C. UNE GESTION INOPÉRANTE EN L'ABSENCE DE TOUTE RÉFORME DES RÉGIMES DE RETRAITE
Le constat fait par le ministère des Finances dans une note commune aux directions du Budget, de la Prévision et du Trésor en date du 10 mai 2000, est sans équivoque.
« Parce qu'il permet d'anticiper les ajustements et de les étaler dans le temps, le fonds est un instrument au service de la consolidation des régimes de retraite. Mais compte tenu de sa date de mise en place, il ne peut par lui-même régler aucune des difficultés que vont devoir affronter les régimes de retraite. Il ne doit donc pas être perçu comme une solution permettant aux régimes de passer le cap des premières décennies en faisant l'économie des nécessaires mesures de consolidation, mais au contraire comme un levier pour accroître l'incitation à la réforme et son efficacité. »
Cette nécessité de réformer les retraites n'est pas la seule obligation d'équilibrer les régimes de retraite ; optimiser la gestion du fonds suppose que les modalités de cette réforme soient connues.
1. En l'absence de réforme, l'horizon de gestion du fonds est calé sur 2019-2020
Comme le souligne le FSV 138 ( * ) , « les recettes et dépenses du fonds de réserve sont fixées par des dispositions d'origine législative. Or, si à ce jour les premières ont bien été précisées, il n'en va pas de même pour les secondes qui n'ont fait l'objet d'aucune disposition particulière, et rien ne permet en conséquence d'estimer les emplois futurs du fonds de réserve.
« En l'attente, un travail en cours d'optimisation à moyen terme du portefeuille est actuellement réalisé en supposant qu'aucun décaissement ne serait effectué jusqu'en 2019, conformément à la déclaration faite par le Premier ministre en mars 2000 et au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, dans sa version initiale présentée au Conseil d'administration des caisses nationales de sécurité sociale, avant son examen par le Conseil d'Etat. »
Fonder la gestion du fonds sur ce seul objectif temporel suppose de rendre disponible la totalité des fonds pour 2019 ou 2020.
Or, dans l'optique énoncée par le Gouvernement d'un objectif de « lissage » des déficits entre 2020 et 2040, le fonds de réserve devrait raisonnablement être conduit à rendre disponible seulement une petite fraction de ces fonds en 2020 ou 2021.
Ainsi, le reste des fonds doit pouvoir faire l'objet d'une optimisation à plus long terme, car plus la durée de placement est étendue, plus les risques encourus sont faibles et la rentabilité espérée est élevée.
Ceci est d'autant plus vrai que le fonds est vraisemblablement appelé à convertir une partie de ses ressources en actions, support à la plus forte rentabilité et dont la volatilité peut être compensée par la durée sur laquelle ces investissements seront réalisés. Mais pour recourir à de tels supports, le rythme du décaissement et donc la réforme des retraites doivent être connus.
Comme l'indique le ministère des Finances « En dépit de la volatilité de leur rendement, les actions devront constituer une part significative de l'investissement du fonds de réserve des retraites. Cette part devra être déterminée au vu de la chronologie et de l'ampleur des décaissements anticipés ».
Or, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, interrogée sur ce point 139 ( * ) , n'a pas semblé, dans sa réponse, accorder toute l'importance nécessaire à cette question : « Le Gouvernement ayant pris l'engagement que les montants mis en réserve dans le cadre du fonds demeureront indisponibles jusqu'en 2020, le fonds de réserve est destiné à être un fonds de lissage pour lisser les besoins de financement prévisibles après 2020. L'évolution des réserves dépendra du rythme et des critères de décaissement des réserves, sur lesquels il serait prématuré de statuer ».
* 138 Réponse au questionnaire précité.
* 139 Cf. réponse au questionnaire précité