I.1 - Comment répartir les dépenses de l'Etat entre le fonctionnement et l'investissement ?

I.1.1 - Signification de la distinction

La distinction entre dépenses de fonctionnement et dépenses d'investissement correspond à un classement économique de la dépense .

Les diverses définitions des dépenses de fonctionnement et d'investissement ont un point commun : la durée de " la contrepartie " de la dépense, c'est-à-dire du bien ou du service qu'elle permet de financer et, par voie de conséquence, ses effets sur le patrimoine de la collectivité ou de l'organisme qui l'effectue.

Les dépenses de fonctionnement sont le plus souvent des dépenses répétitives correspondant à une consommation immédiate et sans incidence sur le patrimoine.

Les dépenses d'investissement procurent un bien durable qui entre dans le patrimoine, avec pour effet de le conserver, de le renouveler ou de l'accroître.

Cette définition des dépenses d'investissement correspond à celle que le plan comptable général donne des " immobilisations ", à savoir des éléments destinés à servir de façon durable à l'activité.

L'instruction budgétaire et comptable M14 applicable aux communes fournit une liste précise des deux catégories de dépenses :

- les dépenses de fonctionnement sont celles qui reviennent régulièrement chaque année : rémunération du personnel, fournitures et consommation courante, petit entretien, participation aux charges d'organismes extérieurs, paiement des intérêts des emprunts et des dettes, et des frais financiers...

- les opérations d'investissement sont des emplois comprenant essentiellement des opérations non répétitives qui modifient la consistance ou la valeur du patrimoine de la commune : achats de matériels durables, constructions ou aménagements de bâtiments, travaux d'infrastructure, grosses réparations de bâtiments existants. Elles comportent également le remboursement des emprunts en capital.

La comptabilité nationale et européenne corrobore, au plan macroéconomique, la définition comptable des investissements :

- dans la comptabilité nationale, la " formation brute de capital fixe ", qui constitue un emploi du compte de capital, " représente la valeur des biens durables acquis par les branches afin d'être utilisés pendant au moins un an dans leur processus de production, ainsi que la valeur des biens et des services incorporés aux biens de capital fixe acquis, aux terrains et aux actifs incorporels " ;

- le système européen de comptes (SEC 95) définit la " formation brute de capital fixe " comme étant " égale aux acquisitions moins les cessions d'actifs fixes ", les actifs fixes étant " des actifs corporels ou incorporels ...utilisés de façon répétée ou continue ...pendant une durée d'au moins un an ".

I.1.2 - Définition donnée par l'ordonnance de 1959 relative aux lois de finances

L'article 6 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 distingue non pas les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'investissement proprement dites, mais, parmi les " charges permanentes de l'Etat ", les dépenses ordinaires , les dépenses en capital et les prêts et avances.

Les dépenses ordinaires sont regroupées selon quatre titres : les charges de la dette, la dotation des pouvoirs publics, les dépenses de personnel et de matériel applicables au fonctionnement des services et les interventions de l'Etat.

Les dépenses en capital constituent trois autres titres : les investissements que l'Etat exécute, les subventions d'investissement qu'il accorde et la réparation des dommages de guerre.

I.1.3 - Problèmes posés par la distinction établie par l'ordonnance de 1959 entre dépenses ordinaires et dépenses en capital

Le principal défaut de la distinction entre les dépenses ordinaires et les dépenses en capital, telle que l'établit l'ordonnance de 1959, est qu' elle ne permet pas de mesurer avec précision l'investissement de l'Etat .

En effet, l'approche budgétaire qui découle des dispositions de l'ordonnance de 1959 conduit à considérer comme dépense d'investissement toutes les dépenses en capital imputées sur les budgets d'équipement (titre V : "  Investissements exécutés par l'Etat ", titre VI "  Subventions d'investissement accordées par l'Etat "). Or les dépenses du titre V ne correspondent pas directement à une augmentation du patrimoine de l'Etat et ne recouvrent pas totalement la notion d'immobilisation, notamment parce que les impôts et taxes afférents à leur acquisition sont aussi imputés au titre V, principalement la TVA. En outre, elles ne retracent pas toutes les opérations d'acquisition d'immobilisations de l'Etat, une partie de celles-ci figurant dans les comptes spéciaux du Trésor. Enfin, elles mélangent les acquisitions d'immobilisations corporelles, incorporelles ou financières.

Pour le titre VI, la notion d'investissement de l'Etat est plus ambiguë. En effet, s'agissant de subventions, la comptabilisation par l'Etat d'une dépense d'investissement peut ne pas correspondre à un investissement effectivement réalisé. Le bénéficiaire de la subvention a, par exemple, la faculté d'étaler l'investissement dans le temps.

En outre, il arrive que des biens de consommation soient imputés au titre V ou, à l'inverse, des biens d'investissement au titre IV (acquisitions d'oeuvre d'art). Certains biens, comme les achats de livres, figurent sur l'un et l'autre titres. Quant aux achats ou au renouvellement de meubles de bureau, biens durables participant à la capacité de production des services, ils sont le plus souvent imputés au titre III. En revanche, certaines dépenses ordinaires, comme le soutien des programmes de recherche, sont inscrites parmi les dépenses en capital.

I.1.4 - Problèmes posés par la distinction entre dépenses de fonctionnement et dépenses d'investissement

Certains récusent la pertinence de la distinction entre le fonctionnement et l'investissement, en invoquant son caractère parfois artificiel.

Doit-on, par exemple, ranger les équipements militaires parmi les dépenses d'investissement, alors qu'ils sont souvent considérés, d'un point de vue strictement économique, comme des dépenses improductives? Au demeurant, la comptabilité nationale ne les inclut pas dans la formation brute de capital fixe, mais dans les " consommations intermédiaires ".

Il n'en reste pas moins que l'investissement militaire a un caractère durable. Son utilisation s'étale sur plusieurs années. Aussi, est-ce à juste titre que la nomenclature budgétaire le classe parmi les dépenses en capital. En outre, le critère du caractère productif de la dépense n'est pas pertinent, dans la mesure où, pour l'Etat, des masses importantes de dépenses de fonctionnement devraient être considérées comme des investissements si on leur appliquait ce critère (éducation, santé, transports...).

Précisément, certains invoquent le caractère productif de ces dernières dépenses ( éducation et recherche , en particulier) pour dénier tout sens à la distinction entre le fonctionnement et l'investissement, s'agissant des dépenses de l'Etat.

Or si ces dépenses préparent l'avenir du pays et contribuent à son enrichissement en accroissant son " capital humain ", il n'en demeure pas moins que, par nature, elles recouvrent, pour l'essentiel, des rémunérations (dépenses de " matière grise ") et des consommations de biens non durables. A ce titre, elles constituent du fonctionnement, à l'exception, bien entendu de celles, très minoritaires en l'espèce, qui rentrent dans la catégorie des dépenses en capital, comme les constructions ou les équipements scolaires et universitaires.

Dans le cas, par exemple, du service public de l'éducation, l'Etat est dans la situation de tout producteur de biens et de services. Pour ce producteur, les biens et services produits sont généralement des valeurs d'exploitation. C'est l'acquéreur qui les immobilise, du moins si cet acheteur est une entreprise ou un organisme qui tient une comptabilité. De même, l'Etat producteur de biens et de services, ne saurait se confondre, notamment du point de vue comptable, avec " la Nation " ou " la collectivité ", qui en bénéficie. Il convient donc de s'en tenir à une logique strictement comptable. D'autant qu'il y aurait un réel danger, du point de vue de la gestion budgétaire, à considérer ces dépenses, dont la rentabilité reste difficile à déterminer 38 ( * ) , comme des investissements. Une telle approche est de nature à embrouiller le débat plutôt qu'à l'éclairer.

Un autre problème soulevé par la distinction entre dépenses de fonctionnement et dépenses d'investissement tient à ce qu'elle ne paraît pas laisser de place à une troisième catégorie de dépenses, celle des transferts .

Les dépenses de transfert, dépenses de redistribution à finalité principalement sociale ou économique, n'ont pas de contrepartie pour l'Etat. Elles ne correspondent, à proprement parler, ni à des dépenses de fonctionnement, ni à des dépenses d'investissement. Or elles représentent une part importante du budget de l'Etat 39 ( * ) .

L'ordonnance de 1959 les classe, soit dans les dépenses ordinaires, qui correspondent pour l'essentiel à du fonctionnement (titre IV), soit dans les dépenses en capital (titre VI). La question se pose néanmoins de l'opportunité de traiter les transferts dans un ensemble séparé des deux autres catégories de dépense (voir infra) .

Aux insuffisances de la comptabilité budgétaire, s'ajoutent celles de la comptabilité patrimoniale de l'Etat dans son état actuel. Celle-ci ne fournit pas une mesure significative de l'actif net immobilisé de l'Etat, de son effort d'investissement, ni plus généralement de la variation de son patrimoine. Elle n'est guère utile pour éclairer la gestion des actifs et optimiser les investissements.

*

Le classement actuel des dépenses n'est pas satisfaisant ; il manque de cohérence. La première tâche à entreprendre pour " mettre en oeuvre concrètement la distinction, pour le budget de l'Etat, entre dépenses d'investissement et de fonctionnement ", est donc de définir avec précision ce qui relève de l'une et l'autre catégorie de dépenses.

A cet égard, le critère le plus pertinent paraît être le critère du plan comptable général, fondé sur la variation patrimoniale qu'entraîne pour l'Etat l'acquisition d'un bien ou d'un service destiné à être immobilisé dans son bilan et susceptible d'être amorti.

Cette orientation se justifie d'autant plus que l'Etat entend développer une véritable comptabilité patrimoniale. En effet, le choix d'un critère comptable pour définir les dépenses d'investissement de l'Etat établit un lien entre la présentation budgétaire et la comptabilité générale. Ce lien ressort clairement des réformes conduites par les Etats et les collectivités publiques dont les budgets distinguent une section de fonctionnement et une section d'investissement. Tel est par exemple le cas du Royaume Uni, qui met en oeuvre, depuis 1993 une importante réforme budgétaire et comptable, et, en France même, des collectivités territoriales, en particulier les communes depuis 1997, date de l'entrée en vigueur d'un nouveau cadre budgétaire et comptable (instruction M14).

I.2 - Faut-il présenter le budget de l'Etat en deux sections, l'une de fonctionnement, l'autre d'investissement ?

La présentation du budget en deux sections s'accompagne généralement d'une règle d'équilibre. L'application d'une telle règle au budget de l'Etat mérite discussion. Mais indépendamment de toute contrainte d'équilibre, la distinction d'une section de fonctionnement et d'une section d'investissement présente, par elle-même, un intérêt pour la clarté et l'exhaustivité des prévisions budgétaires

I.2.1 - Obligations associées à la présentation du budget en deux sections

Les exemples étrangers ou celui des collectivités locales, montrent que la présentation, dans deux sections distinctes, des opérations de fonctionnement et d'investissement, s'accompagne d'obligations spécifiques

Ainsi la réforme budgétaire et comptable mise en oeuvre au Royaume-Uni , qui présente la distinction en deux sections comme un " point clé ", se fonde sur deux règles :

- la " règle d'or ", selon laquelle, sur la durée d'un cycle économique, le gouvernement est tenu de limiter l'emprunt au montant des investissements, à l'exclusion des dépenses courantes ;

- une règle dite " d'investissement soutenable " qui conduit à limiter, sur la durée du cycle, le ratio dette publique nette/ PIB à un niveau " stable et prudent ", plafonné actuellement à 40%.

Comme en Allemagne (article 115 de la Loi fondamentale), l'un des objectifs de la règle d'or est d'éviter de reporter sur les générations futures des dépenses courantes des générations actuelles.

Le gouvernement britannique affiche un autre but, celui de préserver l'investissement public, tombé, dans la période précédente, à un niveau faible au regard des standards historiques et internationaux. C'est l'une des raisons pour lesquelles, au Royaume-Uni, la réforme du cadre budgétaire est étroitement liée à celle du système comptable public. Le lien étroit établi entre la comptabilité budgétaire et la comptabilité patrimoniale et la reconnaissance de la nature économique différente des dépenses de fonctionnement et des dépenses d'investissement, doivent conduire les administrations à mieux connaître leurs actifs et à en faire le meilleur usage. Au plan macro-économique, le gouvernement affirme sa volonté de réaliser le niveau d'investissement exigé pour répondre aux besoins de l'économie et maintenir le stock d'équipement public en bon état.

En France, les collectivités territoriales se voient imposer une règle d'équilibre. Elles ont l'obligation de présenter leur budget en " équilibre réel ". L'article 8 de la loi du 2 mars 1982 prévoit ainsi que " le budget de la commune est en équilibre réel lorsque la section de fonctionnement et la section d'investissement sont respectivement votées en équilibre, les recettes et les dépenses ayant été évaluées de façon sincère... ". En outre, il exclu de financer par l'emprunt aussi bien un éventuel déficit de fonctionnement que le remboursement en capital des annuités d'emprunt, qui constitue une dépense de la section d'investissement. L'emprunt est en définitive affecté au seul financement des équipements, des acquisitions et des travaux neufs.

I.2.2 - Application de ces règles au budget de l'Etat

L'institution, en France, d'une contrainte d'équilibre pour le budget de l'Etat appelle un débat. L'orthodoxie budgétaire classique voudrait en effet que la section de fonctionnement soit équilibrée, l'emprunt étant réservé au financement de la section d'investissement. Comme dans les Etats qui l'ont mise en oeuvre, une telle obligation viserait d'abord à épargner aux générations futures la charge du remboursement des dettes contractées par les générations précédentes pour financer leurs dépenses courantes. Dans l'immédiat, elle serait de nature à faciliter la maîtrise des finances publiques imposée par l'Union européenne dans le cadre de la zone euro. D'un autre côté, celle-ci retient d'autres critères que " la règle d'or " pour encadrer la politique budgétaire des Etats-membres.

En effet, la France doit respecter les deux critères de convergence, relatifs au déficit public et à la dette publique. D'autre part, la situation et la politique budgétaires des Etats membres font l'objet d'une procédure de surveillance de la part des autorités européennes, avec notamment l'obligation de produire, chaque année, un programme pluriannuel de finances publiques, et des sanctions éventuelles en cas de non respect des normes ou des recommandations européennes (procédure dite " des déficits excessifs "). Certes, ces obligations, fondées sur les comptes nationaux, portent sur l'ensemble des administrations publiques et pas seulement sur l'Etat. Mais en raison de l'obligation d'équilibre imposée aux collectivités territoriales et de la responsabilité finale de l'Etat dans l'équilibre des comptes sociaux, c'est en définitive le budget et les comptes de l'Etat stricto sensu qui subissent l'essentiel des obligations " maastrichtiennes ". En outre, la contrainte est d'autant plus forte qu'elle s'étend à l'exécution, par contraste avec la période antérieure, quand la préoccupation dominante des gouvernements se bornait à l'affichage de prévisions acceptables.

En outre, d'un point de vue macro-économique, les observateurs attachent une importance particulière au niveau du solde primaire , qui, compte tenu du taux de croissance et des taux d'intérêt, commande l'évolution de la dette de l'Etat et fournit un meilleur indicateur sur le caractère " soutenable " de la politique budgétaire. L'analyse économique, qui s'est affinée par rapport à l'époque où la règle d'or représentait le seul indicateur de bonne gestion des finances publiques, se fonde aussi sur l' évolution des soldes conjoncturel et structurel . Le programme pluriannuel de finances publiques que le gouvernement transmet à Bruxelles depuis deux ans, comporte des objectifs formulés suivant ces critères. Quelle que puisse être son utilité à certaines périodes, la règle d'or ne constitue pas la seule garantie d'une saine gestion budgétaire. En Allemagne, par exemple, certains, paradoxalement, critiquent son laxisme, les circonstances imposant, selon eux, la réalisation d'un excédent budgétaire global (fonctionnement et investissement cumulés).

En sens inverse, sans être érigé formellement en règle, le rapport entre l'emprunt et l'investissement demeure un critère d'appréciation de la politique budgétaire. L'article 104 C alinéa 3 du traité de Maastricht prévoit ainsi que la Commission européenne, en cas de non respect des critères de convergence, examine si le déficit public excède les dépenses publiques d'investissement. Le règlement n° 1466/97 du 7 juillet 1997 du Conseil européen relatif à la surveillance des politiques économiques et budgétaires exige également que les programmes de stabilité ou de convergence fournissent le montant des dépenses publiques d'investissement, parmi les informations demandées sur " les variables économiques importantes qui sont susceptibles d'influer sur la réalisation " de ces programmes.

En toute hypothèse, c'est-à-dire même en l'absence de règle d'équilibre, la distinction, au sein du budget de l'Etat, d'une section de fonctionnement et d'une section d'investissement présente un grand intérêt.

I.2.3 - Intérêt d'une présentation du budget en deux sections

La contribution du 30 novembre 1999 aux réflexions sur la révision de l'ordonnance de 1959 relative aux lois de finances propose d'envisager cette présentation en raison de ses avantages du point de vue de la transparence des opérations budgétaires (cf. pages 6 et 8-9).

Elle comporte en effet un triple intérêt :

- elle conduit à une présentation plus simple et plus lisible des opérations budgétaires;

- elle favorise une plus grande exhaustivité du budget;

- elle permet d'établir, comme il été dit plus haut, un lien plus direct entre le budget et la comptabilité patrimoniale de l'Etat.

a - Une présentation plus simple et plus lisible des opérations budgétaires

La distinction actuelle entre les opérations définitives et les opérations temporaires avait sans doute un sens lorsque l'Etat jouait un rôle majeur de banquier vis à vis des autres acteurs économiques. La situation a profondément changé : ce rôle est aujourd'hui marginal, sinon en voie de disparition totale, comme en témoigne par exemple la baisse forte et continue des prêts du FDES. Les soldes de fonctionnement et d'équipement revêtent un plus grand intérêt pour évaluer la situation et la gestion budgétaires, que les soldes des opérations définitives et des opérations temporaires. En particulier, leur lien avec la comptabilité patrimoniale leur confère une plus grande signification (cf. ci-dessous).

Telle qu'elle est mise en oeuvre dans la pratique, la présentation actuelle conduit à inscrire au budget des opérations qui ne devraient pas y figurer. Il en est ainsi, par exemple, des avances à court terme, qui constituent de simples opérations de trésorerie. Il convient à cet égard de distinguer les opérations qui influent sur l'équilibre du budget et que celui-ci doit inclure, d'opérations qui ne sont pas de nature budgétaire et n'ont pas d'incidence directe sur le solde budgétaire, ce qui est le cas des opérations de trésorerie. Ce qui n'exclut pas l'obligation d'informer le Parlement sur ces opérations, voire d'exiger son autorisation pour certaines d'entre elles - par exemple pour fixer un plafond d'avances.

Une présentation en deux sections permettrait, en définitive, de clarifier la répartition des recettes et des dépenses. Complétée par un tableau de financement, comme il est proposé plus loin (§ 3.2), elle conduirait à inclure dans le budget des opérations très importantes pour le suivi de la politique budgétaire et le contrôle du Parlement, par exemple en matière d'emprunt, tout en en excluant les opérations de trésorerie, qui, n'étant pas de nature budgétaire, n'ont pas à figurer dans le budget. Elle favoriserait une plus grande exhaustivité du document budgétaire et par voie de conséquence une application plus respectueuse du principe d'universalité.

En ce qui concerne les dépenses de transfert, leur importance dans le budget de l'Etat et leur spécificité justifient de les isoler, non pas dans une section particulière, les recettes ne leur étant pas affectées, sinon marginalement (fonds de concours), mais au sein de la section de fonctionnement.

Il faut également garantir le respect effectif du principe de permanence des méthodes dans l'imputation des recettes et des dépenses 40 ( * ) à l'une ou l'autre section. On a vu, dans la première partie, la difficulté que présente dans certains cas la notion même d'investissement. Il conviendra donc de définir avec précision la nature et la liste des dépenses d'investissement, ainsi qu'il a été procédé pour les collectivités locales, en se reportant le plus possible au référentiel comptable de droit commun, et en s'y tenant. Il en va de même pour la distinction entre opérations budgétaires et opérations de trésorerie, que la répartition par sections est de nature à clarifier.

b - Une plus grande exhaustivité des documents et des autorisations budgétaires

On se reportera sur ce point aux développements consacrés aux emprunts dans la " contribution " du 30 novembre 1999 (cf. notamment I.8 " Autorisations d'emprunt " - p.23 et 24).

La présentation actuelle de la loi de finances comporte une lacune importante : elle masque le niveau réel des besoins de financement de l'Etat. En effet, la lecture des documents budgétaires peut laisser croire que les besoins d'emprunt de l'Etat se limitent au montant du déficit. Il faut, en réalité, y ajouter le chiffre, actuellement supérieur, de l'amortissement des emprunts qui viennent à échéance. A titre d'exemple, en 1998, le besoin de financement à long et moyen terme du Trésor s'est établi à 580,35 milliards, à comparer à un déficit de 247,5 milliards, soit plus de deux fois plus. Le fait que, par définition, le refinancement par l'emprunt des emprunts anciens n'augmente pas l'endettement de l'Etat, n'atténue en rien les inconvénients de la présentation actuelle qui ne permet pas au Parlement d'engager un véritable débat sur la dette. Son information et son autorisation apparaissent tronquées. En dépit des dispositions de l'article 31 de l'ordonnance (" le projet de loi de finances évalue le montant des ressources d'emprunt... "), le Parlement se borne, en l'état actuel des choses, à autoriser le Gouvernement à lever les emprunts nécessaires, sans aucune autre précision.

Un intérêt de la présentation en sections pourrait être de faire apparaître en emplois l'inscription de l'amortissement prévisionnel des emprunts et, en ressources, son mode de financement, et, compte tenu des autres besoins de financement, en particulier des investissements, le montant total des emprunts à effectuer, à l'exception des opérations de trésorerie. Il en va bien ainsi pour les budgets des collectivités locales, avec, pour ce qui les concerne, l'exigence supplémentaire, rappelée ci-dessus, de financer l'amortissement des emprunts par des ressources définitives. On peut s'interroger sur la possibilité et même sur l'opportunité d'appliquer à l'Etat une telle obligation. En effet, si celle-ci se justifie pleinement s'agissant de collectivités dont le gouvernement central doit contrôler l'endettement, il n'en va pas de même pour la dette de l'Etat dont l'évolution est aujourd'hui contrainte par d'autres critères (dette brute/PIB, évolution du solde primaire...).

Ceci conduit à proposer la mise à l'étude d'une présentation du budget, non pas en deux sections, mais en trois parties :

- une section de fonctionnement, comprenant en dépenses, les dépenses de fonctionnement (personnel et autres dépenses de fonctionnement, y compris les charges de la dette) et les dépenses de transfert, et en recettes, l'ensemble des recettes fiscales et non fiscales,

- une section d'investissement pour les dépenses d'investissement, définies avec précision, en s'inspirant de la définition comptable, et les recettes associées par nature à l'investissement,

- un tableau de financement qui reprendrait, pour l'essentiel, le solde des deux sections précédentes ainsi que l'amortissement des emprunts et indiquerait le montant total des emprunts nouveaux permettant de financer l'ensemble de ces besoins.

Des simulations devraient permettre de vérifier la pertinence des reclassements envisagés pour les dépenses et les recettes telles qu'elles figurent dans la présentation actuelle de la loi de finances.

c - Un rapprochement entre le budget et la comptabilité

La question de l'articulation entre l'autorisation budgétaire et la comptabilité générale est en cours d'approfondissement et renvoie à la quatrième question posée par le Rapporteur général de la Commission des finances de l'Assemblée nationale, dans sa lettre du 21 décembre 1999.

Il apparaît, en première analyse, qu'une distinction clairement affichée dans la loi de finances entre les dépenses et les recettes de fonctionnement et celles d'investissement serait de nature à faciliter cette liaison et à assurer, par voie de conséquence, un meilleur compte rendu de l'exécution du budget.

Cependant cette orientation, adoptée par d'autres pays, soulève plusieurs questions.

Il est clair que si la définition des investissements retenue pour le budget se fonde sur des notions comptables reconnues (engagement d'opérations réalisées et immobilisations amorties sur plusieurs années), le passage des prévisions budgétaires aux comptes, qui constatent a posteriori les résultats et les variations de l'actif, s'en trouvera facilité. La présentation de la loi de finances en sections, de fonctionnement et d'investissement, établirait une cohérence entre le budget et les comptes et constituerait un prolongement naturel des efforts engagés pour établir une véritable comptabilité patrimoniale de l'Etat. Cette conclusion se dégage aussi bien d'une enquête menée auprès des chambres régionales des comptes que des réformes entreprises dans d'autres pays. Le cas du Royaume-Uni 41 ( * ) , déjà cité, nous paraît, à cet égard, présenter un intérêt particulier, parce qu'il s'agit d'un pays comparable au nôtre par la taille, que la réforme budgétaire et comptable y est très avancée et qu'elle s'inscrit, comme en France, dans un processus plus global de modernisation de l'Etat.

La réforme britannique en cours 42 ( * ) se caractérise en effet par sa cohérence d'ensemble :

- présentation des prévisions budgétaires, et pas seulement des comptes, en droits constatés, mais avec maintien en parallèle, d'un budget " de caisse ",

- séparation, dans le budget , des opérations courantes et des opérations en capital,

- établissement d'un budget et d'une comptabilité d'exercice non seulement au niveau global, mais dans chaque département ministériel,

- vote des budgets selon les deux présentations,

- élaboration dans chaque ministère d'un plan pluriannuel, comportant des objectifs stratégiques et des indicateurs de résultats, et d'un rapport annuel d'activité rendant compte, sur une base patrimoniale, de l'utilisation des ressources allouées en regard des objectifs assignés,

- établissement de comptes consolidés pour l'ensemble du secteur public (" Whole of Government accounts ").

Le budget sera présenté et examiné simultanément en caisse et en termes patrimoniaux. De même qu'en comptabilité, un tableau des flux de trésorerie coexiste avec le bilan et le compte de résultat, de même rien n'empêche, à première vue, que le budget soit établi à la fois selon une logique de trésorerie et selon une logique patrimoniale. L'une et l'autre démarches sont en effet nécessaires pour fournir au Parlement une information aussi complète et aussi transparente que possible. Un autre aspect à souligner est la nécessité d'assurer une correspondance maximale entre la nomenclature budgétaire et la nomenclature comptable, si l'on veut garantir la cohérence de l'information. A cet égard, la réforme britannique met en relief le lien étroit qui unit la réforme comptable et celle de la présentation du budget.

Conclusion

La distinction, au sein de la loi de finances, d'une section de fonctionnement et d'une section d'investissement, assortie d'un tableau de financement faisant apparaître les prévisions globales d'emprunt, peut présenter un intérêt réel pour améliorer la transparence des opérations budgétaires et financières de l'Etat. Elle est de nature à garantir un plus grand respect des grands principes budgétaires, en particulier ceux d'unité et d'universalité. Sa mise en oeuvre exige toutefois une définition précise des différentes catégories d'opérations, notamment une réflexion sur les investissements et sur le classement des opérations de transfert. Elle implique également, une fois ces définitions et ce classement établis, un strict respect du principe de permanence des méthodes. Enfin, l'exemple des collectivités territoriales comme les réformes effectuées par certains pays étrangers, révèlent un lien étroit entre cette présentation et les efforts engagés pour développer la comptabilité patrimoniale de l'Etat. Quant à l'opportunité de lui associer une obligation d'équilibre budgétaire, elle mérite pour le moins discussion dans la mesure où d'autres normes et critères sont déjà pris en considération dans le cadre de la procédure de surveillance des finances publiques mise en place par l'Union européenne.

II - Budget de l'Etat et budget de la sécurité sociale

" Quelles dispositions paraissent susceptibles d'être mises en oeuvre afin de clarifier les relations financières entre le budget de l'Etat et celui de la Sécurité sociale ? "

Les lois de financement de la sécurité sociale ont été créées en 1996 (loi constitutionnelle du 22 février 1996 et loi organique du 22 juillet 1996). Malgré le parallélisme suggéré par leur dénomination, par leur calendrier et certaines procédures, ces lois ne sont pas de même nature que les lois de finances de l'Etat. Elles s'en différencient notamment sur les points suivants :

• La pluralité des acteurs, dotés d'une personnalité morale autonome, intervenant dans le champ de la loi de financement

• Le caractère évaluatif des objectifs de dépenses par branche, seul l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (l'ONDAM) pouvant être comparé, mais non assimilé, à une autorisation budgétaire de dépense

• L'absence d'un article fixant son équilibre général, et l'impossibilité d'un tel article résultant de la non concordance de champ entre les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses (exclusion des régimes comptant moins de 20 000 cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres), alors même que l'obligation d'être en équilibre s'impose aux régimes de sécurité sociale. Dans les lois de financement, cette contrainte s'exprime indirectement par la fixation de "plafonds d'avances", seule disposition à caractère limitatif, qui autorise certains régimes de base à recourir à des "ressources non permanentes"

• Le principe de l'affectation des recettes de la sécurité sociale à des branches distinctes dont la définition n'est d'ailleurs pas parfaitement homogène d'un régime à l'autre.

Ces différents points ont fait l'objet de développements dans les rapports annuels de la Cour des comptes sur la sécurité sociale au cours des dernières années.

Les deux lois - loi de finances de l'Etat et loi de financement de la sécurité sociale - entretiennent des relations réciproques liées notamment à la part croissante des recettes fiscales dans le financement de la sécurité sociale, à l'importance des transferts financiers en provenance de l'Etat et au statut particulier des agents publics en matière de sécurité sociale. Ces relations, complexes et mouvantes, doivent être clarifiées sur plusieurs points : définition plus précise des frontières respectives des deux lois, description plus transparente des flux financiers entre l'Etat et la sécurité sociale, meilleure articulation des calendriers d'élaboration.

Le cadre de cette clarification doit respecter deux données fondamentales : l'existence de deux lois d'une part, la nécessité d'agrégation en raison de la contrainte globale sur les déficits issue du Traité de Maastricht d'autre part.

Dans un contexte marqué par de profondes modifications du financement de la sécurité sociale, et notamment par la création de fonds qui regroupent et isolent certains transferts de l'Etat à la sécurité sociale, il importe de définir un cadre qui permette de suivre ces transferts dans le temps de manière pertinente, c'est-à-dire à périmètre constant. Cela suppose une consolidation des comptes de l'Etat et de la sécurité sociale ou, au moins dans un premier temps, de l'Etat et des établissements publics "sociaux" nouvellement créés. Les efforts engagés récemment pour réformer la comptabilité de l'Etat (droits constatés et plus généralement développement de la comptabilité patrimoniale) devraient, à terme, permettre cette consolidation.

II.1 Aller vers une symétrie des deux lois, loi de finances de l'Etat et loi de financement de la Sécurité sociale

Une telle symétrie suppose en particulier de faire figurer toutes les recettes affectées aux régimes de sécurité sociale dans les lois de financement de la sécurité sociale et pas dans les lois de finances, y compris donc les recettes fiscales dès lors qu'elles sont affectées au financement de la Sécurité sociale. Exemples : la CSG, mais aussi les taxes sur le tabac, sur l'alcool, sur l'assurance automobile....

L'autorisation de la perception de l'ensemble des impôts (qu'ils soient affectés au budget de l'Etat ou à la sécurité sociale) pourrait continuer de relever de la loi de finances, conformément aux dispositions de l'ordonnance de 1959. Une autre option serait que chacune des deux lois autorise la perception des impôts relevant de son champ ; elle nécessite une modification des deux lois organiques.

Une meilleure symétrie entre les deux lois de finances et de financement supposerait, en outre, de modifier le contenu de la loi de financement pour rendre les champs de dépenses et de recettes comparables, et peut-être, en dépit du caractère évaluatif de beaucoup de ces dernières, pour y ajouter un article d'équilibre. Enfin, la préparation des deux lois pourrait être mieux coordonnée : cadrage pluriannuel cohérent, procédures mieux articulées, harmonisation des calendriers des deux projets de lois.

II.2 Clarifier les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale

Cet objectif, que la Cour poursuit depuis plusieurs années dans ses rapports publics sur la sécurité sociale, peut se décliner de multiples façons. Par exemple, les lois de financement ont retenu la liste suivante des recettes : " cotisations effectives, cotisations fictives, contributions publiques, impôts et taxes affectés, transferts reçus, revenus de capitaux, autres ressources ". Or cette présentation est critiquable : la participation de l'Etat au financement de la Sécurité sociale serait mieux présentée si elle distinguait les parties correspondant à la contribution de l'Etat comme employeur (" cotisations effectives "), comme " puissance publique " (" contributions publiques "), ou encore comme gestionnaire des retraites de ses agents (y compris les transferts de compensation supportés à ce titre), et cela même en l'absence actuelle, regrettable, d'un compte des pensions des agents de l'Etat.

Cet effort de clarification pourrait prendre la forme d'un document unique, situé en annexe des deux lois, où l'ensemble des flux financiers entre l'Etat et la sécurité sociale serait retracé dans une nomenclature pertinente. D'une façon générale, une harmonisation des annexes financières des deux lois est souhaitable : ce qui relève exclusivement du financement de la sécurité sociale serait annexé à la loi de financement, ce qui relève exclusivement du financement de l'Etat serait annexé à la loi de finances, ce qui est commun apparaissant dans les deux. Cette annexe viendrait remplacer le document sur "la contribution de l'Etat au financement de la sécurité sociale" prévu par la loi de finances rectificative du 4 août 1995, dont l'établissement par la Direction du Budget, et la publication ne sont pas annuels (pas de document en 1998), et dont le contenu doit être amélioré pour être conforme aux principes qui viennent d'être définis.

Ce souci de clarification doit permettre aussi de disposer d'une vue d'ensemble des financements, et donc s'articuler avec la comptabilité nationale dont les agrégats sont établis sur des champs et selon des concepts différents de ceux des comptes de l'Etat et de la sécurité sociale (on rappelle en effet que les normes du Traité de Maastricht sont exprimées dans les termes de la comptabilité nationale). Cela suppose que des tables de passage soient constituées entre ces différents types de comptes, mais aussi sans doute que les modalités d'évolution et de définition de la comptabilité nationale prennent pleinement en compte les préoccupations des organismes et des ministères concernés.

Enfin, il faut rappeler un point particulier régulièrement évoqué par la Cour : la suppression du BAPSA qui serait un élément de simplification des relations entre l'Etat et la sécurité sociale.

II.3 Les problèmes posés par l'existence de deux systèmes de comptes

Les comptes des régimes de sécurité sociale sont désormais établis en droits constatés. Les comptes agrégés de la sécurité sociale et les lois de financement devraient aussi passer aux droits constatés à brève échéance (vraisemblablement en 2001). Actuellement, les comptes de l'Etat sont établis en encaissement-décaissement.

Cette coexistence de deux systèmes de comptes pose des problèmes particuliers pour le suivi des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, puisque les mêmes flux se traduiront par des données différentes dans les comptes de l'Etat et dans ceux de la sécurité sociale. La clarification de ces relations en est rendue plus difficile mais aussi plus nécessaire. La première fois où cette difficulté se produira, sans doute à l'automne 2001, la confusion risque d'être grande et il serait alors peut-être utile que la Cour soit associée à l'élaboration des deux ensembles de données et à celle de leur comptabilité.

Le passage des comptes de l'Etat en droits constatés le plus tôt possible éviterait cette difficulté supplémentaire. Il importe en toute hypothèse que les documents retraçant l'ensemble des flux financiers entre l'Etat et la sécurité sociale permettent un passage entre les deux types de comptes. Enfin, là encore, en toute hypothèse, il serait souhaitable que ces créances et ces dettes constatées à la clôture de l'exercice soient évaluées avec précision et en accord explicite entre les deux parties, l'Etat et les caisses.

II.4 La création de fonds spécifiques pour le financement des dépenses sociales

Le fonds de solidarité vieillesse (FSV), qui rembourse depuis 1994 les dépenses vieillesse non contributives, et le nouveau fonds de réforme des exonérations de cotisations sociales (FOREC), qui rembourse, à partir de 2000, les allégements généraux de cotisations sociales et les aides à la réduction du temps de travail, contribuent à clarifier le financement de la sécurité sociale : en regroupant et isolant des dépenses qui étaient réparties antérieurement entre plusieurs articles du budget de l'Etat, la création de ces fonds va dans le sens d'une meilleure transparence.

En revanche, il est clair que la création de telles structures extrabudgétaires, au moment où elle intervient, introduit une discontinuité dans l'évolution du budget de l'Etat, en lui retirant des dépenses (les transferts aux organismes de sécurité sociale repris par les fonds) et un montant de recettes équivalent. Pour permettre un suivi temporel homogène, il conviendrait que le document évoqué au point 2), annexé aux deux projets de lois, de finances et de financement, et les comptes consolidés mentionnés au point 3) s'étendent à ces fonds. Ainsi, il serait possible de reconstituer les recettes et les dépenses dans le périmètre existant avant la création de ces structures.

Il convient d'évoquer également le Fonds de réserve pour les retraites créé par la loi de financement pour 1999 au sein du FSV (2 ème section) afin de consolider les régimes par répartition. Ce fonds diffère des deux premiers cités (1 ère section du FSV et FOREC) par le fait qu'il n'est destiné à contribuer au financement des dépenses sociales qu'à un horizon lointain, et aussi par ses modalités d'alimentation beaucoup moins précises puisqu'il peut recevoir toute ressource "en vertu de dispositions législatives". Les interférences de la création de ce fonds avec le budget de l'Etat sont moindres que pour les deux autres : il ne reprend aucune dépense ni aucune recette permanente de la loi de finances. Cependant son alimentation est susceptible de poser des problèmes d'articulation avec la loi de finances et la loi de financement.

II.5 Les relations de caisse

Les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale ne se situent pas qu'aux niveaux précédents, d'organisation et de flux financiers prévus ou constatés entre les deux lois etc. Elles se situent aussi au niveau de la caisse, de la trésorerie. Sans aborder cette question dans son ensemble, il est nécessaire de l'aborder en mentionnant certaines voies possibles d'amélioration.

Le revenu minimum d'insertion (RMI) et l'allocation aux adultes handicapés (AAH), par exemple, sont versés par les caisses d'allocations familiales mais remboursés par l'Etat. Les modalités de ce remboursement sont fixées par la convention Etat-ACOSS du 2 mai 1994 qui prévoit pour ces deux prestations le versement d'acomptes mensuels correspondant au douzième de la dotation inscrite en loi de finances initiale. Dans ce système, les versements de l'Etat en cours d'année peuvent s'écarter assez sensiblement des dépenses réelles des caisses si les dotations initiales ont été mal anticipées dans un sens ou dans l'autre. Les écarts éventuels ne sont régularisés que l'année suivante.

Il conviendrait d'étudier la possibilité d'un remboursement des dépenses effectives, avec le décalage d'un mois ou deux nécessaire à la remontée de l'information sur le montant des prestations.

II.6 Le bilan d'exécution de la loi de financement

Le parallélisme accru de la loi de finances et de la loi de financement, proposé au point 1) ci-dessus ne peut sans doute pas aller, en raison des différences de nature entre les deux lois, jusqu'à créer une loi de règlement de la loi de financement de la sécurité sociale. Cependant, il paraît nécessaire de disposer d'éléments permettant de juger de son exécution et du respect des objectifs et contraintes qu'elle contient. Il est par exemple souhaitable que lors du dépôt du projet à l'automne n pour l'année n+1 figurent en annexe la description et l'analyse de l'exécution de la loi pour n-1 et les comptes définitifs pour l'année n-2. On rejoint ici l'une des missions confiées à la Cour des comptes, chargée d'établir "un rapport sur l'application de la loi de financement", dont elle n'a pu toutefois s'acquitter qu'imparfaitement jusqu'ici en raison d'une information insuffisante ou trop tardive, en particulier de la disponibilité insuffisamment précoce des comptes (à terme de deux ou trois ans, il faudrait qu'ils soient disponibles à la fin du premier trimestre). Ce rapport devrait présenter, en particulier, les écarts entre prévision et réalisation, avec une estimation des différentes raisons des écarts : impact des erreurs de prévision macro-économique, impact des erreurs sur le rendement des mesures qui ont été mises en oeuvre au titre de la loi..

* 38 Comme il est impossible, du moins dans l'état actuel des connaissances, de déterminer avec une précision suffisante le bénéfice que la collectivité est susceptible de retirer de ces dépenses, l'optimisation du rapport coût-efficacité est dépourvue, en ce qui les concerne, de référence probante.

* 39 Le total des interventions et des subventions d'investissement a représenté le tiers des dépenses du budget général en 1998 (554 milliards sur 1674).

* 40 Ou des produits et des charges dans le cas d'une présentation " patrimoniale " des prévisions budgétaires (cf . ci-dessous)

* 41 D'autres pays ont mis ou mettent en oeuvre une réforme comparable. Il s'agit de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie, pays les plus souvent cités, mais aussi, à un stade moins avancé, de la Finlande, de la Suède et de l'Islande. Comme la Grande-Bretagne, ces pays développent à la fois une comptabilité et un budget fondés sur une approche patrimoniale (droits constatés et charges calculées). Les Etats-Unis, le Canada, l'Irlande, l'Italie et les Pays-Bas progressent également dans cette voie, à des degrés divers, mais en limitant leur réforme au domaine des comptes.

* 42 Cette réforme, présentée sous l'appellation de " Resource accounting and budgeting " (RAB) a été lancée en 1993 et poursuivie avec continuité depuis lors. La comptabilité d'exercice est généralisée dans tous les ministères depuis 1998-1999. Le contrôle de la dépense publique s'effectuera sur cette base à partir de 2000. Sous réserve de l'accord du Parlement, le budget sera également présenté et voté dans cette forme à partir de 2001-2002. A la même date, la comptabilité d'exercice se substituera à la comptabilité budgétaire actuelle. Cf. les documents publiés par la Treasury et le National Audit Office, en particulier celui diffusé en décembre 1999 par la Treasury : " Resource accounting and budgeting. A short guide to the financial reforms ".

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