Rapport n° 147 (1999-2000) de M. Jacques VALADE , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 20 décembre 1999
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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EXAMEN DES ARTICLES
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EXAMEN EN COMMISSION
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TABLEAU COMPARATIF
N° 147
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 décembre 1999 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur :
- la proposition de loi de M. Christian Poncelet, Président du Sénat, et M. Jacques Valade, Vice-président, portant création de la chaîne parlementaire ,
- la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant création de La Chaîne Parlementaire,
Par M. Jacques VALADE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar, vice-présidents ; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. François Abadie, Jean Arthuis, Jean Bernard, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Michel Charzat, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre Jeambrun, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1996, 2007 et T.A. 417
Sénat : 112 et 142 (1999-2000).
Audiovisuel et communication. Parlement . |
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Les propositions de loi déposées, simultanément et dans les mêmes termes, à l'Assemblée nationale par son Président, M. Laurent Fabius, et au Sénat par le Président Christian Poncelet et votre rapporteur, traduisent l'accord intervenu entre les deux assemblées, après une réflexion poursuivie en commun depuis plusieurs années, en vue de la création d'une chaîne parlementaire et civique.
Cette réflexion procédait d'un constat : les moyens d'expression audiovisuels existants, publics ou privés, ne rendent pas compte de la réalité, de la richesse et de l'étendue du rôle de la représentation nationale. Ceci ne tient pas seulement, d'ailleurs, à l'attrait médiatique supposé des " petites phrases ", des incidents de séance ou des péripéties liées aux hommes et aux institutions mais tout simplement au fait que l'élaboration de la loi, le contrôle de l'exécutif procèdent d'un travail de fond qui suscite peu l'intérêt des médias et que ne sauraient de toute façon restituer la présentation sommaire et les quelques images auxquels se résument les " sujets " des journaux télévisés. Volontiers anecdotique, inévitablement elliptique, l'image que donne de l'institution parlementaire la presse audiovisuelle est donc bien peu faite pour nourrir le débat démocratique et l'intérêt des citoyens pour la chose publique.
Mais cette réflexion s'inscrivait aussi dans une tradition parlementaire nationale qui remonte aux premiers jours de la Révolution française. A l'ère du " village global ", le respect du principe de la publicité des débats parlementaires, affirmé en 1789 et consacré par la Constitution de 1791, passe en effet par l'utilisation de la télévision et des nouvelles technologies de l'information. De même, en voulant produire et faire diffuser La Chaîne Parlementaire, le Parlement d'aujourd'hui n'agit pas autrement que l'Assemblée Nationale de juin 1789 lorsqu'elle s'était préoccupée d'établir et de faire imprimer le procès-verbal de ses séances.
La création de La Chaîne Parlementaire renoue donc avec le " devoir de communication " que s'étaient spontanément assigné les premières assemblées parlementaires françaises, et avec le souci de faire participer la collectivité nationale aux travaux de sa représentation et par conséquent de son Parlement.
Si la définition de ce nouveau service public audiovisuel s'inscrit dans la continuité des travaux et des expériences déjà menés par les assemblées, l'accord intervenu entre l'Assemblée nationale et le Sénat propose en revanche de donner à La Chaîne Parlementaire un cadre juridique original afin de garantir à la fois l'autonomie du Parlement et la spécificité de chacune des deux assemblées.
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I. LA DÉFINITION D'UN NOUVEAU SERVICE PUBLIC AUDIOVISUEL
" La Chaîne Parlementaire " représentera incontestablement une innovation dans le " paysage audiovisuel français ", à telle enseigne que, depuis que l'on évoque la création en France d'une " chaîne parlementaire et civique ", on se réfère habituellement à des modèles étrangers, et notamment aux chaînes parlementaires américaine et canadienne.
Ces références, pour flatteuses qu'elles puissent être, ne rendent cependant pas compte de la réalité d'un projet qui correspond profondément, tout en la renouvelant, à la notion très française du service public, tant en ce qui concerne le concept de La Chaîne Parlementaire que les conditions de sa mise à la disposition du public.
A. LE CONCEPT
Fruit d'une longue et difficile maturation et de démarches progressivement convergentes des deux assemblées, La Chaîne Parlementaire se définit, aux termes des propositions de loi, comme une " chaîne parlementaire et civique " remplissant " une mission de service public, d'information et de formation des citoyens à la vie publique, par des programmes parlementaires, éducatifs et civiques ".
• Ses programmes devront faire place, comme le prévoit déjà l'article 45-1 inséré en 1994 dans la loi de 1986 sur la liberté de communication, à la présentation et au compte rendu des travaux des deux assemblées , aussi bien sous forme de retransmission directe ou en différé -comme celles qu'assure déjà " Canal-Assemblées "- des débats en séance publique, des travaux des commissions, des délégations ou des offices parlementaires, que d'émissions permettant d'éclairer ou de replacer dans leur contexte la diffusion " brute " des travaux parlementaires.
• Chaîne " d'information ", elle pourra également, comme l'indique l'exposé des motifs des deux propositions de loi, " faire place aux débats de société, à l'actualité et aux initiatives des collectivités locales, aux travaux du Parlement européen et des Parlements étrangers " et comporter des interviews, des reportages, des émissions de plateau...
• Dans le cadre de sa mission civique et de " formation des citoyens à la vie publique ", elle devra prendre en compte les besoins de publics spécifiques : élus locaux, enseignants, étudiants, public scolaire, et être autant que possible " interactive ", pour permettre aux téléspectateurs de réagir et de participer à ses programmes. Cette interactivité sera complémentaire de celle que permettent déjà les sites internet des assemblées, et tout particulièrement celui du Sénat.
Ce concept ambitieux de " chaîne thématique du débat public " procédant d'une initiative purement parlementaire ne correspond donc en fait à aucun " modèle " étranger. Il convient en effet de rappeler que les chaînes américaines et canadienne, les deux chaînes C. SPAN et la chaîne Cable Parliamentary Channel, créées depuis une vingtaine d'années et considérées comme les exemples les plus réussis de " chaînes parlementaires ", procèdent d'initiatives privées, tandis que d'autres expériences étrangères publiques ou privées, au demeurant inégalement couronnées de succès, sont essentiellement ou uniquement centrées sur la retransmission intégrale ou partielle des débats parlementaires.
B. LES CONDITIONS DE DIFFUSION
L'appartenance de La Chaîne Parlementaire au service public se définit aussi par le choix d'une diffusion gratuite et la plus large possible de ses programmes.
Ce choix se situe également dans la continuité des expériences engagées et des projets élaborés depuis 1993.
• Dans les faits, l'évolution de la diffusion de Canal-Assemblée nationale, devenue en 1996 Canal-Assemblées , a démontré la volonté commune des deux assemblées d'utiliser toutes les " fenêtres " disponibles pour distribuer ses programmes au plus large public : Canal-Assemblée nationale a d'abord utilisé en 1993, le canal " avant Arte " du réseau Paris-TV Câble, puis passé un accord avec les principaux câblo-opérateurs, qui lui a permis d'être transportée par le " bus hertzien " de France Télécom.
Depuis 1996, l'Assemblée nationale et le Sénat cofinancent à parité la location à TPS d'un espace sur le satellite Eutelsat, qui permet de diffuser en clair les programmes de Canal-Assemblées sur les réseaux câblés et à destination des foyers équipés d'antennes de réception directe. Depuis octobre 1999, Canal-Assemblées est également intégrée au bouquet Canal Satellite diffusé par le satellite Astra.
Ces efforts conjoints ont permis d'élargir progressivement la distribution de Canal-Assemblées à 37 réseaux câblés, et d'en permettre également la réception directe aux abonnés des deux " bouquets " TPS et Canal Satellite : l'audience potentielle actuelle de la chaîne peut donc être estimée à environ 2 millions de foyers.
• Au niveau des textes et des projets de textes législatifs , l'article 45-1 de la loi de 1986 que reprennent, sous réserve d'ajustements rédactionnels mineurs, les deux propositions de loi, n'exclut aucun mode de diffusion des programmes produits par les assemblées parlementaires : il mentionne en effet la distribution par câble aussi bien que la diffusion hertzienne, qui recouvre :
- la diffusion satellitaire ;
- la diffusion hertzienne terrestre analogique -peu abordable faute de réseau disponible et en raison de son coût ;
- la diffusion hertzienne numérique terrestre -qui pourra en revanche permettre à moyen terme d'élargir la diffusion de La Chaîne Parlementaire ;
- voire la diffusion sur des réseaux " micro-ondes ", ou faisant appel à d'autres technologies.
L'article 4 de la proposition de loi impose à tous les opérateurs de réseaux câblés ou de bouquets satellitaires de transporter et de mettre gratuitement à la disposition de leurs abonnés La Chaîne Parlementaire : cette clause de " must carry " figurait déjà dans les amendements à l'article 45-1 de la loi de 1986 adoptés en 1997 par le Sénat puis par l'Assemblée nationale lors de la discussion du projet de loi audiovisuelle présenté par M. Philippe Douste-Blazy, dont la dissolution de l'Assemblée nationale n'a pas permis l'adoption définitive.
En attendant les nouvelles perspectives que pourra offrir la diffusion numérique hertzienne terrestre, cette obligation de reprise devrait donc permettre à tous les foyers desservis par un réseau câblé ou abonnés à un bouquet satellitaire -soit à l'heure actuelle 20 % des foyers français- de recevoir La Chaîne Parlementaire.
II. UN CADRE JURIDIQUE RESPECTUEUX DE L'AUTONOMIE DU PARLEMENT ET DE LA SPÉCIFICITÉ DE CHACUNE DES DEUX ASSEMBLÉES
L'article 45-1 introduit en 1994 dans la loi de 1986 reconnaissait le droit à chaque assemblée parlementaire, sous le seul contrôle de son Bureau -ce qui excluait donc celui du Conseil supérieur de l'audiovisuel- de produire et de faire diffuser un programme que l'on pouvait déjà qualifier de " parlementaire et civique ".
Ce texte succinct a certes donné un fondement législatif au développement de Canal-Assemblée nationale puis de Canal-Assemblées, mais il n'offrait pas un cadre juridique adapté à la réalisation du projet plus ambitieux de lancement d' une chaîne parlementaire et civique commune aux deux assemblées , annoncé à l'automne 1995 par un communiqué de presse commun à l'Assemblée nationale et au Sénat.
La " Charte pour la création d'une chaîne parlementaire et civique ", adoptée par les Bureaux des assemblées en décembre 1995, en a défini et présenté les principes fondateurs.
Plusieurs options ont été envisagées pour définir une structure juridique adaptée à ce projet, dont l'ambition exigeait qu'il bénéficie du concours de professionnels de l'audiovisuel.
La charte de décembre 1995 s'orientait vers la gestion de la chaîne parlementaire par un opérateur délégué mais d'autres formules ont successivement été mises à l'étude : constitution d'une société de droit privé, concession de service public, groupement d'intérêt public...
La réflexion sur la chaîne parlementaire a été relancée, à partir de l'automne 1998 par la Délégation du Bureau du Sénat chargée de l'audiovisuel renouvelée, qui a constaté la nécessité de permettre, dans le cadre de la future chaîne, une programmation propre à chaque assemblée.
A partir de ce constat, le dialogue avec l'Assemblée nationale a permis de parvenir à l'accord qui fonde les deux propositions de loi et qui tend à prévoir une organisation et un fonctionnement de La Chaîne Parlementaire respectueux non seulement de l'autonomie du Parlement mais aussi de la spécificité de chacune des deux assemblées.
A. LES GARANTIES DE L'AUTONOMIE DU PARLEMENT
Elles ne nécessitent pas de longs développements, car elles découlent tout naturellement du respect des principes de la séparation des pouvoirs et de l'autonomie administrative et financière du Parlement, qui entraînent que le contrôle de la chaîne, de sa programmation et de sa gestion ne relèvent que du Parlement.
• L'article 2 de la proposition de loi confirme et explicite le principe, déjà posé en 1994, de l'exclusion de La Chaîne Parlementaire du contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Au niveau des principes, il serait en effet choquant de soumettre des assemblées souveraines au contrôle d'une autorité administrative, fût-elle indépendante.
Concrètement, d'ailleurs, ce contrôle n'apporterait rien.
D'une part, la programmation de La Chaîne Parlementaire, chaîne thématique, éducative et d'information, qui ne diffusera aucune publicité ni aucune émission de télé-achat, ne devrait présenter que des risques bien limités d'infraction aux principes généraux inspirant la législation applicable à la communication audiovisuelle, et il paraît normal que les Bureaux des assemblées se voient confier, aux termes de l'article 2 de la proposition de loi, le soin d'élaborer, à partir de la réglementation générale applicable aux chaînes câblées, les règles particulières adaptées à la spécificité de la mission de La Chaîne Parlementaire.
D'autre part, il convient de rappeler que la règle non écrite dite " des trois tiers 1 ( * ) ", qui constitue toujours, pour le CSA, le critère ultime de l'appréciation du pluralisme et de l'impartialité des chaînes publiques, est loin de présenter le même degré d'exigence que les règles qui président à la composition du Bureau et des différents organes des assemblées parlementaires et au déroulement de leurs débats ...
Soumettre La Chaîne Parlementaire au contrôle du CSA n'irait donc pas forcément dans le sens d'une meilleure prise en compte de l'impératif de " l'expression pluraliste des courants de pensée et d'opinion ".
Enfin, les modalités de règlement des problèmes particuliers que pourrait poser la programmation de La Chaîne Parlementaire en période de campagne électorale seront prévues par la convention passée entre les deux assemblées en vue de la mise en oeuvre de La Chaîne Parlementaire.
• Les dispositions de l'article 2 tendent à garantir l'autonomie administrative et financière des assemblées
Les assemblées seront seules détentrices du capital de chacune des deux sociétés de programme composant La Chaîne Parlementaire, et l'essentiel des ressources de ces sociétés proviendront des dotations annuelles qu'elles leur accorderont.
Il est donc logique que les modalités de la détermination du montant de ces dotations et du contrôle de leur emploi respectent le principe d'autonomie financière des assemblées édicté par l'article 7 de l'ordonnance de 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, comme le prévoyaient d'ailleurs déjà les amendements parlementaires à l'article 45-1 de la loi de 1986 adoptés lors de la discussion du projet de loi " Douste-Blazy ".
Le montant des dotations allouées par chaque assemblée à La Chaîne Parlementaire sera donc, comme l'ensemble des crédits affectés aux assemblées parlementaires, arrêté par la commission commune composée des Questeurs de l'Assemblée nationale et du Sénat et présidée par un Président de Chambre de la Cour des comptes, et le contrôle de leur emploi sera confié, dans chaque assemblée, à la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer ses comptes.
B. LE RESPECT DE LA SPÉCIFICITÉ DE CHAQUE ASSEMBLÉE
Les orientations définies par le Bureau du Sénat et approuvées par l'Assemblée nationale pour le fonctionnement de La Chaîne Parlementaire consistent à mettre en place, dans le cadre d'une communauté de moyens techniques, une programmation propre à chaque assemblée, conçue et réalisée par deux sociétés de programme constituées par chacune d'elle, et diffusée selon un partage rigoureux du temps d'antenne en heures et en jours.
L'organisation juridique originale de La Chaîne Parlementaire traduit ces orientations.
• Une convention conclue entre les deux assemblées leur permettra de définir ensemble :
- la nature et les conditions de la mise en commun des moyens techniques et en personnels nécessaires à l'émission des programmes de La Chaîne Parlementaire (régie de production, régie finale). L'adoption des dispositions des propositions de loi imposant aux distributeurs de services la diffusion gratuite de La Chaîne Parlementaire devrait en tout cas alléger ces " charges communes " du montant des coûts de diffusion satellitaire de la chaîne, qui représentent, en année pleine, 2,8 millions de francs pour chacune des assemblées ;
- les règles présidant à la répartition des temps d'antenne, dans le strict respect de la parité prévue par l'article 2 de la proposition de loi. Ce respect exigera non seulement une répartition égale du temps d'antenne, en nombre d'heures et de jours de diffusion, mais aussi une répartition équitable des créneaux bénéficiant des plus fortes audiences ;
- le choix de " l'habillage " de La Chaîne Parlementaire, c'est-à-dire des éléments visuels et sonores définissant son identité ;
- la mise en place d'une instance paritaire d'arbitrage comprenant les Présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale et des députés et sénateurs.
• Tandis que toutes ces " missions communes " seront assurées dans un cadre purement conventionnel et sans création d'une entité juridique spécifique, l'autonomie éditoriale de chaque assemblée " s'incarnera " dans la création de deux sociétés de programme constituées et contrôlées par chacune d'elles , La Chaîne Parlementaire-Assemblée nationale et La Chaîne Parlementaire-Sénat.
Pour votre rapporteur, ce schéma présente, par rapport à tous les projets précédemment envisagés pour confier la gestion et la programmation de la chaîne parlementaire à une structure juridique commune aux deux assemblées, un avantage décisif : il permet en effet de respecter la spécificité de chaque assemblée, leur nature et leur personnalité propres.
Mais le succès de cette formule intellectuellement séduisante -dont en outre la gestion sera certainement plus facile que celle d'une structure associant les deux assemblées- suppose un respect rigoureux du partage paritaire du temps d'antenne.
Or, de ce point de vue, l'expérience de Canal-Assemblées a été décevante pour le Sénat. L'équilibre des temps de diffusion n'a été en effet à peu près assuré qu'en 1996, pour se dégrader rapidement en 1997 et en 1998 au détriment du Sénat, en particulier pour la diffusion directe.
Certes, " l'événement " a souvent lieu à l'Assemblée nationale, première assemblée saisie des textes les plus importants et qui bénéficie en outre de la priorité accordée aux séances de questions d'actualité ou aux déclarations du gouvernement.
Mais, outre que l'intérêt des débats législatifs au Sénat, généralement plus approfondis et plus " pédagogiques ", n'est en rien inférieur à celui des débats de l'Assemblée nationale, le mode de désignation même des sénateurs, fondamentalement différent de celui des députés, le rôle de représentation des collectivités territoriales de la République que la Constitution confère au Sénat, entraînent la nécessité d'un dialogue et d'une interactivité accentués avec les élus locaux.
La nature de La Chaîne Parlementaire et la part que doivent prendre dans sa grille, à côté de la présentation des travaux parlementaires, les " émissions d'accompagnement ", imposent de ce fait un strict respect du principe de la parité de temps d'antenne, qui au demeurant sera inscrit dans la loi.
Ce partage rigoureux du temps d'antenne permettrait la définition d'une programmation de La Chaîne Parlementaire-Sénat qui tiendrait compte à la fois de la nécessité :
- d'en enrichir la partie civique par des programmes propres destinés à éclairer et à " mettre en perspective " l'actualité (interviews, reportages, débats d'actualité) ;
- de développer, conformément à la volonté du Président du Sénat d'être à l'écoute des collectivités locales, une programmation spécifique en direction des élus locaux, voire la réalisation de véritables " prestations de services " aux collectivités locales dans le cadre de partenariats analogues à ceux qui ont été mis en oeuvre pour créer le nouveau site internet " Carrefour des collectivités locales " ;
- de bénéficier de la complémentarité et de favoriser les synergies entre La Chaîne Parlementaire-Sénat et le site internet de la Haute assemblée, qui représente d'ores et déjà un vecteur important de la diffusion intégrale en vidéo des débats en séance publique et de certaines réunions de commission. Outre l'image et le son, la diffusion sur internet des débats présente en effet le grand avantage de pouvoir être complétée, grâce à des liens hypertextes, par la consultation et l'impression de tous les documents parlementaires liés au débat ; enfin, la mise sur internet des débats permet également aux internautes de bénéficier d'un service de " vidéo à la demande ".
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EXAMEN DES ARTICLES
Article
premier
(article 45-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre
1986)
Compétence des assemblées parlementaires
pour produire
et faire diffuser une chaîne parlementaire
I. Commentaire du texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article modifie l'article 45-1 inséré en 1994 par un amendement parlementaire dans la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication (article 3 de la loi du 1 er février 1994, dite " loi Carignon ").
Dans sa rédaction actuelle, l'article 45-1 permet à chaque assemblée du Parlement de produire et de faire diffuser par câble ou par voie hertzienne, sous le contrôle de son Bureau, un programme " de présentation et de compte rendu de leurs travaux " pouvant également " porter sur le fonctionnement des institutions parlementaires et faire place au débat public dans le respect de la représentativité des groupes et formations siégeant dans chacune des assemblées ".
Il affirme donc le droit, pour l'Assemblée nationale et le Sénat, de produire et de faire diffuser des programmes " parlementaires et civiques " en dehors du contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Comme l'avait souligné le rapporteur au Sénat du projet de loi, M. Adrien Gouteyron, " il serait choquant que le CSA opère un contrôle sur la représentation nationale ". Saisi du texte définitivement adopté de la " loi Carignon ", le Conseil constitutionnel avait implicitement ratifié cette analyse en ne soulevant d'office aucune question relative à la conformité à la Constitution des dispositions de son article 3.
Le texte adopté en 1994 comporte aussi, à l'initiative du Sénat, l'esquisse d'une première définition du concept de chaîne " parlementaire et civique " : comme le notait également le rapport de la commission des affaires culturelles du Sénat, " Des émissions à but pédagogique, didactique sur le fonctionnement des institutions ou le débat public ou général doivent trouver leur place sur un canal parlementaire si l'on veut réellement montrer aux téléspectateurs comment se prennent les décisions publiques ".
Le texte proposé par l'article premier de la proposition de loi ne remet pas en cause cet acquis et n'apporte à l'article 45-1 que des aménagements de forme :
- il modifie la première phrase de l'article pour la mettre en cohérence avec le choix de la création d'une seule chaîne parlementaire : la rédaction de 1994 pouvait en effet être interprétée comme allant plutôt dans le sens de la création d'une chaîne par chaque assemblée ;
- il substitue, dans la seconde phrase de l'article, la référence au respect du " pluralisme " des groupes de chaque assemblée à la référence à la " représentativité " de ces groupes, qui avait été introduite dans le texte en vigueur par un amendement du groupe socialiste du Sénat. Cet aménagement rédactionnel, souhaité par l'Assemblée nationale, reste dans le même esprit, car la référence au respect de la représentativité des groupes avait précisément pour objet de garantir le respect du pluralisme.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté l'article premier sans modification.
Article 2
(article 45-2
nouveau de la loi du 30 septembre 1986)
Création et
organisation de La Chaîne Parlementaire
I. Commentaire du texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article, qui constitue l'élément central du dispositif de la proposition de loi, tend à insérer dans la loi du 30 septembre 1986 un article 45-2 (nouveau) portant création et organisation de La Chaîne Parlementaire, créée conjointement par les deux assemblées et composée de deux sociétés de programme indépendantes.
• La Chaîne Parlementaire n'a pas elle-même, en effet, d'existence juridique propre. Elle se définit par la juxtaposition, sur un même canal, à parité de temps d'antenne , des programmes conçus par deux sociétés de programme relevant de chacune des deux assemblées, " La Chaîne parlementaire-Assemblée nationale " et " La Chaîne Parlementaire-Sénat ".
Ce sont donc à ces dernières qu'incomberont, en fait, la réalisation de la " mission de service public, d'information et de formation des citoyens à la vie publique " et le respect de l'obligation d'impartialité des programmes que les deuxième et troisième alinéas de l'article 45-2 (nouveau) assignent à La Chaîne Parlementaire.
Mais, en dehors de la tutelle de chaque assemblée sur " sa " société de programme, le fonctionnement de cette chaîne duale exigera aussi une coopération entre l'Assemblée nationale et le Sénat, qui régleront par convention les questions relatives, par exemple, à " l'habillage " de la chaîne, à la mise en commun des moyens techniques et en personnels nécessaires à l'émission du signal (notamment la régie finale), à la définition des règles présidant à la répartition paritaire du temps d'antenne. Sur ce dernier point, sans doute le plus important, l'exposé des motifs des deux propositions de loi prévoit que les litiges éventuels seront résolus par une commission paritaire d'arbitrage dans laquelle siégeront les Présidents des deux assemblées.
• Les sociétés de programme
Les dix derniers alinéas du texte proposé pour l'article 45-2 (nouveau) de la loi de 1986 sont consacrés aux sociétés de programme qui permettront de concilier l'unité de La Chaîne Parlementaire et l'autonomie de chaque assemblée. Ils en définissent l'objet social, les structures, le mode de financement et les conditions de contrôle.
* Objet social
Chacune des deux sociétés de programme a pour mission " de concevoir et de programmer les émissions de présentation des travaux de l'assemblée dont elle relève, ainsi que des émissions d'accompagnement, dont elle assure la production et la réalisation ".
La création de " La Chaîne Parlementaire-Assemblée nationale " et de " La Chaîne Parlementaire-Sénat " traduit donc l'autonomie de la ligne éditoriale de chaque assemblée.
Chaque société de programme élaborera la grille des programmes diffusés pendant le temps d'antenne qui lui reviendra, ainsi que les émissions composant cette grille : il est précisé (dixième alinéa) que les programmes de La Chaîne Parlementaire ne comporteront ni messages publicitaires, ni émissions de télé-achat.
Une convention conclue entre chaque société et l'assemblée dont elle relève précisera annuellement les conditions d'exécution de sa mission ainsi que le montant de sa dotation financière : cette périodicité ne doit sans doute pas seulement être considérée comme une conséquence de l'annualité budgétaire, mais aussi comme la traduction d'une volonté de " pilotage " actif des sociétés de programme par les assemblées dont elles dépendent.
* Structures des sociétés de programme
Comme le prévoit l'article 4 de la proposition de loi (cf. infra), les sociétés de programme seront des sociétés anonymes à statut particulier.
L'article 45-2 (nouveau) définit les dérogations que comportera leur statut par rapport aux dispositions applicables aux SA de la loi de 1966 sur les sociétés commerciales :
- les sociétés de programme de La Chaîne Parlementaire seront des sociétés " à associé unique " -et à capital public : chaque assemblée ou, plus précisément, l'Etat représenté par chaque assemblée, détiendra la totalité du capital de la société de programme qu'elle constituera. Les règles d'organisation des sociétés seront largement déterminées par leurs statuts, lesquels seront approuvés par le Bureau de leur assemblée de rattachement.
La proposition de loi prévoit seulement, en effet, que chaque société sera dirigée par un président directeur général nommé pour trois ans par le Bureau de l'assemblée dont elle relève, sur proposition du Président de celle-ci.
En l'absence d'autres dispositions particulières, on doit considérer que le rôle de ce président directeur général sera celui défini par la loi de 1966, et en particulier qu'il représentera la société dans ses rapports avec les tiers (article 113 de la loi de 1966).
Par ailleurs, au regard de la législation sur les délits de presse, il sera le directeur de la publication de la société de programme (article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle).
Quant aux autres organes dirigeants des sociétés de programme, ce sont, comme on l'a déjà indiqué, les statuts de chaque société qui définiront leur nature, leur composition, leur mode de désignation et leurs compétences (septième alinéa de l'article 45-2).
Enfin, la responsabilité civile et pénale des dirigeants des sociétés de programme sera définie par les dispositions de la loi de 1966.
* Financement des sociétés de programme
Le financement de chaque société de programme sera assuré par une dotation annuelle versée par l'assemblée actionnaire. La participation de chaque assemblée au financement des moyens techniques communs de La Chaîne Parlementaire sera incluse dans cette dotation.
La Chaîne ne diffusant pas de messages publicitaires, les sociétés de programme n'auront donc aucune ressource publicitaire. Elles pourront cependant faire appel à des partenariats pour des coproductions.
* Contrôle
- Confirmant les termes de l'article 45-1, l'article 45-2 (nouveau) prévoit que " les sociétés de programme, ainsi que les émissions qu'elles programment " ne relèvent pas de l'autorité du Conseil supérieur de l'audiovisuel : comme le souligne l'exposé des motifs des propositions de loi, cette solution se justifie par le principe de la séparation des pouvoirs. Mais elle peut également s'appuyer sur des considérations de fait, l'intervention du CSA ne semblant en rien nécessaire pour garantir l'indépendance de cette nouvelle chaîne publique, ni pour assurer le respect, dans ses programmes, du pluralisme des groupes constitués au sein des assemblées.
Concrètement, le CSA n'interviendra donc à aucun moment dans le fonctionnement des sociétés de programme de La Chaîne Parlementaire et n'exercera à leur égard aucune des compétences que la loi lui reconnaît à l'égard des chaînes publiques (nomination de dirigeants, consultation sur les cahiers des charges, pouvoir de sanction, ...) ou des services audiovisuels privés (autorisation ou conventionnement, pouvoir de sanction, ...).
L'avant-dernier alinéa de l'article 45-2 (nouveau) prévoit, en se référant à l'article 33 de la loi de 1986, relatif aux services distribués par câble, que c'est le Bureau de chaque Assemblée qui aura compétence pour " fixer et contrôler " les conditions d'application à La Chaîne Parlementaire de la réglementation applicable à ces services 2 ( * ) .
Le projet de loi modifiant la loi de 1986 actuellement soumis au Parlement prévoit de modifier la rédaction et la portée de l'article 33 de la loi, qui s'appliquerait aussi bien aux chaînes satellitaires qu'aux chaînes câblées : cette modification fera sans doute de l'article 33 une référence plus appropriée pour La Chaîne Parlementaire, mais imposera aussi d'apporter à l'article 45-2 un amendement de coordination.
- le dernier alinéa de l'article 45-2 nouveau précise les conditions du contrôle financier des sociétés de programme de La Chaîne Parlementaire.
Il les exclut du champ d'application de l'article L. 133-1 du code des juridictions financières, qui soumet au contrôle de la Cour des comptes, entre autres, " les sociétés anonymes dans lesquelles l'Etat possède la majorité du capital social ", mais les soumet en revanche " aux dispositions du règlement de chaque assemblée concernant le contrôle de leurs comptes ".
En application de ces dispositions, les comptes de La Chaîne Parlementaire-Sénat seront annexés au compte administratif du Sénat, et contrôlés par la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes du Sénat, qui pourra à cette fin procéder sur pièces et sur place à toutes vérifications qu'elle estimera utiles.
Par ailleurs, il convient de rappeler que les sociétés de programme seront, comme toute société anonyme, contrôlées par des commissaires aux comptes dans les conditions prévues par la loi de 1966 sur les sociétés commerciales.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 3
(article 45-3
nouveau de la loi du 30 septembre 1986)
Conditions de diffusion
de La Chaîne Parlementaire
I. Commentaire du texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article a pour objet d'insérer dans la loi du 30 septembre 1986 un article 45-3 (nouveau) imposant à tous les opérateurs commercialisant une offre de services de télévision par câble ou par satellite de transporter à leurs frais La Chaîne Parlementaire et de la mettre gratuitement à la disposition de l'ensemble de leurs abonnés.
Les sociétés de programme auront cependant un droit de regard sur la reprise de La Chaîne Parlementaire. Cette reprise ne sera en effet une obligation que pour les diffuseurs : les dirigeants des sociétés de programme de la chaîne pourront quant à eux s'y opposer.
C'est une précaution utile : on ne peut en effet exclure l'apparition de bouquets de chaînes satellitaires ou câblées composées en tout ou partie de programmes dont le " voisinage " avec La Chaîne Parlementaire pourrait paraître saugrenu ou peu souhaitable (chaînes " roses " par exemple).
Afin d'éviter toute ambiguïté sur le champ d'application de l'obligation de reprise de La Chaîne Parlementaire, la rédaction de l'article 45-3 (nouveau) proposée par l'article 3 de la proposition de loi intègre une définition de la fonction de " distributeur de services " applicable aussi bien aux câblo-opérateurs qu'aux diffuseurs de bouquets satellitaires.
Cette définition reprend celle que l'article 25 du projet de loi modifiant la loi de communication, qui viendra en discussion au Sénat en janvier prochain, prévoit d'insérer, sous la forme d'un article 33-4 nouveau, dans la loi de 1986.
Il conviendra donc, le cas échéant, d'apporter, lors de l'examen de ce projet de loi, une modification de coordination à l'article 45-3 pour substituer à la définition du " distributeur de services " une référence à ce nouvel article.
Il est à noter également que la loi du 30 septembre 1986 impose aux câblo-opérateurs d'inclure dans leurs plans de service une proportion minimale de services indépendants (4° de l'article 34), obligation que le projet de loi en cours de discussion prévoit d'étendre aux opérateurs de bouquets satellitaires : il conviendra donc de se poser la question de savoir si La Chaîne Parlementaire devra ou non être prise en compte pour le calcul de cette proportion.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 4
(article 46
de la loi du 30 septembre 1987)
Régime juridique des
sociétés de programme
" La Chaîne Parlementaire -
Assemblée nationale "
et " La Chaîne Parlementaire -
Sénat "
I. Commentaire du texte adopté par l'Assemblée nationale
L'article 4 complète l'article 46 de la loi du 30 septembre 1986 pour préciser que, comme les sociétés nationales de programme énumérées à l'article 44 de la loi de 1986 (France 2, France 3, RFO, Radio France et RFI) et comme La Cinquième (créée par l'article 45 de la loi), les deux sociétés de programme relevant des assemblées seront soumises à la législation sur les sociétés anonymes, sous réserve des dispositions spécifiques -relatives notamment à la structure de ces sociétés et à la composition de leur capital- prévues par la loi de 1986.
Cette disposition rapproche ainsi le statut des deux sociétés de programme de La Chaîne Parlementaire de celui des autres chaînes du service public de l'audiovisuel, ce qui paraît tout à fait souhaitable. On notera toutefois que le choix de la société par action simplifiée (SAS) aurait aussi pu être envisagé pour des raisons pratiques. Il n'aurait en effet nécessité aucune dérogation aux dispositions de la loi de 1966 relatives à cette forme de société, puisque ces dispositions, récemment modifiées par la loi du 13 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche, autorisent la constitution de SAS à associé unique et donnent aux SAS toute latitude pour fixer, par leurs statuts, les conditions dans lesquelles elles sont dirigées. L'examen du projet de loi modifiant la loi de 1986 permettra éventuellement de reconsidérer ce problème.
Il faut enfin relever que la rédaction de l'article 4 de la proposition de loi, comme celle de son article 3, devra sans doute être revue pour tenir compte des dispositions de ce projet de loi, qui modifie le libellé et l'insertion dans la loi des dispositions relatives au statut des sociétés de l'audiovisuel public.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
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Votre commission vous demande d'adopter la présente proposition de loi dans le texte issu des délibérations de l'Assemblée nationale.
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EXAMEN EN COMMISSION
Au cours d'une réunion tenue le lundi 20 décembre 1999 sous la présidence de son président, M. Adrien Gouteyron, la commission a examiné le rapport de M. Jacques Valade présenté, en remplacement du rapporteur, empêché, par M. Adrien Gouteyron, président , sur les propositions de loi n° 112 (1999-2000) de MM. Christian Poncelet, Président du Sénat, et Jacques Valade, vice-président, et n° 142 (1999-2000) adoptée par l'Assemblée nationale, portant création de La Chaîne Parlementaire .
Un débat a suivi la présentation du rapport par M. Adrien Gouteyron, président .
Evoquant les péripéties qu'avait connues, depuis plusieurs années, le projet de création d'une chaîne parlementaire et notant qu'une telle chaîne pouvait évidemment être " la meilleure ou la pire des choses ", M. Michel Dreyfus-Schmidt a estimé que la création d'une chaîne parlementaire et civique fonctionnant avec le concours de bons professionnels était à ses yeux une bonne chose, en particulier parce qu'elle pouvait apporter, sur les textes et les problèmes débattus au Parlement, des explications " en amont ", ce que ne fait plus du tout la presse, qui elle-même semble parfois ne découvrir que tardivement le contenu des projets de loi. Le public ne trouve plus, en tout cas, ni dans la presse nationale, ni dans la presse régionale, les comptes rendus qui lui permettaient autrefois de réagir aux travaux parlementaires et de faire connaître son point de vue.
Relevant que la proposition de loi prévoyait un partage égal du temps d'antenne entre les deux sociétés de programme, il a souligné que ce partage ne devrait évidemment pas interdire aux deux assemblées de produire en commun des émissions, d'organiser par exemple des débats entre députés et sénateurs, sans parler de la retransmission des travaux des commissions mixtes paritaires. Il paraît en effet nécessaire que La Chaîne Parlementaire montre le travail commun des deux assemblées.
M. Jean-Paul Hugot a insisté sur le caractère particulier de La Chaîne Parlementaire, qui émanera du pouvoir législatif et qui sera une chaîne civique destinée à informer sur le fonctionnement du Parlement et à favoriser le débat public.
La Chaîne Parlementaire appartiendra bien sûr au service public, mais c'est son caractère particulier qui justifie que la loi lui reconnaisse un certain pouvoir " d'autorégulation " et que l'on fasse obligation à tous les distributeurs de services câblés et par satellite de la diffuser.
Il convient donc d'être très clair et d'insister sur le fait que le dispositif de la proposition de loi, à l'adoption de laquelle on ne peut qu'être favorable, ne concerne que La Chaîne Parlementaire et non, bien entendu, l'ensemble du service public.
M. Serge Lagauche a regretté que l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée nationale ait été marqué par des réserves ou des " mouvements d'humeur " qui avaient empêché que l'unanimité se fasse sur un projet important par son caractère de service public et par son intérêt pour la nation.
Soulignant que des interrogations avaient été soulevées sur l'absence de contrôle de La Chaîne Parlementaire par le CSA et par la Cour des comptes, il a noté qu'il était important que la gestion et le fonctionnement de la future chaîne se caractérisent par une réelle transparence, pour éviter toute assimilation entre autorégulation et absence de contrôle : ainsi serait-il important que, par exemple, les dispositions qui seront prises pour assurer l'impartialité de La Chaîne Parlementaire pendant les campagnes électorales soient clairement présentées et expliquées à l'opinion, afin que l'on n'ait pas l'impression que le Parlement souhaitait se situer " en dehors de la loi ".
Relevant par ailleurs que les majorités et les positions des deux assemblées pouvaient diverger, il a également souligné l'importance d'une instance d'arbitrage pour assurer un bon fonctionnement de la chaîne, notamment en ce qui concerne le partage du temps d'antenne.
M. James Bordas s'est félicité de la création de La Chaîne Parlementaire, qui paraissait indispensable pour améliorer l'information sur le fonctionnement du Parlement. Relevant qu'il était fréquent qu'un projet de loi soit présenté comme adopté dès lors qu'il avait été examiné en première lecture par l'Assemblée nationale, il a estimé indispensable de faire mieux percevoir le rôle du Sénat, trop souvent méconnu, voire ignoré. La création de La Chaîne Parlementaire sera donc un moyen d'information utile sur le fonctionnement réel des institutions et pourrait à cet égard " remettre les pendules à l'heure ".
M. James Bordas s'est également interrogé sur les moyens d'assurer le respect de la parité des temps d'antenne.
Répondant aux divers intervenants, M. Adrien Gouteyron , président , a notamment apporté les précisions suivantes :
- il doit en effet être tout à fait clair que La Chaîne Parlementaire, qui est d'intérêt public et remplira une mission de service public, ne sera pas pour autant une chaîne publique comme les autres, et que son organisation juridique ne peut constituer un précédent. La Chaîne Parlementaire est une chaîne de service public, mais c'est aussi une chaîne parlementaire qui, parce que nous sommes en démocratie, doit être conçue de manière cohérente avec l'autonomie du Parlement par rapport à l'exécutif : c'est cela qui justifie les dispositions spécifiques qui figurent dans la proposition de loi ;
- il doit également aller de soi -mais il est effectivement important de le préciser- que l'existence de deux sociétés de programme et le partage entre elles du temps d'antenne ne doivent pas être considérés comme excluant la réalisation en commun d'émissions par les deux assemblées ;
- il est possible, et même prévisible, la vie politique étant ce qu'elle est, que les rapports entre les deux assemblées puissent parfois être tendus et rendent difficile la gestion de la répartition du temps d'antenne. Les principes de cette répartition seront précisés par une convention passée entre les deux assemblées, et une instance paritaire d'arbitrage, dans laquelle siégeront les Présidents des deux assemblées, aura vocation à résoudre, de manière souple et pragmatique, les difficultés qui pourraient se présenter.
A l'issue de ce débat, la commission a adopté, à l'unanimité des commissaires présents, la proposition de loi n° 142 (1999-2000) dans le texte issu des délibérations de l'Assemblée nationale .
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TABLEAU COMPARATIF
I. TABLEAU COMPARATIF
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Textes de référence ___ |
Texte adopté par
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Propositions de la Commission ___ |
Proposition de loi
portant création de
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Proposition de loi
portant création de
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Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication |
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TITRE III
DU SECTEUR PUBLIC
................................................................ |
Article premier L'article 45-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi rédigé : |
Article premier Sans modification |
Art. 45-1. - Chaque assemblée parlementaire peut, sous le contrôle de son Bureau, produire et faire diffuser par voie hertzienne ou distribuer par câble un programme de présentation et de compte rendu de ses travaux. Ce programme peut également porter sur le fonctionnement des institutions parlementaires et faire place au débat public dans le respect de la représentativité des groupes et formations siégeant dans chacune des assemblées. |
" Art. 45-1. - L'Assemblée nationale et le Sénat produisent et font diffuser, sous le contrôle de leur Bureau, par câble ou par voie hertzienne, un programme de présentation et de compte rendu de leurs travaux. Ce programme peut également porter sur le fonctionnement des institutions parlementaires et faire place au débat public, dans le respect du pluralisme des groupes constitués dans chacune des assemblées. " |
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Art. 2 Après l'article 45-1 de la même loi, il est inséré un article 45-2 ainsi rédigé : |
Art. 2 Sans modification |
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" Art. 45-2. - La chaîne de télévision parlementaire et civique, créée par l'Assemblée nationale et le Sénat, est dénommée " La Chaîne Parlementaire ". Elle comporte, à parité de temps d'antenne, les émissions de deux sociétés de programme, l'une pour l'Assemblée nationale, l'autre pour le Sénat. |
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" Elle remplit une mission de service public, d'information et de formation des citoyens à la vie publique, par des programmes parlementaires, éducatifs et civiques. |
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" Dans le cadre de son indépendance éditoriale, la chaîne veille à l'impartialité de ses programmes. |
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" La société de programme, dénommée " La Chaîne Parlementaire-Assemblée nationale ", est chargée de concevoir et de programmer des émissions de présentation des travaux de l'Assemblée nationale ainsi que des émissions d'accompagnement. Elle en assure la production et la réalisation. |
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" La société de programme, dénommée " La Chaîne Parlementaire-Sénat ", est chargée de concevoir et de programmer des émissions de présentation des travaux du Sénat ainsi que des émissions d'accompagnement. Elle en assure la production et la réalisation. |
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" Ces deux sociétés de programme sont dirigées par des présidents-directeurs généraux nommés pour trois ans par les Bureaux des assemblées, sur proposition de leur Président. |
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" La nature, la composition, le mode de désignation et les compétences des autres organes dirigeants sont déterminés par les statuts de chaque société de programme approuvés par le Bureau de l'assemblée à laquelle elle se rattache. |
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" Chaque société de programme conclut annuellement avec l'assemblée dont elle relève une convention précisant les modalités d'exécution de sa mission, ainsi que le montant de la participation financière dont elle est dotée par cette assemblée. |
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" Le capital de chacune de ces sociétés est détenu en totalité par celle des deux assemblées à laquelle elle se rattache. Le financement des sociétés de programme est assuré par des dotations annuelles, chaque assemblée dotant sa société directement de la totalité des sommes qu'elle estime nécessaires à l'accomplissement de ses missions. |
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" La Chaîne Parlementaire ne diffuse aucun message publicitaire et aucune émission de téléachat. |
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TITRE III DE L'USAGE DES PROCÉDÉS DE TÉLÉCOMMUNICATIONS ................................................................ |
" Les sociétés de programme, ainsi que les émissions qu'elles programment, ne relèvent pas de l'autorité du Conseil supérieur de l'audiovisuel. |
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CHAPITRE II Des services de radiodiffusion sonore et de télévision distribués par câble |
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Art. 33. - Un décret en Conseil d'Etat pris après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel fixe pour chaque catégorie de services de radiodiffusion sonore et de télévision distribué par câble : 1° La durée maximale des conventions prévues à l'article 34-1 ; 2° Les règles générales de programmation ; 2° bis Les dispositions propres à assurer le respect de la langue française et le rayonnement de la francophonie ; 3° Les conditions générales de production des oeuvres diffusés ; 4° Les règles applicables à la publicité et au parrainage ; 5° Le régime de diffusion des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles. |
" Concernant les matières mentionnées aux 2°, 2° bis , 3°, 4° et 5° de l'article 33, le Bureau de chacune des assemblées fixe et contrôle les conditions dans lesquelles la réglementation en vigueur s'applique à La Chaîne Parlementaire. |
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Code des juridictions financières Art. L. 133-1. - la Cour des comptes assure la vérification des comptes et de la gestion des établissements publics de l'Etat à caractère industriel et commercial, des entreprises nationales, des sociétés d'économie mixte ou des sociétés anonymes dans lesquelles l'Etat possède la majorité du capital social. |
" L'article L. 133-1 du code des juridictions financières n'est pas applicable à ces sociétés, qui sont soumises aux dispositions du règlement de chacune des assemblées concernant le contrôle de leurs comptes. " |
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Art. 3 Il est inséré, dans la même loi, un article 45-3 ainsi rédigé : |
Art. 3 Sans modification |
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" Art. 45-3. - Sauf opposition des organes dirigeants des sociétés de programme mentionnées à l'article 45-2, toute personne qui établit avec des éditeurs de services des relations contractuelles en vue de constituer une offre de services de communication audiovisuelle, mise à disposition du public par satellite ou par câble, ainsi que toute personne qui constitue une telle offre en établissant des relations contractuelles avec d'autres distributeurs, est tenue de diffuser, à ses frais, les programmes de La Chaîne Parlementaire. Ces programmes sont mis gratuitement à disposition de l'ensemble des abonnés. " |
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Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication |
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TITRE III
DU SECTEUR PUBLIC
................................................................ |
Art. 4 |
Art. 4 |
Art. 46.- Les sociétés mentionnés aux articles 44 et 45 sont soumises à la législation sur les sociétés anonymes, sauf dispositions incompatibles avec la présente loi, notamment en ce qui concerne la structure de ces sociétés et la composition de leur capital. |
Dans l'article 46 de la même loi, les mots : " et 45 " sont remplacés par les mots : " ,45 et 45-2 ". |
Sans modification |
* 1 Rappelons que cette règle prévoit que doivent disposer d'un temps d'expression égal le gouvernement, la majorité qui le soutient et l'opposition.
* 2 L'article 45-2 vise à cet égard toutes les catégories d'obligations mentionnées par l'article 33 de la loi : règles générales de programmation (2° de l'article 33), dispositions propres à assurer le respect de la langue française et le rayonnement de la francophonie (2°bis), conditions générales de production des oeuvres diffusées (3°), règles applicables à la publicité et au parrainage (4°), régime de diffusion des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles (5°).