Projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale, TOME III - Les moyens des services et les dispositions spéciales (deuxième partie de la loi de finances) Annexe n° 10 - Culture et communication : presse
BELOT (Claude), Rapporteur spécial
RAPPORT GENERAL 89-TOME III Annexe n° 10 (1999-2000) - COMMISSION DES FINANCES
Tableau comparatif au format Acrobat ( 129 Ko )Table des matières
-
OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR
- A. AIDES DIRECTES : UNE DISPERSION CONDITION DU PLURALISME
- B. DISTRIBUTION : VERS UNE CONCURRENCE ACCRUE ?
- C. AGENCE FRANCE PRESSE : UN PARI NÉCESSAIRE SUR L'AVENIR
-
II. LA SITUATION DE LA PRESSE
- A. DIFFUSION ET CHIFFRE D'AFFAIRES DE LA PRESSE
- B. LA PRESSE ET LE MARCHÉ PUBLICITAIRE
- C. LES ENTREPRISES DE PRESSE
- D. LES AIDES DU BUDGET DES SERVICES GÉNÉRAUX DU PREMIER MINISTRE
- E. LE FONDS DE MODERNISATION
- F. BILAN DES AIDES INDIRECTES A LA PRESSE
- III. LES ENJEUX À MOYEN TERME
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 89
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès verbal de la séance du 25 novembre 1999.
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Deuxième partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 10
CULTURE ET COMMUNICATION :
PRESSE
Rapporteur spécial
: M. Claude BELOT
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1805
,
1861
à
1866
et T.A.
370
.
Sénat
:
88
(1999-2000).
Lois de finances. |
OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR
La
dispersion des aides directes à la presse au départ un peu
surprenante, s'agissant d'interventions dont l'unité de compte est
parfois inférieure au million de francs, se justifie par la
fragilité, si ce n'est du secteur dans son ensemble, du moins de
certains titres et par la nécessité de préserver une
diversité qui en font toute la richesse et le dynamisme.
Dix articles se partagent 260 millions de francs. Si l'on retire les
remboursements à la SNCF et le plan social des NMPP, c'est
145 millions qui se répartissent sur huit postes ;
soustraction faite de l'aide au portage qui constitue désormais le point
de concentration de l'effort budgétaire, cela donne une moyenne par
article inférieure à 12 millions de francs.
La diversité que ces aides tendent à perpétuer, est une
condition de la démocratie
. Et c'est dans cette perspective que
votre rapporteur examine le présent budget sans oublier pour autant
que la presse agit désormais dans un espace éminemment
concurrentiel
: elle est en concurrence avec des grands groupes
internationaux et avec d'autres médias qu'il s'agisse de la
télévision ou, peut-être, demain, d'Internet.
A. AIDES DIRECTES : UNE DISPERSION CONDITION DU PLURALISME
Le
Gouvernement a fait " clairement le choix d'un plan de
développement de la presse quotidienne ". Cette
priorité se traduit par un effort particulier en faveur du portage mais
aussi de l'investissement et de la modernisation par rapport au fonctionnement.
L'intention ne peut qu'être approuvée, même si
appliqués de façon trop rigide, de tels principes peuvent aboutir
à une répartition plus arbitraire voire ponctuellement
contestable.
1. La priorité au portage
Il
s'agit de relancer la vente de la presse quotidienne d'information politique et
générale. Dans un monde saturé d'informations, les patrons
de presse comme les responsables gouvernementaux ont pris conscience de
l'importance d'un mode de distribution, qui seul peut fidéliser une
clientèle qui veut des nouvelles au tout début de sa
journée.
La diffusion par portage connaît de fortes disparités selon les
familles de presse et les zones géographiques. Alors que dans l'Est et
le Nord de la France, ce mode de diffusion est bien implanté, il demeure
encore marginal sur le reste du territoire et peu développé pour
la presse quotidienne nationale. La situation du secteur de la presse
écrite au regard du portage est donc contrastée.
Une des questions qui fait l'objet de débats au sein de la presse et par
voie de conséquence entre une partie de la presse et le gouvernement,
porte sur les parts respectives qu'il faut accorder à l'aide au stock
par rapport à celle favorisant l'effort à la marge. S'il faut
bien admettre que la majeure partie de l'aide doit aller aux journaux qui font
l'effort de développer un réseau de portage, il est paradoxal que
l'aide ne concerne que marginalement la presse notamment dans l'Est où
le portage est traditionnellement très développé et donc
les marges d'expansion relativement faibles.
2. Le Fonds de modernisation : une mise en place laborieuse
C'est
l'article 62 de la loi de finances pour 1998 qui a institué un compte
d'affectation spéciale n°902-32 intitulé : "Fonds de
modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information
politique et générale " et l'a alimenté par une taxe
de 1 % sur certaines dépenses de publicité " hors
médias ".
La création de ce fonds procède d'une initiative parlementaire.
C'est en effet à la suite d'un amendement de M. Le Guen que
l'Assemblée nationale, a institué une taxe sur la
publicité hors médias.
A la base de cette taxe, il y a une analyse : la pénurie de moyens
dont souffre la presse résulte en partie de ce qu'elle doit faire face
auprès des annonceurs à la concurrence du hors médias,
prospectus distribués sans les boites aux lettres ou journaux
gratuits
.
En taxant le " hors médias " et en l'affectant à des
aides à l'investissement, on ferait d'une pierre deux coups : d'un
côté, on contribue à maîtriser une concurrence
anormale ; de l'autre, on donne des moyens supplémentaires de
modernisation à un secteur qui doit s'adapter à un environnement
technologique mouvant et toujours plus concurrentiel.
Sur le plan des intentions, on ne peut que souscrire aux objectifs
affichés par la ministre de la culture et de la communication
lorsqu'elle a déclaré qu'il fallait "
rompre avec la
logique de compensation des charges au profit d'une logique d'incitation
à la modernisation
" et que
" La presse
d'information politique et générale a davantage besoin de
restaurer son esprit entrepreneurial
, ses performances
éditoriales et économiques, plutôt que de se voir appliquer
toujours les mêmes remèdes pour compenser ses
déficits.
"
Mais si l'idée était simple, l'application l'était
beaucoup moins, tant au niveau du prélèvement de la ressource que
des modalités de sa distribution. Cela explique largement le
retard
dans la mise en oeuvre de ce fonds
, comme votre rapporteur l'a
déjà souligné l'année dernière.
Les principales recettes du fonds sont constituées par le produit de la
taxe instituée à l'article 302 bis MA du code
général des impôts, ainsi que, ultérieurement, - et
s'il y a lieu, car les bénéficiaires préfèrent les
subventions aux avances remboursables... - par le remboursement des avances
consenties par le fonds.
Aux termes de l'article 302 bis MA du code général des
impôts, la taxe qui alimente le fonds de modernisation de la presse, est
due par toute personne assujettie à la TVA dont le chiffre d'affaires de
l'année civile précédente est supérieur à
5.000.000 F hors TVA.
Cette taxe, dont le taux est fixé à 1 %, est assise sur les
dépenses hors taxes engagées au cours de l'année civile
précédente et ayant pour objet :
1°) la réalisation ou la distribution d'imprimés
publicitaires
2°) les annonces et insertions dans les journaux mis gratuitement à
la disposition du public.
Sont exclues de l'assiette de la taxe :
a) les dépenses engagées par les associations à but non
lucratif en application des dispositions des articles 256 B et 261 du code
général des impôts ;
b) les dépenses afférentes à la réalisation ou
à la distribution de catalogues adressés, destinés
à des opérations de vente par correspondance ou à distance.
La surestimation de la base taxable, la nécessité de
soustraire certaines activités (ventes par correspondance et
organisations à but non lucratif) expliquent la faiblesse du produit
annoncé.
Avec 139 millions de francs de produit annoncé pour 1998 et entre
155 et 160 millions de francs pour 1999, on est assez loin des
espérances exprimées lors du vote du dispositif, qui se situaient
plutôt aux alentours de 300 à 400 millions de francs.
Les recettes prévues pour 2000 sont maintenues au même niveau de
160 millions de francs, même si les 155 millions de francs
déjà perçus au titre de 1999, laissent espérer un
rendement supérieur proche de 200 millions de francs.
Les bénéficiaires du fonds sont :
a) les entreprises de presse éditrices d'au moins un quotidien ou d'une
publication hebdomadaire régionale ayant obtenu la certification
d'inscription délivrée par la commission paritaire des
publications et agences de presse et relevant de la presse d'information
politique et générale ;
b) les agences de presse inscrites sur la liste prévue à
l'article l
er
de l'ordonnance n°45-2646 du 2 novembre 1945
portant réglementation provisoire des agences de presse.
Les aides accordées prennent la forme de subventions, d'avances
remboursables ou de dépenses d'études. Les décisions
d'attribution sont prises par le ministre chargé de la communication
après avis d'un comité d'orientation.
Le décret n° 99-79 du 5 février 1999
relatif au
fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée
d'information politique et générale
, modifié par le
décret n° 99-356 du 7 mai 1999, définit les actions
éligibles et les dépenses prises en compte pour le calcul des
aides.
Ces critères sont présentés comme très ouverts et
permettent tous les projets de modernisation, qu'il s'agisse des
rédactions, des imprimeries, des services commerciaux ou des
réseaux de distribution, à l'exception des investissements de
simple renouvellement.
Le comité d'orientation du fonds s'est réuni pour la
première fois en juin dernier afin d'étudier les premières
demandes au titre du " régime dérogatoire " permettant
d'apporter une aide à des opérations d'investissement
déjà
engagées à la date de la réunion
du comité d'orientation
. Il a été indiqué
à votre rapporteur que d'autres demandes au titre de ce régime
dérogatoire, ainsi que des demandes au titre du régime normal
doivent être examinées au comité d'orientation du mois de
décembre 1999.
A ce jour, la part respective des demandes de subventions et celles des
demandes d'avances remboursables représentent respectivement 95 %
et 5 % des aides du fonds, alors que la proportion attendue était
de 45 % / 55 %.
Il a également été précisé à votre
rapporteur spécial qu'un "
bilan de l'action de ce fonds doit
par ailleurs être réalisé par le comité
lui-même au printemps 2000 pour la gestion de l'année
précédente " et qu'au " titre du régime
dérogatoire environ 150 dossiers ont été
déposés par une centaine d'éditeurs. Les investissements
sont de natures très diverses montrant que les besoins des entreprises
de presse sont eux-mêmes très diversifiés. Une partie des
propositions concernent des actions de numérisation. "
A la connaissance de votre rapporteur aucune n'aide n'a été
encore arrêtée
et a fortiori versée au titre du fonds
de modernisation. Les difficultés déjà signalées au
niveau collecte se doublent de problèmes sur le plan de la distribution.
Il faut en effet bien constater que le volontarisme qui marquait les
premières déclarations, semble avoir laissé la place
à une attitude réaliste conduisant les pouvoirs publics à
ratifier au nom de l'urgence et de l'efficacité des projets
déjà lancés du fait du jeu normal de la concurrence.
B. DISTRIBUTION : VERS UNE CONCURRENCE ACCRUE ?
La
France se caractérise par un mode de distribution original, fondé
sur un système coopératif, de façon à garantir le
pluralisme. Ce système, mis en place en 1947 autour des Nouvelles
Messageries de la Presse Parisienne, est aujourd'hui en crise en dépit
d'efforts d'adaptation appréciables encouragés par l'État.
Gérées par Hachette, très sensibles au puissant Syndicat
du livre, aujourd'hui divisé - ce qui ne facilite pas la gestion des
conflits dans un secteur où les mouvements sociaux sont fréquents
-, les NMPP peuvent largement s'identifier à l'histoire de la presse
depuis un demi siècle , même si le modèle de
régulation qu'elles incarnent est aujourd'hui de plus en plus souvent
contesté par les éditeurs eux-mêmes.
1. La montée des tensions
Les
mouvements de grèves , dont le dernier date du 6 octobre dernier,
perturbent régulièrement la distribution de la presse, tandis que
la poussée de concurrence entre les NMPP et les Messageries Lyonnaises
de presse - MLP - font craindre à certains
l'amorce d'un processus de
dérégulation sauvage
.
Les principes "d'équité et d'égalité de
traitement" et de "solidarité" entre les titres, institués par la
loi Bichet, sont de plus en plus difficiles à appliquer et, notamment,
la "péréquation" des coûts de distribution entre les
différentes formes de presse
, les magazines acceptant de plus en
plus mal de supporter une bonne part des coûts d'un système
conçu pour les quotidiens.
Le passage, en mai 1999, de l'hebdomadaire Point de vue, des NMPP aux MLP a
créé la surprise et amorcé une certaine redistribution des
cartes. En passant aux MLP dans des conditions jugées satisfaisantes,
l'hebdomadaire aurait ainsi économisé 6 millions de francs.
L'hebdomadaire Marianne envisage de lui emboîter le pas pour
améliorer un compte d'exploitation fragile. Tandis que Le Point pourrait
les imiter, sa filiale, le mensuel Historia vient de passer aux MLP. Dans le
même temps , des publications du groupe Hommel - ont fait le chemin
inverse pour rejoindre les NMPP.
Tandis que le
chiffre d'affaires des NMPP varie relativement peu, puisqu'il
est passé de 18,4 milliards de francs à 19,1 milliards
de francs, pour 2,8 milliards d'exemplaires vendus
,
celui des
MLP
, bien que largement inférieur,
a cru substantiellement
passant de 1 milliard de francs en 1994 à 2,650 milliards de
francs en 1998
.
De fait, en dépit de plusieurs plans de restructuration, qui leur ont
permis de diminuer leur coût d'intervention de 14 % à
9 %, les NMPP ont du mal à faire face à la concurrence.
2. La poursuite des efforts de restructuration
Le
premier
plan quadriennal de modernisation des NMPP (1994-1997),
présenté en juillet 1993, comprenait un ensemble de mesures
couvrant tout le champ d'action des Messageries (gestion des invendus,
organisation de la distribution des quotidiens, restructuration du
réseau de dépositaires ... ), qui devaient permettre
d'économiser 737 millions de francs sur la période. Le plan
de restructuration comprenait un volet social, prévoyant
717 départs
échelonnés sur la période
parmi les ouvriers de l'entreprise.
Par le protocole d'accord du 27 décembre 1993, l'État a
accepté d'apporter sa participation financière à ce plan
social, au moyen d'une convention Fonds national pour l'emploi (FNE),
dérogatoire à la règle commune et concernant au maximum
374 ouvriers. L'accord dont l'application était contrôlée,
prévoyait l'engagement par l'État d'une somme de
136,4 millions de francs maximum sur l'ensemble de la période
1994-2001 (année de passage en retraite des ouvriers partis en 1997)
visant à assurer le financement partiel des allocations spéciales
FNE
.
Toutefois, les économies réalisées -
évaluées à 680 millions de francs, soit
57 millions de francs de moins que prévu -ont été
redistribuées aux éditeurs et aux diffuseurs conformément
aux termes de la convention entre l'État et les NMPP : sur 4 ans, ce
sont donc 141,6 millions de francs qui ont été
redistribués aux quotidiens. Les éditeurs de publications ont
bénéficié d'une baisse encore supérieure,
puisqu'elle atteint 4,25 %, soit une redistribution de 473,1 millions
de francs en 4 ans.
Les NMPP ont engagé en 1998 un nouveau plan quadriennal de
modernisation, dont elles attendent une économie supplémentaire
de 300 à 350 millions de francs et, en conséquence, une
nouvelle baisse de leur taux d'intervention qui passerait ainsi de 9 à
7 %.
Les principales réformes envisagées concernent le traitement des
publications ( fusion des centres de Rungis Nord et de Centre Nord en un centre
unique à Combs-la-Ville ), la distribution sur Paris transformation des
6 centres de diffusion parisiens en un centre de publication, à
Lognes, travaillant le jour, et 4 centres de quotidiens situés à
Paris et en proche banlieue. Enfin, le traitement des invendus doit être
réorganisé.
Une baisse supplémentaire des effectifs est prévue qui portera
sur 4 à 500 personnes entre 1998 et 2001
. Pour y parvenir,
les NMPP ont sollicité l'octroi de mesures d'âge
particulières : c'est ainsi que les ministres de l'emploi et du
budget leur ont accordé la possibilité de procéder
à des départs en congé de conversion à 55 ans
suivis de départs " Allocation spéciale du Fonds National de
l'emploi " à 56 ans étant entendu que la
société financerait intégralement les congés de
conversion.
Ce régime dérogatoire ayant expiré en juin 1999, les
NMPP sont aujourd'hui soumises au droit commun des congés de conversion
et ne bénéficient plus d'un soutien particulier de l'État
pour leur reconversion. Il y a là un retrait de l'État qui
intervient à un moment où il faudrait peut-être
accélérer les mutations.
Au moment où le président du Conseil supérieur des
messageries de presse lançait un appel à un
" moratoire " et à une " trêve d'automne ", le
Gouvernement qui a affirmé son attachement aux principes issus de la loi
Béchet, a confié une mission d'étude et de
réflexion à M. Jean-Claude Hassan, maître des
requêtes au Conseil d'État.
C. AGENCE FRANCE PRESSE : UN PARI NÉCESSAIRE SUR L'AVENIR
En mars
1999, M. Eric Giuily, ancien directeur général d'Antenne 2, qui
occupait précédemment le poste de directeur général
du groupe de publicité BDDP Worldwide, a été
désigné par le conseil d'administration de l'AFP pour
succéder à M. Jean Miot. Le choix d'Eric Giuily était,
à l'évidence, celui de l'État qui, sans être
représenté au conseil d'administration, assure toujours
l'essentiel des ressources de l'AFP.
Ce choix de personne, qui emporte un changement radical de style de gestion, a
suscité un certain nombre de remous, préoccupants eu égard
à l'importance de cet organisme pour le rayonnement de la culture
française.
Nombreux sont ceux qui, comme votre rapporteur spécial, sont
attachés à l'organisme au nom de la présence culturelle
française dans le monde :
l'AFP est un peu comme la voix et le
regard de la France sur le monde, le porte-drapeau de l'exception
française dans un monde de l'information sous influence
anglophone
.
1. Un statut hybride inadapté
Depuis
sa création en 1944, l'AFP a toujours été
considérée par le pouvoir comme un vecteur
privilégié de l'influence sur la scène internationale.
Dès le départ, son statut, adopté en 1957, lui assigne
explicitement une mission d'intérêt général qui
consiste à fournir une information " exacte " et " impartiale ",
tout en lui conférant un " rayonnement mondial " .
Troisième agence derrière l'anglais Reuters et l'américain
Associated Press (AP), l'AFP, qui était d'une taille comparable à
celle de ses concurrents au début des années 60, est aujourd'hui
largement distancée par eux car elle a manqué le
" coche " de la diversification dans l'information
économique :
l'agence Reuters pèse maintenant vingt fois
plus lourd que sa concurrente française
.
Aujourd'hui, à ceux pour qui l'Agence France-Presse doit devenir une
" entreprise comme les autres "
, soumise aux lois du marché,
s'opposent ceux qui dans une perspective souverainiste, dénoncent
la
" marchandisation de l'information "
, en appellent à
" l'exception culturelle "
ou insistent sur son rôle comme
"un des éléments de diffusion de la pensée
française"
.
En dépit de multiples plans de redressement, l'AFP s'est progressivement
enfoncée dans ce que beaucoup considèrent comme une
véritable crise morale et financière.
L'AFP fonctionne à la manière d'une coopérative où
la presse française est à la fois cliente et administrateur. La
dépendance financière à l'égard de l'État se
double d'une lourdeur de fonctionnement liée à
l'ambiguïté du statut de l'agence, soulignée par
un
rapport de l'inspection des finances remis en juin 1998.
Ce rapport, extrêmement critique, mettrait en évidence, selon des
informations de presse, à la fois l'absence de politique commerciale,
les erreurs d'acquisition de certaines filiales, l'organisation
centralisée de l'entreprise, l'absence de contrôle de gestion.
Ni véritable service public ni société à but
commercial, l'agence, qui emploie 2000 personnes (1200 journalistes
dont 200 photographes), doit se satisfaire d'un statut législatif
hybride qui date de 1957.
La particularité de ce statut, c'est qu'il fait de l'agence une
société de droit privé, soumise aux règles du droit
commercial, mais sans capital social,
donc sans actionnaires
. Elle
compte ses clients parmi ses administrateurs mais, curieusement, pas
l'État. Or celui-ci contribue, par le biais d'abonnements à
couvrir 46 % du chiffre d'affaires de l'agence (1,2 milliard de
francs).
2. Un plan stratégique contesté
Pour
permettre à l'AFP de rattraper son retard et sortir de la crise,
M. Giuily propose un ambitieux " plan stratégique " . Le nouveau
président se propose de
faire de l'AFP une agence mondiale
multimédia, tournée vers Internet et les nouveaux supports
technologiques
.
Pour lui, L'AFP doit faire
face à un défi historique, celui de
la révolution technologique du monde de l'information
. A travers
Internet et les divers multimédias se développent des offres qui
deviennent autant de concurrents potentiels des agences.
Pour parvenir à cette diversification de sa clientèle et au
renforcement de ses services qui devrait se traduire par une croissance de plus
de 50 % du chiffre d'affaires de l'entreprise en 5 ans, le nouveau
président estime
qu'il faut investir
. Or les quelque
800 millions de francs
dont il a besoin à cette fin,
ne
peuvent se trouver
, selon lui,
ni dans une augmentation massive des
abonnements de ses principaux clients, ni par une aide directe de
l'État
.
Telle est l'analyse qui conduit le nouveau président de l'Agence
France-Presse à
proposer une " évolution " du statut
de l'agence
de façon à "
associer à [son]
développement 5 ou 6 entreprises publiques ou privées
possédant des technologies " que n'a pas l'entreprise.
Les représentants des salariés accusent leur PDG de
préparer la "privatisation rampante" de l'AFP
. Ils voient dans son
plan une menace pour l'indépendance et la spécificité de
l'agence. Le partenariat proposé par M. Eric Giuily revient
à faire dicter la politique rédactionnelle de l'agence en
fonction des lois du marché.
Dans une lettre aux parlementaires,
M. Eric Giuily affirme qu'il " ne
s'agit nullement d'une privatisation, puisque ces nouveaux partenaires ne
pourront accueillir plus de 49 % du capital de l'agence et ne pourront
prendre le contrôle de fait ou de droit de celle-ci. Aucun d'entre eux ne
pourra avoir une part supérieure à 10 % ou 15 % du
capital. La loi modifiant le statut de 1957 devra le prévoir
expressément. "
Après une période de tension au cours de laquelle on a vu le
nouveau président bénéficier du soutien appuyé du
conseil d'administration de l'agence et de l'État, diverses mesures
d'apaisement ont été prises ; le conseil d'administration
qui devait se prononcer sur le plan, a été reporté au mois
de décembre, ce qui permettra au comité d'entreprise de faire
procéder à une expertise du plan par un cabinet d'audit
indépendant.
La ministre de la Culture et de la Communication a explicitement apporté
son soutien au plan de M. Giuily en déclarant que le " renouveau de
l'Agence France-Presse est une cause nationale " et que " c'est au Parlement
qu'il incombera de recréer les fondements d'une agence moderne,
pérenne, indépendante et ouverte au monde ". Madame Catherine
Trautmann a estimé que "différer ou retarder la mise en oeuvre
d'un plan de développement, c'est compromettre gravement la situation
concurrentielle de l'agence sur des marchés aujourd'hui en pleine
expansion" .
Votre rapporteur spécial n'a pas eu la possibilité de rassembler
les éléments lui permettant de juger sur le fond le plan de
développement du nouveau président. Sans doute pourrait-on
s'interroger sur tel ou tel aspect de la stratégie proposée et
notamment sur celle consistant à chercher à proposer des produits
élaborés à destination du consommateur final, au risque
d'entrer en concurrence avec la presse elle-même.
Mais votre
rapporteur spécial estime qu'il faut lui laisser le temps de mettre en
place sa nouvelle organisation avant de porter un jugement sur la nouvelle
politique
.
La conviction de votre rapporteur spécial est qu'il fallait agir si
l'on ne voulait pas assister impuissant à la marginalisation de l'AFP
sur un marché de l'information désormais mondial
. Sans
capital social, sans assouplissement du carcan que constituent certaines
règles statutaires comme l'équilibre des comptes, l'Agence ne
peut résister à ses concurrents.
Ici comme dans le secteur audiovisuel, il faut donner au secteur public les
moyens de lutter à armes égales.
La presse veut se moderniser. Elle ne cesse de se restructurer et affiche des
ambitions dans le domaine du multimédias et même des
télévisions locales qui témoignent de son dynamisme.
L'État se doit d'encourager de telles initiatives, à
défaut desquelles la presse écrite pourrait bien finir par se
marginaliser dans le nouveau paysage médiatique, qui va apparaître
du fait de la généralisation des technologies
numériques.
II. LA SITUATION DE LA PRESSE
On parle
souvent de crise de la presse. Or, tous les observateurs avertis du secteur
savent qu'il n'y a pas une presse mais plusieurs, dont la situation se
présente de façon très contrastée.
En effet si les Français lisent peu de quotidiens - avec
153 exemplaires vendus par habitants la France se situe au
22
ème
rang mondial - ils sont les premiers
consommateurs : 34,5 millions de Français lisent chaque jour
un magazine, ce qui fait que ce type de presse représente 47% du chiffre
d'affaires total du secteur.
L'économie des entreprises de presse, déjà rendue complexe
par sa dimension à la fois culturelle et industrielle, est aussi
naturellement plus instable du fait qu'un journal est vendu deux fois, une
première fois à son lecteur et une deuxième aux annonceurs.
Ces deux sources de revenus n'évoluent pas nécessairement de
façon parallèle, les recettes de publicité ayant tendance
à se révéler volatiles, indépendamment des menaces
structurelles résultant de la concurrence de la télévision
et, surtout du hors médias.
A. DIFFUSION ET CHIFFRE D'AFFAIRES DE LA PRESSE
La
situation de chaque type de presse est donc très variable au-delà
des tendances générales. On note depuis quinze ans des
fluctuations importantes : une forte croissance du début des
années 80 puis un net ralentissement au début des années
90. La reprise que l'on constate depuis le milieu de la décennie semble
marquer le pas.
Selon l'enquête rapide menée par le département statistique
du SJTI, le tirage total de la presse stagne en 1998.
Le tirage de la presse nationale d'information générale et
politique est en nette diminution de -3,9%, en raison de la baisse du tirage
des quotidiens , -2,8%, et de celle des magazines d'information, -7,4%,
après il est vrai la forte augmentation en 1997.
Les autres catégories de presse, qui représentent près de
80% du tirage stagnent ou sont en légère progression :
tandis que la presse régionale d'information politique et
générale augmente de + 0,8%, la presse spécialisée
grand public et la presse gratuite ne sont en croissance respectivement que de
+0,6% et + 0,4%.
Toutes catégories de presse réunies, les recettes des ventes
n'augmentent que de + 0,5% en 1998
. Elles représentent 60% des
recettes totales, avec 36,4milliards de francs, qui se répartissent pour
deux tiers à la vente au numéro et à un tiers pour les
ventes par abonnement.
Comme en 1997, la croissance des ventes par abonnement qui est de +2,9 %,
compense le tassement de - 0,8 % des ventes au numéro.
Par catégorie de presse les évolutions sont les suivantes en
1998 : -0,5% pour la presse nationale d'information politique et
générale (contre + 4,1 %en 1997), +2,4% pour la presse
locale (contre -1,3 % en 1998), 2,7% pour la presse
spécialisée technique et professionnelle et - 0,5% pour la presse
spécialisée grand public.
Au total, la croissance des recettes " presse " (+2,60%) est un peu plus
élevée qu'en 1997, année qui avait été
marquée par un ralentissement (+1,7%) après deux années
plus favorables. Trois grandes catégories de presse ont des
résultats globaux en nette progression : la presse nationale
d'information générale et politique avec +4,2 %, la presse locale
d'information générale et politique avec +4,3% et la presse
spécialisée technique et professionnelle avec +5,1% ; en
revanche, la presse gratuite progresse de + 1,4% et la presse
spécialisée grand public reste stable, +0,2%.
B. LA PRESSE ET LE MARCHÉ PUBLICITAIRE
Alors
que les dépenses publicitaires dans les médias augmentaient en
moyenne de plus de 10% par an entre 1982 et 1990, le marché s'est
retourné au début des années 90 pour reprendre à un
rythme moyen de près de 4,5% à compter de 1993.
L'évolution n'est pas la même pour tous les médias :
au cours de la période, les recettes de publicité de la presse
ont cru de + 3,9%, à comparer à celles de la
télévision qui ont connu un taux de croissance de plus de 7%.
Ces évolutions différenciées ont entraîné
un resserrement progressif des parts de marché.
Si
la
presse
drainait 56,2 % des ressources publicitaires des médias
en 1990 et 48,5 % en 1993, elle n'en attire plus que
47,2% en 1998
.
C'est au profit de la télévision que s'est effectuée cette
perte de part de marché. En effet, la part relative de l'affichage, de
même que celle du cinéma, demeure stable. Celle de la radio a
tendance à se tasser passant de 7,7% à 6,6% au cours de la
période. Au contraire, celle de la télévision passait de
24,9 % en 1990 à plus de 31,2 % en 1993 et 33,9% en 1998.
Globalement, la croissance des recettes publicitaires reste dans la tendance
orientée à la hausse depuis 1994. Mais, cette évolution
positive est, en 1997, uniquement le fait de la croissance très forte
des recettes de petites annonces, entraînée par
l'amélioration de la conjoncture économique sur les
marchés du travail et de l'immobilier.
Pour l'ensemble des recettes publicitaires, les évolutions enregistrées sont très variables d'une catégorie de presse à l'autre : trois catégories ont particulièrement bénéficié de cette conjoncture favorable : la presse nationale d'information générale et politique avec +1,9%, la presse locale d'information générale et politique avec +7,3% et la presse spécialisée technique et professionnelle avec +7,4%. Les recettes publicitaires de la presse spécialisée grand public et de la presse gratuite augmentent modérément, avec respectivement + 1,9% et + 1,4%.
C. LES ENTREPRISES DE PRESSE
Par
delà les chiffes statistiques que l'on rappelle ci-après, il faut
signaler que la presse connaît actuellement une très nette
tendance à la concentration.
Selon la dernière enquête annuelle d'entreprise de la Direction
générale des Stratégies Industrielles, en 1997,
97 entreprises de 20 personnes ou plus, dont l'activité
principale est l'édition de journaux, employaient au total
28.537 personnes (contre 29.259 en 1996), dont 26.198 au titre
de cette seule activité. En ajoutant à ce dernier effectif celui
employé au titre d'une même activité "édition de
journaux", mais exercée cette fois en tant qu'activité secondaire
par d'autres entreprises des secteurs industriels, on obtient l'effectif total
de la branche, soit 26.309 personnes (contre 26 253 en 1996).
Cette source indique également que, pour la même année,
311 entreprises de 20 personnes ou plus, dont l'activité
principale est
l'édition de revues et périodiques,
employaient au total 20.998 personnes (contre 20.656 en 1996),
dont 19.487 au titre de cette seule activité. En ajoutant à
ce dernier effectif celui employé au titre d'une même
activité " édition de revues et périodiques ",
mais exercé cette fois en tant qu'activité secondaire par
d'autres entreprises des secteurs industriels, on obtient l'effectif total de
la branche, soit 19.992 personnes (contre 19.841 en 1996).
Depuis 1945, la presse française a connu un important mouvement de
concentration. La régression du lectorat et partant du nombre de titres,
l'importance des investissements nécessaires pour mener à bien la
modernisation, les synergies qui se font jour entre les titres, ont eu pour
conséquence de multiplier les rapprochements sans que le concentration
en France atteigne et de loin le niveau atteint dans les autres grands pays
industrialisés.
Certes, on a vu à partir de 1975, la montée en puissance des
groupes multimédias, bien différents de l'empire Prouvost ou,
plus récemment du groupe Hersant : les groupes
" Vivendi ", " Bernard Arnault ", " Pinault ",
" Matra-Hachette ", " Chargeurs ", " Dassault "
prennent pied dans le secteur, tandis que des groupes familiaux, notamment dans
la presse de province faisaient plus que résister. LVMH a repris la
Tribune et Investir ; Pinault a acheté Le Point et Chargeurs 66% de
Libération. Fin 1997, " Dassault " rachète les
publications Valmonde, après avoir essayé de reprendre l'Express.
Ainsi en témoigne l'évolution récente du groupe Hersant,
aujourd'hui partagé entre France Antilles et la Socpresse. Après
la vente de France-soir, l'ouverture du capital du Figaro à des
investisseurs étrangers, la cession des titres de l'Ouest (Presse
Océan, Le Maine libre, le courrier de l'Ouest), on peut signaler le
rachat de la Voix du Nord par le groupe belge Rossel dans lequel le groupe est
présent à 40%, tandis que le rapprochement avec Nord Eclair fait
naître des craintes au sein du titre.
Un autre exemple de l'adaptabilité de la presse est donné par le
Parisien, ébranlé par la disparition accidentelle de son
fondateur et par une grève longue au milieu des années 70, le
groupe est repassé à l'offensive après s'être
séparé de ses journaux féminins et de ses titres de
l'Ouest, en créant " Aujourd'hui ", une édition
nationale du Parisien et en envisageant notamment à partir du journal
l'Equipe une expansion dans le domaine de la télévision.
La presse qu'on dit ainsi trop facilement en crise, est un monde qui bouge
même si le secteur souffre du côté de l'offre d'un handicap
dû à des contraintes sociales particulières et d'une
fragilité financière qui lui interdit de se lancer dans de
nécessaires programmes d'adaptation aux nouvelles technologies.
Tel est le rôle des crédits d'aide à la presse dont le
rôle est à la fois de favoriser le maintien du pluralisme mais
aussi d'inciter le secteur à se moderniser.
Présentation DES
CRédits
A structure constante, hors abonnements de l'État à l'AFP, les
crédits inscrits au budget général consacrés
directement aux aides à la presse, croissent de 3,2 % pour se
monter, en 2000, à
266,8 millions de francs
, soit une
augmentation de 8,1 millions de francs par rapport à 1999.
Cette
croissance de 3,2 %,
nettement supérieure à la
moyenne de celle des autres budgets de l'État -qui est de 0,9 %
pour l'ensemble des dépenses et de 1,2 % pour les seules
dépenses civiles - est sensible comparée à l'inflation
prévue qui est de 0,9 %. Elle confirme un retournement de tendance
par rapport aux années antérieures : la croissance des
crédits est légèrement supérieure à celle du
budget 1999 (+ 2,6 %), alors que 1998 s'était
caractérisée par un léger recul de 1 % des dotations
hors AFP et 1997 avait été marquée par d'importantes
annulations de crédits (36 millions de francs sur près de
268 millions de francs).
Si l'on tient compte de l
'AFP
, dont les dotations devraient
s'accroître de 1,2 % en 2000 pour atteindre
607,4 millions
de francs
, ce budget paraît encore relativement favorisé par
rapport aux autres budgets de l'État.
En dépit d'une mise en oeuvre, semble-t-il décevante, le Fonds de
modernisation de la presse alimenté par une taxe parafiscale sur le
"hors médias", vient encore renforcer le sentiment que la presse est un
secteur auquel les pouvoirs publics restent attentifs.
D. LES AIDES DU BUDGET DES SERVICES GÉNÉRAUX DU PREMIER MINISTRE
Les
aides budgétaires à la presse sont inscrites au chapitre 41-10
et, pour ce qui concerne l'AFP, au chapitre 34-95 du budget des services
généraux du Premier Ministre.
1. Les aides à certaines formes de presse
Elles devraient augmenter, en 2000, de 19,7 % : 43,8 millions de francs contre 36,6 millions de francs dans le précédent budget. On note que cette forme d'aide, inscrite au chapitre 41-10, a sensiblement augmenté depuis 1997, puisque l'on se situe à plus de 13 millions au-dessus des dotations de cette année-là.
a) Le fonds d'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires
Les
crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 sont en
croissance de 33 %, ce qui, après le rattrapage intervenu
l'année dernière, place ce poste avec 26,6 millions de
francs de crédits, à un niveau supérieur de
10 millions de francs à celui de 1997.
On peut rappeler qu'instaurées par un décret du 12 mars
1986, les règles d'attribution du fonds ont été
modifiées par un décret du 17 août 1997. La principale
mesure de ce nouveau texte est la scission en deux sections du fonds d'aide.
La première section, dont la dotation ne peut être
inférieure à 85 % du montant total de la dotation du fonds,
bénéficie aux quotidiens qui remplissent les conditions
définies à l'article 2-1 du nouveau décret, peu
différentes de celles contenues dans celui du 12 mars 1986. Deux
quotidiens, "La Croix" et "L'Humanité", entrent dans cette
catégorie et bénéficient régulièrement de
cette aide. "La Croix" a reçu 9,4 millions de francs en 1997 et
10,9 millions de francs en 1998 ; sur les mêmes périodes,
"L'Humanité" a reçu respectivement 6,2 millions de francs et
7,99 millions de francs.
La deuxième section, totalement nouvelle, vise les quotidiens à
prix très faible, comme "Mon quotidien" ou d'autres titres pour les
jeunes, jugés très intéressants sur le plan de la
diffusion de la pensée, mais qui n'ont naturellement pas un prix facial
élevé. L'aide que ces titres recevront, est très faible
(0,5 % du fonds en 1998), mais leur affiliation à cette section
leur permet de bénéficier du tarif postal
préférentiel prévu par l'article D19-2 du code des postes
et des télécommunications.
RÉCAPITULATIF DES CRÉDITS DU FONDS D'AIDE AUX QUOTIDIENS NATIONAUX A FAIBLES RESSOURCES PUBLICITAIRES :
|
Exercices budgétaires |
1994 |
1995 |
1996
|
1997 |
1998 |
1 |
La Croix |
7.046.041 |
6.964.588 |
8.860.374 |
9.483.505 |
10.908.592 |
2 |
L'Humanité |
5.282.548 |
4.948.588 |
6.076.313 |
6.213.169 |
7.991.408 |
3 |
Mon Quotidien |
- |
- |
- |
- |
100.000 |
4 |
Présent |
641.734 |
603.187 |
748.168 |
- |
- |
|
sans emploi |
|
|
|
|
|
|
Dotation du
chapitre
|
12.970.323 |
12.516.362 |
15.684.855 |
15.696.674 |
19.000.000 |
Votre
rapporteur ne dispose d'aucune information pour l'exercice 1999, dans la mesure
où la répartition des 20 millions de francs est "en cours".
Il lui a été également indiqué de façon pour
le moins elliptique que pour l'an 2000, "il est également
envisagé de tenir compte de la faiblesse du tirage dans les
critères de répartition", ce qui concerne a priori le
fonctionnement de la deuxième section évoquée ci-dessus.
Le fonds d'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et
locaux d'information politique et générale à faibles
ressources de petites annonces.
Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 se
montent à 8,5 millions de francs, soit une augmentation de
300.000 francs par rapport à l'année 1999.
L'élargissement des conditions d'accès, instauré par le
décret du 20 novembre 1997, a permis de limiter les
conséquences de la hausse des tarifs postaux.
En 1998, on comptait 12 bénéficiaires de l'aide avec des
subventions s'étageant de 189.000 francs pour la Dordogne libre
à 1,184 million de francs pour la Marseillaise.
RECAPITULATIF DEPUIS 1994 DES CREDITS DU FONDS D'AIDE AUX QUOTIDIENS REGIONAUX, DEPARTEMENTAUX ET LOCAUX D'INFORMATION POLITIQUE ET GENERALE A FAIBLES RESSOURCES DE PETITES ANNONCES
|
Exercices budgétaires |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1 |
Echo du Centre |
712.562 |
552.581 |
788.292 |
801.873 |
767.946 |
2 |
La Marseillaise |
1.043.970 |
797.095 |
1.159.603 |
1.191.111 |
1.184.877 |
3 |
Nord Littoral |
268.062 |
198.692 |
292.740 |
283.282 |
272.275 |
4 |
Petit Bleu du Lot et Garonne |
422.282 |
314.733 |
452.959 |
466.510 |
460.865 |
5 |
La Liberté de l'Est |
1.079.769 |
822.510 |
1.190.099 |
1.156.438 |
1.094.548 |
6 |
Eclair Pyrénées |
320.190 |
245.693 |
344.145 |
340.973 |
324.455 |
7 |
Libération Champagne |
391.478 |
280.657 |
384.499 |
374.550 |
347.972 |
8 |
Le Journal de la Haute-Marne |
1.014.943 |
755.350 |
1.078.260 |
1.083.236 |
1.020.809 |
9 |
Charente-Maritime/Le Journal |
127.245 |
93.518 |
- |
- |
- |
10 |
La République des Pyrénées |
- |
781.617 |
1.122.744 |
1.142.320 |
1.101.962 |
11 |
La Dordogne Libre |
- |
- |
- |
191.714 |
189.565 |
12 |
Centre Presse Rodez |
- |
- |
- |
496.257 |
470.456 |
13 |
L'Echo Républicain |
- |
- |
- |
285.074 |
309.544 |
|
Chapitre 43-03 (article 30) |
5.380.501 |
4.847.501 |
6.813.346 |
7.813.346 |
7.800.000 |
b) Le fonds d'aide à la presse régionale d'information générale et politique
Ce fonds
a été créé à l'occasion de la loi de
finances pour 1996 et doté de 5 millions de francs. Ses
modalités ont été précisées par le
décret du 10 mai 1996. Le fonds qui disposait de 7 millions de
francs dans la loi de finances pour 1997, 8 millions en 1998 et
8,4 millions de francs en 1999 voit sa dotation pour 2000 augmenter de
+ 300.000 francs
pour être portée
à
8,7 millions de francs
.
2. Les autres aides directes
Elles ont été regroupées après divers changements de nomenclature sur le chapitre 41-10 des crédits des services généraux du Premier Ministre.
a) Le fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger
Les crédits de ce fonds passent de 22 millions de francs à 23 millions de francs pour 2000, soit une augmentation de 4,55 %. On note qu'en dépit de cette augmentation, on reste encore loin des montants du début des années 1990 et notamment de 1996, où les crédits s'étaient montés à 37 millions de francs.
b) L'aide au portage
Cette
aide, d'un montant total de
58 millions de francs
est
répartie en deux postes :
• un article 42,
Aide au portage ;
bénéficiant de 2,4 millions de francs en 1996 et 1997, cette
aide, instituée en 1995, avait culminé à 8 millions
de francs en 1998 plafonne désormais à
7,5 millions de
francs
en 1999 et 2000. Ces crédits visent à compenser
intégralement pendant cinq ans (1995-1999) le
coût des charges
sociales
liées au portage des quotidiens nationaux. 9 quotidiens
nationaux bénéficient du fonds : Les Echos, France Soir,
L'Humanité, International Herald Tribune, Paris Turf, La Tribune, Le
Figaro, Libération et Le Monde ;
• par ailleurs, a été créé, en 1997, un
fonds d'aide au portage
. Doté de 15 millions de
francs à l'article 35, ce fonds a bénéficié d'une
augmentation rapide de ses crédits ; ceux-ci sont passés
à 45 millions de francs pour 1998, 49,5 millions de francs en
1999 et
50,5 millions de francs
dans le projet de loi de finances
pour 2000, soit une augmentation de 2 %. Elle est répartie,
à hauteur de 25 %, au prorata de la diffusion globale par portage
et, à hauteur de 75 %, au prorata de sa progression au cours des
deux dernières années. Un certain nombre de titres
bénéficient ainsi d'une aide supérieure au million de
francs : Le Figaro, Libération et Le Monde pour les quotidiens
nationaux et le Courrier de l'Ouest, le Courrier Picard, La Dauphiné
Libéré, L'Est Républicain, le Midi Libre, la Montagne,
Nice Matin, la nouvelle République du Centre Ouest, Ouest France, le
Parisien, le Progrès de Lyon, Sud Ouest, le Télégramme de
Brest, L'Union, L'ardennais et la Voix du Nord. L'Est républicain, avec
4,511 millions de francs, Ouest France, avec 4,5 millions de francs
et le Dauphiné libéré avec 3,636 millions de francs
obtiennent les aides les plus importantes en 1999 dans la mesure où ils
bénéficient tout particulièrement de l'aide au
développement.
On peut rappeler que l'aide est réservée aux journaux
d'information politique et générale, de langue française,
paraissant au moins 250 fois par an et imprimés sur papier journal.
25 % de la dotation sont destinés à aider le stock d'exemplaires
portés, 75 % sont destinés à récompenser la
progression sur les deux années antérieures à
l'année d'attribution de l'aide.
2.375.000 francs ont été répartis au titre de l'aide
au stock. Les subventions ont été calculées sur la base
d'un taux unitaire de subvention résultant du rapport entre cette
dotation et le nombre d'exemplaires total portés par les candidats en
1998 (712.387.550). Le taux obtenu, 0,0174 F, est alors multiplié,
pour chaque bénéficiaire, par le nombre d'exemplaires qu'il a
portés en 1998.
37.125.000 francs ont été alloués en fonction des
exemplaires supplémentaires portés entre 1996 et 1997 d'une part,
entre 1997 et 1998, d'autre part, conformément au décret, 40%de
la progression 1996-1997 et l'ensemble de la progression 1997-1998 ont
été pris en compte pour le calcul des aides.
Au total, soixante journaux ont bénéficié de l'aide en
1999, à savoir :
7 quotidiens nationaux ont bénéficié de
7.242.012 F (14,6 % du total) ;
30 quotidiens régionaux ont reçu 36.587.066 F
(73,9 % du total). Trois d'entre eux n'ont pas émargé sur la
2
ème
part (Centre Presse Poitiers, Nord littoral, et La
Presse de la Manche).
c) Le fonds d'aide au multimédia
Ce
fonds, annoncé en 1996, avait été créé en
1997 mais non doté, car son financement devait provenir d'un transfert.
Géré par l'Institut pour le Financement du Cinéma et des
Industries Culturelles (IFCIC) ; il a pour objet d'accorder aux
entreprises de la presse écrite une avance partiellement remboursable,
à hauteur de 30 %, afin de permettre de développer des
projets offrant au public des accès aux contenus des journaux, magazines
et revues sur les nouveaux supports numériques.
Doté en 1998 de 15 millions de francs à l'article 36, ce
fonds n'a bénéficié que du maintien de sa dotation en 1999
en francs courants dans le projet de loi de finances pour 2000.
d) Les allégements de charges de télécommunication
L'article 10, " Communications
téléphoniques des
correspondants de presse ", des services généraux du Premier
Ministre, constitue un poste sensible. On peut rappeler que les crédits
avaient été présentés dans le projet de loi de
finances pour 1998 en diminution de près de 50 % ;
l'importance attachée par la presse à ce type d'aide, avait
conduit les assemblées à augmenter les crédits
prévus pour les porter à 26 millions.
Dans le projet de loi de finances 1999, cette dotation, désormais
affectée au remboursement des charges de fac-similé, avait
enregistré une forte baisse (-51,7 %) en passant de
21 à 6,6 millions de francs. Cela résulte du
décret n° 98-793 du 4 septembre 1998, qui a
instauré une aide aux fac-similé, suivant des modalités
compatibles avec le régime de concurrence entre opérateurs
téléphoniques entré en vigueur le
1
er
janvier 1998. Le fonds de remboursement des charges
fac-similé reprend ainsi une partie du périmètre de l'aide
à l'allégement des charges téléphoniques. Il est
doté de 6,6 millions de francs pour 1999, somme ramenée
à 6,5 millions de francs dans le projet de loi de finances pour
2000. On note que ce type d'aide bénéficie plus à la
presse nationale qu'à la presse régionale.
3. Les aides indirectes inscrites au budget des SGPM
a) Le remboursement à la SNCF des réductions de tarif accordées à la presse.
Comme
l'on sait, la SNCF accorde des réductions de tarifs aux publications
inscrites à la commission paritaire, réductions qui font l'objet
d'une compensation financière inscrite au présent budget.
Depuis le 1
er
janvier 1998, les taux de prise en charge
s'établissent à 70 % pour les quotidiens et à
22 % pour les périodiques.
L'article 10, "Réduction de tarif SNCF pour le transport de presse", des
crédits des services généraux du Premier Ministre, est
doté pour
101 millions de francs
de crédits dans le
projet de loi de finances pour 2000 contre 102 millions de francs en 1999
et 95 millions de francs en 1998. On note que la baisse est
considérable par rapport aux crédits inscrits en 1996 et 1997,
qui s'étaient élevés respectivement à 119 et
140,4 millions de francs.
Pour l'exercice 1998, la très forte augmentation du tonnage des
quotidiens - +53 %- et de leur coût de transport, non prévus
en début d'année aurait dû se traduire par une augmentation
substantielle de l'indemnité.
" Les explications fournies par
l'opérateur pour justifier ces progressions n'ayant pas semblé
satisfaisantes,
les pouvoirs publics ont résilié la convention
de 1998 et demandé au Sernam de prendre à sa charge le
différentiel constaté en 1998 entre les besoins - environ
104,4 millions de francs - et la dotation budgétaire de 95 millions
de francs.
"
La SNCF a, de son côté, fait valoir à votre rapporteur
spécial les efforts effectués conjointement par les distributeurs
de presse et la SNCF entre 1994 et 1997 pour rendre possible une baisse de
l'aide de l'État.
La très forte diminution du nombre des
dépositaires de presse, qui sont passés de 1200 à
350, a ainsi permis de faire passer l'aide de l'État de
206 à 140 millions de francs
. Le SERNAM met aussi en avant
le décalage entre la baisse modérée des tonnages entre
1999 et 1997, -8,7 % et le fort recul de 36 % du montant de la
subvention.
La SNCF fait en outre remarquer que pour l'année 1998 première
année d'application de la forfaitisation de l'aide, sur les
95 millions de francs de dotations budgétaires, il en était
prélevé
5 millions pour le remboursement de
l'arriéré, qui se montait à 47 millions de francs fin
1997
.
De même en 1999, sur 102 millions de francs de crédits
inscrits en loi de finances, 90 millions de francs étaient
affectés au transport et 12 millions de francs au remboursement de
la dette de l'État.
Votre rapporteur estime que les rapports entre la SNCF et l'État doivent
à cet égard être remis à plat et qu'il convient de
trouver rapidement un accord débouchant sur une nouvelle convention
tenant compte des coûts effectifs mais aussi du trafic réel
traité par la SNCF.
b) La contribution au plan social de la presse parisienne
Dotée de 26 millions de francs en 1996, cette aide a vu ses crédits réduits de presque 50 % dans les projets de loi de finances pour 1997 et 1998. Avant de se stabiliser en 1999 au niveau de 13,5 millions de francs , montant maintenu en francs courants dans le projet de loi de finances pour 2000.
c) Les abonnements à l'Agence France Presse
Le chapitre 34-95, abonnements souscrits par les administrations au service d'informations générales de l'AFP , des crédits des services généraux du Premier Ministre, est doté, en 2000., de 607,4 millions de francs contre 600,2 millions de francs en 1999 (et 588,7 millions en 1998), soit une croissance de 1,19 %. Ce budget de reconduction intervient à un moment où la nomination d'un nouveau président et d'une nouvelle stratégie suscite un certain nombre de remous au sein de l'organisme.
E. LE FONDS DE MODERNISATION
Créé par l'article 62 de la loi de finances pour
1998,
ce fonds, dont le support est le compte d'affectation spéciale
n°902-32, est abondé par le produit de la taxe de 1 % sur
certaines dépenses de publicité hors médias,
instituée par l'article 23 de la même loi de finances.
Le produit de cette taxe devrait se situer entre 130 et 140 millions de
francs pour l'année 1998 et sans doute à un niveau un peu
supérieur en 1999. Les crédits non utilisés en 1998,
actuellement estimés à 140 millions de francs, seront
reportés sur 1999.
La mise en oeuvre laborieuse de ce fonds fait l'objet d'observations de votre
rapporteur spécial dans la première partie de ce rapport.
F. BILAN DES AIDES INDIRECTES A LA PRESSE
Les
aides indirectes peuvent être évaluées à
près de 7,5 milliards de francs en 1999
, et sont à la
charge :
- de deux
entreprises publiques
(La Poste et la SNCF), à
hauteur des deux tiers,
- des
collectivités locales
, pour plus de 16 %, en
raison de l'exonération de la taxe professionnelle,
- de
l'État
, pour le solde, soit 16 %,
également, en raison d'une fiscalité adaptée à la
presse.
Les aides publiques à la presse en 1997, 1998 et 1999 (en millions de francs)
|
1997 |
1998 |
1999 |
I- Dépense fiscale de l'État en faveur de la presse |
|
|
|
1- Taux
super réduit de TVA (1)
|
1000 |
1200 |
1200 |
2-
Régime spécial de provisions pour investissement
|
210 |
150 |
150 |
II-
Dépense fiscale des collectivités
locales
|
1 190 (e) |
1 235 (e) |
1 206 (e) |
III- Aides indirectes des entreprises publiques |
|
|
|
1- Coût du transport postal supporté par La Poste |
3350 |
3252 |
3104 |
2- Contribution de l'État au service obligatoire de transport de presse par la poste |
1900 (3) |
1850 (3) |
1850 (3) |
TOTAL |
7 750 (e) |
7 687 (e) |
7 510 (e) |
(1)
Dépense fiscale calculée par rapport au taux réduit de
TVA de 5,5 %.
(2) estimation
Les
chiffres 1999 sont semblables à ceux fournis pour 1998. La
différence par rapport aux chiffres de l'an dernier résulte d'un
léger ajustement à la baisse du coût du transport postal,
ainsi que de la baisse de la contribution de l'État au service
obligatoire, qui passe de 1.900 à 1.850 millions de francs .
On note, en ce qui concerne l'aide postale, que celle-ci a été
réévaluée - comptablement - à la suite d'un rapport
de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection
générale des postes et télécommunications de 1996.
Elle s'élèverait ainsi à 3.292 millions de francs en
1995 et 3.498 millions de francs en 1996 et 3.350 seulement en
1997
. Pour 1997 et 1998, elle était estimée respectivement
à 3.252 et 3.104 millions de francs, chiffre maintenu pour
l'année 1999.
Les prévisions tiennent compte de la revalorisation tarifaire et de
l'effort de productivité, mentionné dans les accords
État/presse/Poste du 4 juillet 1996 et du 10 janvier 1997.
Ces accords État/presse/Poste ont permis de mettre en place une nouvelle
grille tarifaire : la grille précédente, outre les
subventions croisées qu'elle générait, était
considérée par La Poste et la presse comme peu incitative,
notamment dans la mesure où elle ne tenait pas suffisamment compte du
niveau de préparation des dépôts et du degré
d'urgence.
Il faut également rappeler, que, conformément aux accords de la
table ronde, un observatoire des tarifs postaux a été mis en
place en juin 1997. Il pourrait permettre aux publications les plus
fragilisées par l'application du nouveau dispositif tarifaire de
bénéficier de mesures particulières. Le financement du
dispositif sera assuré par la Poste à hauteur de 10 millions
de francs et 5 millions de francs en 1999 et 2000.
*
Au total, si, pour récapituler l'ensemble des aides de l'État, l'on additionne, d'un côté, les crédits budgétaires et, de l'autre, les aides indirectes (qui résultent en partie d'estimations), on aboutit, pour 1999, au total de 8.363 millions de francs.
III. LES ENJEUX À MOYEN TERME
La
presse, qu'elle soit nationale ou locale, générale ou
spécialisée, se développe dans un milieu ouvert,
évolutif. La diffusion croissante d'Internet,
l'accélération de la convergence avec le passage rapide au
" tout numérique " changent les données de la
concurrence pour la presse.
On a dépassé le stade où l'on pouvait opposer la presse
à la télévision, l'écrit à l'image. Les uns
comme les autres ne peuvent concevoir leur avenir que comme naturellement
multimédias.
D'où sans doute des revirements stratégiques qui résultent
de ce que la presse a compris qu'elle ne pouvait pas se replier sur son seul
marché traditionnel et qu'elle devait passer à l'offensive pour
mettre en valeur tout le savoir faire qu'elle a acquis dans l'écrit.
1. Les télévisions locales : un débouché naturel pour la presse ?
Longtemps les relations entre la presse et la
télévision ont été conçues de façon
simple voire simpliste comme un affrontement frontal dans le cadre d'un
processus de sélection quasi - darwinien : compétition pour
l'audience mais aussi compétition pour les recettes publicitaires.
L'évolution réglementaire liée à la mise en place
d'un véritable espace audiovisuel européen va faire sauter les
barrières censées protéger les recettes publicitaires de
la presse.
A l'heure actuelle, la grande distribution n'a pas accès aux
écrans de télévision - avec la presse elle-même et
le livre -. Ces réglementations, qui n'existent pas dans les autres pays
européens, devront à l'évidence évoluer. Or la
grande distribution représente 40% des recettes publicitaires de la
presse quotidienne de province.
Longtemps, la situation a paru bloquée jusqu'à ce que, sous la
pression des télévisions locales, dont l'économie est
particulièrement fragile comme en témoigne notamment le sort de
Télé Mont Blanc, on ait abordé la question d'une
évolution de la réglementation. Les esprit ont
évolué comme en témoignent les conclusions du rapport
présenté par MM. Michel Francaix et Jacques Vistel à
l'automne 1998, qui a estimé que la meilleure voie d'entrée de la
presse quotidienne régionale dans l'audiovisuel est constituée
par les télévisions locales et juge souhaitable que le CSA
examine avec une attention particulière les projets de
télévisions locales qui associeront la presse quotidienne
régionale, dans le respect du pluralisme.
En effet, l'intérêt qu'un nombre croissant de
télévisions locales portent désormais à des
développements dans les télévisions locales, change les
données de la question.
L'avènement annoncé du numérique terrestre devrait
faciliter la solution du problème en offrant à la presse des
possibilités de diffusion accrues.
La plupart des grands journaux régionaux ont fait connaître
récemment leur souhait d'être opérateurs d'un service de
télévision hertzien.
Ils ont compris que dans un contexte de
concurrence intense, la télévision représentait un champ
nouveau dans lequel ils pouvaient mettre en valeur leurs compétences.
Dans son rapport au Conseil économique et social sur les effets des
nouvelles technologies sur l'industrie de la presse, M. Jean Miot, estime qu'un
vingtaine de chaînes locales pourraient être créés
par la presse quotidienne régionale. Mais, ajoute-t-il, elles ne
pourront vivre qu'à la condition d'avoir " accès au
marché national de la publicité. "
Cette évolution soulève deux questions :
• le développement multimédias des journaux de la
presse quotidienne de province met-elle en question le pluralisme de
l'information au niveau local ? Votre rapporteur spécial estime
que, sous réserve de cas particuliers, le numérique va
entraîner une prolifération des chaînes qui ne peut que
faire considérer ce risque comme limité
1(
*
)
;
• l'économie des chaînes locales est-elle
assurée compte tenu du potentiel restreint des dépenses locales,
eu égard aux coûts d'une chaîne de télévision
locale ? Votre rapporteur spécial considère à cet
égard, d'une part que la technologie permet de produire des
émissions à faible coût - et que les frais facturés
par TDF sont bien souvent exorbitants - et d'autre part que les système
de syndication publicitaire comme celui préconisé autour des
projets portés par le Parisien est de nature à accroître
les ressources globales des chaînes locales.
Le rapport conclut sur ce sujet en affirmant :
" C'est en se
diversifiant, comme elle l'a déjà fait avec les gratuits et les
radios locales, que la presse régionale pourra conserver son
marché publicitaire, sur les télévisions de
proximité comme sur les sites Internet. "
2. Internet une nouvelle frontière pour la presse ?
Le
rapport du conseil économique et social déjà cité
démontre que la presse est en train de trouver dans Internet une
nouvelle frontière de développement.
La presse doit apprendre à s'insérer dans un espace, le
cyberspace, dans lequel chacun peut être consommateur et producteur
d'information. L'article est une sorte de planète qui, lorsqu'on
l'explore, renvoie à tout un ensemble d'autres planètes, base de
données, images, bande son vidéo, forum de discussion...
Pour le Conseil économique et social,
" La presse survivra
à condition qu'elle s'adapte. Les journaux continueront d'exister si les
éditeurs comprennent que le multimédia n'est pas un support de
substitution mais de complément. Le transfert du papier à
l'écran est voué à l'échec, sauf en matière
d'archives et de banques de données ".
C'est également l'avis de professionnels, qui ne manquent pas de
rappeler qu'on ne peut se contenter de transposer un journal tel quel sur
Internet. " Aujourd'hui la presse en ligne n'a pas pour vocation de capter un
lectorat nouveau, ni même de prolonger le contenu du support sur le Net,
mais bien d'apporter une prestation de service dynamique et qualitative ", note
l'enquête réalisée par Zenith Digital (Zenith Media),
intitulée " Quand la presse écrite fait de l'Internet ",
citée par le rapport du conseil économique et social...
La presse nationale s'est résolument lancée sur Internet :
Libération a lancé un site d'accès gratuit conçu
comme un moyen supplémentaire de développer les recettes
publicitaires du titre, Le Monde, en ligne depuis quatre ans, a investi
30 millions de francs dans sa filiale multimédia et vient de
restructurer totalement son site, quant au Parisien, il privilégie les
services pratiques " on line ", avec notamment 200.000 articles
consultables sur abonnement, une revue de presse payante et un programme
Cityguide, outil pratique destiné à aider les internautes dans
leurs choix de sorties en Ile-de-France. Chaque mois, le site du Parisien
enregistre 600.000 pages vues.
Les magazines ne sont pas en reste ; Elle, avec un million de pages vues
par mois, crée sans cesse de nouvelles fonctions destinées
à renforcer le lien de proximité créé avec ses
lectrices en développant notamment les forums de discussion, et en
offrant également la possibilité à chaque internaute de
créer sa page personnelle, Paris-Match, a lancé, à
l'occasion de son 50
ème
anniversaire, une nouvelle
version de ses pages Web (700.000 pages vues par mois), qui s'appuie sur
un concept de télévision en ligne avec pour objectif de prolonger
l'actualité autour d'un programme au contenu exclusif
La presse française va devoir changer de méthodes
commerciales : pour retenir l'internaute, il lui faut compléter le
contenu éditorial par des services pratiques. C'est donc un vrai
changement de métier. Il va falloir apprendre à investir dans le
marketing pour retenir l'internaute " zappeur ".
L'accès étant gratuit, la rémunération ne peut se
faire que par le trafic commercial généré par le
site :
la cible n'est plus seulement le lecteur mais le " consommateur
".
Les professionnels de l'information vont sans doute devoir se transformer en
commerçants électroniques et développer la vente de
services rattachés aux différentes rubriques du journal comme les
spectacles, les voyages ou les livres.
Le site Web offre des possibilités de ciblage, de personnalisation,
d'interactivité, incomparables avec le support papier. La
fidélisation sera celle attachée à la marque du titre.
*
Ce qui
est certain c'est que les perspectives offertes par Internet mais aussi le
défi concurrentiel qu'il constitue, va obliger la presse à
regrouper ses forces.
On l'a vu avec PQR 66 pour la syndication publicitaire, on le voit aujourd'hui
pour les petites annonces. Vingt-trois quotidiens régionaux vont unir
leurs petites annonces sur un même site, via la société "
France P. A. Presse ", permettant leur commercialisation et leur exploitation.
La société anonyme " France P. A. Presse " est en cours de
constitution. Son capital sera réparti entre les différents
groupes éditeurs en fonction de l'audience de leurs
publications
2(
*
)
.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 23 novembre sous la présidence de
M.
Alain Lambert, président
, la commission a, après que le
président eut salué la présence de MM. Louis de
Broissia et Jean-Paul Hugot, rapporteurs pour avis de la commission des
affaires culturelles, respectivement pour les crédits de la presse et de
la communication audiovisuelle procédé à
l'examen
des
crédits de la presse
pour
2000
, sur le rapport de
M. Claude Belot, rapporteur spécial
.
Après avoir indiqué que le système d'aide à la
presse donnait, dans l'ensemble, satisfaction à la profession et que ses
modalités répondaient au souci de garantir le pluralisme, le
rapporteur spécial a voulu, sans entrer dans une analyse
détaillée des dotations, insister sur trois questions.
Il a souligné que l'État continue de se comporter comme s'il
était possible de ponctionner les entreprises publiques, en oubliant de
les rémunérer au juste prix pour les services qu'elles
rendent : en l'occurrence, il s'agit de la SNCF - dont on connaît
les difficultés qu'elle rencontre pour équilibrer les comptes du
Sernam - qui se voit imposer par l'État un remboursement forfaitaire
déconnecté des quantités transportées,
indépendamment de l'arriéré de paiement dû par
l'État à ce titre.
Il a également attiré l'attention sur la laborieuse mise en route
du fonds de modernisation de la presse, à la fois parce que le rendement
de la taxe sur le hors médias qui le finance est plus faible que
prévu, et parce qu'il semble que l'État et la profession aient
rencontré quelques difficultés à se mettre d'accord sur
une politique et, en particulier, pour définir des critères
d'accès aux aides : finalement, près de deux ans
après le vote de la loi instituant la ressource et le fonds de
modernisation, aucune aide n'avait encore été distribuée.
Le rapporteur spécial a, en dernier lieu, évoqué la
situation de l'Agence France Presse. Il a rappelé que cette agence, qui
pesait il y a vingt ans le même poids que ses concurrents anglo-saxons,
Associated Press, et Reuters, ne représente plus que 5 % du chiffre
d'affaires de cette dernière, faute d'avoir su se diversifier dans
l'information économique.
Il a insisté sur le fait que son statut actuel constituait un
mélange des genres qui rendait l'agence inadaptée à la
compétition économique : tandis qu'on trouve, au sein de son
conseil d'administration, les clients de l'agence que sont les journaux,
l'État, qui assure pourtant directement ou indirectement près de
la moitié des recettes, n'y figure pas, même s'il est
évident que le nouveau président de l'AFP a
bénéficié de son appui pour être élu.
Pour le rapporteur spécial, l'agence se comporte comme un navire
à la dérive, au point que l'accomplissement de la mission
fondamentale de l'AFP, qui est d'apporter un regard français sur le
monde, paraît menacé.
Après que M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission
des affaires culturelles pour les crédits de la presse, fut intervenu
pour indiquer qu'il partageait les orientations manifestées par le
rapporteur spécial, M. Claude Belot a, en réponse à M.
Philippe Marini, rapporteur général, indiqué qu'il avait
l'intention en sa qualité de rapporteur spécial de se pencher sur
la situation de l'AFP, compte tenu des craintes que suscite l'avenir de cet
organisme chez tous ceux qui sont attachés à une certaine
idée du service public.
A l'issue du débat, le rapporteur spécial a émis un
avis favorable
aux
crédits de la presse
.
Réunie le mardi 23 novembre 1999 sous la présidence de
M. Alain Lambert, président, la commission a examiné les
crédits
du
budget
de la
Presse
, sur le rapport de
M. Claude Belot,
rapporteur spécial.
A l'issue de cet examen, elle a confirmé sa proposition de rejeter les
crédits des services généraux du Premier ministre.
Elle a, à nouveau, confirmé cette position lors d'une
réunion tenue le jeudi 25 novembre 1999, après avoir pris
acte des modifications apportées par l'Assemblée
nationale.
1
Ces interventions sont encadrées
par
le dispositif anti-concentration prévu par l'article 41-2 de la loi du
30 septembre 1986 relatif à la prohibition du cumul multimédia
régional ou local. Dans une même zone géographique
déterminée, un groupe de presse local éditeur d'un
quotidien d'information politique et générale ne peut se trouver
dans plus d'une des situations suivantes :
- être titulaire d'une ou plusieurs autorisations relatives à des
services de télévision, à caractère national ou
non, diffusés par voie hertzienne terrestre dans la zone
considérée ;
- être titulaire d'une autorisation relative à un service
radiophonique dont l'audience potentielle est supérieure à 10 %
des audiences potentielles cumulées dans la même zone de
l'ensemble des services, publics ou autorisés, de même nature ;
- être titulaire d'une ou plusieurs autorisations relatives à
l'exploitation de réseaux distribuant par câble à
l'intérieur de cette zone des services de radiodiffusion sonore et de
télévision.
2
L'Alsace, Le Bien public, Le Journal (le Saône-et-Loire, Le
Dauphiné libéré, La Dépêche du Midi, Les
Dernières Nouvelles d'Alsace, l'Est républicain, La Montagne, Le
Populaire du Centre, Le Journal du Centre, Le Berry républicain,
Midi-Libre, L'indépendants Nice-Matin, La Nouvelle République du
Centre-Ouest, Le Parisien, Le Progrès, La Provence, Le
Républicain lorrain, Sud-Ouest, Charente libre, Le
Télégramme de Brest, et La Voix du Nord