N° 89
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME II
Fascicule 1
LES CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER
(
Première partie de la loi de finances
)
(Volume 1 : examen des articles)
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1805
,
1861
à
1866
et T.A.
370
.
Sénat
:
88
(1999-2000).
Lois de finances. |
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS
GÉNÉRALES
DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. - IMPÔTS ET REVENUS AUTORISÉS
A. - Dispositions antérieures
ARTICLE PREMIER
Autorisation de percevoir les impôts
existants
Commentaire : le présent article consacre l'autorisation
annuelle de percevoir les impôts et produits existants et fixe, comme
chaque année, les conditions de l'entrée en vigueur des
dispositions qui ne comportent pas de date d'application
particulière.
Cet article rappelle que l'autorisation de l'impôt est à
l'origine même de l'institution parlementaire.
Il s'applique aux impôts, produits et revenus affectés à
l'Etat, aux collectivités territoriales, aux établissements
publics et organismes divers habilités à les percevoir.
L'article 4 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959
portant loi organique relative aux lois de finances dispose en effet en son
premier alinéa que : "
l'autorisation de percevoir les
impôts est annuelle ".
Il convient d'observer que, comme à l'accoutumée, le
présent article a une portée partiellement rétroactive
puisqu'il dispose que la loi de finances s'applique :
- à l'impôt sur le revenu dû au titre de 1999 et des
années suivantes, ce qui explique que la loi de finances de
l'année " n " fixe le barème de l'impôt sur les
revenus perçus l'année " n - 1 " ;
- de la même façon, s'agissant des sociétés,
à l'impôt dû sur leurs résultats des exercices clos
à compter du 31 décembre 1999, ce qui, pour un grand nombre
d'entre elles, se traduit par une imposition sur des activités
antérieures à l'année n.
Il est également précisé que cette
" loi de
finances s'applique à compter du 1
er
janvier 2000 pour
les autres dispositions fiscales "
et cela
" sous
réserve de dispositions contraires "
qui en l'espèce
figurent notamment à l'article 3 du présent projet de
loi
1(
*
)
.
Cette rétroactivité partielle est néanmoins
inévitable, car il ne serait pas concevable que le Parlement se prive de
toute marge de manoeuvre pour faire évoluer la fiscalité,
notamment dans le cadre d'un changement de politique générale.
Mais elle ne doit pas être confondue avec une forme de
rétroactivité différente trop souvent utilisée par
bien des gouvernements : celle qui consiste à revenir sur la parole de
l'Etat en remettant en cause les engagements pris par celui-ci à
l'égard d'épargnants ou d'investissements dont les
décisions résultent du contexte fiscal qui leur est promis pour
une période déterminée.
A la suite de travaux menés sur cette question de la
rétroactivité, votre rapporteur général a
déposé, le 4 novembre 1999, deux propositions de loi
2(
*
)
visant à limiter le recours
aux dispositions fiscales rétroactives, eu égard à la
nécessité de préserver le principe de
sécurité juridique applicable en ce domaine.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
B. -
Mesures fiscales
ARTICLE 2
Barème de l'impôt sur le revenu
Commentaire : le présent
article procède
à l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu, ainsi
que de certains seuils associés.
Cet article a pour objet d'actualiser de façon tout à fait
classique le barème de l'impôt sur le revenu, ainsi que de
certains seuils ou plafonds associés au calcul de l'impôt sur la
base de la hausse des prix (hors tabac) prévue pour 1999, soit 0,5%.
C'est ainsi que, au paragraphe 1 de cet article, le 1°, a pour objet de
relever de 0,5% les montants des seuils de l'article 197 du code
général des impôts, tandis que, toujours au même
paragraphe, le 2° tend à actualiser, sur les mêmes bases, le
plafond de l'avantage maximal résultant de la demi-part de quotient
familial qui passe de 11.000 à 11.060 francs, et le 3 ° la
décote, qui est portée de 3.330 à 3.350 francs. Enfin, le
paragraphe II actualise l'abattement accordé au contribuable par
personne prise en charge au titre de l'article 196 B du code
général des impôts.
En outre, à l'initiative de la commission des finances de
l'Assemblée nationale, ont également été
actualisés deux autres seuils par voie d'amendement au 2° du
paragraphe 1 du présent article, dont l'ajustement avait
été " omis " dans le projet de loi de finances
déposé par le gouvernement sur le bureau de l'Assemblée
nationale.
Il s'agit, d'une part, du montant maximum de la réduction d'impôt
supplémentaire accordée aux personnes seules invalides, veuves ou
anciens combattants qui passe ainsi de 5.380 à 5.410 francs, et, d'autre
part, du plafond de l'avantage fiscal résultant de la demi-part
supplémentaire bénéficiant aux contribuables isolés
ayant eu des enfants à charge, mais n'en ayant plus au-delà de
l'année du vingt-sixième anniversaire du dernier né, qui
est porté de 6.100 à 6.130 francs.
Examinant les perspectives d'évolution des recettes fiscales pour l'an
2000, qui passeraient de 320 milliards à 333,2 milliards de francs soit
une hausse de 13,2 milliards de francs,
le rapport de M. Didier Migaud
estime, à juste titre, qu'une réflexion s'impose sur l'indexation
du barème.
Il fait d'abord remarquer que l'indexation actuelle s'effectue sur la base de
l'indice des prix hors tabac et que l'écart traditionnel de 0,1% entre
cet indice et l'indice général aboutit sur une période de
cinq ans à une augmentation de la charge fiscale d'environ 1 à
2,5 milliards de francs. Mais il souligne - et il s'agit comme le note le
rapport d'une " remarque d'un autre ordre " - que
"
l'indexation du barème sur l'évolution des prix et non
sur celle du revenu disponible des ménages contribue également
à renforcer le poids intrinsèque de l'impôt sur le revenu
par rapport aux autres prélèvements
".
Le problème de l'indexation n'a pas échappé à votre
rapporteur général qui avait ainsi fait remarquer dans le rapport
sur le projet de loi de finances pour 1999 que, "
une simple indexation
sur les prix permet à l'État, par le jeu de la
progressivité de l'impôt, de toucher les dividendes de
l'augmentation de pouvoir d'achat des Français
". Car telle
est bien la question que pose un barème fortement progressif comme celui
en vigueur dans notre pays, surtout lorsqu'il s'applique à des revenus
gonflés par le retour de la croissance.
Le problème est de définir un mode d'indexation qui aille au
delà d'une simple articulation sur les prix. Tandis que
l'Assemblée nationale s'oriente vers un mode d'indexation tendant
à proportionner le prélèvement résultant de
l'impôt sur le revenu à la croissance de l'assiette, votre
commission des finances recherche un système qui
limite le
phénomène de captation des fruits de la croissance par le budget
de l'État
.
Pour l'Assemblée, la
" modalité d'indexation du
barème et des seuils associés a priori la plus équitable
serait celle qui assurerait une croissance du produit de l'impôt
égale à celle du revenu disponible brut des impôts, hors
effets dus aux différentes règles affectant ou modifiant
l'assiette et les taux de l'impôt
".
La méthode a sa cohérence mais présente, selon votre
rapporteur général, des inconvénients liés à
l'agrégat de référence. Parce qu'il comprend les
transferts sociaux, parce qu'il dépend de l'évolution des minima
sociaux, parce qu'il subit enfin les effets de la fiscalité,
le
revenu disponible peut apparaître comme une grandeur volatile
ou du
moins relativement dépendante de la politique gouvernementale. Le risque
de " circularité " est d'ailleurs suffisamment net pour que le
rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale ait pris
la peine, comme on l'a vu, de préciser qu'il fallait les corriger des
variations de la fiscalité.
Pour votre commission des finances, il s'agit
non pas de trouver un
agrégat représentatif de l'assiette de l'impôt sur le
revenu, mais
de tenir compte
dans l'évolution du barème
de l'accroissement du revenu réel des Français
. La
solution la plus évidente à cet égard est de faire
référence au
taux de croissance du produit intérieur
brut, agrégat à la fois simple et prévisible
.
L'idée directrice est de
mettre en place un système
d'indexation garantissant un partage des fruits de la croissance entre
l'État et les citoyens/contribuables
. Pratiquement, il s'agirait
d'ajouter à la traditionnelle indexation sur les prix, cette
année égale à 0,5 %, un élément égal
à la moitié de la croissance prévue pour 1999 soit 1,15 %.
Le système a le mérite d'une certaine simplicité.
On note que le coût de la mesure de l'ordre de 4,6 milliards de francs
est inférieur à celui de l'indexation sur le revenu disponible
envisagé par la commission des finances de l'Assemblée nationale,
soit 9,75 milliards de francs.
Tel est l'objet de l'amendement qu'elle vous propose d'adopter à cet
article, qui par coordination avec les mesures qu'elle vous proposera par voie
d'article additionnel avant l'article 2 bis en matière de
fiscalité de la famille, comporte également la suppression du
paragraphe II de cet article.
Décision de votre commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi amendé.
ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 2
bis
Aménagements de l'impôt sur le revenu favorables
à la famille
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet de prévoir divers aménagements ponctuels favorables
à la famille et aux solidarités privées :
rétablissement à 16.380 francs du plafond de l'avantage fiscal
résultant d'une demi-part de quotient familial pour les familles n'ayant
qu'un enfant à charge ; possibilité de rattachement au foyer
fiscal des enfants à la recherche d'un emploi ;
élévation à 22.000 francs du montant fixé à
l'article 196 B du code général des impôts pour
l'abattement dont bénéficient les enfants rattachés ;
abaissement à 60 ans de l'âge minimal à partir duquel la
personne recueillie ouvre droit à la déduction prévue
à l'article 156 II 2° ter.
L'année dernière le gouvernement a été amené
à compenser le rétablissement de l'universalité des
allocations familiales qu'il venait de supprimer par un abaissement du plafond
de l'avantage fiscal consécutif au quotient familial, qui est ainsi
passé de 16.380 francs à 11.000 francs.
Ces mesures, qui s'analysent non seulement comme un coup porté aux
familles mais aussi plus généralement comme un renforcement de la
fiscalité sur les hauts revenus, constituent une erreur manifeste
d'appréciation.
Il ne vous est pas proposé de revenir sur un dispositif
déjà voté, mais, simplement, de supprimer certains effets
collatéraux, objectivement indésirables
:
• premièrement, il est suggéré
de
rétablir, pour les couples n'ayant qu'un seul enfant à charge,
l'ancien plafond de
l'avantage résultant de la demi-part de quotient
familial soit
16.380 francs
. Il s'agit d'une mesure de justice, car ces
familles ne bénéficient pas du rétablissement des
allocations familiales ;
• deuxièmement, votre commission souhaite que
la
possibilité de rattachement au foyer fiscal soit offerte non seulement
aux enfants étudiants mais également à ceux, trop
nombreux, à la recherche d'un emploi
;
• troisièmement, il est demandé le
relèvement
de 20.370 francs (20.480 francs pour les revenus de 1999 dans le présent
projet de loi de finances)
à 24.000 francs du seuil de l'article 196
B
, qui fixe le montant de l'abattement ou le plafond de
déductibilité des pensions alimentaires;
ce régime de
l'abattement serait applicable de plein droit à tous les enfants de plus
de vingt ans, étudiants ou à la recherche d'un emploi,
domiciliés chez leur parent
et plus aux seuls enfants mariés
ou ayant eux-mêmes des enfants à charge.
Votre commission est consciente de ce qu'un tel régime d'abattement
serait plus favorable que le mécanisme de quotient familial
plafonné à 11.000 francs mais tient à souligner qu'il
s'applique à des
jeunes adultes
qui entraînent le plus
souvent des charges plus importantes pour les familles. Elle ajoute
que
l'extension du système de l'abattement simplifierait les
déclarations des contribuables,
qui, sur la base de 2.000 francs par
mois, pourraient procéder à une telle déduction sans le
tracas d'avoir à fournir des justificatifs, toujours fastidieux à
rassembler,
facilitant
du même coup
la tâche des services
fiscaux
.
Elle insiste enfin sur le fait que l'on permettrait de
revenir
en partie
sur certains effets pervers de l'abaissement
de 30.330 à 20.370
francs
de ce seuil, du point de vue la taxe d'habitation
; comme
l'a d'ailleurs reconnu le rapporteur général de la commission des
finances de l'Assemblée nationale, puisque la majoration du revenu
fiscal de référence résultant de cette mesure (9.960
francs par enfant) peut entraver les mécanismes de
dégrèvement d'office - lui-même plafonné - existant
pour la fraction de la taxe d'habitation excédant 3,4% du revenu.
• Enfin, votre commission vous propose
d'encourager le
développement des solidarités privées
- et en tout
premier lieu des collatéraux - en
favorisant l'accueil au domicile
des personnes âgées, en abaissant de 75 à 60 ans
l'âge à partir duquel les personnes recueillies au foyer ouvrent
droit à la déduction de 17.680 francs
, fixée par
référence à l'évaluation forfaitaire des avantages
en nature retenue en matière de sécurité sociale. On note
que cette mesure reste - malheureusement - d'une portée restreinte,
puisque la personne recueillie doit avoir un revenu imposable qui
n'excède pas le plafond de ressources fixé pour l'octroi des
allocations supplémentaires du Fonds National de solidarité.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE 2 bis (nouveau)
Fixation des seuils
d'assujettissement à l'impôt sur le revenu des indemnités
versées aux salariés ou aux mandataires sociaux à
l'occasion de la cessation de leurs fonctions
Commentaire : le présent article, issu d'un
amendement
de M. François Hollande, a pour objet de déterminer les
seuils d'assujettissement à l'impôt sur le revenu des
indemnités versées aux salariés ou aux mandataires sociaux
d'une entreprise, à l'occasion de la cessation de leurs fonctions. Si
l'intention poursuivie est compréhensible dans la mesure où il
s'agirait d'améliorer la sécurité juridique, la fixation
d'un seuil d'imposition en valeur absolue, quel que soit son montant, porte
gravement atteinte au principe selon lequel les indemnités
représentatives de dommages-intérêts ne sauraient
être soumises à l'impôt sur le revenu.
Le dispositif prévu par le présent article et codifié
à l'article 80
duodecies
nouveau du code
général des impôts, propose de fixer dans la loi les seuils
d'assujettissement à l'impôt sur le revenu des indemnités
versées lors de la rupture du contrat de travail d'un salarié ou
de la cessation forcée des fonctions d'un mandataire social.
Il procède pour cela par étapes :
- en premier lieu, il valide législativement la pratique actuelle de
l'administration qui considère, sur le fondement de la jurisprudence,
qu'à concurrence de leur fraction conventionnelle (ou à
défaut légale), les indemnités ne doivent pas être
soumises à l'impôt sur le revenu, dans la mesure où elles
visent à réparer un préjudice autre que la perte de
revenus ;
- dans un deuxième temps, il considère que lorsque les
indemnités versées excèdent les seuils mentionnés
à l'alinéa précédent, elles doivent demeurer
exonérées à concurrence, soit de l'équivalent de
deux années de revenu brut, soit de la moitié du montant de
l'indemnité reçue ; il est ainsi implicitement sous-entendu
qu'à concurrence de ces seuils, les indemnités ont la
caractère de dommages-intérêts non imposables ;
- mais, dans un troisième temps, il dispose que toutes les
indemnités qui excèdent un montant fixé en valeur absolue
à 2,35 millions de francs doivent être fiscalisées,
même si leur montant est inférieur aux seuils mentionnés
à l'alinéa précédent.
Il convient enfin de noter que l'assujettissement de ces indemnités
à l'impôt sur le revenu emporte leur soumission aux cotisations de
sécurité sociale, ainsi que le prévoit l'article 2 A
du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.
Votre commission considère qu'en dépit de son caractère
ad hominem,
le présent dispositif présente l'avantage
appréciable de fixer dans la loi le régime fiscal des
indemnités de rupture de contrat qui était jusqu'à
présent laissé à l'appréciation de
l'administration, sous le contrôle du juge. Il évite ainsi les
désagréments liés aux fluctuations de la doctrine et
améliore la sécurité juridique des citoyens.
En outre, il reste relativement généreux puisque les seuils
d'exonération prévus, en proportion du salaire brut annuel ou de
l'indemnité versée, s'avèrent supérieurs aux seuils
qui ressortent jusqu'à présent de la jurisprudence du Conseil
d'Etat. De surcroît, le caractère proportionnel des seuils retenus
permet de maintenir un lien entre le montant fiscalisable des indemnités
et la situation personnelle de chaque salarié ou mandataire.
Toutefois, votre commission considère que la fixation d'un seuil
d'imposition en valeur absolue, quel que soit son montant, porte gravement
atteinte au principe selon lequel les indemnités qui ont le
caractère de dommages-intérêts ne sauraient être
soumises à l'impôt sur le revenu. Elle ouvre ainsi une
brèche dangereuse susceptible de conduire à la fiscalisation de
toutes les indemnités ayant valeur de réparation globale et
octroyées à la suite de la réalisation d'un sinistre ou
d'un accident. Elle risque en outre de compromettre les restructurations
d'entreprises en rendant plus difficile les changements nécessaires
à la tête des sociétés concernées.
En conséquence, votre commission vous proposera de supprimer le plancher
en valeur absolue et, d'autre part, de mettre fin au caractère
rétroactif du dispositif.
I. LE RÉGIME FISCAL ET SOCIAL ACTUEL DES INDEMNITÉS
DE RUPTURE DE CONTRAT
A. RÉGIME FISCAL
1. Indemnités de licenciement
En principe, toute somme perçue d'un employeur à l'occasion de la
rupture du contrat de travail constitue une rémunération
imposable. Toutefois, s'appuyant sur la jurisprudence du Conseil d'Etat,
l'administration
3(
*
)
considère que
la fraction des indemnités de licenciement qui a
pour objet la réparation d'un préjudice exceptionnel autre que la
perte de revenus
(préjudice moral ou professionnel notamment)
bénéficie d'une exonération
.
Pour simplifier, il est admis, en toute hypothèse, que la partie de
l'indemnité de licenciement correspondant au
minimum fixé par
la convention collective de branche
ou
par l'accord professionnel ou
interprofessionnel ou, à défaut,
par la loi,
est
représentative de dommages-intérêts
et
n'est
donc
pas imposable.
Lorsqu'une indemnité plus élevée est versée en
vertu d'un accord particulier (contrat de travail, transaction, etc.) ou d'une
décision de l'employeur,
le surplus est imposable sauf s'il est
établi que l'indemnité répare un préjudice autre
que la perte de salaires
.
En outre, le salarié conserve toujours la possibilité de faire
valoir ses droits par la voie contentieuse s'il estime que le préjudice
subi est plus important que celui dont il a été tenu compte dans
la détermination de la base imposée. L'existence d'un
préjudice autre que la perte de salaires est une question de fait que le
Conseil d'Etat apprécie
au cas par cas
.
Pour cela, le juge prend généralement en compte :
- l'ancienneté et l'âge du salarié au moment du
licenciement ;
- les fonctions qu'il occupait ;
- les conditions du licenciement : brutalité de la rupture,
atteinte à la réputation ;
- les troubles causés dans les conditions d'existence du salarié
licencié : difficultés prévisibles de
réinsertion, perte d'une certaine situation sociale, obligation de
changer de résidence, perte de la possibilité d'augmenter ses
droits à la retraite ou du bénéfice de régimes
surcomplémentaires de retraite propres à l'entreprise, perte du
droit du conjoint à percevoir une pension d'entreprise au cas où
le salarié viendrait à décéder à l'occasion
de son service ;
- l'existence d'une transaction et ses termes.
Ces différents critères sont appréciés au cas par
cas, pour chaque salarié, même s'il s'agit d'un licenciement
collectif dans le cadre d'un plan social.
L'administration admet également l'
exonération
des
dommages-intérêts alloués par les tribunaux
en cas de
licenciement sans cause réelle et sérieuse ou abusif ou en cas
d'inobservation de la procédure de licenciement,
ainsi que de
l'indemnité spéciale de licenciement
versée aux
salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie
professionnelle.
Les indemnités de départs volontaires sont en revanche imposables.
On notera que dans le cas où au delà de la partie destinée
à réparer la perte du salaire (imposée on l'a vu, comme un
salaire), une indemnité ne correspond à aucun préjudice,
ce surplus est imposable comme des revenus mobiliers. Il doit être
rapporté au bénéfice imposable de la société
et taxé, par voie de concurrence, comme revenus mobiliers sans avoir
fiscal, lorsque la société versante est passible de l'impôt
sur les sociétés.
Par ailleurs, la partie imposable de l'indemnité de licenciement peut
bénéficier, sur demande du contribuable, du système du
quotient prévu à l'article 163-0 A du CGI, quel que soit son
montant.
2. Le cas des dirigeants de sociétés
Le président, le directeur général et les administrateurs
des sociétés de type classique ainsi que les membres du conseil
de surveillance des sociétés anonymes de type nouveau sont
révocables sans que la décision ait besoin d'être
justifiée. Ils ne peuvent donc, en règle générale,
prétendre à des dommages-intérêts lorsqu'il est mis
fin à leurs fonctions. L'ensemble des sommes qui leur sont
versées à l'expiration de leur mandat entre donc, en principe,
dans le champ d'application de l'impôt.
En revanche, les membres des directoires et les gérants minoritaires de
sociétés à responsabilité limitée peuvent
percevoir des dommages-intérêts à la suite d'une
révocation n'intervenant pas pour un juste motif. Les sommes
attribuées par les tribunaux, à titre de réparation du
préjudice, ont le caractère de gain en capital, non passible de
l'impôt sur le revenu au nom des intéressés.
B. RÉGIME SOCIAL
1. Les indemnités de rupture de contrat entrent pour partie dans
l'assiette de la CSG et de la CRDS
Dans l'état actuel du droit, les indemnités versées lors
de la rupture d'un contrat de travail sont soumises à la cotisation
sociale généralisée
4(
*
)
(CSG) et à la contribution
pour le remboursement de la dette sociale
5(
*
)
(CRDS) pour la fraction qui
excède " le montant prévu par la convention collective de
branche, l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à
défaut, par la loi ".
L'assiette de la CSG a en effet été alignée sur celle de
la CRDS par la loi de financement de la sécurité sociale pour
1997
6(
*
)
.
On notera qu'en vertu d'une circulaire du 2 février 1996 relative
à la CRDS sur les revenus d'activité et de remplacement, les
indemnités de licenciement prévues dans le contrat de travail ou
déterminées dans un accord d'entreprise ne donnent lieu à
exonération que pour la part de l'indemnité versée
conformément à la convention collective ou à l'accord
professionnel ou interprofessionnel éventuellement applicable, ou,
à défaut, par la loi.
On observera également que la même circulaire substitue à
la notion de " montant prévu ", celle de montant minimum. Or,
une telle interprétation n'est pas sans conséquences dans le cas
où la loi renvoie à l'accord des parties, au juge ou à un
organisme professionnel, le soin de déterminer, au vu des circonstances
propres à chaque cas, le montant de l'indemnité due. Tel est le
cas des dommages - intérêts pour licenciement abusif, des
dommages-intérêts pour rupture anticipée par l'employeur du
contrat à durée indéterminée, de l'indemnité
de clientèle des VRP, ou de l'indemnité de licenciement des
journalistes ayant plus de quinze ans d'ancienneté.
On peut regretter que l'administration ait adopté cette
interprétation contestable tant au plan de l'équité (la
fraction ainsi assujettie à CRDS est celle qui répare un
préjudice aggravé) qu'au regard du texte de l'ordonnance du
24 juillet 1996 (le montant " prévu " par la loi est
celui fixé dans chaque cas et non le minimum).
2. La fraction des indemnités de rupture de contrat correspondant
à des dommages et intérêts n'entre pas dans l'assiette des
cotisations sociales
Pour établir la nature des indemnités de rupture de contrat au
regard des cotisations sociales, le juge distingue tout d'abord les
indemnités légales ou conventionnelles de licenciement - qui
ne sont pas soumises à cotisations sociales -, et les
indemnités négociées ou transactionnelles - qui
peuvent être soumises à cotisations. Le juge opère ensuite
un
distinguo
entre les indemnités qui ont le caractère de
dommages-intérêts et les indemnités qui constituent des
rémunérations au regard du travail accompli.
En vertu d'une jurisprudence bien établie, les indemnités
conventionnelles ou légales de licenciement ne sont pas assujetties aux
cotisations de sécurité sociale
.
A la différence de l'indemnité compensatrice de préavis
correspondant à la rémunération du travail qu'aurait
accompli le salarié s'il était resté au service de son
employeur pendant la durée du délai-congé, les
indemnités de licenciement sont destinées à
réparer, en fonction de l'ancienneté, le préjudice qu'a
subi le travailleur du fait de la perte de son emploi et ne constituent pas un
supplément de rémunération versé à raison ou
à l'occasion du travail. En conséquence, elles ne sont pas
soumises à cotisations. Ainsi en a jugé la Cour de cassation a
plusieurs reprises.
Dans un arrêt n° 661 du 9 juin 1966
7(
*
)
, la chambre civile de la Cour de
cassation a ainsi estimé qu'
" une indemnité de
licenciement, bien qu'elle ait pour origine le contrat, constitue non un revenu
mais des dommages et intérêts, c'est-à-dire la
réparation d'un préjudice, ce qui ne saurait être
assimilé à un revenu quel qu'il soit ".
De même, les indemnités versées par l'employeur aux
salariés qui
acceptent de quitter volontairement
l'entreprise
et qui ont, comme les indemnités légales ou
conventionnelles de licenciement, le caractère de
dommages-intérêts
compensant le préjudice
résultant de la rupture de leur contrat de travail et la perte
prématurée de leur emploi ne doivent pas être incluses dans
l'assiette des cotisations de sécurité sociale
8(
*
)
.
Le juge a ainsi considéré qu'un salarié subit du fait de
la cessation prématurée de son activité dans le cadre d'un
plan social, qui constitue une forme atténuée de licenciement, un
préjudice matériel et moral ; dès lors,
l'indemnité qui lui est versée a pour objet de réparer ce
préjudice et ne constitue pas la rémunération d'un
travail
9(
*
)
.
Il en est de même pour l'indemnisation volontaire supplémentaire
allouée aux salariés en raison de leur acceptation d'un
départ anticipé de l'entreprise, qui, selon le juge,
présente le caractère de dommages-intérêts.
On notera donc avec intérêt que les
sommes allouées
à titre transactionnel
à des salariés qui renoncent en
contrepartie à réclamer des dommages-intérêts pour
rupture injustifiée du contrat de travail ne sont pas soumises à
cotisations sociales,
même pour la part de ces sommes qui
excède le montant de l'indemnité conventionnelle de
licenciement
.
Toutefois, le juge est tenu de rechercher si la somme versée dans le
cadre d'une transaction n'englobe pas des éléments de
rémunération soumis à cotisations, quelle que soit la
qualification retenue par les parties.
En revanche, les sommes versées par l'employeur lors de la
démission d'un salarié n'ont pas, en principe, la nature de
dommages-intérêts, sauf s'il est établi qu'en
réalité, la rupture du contrat de travail a été
provoquée par l'employeur
et que les sommes versées
réparent le préjudice né de la perte de l'emploi.
La Cour de cassation a, par exemple, jugé que l'indemnité
versée à un directeur général à l'occasion
de son départ de la société qui ne constitue ni le
dédommagement d'une révocation qui serait intervenue dans des
conditions abusives, ni la réparation d'un préjudice qui serait
résulté pour lui de la cessation forcée de ses fonctions,
constitue un élément de rémunération soumis
à cotisations
10(
*
)
.
3. Le cas des indemnités versées aux mandataires sociaux
S'agissant des mandataires sociaux, les tribunaux ont jugé que les
dommages-intérêts alloués par décision de justice au
président-directeur-général d'une société
anonyme en réparation du préjudice subi du fait de la
révocation de son mandat social ne sont pas soumises à
cotisations
11(
*
)
.
II. LE DISPOSITIF " HOLLANDE - CAHUZAC "
A. LE DISPOSITIF FISCAL PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT
ARTICLE
Le présent article, qui insère un article
80
duodecies
nouveau dans le code général des
impôts, est composé de deux volets.
Le
premier volet
détermine les seuils d'assujettissement à
l'impôt sur le revenu des indemnités de rupture du contrat de
travail des
salariés.
Le
second
règle le régime fiscal des indemnités de
toutes natures versées aux
mandataires sociaux et dirigeants de
sociétés
à l'occasion de la cessation de leurs
fonctions. Il distingue lui-même deux cas : celui du départ
volontaire des mandataires, qui occasionne le traitement fiscal le moins
favorable, et celui de la cessation forcée des fonctions, qui ne
provoque taxation qu'au delà d'un plafond de 2,35 millions de francs.
1. Le cas des salariés
Le premier paragraphe du 1 de l'article 80
duodecies
nouveau pose le
principe de
l'assujettissement
à l'impôt sur le
revenu du montant des indemnités de licenciement qui excède
la fraction conventionnelle ou légale de ces indemnités
.
Cette disposition transpose donc la doctrine administrative selon laquelle les
sommes qui excèdent les montants légaux ou conventionnels sont
censées représenter le
préjudice financier
résultant de la perte de salaires, et constituent à ce titre une
rémunération imposable.
Toutefois, le deuxième paragraphe du 1 atténue sensiblement ce
principe en portant la fraction exonérée des indemnités de
licenciement à au moins le double du salaire de l'année qui
précède le licenciement.
Il prévoit néanmoins un
plancher général
d'imposition
pour les sommes qui excèdent
2,35 millions de
francs
, seuil correspondant à la moitié de la limite de la
première tranche du tarif de l'impôt de solidarité sur la
fortune.
Au total, le dispositif serait le suivant :
• Les indemnités de licenciement seraient, en toute
hypothèse,
exonérées
à hauteur de la
fraction correspondant au montant prévu par la convention collective de
branche, l'accord professionnel, ou à défaut, par la
loi
12(
*
)
. Cette disposition est
cohérente avec la jurisprudence invariable du Conseil d'Etat selon
laquelle cette fraction est représentative de
dommage-intérêts
censés réparer un
préjudice autre que la perte de salaires. Elle ne doit donc pas
être fiscalisée.
• Au delà, les indemnités ne seraient imposables que pour
la fraction qui excède la plus grande des deux sommes suivantes :
- soit le double de la rémunération brute perçue
l'année précédant la rupture du contrat de travail ;
- soit la moitié des indemnités de licenciement versées.
Ce deuxième seuil vise probablement à faire face à
l'hypothèse où le salarié serait dans l'entreprise depuis
moins d'un an.
Autrement dit, les indemnités de licenciement seraient soumises
à impôt, soit pour la moitié de leur montant, si ce dernier
excède le double de la rémunération brute perçue
l'année précédente ou si le salarié est
licencié avant un an, soit pour la fraction qui excède deux fois
le salaire de l'année précédente, dans les autres cas.
Enfin, au delà d'un seuil de
2,35 millions de francs
, les
indemnités de licenciement seraient automatiquement assujetties à
l'impôt sur le revenu
pour la fraction qui excède ce
plancher
.
Bien entendu, la fraction imposable des indemnités de licenciement
continuera à pouvoir bénéficier du système du
quotient prévu par l'article 163-O A du CGI qui permet
d'atténuer la progressivité du barème de l'impôt.
Pour récapituler, le seuil de déclenchement de l'imposition
serait, pour les indemnités inférieures à
2,35 millions de francs, le plus élevé des trois montants
suivants :
- fraction conventionnelle ou légale des indemnités de
licenciement ;
- moitié des indemnités de licenciement versées ;
- deux fois le montant du salaire brut perçu l'année
précédente.
Au delà d'un seuil de 2,35 millions de francs, toutes les
indemnités seraient taxées, quelle que soit leur nature.
Exemples :
1
er
cas
: une indemnité de licenciement de 2
millions de francs touchée par un salarié qui aurait perçu
un salaire brut d'un million de francs l'année précédente
serait exonérée d'impôt sur le revenu.
2
ème
cas
: une indemnité de licenciement
de 2 millions de francs touchée par un salarié qui aurait
perçu un salaire brut de 800.000 F l'année
précédente serait imposable à hauteur de 400.000 F.
3
ème
cas
: une indemnité de licenciement
de 2 millions de francs touchée par un salarié qui aurait
perçu un salaire brut de 400.000 F l'année
précédente serait imposable à hauteur de un million de
francs.
4
ème
cas
: une indemnité de licenciement
de 3 millions de francs serait imposable, quel que soit le salaire
touché l'année précédente, pour la fraction qui
excède 2,35 millions de francs, soit 650.000 F.
Enfin,
ne seraient jamais taxables
les
indemnités de
départ volontaires
versées dans le cadre d'un plan social
ainsi que les indemnités versées à un salarié
licencié sans cause réelle et sérieuse (article
L. 122-14-4 du code du travail).
2. Le cas des mandataires sociaux et dirigeants d'entreprises
Le 2 de l'article 80
duodecies
concerne les mandataires sociaux et
dirigeants d'entreprises.
Il dispose que toute indemnité versée à l'occasion de la
cessation de leurs fonctions serait imposable,
sans conditions de seuil.
Toutefois,
en cas de cessation forcée des fonctions,
notamment de
révocation, le régime serait le même que pour les
salariés, c'est-à-dire que seule la fraction des
indemnités qui excède les seuils évoqués plus haut
serait soumise à l'impôt sur le revenu.
Ces dispositions seraient applicables :
• dans les sociétés anonymes :
- au président du Conseil d'administration,
- au directeur général,
- à l'administrateur provisoirement délégué,
- aux membres du directoire,
- à tout administrateur ou membre du conseil de surveillance
chargé de fonctions spéciales ;
• dans les sociétés à responsabilité
limitée : aux gérants minoritaires ;
• dans les autres entreprises ou établissements passibles de
l'impôt sur les sociétés : aux dirigeants soumis au
régime fiscal des salariés ;
• dans toute entreprise : à toute personne occupant un emploi
salarié dont la rémunération totale excède la plus
faible des rémunérations allouées aux dirigeants de cette
entreprise.
B. LE DISPOSITIF SOCIAL PROPOSÉ (ARTICLE 2A DU PLFSS
2000)
L'article 2 A du projet de loi de financement de la sécurité
sociale, qui résulte d'un amendement de M. Jérôme
Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances de
l'Assemblée nationale, est le pendant du présent article. Il pose
le principe de l'
assujettissement des indemnités de licenciement aux
cotisations de sécurité sociale, pour la fraction qui est
elle-même soumise à l'impôt sur le revenu.
Toutefois, s'agissant de la CSG, le dispositif actuel, plus rigoureux, est
réaffirmé.
1. Le renforcement de l'assujettissement à la CSG
Bien que l'utilité d'une telle disposition ne soit pas établie au
regard de l'état actuel du droit, il est prévu d'assujettir
à la CSG,
" en tout état de cause "
la fraction
des indemnités de licenciement qui est soumise à l'impôt
sur le revenu en application de l'article 80
duodecies
du CGI.
Cette disposition n'apporte rien de nouveau car les indemnités de
licenciement sont actuellement soumises à la CSG pour la fraction qui
excède le montant prévu par la convention collective de branche,
l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la
loi, ce qui est plus sévère que ce que l'amendement
" Hollande " prévoit en matière d'impôt sur le
revenu.
En revanche, l'article 2 A innove en prévoyant de soumettre
explicitement à la CSG la totalité des indemnités
perçues par les mandataires sociaux et dirigeants à l'occasion de
la cessation de leurs fonction, sauf en cas de cessation forcée de ces
fonctions, où seule la fraction assujettie à l'impôt sur le
revenu entrerait dans l'assiette de la
CSG.
2. L'assujettissement de la fraction imposable des indemnités de
licenciement aux cotisations de sécurité sociale
Le régime social des indemnités de licenciement serait totalement
calqué sur le régime fiscal
prévu par l'article
80
duodecies
du CGI résultant de l'amendement
" Hollande " , à savoir :
- pour les salariés, n'entrerait dans l'assiette des cotisations
sociales que la fraction des indemnités de licenciement assujettie
à l'impôt sur le revenu ;
- la totalité des indemnités perçues par les mandataires
sociaux et dirigeants d'entreprises entrerait dans l'assiette des cotisations
de sécurité sociale,
sauf en cas de cessation forcée
des fonctions
où seule la fraction assujettie à
l'impôt sur le revenu serait prise en compte.
Les cotisations de sécurité sociale concernées sont :
- les cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des
allocations familiales (article L. 242-1 du code de la
sécurité sociale) ;
- les assurances sociales agricoles (article 1031 du code rural) ;
- les cotisations familiales des salariés agricoles (article 1062 du
code rural) ;
- les cotisations d'assurance maladie des travailleurs agricoles (article 1154
du code rural).
III. APPRÉCIATION DE VOTRE COMMISSION
La réflexion de votre commission a été guidée par
le principe selon lequel
la fraction des indemnités
versées à la suite de la rupture d'un contrat de travail ou d'un
mandat social,
qui correspond à des dommages-intérêts ne
doit pas être fiscalisée
,
quel que soit son montant
.
Il est en revanche légitime que la fraction des indemnités qui
s'apparente à un complément de rémunération soit
soumise à l'impôt sur le revenu.
De ce point de vue, votre commission considère que
la fixation de
seuils d'exonération en valeur relative,
comme le propose le
présent article,
constitue une amélioration de la
sécurité juridique des citoyens
dès lors qu'elle leur
permet de connaître le montant exact des indemnités de rupture du
contrat de travail qu'ils doivent déclarer. Au demeurant, au regard de
la jurisprudence du Conseil d'Etat, les seuils fixés apparaissent comme
relativement généreux.
Toutefois,
cette amélioration est immédiatement contredite
par la définition d'un plancher d'imposition en valeur absolue
,
fixé arbitrairement à 2,35 millions de francs. Sans qu'il
soit besoin d'en contester le montant, votre commission considère qu'un
tel " couperet " rompt l'égalité des citoyens devant la
loi et contrevient au principe évoqué précédemment,
selon lequel des indemnités ayant le caractère de
dommages-intérêts ne doivent pas être imposables.
En
outre, il ouvre une brèche dangereuse susceptible de conduire à
la fiscalisation de toutes les indemnités octroyées à
titre de réparation globale à la suite de la réalisation
d'un sinistre ou d'un accident.
Votre commission vous proposera, en conséquence,
d'en rester à
des seuils relatifs
, qui, en permettant d'apprécier la nature d'une
indemnité, notamment en fonction du salaire perçu l'année
précédant la rupture du contrat de travail ou la cessation du
mandat social, respectent les principes de proportionnalité et de
souplesse.
A. UNE AMÉLIORATION DE LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DES
CONTRIBUABLES
Dans l'état actuel du droit, les salariés ou les mandataires
sociaux qui perçoivent des indemnités de rupture de contrat de
travail ou de cessation de mandat social ont, en vertu de l'article 79 du code
général des impôts, l'obligation de les déclarer. On
a vu que l'administration ne considérait comme imposable que la fraction
de ces indemnités qui excède les minima conventionnels ou
légaux, sauf s'il est établi que l'indemnité a pour objet
de réparer un préjudice autre que la perte de revenus.
En cas de contentieux avec l'administration sur la nature de ces
indemnités,
la qualification des sommes versées est
laissée à l'appréciation du juge
qui se réserve
la possibilité de requalifier les versements effectués à
l'occasion d'un départ.
Il se fonde pour cela sur la distinction entre le préjudice
résultant de la perte de salaire et le préjudice moral, seule la
réparation du premier devant être soumise à impôt
dans la mesure où elle s'assimile à une
rémunération.
Mais la
jurisprudence
du Conseil d'Etat pour déterminer le seuil
au delà duquel une indemnité s'apparente à une
rémunération est
fluctuante
et laisse les contribuables
dans l'incertitude. Elle repose notamment sur la capacité des
intéressés à établir le préjudice qu'ils ont
subi. La conséquence est qu'en pratique, peu d'indemnités sont
déclarées.
Ainsi, l'indemnité versée à un employé lors de la
suppression du poste qu'il occupait depuis trente ans a été
considérée pour sa totalité comme destinée à
réparer le préjudice causé, et par suite, comme non
imposable, dans une espèce où un préavis de huit mois
avait été donné à l'intéressé (CE,
arrêt du 14 octobre 1957, req n° 32792) alors que
l'indemnité de rupture du contrat de travail allouée à un
salarié âgé de 65 ans en vertu d'un accord amiable a
été regardée comme constituant un complément de
rémunération imposable en raison de l'absence de caractère
abusif de la rupture (CE, arrêt du 17 décembre 1980, req
n° 18419).
De même, la fraction de l'indemnité perçue en sus de
l'indemnité due en application de la convention collective, par un
salarié licencié à l'âge de 43 ans qui a certes
retrouvé rapidement un emploi équivalent mais à
durée déterminée, a été
considérée comme imposable (CE, arrêt du 11 mai 1984,
n° 40043).
En conséquence,
la fixation de seuils en valeur relative
, comme
le propose le début du deuxième alinéa de l'article 80
duodecies
proposé par le présent article,
améliore la sécurité juridique
et fiscale des
citoyens. Elle leur permet de savoir précisément quel montant ils
doivent déclarer.
De surcroît, il est possible d'observer que
les critères
retenus
pour l'assujettissement des indemnités de rupture de contrat
de travail ou de mandat social, à l'impôt sur le revenu
sont
relativement généreux
par rapport à ce que la doctrine
ou le juge pouvaient jusqu'à présent appliquer.
La somme reçue, si elle n'excède pas un montant de
2,35 millions de francs, sera ainsi toujours exonérée
d'impôt sur le revenu à concurrence, soit de l'équivalent
de deux années de revenu brut, soit de la moitié du montant total
reçu, ce qui
sous-entend implicitement que les montants ainsi
exonérés correspondent à des
dommages-intérêts versés en réparation du
préjudice subi
.
On remarquera également que la présente disposition
élève considérablement les seuils d'exonération des
indemnités par rapport à la pratique actuelle de l'administration
selon laquelle seule la fraction conventionnelle ou légale desdites
indemnités est constitutive de dommages-intérêts et donc
non imposable.
De surcroît, le caractère proportionnel des seuils retenus permet
de maintenir un lien entre le montant fiscalisable des indemnités et la
situation personnelle de chaque salarié ou mandataire.
Dès lors qu'il est implicitement admis qu'à concurrence des
seuils retenus, les indemnités de rupture de contrat ont le
caractère de réparation d'un préjudice global et ne sont
pas susceptibles d'être assimilées à un revenu, une telle
disposition peut donc être considérée comme en ligne avec
le principe qui guide votre commission, selon lequel les indemnités
représentatives de dommages-intérêt doivent demeurer hors
de l'assiette imposable.
B. UNE REMISE EN CAUSE INSIDIEUSE ET DANGEREUSE DU PRINCIPE DE
NON FISCALISATION DES DOMMAGES-INTÉRÊTS
Toutefois, un tel principe est immédiatement contredit par la
dernière phrase du deuxième alinéa du 1 de l'article
80
duodecies
qui prévoit un
plancher d'imposition en
valeur absolue
, fixé arbitrairement à la moitié de la
première tranche du tarif de l'impôt de solidarité sur la
fortune, soit 2,35 millions de francs.
Ce plancher d'imposition, quel que soit son montant, semble
extrêmement pervers à votre commission, dès lors qu'il
sous-entend qu'au delà d'un certain montant absolu, une indemnité
n'a plus le caractère de dommages-intérêts mais s'assimile
à une rémunération " abusive ".
Il n'est qu'à citer M. Christian Sautter, alors Secrétaire
d'Etat au budget, qui déclarait le 21 octobre à
l'Assemblée nationale
13(
*
)
:
" Il n'y a aucune raison qu'un certain nombre de situations
particulièrement choquantes se pérennisent et que des sommes
versées lors du départ volontaire des intéressés,
dont Dominique Strauss-Kahn a dit qu'elles dépassaient parfois
l'entendement, soient traitées comme des dommages-intérêts
et totalement exonérées d'impôt ".
M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des
finances de l'Assemblée nationale, a quant à lui, parlé
d'
" abus inadmissibles ".
Or, par construction, le caractère de dommages-intérêts
d'une indemnité doit s'apprécier au regard de la situation qui
prévalait avant que le contrat de travail soit rompu ou le mandat social
interrompu et non en valeur absolue. C'est en tout cas la position qu'a
toujours adoptée le Conseil d'Etat, en s'appuyant notamment sur des
critères comme la perte d'une certaine situation sociale ou l'obligation
de changer de résidence.
Si l'on admettait, comme le proposent les députés, qu'au
delà de 2,35 millions de francs, toute somme versée en
réparation d'un préjudice est imposable, alors il faudrait
soumettre à l'impôt sur le revenu les indemnités d'ordre
assurantiel versées aux accidentés de la route ou à un
pianiste ayant perdu l'usage de ses mains. On conçoit bien qu'une telle
conséquence serait profondément amorale, et contraire aux
principes généraux du droit.
Il convient également de préciser que
le départ de son
plein gré d'un mandataire social peut s'apparenter à une
cessation forcée de ses fonctions dès lors qu'il est la
résultante d'une restructuration d'entreprise
. Or, le
préjudice causé à l'intéressé du fait de
l'interruption brutale de ses fonctions peut parfois nécessiter le
paiement d'indemnités importantes, notamment lorsqu'elles ont pour objet
d'éviter une action en justice. On remarquera que dans le contexte
d'accélération des fusions d'entreprises qui est le nôtre,
une telle situation peut recouvrir beaucoup de cas particuliers. Il ne saurait
être question d'empêcher de telles restructurations par une mesure
uniquement guidée par des considérations prétendument
morales dont on a vu qu'elles pouvaient créer un dangereux
précédent.
Votre commission ne vous propose pas pour autant d'exonérer
totalement
les indemnités versées aux dirigeants
d'entreprises
lorsqu'il est mis fin à leurs fonctions, mais, en
supprimant le plancher d'imposition de 2,35 millions de francs, de les
soumettre au même régime que les salariés,
c'est-à-dire, imposition au delà de deux années de salaire
brut ou à hauteur de la moitié de l'indemnité
perçue.
C. UNE MESURE RÉTROACTIVE
Comme l'a précisé Didier Migaud au cours du débat à
l'Assemblée nationale, le dispositif proposé par le
présent article s'applique à l'ensemble des revenus perçus
en 1999 et donc rétroactivement à des indemnités
octroyées avant son adoption par l'Assemblée nationale.
Certes, cette " petite " rétroactivité n'est pas
sanctionnée par le Conseil constitutionnel dans la mesure où les
dispositions relatives à l'impôt sur le revenu et à
l'impôt sur les sociétés contenues dans les lois de
finances, s'appliquent naturellement à des bases représentatives
de périodes passées. On notera d'ailleurs que le jour où
l'impôt sur le revenu sera prélevé à la source, le
problème de la rétroactivité de la loi fiscale ne se
posera plus.
Toutefois, dans le cas présent qui concerne des revenus par nature
exceptionnels, votre commission considère qu'
il convient de mettre
fin à cette petite rétroactivité en faisant
démarrer le dispositif à la date de son vote par
l'Assemblée nationale
, c'est-à-dire le 21 octobre 1999. Elle
vous proposera un amendement en ce sens.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article ainsi amendé.
ARTICLE 2 ter (nouveau)
Simplification des
réductions d'impôt sur le revenu au titre des dons et subventions
versés par les particuliers
Commentaire : le présent article introduit à
l'initiative de la commission des finances de l'Assemblée nationale,
tend à simplifier le régime des réductions d'impôts
consécutives aux dons des particuliers
A l'initiative de son rapporteur général, la commission des
finances de l'Assemblée nationale a fait adopter un article additionnel
aménageant dans le sens de la simplification le dispositif de l'article
200 du code général des impôts relatif aux dons et
versements des particuliers à divers organismes d'intérêt
général.
A l'heure actuelle, le régime est rendu passablement complexe du fait
de la différenciation des régimes selon le type d'action et
d'organismes bénéficiaires.
C'est ainsi que se superposent quatre régimes distincts :
• une réduction d'impôt égale à 50% des
versements aux organismes d'intérêt général ;
• une réduction égale à 50 % des versements
effectués aux organismes reconnus d'utilité publique, aux
associations cultuelles ou de bienfaisance, autorisées à recevoir
des dons et des legs, ainsi qu'aux associations soumises à la loi locale
en Alsace et Moselle et reconnues d'utilité publique dans la limite de 6
% du revenu imposable ;
• une réduction d'impôt égale à 40 % des dons
et cotisations versées aux associations de financement ou aux
mandataires des campagnes électorales ou des partis politiques dans la
limite de 5 % du revenu imposable, limite qui ne se cumule pas avec celles de
1,75 % et de 6 % sus-mentionnées ;
• une réduction égale à 60 % des dons à des
organismes fournissant des aliments aux personnes en difficulté,
favorisant leur logement, ou procédant, à titre principal,
à la fourniture gratuite de soins. Ce dispositif, dit
" Coluche " en raison du nom de l'un de ses initiateurs, met en place
un régime particulièrement favorable dans la limite d'un plafond
de 2.050 francs. Les versements effectués au-delà de ce montant
bénéficient de la réduction d'impôt de 50 %, dans la
limite de 1,75 % ou de 6 % selon la nature de l'association. Le tableau
ci-dessous récapitule le coût fiscal de ce dispositif,
2 milliards de francs, par tranche de cotisation.
L'Assemblée nationale propose de simplifier les mécanismes
prévus à cet article 200 du code général des
impôts tout préservant la spécificité du
régime favorable prévu pour l'aide aux personnes en
difficultés.
Il est ainsi prévu de :
• fixer à 6 % du revenu imposable le plafond global des
versements ouvrant droit aux réductions d'impôt, quel que soit le
type et le statut de l'organisme bénéficiaire et, en particulier,
qu'il s'agisse d'oeuvre d'intérêt général et
d'associations de financement des partis politiques et des campagnes
électorales ;
• élever à 50 % au lieu de 40 %, la réduction
d'impôt accordée au titre des dons pour le financement des partis
politiques et des campagnes électorales.
L'Assemblée nationale indique que le coût de ces mesures est
limité : il serait de 60 millions de francs répartis à
raison de 20 millions de francs au titre de l'alignement des taux, et de 40
millions de francs au titre de celui des plafonds.
Votre commission des finances ne peut qu'être favorable à des
mesures de simplification qui vont faciliter les déclarations
d'impôt des contribuables, dont on a vu qu'ils étaient plus de 3
millions et demi à utiliser la possibilité offerte par le code
général des impôts.
Votre commission vous demande en conséquence d'adopter cet article, sous
réserve d'un amendement rédactionnel de nature à
améliorer la " lisibilité " du nouvel article 200 du
code général des impôts.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article ainsi amendé.
ARTICLE 3
Application du taux réduit de
5,5 % de la taxe sur la valeur ajoutée aux travaux portant sur des
locaux à usage d'habitation
achevés depuis plus de deux ans
Commentaire : le présent article a pour objet de
réduire à 5,5% le taux de la taxe sur la valeur ajoutée
portant sur des locaux à usage d'habitation achevés depuis plus
de deux ans, à l'exclusion des logements sociaux à usage locatif.
I. LE DROIT COMMUNAUTAIRE EN MATIÈRE DE TVA : UNE CONTRAINTE FORTE
AU SERVICE DE L'HARMONISATION FISCALE
Le régime de TVA des Etats membres de l'Union européenne est
régi par les dispositions de la directive 77/388 CEE du 17 mai 1977
modifiée, dite sixième directive, qui fixe des règles
communes notamment en matière de territorialité, de champ
d'application, ou de droit à déduction. S'agissant des taux, les
normes qui prévalent aujourd'hui résultent de la directive
92/77/CEE du 19 octobre 1992 : l'encadrement des taux répond
à un objectif souhaitable d'harmonisation fiscale mais ne prend pas en
compte d'autres facteurs tels que la lutte contre le chômage ou le
travail au noir.
A. UN ENCADREMENT STRICT DES TAUX DE TVA
Dans le cadre du régime transitoire entré en vigueur le 1er
janvier 1993, et en attendant l'adoption d'un système définitif
de TVA communautaire, les Etats membres de l'Union européenne appliquent
les règles prévues par les directives
précitées : 77/388/CEE du 17 mai 1977 et 92/77/CEE du
19 octobre 1992 :
les Etats membres ne peuvent avoir qu'un seul taux normal, qui doit
être supérieur à 15 %
14(
*
)
;
les Etats sont autorisés, sans que cela ne soit une obligation,
à appliquer un ou deux taux réduits supérieurs ou
égaux à 5%. Les biens et services susceptibles d'en
bénéficier sont énumérés de manière
limitative dans l'annexe H à la sixième directive de 1977.
Toutefois, les Etats membres, qui, au 1
er
janvier 1991,
appliquaient des taux inférieurs à 5 %, ont été
autorisés, de façon dérogatoire, à les maintenir
pour la durée du régime transitoire. Par ailleurs, il a
été admis que ceux qui devaient modifier leurs structures de taux
en reclassant au taux normal des produits et services
précédemment soumis au taux réduit pourront appliquer
à ces derniers un taux intermédiaire.
Un Etat membre ne peut donc, en vertu des règles communautaires qui
s'imposent à lui, appliquer à une catégorie de biens ou de
services donnés un taux réduit de TVA que s'ils sont
mentionnés dans l'annexe H précitée ou figurant au
nombre des dispositions dérogatoires et transitoires prévues,
pour l'essentiel, par l'article 28 de la même directive. A
défaut, toute baisse de la TVA est
" euro-incompatible "
15(
*
)
.
B. L'ÉVOLUTION DU DROIT COMMUNAUTAIRE EN FAVEUR DES BAISSES
CIBLÉES DE TVA
L'ampleur du problème du chômage a infléchi la position de
la Commission européenne, qui avait toujours apprécié les
règles de taux au regard du fonctionnement du marché
intérieur, indépendamment de toute autre considération
telle que le contenu en emploi des différentes activités.
Lors du Conseil européen pour l'emploi tenu à Luxembourg en 1997,
la Commission a présenté une communication qui envisageait la
possibilité d'autoriser les Etats membres à appliquer le taux
réduit de la TVA sur des services à forte intensité de
main-d'oeuvre, à titre expérimental et sur une base optionnelle.
Elle y reconnaissait que "
le problème du chômage
revêt une telle importance qu'il vaut la peine de tester le
fonctionnement d'un allégement de la TVA ciblé sur les services
à forte intensité de main-d'oeuvre
".
La proposition de directive E-1236 du 17 février 1999 sur les services
à forte intensité de main-d'oeuvre a repris les orientations
suggérées dans la communication précitée. Elle
prévoyait que le Conseil, statuant à l'unanimité sur
proposition de la Commission, pourrait autoriser les Etats membres de l'Union
européenne à appliquer le taux réduit de la TVA à
certains services. L'éligibilité des secteurs serait
déterminée grâce à un certain nombre de
critères. Il n'y avait donc pas, dans la version initialement transmise
au Sénat, de liste limitative des secteurs potentiellement
éligibles à une baisse du taux de TVA.
Depuis, les négociations entre les Etats membres de l'Union
européenne ont abouti à l'établissement d'une liste
limitative des secteurs éligibles, à propos de laquelle les
négociations ont finalement abouti lors du Conseil de l'Union
européenne du 8 octobre 1999.
La directive 1999/85/CE a finalement
été adoptée lors du Conseil du 22 octobre 1999
(cf.
texte ci-joint). Il est à noter que l'adoption d'une liste a permis
d'exclure certains secteurs du champ de la proposition de directive, et en
particulier le secteur de la restauration.
La liste des prestations que les Etats membres de l'Union européenne ont
été autorisés à soumettre au taux réduit de
la TVA s'établit comme suit :
- petits services de réparation (bicyclettes, chaussures et articles de
cuir, vêtements et linge de maison - y compris les travaux de
réparation et de modification) ;
- rénovation et réparation dans les logements privés,
à l'exclusion des matériaux qui représentent une part
importante de la valeur du service fourni ;
- lavage de vitres et nettoyage de logements privés ;
- services de soin à domicile (par exemple aide à domicile, soins
destinés aux enfants, aux personnes âgées, aux personnes
malades ou aux personnes handicapées) ;
- coiffure.
Le gouvernement propose, à travers le présent article, que la
France fasse usage de cette faculté et diminue le taux de la TVA
applicable aux travaux de rénovation et de réparation dans les
logements privés.
TVA réduite : le texte de la directive européenne 1999/85/CE du 22/10/1999
Le
Conseil de l'Union européenne,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et
notamment son article 93,
vu la proposition de la Commission (JOCE C102 du 13 avril 1999),
vu l'avis du Parlement européen (JOCE C279 du 1
er
octobre
1999),
vu l'avis du Comité économique et social (JOCE C209 du
22 juillet 1999),
considérant ce qui suit :
l'article 12, paragraphe 3, point a), de la directive 77/388/CEE du
Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des
législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre
d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée :
assiette uniforme (JOCE L145 du 13 juin 1977 modifiée en dernier
lieu par la directive 1999/59/CE, JOCE L182 du 26 juin 1999)
prévoit que les Etats membres peuvent appliquer soit un, soit deux taux
réduits uniquement aux livraisons de biens et aux prestations de
services des catégories visées à l'annexe H de ladite
directive ;
néanmoins, le problème du chômage est tellement grave
qu'il convient de permettre aux Etats membres qui le souhaitent de tester le
fonctionnement et les effets, en termes de création d'emplois, d'un
allégement de la TVA ciblé sur des services à forte
intensité de main d'oeuvre non repris actuellement à
l'annexe H ;
ce taux de TVA réduit est également susceptible de
diminuer, pour les entreprises concernées, l'incitation à
rejoindre l'économie souterraine ou à y rester ;
l'introduction d'une telle réduction ciblée de taux, n'est
toutefois pas sans danger pour le bon fonctionnement du marché
intérieur et la neutralité de la taxe : il convient, par
conséquent, de prévoir une procédure d'autorisation pour
une période bien délimitée et complète de trois ans
et de limiter strictement le champ d'application d'une telle meure afin d'en
sauvegarder le caractère vérifiable et limité ;
le caractère expérimental de la mesure nécessite une
évaluation précise de ses conséquences en termes d'emploi
et d'efficience par les Etats membres qui l'ont mise en oeuvre et par la
Commission ;
il convient de strictement limiter la mesure dans le temps et qu'elle
prenne fin au plus tard le 31 décembre 2002 ;
l'exécution de la présente directive ne comporte aucune
modification des dispositions législatives des Etats membres.
A arrêté la présente directive :
Article 1
er
- La directive 77/388/CEE est modifiée
ainsi :
1) A l'article 28, le paragraphe 6 suivant est ajouté :
" 6. Le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de
la Commission, peut autoriser un Etat membre à appliquer, et ce pendant
une période maximale de trois ans allant du 1
er
janvier
2000 au 31 décembre 2002, les taux réduits prévus
à l'article 12, paragraphe 3, point a), troisième
alinéa, aux services énumérés dans deux au maximum
des catégories figurant à l'annexe K. Dans des cas
exceptionnels, un Etat membre peut être autorisé à
appliquer les taux réduits à des services appartenant à
trois des catégories susmentionnées.
Les services concernés doivent remplir les conditions suivantes :
a) être à fort intensité de main d'oeuvre ;
b) être en grande partie fournis directement aux consommateurs
finaux ;
c) être principalement locaux et non susceptibles de créer des
distorsions de concurrence et ;
d) il doit y avoir un lien étroit entre la baisse de prix
découlant de la réduction du taux et l'augmentation
prévisible de la demande et de l'emploi.
L'application d'un taux réduit ne doit pas mettre en péril le bon
fonctionnement du marché intérieur. Tout Etat membre souhaitant
introduire la mesure prévue au premier alinéa en informe la
Commission avant le 1
er
novembre 1999 et lui communique avant
cette même date toutes les données utiles d'appréciation,
et notamment les données suivantes :
a) champ d'application de la mesure et description précise des services
concernés ;
b) éléments démontrant que les conditions prévues
aux deuxième et troisième alinéas sont
réunies ;
c) éléments mettant en évidence le coût
budgétaire de la mesure envisagée.
Les Etats membres autorisés à appliquer le taux réduit
visé au premier alinéa établissent, avant le
1
er
octobre 2002, un rapport détaillé contenant
une évaluation globale de l'efficacité de la mesure, notamment en
termes de création d'emplois et d'efficience.
D'ici le 31 décembre 2002, la Commission soumet au Parlement
européen et au Conseil un rapport d'évaluation global et propose
si nécessaire des mesures adéquates permettant de décider
définitivement du taux de TVA applicable aux services à forte
intensité de main d'oeuvre.
2) Il est ajouté une nouvelle annexe K, telle qu'elle figure
à l'annexe de la présente directive.
Article 2
- La présente directive entre en vigueur le jour de sa
publication au Journal officiel des Communautés européennes.
Article 3
- Les Etats membres sont destinataires de la présente
directive.
Annexe
- " Annexe K - liste des services visés à
l'article 28 § 6
1) Petits services de réparation (bicyclettes, chaussures et articles de
cuir, vêtements et linge de maison - y compris les travaux de
réparation et de modification) ;
2) Rénovation et réparation de logements privés, à
l'exclusion des matériaux qui représentent une part importante de
la valeur du service fourni ;
3) Lavage de vitres et nettoyage de logements privés ;
4) Services de soins à domicile (par exemple aide à domicile,
soins destinés aux enfants, aux personnes âgées, aux
personnes malades ou aux personnes handicapées) ;
5) Coiffure ".
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE
A. UNE APPLICATION EXPERIMENTALE, MAIS LARGE, DE LA TVA A TAUX REDUIT POUR
LES TRAVAUX DANS LES LOCAUX D'HABITATION
1. Une application expérimentale du taux réduit de TVA pour les
travaux réalisés dans les logements d'habitation
Le
1 du I.
du présent article insère un nouvel article
279-0
bis
dans le code général des impôts.
Ce nouvel article pose le principe de l'application, pour une durée
limitée, d'une taxe à la valeur ajoutée à taux
réduit sur certains travaux réalisés dans des logements.
Le dispositif est
limité dans le temps
, c'est-à-dire
qu'il prend fin au 31 décembre 2002. Il s'agit de se conformer à
la décision du Conseil de l'Union européenne du 8 octobre 1999
qui autorise seulement une expérimentation, pour trois ans, d'une TVA
à taux réduit sur les travaux dans les logements.
Au terme de la période de trois ans, l'Union européenne devra
décider, au regard de la réalisation des objectifs fixés
(en termes d'emplois notamment) si la mesure doit être
pérennisée.
2. Un champ d'application très large
Les locaux concernés
sont les locaux à usage d'habitation,
à l'exception de la construction neuve (c'est-à-dire les locaux
achevés depuis moins de deux ans).
Le champ de la mesure est donc plus large que
précédemment
, puisque la réduction d'impôt pour
travaux de grosses réparations et d'amélioration s'appliquait aux
logements construits depuis plus de dix ans. Le crédit d'impôt
pour dépenses d'entretien s'appliquait déjà aux logements
construits depuis plus de deux ans. Il faut noter que l'ancienneté de
deux ans ne sera pas requise pour les travaux d'urgence.
De surcroît, la mesure concernera toutes les personnes qui font des
travaux
(locataire, propriétaire-occupant ou
propriétaire-bailleur). Or, la réduction d'impôt pour les
travaux de grosses réparations et d'amélioration, de même
que le crédit d'impôt, ne concernaient que les travaux
réalisés par les propriétaires dans leur résidence
principale. Il s'agit donc d'un élargissement très
conséquent du dispositif. Désormais, les travaux
réalisés dans une résidence secondaire ou les travaux
effectués par un locataire seront soumis au taux réduit de TVA.
Les travaux
concernés sont les travaux d'amélioration, de
transformation, d'aménagement et d'entretien. Il s'agit d'une
définition large, englobant les travaux qui bénéficiaient
auparavant du crédit d'impôt et de la réduction
d'impôt. On remarquera que la formulation fait directement
référence à celle qui était retenue en
matière de logement social, à ceci près que sont
ajoutées les dépenses d'entretien.
En revanche,
les dépenses payées pour l'acquisition de gros
équipements, et la fourniture d'équipements ménagers ou
mobiliers ne sont pas prises en compte
dans le champ d'application de la
nouvelle TVA à taux réduit, afin de se conformer à
l'accord européen du 8 octobre dernier. Les gros équipements
exclus sont toutefois exactement ceux concernés par le nouveau
crédit d'impôt introduit par le IV-2 de l'article sous la forme
d'un article 200
quater
du code général des impôts.
3. Les modalités d'application du taux réduit
Le
3. du I
du présent article précise
les
modalités d'application
du taux réduit de TVA. Un document
doit être fourni au prestataire par le preneur, qui atteste que les
travaux se rapportent bien à des locaux d'habitation achevés
depuis plus de deux ans. Cette attestation, que le prestataire devra conserver,
servira de justificatif en cas de contrôle fiscal.
Le
V.
fixe la date d'entrée en vigueur de la nouvelle TVA
à taux réduit, à savoir le 15 septembre 1999. Toute
facture remise à partir de cette date entrera dans le champ
d'application du nouveau dispositif.
Pour ce qui concerne la mise en place pratique de la mesure,
une instruction
fiscale est parue le 14 septembre 1999
(3C-5-99, B.O.I
n° 169 bis du 15 septembre 1999)
avant même l'adoption
de la loi de finances
. Elle précise notamment la notion de
" locaux à usage d'habitation ", les modalités
d'application du taux réduit de TVA pour les travaux
réalisés dans les parties communes des immeubles collectifs, les
gros équipements soumis au nouveau crédit d'impôt...
B. LE MAINTIEN DU RÉGIME DE LA LIVRAISON A SOI MEME POUR LE
LOGEMENT SOCIAL
1. Les travaux dans les logements sociaux n'entreront pas dans le nouveau champ
de la TVA à taux réduit
Le
2. du I.
du présent article précise le
champ
d'exclusion
de la mesure de TVA à taux réduit.
Il s'agit notamment
des travaux concourant à la production ou
à la livraison d'immeubles
au sens du 7° de l'article 257 du
code général des impôts. Cet article renvoie aux articles
243 à 259 de l'annexe II du CGI qui précisent le régime de
la livraison à soi-même (LASM).
Il s'agit également des
travaux portant sur des logements sociaux
à usage locatif
, visés au 7°
bis
de l'article 257
du CGI, c'est-à-dire les travaux d'amélioration, de
transformation ou d'aménagement qui entrent dans le dispositif de la
livraison à soi-même tel que prévu au 7° de l'article
257, ainsi que, en application du
II.
du présent article, les
travaux d'entretien.
Ces deux premières exclusions s'expliquent par le souhait des
organismes HLM de conserver le régime de la livraison à
soi-même, mis en place en 1996 et étendu progressivement,
régime qui confère un avantage équivalent à une TVA
à taux réduit.
2. Un élargissement et une adaptation du régime de la livraison
à soi-même
• Le
II.
du présent article
modifie le 7°
bis
de l'article 257 du code général des impôts, qui
traite des travaux réalisés dans les logements locatifs sociaux
sous le régime de la livraison à soi-même.
Les modifications consistent essentiellement en la suppression de la condition
d'autorisation préfectorale (dans le but d'accélérer les
transactions) et l'ajout, parmi les travaux bénéficiant du
dispositif de livraison à soi-même, des travaux d'entretien.
Contrairement aux travaux d'amélioration, de transformation et
d'aménagement, les travaux d'entretien entrent dans le champ de la
livraison à soi-même pour la durée expérimentale de
trois ans voulue par l'Union européenne.
Les travaux de nettoyage et les travaux d'entretien des espaces verts sont
désormais expressément exclus, comme pour le logement
privé. Toutefois, les travaux d'aménagement des espaces verts
resteront dans le champ du régime de la livraison à
soi-même, alors qu'ils sont exclus du taux réduit de TVA dans le
droit commun, du fait d'un amendement rédactionnel adopté par
l'Assemblée nationale.
• Le
III.
introduit une dérogation au principe suivant
lequel le fait générateur de la taxe pour les livraisons à
soi-même, est l'achèvement des travaux. S'agissant des
dépenses d'entretien, introduites parmi les dépenses ouvrant
droit au régime de la livraison à soi-même, ce principe
n'avait en effet pas de sens. Il est donc proposé de retenir comme fait
générateur de la TVA le dernier jour de chaque trimestre civil
pour les livraisons à soi-même de travaux d'entretien.
• Le
IV.
supprime, pour les factures émises à
compter du 15 septembre 1999, le régime mis en place pour les
logements privés subventionnés par l'Agence nationale pour
l'amélioration de l'habitat (ANAH), neuf mois seulement après sa
création. Ce régime n'a plus de raison d'être puisque tous
les logements privés, qu'ils bénéficient ou non d'une
subvention de l'ANAH, seront éligibles au nouveau dispositif de TVA
à taux réduit.
C. L'EXCLUSION DES TRAVAUX DE NETTOYAGE, D'AMÉNAGEMENT ET
D'ENTRETIEN DES ESPACES VERTS
Les travaux de nettoyage, ainsi que les travaux d'aménagement et
d'entretien des espaces verts
pour les logements privés sont
également expressément exclus du nouveau dispositif de TVA
à taux réduit en vertu du
2. du I.
du présent
article.
Les travaux de nettoyage auraient pu être inclus dans le nouveau
dispositif (ils sont " eurocompatibles "). Toutefois, s'ils sont
réalisés dans les logements par des salariés, ils
permettent de bénéficier d'une réduction d'impôt, et
s'ils sont le fait d'associations, celles-ci sont exonérées de
TVA. Enfin, pour les entreprises, ils seraient visés par
l'article 4 du présent projet de loi de finances qui concerne les
prestations de services fournies par des entreprises agréées.
L'inclusion des travaux d'aménagement et d'entretien des espaces verts
dans le champ de la TVA à taux réduit n'est, en revanche, pas
" eurocompatible ".
D. LA RÉFORME DES CRÉDITS ET RÉDUCTIONS D'IMPOTS
1. La suppression de la réduction d'impôt pour dépenses de
grosses réparations
Le
1. du
VI.
du présent article modifie l'article 199
sexies
D du code général des impôts, à savoir la
réduction d'impôt pour dépenses de grosses
réparation et d'amélioration afférentes à
l'habitation principale. Cette réduction d'impôt, qui s'appliquait
aux dépenses effectuées jusqu'au 31 décembre 2001,
est supprimée à compter de l'instauration du taux réduit
de TVA sur les travaux dans les locaux d'habitation. Toutefois, les factures
émises jusqu'au 14 septembre 1999, mais payées après cette
date, et avant le 31 décembre 1999, continuent à
bénéficier du crédit d'impôt.
Votre rapporteur note que la réduction d'impôt de l'article 199
sexies
D portait sur 20% du montant des dépenses
de grosses
réparations et d'amélioration, dans la limite d'un plafond de
20.000 francs pour un célibataire et 40.000 francs pour un couple. Or,
l'avantage crée par le dispositif de TVA à taux réduit
correspond à 15,1% des travaux hors taxe (soit la différence
entre 20,6% et 5,5% de TVA).
Lorsque le montant des travaux est inférieur aux plafonds de 20.000 et
40.000 francs, le contribuable pourrait donc être perdant. Cependant,
maintenir un dispositif de réduction d'impôt égal à
5% du montant des dépenses, dans la limite du plafond de l'article 199
sexies
D, pour garantir une neutralité complète du
changement de régime fiscal, pourrait ajouter un élément
de complexité à une mesure destinée à être
lisible. De plus, le plafond des travaux était apprécié de
manière pluriannuelle et pour les seules résidences principales,
si bien que l'extension de l'avantage fiscal paraît compenser, dans un
grand nombre de cas, l'écart entre les deux régimes fiscaux.
2. La réduction du crédit d'impôt pour dépenses
d'entretien
Le 2. du VI.
du présent article
modifie le crédit
d'impôt pour dépenses d'entretien, inscrit à l'article 200
ter
du code général des impôts.
Contrairement au dispositif prévu pour la réduction d'impôt
en faveur des dépenses de grosses réparation et
d'amélioration, le crédit d'impôt pour dépenses
d'entretien n'est pas supprimé à compter de l'entrée en
vigueur du régime de TVA à 5,5%, le 15 septembre 1999. A compter
de cette date, il est réduit à 5% du montant des dépenses,
sans modification des plafonds existants.
Cela signifie que pour les dépenses réalisées entre le 15
septembre 1999 et le 31 décembre 2000, date d'arrêt du dispositif
de crédit d'impôt, les travaux d'entretien
bénéficieront à la fois de l'application du taux
réduit de TVA et d'un crédit d'impôt, mais très
réduit (au maximum, 500 francs de crédit-d'impôt pour
une personne célibataire et 1.000 francs pour un couple, hors
majorations pour personnes à charge).
Le maintien d'un crédit d'impôt, alors même que les travaux
d'entretien entrent dans le champ d'application de la TVA à taux
réduit s'explique par le fait que l'avantage résultant de la
diminution du taux de TVA (15,1 points) est inférieur à celui du
crédit d'impôt (20 points) lorsque le montant des travaux ne
dépasse pas les seuils retenus par le code général des
impôts (10.000 francs pour une personne seule, 20.000 francs pour un
couple). Le choix de maintenir un crédit d'impôt s'explique en
partie par le fait que le plafond de dépenses avait un caractère
annuel et que des contribuables modestes, bénéficiant auparavant
du crédit d'impôt, pourraient être pénalisés,
si leurs dépenses d'entretien sont relativement faibles.
Toutefois, il faut relever que le crédit d'impôt de 5% ne
bénéficiera, comme précédemment, qu'aux travaux
réalisés dans la résidence principale. De plus, au sein
des dépenses d'entretien, seules celles à la charge du
propriétaire si l'immeuble est loué sont éligibles au
dispositif. Il s'agit de charges déductibles du revenu brut foncier. Les
réparations locatives (au sens de l'article 1754 du code civil) à
la charge du locataire et qui ne sont pas en principe déductibles du
revenu foncier, en sont exclues (décret n° 87-713 du 26 août
1987). Les travaux réalisés par les locataires et les travaux
dans les résidences secondaires ne bénéficieront donc que
de la TVA à taux réduit.
• Le
b.
exclut du crédit d'impôt pour
dépenses d'entretien les équipements bénéficiant
désormais, au titre du présent article, d'un crédit
d'impôt spécifique (nouvel article 200
quater
du code
général des impôts).
3. Le nouveau crédit d'impôt pour les " gros
équipements "
Le 3. du VI.
du présent article insère un nouvel article
200
quater
dans le code général des impôts.
• Le
1.
du nouvel article 200
quater
précise qu'il
s'agit d'un crédit d'impôt ouvert pour les dépenses
d'acquisition "
de gros équipements fournis dans le cadre de
travaux d'installation ou de remplacement de systèmes de chauffage, des
ascenseurs ou de l'installation sanitaire "
. Ces dépenses sont
éligibles à deux conditions : qu'elles entrent dans le cadre
d'une opération soumise au taux réduit de TVA (ce qui exclut la
pose par soi-même) et qu'elles soient effectuées dans l'habitation
principale.
La liste des équipements ouvrant droit au crédit d'impôt
est fixée par arrêté du ministre chargé du budget.
Le gouvernement a retenu trois catégories de " gros
équipements " : les installations de chauffage, les
ascenseurs, l'installation sanitaire. Toutefois, à l'exclusion des
ascenseurs, les installations de chauffage et installations sanitaires
réalisées dans un local privatif d'habitation (maison
individuelle ou appartement) seront bien soumises au taux réduit de TVA.
Il faut noter que lorsque le Conseil européen du 8 octobre 1999 a
autorisé l'expérimentation du taux réduit de TVA pour les
travaux dans les logements, il a été indiqué que les
équipements qui représentent
une " valeur
importante "
de la facture devaient être exclus du champ de la
TVA à taux réduit. Le choix de retenir certains types
d'équipements plutôt que leur valeur est une option prise par le
gouvernement pour plus de simplicité. Lors du bilan de
l'expérimentation, la Commission européenne pourrait toutefois
considérer que l'option retenue ne traduit pas exactement l'accord du 8
octobre 1999.
• Le
2.
précise les plafonds de dépenses ouvrant
droit au crédit d'impôt. Ces plafonds (20.000 francs pour une
personne célibataire, 40.000 francs pour un couple, hors
majorations pour personnes à charge) sont identiques à ceux de la
précédente réduction d'impôt pour travaux de grosses
réparations.
En revanche, le taux de réduction est abaissé de 20% à
15%. Il s'agit de compenser exactement le " manque à gagner "
entre l'application du taux normal de TVA et du taux réduit (15,1
points), sans pour autant reprendre l'ancien taux applicable à la
réduction d'impôt.
La période prise en
considération s'étale sur trois ans, jusqu'au 31 décembre
2002, si bien que le crédit d'impôt a un caractère
pluriannuel. Aussi, le crédit d'impôt ne pourra dépasser
3.000 francs sur trois ans, pour une personne célibataire et
6.000 francs pour un couple, hors personnes à charge.
Comme de coutume, le crédit d'impôt s'impute sur l'impôt sur
le revenu après imputation des réductions d'impôts, de
l'avoir fiscal et des autres crédits d'impôts. S'il dépasse
l'impôt dû, il est restitué.
• Le
3.
précise les modalités de reprise du
crédit d'impôt lorsque le bénéficiaire est
remboursé de ses dépenses dans un délai de cinq ans, sauf
si ce remboursement fait suite à un sinistre après que les
dépenses ont été payées.
• Le
VII.
traite des pénalités en cas d'insuffisance
de déclaration faisant apparaître une base d'imposition
incomplète. L'absence de justification est assimilée à une
insuffisance de déclaration en matière de réductions et
crédits d'impôt. Ces dispositions sont mises à jour avec
l'introduction du nouveau crédit d'impôt créé par
l'article 200
quater
du code général des impôts. De
même en est-il pour l'amende fiscale prévue à l'article
1740
quater
du CGI, sanctionnant l'insuffisance de déclaration.
E. LES RÉGIMES SPÉCIFIQUES
Bien que le présent article ne les mentionne pas, il faut relever
les
cas particuliers de la Corse et des départements d'outre-mer.
Aux termes de la directive n°92/77 du 19 octobre 1992, les Etats membres
de l'Union européenne ont la possibilité, pendant la
période transitoire, de maintenir sous certaines conditions des taux
inférieurs à 5% pour les biens et services qui en
bénéficiaient
avant le 1
er
janvier 1991
, ce qui
a permis à la Corse de conserver les deux taux
" super-réduits " dont elle bénéficie (soit 0,9%
et 2,1%). Ces dispositions rendent toutefois difficilement envisageable une
modification du champ d'application de ces taux au profit des travaux dans les
logements.
En effet, au 1
er
janvier 1991, le taux de la TVA applicable en Corse
sur les travaux dans les logements s'élevait à 8 %, et non
à 0,9 % ou 2,1 %.
En application du droit
communautaire, la baisse de la TVA portant sur les travaux dans le logement ne
peut donc avoir pour effet que de diminuer le taux de TVA de 8 % à 5,5
%,
même si le gain lié à la réduction peut
paraître faible (2,5 points) comparé à celui dont
bénéficiera la métropole.
Cependant, on peut légitimement s'étonner que le gouvernement
ait présenté en séance à l'Assemblée
nationale un amendement visant précisément à faire passer
à 2,1% le taux de TVA sur les travaux dans les logements en Corse,
c'est-à-dire une mesure qui serait " euro-incompatible "
.
Sur proposition de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a
d'ailleurs repoussé cet amendement. M. Didier Migaud a
déclaré, à l'appui de son rejet, "
la commission a
considéré que des raisons juridiques tenant au droit
communautaire s'opposaient à cette mesure et nous sommes surpris que le
gouvernement puisse nous faire une telle proposition
".
Les DOM, qui ne font pas partie du territoire fiscal européen,
bénéficieront de leur taux réduit de 2,1% en application
de l'article 293 du code général des impôts. Toutefois,
comme leur taux de droit commun est de 9 %, l'avantage fiscal sera moindre
qu'en métropole (6,9 points contre 15,1 points).
III. D'IMPORTANTES DIFFICULTES D'APPLICATION DANS LES IMMEUBLES EN
COPROPRIETE
A. LES DISPOSITIONS DE L'INSTRUCTION FISCALE DU 14 SEPTEMBRE 1999
L'instruction du 14 septembre 1999 comporte une section relative aux parties
communes des immeubles collectifs.
Les travaux sur les parties communes des immeubles collectifs peuvent
bénéficier du taux réduit de TVA à proportion des
locaux affectés totalement ou partiellement à l'habitation (cette
proportion représente la quote-part de la facture qui sera à taux
réduit)
.
Pour la détermination de cette quote-part, les locaux affectés
principalement à l'habitation (+ de 50% de la surface) sont
considérés comme affectés en totalité à
l'habitation, les locaux affectés principalement à l'usage
professionnel sont considérés comme affectés totalement
à un usage professionnel.
L'instruction prévoit que
la quote-part est déterminée
par le propriétaire de l'immeuble ou le syndicat de
copropriétaires
en fonction de la répartition des parties
communes opérée par le propriétaire pour déterminer
le montant des charges récupérables auprès des locataires
ou, dans les copropriétés, selon les modalités
fixées par le règlement de la copropriété.
Il appartient au syndic de délivrer, sous sa responsabilité
civile et pénale, l'attestation ouvrant droit au bénéfice
du taux réduit.
B. L'INSTRUCTION FISCALE NE PREND PAS EN COMPTE LES CONTRAINTES DE LA
COPROPRIÉTÉ.
Les règlements de copropriété des immeubles
décrivent le type de local que constitue un lot (appartement, commerce,
parking ou cave) et les usages autorisés de ce lot (habitation
bourgeoise ou activités professionnelles libérales, commerciales,
installation d'associations loi 1901)
mais, contrairement à ce que
laisse penser l'instruction fiscale, ils ne décrivent pas l'usage
réel de chaque lot
.
Il n'est donc pas possible de déterminer la quote-part d'application
de la TVA en fonction du seul règlement de copropriété.
Il convient que chaque propriétaire de lot indique au syndic l'usage
réel, professionnel ou habitation, qu'il fait de son lot.
Première difficulté
: les copropriétaires
n'ont pas d'obligation de donner cette information. De plus, en cas de fausse
information, il apparaît, aux termes de l'instruction fiscale, que le
syndic serait considéré comme responsable de la fausse
attestation, qu'il doit délivrer sous son nom.
Deuxième difficulté
: la coordination du
dispositif avec la loi du 10 juillet 1965, et notamment son article 10. Cet
article fixe les règles de participation des copropriétaires aux
charges de l'immeuble.
Il dispose que "
les copropriétaires sont tenus de participer aux
charges entraînées par les services collectifs et les
éléments d'équipement commun en fonction de
l'utilité que ces services et éléments présentent
à l'égard de chaque lot. Ils sont tenus de participer aux charges
relatives à la conservation, à l'entretien et à
l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives
des parties privatives comprises dans leurs lots."
Les charges entraînées par les services collectifs et les
éléments d'équipement communs :
il s'agit des charges
relatives à l'antenne collective du réseau TV, à
l'ascenseur, au chauffage collectif, aux gaines de vide-ordures, aux
interphones, à la climatisation...
Ces charges sont réparties obligatoirement
en fonction de
l'utilité
que présentent les services collectifs et
équipements. Les charges relatives aux ascenseurs se répartissent
ainsi en fonction de la superficie des lots desservis et de l'étage
où ils se situent.
Les charges relatives à la conservation, à l'entretien et
à l'administration des parties communes :
il s'agit des charges
relatives aux assurances de la copropriété, aux honoraires de
syndic, aux balcons, au service de gardiennage, à l'entretien courant de
l'immeuble, au ravalement, à l'entretien des espaces verts et du gros
oeuvre...
Ces charges sont réparties obligatoirement
en fonction de la valeur
relative de chaque partie privative
, en application de l'article 5 de la
loi de 1965 (répartition par "tantièmes"). Il est toutefois
possible d'établir des charges spéciales à certains
copropriétaires seulement, telles que par exemple les charges
d'entretien de chaque bâtiment peuvent être affectées aux
seuls lots composant ce bâtiment.
Les travaux éligibles au taux réduit de TVA (travaux sur les
ascenseurs, travaux de ravalement...) sont compris dans les deux
catégories de charges réparties suivant les deux modalités
prédéfinies.
La loi de 1965 ne fait pas mention d'autres critères de
répartition, notamment en fonction du type d'occupation des lots.
Ainsi, selon la loi de 1965, le syndic de copropriété devrait
répartir les factures, comprenant une part de TVA à taux
réduit et une part à taux normal, en fonction des seules
règles de la copropriété définies ci-dessus.
Dans ces conditions, il ne serait pas possible de répercuter
directement le taux réduit de TVA sur les seuls propriétaires de
logements d'habitation
. Le propriétaire d'un logement à usage
d'habitation qui se situerait dans un immeuble comprenant un pourcentage
élevé de logements professionnels ne bénéficierait
pas d'un allégement substantiel de ses charges de
copropriété, parce que la quote-part serait réduite, et
que l'avantage fiscal serait réparti entre tous les
copropriétaires.
C. LES SOLUTIONS ENVISAGÉES PAR LE MINISTERE DE L'ECONOMIE, DES
FINANCES ET DE L'INDUSTRIE N'APPARAISSENT PAS SATISFAISANTES
Selon les informations recueillies par votre rapporteur auprès des
professionnels, une réunion a eu lieu au ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, le 19 octobre 1999,
s'agissant des conditions d'application du taux réduit de TVA aux
travaux réalisés dans des copropriétés et portant
sur des parties communes, afin de régler les problèmes que posent
l'instruction fiscale du 14 septembre 1999.
Certaines décisions ont été prises :
- les gestionnaires des copropriétés adressent aux entreprises
une attestation indiquant la répartition des locaux entre locaux
à usage d'habitation et autres locaux.
La répartition des
charges, étape ultérieure, se ferait à partir du montant
hors taxe des travaux et des règles de la loi de 1965
.
Si la répartition des charges est faite sur le montant hors taxe, cela
suppose que la charge fiscale serait déterminée en fonction du
seul usage des locaux. L'objectif est bien de faire bénéficier
les propriétaires de logements d'habitation de la mesure de TVA à
taux réduit.
Il y aurait donc une double clé de répartition des charges de
copropriété, avec, dans un premier temps, une répartition
des charges hors taxes suivant les dispositions de la loi de 1965, puis une
répartition de la charge fiscale en fonction de l'occupation des lots.
Cette solution est encore très complexe.
On peut par ailleurs se
demander s'il ne s'agit pas d'une entorse à la loi de 1965, qui ne
prévoit pas de modalité de répartition des charges en
fonction de l'occupation.
-
concernant l'affectation des locaux
, la répartition entre
locaux d'habitation et locaux professionnels serait faite une fois par an
seulement, au moment de l'assemblée générale des
copropriétaires. Cette répartition vaudrait pour tous les
travaux, réguliers, comme ponctuels.
La précision selon laquelle le prorata serait déterminé
une fois par an, sans tenir compte des modifications d'affectation
infra-annuelles, est une avancée.
Toutefois, la règle de la quote-part définie une fois par an,
pour tous les travaux, pourrait trouver des problèmes d'application
lorsque les travaux sur les parties communes ne concerneront, dans les faits,
que des locaux d'habitation
(ex : travaux sur une cour intérieure,
alors que les locaux commerciaux compris dans la proratisation, donnent sur
rue). A l'inverse, la production d'une attestation avec une quote-part
différente pour chaque opération, qui serait plus juste, serait
une procédure extrêmement lourde.
-
concernant la réponse des copropriétaires
. Il
apparaît qu'à défaut de réponse, le syndic devra
considérer les logements concernés comme entièrement
à usage professionnel.
Si la réponse est fausse, la
responsabilité incomberait au seul propriétaire, et non au
syndic
, l'administration fiscale se retournant contre lui en application de
l'article 284-I du code général des impôts.
La difficulté d'application de la mesure fiscale aux
copropriétés est soulignée par le fait qu'à titre
transitoire, le ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie
a admis que les travaux réalisés entre le 15
septembre 1999 et la plus prochaine assemblée générale
suivant le 1er avril 1999 soient réalisés suivant les indications
figurant dans le règlement de copropriété
, sauf si la
copropriété détermine pendant cette période la
quote-part de travaux éligibles au taux réduit.
En tout état de cause, le ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie a fait savoir
qu'une nouvelle instruction fiscale
paraîtrait après le vote de la loi de finances.
D. LA SOLUTION PROPOSÉE PAR VOTRE RAPPORTEUR
GÉNÉRAL
En l'état, la mesure TVA pose des difficultés d'application
très importantes pour les copropriétés, car toutes les
solutions proposées par le ministère de l'économie et des
finances imposent un travail complexe aux syndics de copropriété.
La solution consistant à proposer d'appliquer entièrement un
taux réduit de TVA pour tous les travaux réalisés dans les
parties communes des immeubles collectifs
,
que l'immeuble soit en partie
dédié à un usage professionnel ou non,
est plaisante
en raison de sa simplicité, puisqu'elle supprime toutes les
formalités d'attestation.
Toutefois, le service de la législation fiscale considère que
cette solution ne serait pas compatible avec les termes de la directive du 22
octobre 1999. Celle-ci fait référence aux seuls travaux dans les
logements "
privés
".
Votre rapporteur général vous propose donc une solution
simple, c'est-à-dire retenir le critère d'application du taux
réduit de TVA pour chaque logement, en l'appliquant aux parties communes
des immeubles collectifs.
Lorsque l'immeuble est affecté, pour plus de sa moitié, à
un usage d'habitation, le taux réduit de TVA serait applicable
intégralement sur les parties communes, sans prorata, sur attestation du
syndicat des copropriétaires
.
E. D'AUTRES PROBLÈMES D'APPLICATION DE LA MESURE FISCALE
En dehors du cas des immeubles en copropriété, il faut noter
que
l'application du taux réduit de TVA aux travaux dans les
logements d'habitation entraîne d'importantes difficultés de
trésorerie pour les petits entrepreneurs et les artisans
. En effet,
les professionnels achètent leurs fournitures avec une TVA de 20,6% et
doivent facturer leurs travaux au taux de 5,5%. Ils peuvent demander à
l'administration fiscale à bénéficier d'un crédit
de TVA. En application de l'article 242-0 B de l'annexe II du code
général des impôts, une demande de remboursement peut
être déposée au titre de chaque trimestre civil, lorsque
chacune des déclarations de ce trimestre fait apparaître un
crédit de taxe déductible. La demande doit être
déposée au cours du mois suivant le trimestre
considéré. Cependant, le remboursement n'intervient qu'environ
deux mois plus tard.
Ainsi, les petites entreprises doivent supporter une charge de TVA
importante pendant au moins cinq mois.
Votre rapporteur note qu'il s'agit
simplement de l'application du régime normal en matière de
crédits de TVA, cependant, celui-ci pose des problèmes
particuliers avec le passage au taux réduit. Il apparaît
d'ailleurs, que s'agissant des prestations fournies avant le 15 septembre 1999,
mais qui ont donné lieu à une facture définitive
après cette date, des modalités spéciales de remboursement
des crédits de TVA seraient mises en place.
IV. LE COUT DE LA MESURE : UNE ÉVALUATION INCOMPLETE ET HASARDEUSE
Selon le gouvernement
, le coût global de 19,7 milliards de francs
en 2000 se décompose comme suit :
- coût en TVA : 20,6 milliards de francs ;
- gain en IR : 0,9 milliard de francs.
On peut remarquer que cette évaluation est proche des chiffres
donnés par le gouvernement à votre commission, le 23 juin 1999,
sur une demande de son président
16(
*
)
, Alain Lambert.
Le coût global en 2001 serait réduit à 17,3 milliards de
francs
.
|
TVA à 5,5 % |
Mesure sur les gros travaux |
Mesure sur les petits travaux |
|
||
|
TVA sur
travaux hors équipements
|
Transformation de la RI en CI
|
Transformation du CI à 20 % au 14.09.1999 (a) |
CI à 5 % du 15.09.99 au 31/12/2000 (b) |
CI
entretien
|
Incidence totale des mesures |
2000 |
- 20.600 millions de francs |
480 millions de francs |
590 millions de francs |
- 150 millions de francs |
440 millions de francs |
- 19,7 milliards de francs |
2001 |
- 22.100 millions de francs |
3.300 millions de francs |
2.000 millions de francs |
- 500 millions de francs |
1.500 millions de francs |
- 17,3 milliards de francs |
Les incidences en 2000 des mesures en IR (revenus 1999) sont déterminées à partir des incidences en année pleine affectées du prorata temporis corrigé, pour la mesure sur les gros travaux, d'une hypothèse de réfaction de 50 %, la réalisation de ces travaux étant supposée plus concentrée sur les trois premiers trimestres
PLF
2000 article 3 : TVA à 5,5 % sur les travaux immobiliers à
compter du 15.09.99
Coût de la mesure TVA en 2000 : 20,6 milliards de francs
Base totale des travaux |
" Occupants " |
Bailleurs |
Locaux vacants |
|
Actualisation |
||||
(montants en millions de francs) |
Propriétaires occupants |
Résidences secondaires |
Locataires |
Personnes physiques |
Sociaux* |
Institutionnels |
Locaux d'hébergement |
Total 1996 |
Hyp+ 2 % par année |
Total petits travaux |
43.420 |
9.936 |
21.724 |
6.418 |
11.300 |
813 |
6.484 |
100.095 |
106.222 |
Total gros travaux |
105.676 |
8.595 |
0 |
18.613 |
- |
1.977 |
0 |
134.861 |
143.116 |
Total |
149.096 |
18.531 |
21.724 |
25.031 |
11.300 |
2.790 |
6.484 |
234.956 |
249.337 |
*Travaux d'entretien des bailleurs sociaux actuellement
soumis au
taux normal et qui bénéficieront du taux réduit dans un
système de livraison à soi-même (LASM)
Source : Comptes des travaux (montants en millions de francs)
Estimation du coût de la mesure (en milliards de francs)
Base éligible TTC |
120.881 |
23.779 |
10.170 |
2.651 |
6.484 |
163.965 |
174.001 |
(a) Exclusion des gros équipements et des travaux d'agrandissement, de mainte-nance, d'entretien des espaces verts |
(a) |
|
(a) |
(a) |
|
|
|
(b) Hors autoproduction des ménages : 34 mds de francs |
(b) |
|
(a) |
(a) |
|
|
|
Base HT |
100.233 |
19.718 |
8.433 |
2.198 |
5.376 |
135.958 |
144.279 |
Coût de la baisse de taux |
- 15.135 |
- 2.977 |
- 1.273 |
- 332 |
- 812 |
- 20.530 |
- 21.786 |
Effet sur le travail au noir |
|
|
|
|
|
1.100 |
1.167 |
Coût net de la mesure |
- 15.135 |
- 2.977 |
- 1.273 |
- 332 |
- 812 |
- 19.430 |
- 20.619 |
|
|
|
|
|
|
arrondi |
- 20.600 |
L'évaluation du coût de la mesure est
fondée sur
les données existant dans les comptes du logement de 1996, et
réactualisées.
L'évaluation du coût net de la mesure TVA apparaît donc
largement fictive,
car elle repose sur des données anciennes (1996)
même si elles sont " actualisées ", et que ces
données s'appuient une simple méthode d'enquête et non sur
des statistiques complètes.
On peut remarquer que de nombreux éléments ne sont pas pris en
compte dans l'évaluation.
L'évaluation proposée par le gouvernement tient compte de la
régularisation du travail au noir
pour 1,1 milliard de francs, ce
qui représente 20 milliards de francs de travaux
régularisés (8% des travaux existant) et désormais soumis
à un taux réduit de TVA.
Par contre, l'évaluation ne tient pas compte
des effets de
demande
induits par la baisse globale du coût des travaux,
ni des
retours attendus en termes de cotisations sociales et impôts
du fait
de l'augmentation ou de la régularisation de l'emploi dans le secteur de
la rénovation immobilière.
De même,
l'hypothèse d'une augmentation du coût des
travaux
, consécutive à un déséquilibre entre
l'offre et la demande, n'est pas envisagée : l'augmentation des prix
aurait pourtant pour effet de réduire l'avantage fiscal proposé
par la mesure.
En définitive, l'évaluation se fonde sur des données
anciennes, l'ensemble des retours en termes de cotisations et d'impôts ne
sont pas pris en compte, et le taux de régularisation du travail au noir
semble choisi " au hasard ".
Si elle est pour le moins hasardeuse, cette évaluation permet toutefois
de tirer des enseignements quant à l'impact attendu de la diminution de
la TVA.
Au total,
les propriétaires-bailleurs
ne devraient
bénéficier de la mesure qu'à hauteur de 4,5 milliards de
francs en 2000 (2,9 milliards pour les personnes physiques et 1,2 milliard pour
les HLM, dont les travaux sont déjà très largement au taux
réduit, sous la forme du mécanisme de la livraison à
soi-même).
Les
" occupants "
devraient bénéficier d'un
avantage de 15,1 milliards de francs. Parmi ces occupants,
ce sont
évidemment les propriétaires qui retireront l'avantage le plus
important
, puisque les locataires ne réalisent que 11% des travaux,
qui, de surcroît, entrent exclusivement dans le domaine des petits
travaux.
Il apparaît dès lors que la mesure ne concernera qu'une partie
de la population française
17(
*
)
, et que ses effets redistributifs
seront nuls.
V. UN DISPOSITIF NÉCESSAIRE MAIS INSATISFAISANT
La mesure de baisse de la TVA sur les travaux réalisés dans les
logements est susceptible d'avoir des effets économiques non
négligeables pour le secteur du bâtiment.
La commission des finances du Sénat s'était d'ailleurs
prononcée, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1999, en
faveur d'une action auprès de l'Union européenne pour faire
entrer les travaux dans les logements dans le champ d'application du taux
réduit.
Lors de l'examen de la loi de finances pour 1998, elle avait souhaité
déjà
" qu'une réflexion s'engage, avec nos
partenaires européens, sur l'application du taux réduit de TVA au
secteur de la rénovation du logement. En effet, une telle mesure aurait
un fort contenu en emplois et serait plus adaptée à la nature
actuelle des besoins des économies européennes, dont le parc de
logements a basculé d'une phase de reconstruction dans une phase de
rénovation et de renouvellement ".
Cette position a été réitérée dans le
rapport d'information précité réalisé au nom de
votre commission intitulé " Comment baisser le taux de TVA ".
Ce dernier se prononçait en faveur des baisses ciblées de TVA et
considérait que le secteur des travaux dans le logements offrait des
"
potentialités (...) très réelles de
créations d'emplois
".
Cependant, la commission des finances considérait également que
"
l'application d'un taux réduit de TVA au secteur du logement
serait insuffisante à réduire la tentation du travail clandestin
dans l'artisanat du bâtiment, car celle-ci n'est pas seulement
motivée par le poids de la TVA, mais aussi et surtout par celui des
charges sociales, problème auquel le gouvernement n'apporte toujours pas
de réponse "
.
Votre commission maintient l'opinion qu'elle a déjà
exprimée à de nombreuses reprises
: elle approuve le principe
d'une diminution de la TVA sur les travaux dans les logements, dans la mesure
où celle-ci devrait s'inscrire dans un mouvement plus
général de diminution du poids des prélèvements
obligatoires
18(
*
)
. Elle refuse
toutefois de considérer cette disposition comme une mesure fiscale
majeure, alors qu'aucune réforme du système fiscal et social
n'est engagée.
Concernant l'impact de la mesure,
seul l'impact économique semble
réel
. En matière sociale, il est évident que la
diminution de la TVA profitera presque exclusivement aux propriétaires
(qui réalisent 90% des travaux) et d'autant plus qu'ils feront des
travaux importants.
En d'autres termes, les ménages aux revenus
élevés bénéficieront davantage du
différentiel de TVA.
D'une manière générale,
comme l'a souligné la récente étude du Conseil d'analyse
économique qui est placé auprès du Premier ministre, la
baisse de la TVA n'a pas de caractère redistributif : elle a seulement
un impact sur un secteur économique donné
19(
*
)
.
Lors de son audition devant la commission des finances du Sénat, le 21
octobre dernier, M. Philippe Sigogne, directeur du département des
analyses et prévisions de l'Observatoire français des
conjonctures économiques (l'OFCE) a confirmé cette analyse, en
estimant " contre-redistributive " la mesure d'allégement de
la TVA proposée par le gouvernement.
S'agissant du secteur choisi
, celui du logement, il y a lieu de s'en
féliciter. Il est en effet porteur d'emplois. Cependant, outre que la
mesure intervient précisément au moment où le secteur du
bâtiment a retrouvé son niveau d'emplois d'avant la crise des
années 90, au risque de créer une " surchauffe " par
une insuffisance d'offre, d'autres secteurs sont désormais en droit
d'exiger une même mesure de faveur. Le secteur de la restauration en
particulier, qui est également " à forte intensité de
main d'oeuvre " ne comprend en effet pas pourquoi le gouvernement et
l'Union européenne refusent de lui appliquer une TVA à taux
réduit.
Concernant l'application de la mesure
, il apparaît que celle-ci
entraîne une certaine complexité. Des cas particuliers, parfois
importants (ex : le traitement fiscal des logements de fonction) ne
sont toujours pas réglés. L'instruction fiscale parue
récemment comporte des omissions qui devront être
réparées par la parution, une fois la loi de finances
adoptée, d'une seconde instruction fiscale.
Enfin, malgré la diminution d'impôts annoncée (19,7
milliards de francs),
rien ne permet d'évaluer
précisément le coût de la mesure et donc le " cadeau
fiscal " du gouvernement
. Les retours en termes de cotisations
sociales et d'impôts pourraient largement compenser la réduction
ainsi accordée.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article ainsi amendé.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE
3
Application
du taux réduit de la TVA
au service extérieur des pompes
funèbres
Commentaire : le présent article tend à faire bénéficier les prestations liées au service extérieur des pompes funèbres du taux réduit de la TVA.
I. LE DROIT EUROPÉEN PERMET D'APPLIQUER LE TAUX
RÉDUIT DE LA TVA AUX SERVICES FUNÉRAIRES
A. LES RÈGLES FIXÉES PAR LE DROIT EUROPÉEN
La 15
ème
catégorie de l'annexe H à la
sixième directive autorise l'application du taux réduit de TVA
aux " services fournis par les entreprises de pompes funèbres et de
crémation ainsi que la livraison des biens qui s'y rapportent ".
Elle ne concerne donc que les services rendus par les entreprises de pompes
funèbres proprement dites, et non ceux, qui pourraient y avoir trait
(fourniture de fleurs, de faire-part...) mais qui sont fournis par des
entreprises dont le service funéraire n'est pas la
spécialité.
Il convient de faire la part, dans les opérations effectuées par
ces dernières, entre celles qui relèvent de leur mission
obligatoire (service extérieur des pompes funèbres régi
par le code général des pompes funèbres) et celles qui,
même si elles peuvent être prises en charge par ces entreprises,
sont le plus généralement assurées par des entreprises qui
n'ont pas le statut d'entreprises de pompes funèbres (fleuristes,
imprimeurs, entreprises de marbrerie, entreprises de maçonnerie).
L'application du taux réduit aux opérations de cette
deuxième catégorie n'est pas autorisée par la directive
n° 92/77/CEE du 19 octobre 1992 lorsque le service n'est pas rendu par une
entreprise de pompes funèbres. A contrario, il ne serait pas possible,
compte tenu des distorsions de concurrence qui en résulteraient, de
soumettre ces mêmes opérations au taux réduit lorsqu'elles
sont effectuées directement ou indirectement par une entreprise de
pompes funèbres.
B. LE SERVICE EXTÉRIEUR DES POMPES FUNÈBRES
En France, est considérée comme une mission de service public le
" service extérieur des pompes funèbres ", tel que
prévu à l'article L. 2223-19 du code général des
collectivités territoriales. Il comprend notamment :
- le transport de corps avant et après mise en bière ;
- l'organisation des obsèques ;
- les soins de conservation ;
- la fourniture de cercueils et accessoires ;
- la fourniture des corbillards et des voitures de deuil ;
- la fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires
aux obsèques, à l'exception des plaques funéraires,
emblèmes religieux, fleurs, marbrerie funéraire, travaux
d'imprimerie.
Il s'agit d'un ensemble d'opérations qui correspond en tout état
de cause au domaine d'activité des entreprises de pompes funèbres.
La construction, l'entretien et la vente de caveaux ne relèvent pas, en
revanche, du service extérieur des pompes funèbres. Il en est de
même pour les activités annexes telles que la vente de fleurs ou
l'impression de faire-part.
Actuellement, la seule prestation funéraire soumise au taux
réduit de TVA à 5,5 % est le transport de corps
effectué par les prestataires agréés (exploitants
d'ambulance, services de pompes funèbres) dans des véhicules
aménagés
.
Ceci découle des dispositions de
l'article 279 b quater du code général des impôts, qui
prévoit un taux réduit de la TVA pour les " transports de
voyageurs ", auquel a été assimilé le transport de
corps, comme l'a confirmé récemment le gouvernement
20(
*
)
.
II. UTILISER LES POTENTIALITÉS OFFERTES PAR LE DROIT
EUROPÉEN EN MATIÈRE DE TAUX DE LA TVA APPLICABLE AUX SERVICES
FUNÉRAIRES
Il est proposé de réduire le taux de la TVA portant sur les
prestations liées au service extérieur des pompes funèbres
tel que prévu par le code général des collectivités
territoriales.
Le droit européen permettrait certes d'aller plus loin en englobant dans
le champ de la baisse de la TVA la totalité des services fournis par les
entreprises ayant le statut d'entreprises de pompes funèbres, y compris
ceux qui n'ont pas un caractère obligatoire (fourniture de fleurs,
travaux d'imprimerie, etc.). Mais, compte-tenu des distorsions de concurrence
qui pourraient en résulter, notamment vis-à-vis des entreprises
n'ayant pas le statut d'entreprises de pompes funèbres mais susceptible
de fournir un service équivalent (fourniture de fleurs, travaux
d'imprimerie), il est proposé de limiter le champ de la baisse de la TVA
aux prestations funéraires à caractère obligatoire,
c'est-à-dire au service extérieur des pompes funèbres.
Cette mesure va dans l'intérêt des familles : la
dépense relative aux prestations de services funéraires, qui
intervient à un moment particulièrement pénible dans la
vie des familles, est en effet très lourde, et elle l'est d'autant plus
que le revenu des personnes est modeste.
Les services funéraires peuvent en outre être
considérés comme des biens de première
nécessité car ils sont indispensables et obligatoires. Il s'agit
donc d'une mesure de justice sociale.
Son coût est estimé à 700 millions de francs par le
gouvernement.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE 3 bis (nouveau)
Modification du
régime simplifié d'imposition
Commentaire : le présent article a pour objet
l'aménagement du système d'acomptes prévu par l'article 9
de la loi de finances pour 1999.
Cet article vise à répondre aux critiques adressées par
certaines entreprises à l'encontre des nouvelles modalités du
régime simplifié d'imposition, dit RSI, qui ont été
instituées par l'article 9 de la loi de finances pour 1999.
I. L'ÉTAT ACTUEL DU DROIT : LES NOUVELLES MODALITÉS DU
RÉGIME SIMPLIFIÉ D'IMPOSITION
Ce régime qui est prévu par l'article 302
septies
A du
code général des impôts concerne en principe toutes les
entreprises dont le chiffre d'affaires n'excède pas 1,5 million ou 5
millions de francs selon la nature de l'activité
exercée
21(
*
)
.
Afin de s'acquitter de leurs obligations en matière de paiement de la
TVA, elles devaient déposer chaque année quatre
déclarations trimestrielles
22(
*
)
abrégées (formulaire
CA4) accompagnées de versements provisionnels calculés de
façon semi-forfaitaire
23(
*
)
puis une déclaration
récapitulative (formulaire CA12) l'année suivante, soit au total
cinq imprimés.
Ce système s'est révélé particulièrement
lourd et complexe pour les petites entreprises.
L'article 9 de la loi de finances pour 1999 a substitué, pour le
paiement de la taxe sur la valeur ajoutée dans le cadre du RSI, un
système d'acomptes fixe sur le fondement d'une déclaration
annuelle de chiffre d'affaires au régime déclaratif
antérieur. Cette réforme a considérablement
simplifié les obligations comptables des redevables concernés
mais, dans le même temps, son entrée en vigueur a
révélé certaines difficultés d'application.
D'une part, ce dispositif d'acomptes fixes ne tient pas compte de
l'irrégularité éventuelle, au cours de l'exercice, du
niveau du chiffre d'affaires, ce qui est susceptible d'engendrer des
difficultés de trésorerie pour les entreprises soumises au
régime simplifié.
D'autre part, la TVA acquittée par les redevables à l'occasion
de leurs investissements n'est pas imputable sur les acomptes. Elle peut
seulement faire l'objet d'une demande de remboursement, ce qui peut
également entraîner certains délais. Les entreprises du
secteur du bâtiment risquent d'être pénalisées par
cette règle, la part de leur TVA d'amont, sur investissement,
étant appelée à s'accroître par rapport à
leur TVA d'aval, facturée au client, compte tenu de la baisse du taux
sur les travaux prévue par l'article 3 du présent projet de loi
de finances.
II. LE DISPOSITIF SOUMIS À VOTRE COMMISSION
A l'initiative unanime de sa commission des finances, l'Assemblée
nationale a adopté le présent article, qui vise à modifier
le régime simplifié d'imposition en aménageant le
système d'acomptes fixes.
Il est proposé d'autoriser les redevables dont la TVA due au titre des
opérations courantes d'un trimestre - diminuée, le cas
échéant, de la taxe déductible au titre des
investissements - est inférieure d'au moins 10 % au montant de
l'acompte, à diminuer à due concurrence le montant de cet acompte
en remettant au comptable chargé du recouvrement une déclaration
datée et signée, susceptible d'un contrôle par les services
fiscaux.
La prise en compte par le système fiscal de la
spécificité d'un secteur et des aléas auxquels sont
confrontés les entreprises, face à une réglementation
fiscale souvent complexe, va dans le bon sens.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 4
Application du taux réduit de
5,5
% de la taxe sur la valeur ajoutée aux services d'aide à la
personne
Commentaire : le présent article tend à
réduire à 5,5 % le taux de la TVA sur les prestations des
services d'aide à la personne fournies par des entreprises
agréées.
I. LES SERVICES D'AIDE A LA PERSONNE : UN SECTEUR PEU
DÉVELOPPÉ OÙ DOMINE UNE OFFRE À CARACTÈRE
ASSOCIATIF
A. LA NOTION DE " SERVICES D'AIDES À LA PERSONNE "
Les services d'aides à la personne, qualifiés parfois de services
de proximité, d'emplois familiaux, de services aux particuliers ou de
services à domiciles, comportent deux aspects.
Il peut s'agir, d'une part, de services que le développement du travail
féminin, notamment, rend toujours plus nécessaires
(accomplissement de certaines tâches domestiques, garde des enfants,
soutien scolaire, etc.), et d'autre part, de prestations liées au
maintien à domicile des personnes âgées, dépendantes
ou handicapées (préparation des repas, toilette, etc.).
B. UN SECTEUR ENCORE ÉMERGENT
Ce secteur se caractérise par son fort contenu en main d'oeuvre et par
une demande non satisfaite encore importante.
La taille du marché des services d'aide à la personne est
cependant difficile à quantifier car le secteur ne correspond pas
à une catégorie déterminée des nomenclatures
statistiques.
Les statistiques du ministère de l'emploi et de la solidarité
(délégation générale à l'emploi et à
la formation professionnelle), relative aux agréments
délivrés au titre de l'article L. 129-1 du code du travail font
état de 79 agréments en 1998 pour les entreprises
privées contre 5.094 agréments pour des associations
exonérées de taxe sur la valeur ajoutée par l'article
261-7-1°
ter
du code général des impôts. Cela
étant, le nombre d'heures payées par les entreprises
privées agréées aurait plus que doublé entre 1997
et 1998 : 118.000 en 1997, 279.000 en 1998.
L'exploitation des déclarations de taxes sur le chiffre d'affaires
indique un chiffre d'affaires (hors taxes) taxable du code 853 J (" aides
à domicile ") de 164 millions de francs en 1997.
D'après le Conseil d'analyse économique
24(
*
)
, le secteur des services de
proximité employait 1,2 million de personnes en 1997, soit environ
400.000 emplois (en équivalents temps plein), contre la
moitié seulement en 1992.
La demande ne serait aujourd'hui pas satisfaite. D'après le syndicat des
entreprises de services à la personne (SESP), 6 millions de
ménages seraient demandeurs de ce type de services, soit une demande
latente de 35 milliards de francs et l'équivalent temps plein de
300.000 emplois. La demande émanerait de foyers dont les revenus
mensuels sont compris, dans l'ensemble, entre 12.000 et 30.000 francs.
C. L'OFFRE ASSOCIATIVE DOMINE
1. L'offre associative
Les associations sont très présentes sur le marché, soit
comme
mandataires
(elles assurent alors le recrutement des
salariés pour des particuliers qui deviennent leur employeur et les
aident dans l'accomplissement des obligations sociales, administratives et
fiscales liées à cet emploi), soit comme
prestataires
(elles proposent alors une prestation de services à des personnes
physiques), le cas échéant en recrutant à cet effet des
personnes en difficulté dans le cas des
associations
intermédiaires
. Leur régime fiscal est sensiblement
identique :
- les associations prestataires doivent être agréées
(article L.129-1 I 2° du code du travail). Les rémunérations
des aides à domicile employées sous contrat à durée
indéterminée sont totalement exonérées des
cotisations patronales de sécurité sociale. Les
bénéficiaires des prestations ont droit à une
réduction d'impôt. Les associations prestataires sont
exonérées de TVA, d'impôt sur les bénéfices
et, aujourd'hui, de taxe professionnelle. En revanche, elles sont soumises
à la taxe sur les salaires, mais elle bénéficient d'un
abattement ;
- les travailleurs placés par des associations mandataires
bénéficient des dispositions fiscales et sociales applicables aux
travailleurs employés de gré à gré :
chèque emploi-service, cotisations sociales versées sur une base
forfaitaire et non sur le salaire réel, exonération de
cotisations patronales de sécurité sociale dans certains cas,
réduction d'impôt sur le revenu ;
- les associations intermédiaires sont exonérées de
cotisations patronales de sécurité sociale, supportent la taxe
sur les salaires, mais ne sont pas assujettis aux impôts commerciaux.
2. Des entreprises encore peu nombreuses
La loi du 29 janvier 1996 en faveur du développement des emplois de
services aux particuliers permet à des entreprises d'être
agréées, sur le fondement de l'article L. 129-1 I 2° du code
du travail, pour fournir des services d'aides à la personne. Le
régime fiscal et social dont elles relèvent est cependant
différent de celui qui prévaut pour les associations. Les
entreprises agrées sont en effet soumises au régime de droit
commun en matière de cotisations sociales, de taxe sur la valeur
ajoutée, d'impôt sur les sociétés, de taxe
professionnelle. En revanche leurs clients bénéficient de la
réduction d'impôt prévue à l'article 199
sexdecies
du code général des impôts.
Ce régime fiscal expliquerait la relative absence des entreprises sur le
secteur des aides à domicile : les entreprises mettent en avant un
manque de rentabilité dont les causes sont en grande partie d'origine
fiscale. Elles supportent en effet une taxe sur la valeur ajoutée de
20,6 % ce qui rend plus onéreuses leurs prestations par rapport aux
associations soumises à la taxe sur les salaires, et, plus encore, par
rapport aux particuliers-employeurs qui ne sont assujettis ni à la taxe
sur la valeur ajoutée ni à la taxe sur les salaires.
II. UNE BAISSE DE LA TVA EN FAVEUR DES ENTREPRISES POURRAIT RELANCER LE
SECTEUR DES SERVICES D'AIDE À LA PERSONNE
A. LE CONTEXTE EUROPÉEN
Les services d'aide à la personne font partie des prestations que les
Etats membres de l'Union européenne ont été
autorisés à soumettre au taux réduit de TVA, à
titre expérimental, par la directive 1999/85/CE sur les services
à forte intensité de main d'oeuvre, adoptée lors du
Conseil du 22 octobre 1999
25(
*
)
.
La directive 1999/85/CE permet à chaque Etat membre de choisir dans une
liste limitative deux activités qui bénéficieront d'un
taux de TVA réduit. Dans certains cas " exceptionnels ", les
Etats membres peuvent réduire le taux de TVA applicable à un
troisième secteur d'activité.
Le présent article utilise les facultés offertes par le droit
européen en proposant de diminuer le taux de TVA sur les services
d'aide à la personne. Il concerne en réalité deux
prestations différenciées dans la liste établie par le
Conseil de l'Union Européenne puisqu'il recouvre à la fois les
"
services de soin à domicile
" et le "
lavage
des vitres et nettoyage de logements privés
".
B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
En complétant l'article 279 du code général des
impôts, le présent article propose de soumettre au taux
réduit de la TVA (5,5 %), au lieu du taux normal (20,6 %), les
prestations de service fournies par des entreprises agréées, en
application du II de l'article L.129-1 du code du travail.
La mesure s'appliquerait jusqu'au 31 décembre 2002, conformément
à l'autorisation communautaire.
L'évaluation du coût de la mesure est délicate, car
aujourd'hui les services concernés sont, dans la majorité des
cas, fournis par des associations exonérées de TVA ou par des
personnes directement salariées auprès de particuliers. A offre
constante, le coût de l'application du taux réduit aux services
d'aides à la personne serait négligeable. Mais les statistiques
du ministère de l'emploi et de la solidarité font
apparaître le caractère émergent du marché, qui
connaît une forte croissance.
Le coût de la mesure peut cependant être évalué, en
première année d'application, à 100 millions de francs,
compte tenu du développement qu'on peut attendre dans ce secteur
dès l'annonce de la baisse de taux. Il est en effet probable que les
entreprises intéressées par ce nouveau créneau attendent
une baisse de taux pour structurer leur offre.
III. LA POSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En première lecture l'Assemblée nationale a adopté cet
article sans modification.
Il convient cependant de rapprocher l'adoption de cet article d'autres articles
figurant également dans le présent projet de loi de finances.
Ainsi, à l'initiative de la commission des finances de
l'Assemblée nationale, a été adopté un article 8
bis
, qui tend à porter à 33.000 francs, au lieu de
29.070 francs, l'abattement de taxe sur les salaires prévu par
l'article 1679 A du code général des impôts, au profit,
notamment, des associations.
IV. LA POSITION DE VOTRE RAPPORTEUR
Votre commission est de façon générale favorable aux
mesures qui contribuent à diminuer le poids des
prélèvements obligatoires. Elle s'était à ce titre
déclarée favorable à ce que la TVA applicable à ce
secteur puisse être réduite.
Il convient cependant de s'assurer que la mesure n'aura pas d'effets
négatifs sur les associations
: même si la TVA au taux
réduit ne devait s'appliquer qu'aux entreprises commerciales, alors
qu'elles-mêmes resteraient exonérées, une telle mesure
pourrait se traduire par des effets de substitution voire par une baisse de
l'emploi dans le secteur associatif. A ce titre, les associations
évoquent notamment un "
risque de déstabilisation de
l'emploi
".
Une proposition de résolution (n° 1526, Xème
législature) adoptée par l'Assemblée nationale le 17 juin
dernier demandait ainsi au Gouvernement de "
mesurer avec soin les
effets qu'un assujettissement au taux réduit de la TVA de certains
services rendus aux personnes pourrait exercer sur l'offre associative, avant
d'envisager de mettre en oeuvre une telle mesure dans le cadre de
l'expérimentation proposée par la Commission
européenne
". A ce jour, selon les informations
communiquées à votre rapporteur général, cette
demande est restée sans réponse.
Votre rapporteur général estime donc nécessaire que le
gouvernement apporte toute précision en ce domaine afin notamment qu'il
ne soit pas porté atteinte à la situation des associations qui
opèrent déjà dans ce secteur.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 4 bis (nouveau)
Extension de
l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée à toutes
les cessions réalisées par les SAFER
Commentaire : le présent article vise à
étendre le régime d'exonération de taxe sur la valeur
ajoutée (TVA) en faveur des sociétés d'aménagement
foncier et d'établissement rural (SAFER) à l'ensemble de leurs
opérations.
I. LE RÉGIME DES SAFER A CONNU DES MODIFICATIONS IMPORTANTES AU COURS DE
L'ANNÉE ÉCOULÉE
A. LES MODIFICATIONS INTERVENUES
1. L'innovation de la loi de finances rectificative pour 1998
L'an dernier, afin de combler partiellement l'écart de
compétitivité creusé au détriment des SAFER par
l'article 39 de la loi de finances pour 1999
26(
*
)
sur la diminution des droits de
mutation, l'Assemblée nationale
27(
*
)
a introduit un article
exonérant de taxe de publicité foncière les acquisitions
et les cessions d'immeubles réalisées par les SAFER.
Jugeant cette mesure souhaitable mais insuffisante, et afin d'amplifier
l'effort fait en faveur des SAFER, le Sénat a adopté, contre
l'avis du gouvernement, suivi en nouvelle lecture par l'Assemblée
nationale, un amendement permettant de supprimer toute perception du
Trésor sur les acquisitions et les cessions des SAFER
28(
*
)
.
2. L'élargissement des missions prévu dans la loi
d'orientation agricole
La loi d'orientation agricole
29(
*
)
a étendu le droit de
préemption des SAFER pour la réalisation de projets de mise en
valeur des paysages et de protection de l'environnement approuvés par
l'Etat ou les collectivités locales et leurs établissements
publics.
En outre, les SAFER sont désormais autorisées à
acquérir des parts de sociétés à objet agricole
afin d'intervenir à l'amiable sur le marchés des exploitations
à forme sociétaire.
B. MALGRÉ CES MESURES FAVORABLES AUX SAFER, CELLES-CI CONNAISSENT
UN LENT RECUL DE LEUR ACTIVITÉ
Les SAFER orientent environ 20 % du marché foncier des terres agricoles
en surface (et 9,5 % en nombre de transactions). Si l'on observe ce
marché depuis 1993, on observe une
tendance nette au recul de
l'activité des SAFER
tant en nombre de transactions, qu'en surface
ou en valeur
: entre 1993 et 1998, les interventions des SAFER sont
passées de 27 à 22 % en volume et de 23 à 18 % en
valeur.
Un rapport commandé par M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de
la pêche, devrait permettre au premier semestre 2000 de dresser un
panorama complet de la situation actuelle des SAFER.
II. LA PROPOSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A. UNE MESURE VISANT À CONFORTER LES SAFER
Cet article, introduit à l'Assemblée nationale à
l'initiative de M. Augustin Bonrepaux, président de la commission
des finances, prévoit
l'extension de l'exonération de TVA sur
les acquisitions et cessions d'immeubles ruraux à destination agricole
effectués par les SAFER
.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche, a
apporté son soutien à cette initiative lors du Congrès
national de la Fédération nationale des SAFER (FNSAFER) qui s'est
tenu le 4 novembre 1999 à Gaillac.
Le régime actuel d'exonération de TVA pour les opérations des SAFER
L'article 261 du code général des
impôts
,
repris par l'article L.142-3 du code rural prévoit que sont
exonérées de TVA :
. les opérations immobilières réalisées dans le
cadre des activités des SAFER (dont le champ est défini par les
articles L. 141-1 à L. 141-5 du code rural), à l'exception des
cessions d'immeubles acquis postérieurement au 23 janvier 1990 (
d du
1° du 5 de l'article 261 du code général des
impôts
) ;
. les cessions qui, ayant pour objet le maintien, la création ou
l'agrandissement d'exploitations agricoles, sont assorties d'un engagement de
l'acquéreur pris pour lui et ses ayant causes de conserver la
destination des immeubles acquis pendant un délai de 10 ans à
compter du transfert de propriété ; la même
exonération s'applique aux cessions de parcelles boisées à
condition que l'ensemble de ces parcelles n'excède pas 10 hectares ou,
dans le cas contraire, ne soit pas susceptible d'aménagement ou
d'exploitation régulière ; ces dispositions ne s'appliquent
qu'aux cessions des immeubles acquis postérieurement au 23 janvier 1990
(
d
bis
du 1° du 5 de l'article 261 du code
général des impôts
).
Le présent article vise à modifier la rédaction du d
bis
du 1° du 5 de l'article 261 du code général des
impôts. Il intègre l'élargissement des missions des SAFER
dans sa rédaction et supprime les conditions spécifiques qui
pesaient sur les cessions de parcelles boisées. Désormais toutes
les cessions de biens devraient bénéficier d'une
exonération de TVA si elles répondent aux deux conditions
suivantes :
• relever du champ des missions des SAFER tel que défini à
l'article L. 141-1 du code rural,
• faire l'objet d'un engagement de l'acquéreur de conserver la
destination du bien pendant au moins dix ans.
Le coût de cette extension d'exonération devrait être
d'environ
6 millions de francs
30(
*
)
.
B. DES MESURES COMPLÉMENTAIRES SONT D'ORES ET DÉJÀ
PRÉVUES
M. Augustin Bonrepaux, président de la commission des finances de
l'Assemblée nationale, a annoncé qu'il présenterait
également dans le cadre de l'examen des articles de deuxième
partie du projet de loi de finances pour 2000, un article additionnel visant la
suppression de tout droit d'enregistrement
sur les opérations des
SAFER, pour un coût d'environ
14 millions de francs.
En outre, lors du Congrès de la FNSAFER, M. Jean Glavany, ministre de
l'agriculture et de la pêche, a rappelé que la participation du
budget de l'Etat au fonctionnement des SAFER s'élevait à 43,7
millions de francs pour 1999 et à 45 millions de francs pour 2000 (soit
une augmentation de 2,9 %). En outre, il s'est dit décidé
à renforcer ce financement par les possibilités offertes par le
nouveau règlement communautaire sur le développement rural qui
comporte une rubrique " remembrement des terres ".
Il envisage également qu'un
contrat pluriannuel,
conclu entre les
SAFER, la FNSAFER et les pouvoirs publics au cours du premier semestre 2000,
détermine les modalités d'un financement public pérenne
pour la durée du contrat. Celui-ci devrait être
négocié sur la base notamment des conclusions du rapport
précité commandé par le ministre.
Il est également question d'instaurer un observatoire sur les SAFER
regroupant la FNSAFER et les ministères de l'agriculture et de la
pêche, de l'économie, des finances et de l'industrie, et de la
justice.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 5
Réduction des droits de
mutation
à titre onéreux
Commentaire : le présent article a pour objet de
réduire les droits de mutation à titre onéreux concernant
les immeubles d'habitation, afin d'aligner ces droits sur ceux pesant sur les
immeubles professionnels et de diminuer les droits de mutation à titre
onéreux sur les cessions de fonds de commerce.
L'article 39 de la loi de finances pour 1999 a
abaissé de
manière significative les droits de mutation à titre
onéreux
pour les immeubles d'habitation (de 7 % à 6 %
environ) et surtout sur les locaux professionnels (de 18,2 % à 4,80 %),
tout en relevant la taxation des cessions de parts de sociétés
à prépondérance immobilière (désormais
taxées à 4,80 %).
Le coût de la compensation pour l'Etat s'est élevé à
8,6 milliards de francs, inscrits en dépenses au budget du
ministère de l'intérieur (dont 5,3 milliards de francs pour
les régions et 3,3 milliards de francs pour les
départements). Le coût net était de 3,7 milliards de
francs, du fait de la taxation des cessions de parts de sociétés
à prépondérance immobilière, pour un gain de 4,9
milliards de francs.
Le présent article propose de poursuivre l'abaissement des droits de
mutation, en alignant les droits perçus sur les immeubles d'habitation
sur ceux perçus pour les immeubles professionnels.
Il propose également une diminution des droits de mutation sur les fonds
de commerce.
I. L'ABAISSEMENT DES DROITS DE MUTATION A TITRE ONEREUX SUR LES IMMEUBLES
D'HABITATION
A. LE DROIT EXISTANT
Lorsqu'une cession d'immeubles donne lieu au paiement de la TVA
" immobilière ", (art. 257-7° du CGI) c'est-à-dire
quand la cession intervient en cours de construction ou moins de 5 ans
après l'achèvement de l'immeuble, le droit d'enregistrement est
nul. La cession supporte toutefois une taxe de publicité foncière
au taux de 0,60 % liquidée sur le prix hors taxe (art. 692 du CGI)
majorée du prélèvement pour frais d'assiette et de
recouvrement de 2,5 %.
Dans les autres cas, les ventes d'immeubles donnent ouverture à un
droit qui se décompose comme suit
:
- un
droit proportionnel perçu au profit du département,
dont le taux varie selon l'usage de l'immeuble et sa situation ;
- une
taxe additionnelle perçue au profit de la commune
(CGI,
art. 1584) ou d'un fonds de péréquation départemental
pour les communes de moins de 5.000 habitants (CGI, art. 1595 bis) de 1,20 % ;
- un
prélèvement perçu au profit de l'Etat
au titre
des frais d'assiette et de recouvrement du droit départemental de 2,5 %
sur le montant du droit (CGI, art. 1647).
La taxe additionnelle régionale
de 1,6 % (CGI, art. 1599
sexies
et 1599
septies
)
a été
supprimée
par l'article 39 de la loi de finances pour 1999.
Par ailleurs, la taxe départementale a été réduite
de 15,4 % à 3,6 % pour :
- les immeubles professionnels, c'est-à-dire les immeubles dont
l'acquéreur a pris l'engagement de les affecter à un autre usage
que l'habitation pendant trois ans au moins à compter de la date de
l'acte d'acquisition ;
- les immeubles achetés par les mutuelles, les association cultuelles,
les associations reconnues d'utilité publique ayant pour objet
l'assistance, la bienfaisance ou l'hygiène sociale, en vue d'être
affectés à l'habitation, lorsqu'ils sont nécessaires au
fonctionnement de leurs services ou de leurs oeuvres sociales (ex : foyer ou
hôtel d'hébergement).
Au total, les mutations d'immeubles professionnels sont donc taxées
à 4,80 % correspondant à un taux départemental de 3,60 %
et à la taxe additionnelle communale de 1,20 %, alors que les immeubles
d'habitation supportent des droits plus élevés et variables en
fonction du niveau des droits départementaux (de 5,40 % à 6,20 %).
Droits de mutation à titre onéreux au 1er janvier 1999
|
Immeubles d'habitation |
Immeubles professionnels |
Droit départemental |
de 4,20 à 5 % |
3,60 % |
Taxe additionnelle communale |
1,20% |
1,20 % |
Total |
de 5,40 à 6,20 % |
4,80 % |
B.
LE NOUVEAU DISPOSITIF
Le I. du présent article a pour objet de ramener tous les droits
départementaux pour les immeubles d'habitation à un taux unique,
égal à celui des immeubles professionnels, soit 3,60 %.
Le
1° du A
modifie l'article 1594 D du code général
des impôts en ramenant le taux de la taxe de publicité
foncière ou droit d'enregistrement au taux unique de 3,60%.
Seuls des taux inférieurs, entre 1 % et 3,60 %, sont
autorisés.
L'article 1594 D conservait les taux départementaux en vigueur au
31 décembre 1998, avec la possibilité pour les conseil
généraux de les modifier, sans aller au-delà de 5 % et en
deçà de 1 %. Cependant, au 1er juin 1999, tous les conseils
généraux avaient adopté des taux compris entre 4,20 % et
5 %, c'est-à-dire au dessus de la limite de 3,60 %. Soixante-huit
départements avaient maintenu à 5 % leur taux de mutation
à titre onéreux de droit commun.
Le
2° du A.
modifie une référence à l'article
1594 E du code général des impôts, afin de tenir compte de
l'existence d'un taux unique à l'article 1594 D.
Le
3° du A
. modifie l'article 683
bis
.
Cet article prévoit une taxe de publicité foncière ou un
droit d'enregistrement de 2,60 % à l'exception du cas où la
société s'engage à respecter une des conditions
prévues à l'article 1594 DA. Il s'agit des cas où
l'acquéreur s'engage à maintenir à l'immeuble un usage
professionnel pendant au moins trois ans et des acquisitions d'immeubles non
bâtis (terrains). Le taux est alors de 2 %.
Le présent article aligne le taux de 2,60 % pour les immeubles
d'habitation sur le taux pour les immeubles professionnels et les terrains,
soit 2 %. Dès lors, la distinction suivant la nature de l'immeuble
est supprimée (suppression de la référence à
l'article 1594 D).
Les articles 809 et 810, relatifs aux apports à une
société, personne morale ou groupement, sont modifiés de
la même façon : le taux de 2,60 % est abaissé à
2 %.
Les dispositions spécifiques aux départements d'outre-mer,
à l'article 1043 A, qui prévoit une réduction de
moitié des droits de timbre, sont adaptées, afin de tenir compte
de l'introduction d'un taux de droit d'enregistrement unique.
L'article 1594 DA, qui instaurait un régime spécifique pour les
droits d'enregistrement concernant les immeubles professionnels, est
abrogé. Cet article prévoyait un taux unique de 3,60 %, chaque
département ayant la possibilité de l'abaisser sans pour autant
le réduire à moins de 1 %. Seul le département de la
Marne (51) avait réduit ce taux, pour le porter au taux plancher,
c' est-à-dire à 1 %.
L'article 1594 F
quater
est également abrogé :
il
prévoyait la possibilité, pour les conseils
généraux, de réduire le taux des droits de mutation
départementaux au niveau du taux prévu pour les immeubles
professionnels (article 1594 DA) pour les immeubles d'habitation et les
terrains et locaux à usage de garage situés dans les zones
d'aménagement du territoire, dans les territoires ruraux de
développement prioritaire et dans les zones de redynamisation urbaine,
sous certaines conditions.
Il s'agissait essentiellement de dispositifs issus de
la loi n°95-115
du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire :
- la possibilité de voter un taux de 3,60 % pour les ventes d'immeubles
d'habitation et de garages situés dans les
zones éligibles
à la prime d'aménagement du territoire, dans les territoires
ruraux de développement prioritaire et dans les zones de revitalisation
urbaine
en vertu de l'article 1594 F
quater
du CGI (17
départements appliquaient ce taux réduit au
1
er
juin 1999) ;
- la possibilité d'instituer
un abattement
de 50.000 francs
à 300.000 francs, soit de façon générale (1er
et 2ème alinéas de l'article 1594 F
ter
du CGI), soit pour
les seules zones de revitalisation rurale (3ème alinéa de
l'article 1594 F
ter
du CGI). En pratique, cet abattement n'est
pratiqué que dans 6 départements, et exclusivement dans
des
zones de revitalisation rurale
.
La disparition de l'article 1594 F
quater
, qui permettait d'accorder
un avantage comparatif pour certains territoires prioritaires, enlève la
possibilité pour les conseils généraux de moduler les taux
de droit de mutation suivant les zones. Seul le mécanisme de
l'abattement, prévu à l'article 1594 F
ter
reste en
vigueur : il est toutefois moins utilisé et ne concerne que les
zones de revitalisation rurale (les zones de revitalisation urbaine sont
exclues).
Le
II.
du présent article indique que l'abaissement des droits de
mutation à titre onéreux sur les immeubles d'habitation
s'applique à compter du 15 septembre 1999.
Toutefois, une dérogation est prévue pour les départements
dont les taux, au 1er juin 1999, étaient inférieurs à
3,60 %.
II. L'ABAISSEMENT DES DROITS DE MUTATION A TITRE ONEREUX SUR LES FONDS DE
COMMERCE
Le
B. du I.
du présent article traite des droits de mutation sur
les fonds de commerce.
A. LE DROIT EXISTANT
L'article 719 définit le régime normal de cession des fonds de
commerce ou de clientèle.
Le taux varie en fonction de la valeur taxable :
- aucun droit en dessous de 150.000 francs ;
- 6 % pour une valeur de 150.000 à 700.000 francs ;
- 9 % au-delà de 700.000 francs.
L'article 722
bis
prévoit des taux réduits dans un
objectif d'aménagement et de développement du territoire. Aucun
droit n'est perçu pour les cessions d'une valeur inférieure
à 700.000 francs dans les communes dont la population est
inférieure à 5.000 habitants et qui sont situées dans les
territoires ruraux de développement prioritaire. Cette disposition est
également applicable aux zones de redynamisation urbaine et aux zones
franches urbaines.
B. LE DISPOSITIF PROPOSE PAR LE PRESENT ARTICLE
Le
1° du B.
abaisse de 6 % à 3,80 % et de 9 %
à 2,40 % les tarifs prévus au premier alinéa de
l'article 719.
Il faut noter que les droits de mutation, qui étaient progressifs, en
fonction de la valeur taxable, sont désormais dégressifs,
à partir de la valeur de 700.000 francs (le taux est de
3,80
% si la valeur taxable est inférieure au plafond, et
baisse à 2,40
% au delà).
Le
2° du B.
modifie l'article 722
bis
afin de tenir compte
du nouveau taux de droit commun pour les cessions de fonds de commerce ou de
clientèle inférieures à 700.000 francs. Cette adaptation
n'a aucune conséquence puisque les cessions inférieures à
700.000 francs sont toujours exonérées.
L'exonération
prévue dans un objectif d'aménagement du territoire
présentera toutefois un avantage moindre que précédemment,
en raison de la réduction des taux.
Le
4° du B.
modifie le III. de l'article 810, relatif à
l'enregistrement des apports en société. Désormais, pour
les apports qui ont pour objet un fonds de commerce, une clientèle, un
droit au bail ou une promesse de bail, le taux ne sera plus de 8,60% mais
correspondra au taux défini pour le droit commun des mutation de fonds
de commerce, tel que fixé à l'article 719 du code
général des impôts (taux de 2,40% à 3,60% suivant la
valeur taxable). Outre un allégement important des droits sur les
apports en société, cette modification permet une
neutralité complète quelle que soit la forme juridique de la
mutation.
Votre commission approuve la diminution des droits de mutation sur les fonds
de commerce, dont le coût fiscal est estimé à 700 millions
de francs pour 2000 par le ministère de l'économie, des finances
et de l'industrie.
III. LES MODALITÉS DE COMPENSATION DE L'ABAISSEMENT DES DROITS DE
MUTATION SUR LES IMMEUBLES D'HABITATION
A. LA COMPENSATION EST AUTOMATIQUE
Les modalités de la compensation aux départements sont
prévues par les dispositions relatives à la compensation des
transferts de compétence du code général des
collectivités territoriales, puisque les droits de mutation à
titre onéreux perçus par les départements leur ont
été transférés, en contrepartie de transferts de
compétence prévus par les lois de décentralisation.
La loi du 7 janvier 1983 relative aux transferts de compétences a
posé le principe de l'intégralité de la compensation des
charges financières résultant des compétences
transférées, à la date du transfert ;
les
ressources ainsi transférées assurent la stricte compensation des
accroissements de charges résultant des transferts de
compétences.
L'article 95 de la loi du 7 janvier 1983 complété par l'article
17 de la loi du 29 décembre 1983 a prévu un ajustement des
ressources fiscales transférées pour les départements dont
le montant de ces ressources fiscales était, à la date du
transfert de compétences, supérieur au montant des charges
résultant du transfert de compétences.
B. LA COMPENSATION EST " INTÉGRALE "
L'article L. 1614-5 du code général des collectivités
territoriales prévoit la prise en charge par l'Etat des
conséquences financières négatives pour les
collectivités dans le cas d'une modification des caractéristiques
d'un impôt transféré :
" Les pertes de produit
fiscal résultant, le cas échéant, pour les
départements ou les régions, de la modification,
postérieurement à la date des transferts d'impôts et du
fait de l'Etat, de l'assiette ou des taux de ces impôts sont
compensées
intégralement
, collectivité par
collectivité, soit par des attributions de
dotation de
décentralisation
, soit par des diminutions des ajustements
prévus "
lorsque le produit d'un impôt est
supérieur aux charges transférées qu'il est censé
financer.
En conséquence, les pertes de produit fiscal résultant pour les
départements, de la modification du taux de ces impôts, doivent
être compensées intégralement par des attributions de
dotation générale de décentralisation. Le montant de la
perte de produit fiscal à compenser est constaté, pour chaque
collectivité, par arrêté conjoint du ministre de
l'intérieur et du ministre chargé du budget après avis de
la commission consultative sur l'évaluation des charges.
Il convient de souligner ici que la compensation n'est intégrale que
dans l'hypothèse d'un dégrèvement
, qui préserve
intégralement la capacité de taxation de la commune, car elle
continue de bénéficier en totalité des " effets base
et taux ".
L'intégralité de la compensation pour la baisse des droits de
mutation se calcule à partir des bases de la dernière
année connue, auxquelles est appliqué le taux de progression de
la dotation générale de décentralisation. La loi de
finances initiale pour 1999 a ainsi prévu une compensation
calculée à partir des bases de l'année 1997
(dernière année connue), indexée deux fois sur les taux de
progression de la dotation générale de décentralisation.
Pour la diminution des droits de mutation à titre onéreux
perçus par les départements proposée par le présent
article, la compensation sera calculée à partir des bases de
l'année 1998 auxquelles seront appliqués les taux de progression
de la dotation générale de décentralisation entre 1998 et
1999 et entre 1999 et 2000.
La réduction des droits de mutation perçus par les
départements à 3,6 % sera donc compensée par des
attributions de dotation générale de décentralisation
(DGD), qui correspond au chapitre 41-56 du budget du ministère de
l'intérieur. Une provision de 4,6 milliards de francs a
été inscrite dans le projet de loi de finances pour 2000,
correspondant à la perte de recettes subie par les départements
sur la base des droits de mutation qu'ils ont perçus en 1998, montant
revalorisé comme la DGD entre 1998 et 1999 et entre 1999 et 2000. On
rappellera pour mémoire que le recette des droits
départementalisés était de 17.422 millions de francs en
1998.
L'anticipation de la mesure au 15 septembre 1999 est prévue dans le
projet de loi de finances pour 2000, mais sa compensation aux
départements sera intégrée dans le projet de loi de
finances rectificative pour 1999.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Lors de l'examen de la loi de finances pour 1998, votre rapporteur avait
regretté que "
le droit de mutation sur les immeubles
d'habitation devient le taux de droit commun alors qu'il était un taux
dérogatoire. Son abaissement de 1,6
% est relativement
modéré par rapport à la baisse des droits de mutation sur
les immeubles professionnels
" .
Il approuve donc une nouvelle mesure visant à rapprocher le taux des
droits de mutation français des taux en vigueur au niveau
européen.
Il déplore toutefois que cette nouvelle baisse des droits de mutations
n'ouvre pas droit, pour les collectivités locales, à une
compensation satisfaisante.
A. LA COMPENSATION NE SERA PLUS INTÉGRALE A COMPTER DE 2001
1. Le gouvernement ne souhaite pas prendre en compte l'évolution des
bases en 1999
La compensation de la baisse des droits de mutation à titre
onéreux en 2000 est fixée à partir du produit
enregistré en 1998, auquel sont appliqués les taux de progression
de la DGF en 1999 et en 2000. Pour le gouvernement, la reprise du marché
de l'immobilier en 1999 est liée à la baisse des droits de
mutation engagée par l'article 27 de la loi de finances pour 1999.
D'après les informations recueillies par votre rapporteur
général, les bases de l'année 1999 ne devraient donc pas
être prises en compte dans le calcul de la compensation pour
l'année 2001, car le gouvernement considère que, dans
l'hypothèse contraire, la compensation versée aux
départements serait surévaluée. Les bases de
l'année 1998 seraient donc pérennisées, car la baisse des
droits de mutation à compter de 1999 fausserait le calcul de la
compensation du fait de la reprise du marché qu'elle aurait
provoquée.
Enfin, le gouvernement souligne que, la baisse des droits de mutation
proposée par le présent article étant entrée en
vigueur à compter du 15 septembre 1999, la prise en compte des bases de
1999 reviendrait à intégrer les effets d'aubaine induits par
cette mesure, et que la neutralité financière de la mesure ne
pourrait pas être assurée.
2. La reprise du marché de l'immobilier ne peut être
imputée à la baisse des droits de mutation
L'envolée des achats de logement depuis deux ans ne découle pas
seulement de la baisse des droits de mutation, mais est essentiellement
liée à la croissance de l'économie. Il apparaît donc
que l'augmentation du volume des transactions immobilières ne peut
être imputée totalement à la baisse des droits de mutation
décidée par l'article 27 de la loi de finances pour 1999.
Une étude de M. Mouillart, professeur à l'université de
Paris X Nanterre souligne que "
la baisse des droits de mutation, de
l'ordre de 36 % en deux ans, aura véritablement dopé les
flux d'accession à la propriété : près de
45 % du nombre des accédants supplémentaires attendu entre
1997 et 2001, s'explique par cela. (...) Ainsi, le nombre total des
transactions réalisées par les ménages dans l'ancien aura
progressé de près de 120.000 unités entre 1997 et 2002 (+
4,3 % par an et + 23,6 % au total). Les dispositions publiques prises
depuis deux ans ayant contribué pour moitié à cette
expansion, l'amélioration de l'environnement économique et
financier du marché pour le reste
".
Si les droits de mutation ont eu une influence significative sur la croissance
du marché de l'immobilier, celle-ci n'entre donc en compte que pour
moins de la moitié de la reprise. Par conséquent, le refus de
prendre en compte les bases de 1999 pour le calcul de la compensation
versée aux départements en 2001 revient à priver les
départements des effets de la reprise du marché de l'immobilier.
B. UNE CONTRIBUTION À LA DISPARITION DE L'AUTONOMIE FISCALE DES
COLLECTIVITÉS
1. Les départements sont privés d'une ressource dynamique
Le gouvernement souligne que la hausse du volume des transactions
enregistrée en 1998 compense très largement la baisse des droits
de mutations à titre onéreux. Cependant, il faut souligner que la
baisse des droits de mutation prive les conseils généraux d'une
recette dynamique, compte tenu de la forte progression des transactions et de
l'évolution favorable des prix sur le marché de l'immobilier.
La compensation de la baisse du taux des droits de mutation par une attribution
de dotation générale de décentralisation (DGD) conduit
à remplacer une ressource dynamique par une ressource dont
l'évolution est identique à celle de la DGD. Or, il
n'apparaît pas qu'il existe un lien entre les droits de mutation et les
principes guidant l'évolution de la DGD. La dotation
générale de décentralisation est indexée sur le
taux de progression de la dotation générale de fonctionnement, en
tenant compte du recalage de la base et de la régularisation
négative. En 2000, ce taux sera de 0,821 %, soit un taux
inférieur à l'inflation. La revalorisation de la compensation de
la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle proposée
par l'article 14
ter
du projet de loi de finances pour 2000, n'est donc
pas étendue à la compensation des droits de mutation.
Si le taux appliqué à la compensation de la baisse des droits de
mutation engagée en 1999 avait été celui de la DGF, hors
recalage et régularisation (défini à l'article
L 1613-1 du code général des collectivités
territoriales comme
" la somme du taux prévisionnel
d'évolution de la moyenne du prix de la consommation des ménages
(hors tabac) de l'année de versement et de la moitié du taux
d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année
en cours, sous réserve que celui-ci soit positif "
), le montant
de la compensation versée aux départements aurait
été supérieur de 40 millions de francs. Pour la
compensation de la baisse des droits de mutation estimée pour
l'année 2000 (soit 8,18 milliards de francs, dont
4,85 milliards au titre des mesures nouvelles), la différence porte
sur environ 100 millions de francs.
Les modalités de compensation supposent que les charges
compensées vont évoluer au rythme de croissance de la DGD. Or, la
croissance des prix et des volumes des transactions sur le marché
immobilier témoigne du décalage entre l'évolution des
bases des droits de mutation et l'indexation retenue pour la compensation.
La baisse des droits de mutation constitue une nouvelle atteinte au principe de
l'autonomie fiscale des collectivités locales. L'article L. 1614-5
du code général des collectivités territoriales dispose
que,
" au terme de la période visée à l'article 4
de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, les transferts d'impôt
d'Etat représentent la moitié au moins des ressources
attribuées par l'Etat à l'ensemble des collectivités
locales "
. Cet article visait donc à contraindre l'Etat
à développer les transferts d'impôt aux
collectivités. Or, la multiplication des exonérations et des
baisses de taux des impôts locaux compensés par l'Etat participe
à un mouvement croissant de recentralisation fiscale.
2. Une contribution au recul de la décentralisation fiscale
En supprimant aux départements leur faculté de voter les taux des
droits de mutation, le gouvernement accentue le processus de
démantèlement de la fiscalité locale, entamé par la
loi de finances pour 1999. Cette véritable " recentralisation
déguisée " consiste à remplacer les ressources
fiscales des collectivités par des dotations de l'Etat. En outre, les
dotations versées en contrepartie par l'Etat n'intègrent pas la
croissance des bases d'imposition dans le futur.
La compensation n'est donc
" intégrale " que la première année, et le
décalage avec l'évolution des bases augmente au cours des
années suivantes. Les ressources des collectivités locales sont
ainsi progressivement déconnectées de l'évolution de
l'activité économique sur leur territoire.
Le maintien d'un lien entre les ressources des collectivités et
l'activité économique sur leur territoire nécessite de
prendre en compte l'évolution des bases des droits de mutation à
titre onéreux pour le calcul de la compensation versée par l'Etat
aux collectivités. En conséquence, votre commission propose que
soient prises en compte
chaque année,
les bases de la
dernière année connue pour le calcul de la compensation. C'est
l'objet du premier amendement.
La prise en compte de l'évolution des bases dans le calcul de la
compensation conduit à faire varier les montants perçus par les
départements en fonction de l'activité du marché de
l'immobilier. Compte tenu du fait que la compensation s'effectue par des
attributions de dotation de décentralisation, qui est prise en compte
pour le calcul de l'enveloppe normée des concours de l'Etat aux
collectivités locales, l'augmentation de la compensation qui peut
découler de la prise en compte de l'évolution des bases induirait
une diminution mécanique de la dotation de compensation de la taxe
professionnelle, qui sert de variable d'ajustement au sein de cette enveloppe.
Le deuxième amendement vise donc à neutraliser les effets de la
compensation de la réduction des droits de mutation à titre
onéreux sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article ainsi amendé.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE
5
Amélioration du régime successoral entre
frères et soeurs isolés domiciliés avec le défunt
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet
d'améliorer le régime successoral dont bénéficient
les frères et soeurs isolés, domiciliés avec le
défunt, en portant à 375.000 francs l'abattement dont ils
bénéficient, et en assouplissant les conditions d'octroi de cet
abattement qui ne suppose plus qu'une seule année de cohabitation avant
le décès.
Les frères et soeurs bénéficient, en application de
l'article 788 du code des impôts d'un abattement spécial de
100.000 francs, dès lors qu'ils sont célibataires, veufs,
divorcés ou séparés de corps et à la double
condition qu'ils soient au moment de l'ouverture de la succession :
• âgés de plus de cinquante ans ou atteints d'une
infirmité les mettant dans l'impossibilité de subvenir à
leurs besoins ;
• constamment domiciliés avec le défunt pendant les cinq
années précédant le décès.
La loi sur le pacte civil de solidarité a créé, en
matière de droits de succession, un régime de faveur pour les
personnes sans lien de parenté, puisqu'elles bénéficieront
d'un abattement de 375.000 francs pour les successions ouvertes à
partir du 1
er
janvier 2000.
Or, dans le cas de frères et soeurs habitant le même domicile, le
montant de l'abattement est limité à 100.000 francs.
Il paraît peu cohérent de conserver un régime aussi
restrictif.
C'est la raison pour laquelle votre rapporteur général vous
propose le présent article additionnel qui relève à
375.000 francs le montant de l'abattement - qui n'avait pas été
modifié depuis 1984 - et assouplit les conditions pour en
bénéficier en ne conservant qu'une exigence de domiciliation
commune pendant l'année précédant le décès.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 5
Assouplissement du régime de la
" tontine "
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet
d'aménager le régime des contrats d'acquisition en commun, avec
clause dite de " tontine ", pour rendre possible la transmission de
la résidence principale sans application, à concurrence de
750.000 francs, du tarif des droits de mutation à titre gratuit.
L'article 754 A du code général des impôts, qui
régit les contrats d'acquisition en commun, familièrement
qualifiés de " tontine ", prévoit que les biens
concernés sont, au point de vue fiscal réputés transmis
à titre gratuit et donc soumis, à défaut de liens de
parenté, au tarif le plus élevé (soit 60 %) et à
l'abattement le plus faible (10.000 francs).
Toutefois, le deuxième alinéa de cet article dispose que, lorsque
les immeubles ont une valeur inférieure à 500.000 francs au
moment du premier décès, et qu'ils sont affectés à
l'habitation principale commune aux deux acquéreurs, la part transmise
au survivant est passible, non des droits de mutation à titre gratuit,
mais des seuls droits de vente d'immeubles.
Toutefois, le seuil de 500.000 francs, qui n'a pas été
modifié depuis 1980, n'est plus en rapport avec les
réalités du marché immobilier, notamment en région
parisienne. Il est donc nécessaire d'en relever le montant. Votre
commission propose de le faire passer à 750.000 francs.
Ce système permet, en dépit de sa rigidité, d'assurer aux
deux personnes vivant sous le même toit leur sécurité
immobilière réciproque.
Afin de renforcer l'efficacité de ce dispositif, il apparaît utile
de transformer ce seuil en franchise pour étendre ce régime aux
biens d'une valeur élevée dans la limite du seuil de
750.000 francs.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE
5
Extension des
modalités d'évaluation de la résidence principale en
matière de droits de mutation à titre gratuit aux fratries
Commentaire : le présent article additionnel vise
à
étendre l'abattement forfaitaire de 20 % applicable à
l'évaluation de la résidence principale du défunt en
matière de droits de mutation à titre gratuit aux fratries
cohabitant avant le décès.
L'article 764
bis
du code général des impôts
créé par l'article 17 de la loi de finances pour 1999 a
instauré, en matière de droits de mutation à titre
gratuit, un abattement de 20 % sur la valeur vénale réelle
de l'immeuble constituant au jour du décès la résidence
principale du défunt, lorsque, à cette date, cet immeuble est
également occupé à titre de résidence principale
par le conjoint survivant ou par un ou plusieurs de ses enfants.
En revanche, les fratries ont été exclues du
bénéfice de cet abattement lorsqu'elles occupent la même
habitation.
Lors du débat sur la proposition de loi relative au pacte civil de
solidarité, de nombreux parlementaires ont critiqué le
régime de faveur établi pour les personnes sans lien de
parenté en matière de droits de succession alors qu'aucune mesure
n'était prévue pour les fratries.
C'est la raison pour laquelle votre rapporteur vous propose le présent
article additionnel qui étend l'abattement forfaitaire de 20 %
applicable à l'évaluation de la résidence principale du
défunt en matière de droits de mutation à titre gratuit
aux fratries cohabitant avant le décès.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE
5
Exonération partielle de droits de mutation à
titre gratuit pour les immeubles entrant dans le nouveau régime de
conventionnement en faveur des logements locatifs anciens
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet de
permettre une exonération partielle des droits de mutation à
titre gratuit, à concurrence des trois-quarts de leur valeur, pour les
immeubles donnés en location, pendant neuf ans, dans les conditions
fixées au e du 1° du I de l'article 31 du code
général des impôts, qui sont les conditions posées
à l'application de la déduction forfaitaire majorée en
faveur des logements anciens entrant dans le nouveau dispositif de logements
conventionnés (dispositif dit " Besson ").
L'exonération partielle des droits de première mutation à
titre gratuit en faveur des logements locatifs anciens
affectés
à la résidence principale de ménages répondant
à des conditions de ressources a été adoptée dans
le cadre de la loi de finances rectificative pour 1995 (article 23 de la loi
n° 95-885 du 4 août 1995) sur l'initiative de M. Alain Lambert,
alors rapporteur général.
Cette mesure est intervenue en complément de l'exonération des
droits de mutation à titre gratuit pour les immeubles acquis neufs.
L'exonération était subordonnée à l'affectation des
immeubles à la résidence principale du propriétaire ou du
locataire pendant deux ans pour l'acquéreur, trois ans pour celui auquel
le bien est soumis. Elle était limitée à 300.000 francs
par part.
Le Sénat a ensuite amélioré ce dispositif en adoptant un
article additionnel au projet de loi de finances pour 1996, supprimant la
condition de détention de deux ans pour bénéficier de
l'exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit
(article 15 de la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995).
Le présent article reprend donc la philosophie de ces deux
dispositifs, qui visaient à exonérer les logements locatifs
anciens des droits de première mutation à titre gratuit, en les
appliquant aux logements anciens qui entrent dans le nouveau dispositif
figurant à l'article 96 de loi de finances pour 1999.
Cet article, qui instaure un nouvel avantage fiscal en faveur des logements
anciens donnés en location, pendant six ans, sous condition de
ressources et de loyer, vise à créer une nouvelle
génération de bailleurs.
En prévoyant une déduction forfaitaire majorée (25% au
lieu de 14%), il traduit un début de rééquilibrage du
régime fiscal en faveur du logement ancien, mais encore trop peu
incitatif, par rapport au régime fiscal en faveur du logement neuf.
Un cabinet spécialiste en conseil de patrimoines a réalisé
une étude sur le rendement de l'investissement dans le neuf et dans
l'ancien. Pour un contribuable, situé dans la tranche maximale
d'imposition de 54 % qui décide de réaliser un investissement de
un million de francs pour un logement locatif, son acquisition, au bout de
quinze ans, lui sera revenue à 595.000 francs, par le jeu des
économies d'impôts et des loyers perçus. Elle lui aura en
revanche coûté 828.000 francs s'il choisit le dispositif en faveur
de l'ancien.
Dans ce cas, on observe donc un écart de 30% entre l'avantage fiscal
pour le neuf et pour l'ancien.
Si l'on veut développer le secteur locatif conventionné, il
convient donc de rendre plus attractif le dispositif fiscal en faveur du
logement ancien.
Or, lors de la transmission d'un bien immobilier, les droits de mutation
à titre gratuit ont souvent pour effet d'obliger les héritiers ou
légataires à vendre le bien afin de payer ces droits, si bien que
l'immeuble sort du parc locatif.
Le ministre de l'Economie, des finances et de l'industrie lui-même, lors
du congrès de la Fédération nationale de l'immobilier
(FNAIM), qui s'est tenu début décembre 1998, a souhaité
ouvrir le chantier de la transmission immobilière.
Cet article additionnel, en proposant une exonération partielle des
droits de première transmission pour les logements anciens nouvellement
conventionnés, contribue à accélérer la mise en
oeuvre de ce chantier et à donner déjà un signe positif
aux investisseurs afin qu'ils s'engagent plus facilement dans la location de
logements à caractère intermédiaire.
Un certain nombre de conditions seront bien évidemment posées
à l'exonération des droits de mutation à titre gratuit.
Le champ d'application couvre les logements anciens acquis à compter
du 1er janvier 1999.
La notion de logement ancien s'applique à toute
habitation sortie du champ de la TVA, c'est-à-dire tout logement
construit depuis plus de cinq ans ou déjà vendu une fois s'il n'a
pas été acheté par un marchand de biens.
L'exonération est subordonnée à la condition que les
immeubles aient été donnés en location par le
propriétaire dans les conditions prévues au e. du 1° du I de
l'article 31 du code général des impôts
,
c'est-à-dire que le bailleur devra respecter les plafonds de ressources
et de loyer correspondant.
La location devra intervenir
dans le délai de six mois à
compter de la date d'acquisition du bien immobilier
.
L'exonération est conditionnée à
l'obligation de louer
pendant neuf ans.
Cette condition est plus stricte que celle ouvrant droit
à la déduction forfaitaire majorée sur les revenus
fonciers (6 ans), mais se justifie pleinement par le souci de favoriser la
poursuite de la location du logement.
En effet,
l'engagement de louer pendant neuf ans doit être repris par
les héritiers, donataires ou légataires
lorsqu'au jour de la
transmission à titre gratuit, le délai de neuf ans n'a pas
expiré. Ceci permettra aux contribuables de ne pas attendre le
délai de neuf ans avant de faire une donation.
L'exonération portera sur
les trois-quarts
de la valeur
d'acquisition du bien,
afin de ne pas prêter à contestation
sur le montant de cette exonération.
Enfin,
l'exonération sera plafonnée à 300.000
francs
par part reçue par chacun des donataires, héritiers ou
légataires.
En cas de non-respect des conditions posées à
l'exonération partielle des droits de mutation, les sanctions de droit
commun s'appliqueront.
Le coût fiscal de ce nouveau dispositif pour 2000 n'est pas
évaluable, mais il devrait en tout état de cause, être
limité.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter
cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE
5
Prolongation du régime instaurant une réduction
de 30 % sur les donations sans limite d'âge
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet
de prolonger le régime transitoire instauré à l'initiative
du Sénat par l'article 36 de la loi de finances pour 1999 qui
prévoit une réduction de 30 % sur les donations sans limite
d'âge.
I. LE DISPOSITIF ACTUEL : DES DROITS DE MUTATION TRÈS
ÉLEVÉS
Comme l'indique l'encadré ci après, les droits de mutation
à titre gratuit (successions et donations) sont très
élevés en France. Les taux les plus forts s'échelonnent
ainsi entre 40 et 60 %.
Tarifs des droits applicables en ligne directe et entre époux
Fraction
de part nette taxable :
N'excédant pas 50 000 F 5 %
Comprise entre 50 000 et 75 000 F 10 %
Comprise entre 75 000 et 100 000 F 15 %
Comprise entre 100 000 et 3 400 000 F 20 %
Comprise entre 3 400 000 F et 5 600 000 F 30 %
Comprise entre 5 600 000 et 11 200 000 F 35 %
Supérieure à 11 200 000 F 40 %
Tarifs des droits applicables en ligne collatérale et entre non-parents
Entre
frères et soeurs :
Fraction de part nette taxable n'excédant pas 150 000 F
35 %
Fraction de part nette taxable supérieure à
150 000 F 45 %
Entre parents jusqu'au 4
ème
degré 55 %
Entre parents au delà du 4
ème
degré et entre
personnes non parentes 60 %
En outre, les tranches n'ont fait l'objet d'aucune revalorisation depuis 1984
pour tenir compte de l'inflation.
De tels taux sont de nature à freiner les transmissions
anticipées de patrimoine, notamment professionnel, et à conduire
des chefs d'entreprise à ne pas préparer suffisamment à
l'avance leur relève. Certes, l'article 790 du code
général des impôts prévoit certains
allégements de droits de mutation afin d'encourager les transmissions
anticipées de patrimoine.
Ainsi, les donations bénéficient d'une réduction de
50 % lorsque le donateur est âgé de moins de 65 ans et
d'une réduction de 30 % lorsque le donateur a soixante-cinq ans
révolus et moins de soixante-quinze ans.
A l'origine, aucune mesure n'était prévue pour les donations
réalisées par des personnes de plus de soixante-quinze ans.
Toutefois, à l'initiative de votre commission, l'article 36 de la loi de
finances pour 1999 a instauré, pour les donations effectuées
entre le 25 décembre 1998 et le 31 décembre 1999 une
réduction de 30 % sans limite d'âge.
Votre commission avait estimé que cette discrimination entre les
personnes de moins de soixante-quinze ans et celles de plus de soixante-quinze
ans apparaissait excessive au regard de l'objectif poursuivi, à savoir
encourager les transmissions anticipées.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA PROLONGATION DE DEUX ANS DU
RÉGIME INSTAURANT UNE RÉDUCTION DE 30 % SUR LES DONATIONS
SANS LIMITE D'ÂGE
Le régime transitoire instaurant une réduction de 30 % sur
les donations sans limite d'âge vient à expiration au 31
décembre 1999.
Or, en l'absence d'une réforme générale des droits de
mutations qui tiendrait compte des évolutions de la
société et allégerait les prélèvements sur
la transmission du patrimoine, il apparaît nécessaire de
prolonger de deux ans le régime précité.
En effet, si l'on tient compte des tables d'espérance de vie
établies par l'INSEE, une personne de 75 ans dispose encore de 7 ans si
elle est un homme, et de 12 si elle est une femme pour organiser sa succession.
Par ailleurs, une partie encore importante des patrimoines est détenue
par des personnes âgées de plus de 75 ans.
Il est donc nécessaire d'inciter les personnes de plus de
soixante-quinze ans à organiser la transmission de leur patrimoine,
afin de dynamiser la gestion et l'entretien des biens.
Cette mesure doit être rapprochée des dispositions de l'article
5 bis du projet de loi de finances pour 2000, qui tendent à
promouvoir la transmission des entreprises. Cet article a pour objet
d'exonérer des droits de succession 50 % des parts et actions de
sociétés à condition que leurs propriétaires se
soient engagés à les conserver pendant au moins huit ans et que
les héritiers acceptent également de ne pas les céder
pendant huit nouvelles années.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE 5 bis (nouveau)
Incitation à la
constitution et au maintien à long terme
d'un actionnariat
stratégique dans l'entreprise
Commentaire : résultant d'un amendement de la
commission des
finances de l'Assemblée nationale, le présent article a pour
objet d'instituer, au regard des droits de mutation, un abattement
spécifique de 50 % sur la valeur des titres ou des biens d'une
entreprise transmis par décès, dans le cadre d'un " pacte
d'actionnaires " ; l'abattement ne serait en effet octroyé
qu'aux titres et aux biens que le donataire et ses associés se seraient
préalablement engagés à conserver pendant huit ans et que
les héritiers, donataires ou légataires s'engageraient à
ne pas céder pendant une nouvelle durée de huit ans, à
compter de la fin du délai précédent.
Le présent dispositif est de même inspiration que l'article 9 de
la loi de finances pour 1996 que le Conseil constitutionnel avait
censuré, notamment au motif qu'il méconnaissait le principe
d'égalité devant l'impôt.
Un rappel s'impose donc.
I. LE DESTIN ABRÉGÉ DE L'ARTICLE 9 DE LA LOI DE
FINANCES POUR 1996 ET LES AMÉNAGEMENTS SUBSIDIAIRES DU DROIT FISCAL
Faute de pouvoir réaménager le barème très lourd
des droits de succession décidé en 1984, le législateur a
souhaité, lors de la loi de finances pour 1996, instituer un abattement
spécifique de 50 % sur la valeur des biens professionnels transmis
entre vifs, afin de favoriser la transmission anticipée des entreprises
(article 9). Cet article répondait à une recommandation de la
Commission européenne du 7 décembre 1994 préconisant aux
Etats-membres un certain nombre de mesures fiscales tendant à assurer la
réussite de la transmission familiale et encourager la transmission aux
tiers.
A. LA COURTE VIE DE L'ARTICLE 9 DE LA LOI DE FINANCES POUR 1996
1. Rappel du dispositif de l'article 9 de la loi de finances initiale pour
1996
L'article 9 de la loi de finances pour 1996 exonérait de droits de
mutation à titre gratuit, à concurrence de 50 % de leur
valeur et dans la limite de 100 millions de francs pour chacun des
donataires, les biens considérés comme des biens professionnels
au sens de l'impôt de solidarité sur la fortune, lorsque ces biens
étaient transmis dans un même acte, par un ou plusieurs donateurs
tous âgés de moins de 65 ans qui eux-mêmes, soit
exerçaient leur activité dans l'entreprises, soit étaient
détenteurs des titres transmis, depuis cinq ans au moins.
En contrepartie, les donataires devaient s'engager à conserver pendant
cinq ans les biens ainsi transmis, soit directement, soit par
l'intermédiaire d'une société qu'ils contrôlent. Il
n'était toutefois pas exigé que l'un d'entre eux exerce une
fonction dirigeante au sein de l'entreprise transmise, afin de laisser la
possibilité de faire appel à un gestionnaire extérieur
dans le cas où ce dernier aurait été plus
expérimenté que les héritiers.
Cette exonération était également applicable aux donations
consenties par des personnes âgées de plus de 65 ans en vertu
d'actes passés entre le 1
er
janvier 1996 et le 31
décembre 1997 et aux transmissions par décès accidentel
d'une personne âgée de moins de 65 ans.
Enfin, la rupture de l'engagement de conservation des titres était
lourdement sanctionnée puisqu'au delà des droits
éludés, le donataire était tenu d'acquitter une
pénalité représentant la moitié de la
réduction d'impôt précédemment consentie.
2. La censure du Conseil constitutionnel
Cet article a été invalidé par le Conseil
constitutionnel
31(
*
)
au motif
que cette exonération méconnaissait le principe
d'égalité devant la loi
.
Après avoir rappelé que
" si le principe
d'égalité ne fait pas obstacle à ce que le
législateur décide de favoriser par l'octroi d'avantages fiscaux
la transmission de certains biens, c'est à la condition que celui-ci
fonde son appréciation sur des critères objectifs et rationnels
en fonction des buts qu'ils se propose "
, le Conseil constitutionnel a
spécialement considéré que :
" En instituant un abattement de 50 % sur la valeur des biens
professionnels transmis entre vifs à titre gratuit à un ou
plusieurs donataires, à la seule condition que ceux-ci conservent ces
biens pendant une période de cinq années, sans exiger qu'ils
exercent de fonction dirigeante au sein de l'entreprise et en étendant
le bénéfice de cette mesure aux transmissions par
décès accidentel d'une personne âgée de moins de
soixante-cinq ans, la loi a établi vis-à-vis des autres
donataires et héritiers des différences de situation qui ne sont
pas en relation directe avec l'objectif d'intérêt
général ci-dessus rappelé ;
Dans ces conditions et eu égard à l'importance de l'avantage
consenti, son bénéfice est de nature à entraîner une
rupture de l'égalité entre les contribuables
pour
l'application du régime fiscal des droits de donation et de
succession ".
B. LES AMÉNAGEMENTS SUBSIDIAIRES DU DROIT FISCAL
Faute de pouvoir discriminer entre les transmissions d'entreprises et les
autres mutations, le législateur a par la suite, et souvent à
l'initiative du Sénat, aménagé le régime des
donations et des donations-partage dans un sens favorable à la
transmission des entreprises.
• L'article 14 de la
loi portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier
du
12 avril 1996
a sensiblement
amélioré le régime fiscal de la donation-partage :
- en étendant son champ d'application au cas des enfants uniques ;
- en portant le taux de réduction des droits de 25 % à
35 % pour les donateurs âgés de moins de 65 ans et de
15 % à 25 % pour les donataires qui ont plus de 65 ans et
moins de 75 ans.
• Pour les autres donations, l'article 15 de la loi
précitée a fixé le taux de la réduction à
25 % lorsque le donateur est âgé de moins de 65 ans et
à 15 % lorsque il a plus de 65 ans et moins de 75 ans.
• L'article 16 de la même loi a majoré de 10 points la
réduction de droits applicable lorsque le donateur est âgé
de 65 ans révolus et de moins de 75 ans, pour les donations consenties
entre le 1
er
avril 1996 et le 31 décembre 1997. Le taux de
réduction de droit a donc été porté
temporairement :
- à 35 % lorsqu'il s'agissait d'une donation-partage,
- à 25 % lorsqu'il s'agissait d'une autre donation.
Cette majoration des taux de réduction des droits de mutation a
été prorogée jusqu'au 31 décembre 1998 par
l'article 17 de la loi de finances pour 1998.
• Enfin,
l'article 36 de la loi de finances pour 1999
a
supprimé la distinction des taux d'allégement en fonction de la
nature juridique des donations et de la nature du donataire. En outre,
le
taux de réduction des droits de mutation a été
porté depuis le 1
er
janvier 1999 à 50 % lorsque
le donateur a moins de 65 ans et à 30 % lorsque le donateur a 65
ans révolus et moins de 75 ans
.
Enfin, toutes les donations effectuées entre le 25 novembre 1998 et le
31 décembre 1999 bénéficient d'un taux de
réduction de 30 %, quel que soit l'âge du donateur.
L'article 20 de la loi de finances pour 1999 a par ailleurs relevé
progressivement à 500.000 francs l'abattement accordé sur la
part du conjoint survivant pour les mutations à titre gratuit et a
étendu cet abattement aux successions ouvertes à compter du
1
er
janvier 2000.
• Par ailleurs, l'article 17 de la loi portant DDOEF
précitée a institué un abattement de 100.000 francs par
part sur les droits de mutation à titre gratuit applicables aux
donations consenties entre grands-parents et petits-enfants.
• L'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1996
,
introduit à l'initiative du Sénat, a permis aux héritiers
d'une entreprise individuelle exerçant une activité non
commerciale (BNC) d'imputer les droits de succession et les
intérêts supportés lors de la transmission sur le
résultat de l'entreprise, sous réserve que l'un des
héritiers poursuive personnellement l'activité pendant cinq ans.
La même disposition avait été adoptée en faveur des
héritiers d'entreprises individuelles déclarant leurs
bénéfices dans la catégorie des bénéfices
industriels et commerciaux (BIC) par l'article 10 de la loi de finances
initiale pour 1996.
Même si la législation ne reconnaît jusqu'à
présent aucune spécificité particulière à
l'entreprise, au regard des droits de mutation,
il est possible aujourd'hui
de bénéficier d'une réduction de droits de mutation de
50 % en cas de transmission des titres d'une société ou des
biens d'une entreprise lorsque le donateur est âgé de moins de 65
ans
(article 790 du code général des impôts), ou de
35 % lorsque le donateur a 65 ans révolus et moins de 75 ans,
et après abattement de 300.000 francs sur la valeur des biens et
titres transmis lorsque les héritiers sont des descendants directs.
En outre, si le donataire cumule cette disposition avec l'abattement
prévu par l'article 762 du CGI en cas de démembrement de la
propriété, la réduction de droits de mutation peut
s'avérer substantielle
32(
*
)
.
Par ailleurs, les héritiers ou donataires peuvent obtenir pour les
droits correspondants :
- un différé de paiement de cinq ans à compter de la date
d'exigibilité des droits,
- et, à l'issue de ce délai, un paiement fractionné sur
une période de dix ans.
Tout à fait logiquement, le recours à ce dispositif
entraîne l'exigibilité d'intérêts au profit du
Trésor, mais dont le taux peut être réduit.
Enfin, depuis 1992, les donations réalisées depuis plus de dix
ans n'ont plus à être rappelées pour le calcul des droits.
En d'autres termes, tous les dix ans, il est possible de procéder
à une donation bénéficiant des abattements prévus
par la législation, et surtout, à nouveau soumise aux tranches
les plus basses du barème.
On notera également que les holdings patrimoniaux dans lesquels sont
logées des titres de sociétés non cotées
bénéficient en pratique d'un abattement de 20 % sur la
valeur de l'actif sous-jacent afin de tenir compte du fait que les titres de
telles sociétés ne sont pas liquides.
Dans l'ensemble, ces différents dispositifs permettent
d'atténuer considérablement la rigueur des taux apparents du
barème des droits de mutation.
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article prévoit d'insérer trois articles
nouveaux dans le code général des impôts.
Le premier (article 789 A) accorde un abattement de 50 % au regard
des droits de mutation, sur la valeur des parts ou actions d'une
société industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou
libérale transmises par décès qui remplissent les
conditions prescrites.
Le deuxième (article 789 B) accorde le même avantage aux
biens transmis par décès qui sont affectés à
l'exploitation d'une entreprise individuelle (meubles et immeubles, biens
corporels ou incorporels) et qui remplissent les conditions prescrites.
Enfin, le troisième (article 1840 G
nonies
) détermine
les pénalités dues en cas de non-respect par les
héritiers, donataires ou légataires de leurs engagements.
On notera que l'avantage fiscal n'est accordé qu'en cas de
transmission par décès
, ce qui exclut les donations
d'entreprises, qui, comme on l'a vu plus haut, bénéficient
déjà d'une exonération fiscale de même montant
(50 %) lorsque le donateur est âgé de moins de 65 ans, et de
30 % lorsque le donateur a 65 ans révolus et moins de 75 ans
(article 790 du CGI).
Pour parer aux critiques émises par le Conseil constitutionnel en
décembre 1995, le dispositif proposé par le présent
article subordonne l'octroi de l'avantage fiscal - le même qu'en
1995, mais sans plafond - à plusieurs
conditions
extrêmement rigoureuses
visant certes à favoriser la
continuité de l'actionnariat et de la stratégie de l'entreprise,
mais qui dans leur rigueur risquent de compromettre l'avenir des entreprises
transmises.
D'autant que les pénalités en cas de rupture des engagements sont
les mêmes que celles prévues par le dispositif de 1995,
c'est-à-dire très lourdes.
A. DES CONDITIONS D'OCTROI DE L'EXONÉRATION TRÈS
RIGOUREUSES
1. L'obligation de conserver les titres transmis pendant seize ans en cas de
transmission de parts ou d'actions de sociétés
S'agissant des sociétés (article 789 A), l'abattement de
50 % sur la valeur imposable des titres transmis par décès
ne serait octroyé qu'aux parts ou actions :
- que le défunt et ses associés auraient préalablement
pris l'
engagement collectif de conserver
pendant au moins
huit
ans
33(
*
)
; outre les
titres transmis, l'engagement collectif de conservation doit porter sur au
moins
25 % des droits
financiers et des droits de vote
34(
*
)
attachés aux titres
émis
par la société s'ils sont admis à la
négociation sur un marché réglementé ou, à
défaut, sur au moins
34 %
; ces pourcentages de
détention doivent être respectés tout au long de la
durée de l'engagement collectif de conservation qui est opposable
à l'administration à compter de la date d'enregistrement de
l'acte qui le constate ;
- que les héritiers, donataires ou légataires prendraient
l'engagement, le jour de la déclaration de succession, de ne pas
céder pendant
huit années supplémentaires
à
compter de la date d'expiration du délai de huit ans mentionné
à l'alinéa précédent ; ainsi, en cas de
décès du donateur avant la fin du délai de huit ans
mentionné plus haut, le ou les donataires doivent reprendre à
leur compte l'engagement de conservation des titres transmis, pendant la
durée restant à courir
35(
*
)
.
Ainsi, la fraction du capital de la société dont la
transmission bénéficierait d'une exonération partielle de
droits de mutation par décès serait
gelée pendant
au moins seize années
.
Cette durée peut apparaître excessive à l'heure où
les restructurations d'entreprises demandent une certaine souplesse de
manoeuvre dans le capital.
Le pourcentage minimal de 25 % correspond au seuil
d'éligibilité au régime des biens professionnels au sens
de l'impôt de solidarité sur la fortune tel qu'il est
défini à l'article 885 O
bis
du CGI, s'agissant des
parts ou actions de sociétés passibles de l'impôt sur les
sociétés. S'agissant des sociétés non
cotées, le pourcentage de 34 % correspond à la
minorité de blocage.
En outre, pour le calcul de ces pourcentages, il est tenu compte des titres
détenus par une société possédant directement une
participation dans la société dont les parts ou actions font
l'objet de l'engagement collectif de conservation, dès lors que cette
société a souscrit audit engagement collectif. On notera que si
ladite société fait l'objet d'une transmission par
décès, la fraction de la valeur réelle de son actif brut
qui correspond à sa participation dans la société dont les
titres sont grevés d'un engagement collectif de conservation,
bénéficie également d'un abattement de 50 %.
Enfin, il semble aller de soi que si le donateur possède tout seul
25 % ou 34 %, selon que la société est cotée ou
non, des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres
transmis, il n'a pas besoin de s'associer avec d'autres actionnaires pour
respecter la condition posée par le deuxième alinéa.
On observera que si le premier engagement de conservation doit porter
collectivement sur au moins 25 % ou 34 % du capital de la
société, le second ne porte que sur les titres transmis par
décès et est pris individuellement par chacun des
héritiers, donataires ou légataires dans la déclaration de
succession. En conséquence,
si la fraction des titres transmise est
inférieure aux pourcentages mentionnés, seule cette fraction du
capital sera grevée d'un engagement de conservation de seize ans
, ce
qui s'avère moins contraignant que si un quart ou un tiers du capital
avait du rester gelé pendant seize ans.
On notera également que
le dispositif proposé est plus souple
que celui que le législateur avait adopté en 1995
, qui
n'octroyait l'avantage fiscal qu'en cas de transmission des parts ou actions
dont la détention confère la majorité des droits de vote,
et pas seulement la minorité de blocage, et qui exigeait que le donateur
exerce dans la société une fonction dirigeante lui procurant une
rémunération qui représente plus de la moitié de
ses revenus professionnels, ce qui n'est pas le cas ici.
Enfin, il est prévu qu'en cas de
démembrement de
propriété
, l'engagement de conservation soit signé
conjointement par l'usufruitier et le nu-propriétaire. Ainsi, en cas de
réunion de l'usufruit et de la nu-propriété, le terme de
l'engagement de conservation des titres dont la pleine propriété
est reconstituée demeurerait identique à celui souscrit
conjointement.
La question se pose lorsque le défunt lègue à une personne
la nue-propriété des titres et à une autre personne
l'usufruit, ce qui permet de réduire encore les droits de mutation
puisque dans ce cas, les droits sont calculés sur la valeur de la
nue-propriété, qui, en vertu de l'article 762 du CGI,
bénéficie d'un abattement par rapport à la valeur de la
propriété entière.
2. L'interdiction de céder l'ensemble des biens transmis pendant huit
ans pour les héritiers d'entreprises individuelles
En vertu de l'article 789 B, les entreprises individuelles doivent, quant
à elles, avoir été détenues depuis plus de
trois
ans
par le défunt lorsqu'elles ont été acquises
à titre onéreux, pour donner droit à l'exonération.
Cette restriction tend à éviter des opérations de
circonstance, tel l'achat d'une entreprise en vue de sa transmission
immédiate à des héritiers. Si un tel risque n'est pas
totalement inexistant, on peut toutefois penser qu'il demeure cependant assez
limité, compte tenu de la nature même de l'actif ainsi
transféré. Quoi qu'il en soit, la condition liée à
la durée de détention constitue une sécurité
complémentaire.
On suppose que lorsque l'entreprise n'a pas été acquise à
titre onéreux, soit son propriétaire en est le créateur,
soit il en est l'héritier, et dans ce cas, aucune condition n'est
prévue.
En outre, chacun des héritiers, donataires ou légataires doit
prendre l'
engagement de conserver pendant huit ans l'ensemble des biens
affectés à l'exploitation de l'entreprise
(meubles et
immeubles, biens corporels et incorporels).
Cette condition n'apparaît en revanche pas réaliste pour les
entreprises qui se trouveraient dans l'impossibilité d'aliéner
une camionnette ou un tracteur au simple motif que le fait d'en changer avant
huit ans rend exigibles les droits éludés, les
pénalités et les intérêts de retard.
Une disposition identique à celle évoquée
précédemment est prévue en cas de démembrement de
la propriété des biens transmis.
3. L'exercice d'une fonction dirigeante par l'un des héritiers
ou associés
On a vu que l'absence de condition tenant à l'exercice d'une fonction
dirigeante par les héritiers avait été l'un des motifs de
la censure de l'article 9 de la loi de finances pour 1996 par le Conseil
constitutionnel.
En conséquence, l'article 789 A exige que l'un des associés,
partie à l'engagement collectif de conservation, ou l'un des
héritiers, donataires ou légataires assure, pendant les cinq
années qui suivent la date de la transmission par
décès,
une fonction de direction dans l'entreprise,
si celle-ci est soumise à l'impôt sur les sociétés,
c'est-à-dire être :
- soit gérant nommé conformément aux statuts d'une
société à responsabilité limitée (SARL) ou
d'une société en commandite par actions,
- soit associé en nom d'une société de personnes,
- soit président, directeur général, président du
conseil de surveillance, ou membre du directoire d'une société
par actions.
On notera qu'il est cette fois-ci, fait référence explicitement
à l'article 885 O
bis
du CGI relatif aux biens
professionnels au sens de l'ISF, pour déterminer les fonctions de
direction à assumer.
S'il s'agit d'une société de personnes visée aux articles
8 et 8
ter
du CGI
36(
*
)
,
l'une des personnes mentionnées ci-dessus doit exercer son
activité professionnelle principale dans la société.
On observera que
la fonction de direction peut être exercée par
l'un des associés du défunt
qui se sera préalablement
et collectivement engagé avec lui à conserver ses titres ou
actions pendant huit ans, ce qui permet de remédier au cas où
aucun des héritiers, donataires ou légataires s'avérerait
compétent ou disposé à assurer une fonction de direction
dans l'entreprise. D'où l'intérêt de ce " pacte
d'actionnaires " pour préserver la cohérence de la
stratégie de l'entreprise.
L'article 789 B exige quant à lui que l'un des héritiers,
donataires ou légataires poursuive l'exploitation de l'entreprise
individuelle.
4. Des obligations particulières de déclaration
La déclaration de succession doit être appuyée d'une
attestation de la société dont les parts ou actions font l'objet
de l'engagement collectif de conservation certifiant que les conditions
exigées, en matière de pourcentages de détention continue
et de délai de conservation, ont été respectées
jusqu'au jour du décès.
En outre, dans l'hypothèse où le donateur
décéderait avant le terme de son engagement collectif de
conservation, il est prévu qu'à compter du décès et
jusqu'à l'expiration de l'engagement collectif de conservation, la
société adresse chaque année dans les trois mois qui
suivent le 31 décembre, une attestation certifiant que lesdites
conditions sont remplies au 31 décembre de chaque année.
Enfin, le soin de fixer les modalités d'application du présent
article, et notamment les obligations déclaratives incombant aux
redevables et aux sociétés est renvoyé à un
décret en Conseil d'Etat.
B. LES SANCTIONS EN CAS DE RUPTURE DES ENGAGEMENTS
Compte tenu de l'avantage octroyé, il est parfaitement légitime
que la rupture de l'engagement de conservation des titres entraîne
l'application d'une sanction particulièrement lourde. Au delà du
rappel des droits éludés, le donataire concerné sera tenu
d'acquitter une pénalité représentant la moitié de
la réduction d'impôt précédemment consentie.
Toutefois, on notera que la rupture de son engagement par un des
héritiers n'entraîne pas la remise en cause de l'avantage fiscal
pour l'ensemble des autres, ce qui est heureux, compte tenu de
l'impossibilité pour les héritiers qui seraient ainsi
lésés de faire valoir leurs droits devant le juge civil, en
l'absence de reconnaissance civile des pactes d'actionnaires.
Sur le fond, cette pénalité constitue le régime de droit
commun dans des situations comparables. Il en est ainsi notamment pour les
héritiers ou donataires de parts de groupement forestier ou de bois et
forêt qui ne respectent pas les engagements leur ayant permis de
bénéficier d'un allégement des droits de mutation à
titre gratuit (article 1840 G
bis
du CGI).
Proportionnée à l'avantage consenti, cette sanction devrait en
outre avoir des vertus pédagogiques en incitant le dirigeant à
choisir avec discernement son successeur et à l'associer de façon
préalable à la gestion de l'entreprise. De fait, une telle
préparation ne peut être que favorable à la
pérennité de l'entreprise.
En revanche, il sera sans doute indispensable de cerner progressivement les
situations qui, au côté de la vente des titres, sont
considérées comme entraînant une rupture de l'engagement.
En toute logique, la liquidation de l'entreprise durant la période de
huit ans devrait, elle aussi, s'accompagner de la remise en cause de
l'avantage. On ne peut toutefois ignorer qu'une telle liquidation peut
répondre à des causes très variées, et n'est donc
pas nécessairement le résultat d'une gestion défectueuse.
De même, on peut se demander quelle solution sera appliquée dans
l'hypothèse où l'entreprise fusionne avec une autre
société.
Ces divers cas appellent sans doute des réponses nuancées, ce
qui, concrètement, limite les possibilités de solution globale et
uniforme.
On observera en outre que
les pénalités sont d'autant plus
lourdes que le contribuable a respecté ses engagements plus
longtemps
. Ainsi, compte tenu du taux des intérêts de retard
prévus à l'article 1727 du CGI (9 % par an) et de la
pratique des tribunaux qui considèrent que les intérêts de
retard courent depuis la date de la succession et non de la date où les
engagements ne sont plus tenus, dans l'hypothèse où l'engagement
serait rompu au bout de sept ans, l'intérêt de retard serait de
63 %. Si la rupture a lieu au bout de 14 ans, alors le contribuable devra
acquitter un impôt de 126 % de la valeur des biens transmis au titre
de l'intérêt de retard.
Pour ne pas pénaliser des contribuables qui courent déjà
le risque de devoir acquitter, en plus du rappel des droits
éludés, la moitié des droits dus, il serait utile que
l'administration précise dans le décret en Conseil d'Etat
prévu par le présent article que les intérêts ne
courent qu'à partir du moment où les engagements ne sont plus
tenus.
III. LES APPRÉCIATIONS DE VOTRE COMMISSION
On observera à titre liminaire que l'allégement d'impôt
proposé par le présent article est le même que celui
qu'obtiendrait pour ses donataires un chef d'entreprise qui transmettrait son
entreprise avant 65 ans et sans conditions particulières, en application
de l'article 790 du CGI. Toutefois, le présent article présente
l'avantage de permettre audit chef d'entreprise de rester à la
tête de sa société jusqu'à son décès,
tout en aménageant sa succession, ce qui est appréciable pour des
entrepreneurs qui ne souhaitent pas se déposséder de leur
principale source de revenus.
Sur le fond, et sans insister sur les commentaires auxquels avaient
donné lieu, au sein de la majorité gouvernementale actuelle,
l'article 9 de la loi de finances pour 1996 au moment de sa
discussion
37(
*
)
- le fait
que M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission
des finances de l'Assemblée nationale, consacre la quasi-totalité
du commentaire du présent article dans son rapport, à expliquer
que la France est soumise à un phénomène de
" compétition des territoires " auquel il convient de
s'adapter est en soi suffisamment significatif -, votre commission se
félicite que la majorité ait évolué sur le
délicat sujet de la transmission d'entreprise, et tient à
souligner les enjeux économiques d'une transmission réussie.
Elle regrette toutefois que le présent dispositif ne règle pas le
principal problème auquel sont confrontés les chefs d'entreprises
dans le cadre de la transmission qui est celui de l'impôt de
solidarité sur la fortune.
A. LE NÉCESSAIRE ASSOUPLISSEMENT DE CONDITIONS
ANTI-ÉCONOMIQUES
En dépit de ses aspects plus souples que le dispositif voté par
le législateur en 1995, les conditions exigées par le
présent article en contrepartie de l'avantage fiscal peuvent
apparaître trop rigoureuses au regard de la réalité
économique.
Il en est ainsi de l'interdiction de céder les titres ou biens transmis
pendant seize ans qui peut conduire à geler le capital de l'entreprise
au mépris de sa croissance et des nécessités
économiques. Bien qu'elle apparaisse comme la nécessaire
contrepartie d'un avantage fiscal substantiel, une telle disposition ferme le
capital des entreprises pendant seize ans, ce qui, au regard de
l'échelle du temps économique, peut apparaître
excessivement long, même si la sécurité juridique est un
besoin exprimé par les différents acteurs des
sociétés.
En outre, une telle disposition risque de compromettre l'avenir d'entreprises,
lorsque la nécessité pour les héritiers de payer les
droits de mutation, même allégés, les soumet à des
demandes de distribution très fortes.
Ainsi, dans les cas où l'entreprise constitue une part essentielle du
patrimoine de l'entrepreneur défunt, les héritiers, placés
dans l'interdiction d'aliéner une fraction du capital, même
minoritaire, pour s'acquitter du paiement des droits de succession, seront dans
l'obligation de prélever la somme nécessaire dans les caisses de
l'entreprise, c'est-à-dire sous la forme d'une distribution de
dividendes exceptionnels.
Or, compte tenu du taux marginal de l'impôt sur le revenu et des
prélèvements sociaux applicables aux dividendes, l'entreprise
doit pouvoir verser à ses actionnaires le double des droits de
succession minorés exigés, ce qui peut apparaître excessif
pour nombre d'entreprises.
Dans le cas où l'héritier serait minoritaire dans la
société, il n'aurait aucun moyen de peser sur la politique de
distribution de la société et se verrait obligé
d'aliéner son patrimoine personnel pour acquitter les droits de
succession.
Enfin, dans le cas de la transmission d'une entreprise individuelle,
l'obligation de conserver l'ensemble des biens affectés à
l'exploitation de l'entreprise pendant une durée de huit ans peut
s'avérer absurde. Un patron d'exploitation agricole ne pourrait ainsi
céder un tracteur et un artisan un camionnette, sans courir le risque de
devoir payer des droits de succession à hauteur de 75 % des biens
transmis et des intérêts de retard prohibitifs.
Votre commission vous proposera en conséquence de ramener la
durée de l'engagement de conservation des titres et des biens transmis
de huit et huit ans à cinq et cinq ans, c'est-à-dire dix ans.
Cette durée est susceptible de répondre aux objectifs poursuivis
en matière de continuité de la gestion tout en étant plus
raisonnable au regard de l'inévitable mobilité des facteurs de
production et des évolutions économiques.
En outre, la diminution du délai de détention des titres de huit
à cinq ans, dans les cas évoqués
précédemment, permettrait de calquer la durée de
l'engagement de conservation sur la durée du différé
d'imposition octroyé par l'administration fiscale.
B. LA CONSÉCRATION FISCALE D'UNE NOTION ENCORE
INSUFFISAMMENT RECONNUE EN DROIT COMMERCIAL
On observera que
le présent article
, en réservant un sort
fiscal particulier aux titres de société faisant l'objet d'un
" engagement collectif de conservation " de huit ans,
consacre
fiscalement la notion de " pacte d'actionnaires "
avant que cette
notion ne soit entrée dans le droit civil. Ces pactes porteraient ainsi
sur un pourcentage minimal de titres correspondant à
25 % des
droits
financiers et des droits de vote attachés aux titres
émis
par la société s'ils sont admis à la
négociation sur un marché réglementé ou, à
défaut, au moins
34 %
.
La loi fiscale précède donc la réalité juridique
et financière
, ce qui n'est jamais une bonne pratique, surtout en
matière de droits de mutation qui sont généralement
étroitement calqués sur le droit civil.
Votre rapporteur général avait lui-même
déposé le 26 juin 1997 en son nom personnel, une proposition de
loi n° 379 (1997-1998) tendant à une meilleure
efficacité des pactes d'actionnaires. Cherchant à organiser
généralement pour une longue période, le contrôle de
la gestion d'une société, la composition de son capital ou encore
la sortie d'un actionnaire de la société, ces accords
extra-statutaires présentent une indéniable utilité. Ils
contribuent notamment à assurer la stabilité indispensable
à la réalisation d'objectifs complexes, de moyenne ou longue
durée, notamment dans le cadre des groupes de sociétés,
des holdings, et plus spécifiquement encore, dans le cadre des filiales
communes.
Votre rapporteur général ne peut donc qu'encourager le
gouvernement a inscrire cette proposition de loi à l'ordre du jour des
assemblées.
C. UN PROBLÈME NON TRAITÉ : LE POIDS DE
L'ISF
Comme l'a précisé M. Didier Migaud lors de la discussion du
présent article à l'Assemblée nationale, l'avantage
reconnu au titre des droits de mutation à titre gratuit ne l'est pas
pour la fixation de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la
fortune (ISF). La conclusion de pactes d'actionnaires au regard des droits de
mutation n'emporte donc aucune conséquence au regard de l'ISF.
En d'autres termes, les actionnaires minoritaires qui auraient conclu avec
d'autres un pacte portant sur au moins 25 % ou 34 % du capital
continueraient à devoir inclure les biens ayant fait l'objet du pacte
dans l'assiette de leur impôt, en dépit des pourcentages ainsi
atteints qui correspondent aux seuils d'exonération prévus par
l'article 885 O
bis
du CGI au regard de l'ISF.
Votre rapporteur général considère qu'en diminuant
l'assiette des droits de succession, le présent article ne traite qu'une
partie du problème des transmissions d'entreprises. En effet, un grand
nombre d'héritiers de parts d'entreprises sont obligés de se
dessaisir de leurs titres pour pouvoir acquitter l'ISF. Or, en les obligeant
à garder les titres transmis sous le régime de faveur pendant
huit ans, le présent article les fait entrer - pour ceux qui ne
rempliraient pas les conditions permettant de considérer les biens
transmis comme des biens professionnels - dans le champ de l'ISF sans leur
permettre pour autant de céder une partie des titres pour acquitter la
charge ainsi due qui s'ajoute à celle des droits minorés de
succession.
Votre rapporteur général considère qu'il existe donc une
distorsion de traitement entre l'héritier qui prendrait en charge la
gestion de l'entreprise et qui pourrait bénéficier du
régime des biens professionnel dès lors qu'il posséderait
25 % des titres transmis, et les autres héritiers.
Il considère en conséquence comme indispensable de
prévoir que les titres faisant l'objet d'un " engagement collectif
de conservation " soient considérés comme des biens
professionnels au sens de l'ISF.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet
article ainsi modifié.
ARTICLE 6
Suppression de la contribution
annuelle
représentative du droit de bail
Commentaire : le présent article a pour objet de
modifier le
dispositif de remboursement du droit de bail et de la contribution
additionnelle perçus deux fois pour la période d'imposition du
1er janvier au 30 septembre 1998, et d'organiser la suppression
progressive du droit de bail à compter de l'imposition des revenus 2000.
I. LA RÉFORME DU DROIT DE BAIL : UNE OCCASION RATÉE
A. LA RÉFORME INTRODUITE DANS LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR
1998
Le droit de bail
frappe toutes les mutations de jouissance d'immeubles,
sauf exonérations particulières (ex : locations donnant lieu au
paiement de la TVA, loyer annuel n'excédant pas 12.000 francs).
L'assiette du droit de bail est constituée du prix du loyer,
augmenté des charges imposées au preneur, ou de la valeur
locative réelle des biens loués, si cette valeur locative est
supérieure.
Le taux normal du droit de bail est fixé à 2,5 %.
La taxe additionnelle au droit de bail
est due sur les loyers des locaux
situés dans des immeubles achevés depuis quinze ans au moins, au
premier jour de la période d'imposition. Son taux est également
de 2,5 %.
Le droit de bail est à la charge du locataire et la taxe additionnelle
au droit de bail est à la charge du bailleur. Le droit de bail et la
taxe additionnelle sont toutefois dus par le propriétaire.
L'article 12 de la loi de finances rectificative pour 1998 a remplacé
le droit de bail et sa taxe additionnelle
par deux contributions
représentatives de ce droit et de cette taxe, recouvrées, selon
les contribuables (personnes physiques ou entreprises), comme en matière
d'impôt sur le revenu, ou comme en matière d'impôt sur les
sociétés.
Cette réforme a été présentée comme une
simplification administrative, puisque ni l'assiette, ni le taux des deux
impositions ne sont modifiés.
Jusqu'à la réforme, les déclarations de droit de bail
et de taxe additionnelle présentaient en effet des
caractéristiques particulières :
- la période d'imposition ne correspondait pas à l'année
civile ou à l'exercice comptable des entreprises, mais s'étendait
du 1er octobre au 30 septembre ;
- les impositions étaient établies sur la base des
créances acquises (loyers courus) ;
- les formulaires de déclaration étaient spécifiques.
Avec le nouveau dispositif, les obligations déclaratives
particulières au droit de bail sont alignées sur les
déclarations existant en matière d'impôt sur les
sociétés et d'impôt sur le revenu. Ainsi,
la
formalité spécifique de la déclaration du droit de bail
est supprimée
. La déclaration est celle relative aux revenus
fonciers pour les particuliers et la déclaration de résultat pour
les entreprises.
Le dispositif prévoit que les nouvelles contributions s'appliquent aux
loyers encaissés à compter du 1er janvier 1998, alors même
que les loyers courus entre le 1
er
janvier 1998 et le 30 septembre
1998 ont déjà fait l'objet d'une imposition au mois d'octobre
1998 au titre des anciennes contributions.
En application du G de l'article 12 de la loi de finances rectificative pour
1998,
les personnes morales
ont la possibilité de déduire
les recettes qui ont été soumises au droit de bail entre le 1er
janvier 1998 et le 30 septembre 1998, de l'assiette de la contribution
versée pour le premier exercice d'application du nouveau régime.
En revanche,
le bailleur-personne physique
qui a déjà
acquitté le droit de bail et la taxe additionnelle à l'automne
1998
pourra seulement être remboursé après avoir
cessé de louer pendant au moins neuf mois et sur sa demande.
B. LE REJET DE LA RÉFORME PAR LE SÉNAT
Le Sénat a rejeté la réforme du droit de bail inscrite
dans la loi de finances rectificative pour 1998.
Il n'a pas accepté le mode de remboursement et a
supprimé l'article 12 de la loi de finances rectificative pour 1998
parce que :
-
le remboursement intervient plusieurs années après le double
paiement du droit de bail au titre des neuf premiers mois de 1998
, voire
très longtemps après, si le bailleur poursuit sa location sans
cesser de louer. Le montant du remboursement sera donc dévalorisé
à raison de la durée pendant laquelle les propriétaires
continueront de louer ;
- le contribuable sera contraint de faire une démarche
spécifique auprès des services fiscaux
et de justifier le
paiement de droits qu'il aura acquittés plusieurs années
auparavant. Un certain nombre de créanciers de l'Etat pourraient
être dissuadés par cette procédure ;
-
le mécanisme de remboursement des personnes physiques est nettement
plus défavorable que celui des personnes morales
.
Lors du débat sur la loi de finances rectificative pour 1998, les
arguments du Sénat n'ont malheureusement pas été entendus.
Le gouvernement
a rejeté l'ensemble de ses objections à la
réforme du droit de bail, au motif que les contribuables ne seraient
contraints qu'à un seul paiement en 1999 (en omettant de préciser
que le paiement était décalé d'un an, c'est-à-dire
que le paiement de 1999 vaut pour les loyers de 1998, et non pour ceux de 1999,
comme précédemment).
Le gouvernement, par la voix de M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat
au budget
38(
*
)
, avait ainsi
estimé que "
le dispositif proposé crée un avantage de
trésorerie pour les nouveaux bailleurs
". Il avait
refusé d'envisager un délai de remboursement plus court que le
délai de neuf mois après l'interruption de la location, sous
prétexte "
qu'il est normal de rembourser le
dégrèvement au propriétaire lorsque celui-ci ne veut plus
ou ne peut plus louer son bien. Or il a, dans ce cas, besoin d'une certaine
durée pour être en mesure de prouver qu'il ne cherche pas ou qu'il
ne peut pas louer son bien
". La discussion avait enfin donné
lieu
de sa part à des critiques simplistes et
manichéennes :
" Je constate qu'un fossé
sépare ceux qui veulent simplifier la vie des contribuables et ceux qui
apprécient la complexité du code des impôts ".
L'Assemblée nationale
a choisi de rétablir le dispositif
de l'article 12 de la loi de finances rectificative pour 1998, en ignorant
les remarques formulées par le Sénat.
Le rapporteur général de l'Assemblée nationale indiquait
ainsi que : "
L'Assemblée nationale a admis que l'enjeu
financier justifiait d'étaler dans le temps la perte de recettes, pour
le budget de l'Etat, qui aurait résulté, en 1999, du passage d'un
système à l'autre en permettant l'imputation immédiate du
droit
de bail perçu au titre des loyers courus du 1er janvier
1998 au 30
septembre 1998, sur la contribution représentative due
au titre des loyers perçus en 1998.
L'Assemblée nationale a donc considéré que l'on pouvait
légitimement s'attacher aux paiements effectivement
réalisés, en 1999, tant par le locataire que par le bailleur,
sans s'attacher à l'année d'imputation de la base d'imposition.
Elle a donc admis que le dégrèvement équivalent aux
droits acquittés, au titre des loyers courus du 1er janvier 1998 au 30
septembre 1998, puisse n'intervenir qu'au moment où la superposition des
bases imposables produirait ses effets en termes de paiement effectif,
c'est-à-dire lorsque le bailleur cesserait de louer le bien en
cause
39(
*
)
".
Saisi par des sénateurs, le Conseil constitutionnel a refusé de
censurer la réforme du droit de bail, estimant que l'article ne
conduisait pas à une double imposition des bailleurs,
au motif
que la loi prévoit qu'un dégrèvement interviendra plus
tard (la double imposition n'est en quelque sorte que " temporaire "
et donc inexistante en droit).
La réforme est donc entrée en vigueur au 1
er
janvier
1999.
Moins d'un an plus tard, le gouvernement a finalement reconnu que son
système n'était pas le bon. Il propose de rembourser le droit de
bail aux contribuables sous la forme d'un crédit d'impôt. Par
ailleurs, il supprime le délai de neuf mois d'interruption de la
location pour le remboursement de la taxe additionnelle. Enfin, moins d'un an
après l'avoir réformé, il propose la suppression du droit
de bail.
Ce temps perdu aurait pu être gagné, si le Sénat, en son
temps, avait été écouté.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRESENT ARTICLE
A. UNE MODIFICATION DU DISPOSITIF DE REMBOURSEMENT DU DROIT DE BAIL ET DE LA
CONTRIBUTION ADDITIONNELLE PERCUS POUR LA PERIODE DU 1ER JANVIER AU 30
SEPTEMBRE 1998
Le
D.
de l'article complète l'article 234
decies
du code
général des impôts de manière à
préciser qu'aucune demande de dégrèvement ne pourra
être présentée après le 31 décembre 1999. Il
s'agit de mettre un terme, s'agissant du droit de bail, au dispositif,
fortement critiqué par votre commission des finances, qui consistait
à ne rembourser les contributions perçues deux fois pour une
même période d'imposition
(1
er
janvier-30 septembre 1998) qu'au terme de neuf mois
d'arrêt de la location, sous forme de dégrèvement.
Désormais, le droit de bail sera remboursé sous forme de
crédit d'impôt.
Le
E.
de l'article insère ainsi un nouvel article 234
decies
A dans le code général des impôts. Il s'agit
du nouveau dispositif de remboursement imaginé par le gouvernement.
Les contribuables, soumis à la contribution représentative du
droit de bail et, le cas échéant, à la contribution
additionnelle (lorsque l'immeuble a plus de 15 ans), doivent inscrire sur leur
déclaration de revenus 1999, la base des droits d'enregistrement
correspondants, à l'exclusion des droits ayant déjà fait
l'objet d'une demande de dégrèvement en application de l'article
234
decies
du code général des impôts.
Cette inscription faite, le traitement est différencié pour le
droit de bail et pour la contribution additionnelle.
S'agissant du droit de bail, le
II.
du nouvel article 234
decies
A accorde aux contribuables un crédit d'impôt, d'un montant
égal au droit de bail acquitté sur les sommes
déclarées (2,5 % de la base des droits d'enregistrement). Ce
crédit d'impôt s'impute sur l'impôt sur les revenus de 1999.
Toutefois, un seuil est fixé pour ce remboursement : seules les
personnes dont le total des revenus fonciers (revenus de location et de
sous-location) est inférieur à 60.000 francs, soit les deux tiers
des contribuables déclarant des revenus fonciers,
bénéficieront du remboursement en 2000. Les autres contribuables
(soit le tiers restant), qui ont également payé deux fois les
contributions, devront attendre 2001.
L'introduction de ce seuil introduit
une discrimination sans aucune autre justification que le souci de lisser le
coût fiscal du remboursement.
Le
III.
du nouvel article 234
decies
A précise les
conditions de remboursement de la taxe additionnelle au droit de bail,
également perçue deux fois pour une même période
(1er janvier 1998-30 septembre 1998). Les conditions de remboursement sont ici
moins favorables : les contribuables auront seulement droit à un
crédit d'impôt lors de l'interruption de la location. Par rapport
à l'ancien dispositif, le fait que le délai de neuf mois
d'interruption de la location soit supprimé est une avancée, dans
le sens de ce qu'avait préconisé le Sénat en
décembre 1998.
Toutefois, votre rapporteur général regrette que l'Etat, qui
bénéficie d'une sorte d'avance de trésorerie des
bailleurs, se contente de restituer exactement la somme prélevée
deux fois, sans tenir compte, ne serait-ce que de l'évolution des
prix
. Il apparaît donc logique que la somme soit restituée
rapidement. Il serait nécessaire qu'au-delà d'un certain
délai le remboursement du trop perçu soit automatique.
Le
2.
du
III.
précise que la demande de remboursement,
s'agissant de la contribution additionnelle au droit de bail, devra être
produite l'année au cours de laquelle la cessation ou l'interruption de
la location est intervenue. Toutefois, la base des droits acquittés aura
due être fournie dans la déclaration des revenus 1999.
B. UNE SUPPRESSION PROGRESSIVE DU DROIT DE BAIL À COMPTER DE
L'IMPOSITION DES REVENUS 2000
Le
A.
de l'article supprime les articles 234
bis
, 234
septies
et 234
decies
du code général des
impôts pour les revenus perçus à compter du 1er janvier
2001.
Ainsi, la contribution représentative du droit de bail (article 234
bis
du CGI) est formellement supprimée à compter de
l'imposition des revenus de l'année 2001, c'est-à-dire pour
l'impôt sur le revenu versé en 2002
.
De même sont supprimées les modalités de calcul de la
contribution (article 234
septies
du CGI : la contribution est
calculée en faisant abstraction de la valeur du droit de reprise des
constructions lorsque celles-ci deviennent la propriété du
bailleur en fin de bail) et les modalités spécifiques de
dégrèvement (article 234
decies
).
Le
B.
de l'article modifie la rédaction de l'article 234
bis
, de manière à exclure du champ de l'assiette de la
contribution représentative du droit de bail, les loyers dont le montant
perçu en 1999, n'excède pas 30.000 francs. L'Assemblée
nationale a relevé ce plafond à 36.000 francs, pour un coût
de 300 millions de francs.
Il ne s'agit pas pour autant de réduire l'assiette du droit de bail,
dès l'imposition de ces revenus 1999, ce qui aurait pour effet de
minorer les recettes de l'impôt sur le revenu en 2000
. L'année
1999 n'est qu'une année de référence, qui permettra de
faire le point sur les locaux dont les revenus sont inférieurs à
30.000 francs. Le
P.
à la fin du présent article indique
ainsi que les dispositions du B. s'appliquent aux revenus perçus au
cours de l'année 2000.
Votre rapporteur général considère qu'il y a lieu de
s'interroger sur la pertinence de ce renvoi, pour l'application d'un article du
code général des impôts, à une date fixée en
dehors du code général des impôts. La simple lecture du
nouvel article 234
bis
du CGI ne permet pas au contribuable de
comprendre qu'il ne bénéficiera de l'allégement fiscal que
pour l'imposition des revenus 2000, c'est-à-dire en 2001.
Il est vrai que l'annonce d'une suppression du droit de bail dès 2000,
pouvait laisser penser aux contribuables qu'ils n'auraient plus à
acquitter de droit de bail pour l'impôt sur le revenu 2000, mais il n'y a
pas lieu de laisser subsister un doute dans leur esprit
C. LA TRANSFORMATION DE LA CONTRIBUTION ADDITIONNELLE AU DROIT DE
BAIL
Le
C.
de l'article modifie l'article 234
nonies
et fixe un
montant minimal de loyers pour la perception de la contribution additionnelle
au droit de bail. Il s'agit simplement de reprendre une référence
qui disparaît avec la suppression du droit de bail à compter de
l'imposition des revenus 2000.
Le
G.
modifie de nouveau l'article 234
nonies
du code
général des impôts, à compter de l'imposition des
revenus 2001, afin de tenir compte de la suppression du droit de bail.
La
contribution additionnelle au droit de bail est donc transformée en
simple " contribution ".
L'assiette du prélèvement est inchangée : il s'agit des
revenus tirés de la location des immeubles achevés depuis quinze
ans au moins au 1er janvier de l'année d'imposition.
L'article reprend les références anciennement contenues dans
l'article relatif au droit de bail, puisque la contribution était
additionnelle à celui-ci, avec quelques modifications
rédactionnelles.
Votre rapporteur général s'interroge sur l'opportunité
de modifier à deux reprises, dans le même article, et dans un sens
différent, l'article 234
nonies
du code général des
impôts. Il s'agit, à l'évidence, d'une complexification
inutile du code général des impôts.
D. LE COUT DE LA MESURE
Le coût budgétaire de la nouvelle réforme du droit de bail,
en l'an 2000, après amendement de l'Assemblée nationale,
s'élèvera à 3,5 milliards de francs,
dont 1,4 milliard
de francs pour les ménages et 2,1 milliards de francs pour les
entreprises (effet du régime des acomptes sur 2000).
Ce coût budgétaire en 2000 correspond au coût du premier
remboursement de la " double imposition " de 1998 pour les titulaires
de revenus fonciers inférieurs à 60.000 francs et à
l'impact sur les acomptes d'impôt sur les sociétés, de la
suppression progressive du droit de bail à compter de l'imposition des
revenus 2000.
Impact de la suppression du droit de bail en 2000
|
Coût en 2000
|
Bailleurs personnes physiques |
0 |
Bailleurs personnes morales |
-2.100 |
Ensemble |
-2.100 |
Source : Ministère de l'économie, des
finances
et de l'industrie (direction de la législation fiscale)
Les bailleurs personnes physiques ne bénéficieront en 2000 que
du remboursement de la perception du droit de bail sur les neuf premiers mois
de 1998, s'ils ont moins de 60.000 francs de revenus fonciers.
Impact du remboursement du droit de bail en 2000 et 2001
|
Coût en 2000
|
Coût en 2001
|
Bailleurs percevant moins de 60.000 francs de revenus fonciers |
- 1.000 |
0 |
Bailleurs percevant plus de 60.000 francs de revenus fonciers |
0 |
-1.900 |
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (direction de la législation fiscale)
L'impact
du remboursement de la taxe additionnelle au droit de bail est
évalué par le ministère de l'économie, des finances
et de l'industrie à
400 millions de francs pour 2000
, avec
un coût réparti sur 5 ans, par hypothèse (soit au total 2
milliards de francs).
Au total, le dispositif proposé par le présent article est
d'une extraordinaire complexité.
Suppression de la contribution annuelle représentative du droit de bail
(article 6 du PLF 2000 modifié par l'Assemblée nationale) :
un dispositif complexe
|
LFR 98 |
|
PLF 2000 |
|
|
|
DB +TADB |
2000 |
2001 |
2002 |
TADB |
revenus fonciers < 60.000 F |
Remboursement
|
pas de
suppression
du droit de bail pour l'imposition des revenus 1999
|
suppression
du droit de bail pour l'imposition des
revenus
2000
|
suppression totale du droit de bail |
remboursement
de la TADB acquittée au titre des
revenus
|
revenus fonciers > 60.000 F |
pendant neuf mois consécutifs, l'année qui suit la fin de la location (dégrèvement sur demande expresse à l'administration) |
pas de
suppression
du droit de bail pour l'imposition des revenus 1999
|
suppression
du droit de bail pour l'imposition des revenus 2000
|
pour l'imposition des revenus 2001 |
sur demande l'année d'interruption de la location |
III.
LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
La réforme du droit de bail est
une double occasion
manquée
:
- le gouvernement a entrepris
une réforme complexe du droit de
bail
à compter du 1er janvier 1999, qui a créé de
très nombreuses difficultés,
pour proposer au Parlement de le
supprimer quelques mois plus tard ;
-
le
nouveau dispositif de remboursement et de suppression du droit
de bail est encore exagérément compliqué, dans le seul but
de " lisser " le coût fiscal. On se trouve bien loin de
l'objectif de " simplification " annoncé.
De surcroît, contrairement à ce que le gouvernement a
annoncé, le droit de bail ne sera supprimé qu'à compter de
l'année 2001 pour les locaux dont les revenus sont inférieurs
à 30.000 francs par an et 2002 pour les autres. En 2000, tous les
contribuables devront s'acquitter du droit de bail sur les revenus locatifs de
1999.
Votre rapporteur général vous propose donc de simplifier le
nouveau dispositif proposé par le gouvernement :
1 - il convient de supprimer les nombreux plafonds introduits par le
présent article, qui outre leur évidente complexité,
engendrent des effets de seuils particulièrement inéquitables.
Il n'existe aucune justification, sinon le souci de lisser le coût
fiscal, pour ne pas rembourser les contribuables dans les mêmes
conditions, selon qu'ils disposent de revenus fonciers inférieurs ou
supérieurs à 60.000 francs. Il faut rappeler qu'un tiers des
contribuables déclarant des revenus fonciers sont au-dessus de cette
limite de 60.000 francs.
Il est par ailleurs très contestable de fixer un plafond de loyers
annuels, même porté, de manière dérisoire, de 30.000
à 36.000 francs, pour l'exonération de droit de bail sur les
revenus 2000.
En effet, cette limite est arbitraire :
elle laisse supposer que les
ménages aux revenus modestes bénéficient automatiquement
de loyers faibles
et qu'à l'inverse, les ménages aisés
payent des loyers élevés. Elle ne tient aucun compte du niveau
des loyers en région parisienne et dans certaines grandes
agglomérations, très supérieur au plafond
fixé
40(
*
)
, ni de la
structure familiale, qui conduit logiquement les familles nombreuses à
habiter des logements plus vastes, avec des loyers obligatoirement plus
élevés. Le seuil retenu ne peut donc en aucun cas être
présenté comme un seuil à caractère
" social ". Il n'a aucune autre justification que le souci de limiter
le coût budgétaire.
2
-
il convient également de supprimer progressivement la
contribution additionnelle au droit de bail.
Votre rapporteur général vous propose donc de rembourser tous les
contribuables, dès l'imposition des revenus 1999, pour la contribution
représentative du droit de bail
acquittée deux fois pour la
période du 1er janvier au 30 septembre 1998, en supprimant le seuil
de 60.000 francs de revenus fonciers.
Par ailleurs, il vous propose de supprimer le seuil de 36.000 francs par local
fixé pour la suppression du droit de bail à compter de
l'imposition des revenus 2000.
La contribution représentative du
droit de bail serait supprimée dès l'imposition des revenus 2000,
et non sur deux ans.
Votre rapporteur général
vous propose également
la suppression de la contribution additionnelle au droit de bail
, qui
rapporte environ 3,5 milliards de francs par an,
en deux ans, à
compter de l'imposition des revenus 2000.
Elle sera réduite de
moitié pour tous les contribuables (soit 1,25 % du montant des
loyers) avant d'être totalement supprimée pour l'imposition des
revenus 2001.
Enfin,
votre rapporteur général vous propose
d'améliorer le remboursement de la contribution additionnelle au droit
de bail
en prévoyant qu'à la date de la suppression de la
contribution additionnelle au droit de bail (imposition des revenus 2001), les
contribuables qui n'auraient pas fait de demande de remboursement
(contribuables n'ayant pas cessé de louer) soient automatiquement
remboursés.
Le dispositif proposé par votre commission
|
Imposition des revenus 1999 |
Imposition des revenus 2000 |
Imposition des revenus 2001 |
Droit de bail |
Remboursement du droit de bail payé du 1er janvier au 30 septembre 1998 |
Suppression complète du droit de bail |
- |
Contribution additionnelle au droit de bail
|
- |
Réduction de la CACRDB à 1,25% des loyers perçus |
Suppression complète de la contribution additionnelle
au
droit de bail
|
Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie n'a pas été en mesure d'apporter à votre rapporteur les précisions nécessaires sur le coût d'un tel dispositif. Toutefois, une simulation peut être réalisée, avec les réserves nécessaires.
L'évaluation du coût du nouveau dispositif
|
2000 |
2001 |
2002 |
Remboursement du droit de bail |
- 2,9
milliards de francs
|
- |
- |
Remboursement de la CACRDB |
- 0,4 milliard de francs |
- 0,4 milliard de francs |
- 1,2 milliard de francs |
Suppression du droit de bail |
- 3,5 milliards de francs en IS (acomptes) |
- 0,6 milliard de francs |
|
Suppression de la CACRDB |
- |
-1,75 milliard de francs |
-1,75 milliard de francs |
Coût total |
-6,8 milliards de francs |
-2,75 milliards de francs |
-2,95 milliards de francs |
Le
coût total du dispositif devrait être de l'ordre de 6,8 milliards
de francs en 2000,
soit environ le double du dispositif prévu par le
gouvernement et modifié par l'Assemblée nationale (3,5 milliards
de francs dans le projet de loi de finances pour 2000), mais ce coût sera
essentiellement un coût en trésorerie (en raison de l'avancement
du remboursement du droit de bail). Ce dispositif aura le mérite
d'anticiper sur la suppression définitive du droit de bail et de
simplifier la législation fiscale, simplification dont le ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie, se dit un fervent partisan.
Au demeurant, les dépenses évaluées ci-dessus, comme
celles admises par le gouvernement, résultent dans une large mesure de
sa propre initiative d'il y a un an, et des controverses qu'elle a
suscitées.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi amendé.
ARTICLE 7
Extension du régime
simplifié d'imposition des revenus fonciers
Commentaire : le présent article a pour objet de porter
le
plafond annuel de loyers permettant de bénéficier, sur option,
du régime simplifié d'imposition des revenus fonciers, de
30.000 francs à 60.000 francs, et de majorer le taux
d'abattement pour frais, en le portant d'un tiers à 40 %.
I. LE RÉGIME NORMAL D'IMPOSITION DES REVENUS FONCIERS
Les titulaires de revenus fonciers doivent souscrire une déclaration de
revenus spécifique à ce titre (n° 2044).
Le contribuable doit mentionner ses
recettes brutes
et porter sur sa
déclaration les
charges à déduire
afin de
déterminer un revenu net imposable, ou, le cas échéant, un
déficit.
Pour les propriétés rurales comme pour les
propriétés urbaines détenues directement, neuf postes de
charges viennent en déduction de quatre postes de recettes. Certains de
ces postes de charges sont des agrégats de plusieurs dépenses
(par exemple : frais de gérance, de rémunération des
concierges, primes d'assurances pour risque de loyers impayés). Il faut
détailler et justifier ces différents postes de charges.
Seules trois charges font l'objet d'une déduction forfaitaire : les
frais d'assurance
41(
*
)
,
à l'exception de l'assurance impayés de loyers, de gérance
et l'amortissement.
Seule la détention immobilière au travers de
sociétés civiles, dont les revenus sont imposés entre les
mains du porteur de parts dans la catégorie des revenus fonciers, permet
de porter directement un revenu net (le cas échéant un
déficit) sur la déclaration.
La détermination du revenu foncier net, et sa justification, sont
donc fort complexes et ont justifié la mise en place, à compter
de l'imposition des revenus 1997, d'un régime simplifié
d'imposition, pour les contribuables disposant de revenus fonciers modestes.
II. LE RÉGIME SIMPLIFIÉ D'IMPOSITION
Le régime simplifié d'imposition, dit régime
" micro-foncier " introduit par l'article 3 de la loi de finances
pour 1998 (loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997), consiste
en un régime d'imposition optionnel, qui s'accompagne d'un régime
déclaratif simplifié.
A. CHAMP D'APPLICATION
En application du I. de l'article 32 du code général des
impôts,
le régime simplifié d'imposition concerne les
contribuables titulaires de moins de 30.000 francs de recettes brutes
annuelles
, cette limite pouvant être appréciée
prorata temporis
.
Le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location
est défini par les articles 29 et 30 du code général des
impôts.
Il s'agit du montant des recettes brutes perçues par le
propriétaire, augmentée du montant des dépenses incombant
normalement à ce dernier et mises par conventions à la charge des
locataires (article 29 du CGI). Ce montant est diminué du montant des
dépenses supportées par le propriétaire pour le compte des
locataires.
Le revenu brut des immeubles dont le propriétaire se réserve la
jouissance est constitué du montant du loyer qu'ils pourraient produire
s'ils étaient donnés en location (article 30 du CGI).
Le régime simplifié d'imposition n'est applicable qu'aux
revenus fonciers
imposables selon le droit commun
des
propriétés rurales ou urbaines (déduction forfaitaire de
14 % ou 15 %, déficit foncier imputable sur le revenu global
dans la limite de 70.000 francs, et reportable 10 ans sur les revenus
fonciers des années suivantes).
En application du 2. de l'article 32 du CGI, sont donc exclus de ce
régime les contribuables dont l'un des membres du foyer fiscal
perçoit des revenus dont le régime d'imposition est
différent du droit commun
. Il suffit qu'un seul bien entre dans les
catégories visées.
Il s'agit :
- des parts de société, à l'exception des
sociétés civiles immobilières de copropriété
(article 1655
ter
du CGI). Cette exclusion se justifie par le fait que
ces sociétés, les sociétés civiles de placement
immobilier notamment, déterminent elles-mêmes le revenu net
imposable entre les mains du contribuable ;
- des immeubles bénéficiant d'un régime favorable
d'imposition (article 156-3°-1 ; article 31-1-1° b
ter
et b
quater
), à savoir :
les immeubles en démembrement de propriété ;
les monuments historiques ;
les immeubles bénéficiant de la loi
" Malraux " ;
ceux bénéficiant de la loi " Malraux "
étendue aux zones franches urbaines ;
- des immeubles bénéficiant d'un régime favorable
d'imposition au titre du soutien à l'investissement locatif (article
31-1-1°, e à g), à savoir :
les immeubles imposés selon le régime dit
" Quilès-Méhaignerie " ;
les immeubles bénéficiant de l'amortissement dit
" Périssol " ;
les immeubles bénéficiant de l'amortissement dit
" Besson "
B. UN RÉGIME SIMPLIFIÉ
Le régime simplifié d'imposition des revenus fonciers est un
régime optionnel.
En application du 3. de l'article 32 du code général des
impôts, l'option s'exerce par périodes de trois ans, elle est
irrévocable au cours de chaque période et renouvelable par tacite
reconduction. L'option cesse dès que la limite de 30.000 francs est
dépassée.
Le revenu net imposable est égal au revenu brut diminué d'un
abattement d'un tiers
. Quoique forfaitaire, cet abattement n'est pas
à confondre avec la déduction forfaitaire, car il ne s'y
substitue pas : il se substitue à l'ensemble des charges, dont la
déduction forfaitaire n'est qu'un élément. La
simplification proposée consiste donc largement en une forfaitisation du
revenu net. Elle n'exonère pas de la détermination des recettes
brutes.
III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRESENT ARTICLE
Le
I.
de l'article modifie l'article 32 du code général
des impôts, sur trois points essentiels :
- le plafond de revenus bruts fonciers donnant droit à l'option pour
le régime simplifié d'imposition est porté de
30.000 francs à 60.000 francs ;
- l'abattement pour frais est relevé, passant d'un tiers à
40 % ;
- enfin, la limite de 60.000 francs ne pourra plus être
appliquée
prorata temporis
. Cela signifie que si un bien est
loué une partie de l'année, il n'en sera pas tenu compte pour
minorer le plafond ouvrant droit au régime simplifié
d'imposition. La suppression de cette disposition est une simplification
supplémentaire du dispositif.
En dehors de ces améliorations du régime "micro-foncier", des
mesures d'adaptation sont prises.
Ainsi, le c. du 2. de l'article 32 est modifié, afin de
tenir compte
de l'élargissement du bénéfice du régime fiscal en
faveur des logements locatifs aux logements anciens
. Sont donc exclus du
bénéfice du régime micro-foncier les revenus de location
tirés des logements bénéficiant du nouveau régime
dit "Besson", et non seulement les logements neufs.
Il est ajouté un alinéa à l'article 32 du CGI,
permettant au contribuable de renoncer à l'option qu'il a choisie non
pas au terme de trois ans, mais dès le changement de locataire
. Il
s'agit d'une souplesse supplémentaire dans l'application du
régime simplifié d'imposition. La renonciation prend effet
à compter de l'imposition des revenus de l'année au cours de
laquelle le départ du locataire est intervenu.
Le
II.
de l'article
précise les conditions de renonciation
à l'option
pour le régime simplifié concernant les
contribuables dont le revenu brut foncier dépasserait 30.000 francs
en 1999, sans atteindre la limite de 60.000 francs. Cette précision
est nécessaire dans la mesure où le plafond étant
modifié, le fait de dépasser les 30.000 francs sans
dépasser le nouveau seuil de 60.000 francs pourrait, en l'absence
de mesure spécifique, empêcher les contribuables de remettre en
cause leur option, et les contraindre à rester dans un dispositif dont
ils pourraient souhaiter sortir. Une disposition similaire est prévue
lorsque le revenu brut foncier dépasserait le seuil de
30.000 francs en l'an 2000.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : L'APPROBATION D'UNE MESURE
PRÉCONISÉE PAR LE DERNIER RAPPORT DU CONSEIL DES IMPÔTS
Votre commission ne peut qu'approuver l'extension et la simplification du
régime micro-foncier.
Le présent article reprend d'ailleurs une partie des
préconisations du Conseil des impôts dans son 17ème rapport
au Président de la République sur le thème de la
fiscalité des revenus de l'épargne (1999). Le Conseil des
impôts avait relevé certaines insuffisances du régime
micro-foncier introduit par la loi de finances pour 1998.
"
Après une première période d'application de ce
régime
(le microfoncier),
qui a été mis en place en
1998, son élargissement pourrait être envisagé, de
manière à l'appliquer à un nombre plus important de
contribuables. Le plafond pourrait être relevé progressivement
jusqu'à un montant annuel de 100.000 francs de loyers
encaissés.
Le Conseil s'interroge également sur le niveau de l'abattement. Le taux
de 33 % a été calculé, selon les services de la
direction générale des impôts, à
partir du
montant moyen des déductions opérées par les particuliers
ayant reçu des revenus bruts fonciers inférieurs à
30.000 francs. (...) Les professionnels et les associations de
propriétaires estiment ce taux inférieur à la
réalité et fixent celui-ci entre 40 et 45 % (...)
Si le
régime micro-foncier continuait à n'attirer qu'un nombre
restreint de contribuables par rapport à ceux qui peuvent s'en
prévaloir, la question du niveau de cet abattement devrait être
à nouveau examinée ".
Le présent article devrait donc améliorer le régime du
micro-foncier dans le sens préconisé par le Conseil des
impôts, sans toutefois reprendre intégralement ses
recommandations, puisque seules les préconisations
" basses "ont été retenues.
En 1998, 1.459.544 contribuables déclarent un revenu brut foncier
inférieur à 30.000 francs par an, soit
51,2 % des
contribuables
faisant une déclaration de revenus fonciers.
Toutefois, une partie seulement de ces contribuables ont opté pour le
régime micro-foncier : ils étaient 295.000 en 1998,
première année d'application du dispositif (pour l'imposition des
revenus 1997), soit 10 % de l'ensemble des contribuables déclarant
des revenus fonciers et 20 % des contribuables ayant droit à
l'application du nouveau régime.
Par ailleurs, 566.530 contribuables déclarent entre 30.000 et
50.000 francs de revenus fonciers et 476.590 contribuables
déclarent entre 50.000 et 100.000 francs de revenus fonciers.
Ainsi
1.043.120 contribuables, soit 36,6 % des contribuables,
déclarent entre 30.000 francs et 100.000 francs de revenus fonciers
annuels. Seuls 12,2 % des contribuables déclarent plus de
100.000 francs de revenus fonciers annuels, soit 342.966 personnes.
Le seuil fixé par le présent article, soit 60.000 francs de
revenus fonciers, devrait donc permettre, selon le ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, de toucher
2,4 millions
de contribuables sur 3,5 millions de personnes déclarant des revenus
fonciers, soit les deux-tiers des propriétaires-bailleurs, contre la
moitié dans le précédent régime.
L'Assemblée nationale estime que le fait de porter le plafond ouvrant
droit au régime simplifié d'imposition de 30.000 à
60.000 francs est suffisant, au motif que le relever davantage serait
contre-productif.
" Toute extension du régime semble obéir à la loi
des rendements décroissants. En effet, si selon le tome II du fascicule
Evaluations des voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour
2000, la dépense fiscale relative au régime d'imposition
simplifiée des revenus fonciers n'excédant pas 30.000 francs
s'élève à 100 millions de francs par an,
l'exposé des motifs du projet de loi évalue à
500 millions de francs par an le coût de son extension
".
En fait, le coût du doublement du plafond ouvrant droit au régime
micro-foncier est évalué par le ministère de
l'économie et des finances à 215 millions de francs, et
non 500 millions de francs. Le coût du relèvement du taux de
l'abattement pour charges est de 285 millions de francs. Au total, en y
intégrant le doublement du plafond et le relèvement du taux de
l'abattement pour charges la mesure coûte donc bien 500 millions de
francs. La "
loi des rendements décroissants
" peut
être à tout le moins dès lors relativisée.
Votre rapporteur général s'interroge donc sur la
volonté du gouvernement de poursuivre le mouvement ainsi engagé,
dans le sens préconisé par le Conseil des impôts.
Il serait ainsi envisageable, par exemple, de prévoir une seconde
étape visant à porter de 60.000 à 100.000 francs le
plafond annuel de revenus fonciers ouvrant droit à l'application du
régime "microfoncier" pour l'imposition des revenus 2000. Ceci
permettrait de toucher plus de 80% des contribuables déclarant des
revenus fonciers.
Votre rapporteur remarque enfin que la décision de porter de porter d'un
tiers à 40 % l'abattement pour frais témoigne
a contrario
de la faiblesse des taux retenus pour la déduction forfaitaire de
droit commun (14%) et pour le nouveau régime fiscal en faveur du
logement ancien conventionné (25%).
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE
7
Actualisation
des abattements relatifs au régime d'imposition des plus-values
prévus à l'article 150 Q du code général des
impôts
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet d'actualiser les abattements applicables en matière d'imposition
des plus-values qui n'ont pas été modifié depuis 1977, en
dépit de l'évolution du marché immobilier.
Votre rapporteur général a souligné dans son exposé
général la montée des prélèvements rampants.
Ce phénomène tient largement au fait que le barème est
simplement indexé sur les prix et ne tient pas compte de la croissance
réelle, qui par le jeu de la progressivité tend à faire
monter les contribuables vers des tranches supérieures et donc
accroît la charge fiscale, supportée par les Français.
Mais, aux effets de la progressivité du barème, s'ajoute celui de
la non-réévaluation de tout un ensemble de seuils ponctuels -
comme en témoigne le tableau ci-après relatif à des
régimes fiscaux intéressants spécialement les personnes
physiques -, dont les effets bien que moins sensibles en période
d'inflation ralentie, ne doivent pas être négligeables.
S'agissant de mesures symboliques, il vous est proposé d'actualiser les
montants figurants à l'article 150 Q du code général des
impôts qui n'ont jamais été actualisé depuis
1977 :
• abattement général de 6.000 francs par an sur le total
des plus-values réalisées au cours d'une même
année ;
• abattement spécifique de 75.000 francs lorsque les plus-values
résultent d'une expropriation ou d'une cession à l'État ou
à ses établissements publics administratifs ;
Article du code général des impôts |
Montant du seuil en francs |
Dernière modification |
Objet |
32-1 |
30 000 |
01/01/1998 |
Régime Micro-foncier (modifié par l'art. 7 du PLF 2000) |
35 bis II |
5 000 |
01/01/1984 |
exonération des revenus de location de pièces dans l'habitation principale |
80 quater |
18 000 |
01/01/1991 |
Pensions alimentaires au conjoint |
81-22 ème |
20 000 |
01/01/1988 |
Abattement Indemnité de départ en retraite |
81 ter |
3 000 |
01/01/1974 |
Versement de l'entreprise à un plan d'épargne (1/4 de la rémunération annuelle pour le salarié) |
125-0A |
30 000/60 000 |
01/01/1998 |
Abattement sur les bons et contrats |
154 |
17 000 |
01/01/1982 |
Déduction du salaire du conjoint pour les non-adhérents aux centres de gestion agréés |
156-1° |
200000 |
01/01/1995 |
Déduction du déficit agricole si les autres revenus n'excèdent pas ce seuil |
156 I - 3° |
70000 |
01/01/1995 |
Imputation des déficits fonciers sur le revenu global |
156 9°quater |
30000 |
01/10/1994 |
Plafond du Codevi |
158-5a 3 ème |
20 000 |
01/01/1999 |
Plafonnement de l'abattement de 10% pour les retraités (effet rétroactif 1998) |
163 novodecies |
8 000/16 000 |
01/01/1999 |
Déduction en cas de versement sur un plan d'épargne en vue de la retraite (revalorisée chaque année) |
163 quinquies D |
600 000 |
16/07/1992 |
Plafond du PEA |
163 duovicies |
125 000/250 000 |
01/01/1998 |
Investissement dans une entreprise de pêche artisanale |
196 B |
20 370 |
01/01/1999 |
Déduction d'impôt liée au rattachement d'un enfant majeur |
197 2 |
20 270/6 100 |
01/01/1999 |
Baisse du quotient familial |
197 3 |
33 310/ 44 070 |
01/01/1999 |
Abattement spécial outre-mer |
199 quater D |
15 000 |
01/01/1989 |
Déduction de 25% des frais de crèche ou assistante maternelle agréée, plafonnée à 15 000 Francs |
199 quater F |
400/1 000/1 200 |
01/01/1992 |
Réduction d'impôt pour les enfants scolarisés (même montant depuis 1992 avec une année de suspension 1998) |
200-4 2ème alinéa |
2 050 |
01/01/1999 |
Amendement " Coluche " (extension aux services à domicile, revalorisation annuelle) |
719-1 |
|
01/12/1995 |
Tranches de 150 000F et 700 000F (6 et 9%) pour les frais de mutation des fonds de commerce ; taux modifiés par l'art. 5 du PLF 2000 |
722 |
|
10/05/1993 |
Idem précédent, mais taux de 2% pour les débits de boisson avec une seule tranche (montant supérieur à 150 000 francs) |
754A |
500 000 |
19/01/1980 |
valeur maximale du bien immobilier permettant dans le cadre d'un contrat d'acquisition en commun dit " tontine " de bénéficier de droits d'enregistrement réduits |
757A |
18 000 |
01/01/1976 |
Déductibilité des sommes versées à un organisme chargé de verser la pension alimentaire d'un enfant mineur |
757B |
200 000 |
20/11/1991 |
Exonération de droits de succession sur cette somme si elle est versée après 70 ans |
775 |
6 000 |
01/01/1996 |
Fraction des frais funéraires déductibles |
777 tableau 1 |
tranches |
01/01/1984 |
Tarif ligne directe |
777 tableau 2 |
tranches |
01/01/1984 |
Tarif entre époux |
777 tableau 3 |
tranches |
01/01/1984 |
Tarif ligne collatérale et non parents |
777 tableau 4 |
tranches |
01/01/1984 |
Tarif entre parents jusqu'au 4è degré et au-delà |
779 II |
300 000 |
01/01/1984 |
Abattement pour les personnes handicapées (héritier, légataire ou donateur) |
788 I |
100 000 |
01/01/1984 |
Abattement entre frères et soeurs si le survivant est veuf célibataire ou divorcé et qu'il est âgé de plus de 50 ans et qu'il ait été domicilié pendant 5 ans chez le défunt |
788 II |
10 000 |
01/01/1974 |
Abattement forfaitaire minimal |
790 B |
100 000 |
01/04/1996 |
Abattement forfaitaire par bénéficiaire en cas de donation aux petits-enfants |
793 bis |
500 000 |
01/07/1992 |
Abattement sur des donations foncières (terres cultivées, forêts ..) et certains immeubles. La limite s'applique à la valeur des biens |
793 ter |
300 000 |
01/07/1993 |
Montant de la part exonérée de chaque héritier dans le cas ci-dessus |
•
abattements spécifiques en cas de cession de la première
résidence taxable : 20.000 francs par époux, 30.000 francs
pour un veuf et 10.000 francs par enfant.
Il s'agit de tenir compte de l'évolution des prix du marché
immobilier qui même s'ils ont baissé sensiblement au cours des
années 1990, restent largement supérieurs à ce qu'ils
étaient à la fin des années 1970.
Cette mesure de justice paraît d'autant plus nécessaire que son
coût devrait rester limité
42(
*
)
.
De façon très modérée, votre commission s'est
contentée d'actualiser les abattements sur la base de l'évolution
de l'indice général des prix. Anticipant sur les prochaines
années, elle vous propose de fixer ces abattements en francs, mais par
rapport à une valeur arrondie en euro.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE
7
Prise
en compte de l'inflation pour la détermination des plus-values
résultant de la cession d'un fonds de commerce
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet de
prendre en compte, pour le calcul des plus-values résultant de la vente
d'un fonds de commerce possédé depuis plus de deux ans,
l'inflation constatée sur la durée de
l'exploitation.
A l'heure actuelle la plus-value imposable d'un contribuable exerçant
une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale qui
cède son fonds de commerce est déterminée par la
différence entre le prix d'achat et le prix de cession, sans
actualisation du prix d'acquisition en fonction de l'inflation.
Ainsi, le Trésor public encaisse la plus-value fictive née de
à l'inflation.
Ce régime fiscal est nettement moins favorable que le régime des
plus-values immobilières qui se caractérise non seulement par la
revalorisation du prix d'acquisition en fonction de l'inflation (article
150 K du code général des impôts), mais
également par un abattement sur la plus-value de cession de 5 % par
année de possession de l'immeuble au delà de la
2
ème
(article 150 M du CGI).
L'administration fiscale fait valoir que ces avantages se justifient par le
fait que les plus-values immobilières sont assujetties au barème
progressif de l'impôt sur le revenu alors que celles des professions
précitées sont soumises au taux de taxation des plus-values
professionnelles à long terme, plus favorable.
Toutefois, un tel raisonnement ne prend pas en compte la très forte
augmentation du taux de taxation des plus-values professionnelles à long
terme depuis l'institution des nouveaux prélèvements
sociaux
43(
*
)
. Il convient
à cet égard de rappeler que si les plus-values professionnelles
à long terme bénéficient d'un taux de taxation de faveur
depuis 1965
44(
*
)
, c'est
précisément pour tenir compte du fait que les plus-values
proviennent pour une part des effets de la hausse générale des
prix. Avec un taux de 26 %, il est désormais difficile de parler de
régime de faveur.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter
cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES
L'ARTICLE 7
Abaissement du taux d'imposition des plus-values
de cession à 15 %
Commentaire : le présent article vise à aligner
le
taux proportionnel d'imposition des plus-values de cession, qui
s'élève à 16%, sur le taux de prélèvement
libératoire sur les produits des placements à revenus fixes, qui
est de 15 %.
I. LE DISPOSITIF ACTUEL : LA COEXISTENCE DE PLUSIEURS TAUX
D'IMPOSITION
Les modalités d'imposition des gains nets en capital
réalisés à l'occasion de cessions à titre
onéreux de valeurs mobilières sont définies par l'article
200 A du code général des impôts. Ce dernier dispose
que les gains nets sont imposés au taux forfaitaire de 16 %
(26 % en tenant compte des prélèvements sociaux liés
à la CSG et à la CRDS).
L'article 125 A du code général des impôts fixe les
règles de prélèvement sur les produits de placement
à revenu fixe. Le contribuable peut opter pour un
prélèvement libératoire de l'impôt sur le
revenu
45(
*
)
.
Les taux de prélèvement ont longtemps été
marqués par une grande hétérogénéité.
Toutefois, ils ont été peu à peu harmonisés
à 15 % (25 % si l'on prend en considération les
prélèvements sociaux).
Certaines exceptions subsistent cependant. Elles sont liées à la
nature des placements (les bons anonymes sont taxés à
60 % depuis le 1
er
janvier 1999), mais également
à la date d'émission ou à la durée des placements.
Ainsi, les produits des placements autres que les bons et titres sont soumis
à un taux de 45 % pour les produits courus entre le
1
er
janvier 1983 et le 31 décembre 1989
inclus, à un taux de 35 % pour les produits courus entre le
1
er
janvier 1990 et le 31 décembre 1994 et à
un taux de 15 % pour les produits courus à partir du
1
er
janvier 1995.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : L'ALIGNEMENT DU TAUX D'IMPOSITION
DES PLUS-VALUES DE CESSION SUR LE TAUX DE PRÉLÈVEMENT
LIBÉRATOIRE SUR LES PRODUITS DES PLACEMENTS À REVENUS FIXES
Les différences de taux d'imposition des plus-values de cession d'une
part et des produits des placements à revenus fixes d'autre part
présente deux inconvénients.
D'abord, la coexistence de plusieurs taux d'imposition contribue à la
mauvaise lisibilité de la fiscalité relative à
l'épargne.
Par ailleurs, elle peut créer des distorsions de comportement lorsque
les titres concernés sont des obligations en raison, d'un point de vue
économique, du caractère très proche des notions de revenu
et de plus-value.
Ainsi, il peut être avantageux d'acheter des obligations avant le
détachement du coupon, d'encaisser ce dernier imposé au taux de
15 % puis de revendre les obligations. Cette cession sera assimilée
à une perte qui pourra être imputable sur des gains de même
nature, qui seront eux imposés à 16 % : la
différence de taux permet de diminuer l'imposition sur les plus-values.
Cet exemple montre que la fiscalité peut faire naître des
comportements qui ne sont pas rationnels économiquement.
C'est la raison pour laquelle il est proposé d'aligner le taux
proportionnel d'imposition des plus-values de cession, qui
s'élève à 16 %, sur le taux de
prélèvement libératoire sur les produits des placements
à revenus fixes, qui est de 15 %.
Il convient de relever que le Conseil des impôts, dans son dernier
rapport
46(
*
)
, avait
soulevé cette incohérence et préconisait une harmonisation
des taux d'imposition.
Le coût de cette mesure est estimée à 500 millions de
francs.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter
cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES
L'ARTICLE 7
Actualisation du barème de conversion de
l'usufruit et de la nue-propriété en pleine
propriété
Commentaire : le présent article vise à
actualiser le
barème de conversion de l'usufruit et de la nue-propriété
en pleine propriété prévu à l'article 762 du
code général des impôts.
I. LE DISPOSITIF ACTUEL : UN BAREME OBSOLETE ET TRÈS PENALISANT
POUR LES CONTRIBUABLES
L'utilisation du démembrement du droit de propriété dans
les stratégies patrimoniales nécessite une évaluation
précise des droits démembrés.
Deux méthodes existent : la méthode dite
" économique " et la méthode dite " fiscale "
résultant de l'article 762 du code général des
impôts.
En termes économiques
47(
*
)
, le droit d'usufruit d'un bien
correspond au flux de revenus futurs distribués par ce bien, pendant la
durée de vie de l'usufruit ou le temps convenu pour terme du
démembrement.
Pour évaluer l'usufruit, deux paramètres doivent donc être
connus : le rendement du bien mis à la disposition de l'usufruitier
et la durée de l'usufruit, qui est assimilée à la
durée de vie de l'usufruitier, dans le cas où l'usufruit est
viager. Cet élément peut être défini à partir
des tables d'espérance de vie publiées par l'INSEE.
L'article 13 de la loi du 25 février 1901 portant fixation du budget
général des dépenses et des recettes de l'exercice 1901 a
créé le barème fiscal de l'actuel article 762 du code
général des impôts.
Il s'agissait de poser les règles de " conversion en pleine
propriété " des droits de l'usufruit et de
nue-propriété revenant aux héritiers, en vue de la
détermination de l'assiette des droits de mutation par
décès.
Il existe peu d'informations concernant les modalités de calcul du
barème de l'article 762 du code général des impôts.
Toutefois, il semblerait que ledit barème ait été
établi selon la méthode du calcul actuariel des flux de revenus
des biens démembrés (c'est-à-dire la méthode dite
" économique " évoquée
précédemment), mais à partir des données
disponibles de l'époque.
Ainsi, ce barème est fondé sur les tables d'espérance
de vie de 1898-1903 et évalue le rendement des biens détenus en
usufruit à 2 %.
Or, ces paramètres sont complètement obsolètes :
l'espérance de vie a, au cours du siècle, augmenté en
moyenne de plus de 60 %, tandis qu'un écart significatif s'est
creusé entre les hommes et les femmes.
Par ailleurs, le postulat d'un rendement uniforme de 2 % par an est
très critiquable.
L'utilisation de ces paramètres conduit à surévaluer la
nue-propriété. Selon les informations obtenues par votre
rapporteur général, cette surévaluation peut
dépasser 70 % de la pleine-propriété, pour des
investissements d'un rendement égal ou supérieur à
10 %
48(
*
)
.
Or, l'obsolescence du barème n'est pas neutre fiscalement. En cas de
donation ou de donation-partage avec réserve de l'usufruit, elle
s'avère très pénalisante pour les contribuables puisque
l'assiette de l'impôt est maximisée par une sous-estimation
artificielle de la valeur de l'usufruit.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE RÉACTUALISATION DU
BARÈME
L'administration fiscale est consciente des imperfections qui entachent le
barème de l'article 762 du code général des impôts.
Pourtant, aucune réforme n'est entreprise pour actualiser ce dernier.
En revanche, la même administration critique fortement les
stratégies transmissives qui consistent pour le propriétaire
à apporter au préalable la nue-propriété d'un bien
à une société civile constituée avec ses
héritiers, puis à faire donation des parts sociales qui lui ont
été attribuées, à titre onéreux, en
contrepartie de son apport.
Il convient de relever que ces opérations seraient beaucoup moins
fréquentes si l'application d'un barème obsolète ne
rendait pas la taxation intolérable en manipulant l'assiette des droits
de mutation à titre gratuit.
Il apparaît donc urgent de réactualiser le barème de
l'article 762 du code général des impôts. Deux
considérations contradictoires doivent être conciliées.
Le nouveau barème doit aboutir à un calcul le plus exact possible
de la valeur de l'usufruit qui varie non seulement en fonction du rendement du
bien mais aussi en fonction de la durée de vie de l'usufruitier et de
son sexe. La prise en compte de ces paramètres conduit par
conséquent à établir plusieurs barèmes.
Cette situation se heurterait au second impératif auquel doit
obéir la méthode d'évaluation de l'usufruit et de la
nue-propriété, à savoir la simplicité.
L'utilisation de l'article 762 du code général des impôts
n'est obligatoire que pour la liquidation et le paiement des droits de mutation
à titre gratuit. Elle doit notamment permettre aux contribuables
concernés de prévoir facilement l'impôt qu'ils auront
à payer. La création d'un barème trop complexe serait donc
contreproductive.
Votre rapporteur a choisi une solution de compromis qui vise à conserver
un barème unique mais à en actualiser les paramètres. Le
taux de rendement du bien retenu est de 4 %. La durée de l'usufruit
est calculée en fonction de l'espérance de vie constituée
à partir de la table de mortalité 1990-1992 établie par
l'INSEE. Enfin, les tranches d'âge sont fixés de 5 ans en
5 ans.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter
cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE
7
Suppression de l'interdiction de louer à un ascendant ou
un descendant dans le nouveau régime fiscal en faveur de
l'investissement locatif
Commentaire : le présent article additionnel a pour
objet de
permettre l'extension du nouveau régime fiscal en faveur de
l'investissement locatif (régime dit " Besson ") à la
location aux ascendants ou descendants de l'investisseur.
I. LE NOUVEAU REGIME FISCAL EN FAVEUR DE L'INVESTISSEMENT LOCATIF
L'article 96 de la loi de finances pour 1999 a créé un nouveau
dispositif fiscal en faveur du logement locatif privé (dispositif dit
" Besson "), en remplacement du régime d'amortissement
autonome pour les biens locatifs neufs prévu par l'article 29 de la loi
n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier (dispositif dit " Perissol"), qui s'est
achevé au 31 août 1999 pour les immeubles ayant obtenu un permis
de construire avant le 31 décembre 1998.
Tout en regrettant l'abandon de tout soutien fiscal à l'investissement
locatif dans le secteur libre,
le Sénat a approuvé le principe
de la création d'un secteur locatif intermédiaire et s'est
réjoui du rééquilibrage en faveur du logement ancien,
qu'il avait à de nombreuses reprises appelé de ses voeux.
Considérant toutefois le nouveau régime fiscal comme
insuffisamment incitatif, il avait souhaité y apporter des
améliorations sur trois points :
- ouvrir le nouveau dispositif aux locations en faveur des ascendants ou
descendants, à condition qu'ils ne soient pas membres du foyer fiscal,
- allonger la durée d'amortissement des biens locatifs neufs de neuf
à quinze ans, afin d'assurer une meilleure transition entre le
régime fiscal en faveur des logements neufs et celui en faveur des
logements anciens,
- porter le plafond de la déduction forfaitaire des revenus fonciers sur
le revenu global de 70.000 à 100.000 francs.
L'Assemblée nationale a suivi la position du Sénat sur le second
point, ce qui permet aux investisseurs d'amortir jusqu'à 65 % de la
valeur de l'immeuble neuf, contre seulement 50 % dans le projet de loi
initialement présenté par le gouvernement.
II. LA NÉCESSITÉ D'AMÉLIORER LE DISPOSITIF EXISTANT
Le dispositif actuel prévoit que le locataire doit être une
personne physique, autre qu'un membre du foyer fiscal du propriétaire,
un ascendant ou un descendant. Si le logement est la propriété
d'une société non soumise à l'impôt sur les
sociétés, et que cette société loue à l'un
des associés ou un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant
d'un associé, ce dernier ne peut bénéficier de la
déduction au titre de l'amortissement.
Ces dispositions, qui sont reprises pour le dispositif en faveur du logement
ancien, paraissent exagérément restrictives.
L'interdiction de louer à un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un
descendant est justifiée, selon le gouvernement, par le souci
d'éviter des abus.
Toutefois, considérant que le dispositif fiscal s'accompagne de
nombreuses conditions relatives, en particulier, aux revenus du locataire, les
cas d'abus devraient être exceptionnels.
De plus, il apparaît que l'interdiction de louer à un ascendant
ou descendant pourrait être contournée lorsque l'ascendant ou le
descendant partage le logement avec une autre personne, qui pourra être
titulaire du bail.
Votre rapporteur général estime qu'il n'y a pas de raison qu'un
contribuable ne puisse pas bénéficier d'un avantage fiscal s'il
loue à un membre de sa famille dont les ressources ne sont pas
élevées, à condition que la personne ne soit pas membre du
foyer fiscal (afin de ne pas cumuler les avantages fiscaux) et que le bailleur
ne dispose pas par ailleurs de la déduction au titre du versement d'une
pension alimentaire.
L'encouragement à l'investissement locatif conventionné est
d'autant plus important que la reprise du marché immobilier pourrait,
à terme, créer des tensions sur le marché locatif. Rendre
le dispositif fiscal en faveur du logement " intermédiaire "
plus incitatif apparaît donc comme un objectif prioritaire.
Votre rapporteur général vous propose donc d'adopter le
présent article additionnel, dont le coût pour 2000 devrait
être modeste.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE 7 bis
(nouveau)
Suppression de
toute
condition d'âge pour la réduction d'impôt
au titre des
frais d'hospitalisation et de cure
Commentaire : le présent article introduit par
l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des
finances, tend à supprimer toute condition d'âge pour la
réduction d'impôt accordée en application de l'article 199
quindecies
du code général des impôts au titre des
frais d'hospitalisation et de cure.
A l'heure actuelle, les contribuables âgés de plus de 70 ans
peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le
revenu à raison des dépenses engagées pour leur
hébergement dans un établissement de long séjour ou une
section de cure médicale, quelle que soit leur situation de famille.
La réduction d'impôt est égale à 25 % des
dépenses engagées dans une limite annuelle de 15.000 francs par
foyer, soit une réduction d'impôt maximale de 3.750 francs.
Il faut noter que seuls peuvent être pris en compte, les frais
d'hébergement, à l'exclusion des dépenses de soins. On
note également que le plafond de 15.000 francs, qui ne fait l'objet
d'aucune réduction
pro rata
temporis
, lorsque les
dépenses n'ont été exposées qu'une partie de
l'année, n'est pas majoré en cas d'hébergement des deux
époux.
L'Assemblée nationale a souhaité dans le cadre des
réflexions contenues dans le rapport récemment remis au Premier
Ministre par Mme Paulette Guinchard-Kunstler, intitulé " Vieillir
en France : enjeux et besoins d'une nouvelle orientation de la politique en
direction des personnes âgées en perte d'autonomie ", supprimer la
condition d'âge.
En effet, certaines pathologies graves et invalidantes et en particulier la
maladie d'Alzheimer rendent indispensable le placement avant l'âge de
70 ans fixé par l'article 199
quindecies
du code
général des impôts.
Selon le rapport de M. Didier Migaud, rapporteur général de
la commission des finances de l'Assemblée nationale, un tel
aménagement représente une moins-value de l'ordre de 70 millions
de francs par an, à comparer à la dépense fiscale actuelle
évaluée à 240 millions de francs.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 8
Institution d'une exonération
des
impôts commerciaux en faveur des associations qui exercent des
activités lucratives accessoires
Commentaire : le présent article propose que les
organismes
constitués sous forme associative dont la gestion est
désintéressée puissent exercer des activités
lucratives accessoires tout en restant exonérés des impôts
commerciaux, sous réserve que les recettes liées à ces
activités n'excèdent pas 250.000 francs.
Le présent article concrétise l'une des promesses faites par le
Premier ministre au monde associatif lors des assises de la vie associative
tenue à Paris les 20 et 21 février 1999. Il a pour objet de
remédier aux conséquences de l'instruction du 15 septembre 1998
qui a confirmé l'assujettissement des associations aux impôts
commerciaux pour les activités lucratives accessoires, dès lors
que ces activités sont exercées dans des conditions identiques
à celles des entreprises commerciales.
Il vise à faire bénéficier les associations
concernées d'une exonération d'impôts commerciaux à
condition que le montant de leurs recettes commerciales n'excède pas
250.000 francs par an.
En outre, ces organismes seraient également placés hors du champ
de la taxe professionnelle et exonérés de taxe sur la valeur
ajoutée.
Enfin, il est proposé de simplifier la gestion du paiement de
l'impôt sur les sociétés en supprimant l'obligation de
verser des acomptes pour les associations, fondations et congrégations
dont les activités lucratives accessoires restent de faible importance
(chiffre d'affaires imposé de l'année précédente
inférieur à 350.000 francs).
On notera qu'un des motifs de mécontentement du monde associatif ces
derniers mois reste pendant : le fait d'exiger que les associations soient
gérées de façon bénévole se heurte en effet
à la réalité des grandes associations qui ont
fréquemment recours à des dirigeants à temps plein et
rémunérés à ce titre. Il conviendrait donc que le
gouvernement clarifie ce point dans les meilleurs délais.
I. L'INSTRUCTION FISCALE DU 15 SEPTEMBRE 1998 VISAIT À
REMÉDIER À L'INSÉCURITÉ FISCALE DES ASSOCIATIONS
A. L'INSÉCURITÉ FISCALE DES ASSOCIATIONS
Compte tenu de leur but non lucratif, les associations sont placées par
la loi hors du champ d'application de l'impôt sur les
sociétés, de la taxe professionnelle et bénéficient
de larges exonérations de TVA. Elles sont pour l'essentiel assujetties
à la taxe sur les salaires.
•
Impôt sur les sociétés
L'impôt sur les sociétés s'applique à toutes les
" personnes morales se livrant à une exploitation ou à des
opérations de caractère lucratif " (article 206-1 du CGI).
Les associations sont donc passibles de cet impôt si et seulement si
elles se livrent à une exploitation ou à des opérations de
caractère lucratif.
Deux exonérations spécifiques sont prévues à
l'article 207 du CGI en faveur :
- des associations organisant avec le concours des collectivités
territoriales des manifestations telles que foires, expositions et
réunions sportives ;
- de toutes associations à raison des opérations
exonérées de TVA par le 1° du 7 de l'article 261 du CGI.
Cette dernière exonération est toutefois d'un effet pratique
limité, les associations ainsi exonérées de TVA
n'étant le plus souvent pas passibles de l'impôt sur les
sociétés.
Les associations sans caractère lucratif sont toutefois soumises
à l'impôt sur les sociétés à hauteur des
revenus de leur patrimoine (location d'immeubles bâtis et non
bâtis, exploitation des propriétés agricoles ou
forestières, revenus de capitaux mobiliers hors actions de
sociétés françaises et obligations) mais ces revenus sont
taxés au taux de 24 % et même de 10 % pour les
dividendes émanant de certaines sociétés
immobilières et sociétés agréées.
Les associations qui ne se livrent à aucune opération lucrative
sont exonérées de l'imposition forfaitaire annuelle des
sociétés prévue à l'article 223
septies
du
CGI.
Enfin, les associations qui ne sont pas passibles de l'IS ne le sont pas
davantage de la taxe d'apprentissage qui représente 0,5 % des
salaires versés par l'entreprise.
•
Taxe professionnelle
L'article 1447 du CGI dispose que " la taxe professionnelle est due chaque
année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre
habituel une activité professionnelle non salariée ". Il a
constamment été interprété comme plaçant les
associations à but non lucratif hors du champ d'application de la taxe
professionnelle.
Le CGI prévoit en outre certaines exonérations au profit,
notamment :
- des établissements d'enseignement du second degré qui ont
passé avec l'Etat un contrat et des établissements d'enseignement
supérieur qui ont passé une convention ou qui font l'objet d'une
reconnaissance d'utilité publique (article 1460) ;
- des entreprises de spectacle (article 1464 A) : cette exonération
relève des collectivités territoriales ou de leurs
groupements ; elle est plafonnée à 50 %.
•
La Taxe sur la valeur ajoutée
Le champ d'application de la TVA n'exclut pas les associations à but non
lucratif. En effet, l'article 256 A du CGI dispose ainsi que " sont
assujetties à la TVA les personnes qui effectuent de manière
indépendante une activité de producteur, de commerçant ou
de prestataire de services, quels que soient le statut juridique de ces
personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la
nature de leurs interventions ".
Toutefois, les associations font l'objet de plusieurs exonérations qui
leur sont propres, le point commun de ces exonérations étant de
viser les organismes agissant sans but lucratif et dont la gestion est
désintéressée (mouvements d'opinion, associations
fermées, associations ouvertes, manifestations de bienfaisance).
Source : Rapport de M. Guillaume Goulard, fiches n° 1 et
2
Toutefois, le bénéfice de ce régime fiscal
privilégié est subordonné au caractère non lucratif
de leur activité qui s'apprécie à l'aune de deux
critères :
- une gestion désintéressée : cela signifie que
l'association ne doit concourir, ni directement ni indirectement, à
l'enrichissement de ses membres ;
- une gestion dont les objectifs et les méthodes ne peut les assimiler
à des entreprises commerciales.
Selon l'article 261 du CGI qui concerne les exonérations de TVA, le
caractère désintéressé de la gestion peut
être évalué au regard de trois critères :
- l'organisme doit être géré et administré à
titre bénévole par des personnes n'ayant aucun
intérêt direct ou indirect dans les résultats de
l'exploitation ;
- l'organisme ne doit pas procéder à aucune distribution directe
ou indirecte des bénéfices, sous quelque forme que ce soit ;
- les membres de l'organisme et leurs ayants droit ne doivent pas pouvoir
être déclarés attributaires d'une part quelconque de
l'actif, sous réserve du droit de reprise des apports.
Toutefois, même gérée de façon
désintéressée, une association peut être
considérée comme un organisme à but lucratif pour
l'application des impôts commerciaux dès lors qu'elle exerce une
activité similaire à celle d'une entreprise commerciale et
qu'elle l'exerce dans les mêmes conditions que celle-ci.
Bien que non contestable, ce principe est celui qui donnait lieu à la
plus grande partie des difficultés concrètes, à la fois
parce que les services fiscaux en retenaient une interprétation trop
large et parce qu'il était très inégalement
appliqué sur l'ensemble du territoire.
En outre, les critères fixés il y a plus de vingt ans pour
bénéficier du régime d'exonération se sont
révélés inadaptés à la situation actuelle
caractérisée par l'intervention croissante du milieu associatif.
Les élus se sont ainsi fait l'écho des inquiétudes
émanant des associations à la suite de l'augmentation des
redressements fiscaux et de l'insécurité fiscale qu'une telle
situation engendre.
Car, comme le relève le rapport Goulard, à la différence
des sociétés commerciales pour lesquelles les impositions
supplémentaires résultant de redressements fiscaux sont
" économiquement supportables ", une association qui subit un
contrôle et un redressement se voit contrainte de supporter d'un seul
coup la totalité de l'impôt dû au titre des trois
années précédentes. Les redressements notifiés aux
associations sont en conséquence presque toujours
disproportionnés par rapport à leurs possibilités
financières.
A ce titre, il préconisait plusieurs mesures :
- la publication d'une instruction clarifiant le régime fiscal des
associations en déterminant de façon objective la
frontière entre les activités lucratives et les activités
non lucratives ; cette proposition a donné lieu à
l'instruction du 15 septembre 1998 ;
- l'institution d'une procédure de " garantie " ou de
" rescrit " permettant aux associations d'interroger l'administration
sur leur statut fiscal sans encourir de contrôle et de
redressement ; cette préconisation a également
été suivie de mesures
49(
*
)
;
- l'institution de voies de recours adaptées, qui supposent une
extension de la compétence de la commission départementale des
impôts et un aménagement de sa composition ; cette
proposition a fait l'objet de l'article 111 de la loi de finances pour 1999.
B. L'INSTRUCTION DU 15 SEPTEMBRE 1998 ET SES DIFFICULTÉS
D'APPLICATION
1. Les dispositions de l'instruction du 15 septembre 1998
L'instruction 4 H-5-98 du 15 septembre 1998 tendait à remédier
aux incertitudes relevées ci-dessus.
Cette instruction prévoit ainsi qu'une association ne peut se trouver
assujettie aux impôts commerciaux que si :
- sa gestion est intéressée, c'est-à-dire que des
rémunérations ou des avantages significatifs sont consentis aux
dirigeants
50(
*
)
ou à des
tiers ;
- ou si elle développe une activité exercée par une
entreprise lucrative, en visant le même public, en pratiquant des prix
comparables et en ayant recours à des méthodes
commerciales
51(
*
)
.
Pour apprécier si une association relève effectivement du secteur
lucratif ou non, il convient désormais de procéder à
l'analyse suivante :
Un préalable consiste à examiner si l'association n'exerce pas
son activité principalement
au profit d'entreprises
. Dans ce cas,
l'association est nécessairement soumise aux impôts commerciaux. A
défaut, le principe d'égalité devant l'impôt ne
serait pas respecté.
Il convient ensuite de vérifier le
caractère
désintéressé
de la gestion de l'organisme. Si la
gestion est intéressée (rémunération significative
des dirigeants, avantages en nature consentis à ces derniers et à
leurs proches,
etc
...), l'association est soumise aux impôts
commerciaux.
L'interrogation suivante en cas de gestion désintéressée
consiste à déterminer si les
activités
exercées
par l'organisme
ne concurrencent pas une entreprise.
Si la gestion est désintéressée et si l'activité
n'est pas concurrentielle, il n'est pas nécessaire de poursuivre
l'analyse, l'organisme n'est pas soumis aux impôts commerciaux.
Dans le cas contraire, dès lors que l'activité est
concurrentielle, l'analyse doit être poursuivie.
La dernière interrogation porte alors sur les
modalités
d'exercice
de chaque activité de l'organisme. Les modalités
à examiner sont au nombre de quatre, classées par ordre
d'importance décroissante :
le "
produit
" : l'activité (prestation, vente)
tend-elle à satisfaire des besoins déjà pris en compte par
le marché, ou pas ?
le "
public
" concerné : l'activité
est-elle réalisée au profit de catégories de personnes en
situation difficile sur le plan moral, physique ou financier ?
les "
prix
" pratiqués : les tarifs sont-ils
nettement inférieurs à ceux des organismes lucratifs ?
la "
publicité
" utilisée : l'organisme
a-t-il recours aux mêmes méthodes et procédés
commerciaux que les entreprises pour se créer une clientèle
(recours à la publicité, etc...) ?
L'examen de ces quatre critères doit permettre de vérifier que
l'organisme ne cherche pas à se " placer " sur le
marché, comme n'importe quelle autre entreprise.
L'instruction précise également qu'un organisme dont
l'activité principale est non lucrative peut réaliser des
opérations de nature lucrative, notamment quand celles-ci sont
nécessaires à l'exercice de son activité non lucrative.
Dans cette hypothèse, le caractère non lucratif d'ensemble de
l'organisme n'est pas contesté si les opérations lucratives sont
dissociables de l'activité principale non lucrative, par leur nature. Il
est, en outre, nécessaire que l'activité non lucrative demeure
" significativement prépondérante ", la partie
lucrative ne devant pas orienter l'ensemble de l'activité de l'organisme.
L'instruction ajoute qu'
en matière d'impôt sur les
sociétés et de taxe professionnelle, l'absence de remise en cause
du caractère non lucratif de l'activité principale suppose
également que les opérations lucratives soient
réalisées dans le cadre d'un secteur d'activité distinct
ou d'une filiale
.
Une nouvelle instruction est parue le 16 février 1999
(n° 4H-1-99) afin de détailler les conditions dans lesquelles
une association qui exerce une activité lucrative peut placer cette
activité dans un secteur d'imposition distinct. Cette nouvelle
instruction a notamment apporté les éléments
suivants :
- en principe, sont considérées comme dissociables de
l'activité principale non lucrative les activités qui
correspondent à des prestations de nature différente : vente
d'un journal, même si le thème de ce dernier correspond à
l'objet social de l'organisme, exploitation d'un bar ou d'une buvette, vente
d'articles divers, même illustrés du logo de l'association,
location de salles ;
- la notion de prépondérance doit s'appréhender de la
manière qui rende le mieux compte du poids réel de
l'activité non lucrative de l'organisme ; à cet
égard, le critère comptable du rapport des recettes commerciales
sur l'ensemble des moyens de financement de l'organisme (recettes, subventions,
dons, legs, etc.) apparaît comme le plus objectif ; il est toutefois
possible d'apprécier cette notion en fonction de la part respective des
effectifs ou des moyens qui sont consacrés respectivement à
l'activité lucrative et à l'activité non lucrative ;
en toute hypothèse, il est généralement
préférable d'apprécier la prépondérance par
rapport à une moyenne pluriannuelle afin d'éviter de tirer des
conséquences d'une situation exceptionnelle.
2. Les difficultés d'application
L'instruction du 15 septembre 1998 comme celle du 16 février 1999 ont
suscité de grandes inquiétudes au sein du monde associatif.
L'impossibilité pour un grand nombre de petites associations de se
conformer aux conditions leur permettant de rester hors du champ d'application
des impôts commerciaux alors même que leur activité demeure
essentiellement non lucrative, est rapidement apparue. De nombreuses
associations se sont ainsi signalées pour souligner les
difficultés que faisaient surgir les dispositions des deux instructions
précitées.
En outre, les services fiscaux se sont retrouvés assaillis par une
multitude de demandes d'associations désireuses d'obtenir des
précisions sur le régime fiscal qui leur est applicable.
Lors des assises de la vie associative tenue à Paris les 20 et 21
février 1999, le Premier ministre a en conséquence annoncé
deux mesures importantes pour mettre un terme aux légitimes
inquiétudes du monde associatif :
- en premier lieu, il a annoncé le report de l'entrée en vigueur
des instructions du 15 septembre 1998 et du 16 février 1999
précitées au 1
er
janvier 2000 ;
- en second lieu, il a promis une exonération d'impôts commerciaux
pour les certaines activités accessoires développées par
les associations.
Tel est l'objet du présent article.
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article vise à exonérer explicitement
d'impôts commerciaux les organismes sans but lucratif constitués
sous forme associative qui, en vertu du 1
bis
ajouté à
l'article 206 du code général des impôts, remplissent les
trois conditions suivantes :
- leur gestion est désintéressée ;
- leurs activités non lucratives restent significativement
prépondérantes ; on a vu que cette notion avait
été explicitée par l'instruction du 16 février 1999
précitée ;
- le montant de leurs recettes d'exploitation encaissées au titre des
activités lucratives au cours de l'année civile n'excède
pas
250.000 francs par an
; en mentionnant les seules recettes
d'exploitation, le gouvernement a voulu expressément exclure de
l'exonération toutes les autres recettes : produits des parts et
actions de sociétés, résultats de participation, produits
de créances ; en outre, il a expressément
précisé que les organismes à but non lucratif sont
assujettis à l'impôt sur les sociétés en raison des
résultats de leurs activités financières lucratives et de
leurs participations.
Cette mesure vise les associations de la loi de 1901, les associations
régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les
départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, les fondations
d'entreprise ou reconnues d'utilité publique ainsi que les
congrégations.
Les organismes ainsi exonérés deviennent en revanche passibles de
l'impôt sur les sociétés, de la TVA et de la taxe
professionnelle aussitôt que l'une des trois conditions n'est plus
remplie, mais selon des modalités différentes.
1. La situation des organismes visés au regard de l'impôt sur
les sociétés
Le I du présent article précise que les organismes
exonérés deviennent passibles de l'impôt sur les
sociétés à compter du 1
er
janvier de
l'année au cours de laquelle l'une des trois conditions n'est plus
remplie. En application du droit commun, la totalité de l'impôt
dû au titre d'une année est liquidé le 15 avril de
l'année suivante. Cette disposition supposait d'aménager les
règles prévues en matière de versement des acomptes afin
de ne pas rendre une association perpétuellement redevable de
l'impôt sur les sociétés, dans l'hypothèse où
elle l'aurait été une fois.
En effet, l'article 1668 du CGI dispose que l'impôt sur les
sociétés est payé en quatre termes
déterminés provisoirement d'après le résultat du
dernier exercice clos. En l'absence de dispositions spécifiques, un
organisme qui aurait été imposé au titre des
résultats réalisés l'année N aurait donc du
acquitter en N + 1 quatre acomptes au titre du résultat de
l'année N + 1, quand bien même ce résultat
n'aurait au final pas été imposable.
Pour éviter de mettre en place un système de remboursement des
associations qui se trouveraient dans ce cas, le présent article
prévoit dans son paragraphe IV une disposition tendant à
dispenser les organismes sans but lucratif du paiement des acomptes à
condition que le chiffre d'affaires du dernier exercice clos soit
inférieur à 350.000 francs.
On rappellera également que les organismes sans but lucratif dont le
chiffre d'affaires est inférieur à 500.000 francs
bénéficieront, en vertu de l'article 11 du présent projet,
d'une exonération d'imposition forfaitaire annuelle (IFA).
2. La situation des organismes visés au regard de la TVA
En vertu du a du 1° du 7 de l'article 261 du CGI, les services de
caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à
leurs membres par les organismes sans but lucratif dont la gestion est
désintéressée sont exonérés de taxe sur la
valeur ajoutée.
Il en est de même, en vertu du b du 1° du 7 du même
article, pour les opérations faites au bénéfice de toutes
personnes par des oeuvres sans but lucratif qui répondent aux conditions
suivantes :
- leur gestion est désintéressée ;
- les prix pratiqués ont été homologués par
l'autorité publique ;
- des opérations analogues ne sont pas couramment
réalisées à des prix comparables par des entreprises
commerciales, en raison notamment du concours désintéressé
des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées
dont ils bénéficient.
Le paragraphe II du présent article propose d'instituer un nouveau cas
d'exonération de TVA, sans possibilité d'option, en faveur des
organismes répondant aux trois conditions précitées,
c'est-à-dire une gestion désintéressée, des
activités non lucratives significativement prépondérantes
et des recettes d'exploitation inférieures à 250.000 francs
au titre des activités lucratives. Une telle disposition semble conforme
aux dispositions communautaires dès lors qu'un plafond de recettes est
fixé.
Toutefois, certaines opérations sont explicitement exclues du
bénéfice d'une telle exonération. Il s'agit :
- des opérations concourant à la production, à la
livraison, à la transformation ou à l'amélioration
d'immeubles ;
- des opérations donnant lieu à la perception de revenus
patrimoniaux.
On rappellera enfin que les associations bénéficient de la
franchise de TVA ouverte aux micro-entreprises par l'article 7 de la loi de
finances pour 1999.
3. La situation des organismes visés au regard de la taxe
professionnelle
En application du paragraphe III du présent article, les organismes qui
remplissent les trois conditions précitées sont
exonérés de taxe professionnelle.
Toutefois, comme pour l'impôt sur les sociétés, ils
deviennent imposables à compter de l'année au cours de laquelle
l'une des trois conditions n'est plus remplie.
En principe, cette situation est assimilée à une création
d'établissement et, en vertu du II de l'article 1478 du CGI, la taxe
professionnelle n'est pas due pour l'année de cette création.
Elle est due pour les deux années suivant celle de la création,
la base d'imposition étant alors calculée d'après les
immobilisations dont le redevable a disposé au 31 décembre de la
première année d'activité. Enfin, en principe toujours, la
base du nouvel exploitant est réduite de moitié pour la
première année d'imposition, en vertu du troisième
alinéa du II de l'article 1478.
Toutefois, le présent article prévoit que lorsque l'organisme se
livrait à une activité lucrative l'année
précédant celle au cours de laquelle il devient imposable, cette
réduction de base n'est pas applicable.
En sens inverse, lorsque les trois conditions posées au premier
alinéa du 1 bis de l'article 206 du CGI sont à nouveau
réunies, l'organisme reste redevable de la taxe au titre de
l'année au cours de laquelle il les remplit, lorsqu'il ne les
remplissait pas l'année précédente.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 8 bis
(nouveau)
Relèvement de
l'abattement de taxe sur les salaires
au profit des associations
Commentaire : le présent article tend à faire
passer
l'abattement sur les salaires dont profitent notamment les associations
à 33.000 francs au lieu de 29.070 francs en 1999.
I. LE DISPOSITIF EN VIGUEUR
L'article 231 du code général des impôts prévoit
que les organismes qui versent des salaires sont passibles d'une taxe assise
sur le montant de ces salaires
52(
*
)
. En conséquence, les
organismes sans but lucratif sont eux aussi passibles de cet impôt.
Toutefois, le mouvement associatif au sens large bénéficie d'un
régime favorable de taxe sur les salaires.
D'une part, l'article 231
bis
L du code général des
impôts dispose que les rémunérations versées par des
organismes sans but lucratif aux personnes qu'ils recrutent à l'occasion
et pour la durée des manifestations de bienveillance ou de soutien, sont
exonérées de taxe sur les salaires, si ces manifestations sont
exonérées de taxe sur la valeur ajoutée.
D'autre part, l'article 1679 A du même code prévoit un abattement
de 29.070 francs sur la taxe due au titre des salaires versés en
1999, au bénéfice des associations et autres organismes sans but
lucratif.
Trois types d'organismes sont concernés :
- les associations régies par la loi du 1
er
juillet
1901 ;
- les syndicats professionnels et leurs unions, tels qu'ils figurent au
chapitre 1
er
du titre 1
er
du livre IV du code du
travail ;
- les mutuelles régies par le code de la mutualité lorsqu'elles
emploient moins de trente salariés.
Concrètement, cela signifie que la taxe sur les salaires n'est
exigible, pour les organismes précédemment cités, que pour
la partie de son montant dépassant 29.070 francs en 1999.
Cette disposition revient à exonérer de la taxe sur les salaires
les rémunérations versées à près de six
salariés payés au SMIC.
Ce plafond est relevé chaque année dans la même proportion
que la limite supérieure de la première tranche du barème
de l'impôt sur le revenu.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a
adopté un amendement tendant à porter l'abattement à
33.000 francs. Pour l'an 2000, les organismes visés à
l'article 1679 A ne devront plus acquitter que la fraction de taxe sur les
salaires qui excède 33.000 francs.
Les petits organismes, dont le montant de taxe sur les salaires est
inférieur à 33.000 francs, sont totalement
exonérés.
Le coût de cette mesure est évalué à
100 millions de francs pour 2000.
Cette mesure a été proposée pour calmer en partie les
inquiétudes des associations d'aide à la personne
provoquées par l'adoption de l'article 4 du projet de loi de finances
pour 2000. Cet article réduit à 5,5 % le taux de la TVA sur
les prestations de services d'aide à la personne fournies par des
entreprises agréées. Dans la mesure où les associations
d'aide à la personne sont déjà exonérées de
la TVA, cette mesure bénéficiera uniquement aux entreprises qui
risquent de concurrencer le secteur associatif.
Enfin, il est à noter que le rapport au Premier ministre de
M. Guillaume Goulard
53(
*
)
faisait état des critiques de certaines associations vis-à-vis de
cet impôt qu'elles jugent trop lourd et, à ce titre,
défavorable à l'emploi.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 9
Mesures en faveur des versements
effectués par les entreprises
dans le cadre du mécénat
Commentaire : le présent article propose d'admettre les
versements effectués par les entreprises au profit des organismes sans
but lucratif comme des charges déductibles du résultat dans les
conditions de droit commun, et de généraliser à l'ensemble
des organismes la possibilité pour l'entreprise versante d'associer son
nom aux opérations financées, possibilité dont ne
bénéficiait jusqu'à présent que la Fondation du
Patrimoine.
I. RAPPEL DU DROIT EXISTANT
En principe, ne sont déductibles des résultats d'une entreprise
que les dons et subventions versés dans l'intérêt direct de
l'entreprise, c'est-à-dire ceux qui relèvent d'une gestion
commerciale normale.
Toutefois, en vertu de l'article 238
bis
du code
général des impôts, les entreprises assujetties à
l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les
sociétés sont autorisées à déduire du
montant de leurs bénéfices les versements qu'elles ont
effectués au profit d'organismes sans but lucratif ainsi qu'à
certains organismes agréés dans la limite de 2,25 â ou
3,25 â de leur chiffre d'affaires selon la nature des organismes
bénéficiaires.
A ces limites particulières s'ajoute un plafond global : le montant
total des dépenses déductibles au titre d'un exercice ne peut
excéder 3,25 % du chiffre d'affaires. Ce plafond prend
également en compte les déductions pratiquées au titre des
dons d'oeuvres d'art à l'Etat et de l'acquisition d'oeuvres d'art
contemporaines (article 238
bis
AA et 238
bis
AB du
CGI).
Le plafond de déduction est de
2,25 â
lorsque les
versements sont effectués au profit d'oeuvres ou d'organismes
d'intérêt général ayant un caractère
philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif,
familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine
artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à
la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques
françaises, notamment quand ces versements sont faits au
bénéfice d'une fondation d'entreprise.
Ce plafond est porté à
3,25 â
du chiffre
d'affaires lorsque les dons sont faits à des fondations ou associations
reconnues d'utilité publique, ainsi qu'aux associations cultuelles ou de
bienfaisance qui sont autorisées à recevoir des dons et legs et
aux établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Moselle. Sont
également déductibles dans cette limite les versements faits
à des établissements d'enseignement supérieur ou
d'enseignement artistique publics ou privés à but non lucratif
agréés par le ministre chargé du budget ainsi que par le
ministre chargé de l'enseignement supérieur ou par le ministre
chargé de la culture.
Lorsque ces limites sont atteintes, l'excédent de dépenses peut
être déduit du bénéfice imposable
réalisé par l'entreprise concernée au cours des cinq
exercices suivants, après déduction des versements propres
à ces exercices.
Enfin, lorsqu'ils sont effectués au cours d'un exercice
déficitaire, ces versements sont reportables sur les cinq exercices
suivants celui au cours duquel ils ont été effectués,
après imputation des versements de même nature effectués au
cours des exercices concernés, dans la limite qui leur est applicable et
dans la limite globale de 3,25 â.
Ces versements ne sont déductibles que s'ils ne donnent lieu à
aucune contrepartie, y compris l'association du nom de l'entreprise versante
à l'opération financée, à l'exception des
versements effectués au profit de la Fondation du Patrimoine. Cette
dernière exception a d'ailleurs été introduite à
l'initiative du Sénat à l'occasion de la loi de finances pour
1997.
II. LES DISPOSITIONS PROPOSÉES PAR LE PRÉSENT ARTICLE
Les règles d'imputation exposées précédemment
obligent les entreprises qui ont exposé des dépenses de
mécénat à effectuer une gestion fine des avantages fiscaux
correspondants.
Aussi, afin d'encourager les actions de mécénat des
entreprises, il est proposé :
- d'autoriser les entreprises mécènes à associer leur nom
aux opérations qu'elles soutiennent. Cette mesure leur permettra de
signer leur action sans que cette signature soit considérée
désormais comme une contrepartie les privant du bénéfice
de l'avantage fiscal ;
- de simplifier le suivi des dépenses de mécénat lorsque
l'entreprise est déficitaire au plan fiscal en lui permettant de
déduire les dons qu'elle effectue au titre du mécénat, de
son résultat et non plus de son seul bénéfice ; les
versements concernés seraient donc considérés comme des
charges déductibles dans les conditions de droit commun.
Cette disposition permettra dorénavant aux entreprises de cumuler les
plafonds de déduction sur six ans, dans l'hypothèse ou au moins
l'exercice final est excédentaire. En outre, la nouvelle règle
est d'autant plus intéressante que la législation fiscale
prévoit une imputation des déficits sur les exercices suivants
jusqu'au cinquième exercice qui suit l'exercice déficitaire.
A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a
adopté un amendement tendant à appliquer cette dernière
mesure aux versements effectués par des entreprises à des
sociétés ou organismes de recherche scientifique et technique
agréés visés à l'article 238
bis
A du
code général des impôts.
Ces mesures seraient applicables pour les entreprises soumises à
l'impôt sur le revenu, pour l'impôt dû au titre de 1999, et,
pour les sociétés assujetties à l'impôt sur les
sociétés, pour les exercices clos à compter du
31 décembre 1999.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 10
Mesures en faveur de la
création
d'entreprises
Commentaire : le présent article comprenait dans sa
version initiale, trois dispositifs destinés à favoriser la
création d'entreprises, à travers : la pérennisation
du report d'imposition des plus-values de cession dont le produit est
réinvesti dans les fonds propres d'une PME, la suppression du
caractère provisoire du régime des bons de souscription de parts
de créateurs d'entreprise étendus, en même temps, à
l'ensemble des jeunes entreprises de croissance, quelle que soit la nature de
leur activité et, enfin, l'exonération du droit de
1.500 francs perçu sur les apports effectués lors de la
constitution de sociétés.
Le contenu de cet article, tel que le gouvernement l'a conçu, est
disparate et les mesures qu'il prévoit d'inégale importance.
Toutes tendent néanmoins, il est vrai, à favoriser la
création d'entreprises.
Les modifications prévues du code général des
impôts concernent donc le régime des plus-values de cession de
valeur mobilière, des bons de souscription de parts de créateurs
d'entreprise (BSPCE) et des droits d'apports exigés lors de la
constitution de sociétés.
Deux de ces mesures consistent en la pérennisation de dispositions
provisoires relatives, pour la première, aux réinvestissements de
plus-values et, en ce qui concerne la seconde, aux bons de création
d'entreprises (BSPCE).
I. LE PROJET INITIAL : DIVERSES DISPOSITIONS D'INÉGAL
INTÉRÊT MAIS NÉANMOINS OPPORTUNES
Malgré le caractère disparate et l'inégale portée
des mesures initialement proposées par le gouvernement dans cet article,
celles-ci n'en vont pas moins dans le bon sens. S'agissant
particulièrement de l'extension du champ d'application du régime
des bons de création d'entreprises et de la pérennisation des
avantages fiscaux qui sont accordés à leurs cessions ainsi
qu'à celles de titres dont le produit est réinvesti dans les
fonds propres de jeunes sociétés non cotées.
La suppression du caractère temporaire de ces incitations est, en
l'occurrence, appréciable dans la mesure où elle contribue, de
façon générale, à la fois à simplifier et
à stabiliser l'environnement fiscal des entreprises nouvellement
créées, et, en ce qui concerne les BSPCE, permet leur
montée en régime qui nécessite un certain temps et
augmente leur caractère attractif.
A. LA PÉRENNISATION DU REPORT D'IMPOSITION DES PLUS VALUES
RÉINVESTIES DANS LES FONDS PROPRES DES ENTREPRISES
1. Un objectif louable
L'objectif de cette mesure est d'inciter des personnes
expérimentées (salariés, dirigeants d'entreprises)
à investir le produit de leur réussite dans l'apport de fonds
propres à des entreprises nouvelles.
En remployant ainsi les plus values retirées de la cession de droits
sociaux de leur entreprises dans la souscription au capital initial ou la
participation à une augmentation du capital d'une jeune
société, ces personnes qualifiées souvent de
" business angels " (sorte de mentors) sont susceptibles de prodiguer
en même temps de précieux conseils à leurs émules.
L'apport de financements recherchés pourra donc se doubler d'un
transfert de compétences.
2. La consécration de dispositions initiées par de
précédentes lois de finances
C'est l'article 79 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du
30 décembre 1997) qui a institué ce mécanisme de
report d'imposition de plus values de cession ou de droits sociaux normalement
imposables au taux proportionnel de 16 %.
Il devait initialement bénéficier seulement à des
sociétés créées depuis moins de sept ans mais
l'article 5 de la loi de finances pour 1999 a porté ce délai
à quinze ans.
3. Un dispositif restreint
a) Les apports concernés
Les apports doivent consister en une souscription au capital des
sociétés éligibles à l'occasion soit de leur
constitution, soit d'opérations d'augmentation de capital en
numéraire.
Les plus values dont le produit est ainsi réinvesti proviennent de la
cession à titre onéreux :
- de
titres
mentionnés à l'article 92 B du code
général des impôts (valeurs mobilières
négociées sur un marché réglementé ou sur le
marché hors cote, obligations et autres titres d'emprunts
négociables non cotés) ;
- de
droits sociaux
, visés à l'article 92 J du
même code, cédés par certains associés de
sociétés passibles de l'impôt sur les
sociétés dont la part dans les bénéfices sociaux
n'excède pas 25 %.
b) De nombreuses limitations
-
concernant le cédant
: il doit avoir été,
pendant cinq ans, salarié ou mandataire social de la
société dont les titres sont cédés. Son foyer
fiscal doit en avoir détenu plus de 10 % des bénéfices
sociaux.
Mais il lui est interdit, en revanche, de devenir salarié ou mandataire
social de la société bénéficiant de l'apport (ou
même d'y détenir une participation substantielle de plus de 25 %
des droits pendant les cinq années suivantes).
-
concernant la société bénéficiaire de
l'apport :
Elle ne doit pas exercer une activité bancaire, financière,
immobilière ou d'assurance. Il lui faut être une véritable
PME, réellement nouvelle, ce qui implique :
. qu'elle ne soit pas cotée à la date de l'apport (ses
titres pouvant faire néanmoins l'objet d'une négociation sur le
marché libre dit " over the counter ") ;
. qu'elle soit détenue pour 75 % au moins, directement ou
indirectement, par des personnes physiques (hors participation minoritaire
d'organismes de capital - risque) ;
. qu'elle ait été immatriculée au registre du
commerce depuis moins de quinze ans (moins de sept ans pour les apports
réalisés avant le 31 août 1998) ;
. qu'elle ne soit pas issue d'une concentration, d'une restructuration
d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes.
En outre, la société bénéficiaire de l'apport doit
être passible de l'impôt sur les sociétés en France,
de plein droit ou sur option.
-
dans le temps :
le réinvestissement doit avoir lieu au
plus tard avant la fin de l'année qui suit celle de la cession.
Enfin, il ne s'agit encore que d'un dispositif temporaire, en attendant que la
pérennisation proposée ne prenne effet, puisque ne sont
concernées que les cessions réalisées entre le
1
er
janvier 1998 et le 31 décembre 1999, soit une
période de deux ans.
La transmission, soit à titre onéreux, soit à titre
gratuit, le rachat ou l'annulation des titres remis en contrepartie de l'apport
mettent fin au report d'imposition accordé.
En résumé, ce dispositif d'aide à la création
d'entreprises s'adresse effectivement à des personnes, salariés,
associés ou dirigeants, s'étant précédemment
engagées de façon significative (en droit fiscal, le seuil de
10 % distingue les participations de simples placements de portefeuille)
et durable (puisqu'une durée de cinq ans est prise en compte) dans
l'activité d'une entreprise avec une certaine réussite dont
témoignent les plus values de droits sociaux convoitées.
En bref, il s'agit donc bien, comme cela a été
souligné plus haut, de faire bénéficier de jeunes PME des
capitaux et des conseils d'entrepreneurs expérimentés et
efficaces.
Les nombreuses restrictions apportées à ce mécanisme de
ré-emploi de plus values peuvent sembler justifiées par le double
souci d'en réserver le bénéfice à de vraies PME,
réellement nouvelles et d'éviter certains détournements
(par exemple la création, par ce biais, de filiales de groupes ou de
sociétés préexistantes ou le développement de
relations " incestueuses " entre la société dont les
titres sont cédés et la société
bénéficiaire, consistant à recaser des dirigeants de la
première ou à placer la seconde sous son contrôle).
Le dispositif dont le paragraphe I du présent article propose la
pérennisation n'en demeure pas moins (voir infra) complexe et sans doute
peu incitatif (le coût n'en est d'ailleurs pas précisé). Il
ne s'agit jamais que d'un report et non d'une exonération.
B. RENDRE DURABLE LE REGIME DES BONS DE CREATION D'ENTREPRISE ET EN
ETENDRE LE CHAMP D'APPLICATION
Comme les mesures qui viennent d'être décrites, celles relatives
aux bons de création d'entreprises, proposées par les paragraphes
I et IV de cet article, s'inscrivent dans la continuité de dispositions
adoptées dans le cadre de textes antérieurs qu'elles tendent
à consacrer, en assurant leur pérennisation.
1. La stabilisation du régime des bons de création
d'entreprises
a) Des avancées successives
Plus ou moins inspirés des " stock-options " (plans d'options
de souscription ou d'achat d'actions d'une entreprise par ses propres
dirigeants ou salariés), mais bénéficiant d'un
régime fiscal nettement plus avantageux (voir infra), les BSPCE (bons de
souscription de parts de créateurs d'entreprises) permettent à la
fois d'attirer vers les jeunes sociétés à fort potentiel
de croissance les talents dont elles ont besoin et de leur procurer des fonds
propres. Pour les personnels concernés, qui croient au projet fondateur
de leur société, l'espérance d'une forte plus value
constitue un instrument à la fois de motivation, de fidélisation
et de compensation d'une moindre rémunération immédiate.
La récompense ainsi obtenue, dans le meilleur des cas, est aussi la
contrepartie d'un risque réel car le succès n'est pas toujours au
bout du chemin.
Les BSPCE, que l'on peut désigner par l'appellation
résumée de " bons de création " ou de
" bons de créateurs d'entreprises " ont été
institués par l'article 76 de la loi de finances pour 1998.
Ce mécanisme a été réservé, au
départ, à des sociétés présentant les
mêmes caractéristiques que celles visées par le dispositif,
analysé plus haut, du paragraphe I (réinvestissement dans les
fonds propres de jeunes sociétés du produit de plus-values de
cessions de titres).
Il devait s'agir, en effet, initialement de sociétés :
- non cotées, créées depuis sept ans, passibles de
l'impôt sur les sociétés,
- entièrement nouvelles, c'est-à-dire non issues de
concentrations, de restructurations, d'extensions ou de reprises
d'activités préexistantes,
- détenues, directement ou indirectement, pour 75 % au moins par
des personnes physiques (sans tenir compte des participations d'organismes de
capital risque).
En bref, les sociétés autorisées à émettre
ces bons fiscalement avantageux devaient être de vraies PME,
entièrement nouvelles et indépendantes. En revanche, faute de
pouvoir définir juridiquement cette notion, il n'était pas
exigé qu'elles soient innovantes (bien que le mécanisme
considéré soit particulièrement bien adapté aux
entreprises de ce type).
Les bénéficiaires des BSPCE étaient et demeurent les
salariés de la société ainsi que ses mandataires sociaux
soumis au régime fiscal des salariés.
Comme pour les reports d'imposition de plus-values, l'article 5 de la loi de
finances pour 1999 a étendu le régime de ces bons aux
sociétés de moins, non plus de sept, mais de quinze ans.
Le même texte a, par ailleurs, autorisé leur émission par
des sociétés issues d'essaimage (bien qu'elles résultent
de l'extension, par ailleurs interdite, d'activités
préexistantes).
Par la suite, la loi n° 99-587 du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la
recherche a encore substantiellement élargi le champ d'application du
dispositif.
Celui-ci s'applique, en effet, désormais :
- aux sociétés cotées sur les marchés de valeur de
croissance en France (nouveau marché) et au sein de l'espace
économique européen ;
- à celles détenues par des personnes physiques à hauteur
non plus de 75 % mais de 25 % (pour tenir compte de la dilution
inévitable de la part de capital détenu par les fondateurs d'une
société en croissance rapide ainsi que de l'insuffisance de fonds
propres de chercheurs qui créent leurs entreprises).
La loi précitée a enfin prorogé le régime des
BSPCE jusqu'au 31 décembre 2001, alors qu'il devait être
expérimenté, initialement, pendant une période de
seulement deux ans allant du 1
er
janvier 1998 au 31 décembre
1999.
b) Un régime fiscal avantageux
Le régime d'imposition des BSPCE (ou BCE) est précisé par
une instruction du 16 juillet 1998 du service de la législation fiscale
de la Direction Générale des Impôts.
Ils sont émis dans les conditions prévues par l'article 339-5 de
la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, relatif
aux bons de souscription dits " autonomes "
54(
*
)
.
Réservés aux membres du personnel salarié de la
société ainsi qu'à ses dirigeants soumis au régime
fiscal des salariés (à l'exclusion donc des administrateurs,
membres du conseil de surveillance, mandataires, etc... qui ne sont pas dans ce
cas), ces bons confèrent à leurs bénéficiaires le
droit de souscrire des titres (actions ou certificats d'investissement)
représentant une quote-part du capital de la société
émettrice, à un prix fixé de manière intangible
à la date de leur attribution.
Attribués "
intuitu personnae
" et donc rigoureusement
incessibles, les BCE sont soumis aux dispositions qui régissent les
valeurs mobilières (autorisation par les actionnaires réunis en
assemblée générale extraordinaire etc...).
Les titres sont émis au fur et à mesure de l'exercice des bons,
c'est à dire lorsque les bénéficiaires font une demande de
souscription accompagnée du versement du prix correspondant. Le prix
d'acquisition est fixé au jour de l'attribution par l'assemblée
générale des actionnaires. Les bons doivent être
exercés par leurs titulaires dans les cinq ans qui suivent.
Le gain net réalisé lors de la cession des titres souscrits en
exercice des BCE est imposé selon le taux de droit commun,
particulièrement avantageux, du régime des plus-values de cession
de valeurs mobilières ou de droits sociaux, qui est de 16 %,
(26 % compte tenu des prélèvements sociaux
55(
*
)
additionnels), lorsque le
bénéficiaire, à la date de la cession, est ou a
été pendant au moins trois ans, salarié de la
société émettrice.
Si cette dernière condition d'ancienneté n'est pas
respectée, la plus value est taxable à un taux majoré de
30 % (soit 40 % en incluant les prélèvements sociaux).
Ces modalités d'imposition paraissent particulièrement
attrayantes, eu égard au taux marginal de l'impôt sur le revenu en
France (54 %) et en comparaison du régime des stock-options, du
fait, principalement de l'absence de cumul entre plus-value d'acquisition (plus
sévèrement taxée) et plus-value de cession.
Le régime fiscal des BCE est également beaucoup plus simple
(notamment du fait qu'il n'a pas eu encore à subir de modifications) et
nettement plus souple (mis à part le respect d'une condition
d'ancienneté dans l'entreprise, aucun délai de conservation des
titres n'est exigé).
Du point de vue de la dépense fiscale, il est vrai que les
inconvénients des BCE sont bien moindres : soit la nouvelle
société échouera et la perte de recette sera minime, soit
elle réussira et les pouvoirs publics bénéficieront de
ressources supplémentaires d'autant plus abondantes que sa croissance
sera soutenue (or, ce sont les entreprises présentant le meilleur
potentiel à cet égard qui sont visées par le dispositifs
des BCE).
Les deux tableaux suivants illustrent le caractère plus favorable mais
le champ d'application plus étroit du régime des BCE par rapport
à celui des stock-options.
Concernant ces dernières, on rappellera qu'elles ont été
introduites en France par la loi du 31 décembre 1970 et permettent soit
de souscrire à des actions créées lors d'une augmentation
de capital (plans d'option de
souscription
d'actions), soit d'acheter
des actions rachetées au préalable par le société
(plans d'option
d'achat
d'actions).
Les opérations correspondantes doivent être autorisées par
une assemblée générale extraordinaire des actionnaires
(AGE) statuant, dans le cas des stock-options, sur rapport du conseil
d'administration (ou du directoire) et des commissaires aux comptes.
|
Attributaires |
Bénéficiaires |
Stock-options |
- sociétés, cotées ou non, et leurs filiales,
|
Salariés, puis mandataires sociaux, lorsque ces derniers :
|
BSPCE |
- sociétés non cotées ou cotées sur le nouveau
marché ou sur les marchés de valeurs de croissance de l'Espace
économique européen,
|
Attribués " intuitu personnae ", réservés aux membres du personnel salarié et aux dirigeants soumis au régime fiscal des salariés |
L'extension du bénéfice des stock-options à tout type de
sociétés, mères ou filiales de groupes, ainsi qu'aux
mandataires sociaux occupant une fonction de direction apparaît comme
l'une des principales différences entre leur régime et celui des
bons de créateur d'entreprises.
Le tableau ci-dessous confirme en outre l'avantage fiscal dont
bénéficient ces derniers, du fait, principalement, de l'absence
de délais de conservation et d'imposition d'éventuelles plus
values d'acquisition (dans la pratique, des rabais sont très rarement
accordés).
Il montre également le durcissement
56(
*
)
dont l'imposition des stock-options
a fait l'objet depuis 1995, du fait de ce que notre collège René
Trégouët a appelé "
des initiatives malencontreuses
de la précédente majorité
".
CONDITIONS D'IMPOSITION
|
DELAIS
|
RABAIS 57( * ) |
PLUS-VALUES
|
|
Stock option |
- 5 ans de
conservation du titre entre l'attribution (au prix d'acquisition) et la cession
|
Si 5 %
|
d'acquisition 58( * )
-
en
cas de non respect des cinq ans
:
imposition comme salaire
l'année de cession (avec un système de quotient)
|
de cession 59( * ) imposition au taux de droit commun (16 %) + 10 % de prélèvements sociaux (CSG, CRDS, et 2 %) |
|
|
|
- si respect des cinq ans : depuis le 20.9.95, taux spécifique de 30 %, appliqué l'année de cession, + 10 % de prélèvements sociaux (CSG, CRDS et 2 %) ou imposition, sur option, comme salaire (sans application du système du quotient) |
|
BSPCE |
- 3 ans
d'ancienneté dans l'entreprise
|
non prévu (titres, pour la plupart, non cotés) |
non imposées |
-
si
moins de 3 ans d'ancienneté
: taux majoré de 30 % (40 %
compte tenu des prélèvements sociaux)
|
En
résumé, le régime d'imposition des bons de créateur
d'entreprise présente, avec celui relatif aux stock-options à la
fois des similitudes (plus value de cession taxée au taux de droit
commun applicable aux valeurs mobilières) et des divergences (champ
d'application beaucoup plus restrictif en contrepartie de conditions
d'imposition nettement plus favorables).
On peut y voir un modèle ou une préfiguration d'un dispositif
allégé de taxation des stock-options (dont les conditions
d'attribution deviendraient, en compensation, plus transparentes et ouvertes
à un plus grand nombre de salariés).
2. L'extension du champ d'application
L'extension de la possibilité d'émettre des BCE à des
entreprises qui n'y étaient auparavant pas autorisées, à
raison de la nature de leurs activités, constitue la mesure la plus
novatrice de cet article, dans sa version initiale, telle que
présentée par le Gouvernement.
En effet, et ceci concerne aussi l'incitation au remploi de plus values
visée au paragraphe I de cet article, les avantages fiscaux dont
bénéficient les entreprises nouvelles ainsi que les subventions
qui leur sont octroyées, sont généralement
réservés à celles qui exercent à titre exclusif une
activité industrielle, commerciale ou artisanale, à l'exception
notable des activités financières et immobilières.
Ces activités paraissent ainsi jugées plus créatrices
d'emplois et sont estimées nécessiter des investissements plus
importants.
L'aide publique est donc destinée en priorité à assurer
la pérennité d'entreprises nouvelles censées être
plus particulièrement fragilisées durant leurs premières
années d'exploitation par le volume de leurs investissements et leurs
charges de personnels.
L'article 44
sexies
du code général des
impôts dispose ainsi (dans la partie relative aux bénéfices
des professions non commerciales) que les dispositions particulières
à certaines entreprises nouvelles "
ne s'appliquent pas aux
entreprises qui exercent une activité bancaire, financière,
d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles ni aux entreprises
exerçant une activité de pêche maritime
créées à compter du 1er janvier 1997
".
Or, jusqu'à présent, les sociétés nouvelles
susceptibles d'émettre des BCE (comme celles pouvant
bénéficier de ré-emplois de plus-values de cession)
doivent, elles aussi, selon l'article 163
bis
G, exercer une
activité autre que celles exclues du bénéfice des
exonérations d'impôts sur le revenu et les sociétés
accordées par l'article 44
sexies
susvisé.
Le A du II de cet article du projet propose de supprimer cette restriction et
modifie, en ce sens, la rédaction de l'article 163
bis
G.
Il tend ainsi à autoriser les sociétés bancaires,
financières, immobilières, d'assurance ou de pêche maritime
à émettre des BCE.
Il est indéniable que dans la nouvelle économie, ces
activités (hormis le cas un peu particulier de la pêche maritime)
peuvent présenter, elles aussi, un fort potentiel de croissance et de
créations d'emplois, du fait de l'apparition de nouveaux services aux
entreprises et aux particuliers (comme le courtage électronique),
liée à l'essor des nouvelles technologies d'information et de
communication.
Les entreprises concernées doivent financer des investissements
immatériels et des dépenses d'équipement importantes pour
se moderniser et se mettre en réseau. Il serait paradoxal d'aider, d'un
côté, en amont, le développement de ces technologies
nouvelles et d'ignorer, en aval, les applications qui en sont faites et en
constituent l'un des principaux débouchés.
Au demeurant, l'exclusion de certaines activités ne se justifie
aucunement si le but essentiel de la mesure est d'encourager l'esprit
d'entreprise et la prise de risques : on ne voit pas au nom de quoi les
domaines financier et immobilier devraient faire l'objet d'une sorte
d'ostracisme.
3. La pérennisation des bons
Le dispositif incitatif de bons de souscription de parts de créateur
d'entreprise semblait présenter, à l'origine, un caractère
expérimental, puisque la loi de finances pour 1998 l'avait
instauré pour une durée allant du 1er janvier 1998 au 31
décembre 1999.
Or, l'expérience des stock-options montre qu'il faut un certain temps
pour que ce type de mécanisme se diffuse dans les entreprises
(même si les sociétés sont sans doute aujourd'hui plus
réactives que dans les années soixante-dix, notamment celles plus
particulièrement visées par les BCE).
La loi précitée du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la
recherche a donc prorogé jusqu'au 31 décembre 2001 la date
d'expiration du régime provisoire des BCE.
Dans la version initiale de cet article, le Gouvernement propose de
pérenniser ces bons et de supprimer, à cet effet, le V de
l'article 163
bis
G du code général des
impôts qui les soumet, actuellement, à l'échéance du
31 décembre 2001.
C. L'ALLÉGEMENT DE CERTAINS DROITS D'APPORT
Le régime des droits d'apport aux sociétés est l'un des
plus complexes de notre droit fiscal et a été analysé, de
façon très détaillée, dans le rapport
général de la commission des finances de l'Assemblée
nationale.
Il est également l'un des plus lourds au monde, de par l'application de
taux proportionnels (droits de mutation de droit commun ou taxation
spécifique), en ce qui concerne surtout les apports à titre
onéreux mais aussi, parfois, les apports purs et simples d'immeubles et
de fonds de commerce lorsque la société
bénéficiaire est soumise à l'impôt sur les
sociétés.
Les réductions des droits de mutation à titre onéreux
prévues à l'article 5 sont, de ce point de vue, les bienvenus.
La portée des A et B du paragraphe III de cet article est beaucoup plus
réduite.
Il s'agit d'introduire, dans le code général des impôts,
un nouvel article 810
bis
qui exonère les apports
effectués lors de la constitution de sociétés :
- d'une part, du droit fixe d'enregistrement de 1.500 francs,
prévu à l'article 810 et actuellement perçu dans la
majorité des cas ;
- d'autre part, d'un autre droit fixe, d'un montant de 1.500 francs
aussi, visé par le paragraphe I
bis
de l'article 809,
perçu à l'occasion d'apports réalisés sous
certaines conditions
60(
*
)
à une société en nom collectif, en commandite simple,
à une SARL dans laquelle la gérance est majoritaire ou à
une société civile exerçant une activité
professionnelle.
Il s'agit de l'imposition des plus-values réalisées par une
personne physique à l'occasion de l'apport à une
société soumise à un régime réel
d'imposition d'une branche complète d'activités ou d'un ensemble
d'éléments d'actif affectés à l'exercice d'une
activité professionnelle.
Le droit de mutation est remplacé par un droit fixe (dont la
suppression est demandée) si l'apporteur s'engage à conserver
pendant cinq ans les titres remis en contrepartie de l'accord.
Le régime de droit commun des apports purs et simples ou des apports
d'activité serait ainsi l'exonération, lors de la création
d'une société, et la perception d'un droit de 1.500 francs
pour les opérations réalisées durant l'existence de la
société.
Le coût de cette disposition, visant les quelques
140.000 sociétés créées chaque année en
France, serait modeste (200 millions de francs en 2000), à l'image
de son ambition.
Même si l'on peut penser que les créateurs d'entreprise n'en sont
pas à 1.500 francs près, il s'agit d'une mesure qui peut
être appréciée autant par la simplification qu'elle apporte
que par l'allégement qu'elle accorde à des personnes
méritant particulièrement d'être encouragées.
Il doit être souligné qu'elle vise -comme il a été
précisé- non seulement les créations d'activités
nouvelles, mais également les sociétés issues de la
transformation d'activités préexistantes exercées dans un
cadre individuel.
La disposition du B du paragraphe III est de pure coordination puisqu'elle
tend uniquement à modifier la rédaction de l'article 810 du
code général des impôts en conséquence des
propositions du A de ce même paragraphe.
II. L'EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : BEAUCOUP DE BRUIT POUR
PAS GRAND CHOSE
Lors des débats en séance publique, à l'Assemblée
nationale, sur la première partie de la loi de finances, le ministre de
l'économie et des finances, M. Dominique Strauss-Kahn avait
qualifié de "
relativement mineur
" cet article. Il
déclarait ainsi que l'extension du dispositif des BSPCE à toutes
les sociétés, et notamment aux entreprises de service les plus
modernes "
ne lui semblait pas poser de problème
majeur
" et pouvait même "
aller de soi
".
Plusieurs éléments ont contribué toutefois à faire
dévier le débat vers la question des stock options et à
l'élargir bien au-delà du simple examen du dispositif technique
proposé :
- Les similitudes tout d'abord, malgré la persistance de
différences importantes, entre stock options et BSPCE pouvaient laisser
croire, ce qui était peut-être le cas, que l'objectif ultime du
gouvernement était d'aligner le régime fiscal des
premières sur celui, beaucoup plus favorable, des seconds
61(
*
)
. Quant au député
Nicole Bricq, elle estimait, dans une note du 27 juillet 1999 au
rapporteur général de la commission des finances de
l'Assemblée nationale, qu'il suffisait de "
retouches fiscales
et sociales de faible importance
" pour fusionner bons de croissance
(stock options) et bons de créateurs d'entreprise.
- Diverses informations parues dans la presse, s'ajoutant à l'annonce
de nombreux licenciements chez Michelin, ont d'autre part
particulièrement indisposé certaines fractions de la gauche
plurielle à l'encontre du dispositif proposé. Le journal
" l'Expansion " a ainsi révélé le
9 septembre que les plans d'achat ou de souscription d'actions en vigueur
dans les entreprises du CAC 40 offraient à 28.000 dirigeants
une richesse virtuelle de 45 milliards (soit 1,6 million de francs
par personne mais le magazine estimait que certains dirigeants salariés
pouvaient gagner des centaines de millions, les plus values potentielles par
dirigeant dépassant, par exemple, 80 millions de francs chez
l'Oréal et avoisinant 40 millions de francs pour LVMH).
Il soulignait, à ce titre, " la logique
hypersélective " présidant à l'attribution de ces
titres dans notre pays. Par ailleurs, selon diverses rumeurs dont fait
état " l'Express " du 21 octobre, l'indemnité de
départ du PDG d'Elf, ajoutée à ses stock options, aurait
atteint des sommes qui peuvent paraître, selon l'expression de Dominique
Strauss-Kahn " dépasser l'entendement ".
Ces éléments et le tintamarre politico-médiatique qui
a accompagné leur divulgation explique la polarisation et les
débordements du débat ainsi que son caractère parfois
idéologique ou confus.
A. UN DÉBAT CONCENTRÉ SUR LES STOCK OPTIONS ET
DÉBORDANT DU CADRE DU DISPOSITIF DE CET ARTICLE
1. Une polarisation sur les stock options
a) Une discussion escamotée sur le ré-emploi des plus-values
et l'exonération de droits fixes d'enregistrement
Les dispositions de cet article, étrangères aux BSPCE, n'ont pas
été débattues en commission ni en séance publique.
Elles ont été néanmoins commentées dans le rapport
général de M. Migaud qui a fait observer, par ailleurs, à
l'auteur d'un amendement, M. Christian Cuvilliez, que celui-ci risquait
involontairement de les faire disparaître, en proposant la suppression de
l'article tout entier alors qu'il ne souhaitait, en fait, que celle des
paragraphes II et IV relatifs aux bons incriminés.
Concernant le paragraphe I (report d'imposition des plus values de cession de
valeurs mobilières réinvesties dans de nouvelles
sociétés), le rapport écrit de M. Migaud observe qu'il
eût été sans doute plus clair d'intégrer ces
dispositions dans l'article 60 de la deuxième partie de la loi de
finances qui propose une fusion des différents régimes
d'imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières et de
droits sociaux réalisés par les particuliers et un
aménagement du régime différé d'imposition des plus
values d'échange de ces mêmes titres.
S'agissant de l'exonération de droits fixes d'apports effectués
lors de la constitution de sociétés, le rapport
général de l'Assemblée nationale note la
possibilité d'effets " collatéraux " (extension du
bénéfice de la mesure à des sociétés
tierces) qu'il juge cependant inévitables sous peine de complexifier
encore davantage notre droit fiscal en la matière.
De fait, le régime des droits d'apport étant commun à
toutes les sociétés et la transformation d'activités
existantes exercées dans un cadre individuel étant visée
en même temps que les créations d'activités nouvelles, une
grande variété de montages sont possibles pouvant
bénéficier à des sociétés civiles à
objectif purement patrimonial (y compris des sociétés civiles
immobilières de gestion d'un patrimoine privé).
b) La concentration sur les stock options
Le rapport de M. Migaud, sans se focaliser entièrement sur les bons de
créateur d'entreprises, leur a consacré de substantiels
développements, insistant, notamment sur la possibilité
désormais offerte aux salariés et dirigeants de SAS
(sociétés par actions simplifiées) de s'en voir attribuer
et s'inquiétant qu'une société anonyme puisse filialiser
certaines de ses branches dans le cadre d'une SAS à actionnaire unique.
Dès l'examen en commission, le débat s'est concentré
presqu'exclusivement sur les BSPCE, le rapporteur général
proposant d'en supprimer la pérennisation et la
généralisation à l'ensemble des sociétés
nouvelles.
La discussion n'a pas tardé ensuite à
" dériver " vers le sujet des stock-options à propos
d'un amendement du président Augustin Bonrepaux tendant à porter
de 30 à 40 % le taux d'imposition des plus values de cession
dépassant 500.000 francs par an.
Cette tendance s'est confirmée en séance publique, des
tractations s'étant entre-temps, semble-t-il, déroulées
entre différentes composantes de la gauche plurielle.
Le compromis suivant a finalement été respecté :
- Retrait de l'amendement du Président Bonrepaux tendant à
surtaxer les plus values sur stock options supérieures à
500.000 francs par an (en attendant le dépôt d'un projet de
loi sur l'épargne salariale tenant compte des points de vue
exprimés par les députés de la majorité ainsi que
des conclusions d'une mission de réflexion confiée à notre
collègue député Jean-Pierre Balligand et à l'ancien
commissaire au plan Jean-Baptiste de Foucauld) ;
- Suppression, comme l'avait proposé M. Migaud, de la
généralisation des BSPCE à l'ensemble des
sociétés nouvelles et de leur pérennisation (le
fonctionnement, en l'état, du régime actuel étant de toute
façon assuré jusqu'à la fin de 2001) ;
- Vote, enfin, avec le soutien de la majeure partie de l'opposition, d'un
amendement de M. François Hollande visant à considérer
comme imposables les indemnités versées à l'occasion de la
rupture d'un contrat de travail sous certaines conditions
62(
*
)
, et à plafonner la fraction
des indemnités de licenciement exonérée
63(
*
)
, dans la limite de la moitié
de la première tranche du barème de l'impôt de
solidarité sur la fortune (voir commentaire de l'article 2
bis
).
2. Un élargissement à de plus vastes sujets
Par rapport à l'objet de l'article en discussion, le débat sur
les stock-options représentait déjà une sorte de
digression, malgré les similitudes, déjà
soulignées, existant entre ces titres et les BSPCE.
Mais, même si le débat en séance publique est
resté, dans l'ensemble, relativement sobre et concentré sur les
questions d'aides aux créations d'entreprises et de critères
d'attribution de stock options, les problèmes en cause étaient,
en réalité, plus importants encore, comme en témoignent
les propos de certains intervenants, les tractations préalables et leurs
commentaires dans la presse ou, enfin, le renvoi de diverses dispositions
à un texte ultérieur sur l'ensemble de l'épargne salariale.
"
Avec cette question des stock options -a déclaré M.
Christian Cuvilliez- nous n'abordons pas un débat à
caractère budgétaire et fiscal mais un problème de
civilisation, qui concerne le type de société que nous voulons au
siècle prochain
". Et d'évoquer "
le
développement surréaliste des nouveaux conquérants de la
fortune
" et les dividendes que se réservent "
une
poignée de dirigeants décideurs autocrates s'arrogeant des
privilèges exorbitants
" !
Pour M. Georges Sarre, "
se voir attribuer le droit de recevoir un
actif dont la valeur a parfois quadruplé par rapport à un prix
fixé à l'avance, ce n'est rien d'autre qu'un
sursalaire
" et le système du stock options est abusif, opaque
et injuste.
De fait, la " mise à plat " du système soulève
de vastes problèmes sociaux, économiques, juridiques :
- comment concilier, notamment :
. une plus grande
transparence
avec l'offre aux dirigeants de nos
entreprises
64(
*
)
d'avantages
équivalents à ceux auxquels ont droit leurs homologues
étrangers (dans un contexte où le recrutement de cadres
compétents devient soumis lui aussi à la concurrence fiscale
internationale) ?
. une plus grande
ouverture
avec la récompense des mérites
individuels des salariés qui contribuent le plus à la
valorisation de leur société ?
- comment imposer des gains qui diffèrent à la fois d'un salaire
(aspect aléatoire, achat des titres) et sont procurés par des
placements distincts de formes d'épargne plus longues (fonds de pension,
etc...), étant motivés par la recherche d'une plus value à
relativement court terme ?
- cela doit-il relever de la législation sur l'épargne
salariale ou du droit des sociétés ?
Les stock options sont en fait intrinsèquement liées à la
nouvelle économie, à laquelle prétendait adhérer
Dominique Strauss-Kahn, dans laquelle l'opposition capital-travail est
dépassée, tous les salariés devenant actionnaires et les
ressources humaines, de plus en plus essentielles, se voyant
rémunérées de façon croissante sous forme de
dividendes.
C'est aussi une nouvelle conception des entreprises qui se
révèle, plus patrimoniale et moins liée à la notion
d'intérêt social (voir infra).
B. UNE DISCUSSION PARFOIS OBSCURCIE PAR DES CONSIDÉRATIONS
IDÉOLOGIQUES OU CERTAINES CONFUSIONS
1. Des considérations idéologiques
" Il
importe
surtout -écrivait Nicole
Bricq
dans sa note précitée du 27 juillet 1999- de ne pas faire de
la question des prélèvements sociaux sur les plus values des bons
de croissance (stock options) un problème idéologique
".
Notre collègue estimait que la référence, en la
matière, à la durée de détention des actions
acquises constituait un bon critère et considérait, à
juste titre, de telles plus values comme un revenu complémentaire
plutôt que comme un complément de salaire (avec les
conséquences fiscales que cela implique).
De son côté, M. Claude Allègre avait
déclaré le 13 mai 1998 aux assises de l'innovation
"
Gagner de l'argent, ce n'est pas honteux, c'est servir son
pays
".
Enfin, un peu plus tard, à l'occasion du 15eme anniversaire de l'AFIC
(Association française des investisseurs en capitaux), M. Dominique
Strauss-Kahn jugeait " très peu compétitif " (mais
aussi " opaque " et " inégalitaire ") le
système français actuel des stock-options et estimait, bien qu'il
s'agisse d'un sujet passionnel, qu'il méritait d'être
réformé.
Un volet fiscal avait été initialement introduit, à cet
effet, dans une première version du projet de loi sur l'innovation et la
recherche. Ces bonnes intentions se sont malheureusement toujours
heurtées aux réticences de nature idéologique d'une partie
de la majorité gouvernementale.
Certaines déclarations faites à l'Assemblée nationale lors
de la discussion de cet article en séance publique en témoignent.
Le problème majeur de notre pays est d'ordre culturel : ce qui
choque, en France, est monnaie courante aux Etats-Unis. L'article de
" l'Expansion ", si souvent cité, révélait aussi
que les 10 patrons américains les mieux payés ont
reçu 2,3 milliards de dollars (13,8 milliards de francs) en
cinq ans et détiennent pour 38 milliards de francs d'actions de
leurs entreprises, le PDG de Disney, Michael Eisner ayant
" empoché ", 3,8 milliards de francs entre 1994 et 1998.
Quant à " l'Express ", il estimait que Philippe Jaffré
" surpayé en France... paraît presque à la
traîne de ses collègues étrangers " (la
rémunération du patron de Mobil a augmenté de 23 % en
1998, année durant laquelle il a encaissé 16 millions de
francs plus une prime de gestion de 18 millions de francs. Son
portefeuille de stock options approche les 200 millions de francs et il a
droit, en cas de licenciement, à une indemnité de
60 millions de francs).
Les chiffres qui provoquent l'indignation des Français, lorsque sont en
cause les rémunérations d'un dirigeant de grande entreprise, ne
suscitent pas du tout les mêmes réactions s'agissant du transfert
ou des revenus d'un joueur de football ou des gains du loto (plus de
20 milliards de francs de lots ont été distribués en
1998, le record des gains, non imposés, ayant atteint 150 millions
de francs en mars 1997).
Tout ce qui touche à la rémunération des chefs
d'entreprise apparaît en France comme hautement symbolique. On se heurte
au même tabou en matière d'ISF dont tout allégement
circonstancié apparaît impossible (seule une aggravation peut
être envisagée).
Ces obstacles idéologiques ont conduit à repousser encore
à plus tard des réformes qui s'imposent et apparaissent urgentes.
La priorité ne semble donc pas tant de réconcilier en France le
capital et le travail mais bien plutôt les différentes
sensibilités de la majorité plurielle !