Rapport n° 367 (1998-1999) de M. Xavier PINTAT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 19 mai 1999

N° 367

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 mai 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1), sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Colombie ,

Par M. Xavier PINTAT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.

Voir le numéro :

Sénat : 277 (1998-1999).

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale signée à Paris le 21 mars 1997 entre la France et la Colombie.

Cette convention, dont le dispositif est inspiré de celui de la convention européenne d'entraide judiciaire du 20 avril 1959, est similaire aux textes de même nature conclus entre la France et de nombreux pays, notamment en Amérique latine.

En posant le principe d'une coopération entre les deux pays en matière judiciaire et en définissant l'étendue et les limites de cette coopération, elle doit permettre de faciliter le traitement de demandes d'entraide qui sont actuellement appréciées au cas par cas par les autorités judiciaires de chaque pays, sans obligation de donner suite ou de motiver d'éventuels refus.

Ce type d'instrument paraît très utile à l'heure où la criminalité prend un caractère de plus en plus transnational. S'agissant de la France et de la Colombie, il devrait associer le traitement des affaires impliquant les deux pays, notamment en matière de trafic de stupéfiants.

Votre rapporteur effectuera une rapide présentation de la Colombie et de ses relations avec la France avant d'analyser le dispositif de cette convention d'entraide judiciaire en matière pénale.

I. LA SITUATION POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA COLOMBIE

Avec 37 millions d'habitants, dont près de 7 millions dans la capitale Bogota, la Colombie compte une population légèrement supérieure à celle de l'Argentine, ce qui en fait, après le Brésil, l'un des plus importants pays d'Amérique du Sud.

A. LA SITUATION POLITIQUE EN COLOMBIE

1. Le régime politique de la Colombie

La Colombie est indépendante depuis 1830 et a vu son territoire réduit en 1903 du fait de la sécession du Panama.

La vie politique s'organise dans le cadre d'un régime présidentiel défini par la Constitution de 1991 qui a modifié celle de 1886. Elle est marquée par la rivalité entre libéraux et conservateurs qui alternent au pouvoir.

L'émergence de nouvelles formations politiques, notamment l'Alliance démocratique M19, issue d'un ancien mouvement de guérilla et regroupant des forces de gauche, n'a pas entamé cette bipolarisation de fait.

La domination du parti libéral au cours des deux dernières décennies a pris fin avec l'élection en juin 1998 à la Présidence de la République du candidat conservateur, Andrès Pastrana qui a succédé au Président libéral Ernesto Samper. Le parti libéral avait en revanche remporté en mars de la même année les élections législatives et maintient donc sa domination sur le Congrès.

2. La difficile recherche de la paix civile

La vie politique colombienne est dominée par les enjeux liés à la situation intérieure : le rétablissement de la paix civile dans l'espoir de mettre fin à une guérilla de près de quarante ans, la lutte contre les cartels de la drogue.

En effet, la société colombienne et marquée par une forte tradition de violence . Un tiers du territoire national échapperait au contrôle du gouvernement, un million de personnes auraient été déplacées alors que les assassinats politiques se multiplient tout comme les actions meurtrières des guérilleros, des forces paramilitaires et des trafiquants de drogue.

La guérilla , qui contrôlerait 600 des 1 050 municipalités colombiennes, est le fait de deux mouvements principaux :

- les forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC) d'obédience marxiste, qui comptent 12 000 hommes

- et l' armée de libération nationale (ELN), d'inspiration guévariste, qui compterait 6 000 hommes.

La guerre civile implique également des milices paramilitaires dont le démantèlement est régulièrement posé, par les guérilleros, comme une condition préalable à un arrêt des affrontements.

Le Président Pastrana a fait de la recherche de la paix civile la priorité de son mandat. Dès son élection, des contacts ont été établis avec les FARC et en janvier dernier, le dialogue de paix était officiellement lancé. Le Président Pastrana et le chef des FARC se sont rencontrés le 2 mai dernier pour élaborer l'ordre du jour des négociations qui devraient commencer dans les prochaines semaines. Ces négociations porteront sur des thèmes économiques et sociaux, sur la situation des prisonniers détenus de part et d'autre et sur l'attitude de l'Etat face aux groupes paramilitaires.

Le dialogue avec l'ELN s'avère plus difficile mais il s'est noué lors de contacts en Allemagne l'an passé.

La lutte contre le trafic de drogue constitue également l'un des principaux enjeux de rétablissement de l'ordre public. Si certains succès ont pu être mis au crédit des autorités gouvernementales (arrestation des principaux responsables du cartel de Medellin en 1991 et du cartel de Cali en 1995), le trafic de drogue continue d'exercer une influence considérable sur la société colombienne tout entière. Ainsi le Président Samper a-t-il été considérablement affaibli sur la fin de son mandat, par les accusations portées contre lui et relatives au financement de sa campagne présidentielle par l'argent de la drogue.

Lors de son audition le 5 mai dernier par votre commission des affaires étrangères, M. Alain Labrousse, directeur de l'observatoire géopolitique des drogues, a détaillé l'implication des Forces armées révolutionnaires colombiennes et des milices paramilitaires qui les combattent dans la production et le commerce de stupéfiants, le trafic de drogue constituant la source principale de financement de ces groupes armés.

3. Les relations extérieures de la Colombie

Face aux incertitudes du processus de paix, la situation intérieure de la Colombie suscite une certaine inquiétude de ses voisins immédiats, le Venezuela, l'Equateur et le Pérou, qui souhaitent rester à l'abri d'incursions sur leur territoire de guérilleros ou de trafiquants de drogue. Sans évoquer un risque de déstabilisation régionale, ces pays renforcent néanmoins leur vigilance aux frontières.

Les Etats-Unis se montrent également extrêmement préoccupés par l'évolution de la situation en Colombie en raison en particulier des implications des trafics de stupéfiants. Jugeant les mesures de lutte contre la drogue insuffisantes, les autorités américaines avaient " décertifié " la Colombie sous la présidence Samper. L'élection de M. Pastrana s'est traduite par une amélioration des relations qui sont en voie de normalisation, la Colombie ayant bénéficié d'une " recertification " dans l'intérêt national des Etats-Unis.

La Colombie participe avec la Bolivie, l'Equateur, le Venezuela et le Pérou à la Communauté andine qui a succédé en 1996 au Pacte andin et qui se fixe comme objectif la réalisation d'une union douanière et le rapprochement avec le Mercosur.

B. LA SITUATION ÉCONOMIQUE DE LA COLOMBIE

La Colombie dispose d'importantes ressources naturelles, et en premier lieu de charbon et de pétrole. Elle est également un grand producteur de café.

Malgré ses difficultés intérieures et la guerre civile, la Colombie a bénéficié d'une longue période de croissance continue , supérieure à 5 % l'an de 1993 à 1995, et d'indicateurs macroéconomiques considérés comme satisfaisants.

Après un ralentissement dès 1996, l'économie colombienne est entrée en récession, avec une croissance pratiquement nulle en 1998 et négative sur les premiers mois de 1999. La chute de l'activité a entraîné une rapide dégradation de la situation de l'emploi, le taux de chômage, encore inférieur à 10 % de la population active en 1995, s'établissant actuellement à 15 %.

Les finances publiques, relativement équilibrées au début de la décennie, accusent un déficit qui s'accentue (4,3 % du PIB en 1997 et 5 % du PIB en 1998).

Le solde négatif de la balance commerciale s'est aggravé du fait de la chute des cours des grandes productions d'exportations (pétrole, café) et de la moindre compétitivité des produits colombiens en raison des dévaluations monétaires intervenues dans plusieurs pays de la zone.

II. LES RELATIONS FRANCO-COLOMBIENNES

A. LES RELATIONS POLITIQUES ET CULTURELLES

1. Les relations politiques

Comme un grand nombre de pays d'Amérique latine, la Colombie est favorable à une plus grande l'ouverture politique et économique vers l'Europe. Dans cette perspective, la France apparaît comme un partenaire de confiance, comme en témoigne la qualité des relations bilatérales.

Depuis trois ans, le dialogue politique avec la Colombie s'est renforcé . Alors que le Président Samper s'était rendu à deux reprises à Paris, le Président Pastrana, avec lequel s'étaient établis des contacts avant son élection, a rencontré le Chef de l'Etat le 16 juillet 1998. A cette occasion, la France a donné son accord de principe pour une participation, le moment venu, à un " groupe des amis de la Colombie ".

Plus récemment, en février 1999, le ministre délégué à la coopération et à la francophonie s'est rendu en Colombie.

Enfin, il faut signaler que le gouvernement français suit avec une particulière attention la situation d'une de nos compatriotes, Mlle Oganesoff, enlevée à Bogota le 1 er août 1998 et retenue en otage par un groupe relevant des Forces armées révolutionnaires colombiennes, alors qu'un autre Français, M. Steinmetz, technicien sur un site pétrolier, est décédé le 4 mars dernier après avoir été détenu par un front de l'armée de libération nationale.

2. Les relations culturelles

La France a développé une coopération culturelle, scientifique et technique variée et de bon niveau avec la Colombie . Elle mobilise des crédits de l'ordre de 48 millions de francs par an qui font de la France l'un des premiers fournisseurs d'aide à la Colombie.

Une large part de cette enveloppe est consacrée au fonctionnement des trois établissements français relevant du réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ainsi qu'à l'appui au réseau des Alliances françaises, qui compte 11 implantations. L'Alliance française de Bogota gère notamment le Centre de ressources sur la France contemporaine " André Maurois " inauguré en 1998.

La coopération porte également sur la promotion des formations supérieures et l'audiovisuel (diffusion de TV5). Les organismes français de recherche comme l'ORSTOM, le CIRAD et l'INRA sont également très présents en Colombie.

La France participe à un programme de mise en place d'une économie de substitution à la drogue, en particulier par l'encouragement des cultures alternatives. Dans ce cadre, le système français SPOT-Image a été retenu pour la télédétection satellitaire.

B. LES RELATIONS ÉCONOMIQUES

Les échanges économiques avec la Colombie se sont renforcés au cours de dernières années, les entreprises françaises ayant remporté d'importants contrats dans les domaines de la défense, de la sécurité et des infrastructures.

Les exportations françaises en Colombie qui étaient passées de 1,4 milliard de francs en 1996 à 2,7 milliards de francs en 1997 sont revenues à 2,5 milliards de francs en 1998. C'est une part de marché modeste, entre 2,5 % et 3 %, qui fait de la France le 7 e fournisseur de la Colombie et son 2 e fournisseur européen derrière l'Allemagne. La Colombie constitue notre cinquième marché en Amérique latine après le Brésil, l'Argentine, le Mexique et le Chili.

Les entreprises françaises ont récemment renforcé leur présence en Colombie, notamment dans le secteur pétrolier (Total), mais la France n'est que le 7 e investisseur étranger . Les deux pays ne sont pour l'instant pas liés par un accord d'encouragement et de protection des investissements.

III. LA CONVENTION D'ENTRAIDE JUDICIAIRE EN MATIÈRE PÉNALE

La convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre la France et la Colombie, signée à Paris le 21 mars 1997, reprend pour l'essentiel les dispositions des accords de même nature déjà signés par la France et s'inspire largement de la convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959.

A. LE CADRE GÉNÉRAL DE LA COOPÉRATION JUDICIAIRE FRANCO-COLOMBIENNE

En l'absence de convention bilatérale, la coopération judiciaire est uniquement régie par le principe de réciprocité et l'analyse, au cas par cas, des possibilités de donner suite à la demande. Les conventions d'entraide ont pour objet de créer une obligation de coopération, laissant toutefois aux Etats une possibilité de refus dans certaines hypothèses.

La France a signé de telles conventions avec de nombreux pays du continent américain. Sont actuellement en vigueur les conventions d'entraide judiciaire en matière pénale avec le Canada et le Mexique alors qu'ont été signées des conventions, non encore en vigueur, avec le Brésil, l'Uruguay, le Paraguay, Cuba, l'Argentine, les Etats-Unis et la République dominicaine.

Il faut ajouter que la France est liée à la Colombie par un accord d'extradition en date du 8 avril 1850. Les autorités colombiennes avaient exprimé le souhait d'élaborer un nouvel accord mais les négociations, entamées en 1985, ont été suspendues en 1988 suite à une décision de la Cour Suprême et du Conseil d'Etat colombiens. Ces négociations pourraient toutefois reprendre dans un proche avenir.

La convention du 21 mars 1997 pour sa part reprend un certain nombre de règles traditionnelles des conventions d'entraide judiciaire en matière pénale

1. Un champ d'application traditionnel

Aux termes de l'article premier, les deux Etats " s'engagent à s'accorder mutuellement (...) l'aide judiciaire la plus large possible dans toute procédure visant des infractions pénales dont la répression est, au moment où l'entraide est demandée, de la compétence de autorités judiciaires de la partie requérante ".

Toutefois, demeure hors du champ d'application de la présente convention toute demande d'entraide concernant :

- l'exécution des décisions d'arrestation et des condamnations,

- les infractions militaires qui ne constituent pas des infractions de droit commun.

2. Les motifs de refus d'entraide

L'article 4 réserve aux Etats parties la possibilité de refuser l'entraide judiciaire dans trois hypothèses :

- si la demande se rapporte à des infractions considérées par la partie requise, soit comme des infractions politiques, soit comme des infractions connexes à des infractions politiques ;

- si la partie requise estime que l'exécution de la demande est de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public ou à d'autres intérêts essentiels de son pays ;

- si la demande a pour objet une perquisition ou une mesure conservatoire et que les faits à l'origine de la requête ne constituent pas une infraction pour la loi de l'Etat requis.

Cette dernière hypothèse de refus va au-delà des dispositions prévues dans la convention européenne d'entraide judiciaire, qui n'envisage que les deux premiers motifs.

Par ailleurs, à ces trois motifs facultatifs s'ajoute un motif obligatoire de refus (article 4-2), l'entraide étant refusée si la demande a pour objet une mesure de confiscation et que les faits à l'origine de la requête ne constituent pas une infraction au regard de la législation de la partie requise.

3. Les procédures d'entraide

Les procédures d'entraide sont définies aux articles 15 à 20 de la convention.

Les demandes d'entraide sont adressées de ministère de la justice à ministère de la justice (article 16).

L'article 15 précise les mentions devant figurer dans la demande, essentiellement son objet et son motif, un exposé des faits et leur qualification et, le cas échéant, les questions susceptibles d'être posées dans le cas d'une audition ou d'un interrogatoire ainsi qu'une description des biens à rechercher, saisir ou confisquer.

Les questions de traduction sont réglées à l'article 17 : les demandes et les pièces les accompagnant sont rédigées dans la langue de l'Etat requérant et accompagnées d'une traduction dans la langue de l'Etat requis.

L'article 18 stipule que les pièces et documents transmis en application de la convention d'entraide judiciaire sont dispensés de toute formalité de légalisation.

En vertu de l'article 19, l'Etat requis doit motiver et notifier à l'Etat requérant tout refus d'entraide judiciaire .

L'article 20 précise que l'exécution des demandes d'entraide ne donne lieu à aucun remboursement de frais, à l'exception de ceux occasionnés par l'intervention d'experts et par le transfèrement de personnes détenues.

B. LES FORMES DE L'ENTRAIDE JUDICIAIRE

L'entraide judiciaire en matière pénale portera principalement sur la recherche de preuves, l'audition de témoins ou d'experts, le transfèrement de personnes détenues et la communication d'extraits de casier judiciaire.

1. La recherche de preuves

La convention précise, dans son article 5, que la partie requise exécutera les demandes d'entraide relatives à une affaire pénale qui lui sont adressées par les autorités judiciaires de la partie requérante et qui ont pour objet d'accomplir des actes d'instruction ou de communiquer des pièces à conviction, des dossiers ou des documents.

Si la partie requérante désire que les témoins ou experts déposent sous serment, elle en fera expressément la demande et la partie requise y donnera suite si sa législation ne s'y oppose pas.

La partie requise n'est pas tenue de communiquer des originaux, sauf si la partie requérante le demande expressément et dans la mesure où cela se révèle possible.

Par ailleurs, si la partie requérante le demande expressément, la partie requise l'informe de la date et du lieu d'exécution de la demande d'entraide à laquelle pourront assister ses autorités et les personnes mandatées par elle si la partie requise y consent (article 6).

Enfin, l'Etat requis pourra surseoir à la remise des pièces à conviction, dossiers ou documents s'ils lui sont nécessaires pour une procédure pénale en cours. Les pièces à conviction ainsi que les originaux des dossiers et documents qui auront été communiqués seront conservés par la partie requérante sauf si la partie requise en a demandé le retour (article 7).

La partie requérante, par demande expresse, peut exiger que la partie requise maintienne la demande d'entraide judiciaire confidentielle, de même que la partie requise peut demander la même confidentialité pour les informations ou les pièces à conviction qu'elle aura communiquées (article 8). La convention précise que la partie requérante ne pourra divulguer ou utiliser une information ou une pièce à conviction communiquée à des fins autres que celles stipulées dans la demande, à moins d'un accord préalable de la partie requise.

2. La comparution de témoins ou d'experts et le transfèrement de personnes détenues

L'article 9 précise que les citations à comparaître devront être envoyées à la partie requise au moins quarante jours avant la date fixée pour la comparution, la partie requise pouvant renoncer à ce délai en cas d'urgence.

Le défaut de comparution d'un témoin ou d'un expert n'entraînera, en tout état de cause, aucune sanction ou mesure de contrainte.

L'article 9 précise également le mode de calcul des indemnités à verser ainsi que des frais de voyage et de séjour à rembourser au témoin ou à l'expert.

Si la comparution personnelle d'un témoin ou d'un expert est particulièrement nécessaire, la partie requérante doit en faire mention dans la demande de remise de citation, avec indication du montant des indemnités. Une avance, dans ce cas, pourra lui être consentie par la partie requise, puis remboursée par la partie requérante.

Lorsque les demandes de citation à comparaître en tant que témoin présentées par l'Etat requérant, concernent une personne détenue, le transfèrement de cette dernière peut être refusé dans quatre hypothèses (article 11) :

- tout d'abord, si la personne détenue n'y consent pas, et ce afin d'éviter le transfèrement d'une personne manifestement peu disposée à coopérer avec l'autorité judiciaire requérante ;

- si la présence de la personne est nécessaire dans une procédure pénale en cours sur le territoire de l'Etat requis, ce dernier pouvant ainsi privilégier le souci de mener à leur terme les instances en cours ;

- si le transfèrement de la personne est susceptible de prolonger sa détention ;

- enfin si d'autres considérations impérieuses s'opposent à ce transfèrement, ce motif de refus couvrant des situations telles que celles présentant un risque d'évasion ou un problème de sécurité.

Il faut souligner que ces différents motifs demeurent facultatifs et qu'ils peuvent donc ne pas être invoqués par l'autorité requise.

L'article 11 définit également les conditions de ce transfèrement et précise notamment que la personne transférée devra rester en détention sur le territoire de l'Etat requérant, à moins que l'Etat requis ne demande sa mise en liberté.

Aux termes de l'article 12, le témoin ou l'expert bénéficie, selon l'usage, lorsqu'il comparaît devant l'autorité judiciaire requérante, d'une immunité de poursuites et d'arrestation pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ du territoire de l'Etat requis. Cette immunité est étendue aux personnes poursuivies à l'exclusion, bien entendu, des faits pour lesquels elles ont été citées à comparaître.

3. Les autres dispositions

L'article 13 prévoit que la partie requérante pourra demander de rechercher, de saisir ou de confisquer les produits d'une infraction à sa législation susceptibles de se trouver sur le territoire de la partie requise. Cette dernière prend toutes dispositions nécessaires pour empêcher que ces produits fassent l'objet d'une transaction ou ne soient transférés ou cédés avant que les autorités de la partie requérante n'aient pris une décision définitive à leur égard.

L'article 14 précise que la partie requérante pourra obtenir des extraits de casier judiciaire en s'adressant à l'autre partie, si la législation de cette dernière le lui permet.

Par ailleurs, une partie peut demander à l'autre de diligenter sur son territoire des poursuites pénales pour des faits susceptibles de constituer des infractions pénales relevant de la compétence de cette dernière (article 21).

Enfin, l'article 22 prévoit une communication annuelle, par chacune des parties, des avis de condamnation prononcés à l'encontre des ressortissants de l'autre partie.

CONCLUSION

Alors que l'établissement de relations plus étroites avec la Colombie s'inscrit dans la logique du renforcement de la présence française en Amérique latine, la convention d'entraide judiciaire en matière pénale contribuera, dans ce domaine bien spécifique de la coopération judiciaire, à améliorer ces relations en facilitant le déroulement d'enquêtes ou de procédures d'instruction impliquant les deux pays.

C'est pourquoi votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous demande d'approuver le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent rapport au cours de sa réunion du mercredi 19 mai 1999.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, a évoqué les richesses naturelles de la Colombie, particulièrement les ressources en pétrole et en charbon. Il a souligné que les guérillas et les forces paramilitaires contrôleraient une bonne partie du territoire du pays. Il a rappelé que l'une de nos compatriotes était retenue en otage depuis le ler août dernier par les forces armées révolutionnaires colombiennes.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a précisé que les guérillas contrôlaient plus de 600 des 1 000 municipalités du pays.

La commission a alors approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

PROJET DE LOI

(Texte présenté par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la république de Colombie, signée à Paris le 21 mars 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi 1 ( * ) .

ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT2 ( * )

Etat de droit et situation de fait existants et leurs insuffisances

Avant le 21 mars 1997, la France n'était liée avec la Colombie par aucun texte en matière d'entraide judiciaire. Le présent texte vient combler ce vide et ouvrir la coopération judiciaire franco-colombienne.

Cette convention d'entraide judiciaire en matière pénale reprend, pour l'ensemble, les dispositions que l'on rencontre dans les autres accords relatifs à l'entraide pénale signés par la France, notamment avec le Mexique, l'Uruguay et le Paraguay et s'inspire, pour l'essentiel, de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959.

Bénéfices escomptés en matière

. d'emploi : sans objet

. d'intérêt général : la convention, en facilitant les procédures d'instruction, participe à une meilleure administration de la justice

. financière : sans objet

. de simplification des formalités administratives : la procédure d'entraide judiciaire en matière pénale reçoit un cadre juridique qui lui permet de s'affranchir des aléas liés aux demandes jusqu'ici fondées sur le principe de réciprocité

. de complexité de l'ordonnancement juridique : voir paragraphe précédent.

* 1 Voir le texte annexé au document Sénat n° 277 (1998-1999)

* 2 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

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