Projet de loi portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale
GARREC (René)
RAPPORT 225 (98-99) - commission des lois
Table des matières
- LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
- EXPOSÉ GÉNÉRAL
- EXAMEN DES ARTICLES
-
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS MODIFIANT
LE CODE DE JUSTICE MILITAIRE -
TITRE II
DISPOSITIONS MODIFIANT
LE CODE DE PROCÉDURE PÉNALE -
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES -
ANNEXE
NOMBRE ET NATURE DES AVIS ÉMIS PAR LE MINISTRE DE LA DÉFENSE POUR L'ANNÉE 1997 - ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF
- CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
- CODE DE JUSTICE MILITAIRE
N°
225
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 17 février 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale ,
Par M.
René GARREC,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM.
Jacques
Larché,
président
; René-Georges Laurin, Mme Dinah
Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour,
vice-présidents
; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck,
Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest,
secrétaires
;
Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José
Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel,
Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière,
Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye,
Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec,
Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier,
Lucien Lanier, Simon Loueckhote, François Marc, Mme Lucette
Michaux-Chevry, MM. Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Simon Sutour, Alex
Türk, Maurice Ulrich.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.)
:
677
,
959
, et T.A.
156
.
Sénat
:
490
(1997-1998).
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Réunie le mercredi 17 février 1999 sous la
présidence de M. Charles Jolibois, vice-président, la
commission des Lois a examiné le projet de loi n° 490,
adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme du code
de justice militaire et du code de procédure pénale.
M. René Garrec, rapporteur, a indiqué que le projet de loi
permettrait d'étendre aux justiciables militaires nombre de droits dont
bénéficiaient les autres justiciables et qu'il conduirait
à une simplification du droit applicable pour les infractions commises
hors du territoire de la République par des militaires. Il a
regretté que le droit applicable en temps de guerre n'ait pas fait
l'objet d'une codification à droit constant et a estimé qu'il
serait judicieux, dans l'avenir, de rassembler au sein du code de
procédure pénale l'ensemble des dispositions applicables en temps
de paix.
La commission a adopté une quarantaine d'amendements tendant notamment
à :
- exclure du code de justice militaire toute mention du tribunal aux
armées des forces françaises stationnées en Allemagne,
cette juridiction étant appelée à disparaître
prochainement ;
- prévoir des dispositions particulières pour la composition du
tribunal aux armées de Paris lorsqu'il statue en matière
criminelle ;
- prévoir explicitement un avis du ministre de la défense ou de
l'autorité militaire habilitée lorsque la partie
lésée met en mouvement l'action publique.
La commission a adopté à l'unanimité le projet de loi
ainsi modifié.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
L'avènement d'une justice militaire en France est traditionnellement
attribué à Philippe VI, qui, par le mandement de Montdidier
du 1
er
mai 1347, a soustrait aux juridictions ordinaires
" les sergents et soldats employés à la garde des
châteaux "
.
Depuis lors, la France a connu une multitude de juridictions militaires, parmi
lesquelles le tribunal de la connétablie, les prévôts, les
conseils de guerre, les cours martiales et même les juges du point
d'honneur, dont la fonction consistait à empêcher les
gentilshommes de donner suite à leurs offenses et querelles.
Le premier code de justice militaire fut élaboré en 1857 et
donnait compétence au conseil de guerre pour connaître de
l'ensemble des infractions commises par des militaires. En 1928, un nouveau
code fut élaboré pour l'armée de terre, remplaçant
les conseils de guerre par des tribunaux militaires. Cette réforme fut
étendue par la suite aux personnels de l'armée de l'air et de la
marine. Un nouveau code de justice militaire fut élaboré en 1965,
qui donna naissance aux tribunaux permanents des forces armées.
Enfin, en 1982, une nouvelle réforme mit fin à l'existence des
juridictions militaires, au moins pour ce qui concerne les infractions commises
en temps de paix sur le territoire de la République.
*
* *
Le
Sénat est aujourd'hui invité à examiner un
projet de
loi modifiant le code de justice militaire et le code de procédure
pénale, dont l'objectif premier est de rendre applicables à la
justice militaire les modifications apportées à la
procédure pénale par la loi n° 93-2 du
4 janvier 1993 portant réforme de la procédure
pénale
, laquelle a notamment modifié en profondeur les
règles de la garde à vue.
Avant de présenter l'économie du projet de loi, votre rapporteur
s'attachera à présenter les règles actuellement
applicables aux infractions commises par des militaires.
I. LE DROIT ACTUEL : DES RÈGLES COMPLEXES, DES DROITS INÉGAUX
Trois situations différentes doivent aujourd'hui être distinguées en ce qui concerne le droit applicable aux infractions commises par des militaires. Si le droit applicable en temps de paix est très proche du droit commun pour les infractions commises sur le territoire de la République, des spécificités plus importantes demeurent en ce qui concerne les infractions commises hors du territoire, cependant que le droit applicable en temps de guerre reste très dérogatoire.
A. EN TEMPS DE PAIX SUR LE TERRITOIRE DE LA RÉPUBLIQUE
Jusqu'en
1982, les infractions militaires et les infractions commises par des militaires
dans le service ou dans un établissement militaire étaient
soumises à des
tribunaux permanents des forces armées
(TPFA). Les autres infractions relevaient de la compétence des
juridictions ordinaires. Devant les TPFA, le droit de mettre en mouvement
l'action publique appartenait au seul ministre de la défense et aux
autorités militaires désignées par décret. Les
jugements rendus par ces tribunaux n'étaient pas susceptibles d'appel et
ne pouvaient être attaqués que par la voie du pourvoi en cassation.
La loi n° 82-621 du 21 juillet 1982 relative à
l'instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de
sûreté de l'Etat et modifiant les codes de procédure
pénale et de justice militaire a profondément modifié
cette situation en supprimant les tribunaux permanents des forces
armées.
Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, des juridictions de droit
commun spécialisées en matière militaire (une cour
d'assises et un tribunal correctionnel dans le ressort de chaque cour d'appel)
connaissent des infractions militaires et des infractions de droit commun
commises par des militaires dans l'exécution du service.
La
commission de l'infraction à l'intérieur d'un
établissement militaire n'est plus un critère de
compétence de ces juridictions spécialisées. Par ailleurs,
les infractions de droit commun commises en dehors de l'exécution du
service relèvent naturellement des juridictions de droit
commun.
1. Compétence
Les
juridictions de droit commun spécialisées sont compétentes
à l'égard des militaires, tels qu'ils sont définis aux
articles 61 à 63 du code de justice militaire. Cela concerne les
militaires de carrière, les militaires engagés par contrat, les
militaires qui accomplissent leur service militaire, mais aussi les
équipages de prise, les prisonniers de guerre, les personnes
placées à titre militaire, dès avant leur incorporation,
dans un hôpital, un établissement pénitentiaire, sous la
garde de la force publique, enfin ceux qui sont portés à quelque
titre que ce soit sur les rôles d'équipage de la marine nationale
ou le manifeste d'un aéronef militaire.
En ce qui concerne les militaires de la gendarmerie, ils ne sont justiciables
des juridictions spécialisées que pour les infractions commises
dans le service du maintien de l'ordre. Enfin, les juridictions
spécialisées sont compétentes à l'égard de
toutes les personnes majeures, auteurs ou complices, ayant pris part à
l'infraction.
2. Procédure
Par
ailleurs, la procédure applicable devant ces juridictions a
été profondément rapprochée des règles du
droit commun. Ainsi, le procureur de la République est compétent
pour mettre en mouvement l'action publique. Aucun militaire ne participe au
jugement des affaires portées devant les juridictions
spécialisées. Les jugements rendus par les tribunaux
correctionnels spécialisés sont susceptibles d'appel.
La loi de 1982 a en outre ouvert aux victimes le droit d'exercer l'action
civile tendant à la réparation du dommage causé par
l'infraction. Toutefois,
la loi a maintenu l'interdiction faite aux victimes
de mettre en mouvement l'action publique
. M. Robert Badinter,
alors garde des Sceaux, avait ainsi justifié le maintien de cette
particularité :
" si l'on reconnaissait à tous ceux
qui s'affirment victimes, non seulement le droit de provoquer l'ouverture d'une
information, mais -ce qui est beaucoup plus saisissant encore- celui de citer
en correctionnelle, à leur gré, tout officier ou tout soldat, on
ouvrirait aux fausses victimes, aucunement préoccupées de la
sanction de la dénonciation calomnieuse qui n'interviendrait que des
mois ou des années plus tard, la possibilité d'entreprises de
déstabilisation de l'armée républicaine "
1(
*
)
.
La loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992, relative
à l'entrée en vigueur du nouveau code pénal et à la
modification de certaines dispositions de droit pénal et de
procédure pénale rendue nécessaire par cette entrée
en vigueur est venue tempérer l'interdiction faite à la partie
lésée de mettre en mouvement l'action publique.
L'article 698-2 du code de procédure pénale permet
désormais à la partie lésée de mettre en mouvement
l'action publique
" en cas de décès, de mutilation ou
d'infirmité permanente "
.
La procédure applicable aux infractions commises par des militaires sur
le territoire de la République est donc désormais proche du droit
commun. Toutefois, certaines particularités procédurales, issues
du code de justice militaire, demeurent devant les juridictions de droit commun
spécialisées, dont les plus notables sont les suivantes :
- le procureur de la République doit demander l'avis du ministre de la
défense ou de l'autorité militaire habilitée
préalablement à tout acte de poursuite, sauf en cas de crime ou
de délit flagrant ;
- les investigations au sein d'un établissement militaire doivent
être précédées de réquisitions
adressées à l'autorité militaire ; l'autorité
militaire se fait représenter lors des opérations ;
- les militaires doivent être détenus dans des locaux
séparés, qu'ils soient prévenus ou condamnés ;
en outre, le contrôle judiciaire ne leur est pas applicable ;
- les décisions rendues en matière de désertion ou
d'insoumission peuvent être annulées lorsqu'il est établi a
posteriori que la personne n'était pas en état de
désertion ou d'insoumission ;
- les mesures disciplinaires de privation de liberté sont imputables sur
les peines d'emprisonnement ferme.
Incontestablement, les infractions commises par des militaires sur le
territoire de la République se voient aujourd'hui traitées dans
des conditions très proches de celles du droit commun.
DÉCISIONS RENDUES DURANT L'ANNÉE 1997
PAR LES
JURIDICTIONS DE DROIT COMMUN SPÉCIALISÉES
ET
COMMUNIQUÉES AU MINISTRE DE LA DÉFENSE
|
CLASSEMENTS
|
NON-
|
DÉCISIONS DE JUGEMENTS |
Atteintes volontaires à la vie et à l'intégrité des personnes |
53 |
0 |
96 |
Atteintes involontaires à la vie et à l'intégrité des personnes |
28 |
0 |
51 |
Agressions sexuelles |
3 |
0 |
10 |
Trafic de stupéfiants et usage |
341 |
0 |
644 |
Autres atteintes à la personne humaine |
8 |
0 |
7 |
Appropriations frauduleuses |
525 |
0 |
248 |
Destructions matériels appartenant à autrui |
109 |
0 |
25 |
Infractions au code de la route |
17 |
0 |
7 |
Autres infractions de droit commun |
226 |
1 |
91 |
Insoumission (dénonciations de l'autorité militaire) |
2.854 |
0 |
1.040 |
Désertion (dénonciation de l'autorité militaire) |
1.956 |
1 |
2.867 |
Mutilation volontaire |
86 |
0 |
122 |
Destructions matériels militaires |
72 |
0 |
97 |
Détournements, faux, falsifications |
29 |
0 |
53 |
Refus d'obéissance (objecteurs de conscience) |
20 |
0 |
34 |
Voies de fait, outrages à supérieurs |
28 |
0 |
169 |
Violences, outrages à subordonnés |
19 |
5 |
22 |
Violation de consigne |
28 |
2 |
64 |
Autres infractions militaires |
68 |
0 |
85 |
TOTAL GÉNÉRAL |
6.470 |
9 |
5.702 |
B. EN TEMPS DE PAIX HORS DU TERRITOIRE DE LA RÉPUBLIQUE
Depuis la loi de 1982, les infractions commises par des militaires sur le territoire de la République sont instruites et jugées en vertu de règles inscrites dans le code de procédure pénale. En revanche, les infractions commises hors du territoire de la République restent soumises au code de justice militaire. Dans ces conditions, les justiciables du code de procédure pénale ont progressivement vu leurs droits étendus par les réformes de la procédure pénale intervenues depuis 1982, cependant que les justiciables du code de justice militaire ne bénéficiaient pas de ces évolutions.
1. Compétence
En
principe, des
tribunaux aux armées établis hors du territoire
de la République sont compétents pour le jugement des infractions
commises par les militaires et assimilés lorsque des forces stationnent
ou opèrent hors du territoire
(article 3 du code de justice
militaire). La création de ces tribunaux est laissée à
l'appréciation du gouvernement.
Les tribunaux aux armées sont compétents pour
l'ensemble des
infractions
commises par les militaires et assimilés hors du
territoire de la République. Aux termes des articles 59 à 66
du code de justice militaire, sont justiciables de ces tribunaux non seulement
les militaires mais également les personnels civils employés
à titre statutaire ou contractuel par les forces armées, ainsi
que les personnes à leur charge, lorsqu'elles accompagnent le chef de
famille hors du territoire de la République. En outre, la
compétence des tribunaux aux armées s'étend à tous
auteurs ou complices lorsque l'un d'eux est justiciable de ces juridictions.
Tous les auteurs ou complices d'infractions contre les forces armées
françaises ou contre leurs établissements ou matériels
sont justiciables des tribunaux aux armées. Enfin, ces tribunaux ont
compétence à l'égard des mineurs lorsque ceux-ci sont
membres des forces armées ou lorsqu'aucune juridiction n'a
compétence à leur égard.
La compétence
ratione loci
des tribunaux aux armées est
définie par l'article 67 du code de justice militaire qui
prévoit la compétence des tribunaux aux armées du lieu de
l'infraction, du lieu de l'affectation ou du débarquement ou de
l'arrestation de tout auteur ou complice, enfin du lieu le plus proche de la
résidence.
En pratique, un seul tribunal aux armées existe aujourd'hui,
le
tribunal aux armées des forces françaises stationnées en
Allemagne
, dont le siège est à Baden-Baden, autrefois
tribunal de Landau (l'appellation et le siège de cette juridiction ont
été modifiés par un décret n° 95-662 du
9 mai 1995). La création de cette juridiction résulte
de la convention de Londres du 19 juin 1951 et de l'accord
complémentaire du 3 août 1959, en vertu desquels les
ressortissants français bénéficient du privilège de
juridictions en Allemagne.
Des juridictions prévôtales, compétentes pour les jugements
des contraventions des quatre premières classes ont également
été établies auprès du tribunal aux armées.
Le tableau suivant récapitule l'activité du tribunal de
Baden-Baden pour l'année 1997.
Tribunal aux armées des forces françaises
stationnées
en Allemagne et juridictions prévôtales
(année 1997)
Procédures reçues |
Nombre de
jugements rendus
|
Nombre de jugements rendus par les juridictions prévôtales |
||
|
751 |
729 |
||
|
En
matière
|
En
matière
|
En
matière
|
Contravention des
quatre
|
2724 |
1 |
629 |
121 |
729 |
Lorsqu'aucun tribunal aux armées n'a été
établi auprès d'une force stationnant à l'étranger,
les
juridictions spécialisées de droit commun sont en principe
compétentes
pour connaître des infractions commises par des
militaires hors du territoire de la République. Dans ce cas, la
compétence territoriale est déterminée selon les
règles du code de procédure pénale. L'article 697-3
de ce code prévoit que "
sont également
compétentes les juridictions du lieu de l'affectation ou du
débarquement. En outre, la juridiction territorialement
compétente à l'égard des personnels de marins
convoyés est celle à laquelle seraient
déférées les personnels du navire convoyeur ".
Ces règles de compétence sont toutefois rendues plus complexes
par l'existence d'un
tribunal des forces armées à Paris
.
Celui-ci connaît des infractions commises sur un territoire
étranger par des militaires français si des accords
internationaux prévoient une attribution expresse de compétence
au profit des juridictions militaires françaises et si aucune
juridiction militaire n'a été établie sur ce territoire.
De tels accords ont été conclu avec plusieurs Etats d'Afrique,
à savoir le Burkina Faso, la Centrafrique, la Côte d'Ivoire,
Madagascar, le Gabon, le Sénégal, le Togo et Djibouti. Le tableau
suivant résume l'activité du tribunal des forces armées de
Paris au cours de l'année 1997.
Tribunal des forces armées de Paris (année 1997)
Procédures reçues |
Nombre de
jugements rendus
|
||
|
166 |
||
|
En
matière
|
En
matière
|
En
matière
|
1030 |
0 |
142 |
24 |
2. Procédure
Depuis
1982, la procédure applicable devant les juridictions militaires
comporte des points communs importants avec la procédure de droit
commun. Ainsi,
les formations de jugement ne sont composées que de
juges civils
. En outre, la mise en mouvement de l'action civile appartient
à un commissaire du Gouvernement exerçant les attributions et
prérogatives reconnues au procureur de la République. Comme
devant les juridictions de droit commun spécialisées, les
victimes peuvent exercer l'action civile en réparation du dommage
causé par une infraction et mettre en mouvement l'action publique en cas
de décès, de mutilation ou d'infirmité permanente.
Toutefois, la procédure applicable pour les infractions commises en
temps de paix hors du territoire de la République est très
dérogatoire du droit commun. En particulier, les dispositions
introduites dans le code de procédure pénale par la
loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme
de la procédure pénale ne sont pas applicables dans ce cadre.
Dans ces conditions, le code de justice militaire fait toujours
référence à l'inculpation et le régime de la garde
à vue applicable en matière militaire est sensiblement
différent du régime de droit commun.
Les règles relatives à la mise en mouvement de l'action publique
comportent des particularités encore plus étendues que devant les
juridictions de droit commun spécialisées, dans la mesure
où la dénonciation de l'infraction par l'autorité
militaire impose au commissaire du Gouvernement l'engagement de poursuites. En
l'absence de dénonciation, l'avis du ministre de la défense doit
être sollicité, sauf en cas de flagrance.
En matière de détention provisoire, il convient de noter que,
pour les militaires, la privation de liberté peut résulter de
pièces autres que les mandats. Ainsi, les justiciables des tribunaux aux
armées peuvent être détenus pendant cinq jours ou plus sur
ordre d'incarcération provisoire du commissaire du Gouvernement,
jusqu'à ce qu'une décision soit prise sur la suite à
donner à la procédure.
Par ailleurs, la détention provisoire peut être ordonnée
"
lorsqu'elle est rendue nécessaire par la discipline des
armées
".
De nombreuses dispositions spécifiques caractérisent
également la procédure d'instruction et de jugement devant les
tribunaux aux armées.
L'une des spécificités les plus
importantes de la justice militaire est incontestablement l'absence d'appel en
matière délictuelle et contraventionnelle
. En revanche,
l'ensemble des décisions des juridictions militaires peut faire l'objet
d'un pourvoi en cassation.
C. EN TEMPS DE GUERRE : DES DISPOSITIONS ENTIÈREMENT DÉROGATOIRES
Si la
loi de 1982 a apporté des modifications profondes au droit applicable
pour les infractions commises en temps de paix par les militaires, elle n'a pas
apporté de modification au droit applicable en temps de guerre. Devant
l'Assemblée nationale, le Garde des Sceaux avait fait valoir que
"
dans le temps de l'exception, l'impératif de survie de la
collectivité nationale l'emporte sur toute autre
considération
".
Dans ces conditions, le code de justice militaire prévoit la mise en
place de trois catégories de juridictions militaires :
- l'article 24 du code prévoit l'établissement sur le
territoire de la République de
tribunaux territoriaux des forces
armées
, composés de cinq membres dont trois juges
militaires ;
- l'article 26 prévoit l'établissement d'un
Haut tribunal
des forces armées
ayant son siège à Paris, pour le
jugement des maréchaux et amiraux de France, des officiers
généraux ou assimilés et des membres du contrôle
général des armées ;
- enfin, l'article 49 prévoit la possibilité
d'établir des
tribunaux militaire aux armées
lorsque
celles-ci stationnent ou opèrent hors du territoire de la
République ou sur le territoire de celle-ci. Ces tribunaux sont
composés d'un président et de quatre juges militaires.
Il convient de noter qu'en cas de mobilisation ou de mise en garde, le
Gouvernement peut décider par décret de rendre applicables les
dispositions du code de justice militaire relatives au temps de guerre
(article 699-1 du code de procédure pénale). En outre, des
tribunaux territoriaux des forces armées peuvent être
établis par décret en cas d'état de siège ou
d'état d'urgence déclaré. Une telle solution avait
été exclue lors de la proclamation de l'état d'urgence sur
le territoire de la Nouvelle-Calédonie en 1985.
Par ailleurs, le code de justice militaire prévoit
l'établissement de prévôtés constituées par
la gendarmerie sur le territoire de la République ou lorsque de grandes
unités, formations ou détachements stationnent hors du
territoire. Les prévôts, ainsi que les officiers, gradés ou
gendarmes placés sous leurs ordres, exercent la police judiciaire
militaire. Lorsque des tribunaux militaires aux armées sont
établis, les prévôts peuvent exercer une juridiction
dénommée "
tribunal prévôtal
" et
connaître des contraventions des quatre premières classes, ainsi
que des infractions aux règlements relatifs à la discipline
commises par les justiciables non militaires et par les prisonniers de guerre
qui ne sont pas officiers.
La procédure applicable devant les juridictions des forces armées
en temps de guerre est très différente des dispositions de droit
commun définies dans le code de procédure pénale. On ne
retiendra ici que quelques exemples illustrant la spécificité de
la justice militaire en temps de guerre.
En temps de guerre, le commissaire du Gouvernement se borne à donner son
avis sur toutes les questions concernant la mise en mouvement de l'action
publique, la décision étant prise par l'autorité militaire
sous forme de la délivrance d'un ordre de poursuite.
Le délai normal de quarante-huit heures en matière de garde
à vue peut être prolongé de vingt-quatre heures.
On peut enfin signaler qu'en ce qui concerne les débats, le tribunal
peut interdire en tout ou partie, tout compte-rendu des débats,
même en l'absence de huis clos.
II. LE PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UN PROGRÈS POUR LES JUSTICIABLES MILITAIRES
A. APPLIQUER AUX JUSTICIABLES MILITAIRES DES DROITS RECONNUS AUX AUTRES JUSTICIABLES
Le
projet de loi soumis au Sénat est nécessaire. En effet,
l'article 229 de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993
modifiant le code de procédure pénale prévoyait que les
dispositions de cette loi seraient rendues applicables aux procédures de
la compétence des juridictions des forces armées à compter
du 1
er
janvier 1995. Cette échéance a
été successivement reportée au
1
er
mars 1996, au 1
er
janvier 1997,
enfin au 1
er
janvier 1999.
Le projet de loi tend donc en premier lieu à rapprocher les
règles applicables devant les juridictions militaires des règles
de droit commun de notre procédure pénale. Ainsi, le Gouvernement
a proposé la suppression de nombre de dispositions du code de justice
militaire prévoyant des règles de procédures
spécifiques.
Le projet de loi permettra aux justiciables des juridictions militaires de
bénéficier des garanties offertes aux autres justiciables, en
particulier en ce qui concerne la garde à vue et la détention
provisoire. Le projet aura en outre pour conséquence
qu'à
l'avenir, l'ensemble des réformes de procédure pénale
seront applicables aux justiciables militaires
. Ainsi, lors du débat
à l'Assemblée nationale, Mme Elisabeth Guigou, Garde
des Sceaux, ministre de la justice, a indiqué :
" (...)
dès que seront adoptées par le Parlement les dispositions des
projets de réforme que je suis en train d'achever, au nom du
Gouvernement, comme celles instituant des délais d'enquête ou
d'instruction et prévoyant l'intervention d'un avocat dès le
début de la garde à vue, elles seront automatiquement et sans
délai applicables à la procédure pénale militaire
en temps de paix "
2(
*
)
.
L'évolution proposée est donc très importante, puisqu'elle
conduira à un rapprochement sensible des règles applicables en
temps de paix aux militaires en cas d'infraction hors du territoire de la
République de celles qui leur sont applicables en cas d'infraction sur
le territoire de la République.
Votre commission approuve l'évolution ainsi proposée.
La
spécificité militaire ne justifie pas aujourd'hui qu'une
procédure très dérogatoire au droit commun subsiste pour
les infractions militaires et ce d'autant plus qu'elle ne s'applique
désormais qu'aux infractions commises hors du territoire
. La
diversification des procédures, selon que l'infraction est commise sur
le territoire de la République ou hors de celui-ci n'apparaît pas
justifiée. L'instauration d'un droit d'appel des jugements est en
particulier une évolution tout à fait souhaitable.
En revanche,
le droit applicable en temps de guerre ne fait l'objet d'aucune
modification dans le projet de loi
. L'exposé des motifs du projet
indique que
" dans de telles circonstances, en effet,
l'impératif de survie de la collectivité nationale doit
l`emporter sur toute autre considération ".
B. PROMOUVOIR UNE SIMPLIFICATION DES RÈGLES APPLICABLES
Indépendamment de l'objectif consistant à
rapprocher
la justice militaire du droit commun, le Gouvernement a souhaité
apporter, dans un souci de simplification, certaines modifications aux
règles applicables tant pour les infractions commises sur le territoire
par des militaires que pour celles commises hors du territoire. Les principales
dispositions proposées sont les suivantes.
Tout d'abord, le projet de loi a prévu le transfert au tribunal des
forces armées de Paris -rebaptisé tribunal aux armées de
Paris- de l'ensemble des infractions commises hors du territoire par des
militaires lorsqu'un tribunal aux armées n'a pas été
établi auprès d'une force stationnant ou opérant à
l'étranger.
Il faut reconnaître que les règles de compétence actuelles
en ce qui concerne les infractions commises hors du territoire de la
République sont complexes et peuvent aboutir à des
dysfonctionnements. En effet, lorsqu'un tribunal aux armées n'a pas
été établi auprès d'une force stationnant à
l'étranger, les juridictions de droit commun spécialisées
sont compétentes. La juridiction compétente est celle de
l'affectation, c'est-à-dire celle du lieu où est établi le
régiment du militaire auteur d'une infraction. Dans ces conditions,
lorsque des militaires appartenant à des régiments
différents commettent ensemble des infractions, des juridictions
différentes sont compétentes, de sorte que certains sont
poursuivis tandis que d'autres bénéficient d'un classement. A
l'évidence, un tel système présente plus
d'inconvénients que d'avantages et la réforme proposée est
bienvenue.
Par ailleurs, le projet de loi initial prévoyait de modifier les
critères de détermination de la compétence des
juridictions de droit commun spécialisées en matière
militaire. Actuellement, ces juridictions sont compétentes pour les
infractions militaires et les infractions de droit commun commises dans
l'exécution du service. Le Gouvernement a proposé que ces
juridictions soient désormais compétentes pour les infractions
commises dans un établissement militaire et les infractions commises
dans l'exécution du service.
Enfin, le projet de loi prévoyait la possibilité pour le ministre
de la défense ou l'autorité militaire habilitée de donner
un avis lorsque la partie lésée met en mouvement l'action
publique. En effet, lorsque cette possibilité a été
ouverte en 1992, l'avis du ministre de la défense n'a pas
été explicitement prévu, alors que le procureur de la
République doit demander un tel avis avant la mise en mouvement de
l'action publique.
C. LA VOLONTÉ DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE : LIMITER AU MAXIMUM LES SPÉCIFICITÉS DE LA JUSTICE MILITAIRE
L'Assemblée nationale a examiné le présent
projet de loi en première lecture le 10 juin dernier et lui a
apporté des modifications substantielles.
Elle a en particulier décidé de supprimer la possibilité
d'établir des tribunaux aux armées auprès des forces
stationnant ou opérant à l'étranger en temps de paix,
constatant qu'un seul tribunal avait été établi
jusqu'à présent et qu'il allait être prochainement
supprimé. En contrepartie, elle a accepté, à la demande du
Gouvernement, que des chambres du tribunal aux armées de Paris,
appelé dans ces conditions à devenir la seule juridiction
compétente pour les infractions commises par des militaires hors du
territoire national, puissent être éventuellement
détachées auprès de forces stationnant ou opérant
à l'étranger.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale s'est opposée à la
modification des critères appliqués pour la détermination
de la compétence des juridictions de droit commun
spécialisées, refusant que ces juridictions soient
compétentes pour des infractions commises dans un établissement
militaire, mais qui n'auraient aucun rapport avec le service. Actuellement, en
effet, seul le critère de l'exécution du service permet de
déterminer la juridiction compétente.
Surtout, l'Assemblée a apporté une modification très
importante aux conditions de mise en mouvement de l'action publique par la
personne lésée. Alors qu'actuellement, celle-ci n'est possible
qu'en cas de décès, de mutilation ou d'infirmité
permanente, l'Assemblée nationale a élargi cette
possibilité en supprimant toute restriction à la
possibilité pour la partie lésée de mettre en mouvement
l'action publique. Elle n'a toutefois prévu la mise en mouvement de
l'action publique que par la voie de la plainte avec constitution de partie
civile devant le juge d'instruction, excluant ainsi la voie de la citation
directe.
A la demande du Gouvernement, l'Assemblée nationale a accepté que
cette mesure n'entre en vigueur que le 1
er
janvier 2002,
c'est-à-dire lorsque l'armée ne comportera plus d'appelés.
Le Gouvernement a en effet fait part de sa crainte que des personnes refusant
de participer à des exercices qu'elles jugent périlleux puissent
déposer plainte avec constitution de partie civile en invoquant le
délit de mise en danger d'autrui.
L'Assemblée nationale s'est en revanche opposée à ce que
le ministre de la défense puisse donner un avis lorsque l'action
publique est mise en mouvement par la partie lésée, estimant
qu'un tel avis serait contradictoire avec l'objectif de rapprochement de la
procédure applicable devant les juridictions militaires de celle
applicable en droit commun.
III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS
1. Le constat d'un projet inachevé
Votre
commission ne peut que se féliciter que le présent projet de loi
soit enfin présenté, alors que les justiciables militaires
auraient dû bénéficier depuis longtemps des garanties
offertes aux autres justiciables.
Toutefois, elle regrette que le projet soit en quelque sorte inachevé.
Le rapprochement considérable opéré entre le droit
applicable pour les infractions commises hors du territoire et le droit
applicable pour les infractions commises sur le territoire, aurait pu justifier
le regroupement de l'ensemble des dispositions applicables en temps de paix au
sein du code de procédure pénale, cependant que le code de
justice militaire n'aurait plus concerné que le temps de guerre.
En ce qui concerne le droit applicable en temps de guerre, le Gouvernement a
choisi de ne lui apporter aucune modification. Toutefois, la suppression ou la
modification de dispositions communes aux temps de paix et de guerre a conduit
à une solution peu satisfaisante.
Le droit applicable en temps de guerre sera en effet le code de justice
militaire dans sa rédaction précédant le présent
projet de loi. En cas de renvoi au code de procédure pénale, le
droit applicable sera le code de procédure pénale dans sa
rédaction précédant l'adoption de la loi du 4 janvier
1993.
Le moins que l'on puisse dire -malgré l'aval qu'a reçu cette
solution de la part du Conseil d'Etat- est que cela ne facilitera pas la
compréhension et la lisibilité du droit applicable. Il eût
été préférable de procéder à une
recodification à droit constant.
L'Assemblée nationale a d'ailleurs invité le Gouvernement, dans
un article additionnel au projet de loi, à procéder à une
refonte du code de justice militaire avant le 1
er
janvier 2002.
Afin que la prochaine réforme puisse tenir compte des premiers effets de
la professionnalisation des armées, votre commission vous propose de
reporter cette date au 31 décembre 2002.
2. Poursuivre l'unification de la justice militaire
L'Assemblée nationale a décidé de faire du
tribunal aux armées de Paris la seule juridiction compétente pour
les infractions commises hors du territoire. Votre commission approuve cette
orientation, qui permettra une simplification heureuse du droit applicable et
propose de modifier le projet de loi pour aller plus loin encore dans cette
direction.
L'Assemblée nationale a en effet laissé subsister dans le code de
justice militaire plusieurs dispositions relatives au tribunal aux
armées auprès des forces stationnées en Allemagne.
D'après les informations recueillies par votre rapporteur, le
Gouvernement envisagerait de supprimer dans des délais très brefs
ce tribunal. Votre commission a donc estimé préférable
d'exclure du code de justice militaire toute référence à
cette juridiction, afin d'éviter que des dispositions du code ne
deviennent rapidement obsolètes. Une disposition transitoire à la
fin du projet de loi peut permettre de prévoir le sort des affaires
relevant actuellement de la compétence du tribunal de Baden-Baden.
Par ailleurs, votre commission a adopté de nombreux amendements de
coordination, afin de prendre pleinement en compte le fait que le tribunal aux
armées de Paris est appelé à devenir la seule juridiction
militaire en temps de paix. Elle a en particulier prévu des dispositions
spécifiques pour la composition du tribunal lorsqu'il sera appelé
à juger des crimes.
3. Prévoir explicitement un avis du ministre de la défense en cas de mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée
L'Assemblée nationale a souhaité étendre
la
possibilité pour la partie lésée de mettre en mouvement
l'action publique, qui n'est possible aujourd'hui qu'en cas de
décès, de mutilation ou d'infirmité permanente. Elle a
donc prévu sans restrictions la possibilité de mettre en
mouvement l'action publique, dans les conditions prévues par les
articles 85 et suivants du code de procédure pénale
(relatifs à la plainte avec constitution de partie civile devant le juge
d'instruction). Elle a par ailleurs supprimé l'article 46 du projet
de loi prévoyant une demande d'avis du ministre de la défense en
cas de mise en mouvement de l'action publique par la partie
lésée. Son rapporteur, M. Jean Michel, a fait valoir
qu'une telle disposition
" éloignerait la procédure
applicable devant les juridictions militaires de la procédure de droit
commun "
.
De fait, le législateur, lorsqu'il a autorisé la mise en
mouvement de l'action publique par la partie lésée en cas de
décès, de mutilation ou d'infirmité permanente, n'a pas
prévu explicitement l'avis du ministre de la défense.
Toutefois, il faut noter que le droit commun prévoit que lorsqu'une
plainte avec constitution de partie civile est déposée devant le
juge d'instruction, celui-ci ordonne communication de la plainte au procureur
de la République pour qu'il prenne ses réquisitions. Or, en ce
qui concerne la procédure applicable pour les justiciables militaires
devant les juridictions de droit commun spécialisée,
l'article 698-1 du code de procédure pénale prévoit
que "
le procureur de la République doit demander
préalablement à tout acte de poursuite, sauf en cas de crime ou
de délit flagrant, l'avis du ministre chargé de la défense
ou de l'autorité militaire habilitée par lui
". Par
conséquent, si l'on considère les réquisitions du
procureur après plainte avec constitution de partie civile comme un acte
de poursuite, la demande d'avis devient nécessaire. Il est vrai que la
Cour de cassation a considéré, en 1997, que l'article 698-1 ne
concernait que la mise en mouvement de l'action publique par le procureur.
Néanmoins, d'après les informations recueillies par votre
rapporteur, les procureurs, actuellement, sollicitent l'avis du ministre de la
défense lorsque la partie lésée met en mouvement l'action
publique.
Par conséquent, il est difficile de dire que la demande d'avis du
ministre de la défense constituerait une réelle innovation.
Votre commission pense que cet avis peut avoir une utilité pour
expliquer le contexte des infractions
. Actuellement, on compte environ
10.000 dénonciations ou avis du ministre de la défense (voir
statistiques en annexe du présent rapport). Rien ne permet d'affirmer
que ces avis font des militaires des justiciables protégés. Il
faut rappeler que ces avis ne lient pas, et qu'ils n'interrompent pas le cours
de la justice.
Surtout, il n'y a guère de raison de prévoir un
avis du ministre lorsque le procureur met en mouvement l'action publique et
d'exclure cet avis lorsque la partie lésée met en mouvement
l'action publique.
C'est pourquoi votre commission vous propose d'accepter
l'élargissement de la mise en mouvement de l'action publique par la
partie lésée décidé par l'Assemblée
nationale et de prévoir explicitement un avis du ministre de la
défense, afin d'éviter toute ambiguïté en cette
matière.
*
* *
Dans les
débats sur la justice militaire, on a coutume de citer cette phrase de
Napoléon Bonaparte : "
La justice est une en France :
on est citoyen français avant d'être soldat
". Votre
commission souscrit à cette philosophie et approuve donc l'esprit de ce
projet de loi, qui marque un nouveau rapprochement entre la situation des
justiciables militaires et celle des autres justiciables.
Il convient néanmoins de garder à l'esprit l'utilité que
peuvent avoir certaines spécificités en ce qui concerne les
justiciables militaires, surtout lorsqu'elles n'entravent en rien le cours de
la justice.
La volonté de concilier unité de la justice et
prise en compte du caractère propre de l'institution militaire a
inspiré votre commission des Lois dans les propositions qu'elle vous
soumet.
RÈGLES DE COMPÉTENCE POUR LES INFRACTIONS
COMMISES
PAR DES MILITAIRES ET ASSIMILÉS EN TEMPS DE
PAIX
|
Droit en vigueur |
Projet de loi adopté par l'Assemblée nationale |
||
|
Infractions commises sur le territoire de la République |
Infractions commises hors du territoire de la République |
Infractions commises sur le territoire de la République |
Infractions commises hors du territoire de la République |
|
|
Tribunal aux armées ou chambre spécialisée d'une juridiction de droit commun ou tribunal des forces armées de Paris |
|
|
|
|
Tribunal aux armées ou chambre spécialisée d'une juridiction de droit commun ou tribunal des forces armées de Paris |
|
|
|
|
Tribunal aux armées ou chambre spécialisée d'une juridiction de droit commun ou tribunal des forces armées de Paris |
|
|
* Sous réserve de la compétence du tribunal aux armées des forces stationnées en Allemagne.
EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS MODIFIANT
LE CODE DE
JUSTICE MILITAIRE
Article 1
er
(article premier du code de
justice
militaire)
Organisation de la justice militaire
Cet
article tend à modifier l'article 1
er
du code de justice
militaire, relatif aux principes de l'organisation de la justice militaire.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 1
er
du code
prévoit que la justice militaire est rendue en temps de paix par les
tribunaux aux armées établis hors du territoire de la
République et, en temps de guerre, par des tribunaux territoriaux des
forces armées et par des tribunaux militaires aux armées.
Il prévoit en outre que des tribunaux prévôtaux peuvent
être établis dans les conditions prévues par le code de
justice militaire.
Le projet de loi initial tendait à prévoir la compétence,
en temps de paix, du tribunal aux armées de Paris ou, le cas
échéant, des tribunaux aux armées établis hors du
territoire et, en cas d'appel, de la Cour d'appel de Paris ou des cours d'appel
compétentes.
Actuellement, un seul tribunal aux armées établi hors du
territoire subsiste, le tribunal aux armées des forces françaises
stationnées en Allemagne, installé à Baden-Baden depuis
1995 et dont la compétence est définie par le décret
n° 82-1122 du 23 décembre 1982. Les affaires
relevant de la justice militaire sont portées devant la juridiction de
droit commun compétente lorsqu'un tribunal n'a pas été
établi auprès d'une force armée qui stationne ou
opère hors du territoire de la République (article 5 du code
de justice militaire). Toutefois, un tribunal des forces armées ayant
son siège à Paris connaît des infractions commises sur un
territoire étranger par des militaires français si des accords
internationaux prévoient une attribution de compétence au profit
des juridictions militaires, et si aucune juridiction militaire n'a
été établie sur ce territoire.
Le projet de loi tendait à remplacer le tribunal des forces
armées de Paris par un tribunal aux armées de Paris dont la
compétence serait étendue à toutes les affaires relevant
de la justice militaire survenues hors du territoire de la République en
temps de paix.
Le Gouvernement proposait toutefois de
maintenir la
mention des tribunaux établis hors du territoire, d'une part pour tenir
compte de l'existence du tribunal de Baden-Baden, d'autre part pour laisser
ouverte la possibilité d'établir d'autres tribunaux aux
armées hors du territoire.
L'Assemblée nationale a estimé souhaitable que le tribunal aux
armées de Paris devienne la seule juridiction compétente pour les
infractions commises en dehors du territoire, sous réserve de la
compétence du tribunal de Baden-Baden. Le rapporteur de
l'Assemblée nationale, M. Jean Michel, a en effet
constaté qu'en dehors du tribunal aux armées des forces
armées stationnées en Allemagne, aucun tribunal aux armées
n'avait été créé. Il a estimé que la
compétence systématique du tribunal aux armées de Paris
clarifierait les règles de compétence applicables, sans ralentir
le cours de la justice, dans la mesure où il apparaît plus
aisé de renvoyer un prévenu à Paris que d'envisager la
constitution d'un tribunal aux armées. L'Assemblée nationale a
donc supprimé la référence aux tribunaux aux armées
établis hors du territoire et a consacré un article
spécifique au tribunal de Baden-Baden.
Votre commission approuve le souhait du Gouvernement de renvoyer au tribunal
aux armées de Paris l'ensemble des affaires relevant de la justice
militaire survenues en temps de paix hors du territoire de la
République, ainsi que le choix de l'Assemblée nationale
d'écarter toute référence à l'établissement
de territoires aux armées hors du territoire.
Ces modifications
permettront une clarification appréciable des règles de
compétence applicables en temps de paix.
Actuellement, lorsqu'une
affaire doit être renvoyée devant la juridiction de droit commun
compétente, il convient de prendre en compte l'origine du
régiment auquel appartient le militaire auteur d'une infraction. Lorsque
des militaires issus de régiments différents commettent ensemble
des infractions hors du territoire de la République, les juridictions
compétentes ne sont pas les mêmes, de sorte que le traitement
réservé à ces personnes peut être différent.
Il est donc tout à fait utile de prévoir la compétence
exclusive du tribunal aux armées de Paris, et, en cas d'appel, de la
Cour d'appel de Paris.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 2
(article 2 du code de justice
militaire)
Droit applicable devant le tribunal aux armées de
Paris
Cet
article tend à modifier l'article 2 du code de justice militaire.
Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit qu'en temps de
guerre ou hors du territoire de la République, les infractions sont
instruites et jugées selon les règles du code de justice
militaire.
Pour tenir compte de l'évolution opérée par le projet de
loi dans le sens d'un rapprochement des règles applicables à la
justice militaire et de celles figurant dans le code de procédure
pénale, le projet de loi tend à modifier l'article 2 du code
pour préciser qu'en temps de paix, les infractions de la
compétence du tribunal aux armées sont instruites et
jugées selon les dispositions du code de procédure pénale,
sous réserve des dispositions particulières
édictées par les articles 698-1 à 698-8 du même code
et de celles édictées par le code de justice militaire. Cette
adjonction marque le rapprochement de la justice militaire avec le droit
commun. Par souci de clarté, votre commission vous propose, par un
amendement
, de mentionner non seulement l'instruction et le jugement,
mais également la poursuite des infractions.
Compte tenu des évolutions prévues par le projet de loi, les
infractions commises par des militaires en temps de paix en dehors du
territoire de la République se verront appliquer, pour l'essentiel, les
règles de droit commun. Certaines règles particulières,
inscrites soit dans les articles 698-1 à 698-8 du code de
procédure pénale (qui concernent le traitement des infractions
commises par des militaires sur le territoire de la République), soit
dans le code de justice militaire demeurent cependant applicables.
Par ailleurs, le deuxième alinéa de l'article 2 du code de
justice militaire, tel qu'il figure dans le projet de loi tend à
préciser les équivalences fonctionnelles entre les juridictions
de droit commun et le tribunal aux armées de Paris. Il existe en effet
des appellations spécifiques aux juridictions militaires. Ainsi, le
procureur de la République est appelé commissaire du Gouvernement
et la chambre d'accusation, chambre de contrôle de l'instruction.
Le Gouvernement a donc proposé d'inscrire dès l'article 2 du
code de justice militaire ces dénominations. Toutefois,
l'Assemblée nationale a décidé de rapprocher très
fortement les appellations applicables pour le tribunal aux armées de
celles utilisées en droit commun, comme le montre le tableau
suivant :
Juridiction de droit commun |
Juridictions militaires
|
Juridictions militaires
|
Juge d'instruction |
Juge d'instruction |
Juge d'instruction |
Procureur de la République |
Commissaire du Gouvernement |
Procureur de la République près le tribunal aux armées |
Président du tribunal |
Président de la juridiction des forces armées |
Président du tribunal aux armées |
Président de la Cour d'assises |
Président de la juridiction des forces armées |
Président du tribunal aux armées |
Chambre d'accusation |
Chambre de contrôle de l'instruction |
Chambre d'accusation |
Les
modifications apportées par l'Assemblée nationale apparaissent
bienvenues, dans la mesure où
le rapprochement des procédures
opéré par le projet de loi justifie également un
rapprochement des terminologies
. Toutefois, compte tenu de ces
rapprochements, il apparaît beaucoup moins utile de mentionner dès
l'article 2 du code de justice militaire les équivalences entre la
justice de droit commun et la justice militaire.
Votre commission vous soumet donc un
amendement
de suppression des
deuxième et troisième alinéas du texte proposé pour
l'article 2 du code de justice militaire.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a souhaité, dans un
article 2 bis, insérer un article 2-1 dans le code de
justice militaire afin de mentionner dans ce texte les règles
applicables en temps de guerre.
Le Gouvernement a en effet décidé de n'apporter aucune
modification au droit applicable en temps de guerre. Toutefois, les
modifications apportées au code de justice militaire, qui comporte un
grand nombre de renvois entre le droit applicable en temps de paix et le droit
applicable en temps de guerre, l'ont conduit à insérer un article
à la fin du présent projet de loi prévoyant que le droit
applicable en temps de guerre résulte du code de justice militaire dans
sa
" rédaction antérieure à la présente
loi "
.
L'Assemblée nationale a souhaité, par souci de clarté, que
la mention du droit applicable en temps de guerre figure dans le code de
justice militaire lui-même.
C'est pourquoi, elle a
inséré un article additionnel créant un article 2-1
dans le code de justice militaire. Cet article tend à prévoir
qu'en temps de guerre, les infractions de la compétence des tribunaux
territoriaux des forces armées et des tribunaux militaires aux
armées sont instruites et jugées selon les dispositions du code
de procédure pénale avant l'entrée en application de la
loi du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure
pénale et les règles du code de justice militaire dans sa
rédaction résultant de la loi n° 82-621 du
21 juillet 1982 relative à l'instruction et au jugement des
infractions en matière militaire et de sûreté de l'Etat
.
Votre commission approuve l'insertion de ces dispositions dans le code de
justice militaire. Elle estime toutefois préférable de les
inscrire dans l'article 2 de ce code, afin qu'apparaissent dans le
même article les dispositions applicables en temps de paix et celles
applicables en temps de guerre.
Elle vous propose donc d'intégrer dans l'article 2 du code de
justice militaire le texte proposé par le projet de loi pour
l'article 2-1 du code de justice militaire.
Elle vous propose d'adopter l'article 2
ainsi modifié
.
Article2 bis
(article 2-1 du code de justice
militaire)
Droit applicable en temps de guerre
Compte tenu du choix effectué à l'article précédent, votre commission vous propose de supprimer cet article.
Article 2 ter
(chapitre 1er du livre 1er du code de
justice militaire)
Coordination
Cet
article, introduit par l'Assemblée nationale, tend à modifier
l'intitulé du chapitre premier du titre premier du code de
justice militaire pour remplacer les mots :
" des tribunaux aux
armées "
par les mots
" du tribunal aux
armées "
.
Il s'agit de prendre en compte le fait que l'Assemblée nationale a
décidé de faire du tribunal aux armées de Paris la seule
juridiction militaire compétente pour les infractions commises en temps
de paix hors du territoire de la République, sous réserve de la
compétence du tribunal aux armées des forces françaises
stationnées en Allemagne.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 2 quater
(article 3 du code de justice
militaire)
Établissement du tribunal aux armées de Paris
Cet
article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, tend
à modifier l'article 3 du code de justice militaire, pour tenir
compte de la décision de faire du tribunal aux armées de Paris
la seule juridiction militaire compétente en temps de paix pour les
infractions commises hors du territoire
.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 3 du code de justice
militaire prévoit qu'en temps de paix, des tribunaux peuvent être
établis aux armées lorsque celles-ci stationnement ou
opèrent hors du territoire de la République.
L'Assemblée a modifié cet article pour prévoir
l'établissement d'un tribunal aux armées ayant son siège
à Paris, dénommé tribunal aux armées de Paris. Il
convient de noter que ce choix conduit à faire du tribunal aux
armées de Paris une nouvelle juridiction. Formellement, on ne peut dire
que le tribunal des forces armées de Paris, inscrit dans la loi de 1982,
et compétent pour juger les infractions commises par des militaires dans
certains pays africains avec lesquels la France a des accords particuliers,
devient compétent pour toutes les affaires militaires survenues hors du
territoire en temps de paix. Le tribunal aux armées de Paris sera une
nouvelle juridiction dotée d'une compétence plus large que celle
du tribunal des forces armées de Paris.
Approuvant, le choix fait par l'Assemblée nationale, votre commission
vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 3
(article 4 du code de justice
militaire)
Organisation du tribunal aux armées
et cour d'appel
compétente
Cet
article tend à modifier l'article 4 du code de justice militaire.
Dans sa rédaction actuelle, cet article renvoie à un
décret pris sur le rapport du garde des sceaux et du ministre de la
défense, la liste des tribunaux aux armées, le nombre de leurs
chambres de jugement ainsi que les limites territoriales ou maritimes dans
lesquelles s'exerce leur juridiction. Il renvoie à un
arrêté du ministre de la défense la désignation des
autorités militaires habilitées à dénoncer les
infractions ou à donner un avis sur les poursuites éventuelles.
Dans le projet de loi initial, le Gouvernement proposait simplement une
modification rédactionnelle de cet article. Toutefois, le choix de
l'Assemblée nationale de faire du tribunal aux armées de Paris la
seule juridiction militaire compétente en temps de paix a conduit
à une modification importante de l'article 3 du projet.
Le premier paragraphe de l'article 3 tend désormais à
modifier l'article 4 pour prévoir qu'un décret fixe le
nombre de chambres de jugement du tribunal aux armées de Paris, le
ressort dans lequel s'exerce sa juridiction ainsi que la cour d'appel
compétente.
Votre commission ne voit guère l'utilité de renvoyer au
décret la détermination du ressort du tribunal aux armées
de Paris. Celui-ci est compétent pour toutes les infractions relevant de
la justice militaire commises en temps de paix hors du territoire
français, comme le prévoit l'article premier du projet de
loi. De même, cet article premier mentionne que la cour d'appel
compétente est la cour d'appel de Paris, de sorte qu'il est inutile de
renvoyer au décret la détermination de la cour d'appel
compétente. Votre commission vous soumet donc un
amendement
supprimant ces précisions dans le texte proposé pour
l'article 4 du code de justice militaire.
Le second paragraphe tend à compléter l'article 4 du code de
justice militaire par un alinéa précisant que des chambres
détachées du tribunal aux armées de Paris peuvent, en cas
de besoin, être instituées à titre temporaire hors du
territoire de la République, par décret pris sur le rapport
conjoint du garde des sceaux et du ministre de la défense.
Ce paragraphe a été introduit par l'Assemblée nationale
à la demande du Gouvernement, qui a estimé nécessaire que
des chambres détachées puissent être instituées
auprès d'une force établie hors du territoire, compte tenu de la
disparition de la possibilité d'instituer des tribunaux aux
armées. Devant l'Assemblée nationale, Mme Elisabeth Guigou, garde
des sceaux, a notamment estimé : "
Personne (...) ne peut
prévoir ni connaître précisément la nature et la
durée des opérations que l'armée française pourra
un jour être conduite à mener hors du territoire national. Dans
l'intérêt tant d'une bonne administration de la justice -je pense
notamment à la situation des victimes- que de l'efficacité de
notre armée -je pense en particulier à la situation des
témoins- le code de justice militaire doit maintenir la
possibilité de juger sur place les infractions susceptibles d'être
commises à l'occasion de telles opérations
".
Votre commission souscrit à ce raisonnement, estimant utile de conserver
la possibilité que certaines infractions soient jugées sur place,
dans l'hypothèse où des forces françaises devraient
stationner en territoire étranger pendant une longue période.
Elle vous propose d'adopter l'article 3
ainsi modifié.
Article 3 bis
(article 4-1 du code de justice
militaire)
Sort du tribunal aux armées
des forces
stationnées en Allemagne
Cet
article, introduit par l'Assemblée nationale, tend à
insérer un article 4-1 dans le code de justice militaire pour
prévoir que les juridictions des forces armées établies
hors du territoire national en vertu de conventions internationales sont
maintenues et que les infractions relevant de leur compétence sont
instruites et jugées selon les dispositions de l'article 2 du code
de justice militaire. Un décret déterminerait la cour d'appel
compétente.
Cet article vise à prendre en considération l'existence du
tribunal aux armées des forces stationnées en Allemagne, compte
tenu du choix de l'Assemblée nationale de faire du tribunal aux
armées de Paris la juridiction militaire compétente pour
l'ensemble des infractions commises en temps de paix hors du territoire. Ce
tribunal, établi dans le cadre de la convention de Londres du
19 juin 1951, est compétent pour connaître des
infractions commises par les militaires stationnés en Allemagne et les
personnes " à la suite de l'armée " (familles de
militaires et certains civils travaillant pour l'armée). Ce tribunal est
présidé par un conseiller de la cour d'appel de Colmar, la
chambre d'accusation de cette cour exerçant les attributions de chambre
de contrôle de l'instruction.
L'Assemblée nationale a souhaité insérer dans le code de
justice militaire une disposition spécifique relative à ce
tribunal, son rapporteur estimant qu'il n'était pas possible de
préjuger de la disparition des accords internationaux ayant
présidé à la création de ce tribunal.
Toutefois, d'après les informations recueillies par votre rapporteur,
les conventions concernées ne prévoient pas expressément
l'installation d'un tribunal sur le sol allemand, mais la compétence de
juridictions françaises pour connaître des infractions commises
par les membres des forces françaises stationnées en Allemagne et
les personnes à la suite de l'armée. En outre, il
semble que
le Gouvernement ait l'intention de supprimer très prochainement cette
juridiction, pour tenir compte de la réduction progressive de
l'importance des forces armées françaises présentes en
Allemagne
.
Dans ces conditions, votre commission estime préférable que les
dispositions relatives au tribunal aux armées de Baden-Baden,
destinées à être transitoires, figurent à la fin du
projet de loi et non au sein du code de justice militaire. En 1982, des
dispositions transitoires destinées à accompagner la disparition
des tribunaux permanents des forces armées avaient été
inscrites dans la loi n° 82-621 du 21 juillet 1982 relative
à l'instruction et au jugement des infractions en matière
militaire et de sûreté de l'Etat, sans toutefois qu'elles figurent
dans le code de justice militaire. L'exclusion de toute allusion à ce
tribunal dans le code de justice militaire permettra de renforcer
l'unité des dispositions du code.
Votre commission vous propose donc la
suppression
de
l'article 3 bis.
Article 4
(article 5 du code de justice
militaire)
Renvoi des infractions de la compétence des
tribunaux
aux armées au tribunal aux armées de Paris
Dans sa
rédaction actuelle, l'article 5 du code de justice militaire
dispose que lorsqu'un tribunal aux armées n'a pas été
établi auprès d'une force armée qui stationne ou
opère hors du territoire de la République, les affaires relevant
de la justice militaire sont portées devant la juridiction de droit
commun compétente. Il prévoit en outre que lorsqu'un tribunal aux
armées a cessé de fonctionner, les affaires de sa
compétence sont renvoyées à une des juridictions de droit
commun compétente selon les règles prévues à
l'article 662 du code de procédure pénale (cet article rend
compétente la chambre criminelle de la Cour de cassation pour les
renvois d'affaires d'une juridiction à une autre).
L'article 4 du projet de loi tend à modifier cet article 5
pour prévoir le renvoi au tribunal aux armées de Paris des
infractions de la compétence des tribunaux aux armées lorsqu'un
tel tribunal n'a pas été établi avant l'entrée en
vigueur du présent projet de loi. Il prévoit en outre le renvoi
au tribunal aux armées de Paris des infractions relevant de la
compétence d'un tribunal aux armées qui cesserait de fonctionner.
Comme l'article précédent, cet article concerne en fait
exclusivement le tribunal aux armées des forces stationnées en
Allemagne, seul tribunal aux armées existant actuellement. Compte tenu
de la vocation de ce tribunal à disparaître dans un proche
délai, votre commission vous propose d'inscrire ces dispositions sur le
sort des infractions de sa compétence à la fin du présent
projet de loi et non dans le code de justice militaire lui-même.
Elle vous soumet donc un
amendement
tendant à supprimer
l'article 5 du code de justice militaire.
Elle vous propose d'adopter l'article 4
ainsi modifié
.
Article 5
(article 6 du code de justice
militaire)
Composition du tribunal aux armées
Cet
article tend à modifier l'article 6 du code de justice militaire,
relatif à la composition du tribunal aux armées. Dans sa
rédaction actuelle, cet article prévoit que le tribunal est
composé d'un président et de deux assesseurs pour le jugement des
délits et des contraventions, d'un président et de six assesseurs
pour le jugement des crimes. Le jury populaire n'est donc pas prévu en
matière criminelle.
Le texte proposé par le projet de loi prévoit que le tribunal est
composé de son président ou d'un magistrat qu'il
délègue pour le jugement des contraventions. En ce qui concerne
le jugement des délits, le tribunal serait composé d'un
président et de deux assesseurs et d'un seul de ces magistrats dans les
cas prévus par l'article 398-1 du code de procédure
pénale. L'article 398 du code de procédure pénale
prévoit en effet depuis l'entrée en vigueur de la
loi n° 95-125 du 8 février 1995 que certains
délits mentionnés à l'article 398-1 (certaines
violences, les menaces...) sont jugés par un juge unique. Cette
disposition s'appliquerait devant le tribunal aux armées.
Enfin, le texte proposé tend à renvoyer aux articles 698-6
et 698-7 du code de procédure pénale en ce qui concerne la
composition du tribunal lorsqu'il statue en matière criminelle. Ces
articles concernent la composition des cours d'assises
spécialisées compétentes en matière criminelle
à l'égard des militaires pour les infractions commises sur le
territoire de la République dans l'exercice des fonctions. Ces articles
prévoient en particulier que la Cour statue sans jury lorsqu'existe un
risque de divulgation d'un secret de la défense nationale. Il est
effectivement souhaitable de prévoir une disposition similaire pour le
tribunal aux armées de Paris, afin d'un jury puisse être
constitué dans les cas où il n'existe pas de risque de
divulgation d'un secret de la défense nationale.
Toutefois, il ne paraît pas souhaitable de renvoyer simplement au code de
procédure pénale. En effet, il convient de prévoir des
dispositions particulières en ce qui concerne la désignation du
jury et des assesseurs, afin de tenir compte du fait que le tribunal aux
armées sera une juridiction unique ayant son siège à
Paris. Il convient en outre de prévoir l'hypothèse du
détachement d'une chambre du tribunal aux armées auprès
d'une force stationnant ou opérant à l'étranger.
Dans ces conditions, votre commission vous propose, par un
amendement
,
de prévoir l'insertion de dispositions particulières dans
l'article 205 du code de justice militaire que le projet de loi tend
à supprimer et pour lequel votre commission proposera une nouvelle
rédaction après l'article 27 du projet de loi.
Elle vous propose d'adopter l'article 5
ainsi modifié
.
Articles 5 bis à 5
undecies
Coordinations
Ces
articles, introduits par l'Assemblée nationale, ont pour objet de
coordonner, dans un grand nombre d'articles du code de justice militaire, les
choix effectués, notamment en ce qui concerne certaines appellations.
L'Assemblée nationale a en effet décidé que le tribunal
aux armées de Paris serait la seule juridiction militaire
compétente pour les infractions commises en temps de paix hors du
territoire. Elle a décidé en outre de donner à la chambre
de contrôle de l'instruction l'appellation de chambre d'accusation et au
commissaire du Gouvernement celle de procureur de la République afin de
rapprocher la terminologie militaire du droit commun.
Les articles 5 bis à 5 undecies du projet de loi ont pour
objet de prendre en compte ces modifications dans les articles 10, 11, 12,
13, 14, 15, 16, 17, 21, 22, 82, 83, 86, 87 et 90 du code de justice militaire.
L'
article 5 bis
tend à remplacer dans l'article 10
du code de justice militaire, posant le principe de l'existence d'un
commissaire du Gouvernement auprès du tribunal, le terme de commissaire
du Gouvernement par celui de procureur de la République auprès du
tribunal aux armées.
L'
article 5 ter
tend à remplacer la
référence au
" contrôle de l'instruction "
par une référence à la chambre d'accusation dans la
section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre 1
er
du code de justice militaire.
L'
article 5 quater
tend à prendre en compte les
changements de terminologie dans l'article 11 du code de justice
militaire, relatif à la composition de la chambre d'accusation.
Le premier paragraphe de l'
article 5 quinquies
et
l'
article 5 sexies
tendent à opérer des
changements de terminologie dans l'article 12 du code de justice
militaire, qui concerne la présidence et les fonctions du
ministère public au sein de la chambre d'accusation. Le second
paragraphe de l'article 5 quinquies tend à opérer un
changement de terminologie au dernier alinéa de l'article 21 du
code de justice militaire, relatif aux incompatibilités empêchant
de siéger ou de remplir les fonctions de juge d'instruction dans une
affaire soumise au tribunal aux armées.
L'article 5 septies
vise à opérer un changement
de terminologie dans l'article 13 du code de justice militaire qui
dispose, dans sa rédaction actuelle, qu'un décret peut
prévoir que les attributions de la chambre de contrôle de
l'instruction seront exercées, conformément aux dispositions du
présent code, par la chambre d'accusation d'une cour d'appel qu'il
désigne. L'article premier du présent projet de loi tend à
faire du tribunal aux armées de Paris la seule juridiction militaire
compétente pour les infractions commises par des militaires hors du
territoire de la République. Cette juridiction sera dotée d'une
chambre d'accusation. Dans ces conditions, votre commission estime que
l'article 13 du code de justice militaire n'a plus de pertinence. Elle vous
propose, par un
amendement
, de modifier l'article 5 septies
afin de supprimer l'article 13 du code de justice militaire.
L'
article 5 octies
tend à prendre en compte la
décision de confier à une unique juridiction militaire le soin de
connaître des infractions commises en temps de paix hors du territoire de
la République dans les articles 14 (personnels du tribunal aux
armées), 65 et 66 (compétence du tribunal aux armées
à l'égard des auteurs et complices d'infractions) du code de
justice militaire.
L'
article 5 nonies
tend à opérer des
modifications de terminologie dans l'article 15 du code de justice
militaire (affectation par le ministre de la défense des magistrats de
l'instruction ou du parquet, ainsi que des personnels chargés du service
du tribunal aux armées).
L'
article 5 decies
tend également à coordonner
des changements d'appellation dans les articles 16 (fonctions du procureur
de la République auprès du tribunal aux armées), 17
(fonctions du juge d'instruction), 21 (incompatibilités), 82 (officiers
de police judiciaire des forces armées), 83 (agents de police
judiciaire), 86 (rôles de l'officier de police judiciaire et du procureur
de la République en cas de découverte d'un cadavre), 87 (garde
à vue) et 90 (renvoi par le procureur de la République des
affaires ne relevant pas de la juridiction à laquelle il est
attaché). Votre commission a adopté un
amendement
tendant
à corriger une erreur dans le décompte des alinéas.
Enfin, l'
article 5 undecies
tend à remplacer le terme
" juridiction des forces armées "
par celui de
" tribunal aux armées "
dans l'article 22 du
code de justice militaire (serment des officiers et sous-officiers greffiers
ainsi que des sous-officiers huissiers-appariteurs).
Votre commission vous propose d'adopter les articles 5 bis à
5 undecies
ainsi modifiés
.
Article 6
(article 23 du code de justice
militaire)
Défense des personnes justiciables
du tribunal aux
armées
Cet
article tend à modifier l'article 23 du code de justice militaire,
relatif à la défense devant les tribunaux aux armées. Dans
sa rédaction actuelle, cet article prévoit que la défense
est assurée par les avocats inscrits au barreau ou admis en stage, ou
par un militaire agréé par l'autorité militaire. Il
prévoit en outre que les avocats de nationalité
étrangère ne peuvent concourir à la défense devant
ces juridictions, sous réserve des dispositions particulières
prévues par les conventions internationales.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale pose le principe de la
défense par un avocat. La défense par un militaire est toutefois
possible
" si l'éloignement le justifie "
. Dans ce cas,
le militaire serait choisi sur une liste établie par le président
de la juridiction des forces armées.
Il est possible de s'interroger sur l'opportunité de conserver des
dispositions spécifiques en cas d'éloignement, alors même
que le projet de loi tend à faire du tribunal aux armées de Paris
l'unique juridiction militaire en temps de paix. Toutefois, il paraît
nécessaire de conserver la possibilité que la défense soit
assurée par un militaire pour le cas où une chambre
détachée du tribunal aux armées serait instituée
hors du territoire. En outre, il convient de garder à l'esprit que
l'avocat n'intervient pas seulement pendant le procès. Compte tenu de
l'application à la justice militaire des réformes de
procédure pénale intervenues au cours des dernières
années, l'avocat pourra être appelé à intervenir au
cours de la garde à vue. Lorsque celle-ci se déroule loin du
territoire français, il paraît utile qu'un militaire puisse
assurer cette fonction.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 6
sans
modification
.
Article 6 bis
(article 59 du code de justice
militaire)
Compétence du tribunal aux armées
Cet
article, introduit par l'Assemblée nationale, a pour objet
d'améliorer la rédaction de l'article 59 du code de justice
militaire, en particulier pour tenir compte de l'instauration d'une juridiction
militaire unique en temps de paix.
Le texte prévoit que, sous réserve des engagements
internationaux, le tribunal aux armées connaît des infractions de
toute nature commises hors du territoire de la République par les
membres des forces armées ou les personnes à la suite de
l'armée en vertu d'une autorisation.
L'article 59 du code de justice militaire vient donc compléter
l'article 1
er
du même code, qui définissait
déjà la compétence territoriale du tribunal aux
armées, pour mentionner les personnes à l'égard desquelles
cette juridiction est compétente.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 6 ter
(article 64 du code de justice
militaire)
Compétence du tribunal aux armées à
l'égard des mineurs
Cet
article, introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, tend
à tenir compte de l'instauration d'une juridiction militaire unique en
temps de paix dans l'article 64 du code de justice militaire, relatif
à la compétence du tribunal aux armées à
l'égard des mineurs.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 7
(article 67 du code de justice
militaire)
Compétence territoriale des tribunaux aux
armées
Cet
article tend à modifier l'article 67 du code de justice militaire,
relatif à la compétence territoriale des tribunaux aux
armées.
Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit la
compétence des tribunaux :
- du lieu de l'infraction ;
- du lieu de l'affectation ou du débarquement, ou de l'arrestation,
même lorsqu'elle a été opérée pour une autre
cause, de tout auteur ou complice ;
- du lieu le plus proche de la résidence.
Par ailleurs, cet article concerne également le cas où aucun
tribunal aux armées n'a été établi auprès
d'une force armée qui stationne ou opère hors du territoire de la
République. Dans un tel cas, l'article 5 du code, dans sa
rédaction actuelle, prévoit que les affaires relevant de la
justice militaire sont portées devant la juridiction de droit commun
compétente. L'article 67 complète cette disposition en
prévoyant que la juridiction ayant son siège dans le ressort de
la cour d'appel de Paris est compétente à défaut de tout
autre tribunal.
Ces dernières dispositions n'ont plus de pertinence, puisque le projet
de loi tend à faire du tribunal aux armées de Paris la
juridiction compétente pour l'ensemble des infractions commises hors du
territoire en temps de paix sous réserve de la compétence du
tribunal de Baden-Baden. Le projet de loi tend donc à supprimer le
dernier alinéa de l'article 67.
L'Assemblée nationale a modifié le début de cet article
afin de ne conserver des règles de compétence territoriale
spécifiques que pour le tribunal aux armées des forces
françaises stationnées en Allemagne. Toutefois, d'après
les informations recueillies par votre rapporteur, le Gouvernement à
l'intention de supprimer rapidement cette juridiction, dont la
compétence est clairement énoncée dans un décret
n° 82-1122 du 23 décembre 1982, modifié par
un décret n° 95-662 du 9 mai 1995.
Dans ces conditions, votre commission estime que des règles
spécifiques de compétence territoriale n'ont plus lieu
d'être dans le code de justice militaire, le tribunal aux armées
de Paris étant appelé à être compétent pour
l'ensemble des infractions commises par des militaires en temps de paix hors du
territoire de la République
. Elle vous propose donc de modifier
l'article 7 du projet de loi afin de prévoir la suppression de
l'article 67 du code de justice militaire.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 7
ainsi
modifié
.
Article 8
(article 76 du code de justice
militaire)
Adaptation du code de justice militaire au code de
procédure pénale
en matière de renvoi d'une juridiction
à une autre
Cet
article a pour objet de modifier l'article 76 du code de justice militaire
afin de rendre applicables une partie des dispositions de l'article 665 du
code de procédure pénale, relatif au renvoi d'une affaire d'une
juridiction à une autre.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 76 du code de justice
militaire renvoie, en cas d'établissement postérieurement
à l'ouverture des poursuites d'un justiciable hors du ressort de la
juridiction saisie, à l'article 662 du code de procédure
pénale, dans sa rédaction antérieure à la loi
n° 93-2 du 4 janvier 1993. L'article 662 ancien du
code de procédure pénale traitait du renvoi d'une juridiction
à une autre dans trois situations (impossibilité de composer
légalement la juridiction compétente, interruption du cours de la
justice pour d'autres motifs ou suspicion légitime). Le cas d'un
justiciable ayant établi sa résidence hors du ressort de la
juridiction était donc couvert par cet article.
Depuis la loi du 4 janvier 1993, l'article 662 du code de
procédure pénale ne concerne plus que le renvoi d'une affaire
pour suspicion légitime. L'article 665 du code traite
désormais des renvois dans l'intérêt d'une bonne
administration de la justice.
Le projet de loi tend donc à modifier
l'article 76 du code de justice militaire, afin qu'il renvoie
désormais aux deuxième, troisième et quatrième
alinéas de l'article 665 du code de procédure
pénale
.
Le deuxième alinéa de cet article prévoit que le renvoi
peut être ordonné par la chambre criminelle de la Cour de
cassation, soit sur requête du procureur général
près cette cour, soit sur requête du procureur
général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle
la juridiction saisie a son siège, agissant à l'initiative ou sur
demande des parties.
Le troisième alinéa concerne la possibilité de recours
contre la décision de la chambre criminelle. Le projet de loi initial ne
prévoyait pas l'application de cet alinéa aux justiciables
militaires, mais l'Assemblée nationale a souhaité qu'ils puissent
former un recours. Enfin, le quatrième alinéa prévoit que
la chambre criminelle statue dans les huit jours de la requête.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 9
(article 80 du code de justice
militaire)
Adaptation du code de justice militaire
au code de
procédure pénale
Cet
article tend à apporter des modifications rédactionnelles
à l'article 80 du code de justice militaire, relatives aux
prérogatives du procureur de la République près le
tribunal aux armées.
Il permettra en outre d'étendre aux justiciables militaires les
règles applicables en matière de procédure pénale
pour la restitution des objets saisis.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 10
(article 82 du code de justice
militaire)
Officiers de police judiciaire des forces armées
Cet
article a pour objet de modifier l'article 82 du code de justice
militaire, relatif aux officiers de police judiciaire des forces armées.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 82 prévoit notamment
que les officiers de police judiciaire des forces armées peuvent
procéder, soit sur instructions du commissaire du Gouvernement au cours
d'une enquête de flagrance, soit sur commission rogatoire expresse du
juge d'instruction, aux opérations prescrites par ces autorités
en tous lieux qui leur sont désignés.
A l'avenir, cette possibilité serait ouverte aux officiers de police
judiciaire des forces armées en cas d'enquête préliminaire.
Cette possibilité existe déjà pour les officiers de police
judiciaire n'appartenant pas aux forces armées, qui peuvent, dans
certaines situations, procéder à des opérations sur tout
le territoire national.
Compte tenu de la décision de faire du tribunal aux armées de
Paris la seule juridiction compétente pour les infractions commises hors
du territoire de la République en temps de paix, votre rapporteur vous
propose de modifier, par un
amendement,
l'article 10 du projet pour
supprimer la possibilité pour les officiers de police judiciaire
d'opérer, en cas d'urgence, dans tout le ressort de la juridiction des
forces armées à laquelle ils sont rattachés. En effet, le
ressort du tribunal aux armées couvre en fait le monde entier à
l'exception du territoire national.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 10
ainsi
modifié
.
Article 11
(article 88 du code de justice
militaire)
Présentation à l'autorité judiciaire des
personnes
appréhendées en raison d'un crime ou délit
flagrant
Cet
article tend à modifier l'article 88 du code de justice militaire,
qui prévoit la nécessité de présenter dans les
meilleurs délais à l'autorité judiciaire les personnes
appréhendées en raison d'un crime ou délit flagrant ou
contre lesquelles il existe des indices graves, pour remplacer le mot
" inculpation "
par celui de
" mise en
examen "
. Il s'agit de l'une des conséquences du premier
objectif du projet de loi, qui consiste à appliquer aux
procédures de la compétence des juridictions militaires les
dispositions de la loi du 4 janvier 1993 portant réforme de la
procédure pénale.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification.
Article 12
(article 89 du code de justice
militaire)
Dépôt dans un local disciplinaire
des
militaires appréhendés
Cet
article tend à supprimer l'article 89 du code de justice militaire,
qui prévoit dans sa rédaction actuelle que les militaires
appréhendés peuvent être déposés dans un
local disciplinaire, dans l'attente d'une éventuelle décision de
poursuite.
Il s'agit là d'une des spécificités de la justice
militaire qui subsistent aujourd'hui, sans nécessité apparente,
au moins en temps de paix. La suppression de cette disposition apparaît
bienvenue.
Plus généralement, toutes les dispositions du code de
procédure pénale relatives à la garde à vue, telle
qu'elles ont été modifiées depuis 1993 seront applicables
aux justiciables du tribunal aux armées de Paris. Ainsi, le délai
de la garde à vue ne pourra excéder quarante-huit heures
(article 63 du code de procédure pénale), toute personne
placée en garde à vue pourra faire prévenir un proche par
téléphone (article 63-2 du code de procédure
pénale), elle pourra demander à être examinée par un
médecin (article 63-3), enfin, elle pourra demander à
s'entretenir avec un avocat lorsque vingt heures se seront
écoulées depuis le début de la garde à vue.
Il s'agit là de garanties importantes et il est tout à fait
légitime qu'elles s'appliquent aux justiciables du tribunal aux
armées de Paris, d'autant plus que les militaires
bénéficient déjà de ces garanties pour les
infractions commises sur le territoire de la République.
Dorénavant, toutes les réformes de procédure pénale
seront, sauf dispositions contraires, applicables en matière de justice
militaire. Le Gouvernement a déposé plusieurs projets de loi
tendant à modifier le code de procédure pénale et il
serait intéressant de savoir si les mesures prévues
s'appliqueront, dans l'hypothèse de l'adoption des projets de loi,
à la justice militaire ou si des dérogations sont
envisagées. Le Gouvernement propose ainsi, dans son projet de loi
renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes,
de permettre à une personne gardée à vue de s'entretenir
avec un avocat dès la première heure de la garde à vue.
Devant l'Assemblée nationale, le Garde des Sceaux a fait part de son
intention de ne prévoir aucune dérogation en ce qui concerne les
justiciables militaires en ce domaine.
En définitive, fort peu de spécificités sont
appelées à perdurer en ce qui concerne la garde à vue.
L'article 88 du code de justice militaire prévoit l'information des
supérieurs hiérarchiques d'un militaire lorsqu'il fait l'objet
d'un transfèrement pour être présenté à
l'autorité judiciaire compétente.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 12
sans
modification
.
Article 13
(article 91 du code de justice
militaire)
Action civile et mise en mouvement de l'action publique
Cet
article tend à modifier l'article 91 du code de justice militaire,
relatif à la mise en mouvement de l'action publique.
Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que l'action
civile en réparation du dommage causé par les infractions de la
compétence du tribunal aux armées appartient à ceux qui
ont personnellement souffert de l'infraction. Cet article prévoit en
outre, en vertu de la loi n° 92-1336 du
16 décembre 1992, que la partie lésée ne peut
mettre en mouvement l'action publique sauf en cas de décès, de
mutilation ou d'infirmité permanente. Auparavant, la partie
lésée ne pouvait en aucun cas mettre en mouvement l'action
publique.
L'article 13 du projet tend à remplacer la mention explicite de ces
règles par un renvoi aux règles applicables devant les
juridictions mentionnées à l'article 697 du code de
procédure pénale, à savoir les juridictions de droit
commun spécialisées en matière militaire.
Actuellement, ces règles sont entièrement identiques à
celles posées dans l'article 91 du code de justice militaire.
Toutefois, le projet de loi tend à modifier ces règles. Les
modifications proposées seront examinées sous l'article 45
du projet de loi.
En définitive, l'article 13 tend à marquer la
proximité des règles applicables sur le territoire national et
hors du territoire national en temps de paix.
Votre commission vous soumet un
amendement
rédactionnel
destiné à marquer que le droit applicable sera désormais
le code de procédure pénale, sous réserve de dispositions
particulières, et vous propose d'adopter l'article 13
ainsi
modifié
.
Article 14
(article 92 du code de justice
militaire)
Pouvoir de dénoncer l'infraction
ou de donner un
avis sur les poursuites éventuelles
L'article 14 tend à supprimer l'article 92 du
code
de justice militaire, qui prévoit, dans sa rédaction actuelle,
que le pouvoir de dénoncer l'infraction ou de donner un avis sur les
poursuites éventuelles appartient au ministre chargé de la
défense.
Cet article tend en fait à tirer les conséquences du
précédent, qui renvoie à la procédure applicable
devant les juridictions mentionnées à l'article 697 du code
de procédure pénale, compétentes pour les infractions
commises sur le territoire national. Il ne s'agit donc pas de la disparition de
tout pouvoir de dénonciation ou d'avis du ministre de la défense,
mais d'un renvoi aux dispositions du code de procédure pénale
relatives à la procédure suivie devant les chambres
spécialisées en matière militaire des juridictions
ordinaires.
L'article 698-1 du code de procédure pénale prévoit
que le procureur de la République apprécie la suite à
donner aux faits portés à sa connaissance, notamment par la
dénonciation du ministre chargé de la défense ou de
l'autorité militaire habilitée par lui. Il prévoit en
outre qu'à défaut de cette dénonciation, le procureur de
la République doit demander préalablement à tout acte de
poursuite, sauf en cas de crime ou de délit flagrant, l'avis du ministre
chargé de la défense ou de l'autorité militaire
habilitée par lui.
L'article 14 du projet tend donc à rapprocher les règles
relatives à l'action publique en matière militaire de celles
applicables en droit commun.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 15
(article 95 du code de justice
militaire)
Poursuites à l'encontre des maréchaux et amiraux
de France,
des officiers généraux ou assimilés et des
membres du
contrôle général des armées, ainsi que
des magistrats
du corps judiciaire détachés
Cet
article a pour objet de supprimer l'article 95 du code de justice
militaire. Actuellement cet article prévoit que les poursuites à
l'encontre des maréchaux et amiraux de France, des officiers
généraux ou assimilés et des membres du contrôle
général des armées ne peuvent être ouvertes que sur
la dénonciation ou après avis du ministre chargé de la
défense. Cela implique que toute mise en mouvement de l'action publique
par la partie lésée est exclue, que la seule autorité
compétente pour dénoncer l'infraction ou donner un avis est le
ministre de la défense, qu'enfin l'intervention de cette
dénonciation ou de cet avis est indispensable, même en cas de
crime ou de délit flagrant.
L'article 95 prévoit par ailleurs l'avis du garde des sceaux
préalablement aux poursuites contre les magistrats du corps judiciaire
détachés. Le projet de loi initial tendait simplement à
apporter une modification rédactionnelle à cet article pour
supprimer un renvoi à des dispositions du code de procédure
pénale abrogées, mais l'Assemblée nationale a
décidé sa suppression.
Elle a estimé, suivant le raisonnement de son rapporteur, que le niveau
hiérarchique ne justifiait pas le renforcement de la
spécificité de la justice militaire et que le maintien d'une
forme de privilège de juridiction pour certains magistrats allait
à l'encontre des récentes réformes du code de
procédure pénale.
Votre commission approuve l'abrogation de l'article 95 du code de justice
militaire, qui ne semble plus conserver de justification aujourd'hui et elle
vous propose d'adopter l'article 15
sans modification
.
Article 16
(articles 96, 97, 98 et 100 du
code
de justice militaire)
Abrogation de dispositions du code de justice
militaire
Cet
article tend à abroger quatre articles du code de justice militaire,
relatifs aux prérogatives du commissaire du Gouvernement dans la mise en
mouvement de l'action publique. Cette suppression est la conséquence
logique de la décision d'appliquer à la justice militaire les
règles prévues dans le code de procédure pénale.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 17
(article 101 du code de justice
militaire)
Instruction des infractions relevant
de la
compétence du tribunal aux armées
Cet
article tend à modifier l'article 101 du code de justice militaire
pour prévoir, comme pour la mise en mouvement de l'action publique, la
mise en oeuvre, pour l'instruction des infractions relevant de la
compétence du tribunal aux armées, des dispositions applicables
devant les juridictions mentionnées à l'article 697 du code
de procédure pénale, à savoir les juridictions de droit
commun spécialisées en matière militaire.
Seules quelques règles particulières relatives aux citations de
témoins (article 109 du code de justice militaire), au choix des
experts (article 110) et aux mandats d'arrêt, d'amener et de
dépôt (articles 111 et 112) seraient conservées.
Votre commission vous propose, par un
amendement
rédactionnel, de
mieux marquer que le droit applicable sera désormais le droit commun,
sous réserve de quelques dispositions particulières. Elle vous
propose d'adopter l'article 17
ainsi modifié
.
Article 18
(articles 102 à 108 du
code de
justice militaire)
Abrogation de dispositions du code de justice
militaire
relatives à l'instruction
Cet
article tend à abroger les articles 102 à 108 du code de
justice militaire, prévoyant certaines dispositions particulières
pour l'instruction des affaires relevant de la compétence des
juridictions des forces armées.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 19
(article 112 du code de justice
militaire)
Personne recherchée trouvée à plus de
200 km
du siège du juge d'instruction ayant
délivré le mandat
Cet
article tend à modifier l'article 112 du code de justice militaire,
relatif aux règles applicables lorsqu'une personne recherchée est
trouvée à plus de 200 km du siège du juge
d'instruction qui a délivré le mandat, pour tenir compte de
l'application de la loi du 4 janvier 1993 ayant remplacé
l'inculpation par la mise en examen. L'assemblée nationale a en outre
apporté des modifications rédactionnelles à cet article.
Il convient de noter que l'article 112 du code de justice militaire, tel
que modifié par le projet de loi, prévoit qu'une personne
recherchée en vertu d'un mandat d'amener ou d'un mandat d'arrêt
peut être conduite devant le procureur de la République du lieu de
l'arrestation ou devant le procureur de la République du tribunal aux
armées de Paris si celui-ci est plus proche. Cette rédaction
résulte de la décision de l'Assemblée nationale de faire
du tribunal aux armées de Paris la seule juridiction militaire
compétente pour les infractions commises en temps de paix hors du
territoire de la République. Toutefois, à 200 km de Paris,
le procureur près le tribunal aux armées de Paris ne peut en
aucun cas être plus proche que le procureur du lieu de l'arrestation.
Votre commission vous propose donc de supprimer par un
amendement
la
possibilité de conduire une personne recherchée en vertu d'un
mandat d'amener ou d'un mandat d'arrêt devant
" le procureur de
la République près le tribunal aux armées de Paris si
celui-ci est plus proche "
.
Elle vous propose d'adopter l'article 19
ainsi modifié
.
Article 20
(articles 113 à 130 du
code de
justice militaire)
Abrogation de règles spécifiques
à la justice militaire
en matière d'instruction
préparatoire
Cet
article tend à abroger un grand nombre de règles
spécifiques à la justice militaire en ce qui concerne
l'instruction préparatoire, le principe étant désormais
l'application du code de procédure pénale, sous réserve du
maintien de quelques dispositions particulières.
La commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 21
(article 131 du code de justice
militaire)
Règles relatives à la détention
provisoire
Cet
article tend à modifier l'article 131 du code de justice militaire
pour prévoir l'application à la justice militaire des
règles sur la détention provisoire figurant dans le code de
procédure pénale, sous réserve de deux dispositions
particulières. En effet, l'article 135 du code de justice militaire
prévoit la détention séparée des militaires, qu'ils
soient condamnés ou en détention provisoire, tandis que
l'article 137 du même code prévoit l'inapplicabilité
aux militaires, sous certaines réserves, du contrôle judiciaire.
La démarche retenue en matière de détention provisoire est
donc identique à celle prévue pour la mise en mouvement de
l'action publique et les règles relatives à l'instruction,
à savoir un renvoi aux règles du code de procédure
pénale, sous réserve de dispositions particulières.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 22
(articles 132 à 134 du
code de
justice militaire)
Abrogation de dispositions
particulières
relatives à la détention provisoire
Cet
article tend à abroger les articles 132 à 134 du code de
justice militaire, qui contenaient des dispositions spécifiques en
matière de détention provisoire. Il s'agit d'une
conséquence logique de la décision de renvoyer aux règles
du code de procédure pénale.
Votre commission vous proposer d'adopter cet article
sans modification
.
Article 23
(article 135 du code de justice
militaire)
Détention séparée des militaires
Le
projet de loi prévoit le maintien d'une des spécificités
de la justice militaire, à savoir le principe de la détention
séparée des militaires, inscrit à l'article 135 du
code de justice militaire. Toutefois, l'article 23 du projet de loi tend
à apporter une modification rédactionnelle à cet
article 135, pour tenir compte de l'abrogation des articles 130
à 134 dans leur rédaction actuelle, relatifs à l'ordre
d'incarcération provisoire.
L'article 135 continuerait cependant à prévoir, en
matière de détention provisoire, la détention dans un
quartier spécial des militaires détenus en maison d'arrêt
ou leur détention dans une prison prévôtale ou enfin leur
détention dans un établissement militaire désigné
par l'autorité militaire.
La commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 24
(articles 136,137,138 à
150 du
code de justice militaire)
Abrogation de dispositions spécifiques
à la justice militaire
en matière de détention
provisoire
Cet
article, comme l'article 22, tend à abroger des dispositions de
code de justice militaire comportant des règles spécifiques en
matière de détention provisoire. Il s'agit d'une
conséquence logique de la décision de renvoi au code de
procédure pénale.
En ce qui concerne l'article 137 du code de justice militaire, seuls les
quatre derniers alinéas seraient supprimés. Le premier
alinéa de cet article dispose de manière générale
que le contrôle judiciaire prévu par le code de procédure
pénale n'est pas applicable aux militaires et assimilés.
Les deuxième à cinquième alinéas de cet article
posent une exception à ce principe en prévoyant que le
contrôle judiciaire peut être appliqué aux militaires et
assimilés qui ont été rendus à la vie civile depuis
la date de l'infraction ainsi qu'aux personnes étrangères aux
armées et justiciables des juridictions militaires, sous certaines
conditions.
L'absence de contrôle judiciaire pour les militaires est
justifiée par le fait que les obligations imposées dans le cadre
de cette institution risquent de
gêner l'accomplissement du
service, alors que l'autorité militaire dispose de moyens de
contrôle suffisants sous forme des obligations de ce service.
Toutefois, il est difficile de percevoir la raison qui conduit à
supprimer l'exception à cette absence de contrôle judiciaire,
actuellement prévue par le deuxième alinéa de
l'article 137 du code de justice militaire. Il ne paraît pas anormal
que les militaires rendus à la vie civile depuis la date de l'infraction
et les personnes étrangères aux armées et justiciables du
tribunal aux armées puissent faire l'objet d'un contrôle
judiciaire. Votre commission vous propose donc, par un
amendement,
de
maintenir l'exception à l'absence de contrôle judiciaire
prévue au deuxième alinéa de l'article 137 du code de
justice militaire.
Elle vous propose d'adopter l'article 24
ainsi modifié
.
Article 25
(article 151 du code de justice
militaire)
Règles applicables à la chambre d'accusation
Cet
article tend à modifier l'intitulé du paragraphe 3 de la
section 3 du chapitre premier du titre premier du livre
deuxième du code de justice militaire, actuellement intitulé
"
de la chambre de contrôle de l'instruction
" pour
tenir compte de la décision prévu par l'Assemblée
nationale de retenir l'appellation de chambre d'accusation.
Cet article tend en outre à remplacer l'article 151,
définissant actuellement les conditions dans lesquelles peut être
saisie la chambre de contrôle de l'instruction, afin de prévoir
que les règles applicables à la chambre d'accusation sont celles
" relatives à la chambre d'accusation mentionnée au
deuxième alinéa de l'article 698-7 du code de
procédure pénale "
.
Le choix de cette expression ne paraît guère adapté. En
fait, ce nouvel article 151 est appelé à remplacer quatorze
articles du code de justice militaire, qui prévoient des règles
de fonctionnement spécifiques pour la chambre de contrôle de
l'instruction. L'objectif est d'appliquer les règles du code de
procédure pénale. Or, l'article 698-7 du code de
procédure pénale ne concerne que la possibilité pour la
chambre d'accusation, dans les affaires relevant des cours d'assises
chargées de juger les crimes militaires et les crimes commis dans
l'exécution du service par des militaires, d'ordonner que la cour
d'assises saisie soit composée sans jury populaire lorsqu'il existe un
risque de divulgation d'un secret de la défense nationale. Il s'agit
donc d'une particularité du rôle de la chambre d'accusation
lorsque sont en cause des militaires.
Votre commission vous propose donc par un
amendement
de prévoir
dans le code de justice militaire que
" les règles applicables
à la chambre d'accusation sont celles prévues par le code de
procédure pénale "
. Une telle rédaction fait
mieux apparaître le rapprochement du droit commun que tend à
opérer le projet de loi.
Il convient par ailleurs de souligner que, dans le projet de loi initial, le
Gouvernement avait proposé d'inscrire ces dispositions dans l'actuel
article 150 et de faire disparaître la division
spécifiquement consacrée à la chambre de contrôle de
l'instruction. Le choix de l'Assemblée nationale de déplacer ce
texte à l'article 151 et de maintenir un paragraphe consacré
désormais à la chambre d'accusation est plus clair et
mérite d'être approuvé.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
Article 26
(articles 152 à 164 du
code de
justice militaire)
Abrogation de règles spécifiques
relatives à la chambre de contrôle de l'instruction -
Réouverture de l'information sur charges nouvelles
Cet
article a tout d'abord pour objet de supprimer les articles 152 à
164 du code de justice militaire qui, dans leur rédaction actuelle,
définissent des règles spécifiques relatives au
fonctionnement de la chambre de contrôle de l'instruction.
Ces articles seraient remplacés par un nouveau paragraphe
intitulé "
de la réouverture de l'information sur charges
nouvelles "
qui comporterait un unique article numéroté
152. Le texte proposé pour cet article figure actuellement dans
l'article 161 du code de justice militaire et prévoit que
lorsqu'une décision de non lieu a été rendue par le juge
d'instruction ou la chambre d'accusation, il appartient au ministre de la
défense ou aux autorités militaires désignées par
arrêté ministériel de dénoncer d'éventuelles
charges nouvelles. Le texte dispose en outre que le procureur, s'il envisage de
requérir la réouverture de l'information, en l'absence de
dénonciation, doit recueillir l'avis du ministre de la défense ou
des autorités militaires. La dénonciation ou l'avis est
classé au dossier de la procédure.
En droit commun, la reprise de l'information sur charges nouvelles fait l'objet
de la section XIII du titre III du livre premier du code de
procédure pénale. L'article 189 du code de procédure
pénale auquel renvoie le texte proposé pour l'article 152 du
code de justice militaire dispose que les charges nouvelles sont notamment les
déclarations des témoins, pièces et procès-verbaux
de nature à fortifier les charges qui auraient été
trouvées trop faibles. Par ailleurs, l'article 190 du code de
procédure pénale prévoit qu'il appartient au
ministère public seul de décider s'il y a lieu de requérir
la réouverture de l'information sur charges nouvelles.
Il est possible de s'interroger sur ce nouvel avis que doit donner le ministre
de la défense ou l'autorité militaire sur la réouverture
de l'information, dans la mesure où un tel avis est prévu pour
les infractions commises hors du territoire de la République mais non
pour les infractions commises sur le territoire de celle-ci. Toutefois, il faut
noter que les infractions commises hors du territoire le sont dans un contexte
plus difficile à appréhender par le procureur de la
République et que ces infractions peuvent, lorsque des forces sont en
opérations à l'étranger, présenter des
particularités, susceptibles de justifier ce nouvel avis du ministre en
cas de réouverture de l'information.
Votre commission vous propose, en conséquence, d'adopter
l'article 26
sans modification
.
Article 27
(articles 202 à 204 du
code de
justice militaire)
Procédure devant les juridictions de
jugement
Actuellement, en ce qui concerne la procédure devant les
juridictions de jugement, l'article 202 du code de justice militaire renvoie
aux articles 211 à 262, relatifs à la procédure applicable
en temps de guerre, sous réserve de quelques dispositions
particulières figurant dans les articles 203 à 210.
L'article 27 du projet de loi tend à modifier entièrement cette
situation, en modifiant les articles 202 à 204 pour prévoir
l'application des règles de droit commun prévues dans le code de
procédure pénale.
Ainsi, le texte proposé pour l'article 202 du code de justice militaire
prévoit que les infractions de la compétence du tribunal aux
armées sont jugées selon les règles suivies devant les
juridictions mentionnées à l'article 697 du code de
procédure pénale. Dans la mesure où, devant ces
juridictions, le droit commun est applicable, sous réserve de quelques
particularités, votre commission vous propose, par un
amendement
rédactionnel, de marquer plus clairement dans le texte proposé
pour les articles 202 et 203, comme dans d'autres articles, que le
principe sera désormais l'application de la procédure de droit
commun. Ce renvoi au code de procédure pénale en matière
de jugement des affaires aura notamment pour effet de permettre le jugement de
certains délits par un juge unique comme le prévoit l'article 398
du code de procédure pénale depuis l'entrée en vigueur de
la loi n°95-125 du 8 février 1995. Cela concerne notamment les
atteintes involontaires à l'intégrité de la personne, les
violences et les menaces.
Le texte proposé pour l'article 203 du code de justice militaire est une
innovation importante puisqu'il tend à prévoir l'appel des
jugements rendus par le tribunal aux armées de Paris dans les conditions
du droit commun. L'absence d'appel des jugements des juridictions militaires
constituait l'une des particularités les moins acceptables figurant
encore dans le code de justice militaire et il faut approuver la disparition
d'une spécificité sans doute contraire à la Convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
Enfin, le texte proposé pour l'article 204 du code de justice
militaire tend à prévoir la possibilité d'annulation d'une
condamnation contre un insoumis ou un déserteur lorsque la preuve est
faite que le condamné défaillant n'était pas en
état d'insoumission ou de désertion. Actuellement, cette
règle figure dans l'article 302 du code de justice militaire. Votre
commission vous propose d'apporter une modification rédactionnelle
à cet article, afin de supprimer des renvois à d'autres articles
du code de justice militaire, qui apparaissent sans intérêt.
Elle vous propose d'adopter l'article 27
ainsi modifié
.
Article additionnel après
l'article 27
(article 205 du code de justice
militaire)
Composition du tribunal aux armées pour le jugement des
crimes
Votre
commission vous propose, par un
amendement
, d'insérer un article
additionnel après l'article 27, afin de prévoir des
dispositions particulières pour le jugement des crimes par le tribunal
aux armées.
L'Assemblée nationale avait décidé d'opérer un
renvoi aux articles 698-6 et 698-7 du code de procédure
pénale relatifs à la composition des cours d'assises
spécialisées en matière militaire. Ces articles
prévoient notamment que, pour les infractions militaires et les
infractions de droit commun commises dans l'exécution du service,
lorsqu'il existe un risque de divulgation d'un secret de la défense
nationale, la cour est composée sans jury et comprend donc un
président et six assesseurs.
Il paraît souhaitable de prévoir les mêmes dispositions
s'agissant du tribunal aux armées. En revanche, il convient de
prévoir des dispositions spécifiques pour les cas où le
tribunal aux armées statuera avec un jury. Le tribunal aux armées
étant appelé à être une juridiction unique, sise
à Paris, le jury sera tiré au sort sur la liste annuelle
établie pour la Cour d'assises de Paris. En ce qui concerne le
président et les assesseurs, ils seront choisis parmi les juges du
tribunal aux armées.
Enfin, en cas de détachement d'une chambre du tribunal aux armées
de Paris hors du territoire, les crimes seront jugés par un
président et six assesseurs, dans la mesure où l'on ne voit
guère de possibilité de constituer un jury dans ce cas.
Article 28
(articles 205 à 210 du
code de
justice militaire)
Abrogation de dispositions spécifiques à
la justice militaire
en ce qui concerne le jugement des affaires
Cet
article tend à tirer les conséquences du renvoi au code de
procédure pénale en ce qui concerne les règles applicables
au jugement des affaires.
Il a en effet pour objet d'abroger les articles 205 à 210 du code
de justice militaire, qui ont notamment pour fonction de prévoir quelles
dispositions applicables en temps de guerre ne s'appliquent pas en temps de
paix. Curieusement en effet, pour le jugement des affaires, les dispositions
actuelles du code de justice militaire relatives à la procédure
applicable en temps de paix renvoient aux dispositions applicables en temps de
guerre, à quelques réserves près.
Votre commission vous soumet un
amendement
de coordination et vous
propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.
Article 29
(article 263 du code de justice
militaire)
Pourvoi en cassation
Cet
article tend à modifier l'article 263 du code de justice militaire
relatif au pourvoi en cassation. Cet article, dans sa rédaction
actuelle, prévoit que les jugements rendus par les juridictions des
forces armées peuvent être attaqués par la voie du pourvoi
devant la cour de cassation dans les conditions prévues par le code de
procédure pénale, sous réserve de dispositions
spécifiques prévues aux articles 264 à 271 du code de
justice militaire.
Il convient de noter que cet article, dans sa rédaction actuelle, est
applicable à tout moment, soit en temps de guerre ou en temps de paix.
Le texte proposé tend à renvoyer sans réserve aux
dispositions du code de procédure pénale en ce qui concerne les
règles relatives au pourvoi en cassation applicables aux jugements
rendus en dernier ressort par les juridictions des forces armées en
temps de paix. L'Assemblée nationale a souhaité que la mention du
temps de paix figure expressément dans cet article. Toutefois, quelle
que soit la rédaction choisie, il n'a vocation à s'appliquer
qu'en temps de paix, puisque le projet de loi tend à rendre applicable
le code de justice militaire issu de la loi n° 82-621 du
21 juillet 1982 en temps de guerre. On mesure ici les
ambiguïtés que peut provoquer le choix fait par le Gouvernement de
n'apporter aucune modification au droit applicable en temps de guerre,
même pour opérer une codification à droit constant.
Votre commission vous propose, par un
amendement
, de faire
référence au tribunal aux armées de Paris plutôt
qu'aux juridictions des forces armées en temps de paix pour tenir compte
de la décision de faire de ce tribunal la seule juridiction militaire en
temps de paix.
Elle vous propose d'adopter l'article 29
ainsi modifié
.
Article 30
(articles 264 à 271 du
code de
justice militaire)
Abrogation de dispositions spécifiques à
la justice militaire
en ce qui concerne le pourvoi en cassation
Cet
article vise à tirer les conséquences du renvoi sans
réserve au code de procédure pénale en ce qui concerne les
règles applicables pour le pourvoi en cassation, puisqu'il tend à
supprimer toutes les dispositions spécifiques inscrites dans les
articles 264 à 271 du code de justice militaire.
Ces spécificités continueront d'être applicables en temps
de guerre puisque le code de justice militaire applicable pendant cette
période sera celui issu de la loi n° 82-621 du
21 juillet 1982.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 31
(article 273 du code de justice
militaire)
Demande en révision
Comme
pour le pourvoi en cassation, cet article tend à modifier
l'article 273 du code de justice militaire pour prévoir
l'application sans réserve des dispositions du code de procédure
pénale en ce qui concerne les demandes en révision. Dans sa
rédaction actuelle, cet article prévoit l'application des
règles du code de procédure pénale sous réserve des
dispositions des articles 274 et 275 du code de justice militaire.
Votre commission vous propose d'adopter un
amendement
de coordination et
vous propose d'adopter l'article 31
ainsi modifié
.
Article 32
(articles 274 et 275 du code de
justice militaire)
Abrogation de dispositions spécifiques à
la justice
militaire en ce qui concerne les demandes en révision
Cet
article tire les conséquences du précédent et tend
à supprimer les dispositions particulières du code de justice
militaire relatives aux demandes en révision.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 32 bis
Citations et
significations
Cet
article, inséré par l'Assemblée nationale, tend à
modifier l'intitulé du titre quatrième du livre deuxième
du code de justice militaire, afin que celui-ci ne mentionne plus les
assignations, mais seulement les citations et notifications. En effet, le terme
d'assignations ne figure plus dans le code de procédure pénale.
Cet article tend à apporter la même modification dans
l'article 276 du code de justice militaire. Cet article prévoit des
règles simplifiées pour les citations et notifications par
rapport à celles prévues par le code de procédure
pénale puisque ces citations et notifications sont faites, sans frais,
"
soit par les greffiers et les huissiers-appariteurs, soit par tous
les agents de la force publique
". Le droit commun prévoit que
les citations et significations sont faites par exploit d'huissier de justice
(article 550 du code de procédure pénale).
Votre commission vous propose un
amendement
de coordination et vous
soumet l'article 32 bis ainsi modifié.
Article 33
(article 277 du code de justice
militaire)
Citations et significations
Cet
article tend à remplacer l'actuel article 277 du code de justice
militaire relatif au contenu de la citation à comparaître
délivrée au prévenu par une disposition prévoyant
l'application des dispositions du code de procédure pénale
relatives aux citations et significations, sous réserve de dispositions
particulières qui continueront de figurer au titre quatrième du
livre deuxième du code de justice militaire relatif aux citations et
notifications. En fait, les seules dispositions dérogatoires
appelées à subsister sont celles inscrites aux articles 276
et 283 du code de justice militaire.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification.
Article 34
(articles 278 à 282, 284 et 285 du
code
de justice militaire)
Abrogation de dispositions spécifiques
à la justice militaire
en ce qui concerne les citations et
notifications
L'article 33 ayant prévu de renvoyer aux
dispositions du
code de procédure pénale en ce qui concerne les citations et
notifications, cet article tend à abroger sept articles du code de
justice militaire contenant des prescriptions particulières en ces
matières.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 35
(chapitres I
er
à IV du
titre
V du livre II du code de justice militaire)
Abrogation de dispositions du
code de justice militaire
Cet
article a pour objet de supprimer quatre chapitres du code de justice militaire
relatifs à certaines procédures particulières. Il s'agit
de dispositions respectivement relatives :
- aux jugements par défaut ou d'itératif défaut ;
- au séquestre et à la confiscation des biens ;
- à la reconnaissance d'identité d'un condamné ;
- aux règlements de juges et aux renvois d'un tribunal à un autre
tribunal.
La suppression de ces dispositions aura pour conséquence l'application
des dispositions de droit commun figurant dans le code de procédure
pénale. Ainsi s'appliqueront en particulier de plein droit à la
justice militaire les articles 662 à 667 du code de procédure
pénale, relatifs aux renvois d'un tribunal à un autre, de
même que les articles 657 à 661 relatifs aux règlements de
juges et les articles 487 à 494-1 sur le jugement par défaut. En
revanche, la confiscation des biens n'est prévue dans le code de
procédure pénale que dans le cadre de la procédure de
contumace (article 639). La confiscation de biens ne pourra donc plus
être appliquée aux militaires, sauf dans le cadre de la
procédure de contumace.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 36
(article 345 du code de justice
militaire)
Renvoi au code de procédure pénale
pour
l'exécution des jugements
Dans sa
rédaction actuelle, l'article 345 du code de procédure
pénale prévoit l'exécution du jugement dans les
vingt-quatre heures suivant l'expiration du délai fixé par le
pourvoi.
Cet article serait remplacé par une disposition prévoyant
l'exécution des jugements dans les conditions prévues par le code
de procédure pénale, sous réserve de dispositions
particulières. En fait, la seule disposition particulière
appelée à subsister est l'article 349 du code de justice
militaire, qui prévoit l'obligation pour le procureur, lorsqu'un
jugement concerne un militaire, d'adresser un extrait du jugement au chef de
corps, de la formation ou du service auquel appartient le condamné.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 37
(articles 346 à 348, 350 à
355,
357, 365, 367,
378, 379, 382, 384, 387 et 394 du code de justice
militaire)
Abrogation des dispositions spécifiques à la
justice militaire
Cet
article tend à supprimer un grand nombre de dispositions du code de
justice militaire, le droit commun ayant désormais vocation à
s'appliquer, sous réserve du maintien de prescriptions
particulières.
Ainsi, le premier paragraphe de cet article tend à supprimer les
articles 346 à 348 et 350 à 355 du code de justice militaire, qui
précisent des dispositions particulières en matière
d'exécution des jugements.
Le deuxième paragraphe tend pour sa part à opérer, par
coordination avec les décisions prises pour l'ensemble du texte, une
modification de terminologie dans l'article 357, qui prévoit que pour
l'exécution des peines prononcées contre les militaires, est
réputé détention provisoire le temps pendant lequel
l'individu a été privé de sa liberté, même
par mesure disciplinaire, si celle-ci a été prise pour le
même motif.
Enfin le troisième paragraphe prévoit la suppression des articles
365, 367, 378, 379, 382, du troisième alinéa de l'article 384,
enfin des articles 387 et 394 du code de justice militaire. Ces articles
contiennent des dispositions particulières en ce qui concerne la
libération conditionnelle (bénéfice de la
libération accordée par arrêté conjoint du ministre
de la justice et du ministre de la défense), le casier judiciaire
(usurpation d'identité par un condamné), les frais de justice et
la contrainte par corps (condamnation d'un prévenu aux frais envers
l'Etat), le relèvement des interdictions, déchéances et
incapacités.
De même seraient supprimées des dispositions sur les
conséquences de la dégradation civique (qui n'existe plus dans le
code de procédure pénale), sur la destitution, enfin sur
l'impossibilité de substituer une peine d'amende à une peine de
prison en cas de circonstances atténuantes pour une infraction militaire.
Votre commission vous propose, par un
amendement
, de compléter
cet article, afin d'apporter une modification de coordination
rédactionnelle au sein de l'article 349 du code de justice militaire,
relatif à la communication des extraits du jugement à
l'autorité militaire.
Elle vous propose d'adopter l'article 37
ainsi modifié
.
Articles 37 bis et 37 ter
(articles 479 et 482 du
code de
procédure pénale)
Juridictions prévôtales
Ces
articles, insérés dans le projet de loi par l'Assemblée
nationale tendent à modifier les dispositions du code de justice
militaire relatives aux juridictions prévôtales pour tenir compte
des décisions prévues en ce qui concerne les tribunaux aux
armées.
L'article 479 du code de justice militaire prévoit, dans sa
rédaction actuelle, que des tribunaux prévôtaux,
composés de gendarmes et compétents pour les contraventions des
quatre premières classes peuvent être établis lorsque des
tribunaux aux armées (en temps de paix) ou des tribunaux militaires aux
armées (en temps de guerre) sont établis hors du territoire de la
République.
L'Assemblée nationale ayant décidé d'exclure à
l'avenir la possibilité de mettre en place des tribunaux aux
armées en temps de paix, elle a logiquement souhaité supprimer la
référence aux tribunaux aux armées dans l'article 479
du code de justice militaire.
Il en résulte que des juridictions
prévôtales ne pourront plus être créées en
temps de paix
.
L'Assemblée nationale a également modifié
l'article 482 du code de justice militaire, relatif aux modalités
de saisine des juridictions prévôtales pour supprimer les
règles applicables en temps de paix, dans la mesure où celles-ci
en trouveront plus à s'appliquer.
Votre commission vous propose d'adopter les articles 37 bis et
37 ter
sans modification.
Articles 38, 39 et 40
(articles 491, 492 et 493 du
code de
justice militaire)
Procédure devant les juridictions
prévôtales
Ces
articles ont pour objet de modifier des dispositions du code de justice
militaire relatives aux tribunaux prévôtaux.
L'article 38 tend à modifier l'article 491 du code de justice
militaire et à prévoir la prise en charge par l'Etat des frais de
justice, conformément à la situation qui prévaut en droit
commun, en vertu de l'article 800-1 du code de procédure
pénale.
L'article 39 tend à supprimer, dans l'article 492 du code de
justice militaire, un renvoi à une disposition abrogée du
même code. Enfin, l'article 40 tend à modifier
l'article 493 du code de justice militaire pour prévoir un appel
des jugements des juridictions prévôtales.
Sur le fond, ces articles vont dans le sens d'un rapprochement du droit
applicable devant les juridictions prévôtales de celui
appliqué devant les juridictions de droit commun.
Toutefois, l'adoption du présent projet de loi aura pour
conséquence qu'aucun tribunal aux armées ne pourra être
établi en temps de paix auprès d'une force opérant ou
stationnant hors du territoire de la République. Or, en temps de paix,
les tribunaux prévôtaux ne peuvent être établis
qu'auprès de tribunaux aux armées établis hors du
territoire de la République. Il ne sera donc plus possible de mettre en
place des tribunaux prévôtaux en temps de paix.
Dans ces
conditions, il est vain de modifier les dispositions du code de justice
militaire relatives aux juridictions prévôtales puisque celles-ci
ne trouveront plus à s'appliquer en temps de paix. En ce qui concerne le
temps de guerre, le Gouvernement a décidé que le droit applicable
serait le droit existant avant le présent projet de loi. Modifier les
dispositions dans les tribunaux prévôtaux serait donc sans effet,
en temps de paix comme en temps de guerre
.
Dans ces conditions, votre commission vous propose la
suppression
des
articles 38, 39 et 40.
TITRE II
DISPOSITIONS MODIFIANT
LE CODE DE
PROCÉDURE PÉNALE
Article 41
(article 465 du code de
procédure pénale)
Mandat de dépôt ou
d'arrêt contre un prévenu condamné
à une peine au
moins égale à une année d'emprisonnement
Dans sa
rédaction actuelle, l'article 465 du code de procédure
pénale prévoit la possibilité pour le tribunal, lorsque
les éléments de l'espèce justifient une mesure
particulière de sûreté, de décerner mandat de
dépôt ou d'arrêt contre une personne, s'il s'agit d'un
délit de droit commun et si la peine prononcée est au moins d'une
année d'emprisonnement. La Cour de cassation a logiquement estimé
qu'il n'était pas possible de décerner mandat d'arrêt ou de
dépôt en vertu de l'article 465 lorsqu'est en cause une infraction
militaire
3(
*
)
.
L'article 41 du projet de loi tend à donner cette
possibilité au tribunal lorsque sont en cause des délits d'ordre
militaire prévus par le livre III du code de justice militaire.
Rappelons que ces délits sont notamment l'insoumission, la
désertion, la provocation à la désertion et le recel de
déserteur.
De fait, il n'y a guère de raison susceptible de justifier que le
tribunal ne puisse décerner mandat de dépôt ou
d'arrêt contre les personnes condamnées pour ce type
d'infractions. Ainsi, les juridictions spécialisées, seules
à connaître de ces délits d'ordre militaire, auront des
prérogatives identiques à celles des juridictions de droit
commun, ce qui permettra d'éviter que soient rendues des
décisions inapplicables.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 42
(article 697-1 du code de
procédure pénale)
Compétence des juridictions
spécialisées
L'article 42 du projet de loi, qui tendait à
modifier
les critères de compétence des juridictions
spécialisées, a été supprimé par
l'Assemblée nationale.
Ces juridictions spécialisées, qui sont des juridictions civiles,
ont remplacé après l'adoption de la loi n° 82-621 du
21 juillet 1982, les tribunaux permanents des forces armées.
Actuellement, ces juridictions connaissent des infractions militaires
prévues par le livre III du code de justice militaire, ainsi que
des crimes et délits de droit commun commis dans l'exécution du
service par les militaires.
Avant la loi de 1982, les tribunaux permanents des forces armées
étaient compétents pour les infractions militaires et pour les
infractions du droit commun commises par des militaires ou assimilés,
soit dans un établissement militaire, soit dans le service
. La
loi de 1982 a consacré le critère de l'exécution du
service et a écarté celui de l'établissement.
Dans le projet de loi initial, le Gouvernement a proposé que les
juridictions spécialisées aient à connaître des
infractions commises à l'intérieur d'un établissement
militaire ou, hors d'un établissement militaire, dans l'exécution
du service. Dans l'exposé des motifs du projet de loi, le Gouvernement a
fait valoir qu'une telle évolution mettrait fin à certaines
incertitudes juridiques, le critère de l'exécution du service
ayant donné lieu à quelques difficultés
d'interprétation.
De fait, il semble que des décisions contradictoires aient
été rendues dans certaines hypothèses. Toutefois, un
arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation a beaucoup
clarifié le critère de l'exécution de service. Dans cette
affaire, des militaires avaient imposé des sévices sexuels
à l'un de leurs camarades au sein d'un établissement militaire.
Le juge d'instruction de la juridiction spécialisée
s'était déclaré incompétent, mais le procureur de
la République avait fait appel. La chambre d'accusation de Reims a
confirmé le 12 janvier 1987 l'ordonnance du juge d'instruction
en énonçant que
" les termes de l'article 697-1 du
code de procédure pénale impliquent que ne relèvent de la
compétence des juridictions visées à l'article 697 du
même code que les crimes et délits de droit commun commis par des
militaires au cours d'une mission déterminée, ou d'une mission
générale, ou de l'accomplissement de tâches
contrôlées par l'autorité militaire ; que n'entrent
pas dans ces catégories les infractions de droit commun commises,
même à l'intérieur de l'établissement militaire, par
des militaires qui ne sont affectés à aucune tâche et
n'accomplissent aucun devoir attaché à leur fonctions, et ainsi
n'exécutent aucun service ".
Saisie d'un pourvoi formé par le procureur général
près la cour d'appel de Reims, la chambre criminelle de la Cour de
cassation a considéré que la cour d'appel avait fait une exacte
application de la loi et que
" ne constituent des crimes ou
délits de droit commun commis dans l'exécution du service au sens
de l'article 697-1 du code de procédure pénale que des
infractions commises par un militaire dans le cadre de la mission de service
qui lui est confiée "
4(
*
)
.
Cet arrêt a été confirmé par un autre arrêt de
la chambre criminelle de la Cour de cassation du 17 novembre 1993,
rendu à propos d'une affaire dans laquelle des gendarmes étaient
poursuivis pour homicide involontaire après la mort d'un autre gendarme
qui, au terme d'une opération de police judiciaire, avait regagné
la chambre de son cantonnement en ayant conservé son arme de service.
L'Assemblée nationale s'est opposée à la modification des
critères de compétence des juridictions
spécialisées proposée par le Gouvernement. Son rapporteur
a en particulier noté que
les incertitudes liées à la
notion d'exécution du service persisteraient, ce critère devant
continuer à s'appliquer pour les infractions commises hors des
établissements militaires
. Il a en outre estimé que la notion
d'établissement militaire n'était ni claire ni objective.
Votre commission partage ce sentiment et considère que certaines
infractions de droit commun dans un établissement militaire n'ont aucune
raison d'être renvoyées à une juridiction
spécialisée.
Elle vous propose donc de
maintenir la suppression
de l'article 42
décidée par l'Assemblée nationale.
Article 43
(article 697-2 du code de
procédure pénale)
Compétence des juridictions
spécialisées lorsqu'un tribunal
aux armées n'a pas
été établi auprès d'une force
qui stationne
hors du territoire
Actuellement, pour le jugement des infractions commises par des
militaires hors du territoire de la République, les juridictions
spécialisées sont compétentes lorsqu'aucun tribunal aux
armées n'a été établi auprès d'une force qui
opère ou stationne hors de son territoire. Les juridictions
spécialisées sont donc très souvent compétentes,
puisque le seul tribunal aux armées existant est celui des forces
stationnées en Allemagne.
La compétence des juridictions spécialisées a posé
des difficultés importantes, dans la mesure où il convient de
prendre en compte des critères tels que le lieu de rattachement du
régiment auquel appartient le militaire concerné pour
déterminer la juridiction spécialisée compétente.
Le projet de loi tend à simplifier cette situation, en faisant du
tribunal aux armées de Paris la seule juridiction compétente pour
connaître des infractions commises par des militaires hors du territoire
de la République.
L'article 43 vise à tirer les conséquences de cette
évolution en supprimant l'article 697-2 du code de procédure
pénale, qui prévoit la compétence des juridictions
spécialisées en l'absence de création d'un tribunal aux
armées auprès d'une force qui stationne hors du territoire.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 44
(article 698 du code de
procédure pénale)
Procédure applicable devant les
juridictions spécialisées
L'article 698 du code de procédure pénale
prévoit que les infractions de la compétence des juridictions
spécialisées sont jugées selon les règles du code
de procédure pénale,
" sous réserve des
dispositions particulières énoncées par les
articles 698-1 à 698-8 "
.
L'article 44 du projet a pour objet de modifier cet article afin qu'il
renvoie aux articles 698-1 à 698-9 pour tenir compte de la
création prévue à l'article 48 du projet de loi d'un
article 698-9 du code de procédure pénale permettant aux
juridictions spécialisées d'ordonner la tenue des débats
à huis clos lorsqu'existe un risque de divulgation d'un secret de la
défense nationale.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 45
(article 698-1 du code de
procédure pénale)
Restriction de la notion de flagrance au
regard
de l'avis du ministre de la défense
Dans sa
rédaction actuelle, l'article 698-1 prévoit notamment que le
procureur de la République doit, préalablement à tout acte
de poursuite, demander l'avis du ministre de la défense ou de
l'autorité militaire habilitée par lui,
sauf en cas de crime
ou de délit flagrant
.
En droit commun, la notion de flagrance est définie dans
l'article 53 du code de procédure pénale. Le crime ou
délit flagrant est, selon le premier alinéa de l'article 53,
"
le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient
de se commettre "
. En outre, il y a crime ou délit flagrant
lorsque
" dans un temps très voisin de l'action, la personne
soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est
trouvée en possession d'objets, ou présente des traces ou
indices, laissant penser qu'elle a participé au crime ou au
délit ".
Enfin, l'article 53 du code de procédure pénale assimile,
dans son second alinéa, au crime ou délit flagrant tout crime ou
délit qui a été commis dans une maison dont le chef
requiert le procureur de la République ou un officier de police
judiciaire de le constater.
La flagrance par assimilation a posé des difficultés en
matière militaire. La Cour de cassation a en effet estimé que la
réquisition du chef de corps justifiait une enquête de
flagrance
5(
*
)
. Pour éviter que le ministre
de la défense ne soit privé de la possibilité de donner un
avis, il semble que certains chefs de corps aient préféré
ne pas dénoncer des infractions, afin d'éviter la conduite d'une
enquête de flagrance. Dans ce cas, en effet, la demande d'avis du
ministre de la défense n'est pas obligatoire.
Le Gouvernement a donc proposé de limiter la notion de flagrance au
regard de l'avis du ministre de la défense. L'article 45 du projet
tend à modifier l'article 698-1 du code de procédure
pénale pour prévoir que l'avis du ministre de la défense
n'est pas indispensable en cas de crime ou délit flagrant
" tel
que défini au premier alinéa de l'article 53 "
.
Ainsi, la réquisition du chef de corps n'aurait plus pour
conséquence de priver éventuellement le ministre de la
défense de la possibilité de donner un avis.
Votre commission approuve cette évolution. Toutefois, il semble que
l'article 45 n'ait en fait aucune utilité, du fait des
réformes du code de procédure pénale en cours. Le projet
de loi relatif aux alternatives aux poursuites, adopté par le
Sénat en première lecture le 18 juin 1998,
prévoit en effet, dans son article 6, la suppression du second
alinéa de l'article 53 du code de procédure pénale,
relatif à la flagrance par assimilation. Il ne paraît donc ni
souhaitable ni nécessaire de renvoyer, dans l'article 698-1 du code
de procédure pénale, au premier alinéa de
l'article 53, alors que cet article, si l'Assemblée nationale suit
la proposition du Gouvernement acceptée par le Sénat, ne
comportera bientôt qu'un seul alinéa. La disparition de la
flagrance par assimilation devrait faire disparaître les
difficultés qui se sont posées en ce qui concerne l'avis du
ministre de la défense.
Dans ces conditions, votre commission vous propose la
suppression
de cet
article.
Articles 45 bis et 46
(article 698-2 du
code de
procédure pénale)
Mise en mouvement de l'action publique
par la partie lésée -
Avis du ministre de la défense
Depuis
l'adoption de la loi de 1982, l'action civile en réparation du dommage
est ouverte à ceux qui ont personnellement souffert du dommage
causé par l'infraction. A l'époque, cette évolution avait
été perçue comme un progrès incontestable,
même si la Cour de cassation a eu l'occasion de rappeler depuis lors que
la loi de 1982 n'a pas dérogé au principe selon lequel seuls les
tribunaux administratifs peuvent se prononcer sur la réparation du
préjudice causé par une faute indissociable des fonctions
exercées
6(
*
)
. En revanche, la loi avait
maintenu le principe selon lequel la partie lésée ne pouvait
mettre en mouvement l'action publique. La loi n° 92-1336 du
16 décembre 1992 a ouvert le droit pour la partie
lésée de mettre en mouvement l'action publique "
en cas
de décès, de mutilation ou d`infirmité
permanente "
, que les infractions aient été commises sur
le territoire national ou hors de celui-ci. Le texte adopté n'avait pas
prévu explicitement la possibilité pour le ministre de la
défense de donner un avis en cas de mise en mouvement de l'action
publique par la partie lésée.
Le Gouvernement a donc souhaité introduire dans le présent projet
de loi un article 46, prévoyant un avis du ministre de la
défense dans ce cas, comme lors de la mise en mouvement de l'action
publique par le procureur de la République.
Au cours des débats à l'Assemblée nationale, le texte a
été modifié de manière importante. D'une part, les
députés ont souhaité étendre les
possibilités de mise en mouvement de l'action publique par la partie
lésée, aujourd'hui limitées aux cas de
décès, de mutilation ou d'infirmité permanente.
L'Assemblée nationale a donc adopté un article 45 bis
qui prévoit la mise en mouvement de l'action publique par la partie
lésée "
dans les conditions déterminées aux
articles 85 et suivants "
. Elle a décidé,
après un dialogue avec le Gouvernement, de ne rendre cette disposition
applicable qu'à compter du 1
er
janvier 2002,
c'est-à-dire lorsque l'armée ne comportera plus d'appelés.
D'autre part, elle a décidé de supprimer l'article 46 du
projet de loi, souhaitant ainsi exclure tout avis du ministre de la
défense ou de l'autorité habilitée en cas de mise en
mouvement de l'action publique par la partie lésée.
Le renvoi aux articles 85 et suivants du code de procédure
pénale a pour effet de limiter la mise en mouvement de l'action publique
par la partie lésée à la plainte avec constitution de
partie civile devant le juge d'instruction. La citation directe à
l'égard de personnes qui n'ont pas été l'objet de
l'instruction ne sera donc pas possible, alors qu'en 1992, lorsqu'il avait
ouvert à la partie lésée la faculté de mettre en
mouvement l'action publique en cas de décès, de mutilation ou
d'infirmité, le législateur n'avait posé aucune
restriction à cette faculté, en ce qui concerne la
procédure.
Le choix opéré par l'Assemblée nationale est
compréhensible. En 1982, lors du précédent débat
sur le code de justice militaire, le garde des sceaux avait souligné le
risque de déstabilisation de l'armée républicaine dans
l'hypothèse où l'on permettrait à la partie civile de
citer directement devant un tribunal des membres des forces armées.
Toutefois, le projet de loi relatif aux alternatives aux poursuites et
renforçant l'efficacité de la procédure pénale, en
cours de discussion devant le Parlement, tend, dans son article 13,
à permettre à une personne de demander à être
jugée en son absence par le tribunal correctionnel quelle que soit la
peine d'emprisonnement encourue, dès lors qu'une partie civile a
usé de la voie de la citation directe. Les risques inhérents
à cette procédure pourraient s'en trouver limités.
Néanmoins, votre commission approuve la solution
équilibrée retenue par l'Assemblée nationale.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a souhaité exclure tout avis
du ministre de la défense lorsque la mise en mouvement de l'action
publique est le fait de la personne lésée, mais il n'est pas
certain que la rédaction choisie aboutisse à ce résultat.
Le renvoi aux articles 85 et suivants du code de procédure
pénale introduit en effet une ambiguïté. L'article 85
du code de procédure pénale prévoit la possibilité
pour la personne qui se prétend lésée par un crime ou un
délit de porter plainte devant le juge d'instruction. L'article 86
prévoit que le juge d'instruction ordonne communication de la plainte au
procureur de la République pour que ce magistrat prenne ses
réquisitions. Or, l'article 698-1 du code de procédure
pénale, relatif à la procédure applicable devant les
juridictions spécialisées dispose que le procureur de la
République doit demander, préalablement à tout acte de
poursuite, l'avis du ministre de la défense. Même si des
appréciations différentes sont possibles à ce sujet, on
peut considérer que les réquisitions prises par le procureur de
la République après plainte avec constitution de partie civile
devant le juge d'instruction sont un acte de poursuite impliquant une demande
d'avis du ministre de la défense.
D'après les informations
recueillies par votre rapporteur, les procureurs demandent actuellement un avis
du ministre de la défense lorsque la partie lésée met en
mouvement l'action publique
.
Il est vrai cependant que la Cour de cassation, dans un arrêt du 16
juillet 1997, a explicitement énoncé que "
l'article
698-1 du code de procédure pénale, qui subordonne les poursuites
exercées pour les infractions militaires visées à
l'article 697-2 du même code, soit à la dénonciation, soit
à l'avis préalable des autorités militaires, ne
régit que la mise en mouvement de l'action publique à l'encontre
des militaires par le procureur de la République
". Dans ces
conditions, l'incertitude prévaut en ce qui concerne l'obligation
éventuelle de demander un avis du ministre de la défense en cas
de mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée.
Sur le fond, votre commission ne partage pas les réticences de
l'Assemblée nationale en ce qui concerne l'avis du ministre de la
défense. Manifestement, en 1992, lorsque la mise en mouvement de
l'action publique a été ouverte à la partie
lésée, le législateur a négligé de
prévoir un tel avis, mais n'a pas souhaité l'exclure
explicitement.
Or, on voit mal pourquoi cet avis présenterait un
intérêt lorsque le procureur met en mouvement l'action publique et
n'en présenterait pas lorsque la personne lésée fait de
même
.
Il convient de rappeler que l'avis du ministre ou de l'autorité
habilitée ne lie en rien le procureur de la République, que la
procédure d'avis ne suspend pas le cours de la justice, que l'avis n'est
pas nécessaire en cas de crime ou de délit flagrant.
Votre commission accepte le rapprochement de la procédure judiciaire
applicable aux militaires et assimilés de celle de droit commun. Il n'en
reste pas moins que l'activité militaire continue et continuera a
présenter des spécificités qui ne peuvent être
ignorées. La liberté d'expression traditionnellement
limitée des militaires, l'absence de représentation syndicale, ne
sont pas des éléments totalement négligeables. Dans ce
cadre, l'avis du ministre de la défense peut être utile pour
éclairer le procureur sur les circonstances de l'infraction, les
particularités de la mission au cours de laquelle elle s'est produite.
Dans ces conditions, votre commission vous propose d'adopter
l'article 45 bis sans modification, acceptant l'extension des
possibilités de mise en mouvement de l'action publique par la partie
lésée décidée par l'Assemblée nationale.
Elle vous propose également, par le rétablissement de
l'article 46, de prévoir explicitement la possibilité d'un
avis du ministre de la défense ou de l'autorité habilitée.
Une telle position paraît concilier la volonté d'offrir à
tous les citoyens la même justice et la nécessité de
prendre en compte les particularités de l'activité militaire.
L'avis du ministre de la défense existe aujourd'hui et il paraît
préférable de lever toute ambiguïté à ce sujet.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 45 bis
sans
modification
et de
rétablir
l'article 46.
Article 47
(article 698-5 du code de la
procédure pénale)
Application de dispositions du code de
justice militaire
L'article 698-5 du code de procédure pénale
prévoit l'application de plusieurs articles du code de justice militaire
devant les juridictions de droit commun spécialisées.
L'article 47 du projet tend à modifier les renvois
opérés, en particulier pour tenir compte de l'abrogation d'un
grand nombre d'articles du code de justice militaire (par exemple les
articles 307 à 318 qui concernent certaines procédures
particulières) ou du changement de place de certains articles
(l'article 302 devient l'article 204).
Enfin, certains articles du code de justice militaire deviendront applicables
devant les juridictions spécialisées, alors qu'ils ne
l'étaient pas jusqu'à présent. Il s'agit notamment de
l'article 349, qui fait obligation au procureur, lorsqu'un jugement
concerne un militaire, d'adresser un extrait du jugement au chef de corps, de
la formation ou de service auquel appartenait le condamné. Il s'agit
également de l'article 366 qui prévoit la mise à
disposition de l'autorité militaire des condamnés ayant obtenu
une libération conditionnelle alors qu'ils ont conservé la
qualité de militaire ou sous réserve d'incorporation dans
l'armée. De même seraient rendus applicables l'article 368
(prise en compte du temps passé au service militaire dans la
durée de la peine encourue pour les condamnés qui atteignent la
date de la libération du service sans avoir été
frappés de la révocation de leur libération
conditionnelle), l'article 369 (régime de sursis à
exécution) et l'article 373 (persistance de la perte de grade, des
décorations françaises et des droits à pension pour
services antérieurs en cas de réhabilitation).
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 48
(article 698-9 nouveau du code de
procédure pénale)
Débat à huis clos
Cet
article tend à insérer, dans le code de procédure
pénale, un article 698-9 pour prévoir que les juridictions
spécialisées peuvent ordonner, par une décision rendue en
audience publique, que les débats se tiennent à huis clos si la
publicité risque d'entraîner
la divulgation d'une information
couverte par le secret de la défense nationale
. La décision
sur le fond devrait toujours être rendue en audience publique.
Dans le projet de loi initial, le Gouvernement avait prévu de rendre
applicable cette possibilité à l'ensemble des juridictions.
D'ores et déjà, la Cour d'assises et les tribunaux correctionnels
peuvent décider le huis clos dans quelques cas, en particulier si la
publicité peut être dangereuse pour l'ordre et les moeurs.
L'Assemblée nationale a souhaité limiter l'application de ce
nouveau cas de huis clos aux juridictions spécialisées (et au
tribunal aux armées de Paris du fait des renvois entre le code de
procédure pénale et le code de justice militaire). De fait, si
l'on avait voulu étendre cette disposition à l'ensemble des
juridictions, il aurait été préférable de
compléter les articles 306 et 400 du code de procédure
pénale, relatifs au huis clos devant la Cour d'assises et devant le
tribunal correctionnel.
Votre commission vous propose donc d'approuver le choix de limiter
l'application du huis clos pour risque de divulgation d'un secret de la
défense nationale aux juridictions spécialisées. Elle vous
soumet
un
amendement
tendant à rédiger cette
disposition de manière aussi proche que possible de celle prévue
pour le huis clos devant le tribunal correctionnel, afin de prévoir une
motivation de la décision de huis clos et d'évoquer
explicitement le cas des jugements séparés pouvant intervenir sur
des incidents ou exceptions.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 48
ainsi
modifié
.
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES
Article 49
(article 229 de la loi
n° 93-2 du 4 janvier 1993)
Abrogation d'une
disposition devenue sans objet
Cet
article tend à abroger l'article 229 de la loi n° 93-2 du
4 janvier 1993 portant réforme de la procédure
pénale, par lequel le législateur prévoyait que les
dispositions de cette loi seraient rendues applicables aux juridictions
militaires avant le 1
er
janvier 1995.
Ce délai fut repoussé à trois reprises. La loi
n° 95-125 du 8 février 1995 relative à
l'organisation des juridictions et à la procédure pénale,
civile et administrative a renvoyé l'application au
1
er
mars 1996. La loi du 22 juillet 1996 sur la
répression du terrorisme fixa la date d'application au
1
er
janvier 1997. Enfin, la loi n° 97-1019
du 28 octobre 1997 portant réforme du service national a
fixé l'échéance au 1
er
janvier 1999.
Il faut signaler que, dans le projet de loi portant réforme du service
national, le Gouvernement avait introduit un article prévoyant la
réforme par ordonnance du code de justice militaire. Cette proposition
avait été repoussée par les deux assemblées.
La discussion du présent projet de loi tend -enfin- à rendre sans
objet l'article 229 de la loi de 1993. Il faut constater que les
délais inscrits dans la loi par les assemblés n'ont, au mieux,
qu'une valeur indicative.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 50
(article 1018A du code
général des impôts)
Recouvrement des droits fixes de
procédure
L'article 800-1 du code de procédure pénale
prévoit la prise en charge par l'Etat des frais de justice criminelle,
correctionnelle et de police. Ces frais, qui ne couvrent pas certaines
dépenses, tels que les honoraires d'avocats, sont remplacés par
un droit fixe de procédure dû par le condamné.
L'article 37 du projet de loi a notamment pour objet d'étendre la
prise en charge par l'Etat des frais liés aux procédures devant
les juridictions des forces armées, en pratique le tribunal aux
armées de Paris.
En conséquence, l'article 50 vise à rendre applicables les
dispositions de l'article 1018A du code général des
impôts aux décisions rendues par les juridictions des forces
armées. L'article 1018A pose le principe de la soumission des
décisions des juridictions répressives à un droit fixe de
procédure. Il prévoit que le droit n'est pas dû lorsque le
condamné est mineur. En cas de non-lieu ou de relaxe,
l'article 1018A prévoit le recouvrement sur la partie civile qui a
mis en mouvement l'action publique.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
sans modification
.
Article 51
(articles 8, 10 et 14 de la loi
n° 82-621 du 21 juillet 1982)
Abrogations de
dispositions devenues inutiles
Cet
article tend à abroger plusieurs dispositions de la loi
n° 82-621 du 21 juillet 1982, appelées à
perdre leur pertinence du fait de l'adoption du présent projet de loi.
L'article 8 prévoit les modalités de renvoi à une
autre juridiction en cas de suppression d'une juridiction des forces
armées. L'article 10 prévoit l'établissement du
tribunal des forces armées de Paris et définit sa
compétence. Enfin, l'article 14 prévoit la date
d'entrée en vigueur de la loi de 1982 et le renvoi des procédures
en cours devant les tribunaux permanents des forces armées aux
juridictions de droit commun spécialisées. Seul le
troisième alinéa de cet article, qui prévoyait le sort des
affaires en cours devant le tribunal aux forces armées de Paris dans
l'hypothèse d'une disparition de cette juridiction, serait
supprimé.
Votre commission vous propose, par un
amendement
, de compléter
cet article par un alinéa précisant que les affaires en cours
devant le tribunal des forces armées de Paris à la date de
promulgation de la loi seraient renvoyées au tribunal aux armées
de Paris et que les actes, formalités et décisions intervenues
antérieurement demeureront valables.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi modifié.
Article 52
Droit applicable en temps de
guerre
Dans le
projet de loi initial, le Gouvernement avait proposé de prévoir
à la fin de la loi une disposition relative au droit applicable en temps
de guerre. Il s'agissait de préciser que le droit applicable
était le code de justice militaire dans sa rédaction
antérieure à l'adoption du présent projet de loi et, en
tant que de besoin, le code de procédure pénale dans sa
rédaction antérieure à la loi n° 93-2 du
4 janvier 1993.
L'Assemblée nationale a décidé de codifier cette
disposition en l'insérant dans un article 2-1 du code de justice
militaire (votre commission vous propose de l'inscrire dans l'article 2)
et a donc supprimé cet article 52.
Cette solution paraît
effectivement préférable, dans la mesure où il est
souhaitable que la lecture du code de justice militaire permette de comprendre
immédiatement le droit applicable en temps de paix comme en temps de
guerre.
Votre commission vous propose de
maintenir la suppression
de
l'article 52.
Article 52 bis
Refonte du code de justice
militaire
Cet
article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée
nationale, prévoit que le code de justice militaire fera l'objet d'une
refonte avant le 1
er
janvier 2002 et que, dans cette
attente, les dispositions du code valables en temps de guerre
résulteront de la rédaction antérieure au présent
projet de loi.
On peut regretter l'inachèvement du présent projet de loi, qui
justifie cette demande de refonte. L'adoption du présent projet de loi
dans les meilleurs délais est néanmoins souhaitable, dans la
mesure où il permettra d'étendre de manière substantielle
les droits des justiciables militaires.
La réforme envisagée pour l'avenir pourrait peut-être
permettre de rassembler au sein du code de procédure pénale
l'ensemble des dispositions applicables en temps de paix, le code de justice
militaire devenant alors entièrement consacré au temps de guerre.
Toutefois, le délai retenu par l'Assemblée nationale pour la
refonte du code de justice militaire paraît trop bref à votre
commission
. Le présent projet de loi ne pourra s'appliquer que dans
quelques mois et il paraît souhaitable d'en connaître les
conséquences avant de prévoir une nouvelle réforme. Par
ailleurs, il apparaît souhaitable que la prochaine réforme puisse
prendre en compte les premiers effets de la professionnalisation des
années. Dans ces conditions, votre commission vous propose, par un
amendement
, de remplacer la date du
1
er
janvier 2002 par celle du
31 décembre 2002.
Elle vous propose d'adopter l'article 52 bis
ainsi
modifié
.
Article 53
Application aux territoires
d'outre-mer
et à Mayotte
Cet
article prévoit l'application de la loi dans les territoires d'outre-mer
et dans la collectivité territoriale de Mayotte.
La loi n° 82-621 du 21 juillet 1982 relative à
l'instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de
sûreté de l'Etat prévoyait que son application aux
territoires d'outre-mer donnerait lieu à des dispositions
législatives particulières.
De fait, la loi n° 83-1114 du 22 décembre 1983 a
rendu applicables aux territoires d'outre-mer les dispositions de la loi de
1982, sans que des adaptations particulières soient prévues.
Les dispositions des articles 697 à 698-8 du code de
procédure pénale relatives à la procédure
applicable aux infractions commises par des militaires sur le territoire de la
République ne font l'objet d'aucune adaptation particulière dans
les dispositions du code de procédure pénale
spécifiquement consacrées aux territoires d'outre-mer et à
la collectivité territoriale de Mayotte.
Pour tenir compte de la loi constitutionnelle n° 98-610 du
20 juillet 1998, en conséquence de laquelle la
Nouvelle-Calédonie n'est plus un territoire d'outre-mer, votre
commission vous propose, par un
amendement
, de mentionner la
Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis et
Futuna plutôt que les territoires d'outre-mer.
Elle vous propose d'adopter l'article 53
ainsi modifié
.
*
* *
Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observation et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission des lois vous propose d'adopter le présent projet de loi.
ANNEXE
NOMBRE ET NATURE DES AVIS ÉMIS PAR
LE MINISTRE DE LA DÉFENSE POUR L'ANNÉE 1997
ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF
CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
Art. 398-1
: Sont jugés dans les
conditions
prévues au troisième alinéa de l'article 398 :
-
1° Les délits prévus par les articles 66 et 69 du
décret-loi du 30 octobre 1935 unifiant le droit en matière
de chèques et relatif aux cartes de paiement ;
2° Les délits prévus par le code de la route ainsi que,
lorsqu'ils sont commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule,
par les articles 222-19, 222-20, 223-1 et 434-10 du code pénal :
3° Les délits en matière de coordination des
transports ;
4° Les délits prévus par le 2° de
l'article 32 du décret-loi du 18 avril 1939 fixant le régime
des matériels de guerre, armes et munitions ;
5° Les délits prévus par les articles 222-11, 222-12
(1° à 10°), 222-13 (1° à 10°), 222-16,
222-17, 222-18, 222-32, 227-3 à 227-11, 311-3, 311-4
(1° à 8°), 313-5, 314-5,
314-6, 321-1, 322-1 à
322-4, 322-12, 322-13, 322-14, 433-3, premier alinéa, 433-5 et
521-1
du code pénal et L. 628 du code de la santé publique ;
6° Les délits prévus par le code rural en matière de
chasse, de pêche et de protection de la faune et de la flore et les
délits prévus par le décret-loi du 9 janvier 1852 en
matière de pêche maritime.
Toutefois, le tribunal statue obligatoirement dans les conditions
prévues par le premier alinéa de l'article 398 lorsque le
prévenu est en état de détention provisoire lors de sa
comparution à l'audience ou lorsqu'il est poursuivi selon la
procédure de comparution immédiate. Il statue également
dans les conditions prévues par le premier alinéa de
l'article 398 pour le jugement des délits prévus au
présent article lorsque ces délits sont connexes à
d'autres délits non prévus par cet article.
Art. 662
: En matière criminelle, correctionnelle ou de
police, la chambre criminelle de la Cour de cassation peut dessaisir toute
juridiction d'instruction ou de jugement et renvoyer la connaissance de
l'affaire à une autre juridiction du même ordre pour cause de
suspicion légitime.
La requête aux fins de renvoi peut être présentée
soit par le procureur général près la Cour de cassation,
soit par le ministère public établi près la juridiction
saisie, soit par les parties.
La requête doit être signifiée à toutes les parties
intéressées qui ont un délai de dix jours pour
déposer un mémoire au greffe de la Cour de cassation.
La présentation de la requête n'a point d'effet suspensif à
moins qu'il n'en soit autrement ordonné par la Cour de cassation.
Art. 665
: Le renvoi d'une affaire d'une juridiction à une
autre peut être ordonné pour cause de sûreté publique
par la chambre criminelle, mais seulement à la requête du
procureur général près la Cour de cassation.
Le renvoi peut également être ordonné, dans
l'intérêt d'une bonne administration de la justice, par la chambre
criminelle, soit sur requête du procureur général
près la Cour de cassation, soit sur requête du procureur
général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle
la juridiction saisie a son siège, agissant d'initiative ou sur demande
des parties.
Dans les dix jours de la réception de la demande et s'il n'y donne pas
suite, le procureur général près la cour d'appel informe
le demandeur des motifs de sa décision. Ce dernier peut alors former un
recours devant le procureur général près la Cour de
cassation qui, s'il ne saisit pas la chambre criminelle l'informe des motifs de
sa décision.
La chambre criminelle statue dans les huit jours de la requête.
Art. 697
: Dans le ressort de chaque cour d'appel, un tribunal
de grande instance est compétent pour l'instruction et, s'il s'agit de
délits, le jugement des infractions mentionnées à
l'article 697-1.
Des magistrats sont affectés, après avis de l'assemblée
générale, aux formations de jugement, spécialisées
en matière militaire, de ce tribunal.
Dans le même ressort, une cour d'assises est compétente pour le
jugement des crimes mentionnés à l'article 697-1.
Un décret pris sur le rapport conjoint du garde de sceaux, ministre de
la justice, et du ministre chargé de la défense fixe la liste de
ces juridictions.
Art. 698-1
: Sans préjudice de l'application de
l'article 36, l'action publique est mise en mouvement par le procureur de
la République territorialement compétent, qui apprécie la
suite à donner aux faits portés à sa connaissance,
notamment par la dénonciation du ministre chargé de la
défense ou de l'autorité militaire habilitée par lui. A
défaut de cette dénonciation, le procureur de la
République doit demander préalablement à tout acte de
poursuite, sauf en cas de crime ou de délit flagrant, l'avis du ministre
chargé de la défense ou de l'autorité militaire
habilitée par lui. Hormis le cas d'urgence, cet avis est donné
dans le délai d'un mois. L'avis est demandé par tout moyen dont
il est fait mention au dossier de la procédure.
La dénonciation ou l'avis figure au dossier de la procédure,
à peine de nullité, sauf si cet avis n'a pas été
formulé dans le délai précité ou en cas d'urgence.
L'autorité militaire visée au premier alinéa du
présent article est habilitée par arrêté du ministre
chargé de la défense.
Art. 698-2
: L'action civile en réparation du dommage
causé par l'une des infractions mentionnées au premier
alinéa de l'article 697-1 appartient à ceux qui ont
personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction.
Sauf en cas de décès, de mutilation ou d'infirmité
permanente, la partie lésée ne peut toutefois mettre l'action
publique en mouvement.
Art. 698-3
: Lorsque le procureur de la République, le
juge d'instruction et les officiers de police judiciaire sont amenés,
soit à constater des infractions dans les établissements
militaires, soit à rechercher, en ces mêmes lieux, des personnes
ou des objets relatifs à ces infractions, ils doivent adresser à
l'autorité militaire des réquisitions tendant à obtenir
l'entrée dans ces établissements.
Les réquisitions doivent, sauf nécessité, préciser
la nature et les motifs des investigations jugées nécessaires.
L'autorité militaire est tenue de s'y soumettre et se fait
représenter aux opérations.
Le procureur de la République, le juge d'instruction et les officiers de
police judiciaire veillent, en liaison avec le représentant
qualifié de l'autorité militaire, au respect des prescriptions
relatives au secret militaire. Le représentant de l'autorité
militaire est tenu au respect du secret de l'enquête et de l'instruction.
Art. 698-4
: Les supérieurs hiérarchiques
doivent satisfaire à la demande des officiers de police judiciaire
tendant à mettre à leur disposition un militaire en
activité de service, lorsque soit les nécessités de
l'enquête, soit l'exécution d'une commission rogatoire ou d'un
mandat de justice exigent cette mesure.
Art. 698-5
: Les articles 73 à 77, 93, 94, 137, 302, 307
à 318, 357, 371, 374, 375, 377 et 384 alinéa 3 du code de
justice militaire sont applicables. Conformément à
l'article 135 de ce même code, la personne mise en examen, le
prévenu ou le condamné militaire doit être détenu
dans des locaux séparés.
Art. 698-6
: Par dérogation aux dispositions du titre
I
er
du livre II, notamment aux articles 240 et 248, premier
alinéa, et sous réserve des dispositions de l'article 698-7, la
cour d'assises prévue par l'article 697 est composée d'un
président et de six assesseurs désignés comme il est dit
aux alinéas 2 et 3 de l'article 248 et aux articles 249
à 253.
La cour ainsi composée applique les dispositions du titre I
er
du livre II sous les réserves suivantes :
1° Il n'est pas tenu compte des dispositions qui font mention du jury
ou des jurés ;
2° Les dispositions des articles 254 à 267, 282, 288
à 292, 293, alinéas 2 et 3, 295 à 305 ne sont pas
applicables ;
3° Pour l'application des articles 359, 360 et 362, les
décisions sont prises à la majorité.
Art. 698-7
: Les dispositions de l'article 698-6 ne sont
applicables, pour le jugement des crimes de droit commun commis dans
l'exécution du service par les militaires, que s'il existe un risque de
divulgation d'un secret de la défense nationale.
Lorsque la mise en accusation est prononcée en application de
l'article 214, premier alinéa, la chambre d'accusation constate
dans son arrêt, s'il y a lieu, qu'il existe un risque de divulgation d'un
secret de la défense nationale et ordonne que la cour d'assises saisie
soit composée conformément aux dispositions de
l'article 698-6.
Art. 698-8
: Les juridictions compétentes pour juger
les infractions prévues par le livre III du code de justice
militaire peuvent également prononcer les peines militaires de la
destitution et de la perte du grade.
CODE DE JUSTICE MILITAIRE
Art. 60
: Sont considérés comme
membres des forces armées pour l'application des dispositions du
présent chapitre, les personnes visées aux articles 61
à 63 présentes, à quelque titre que ce soit, sur le
territoire étranger, les personnels civils employés à
titre statutaire ou contractuel par les forces armées, ainsi que les
personnes à leur charge, lorsqu'elles accompagnent le chef de famille
hors du territoire de la République.
Art. 61
: Les militaires visés par le présent
code sont :
1° Les militaires qui possèdent le statut de militaire de
carrière ;
2° Les militaires qui servent en vertu d'un contrat ;
3° Les militaires qui accomplissent le service militaire dans les
conditions prévues par le code du service national, à l'exception
des militaires en position hors-cadre ou de retraite, ainsi que des
déserteurs.
Art. 62
: Les personnes qui effectuent le service militaire
dans les conditions prévues par le code du service national ainsi que
les engagés sont soumis aux dispositions du présent code à
partir de leur réunion en détachement pour rejoindre leur
destination ou, s'ils rejoignent isolément, à partir de leur
arrivée à destination, jusqu'au jour inclus où ils sont
renvoyés dans leurs foyers. Il en est de même quand, avant
d'être incorporés, ils sont placés à titre militaire
dans un hôpital, un établissement pénitentiaire ou sous la
garde de la force publique ou sont mis en subsistance dans une unité.
Art. 63
: Sont également soumis aux dispositions du
présent code :
1° Ceux qui sont portés présents, à quelque
titre que ce soit, sur le rôle d'équipage d'un bâtiment de
la marine ou le manifeste d'un aéronef militaire ;
2° Ceux qui, sans être liés légalement ou
contractuellement aux forces armées, sont portés sur les
contrôles et accomplissent du service ;
3° Les membres d'un équipage de prise ;
4° Les prisonniers de guerre.
1
JOAN, 2
ème
séance du 14 avril 1982, p.1129
2
J.O. AN, 1
ère
séance du
10 juin 1998, pp. 4909-4910
3
Cass. Crim. , 25 avril 1990.
4
Cass. Crim. , 2 octobre 1987.
5
Cass. Crim. , 17 novembre 1993.
6
Cass. Crim., 29 novembre 1988.