PJL relatif au Conseil supérieur de la magistrature
JOLIBOIS (Charles)
RAPPORT 57 (98-99) - COMMISSION DES LOIS
Tableau comparatif au format Acrobat .Table des matières
- LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
-
EXPOSE GENERAL
-
I. SOUS RÉSERVE DE DEUX MODIFICATIONS TECHNIQUES, L'ASSEMBLÉE
NATIONALE A ADOPTÉ LE TEXTE ISSU DES TRAVAUX DE VOTRE COMMISSION DES
LOIS EN PREMIÈRE LECTURE
- A. LE MAINTIEN, AU SEIN D'UNE FORMATION PLÉNIÈRE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE, DE DEUX FORMATIONS DISTINCTES RESPECTIVEMENT COMPÉTENTES À L'ÉGARD DES MAGISTRATS DU SIÈGE ET À L'ÉGARD DES MAGISTRATS DU PARQUET
- B. LES MODALITÉS RETENUES POUR LA DÉSIGNATION DES PERSONNALITÉS EXTÉRIEURES APPELÉES À FAIRE PARTIE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE
-
II. UN SEUL POINT DE DÉSACCORD IMPORTANT SUBSISTE AUJOURD'HUI ENTRE LES
DEUX ASSEMBLÉES : LA NOMINATION DES PROCUREURS
GÉNÉRAUX
- A. LE PROBLÈME DE LA NOMINATION DES PROCUREURS GÉNÉRAUX : LE RÉTABLISSEMENT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE DE L'EXIGENCE D'UN AVIS CONFORME DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE, SUPPRIMÉE PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE
- B. LES DEUX MODIFICATIONS TECHNIQUES APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE AU TEXTE DU SÉNAT
- III. LA PROPOSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : L'ADOPTION SANS MODIFICATION DU TEXTE RETENU PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN DEUXIÈME LECTURE
-
I. SOUS RÉSERVE DE DEUX MODIFICATIONS TECHNIQUES, L'ASSEMBLÉE
NATIONALE A ADOPTÉ LE TEXTE ISSU DES TRAVAUX DE VOTRE COMMISSION DES
LOIS EN PREMIÈRE LECTURE
N° 57
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 5 novembre 1998
RAPPORT
FAIT
au
nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du Règlement et
d'administration
générale (1) sur le projet de loi
constitutionnelle, ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE
NATIONALE, EN DEUXIÈME LECTURE, relatif au
Conseil
supérieur de la magistrature,
Par M.
Charles JOLIBOIS,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM.
Jacques
Larché,
président
; René-Georges Laurin, Mme Dinah
Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour,
vice-présidents
; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck,
Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest,
secrétaires
;
Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José
Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel,
Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière,
Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye,
Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec,
Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier,
Lucien Lanier, François Marc, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jacques
Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Simon Sutour, Alex
Türk, Maurice Ulrich.
Voir les numéros :
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
Première lecture :
835, 930
et T.A.
142
.
Deuxième lecture :
1017, 1104
et T.A.
186
.
Sénat
: Première lecture :
476
,
511
et T.A.
156
(1997-1998).
Deuxième lecture :
6
(1998-1999)
Justice. |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Réunie le mercredi 4 novembre 1998 sous la
présidence de M. Jacques Larché, président, la
commission a examiné, en deuxième lecture, sur le rapport de
M. Charles Jolibois, le projet de loi constitutionnelle relatif au
Conseil supérieur de la magistrature (CSM).
Le rapporteur s'est félicité que l'Assemblée nationale ait
accepté, en deuxième lecture, la totalité des
modifications introduites à l'initiative de la commission des Lois du
Sénat, à l'exception de deux dispositions techniques, et ait
notamment approuvé le maintien au sein du CSM de deux formations
spécialisées pour le siège et pour le parquet ainsi que la
consécration d'une formation plénière dont la
compétence serait limitée à émettre des avis
à la demande du Président de la République.
Il a constaté qu'un seul point restait en discussion sur le fond,
à savoir les modalités de nomination des procureurs
généraux, l'Assemblée nationale ayant rétabli en
deuxième lecture l'exigence d'un avis conforme du CSM pour la nomination
de ces hauts magistrats alors que le Sénat l'avait supprimée en
première lecture.
Après avoir présenté les différentes
hypothèses envisageables, le rapporteur a proposé à la
commission d'accepter, comme elle l'avait fait en première lecture,
l'exigence d'un avis conforme du CSM pour la nomination de l'ensemble des
magistrats du parquet, tout en estimant qu'il conviendrait de veiller
ultérieurement à ce que le Garde des Sceaux ne soit pas
démuni des moyens lui permettant de garder la maîtrise de
l'application de la politique pénale.
A l'issue d'un débat auquel ont participé MM. Jacques
Larché, président, Guy Allouche, Jean-Jacques Hyest,
Maurice Ulrich, Charles de Cuttoli, Patrice Gélard et
Pierre Fauchon, la
commission a adopté sans modification le
projet de loi constitutionnelle
relatif au Conseil supérieur de la
magistrature issu des travaux de l'Assemblée nationale en
deuxième lecture.
EXPOSE GENERAL
Mesdames, Messieurs,
Après une deuxième lecture à l'Assemblée nationale,
le projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la
magistrature revient aujourd'hui devant le Sénat pour une
deuxième lecture dans une rédaction très proche de celle
retenue par notre assemblée en première lecture.
S'inscrivant dans le prolongement de la révision constitutionnelle de
1993, cette nouvelle réforme du Conseil supérieur de la
magistrature poursuit un double objectif :
- renforcer les pouvoirs de ce Conseil à l'égard des magistrats
du parquet de manière à faire bénéficier ceux-ci de
garanties constitutionnelles d'indépendance comparables à celles
des magistrats du siège ;
- et en même temps élargir sa composition à une
majorité de personnalités extérieures à la
magistrature.
Après avoir adopté ce projet de loi constitutionnelle sans aucune
modification en première lecture, l'Assemblée nationale a
accepté, en deuxième lecture, la quasi totalité des
modifications introduites par le Sénat qui avait pour sa part
profondément amendé le texte en première lecture, suivant
les propositions de votre commission des Lois.
En effet, hormis deux modifications d'ordre technique, l'Assemblée
nationale a entièrement retenu le texte issu des travaux de votre
commission des Lois.
Elle a ainsi notamment approuvé le maintien au sein du Conseil
supérieur de la magistrature de deux formations respectivement
compétentes à l'égard des magistrats du siège et
à l'égard des magistrats du parquet, qui consacre la
spécificité du parquet au niveau constitutionnel.
A ce stade de l'examen parlementaire, un seul point reste en discussion sur le
fond, mais il est d'importance : il s'agit des modalités de
nomination des procureurs généraux. En effet, l'Assemblée
nationale a rétabli en deuxième lecture l'exigence d'un avis
conforme du Conseil supérieur de la magistrature pour la nomination de
ces hauts magistrats alors que le Sénat l'avait supprimée en
première lecture, se prononçant alors en faveur du maintien de
leur régime actuel de nomination en Conseil des ministres sans aucune
intervention du Conseil supérieur de la magistrature.
I. SOUS RÉSERVE DE DEUX MODIFICATIONS TECHNIQUES, L'ASSEMBLÉE NATIONALE A ADOPTÉ LE TEXTE ISSU DES TRAVAUX DE VOTRE COMMISSION DES LOIS EN PREMIÈRE LECTURE
En
deuxième lecture, l'Assemblée nationale a retenu la quasi
totalité des modifications apportées au projet de loi
constitutionnelle par le Sénat, dont le travail a d'ailleurs
été jugé "
excellent
" par
M. Jacques Floch, rapporteur de la commission des Lois,
Mme Elisabeth Guigou, Garde des Sceaux, ayant pour sa part
déclaré que "
les modifications apportées par le
Sénat sont de nature à améliorer le texte de
l'article 65 de la Constitution
".
En effet, si l'on excepte deux modifications d'ordre technique, c'est le texte
issu des travaux de votre commission des Lois qui revient aujourd'hui devant le
Sénat.
Ainsi, l'Assemblée nationale a approuvé le maintien par le
Sénat de deux formations distinctes pour le siège et pour le
parquet au sein du Conseil supérieur de la magistrature. Elle s'est
également rangée aux modalités retenues par le
Sénat pour la nomination des membres du Conseil supérieur de la
magistrature n'appartenant pas à la magistrature.
A. LE MAINTIEN, AU SEIN D'UNE FORMATION PLÉNIÈRE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE, DE DEUX FORMATIONS DISTINCTES RESPECTIVEMENT COMPÉTENTES À L'ÉGARD DES MAGISTRATS DU SIÈGE ET À L'ÉGARD DES MAGISTRATS DU PARQUET
S'inscrivant dans la continuité des positions qu'il
avait
prises en 1993, le Sénat, suivant les propositions de votre commission
des Lois, a jugé nécessaire de maintenir au sein du Conseil
supérieur de la magistrature deux formations distinctes exerçant
séparément les compétences relatives à la
carrière et à la discipline, d'une part, des magistrats du
siège et, d'autre part, des magistrats du parquet.
Constatant que les métiers exercés par ces deux catégories
de magistrats sont profondément différents, puisque les uns
jugent alors que les autres poursuivent et requièrent au nom de la
société, le Sénat a en effet jugé indispensable de
marquer symboliquement cette profonde différence au plus haut niveau de
la hiérarchie des normes, afin d'éviter une regrettable confusion
qui risquerait de mettre en cause le principe fondamental de
l'indépendance du juge par rapport au ministère public.
Aussi a-t-il prévu le maintien de deux formations
spécialisées en adaptant leur composition à la
spécificité des questions traitées, en l'ouvrant à
une majorité de non magistrats et en veillant à ne pas
accroître excessivement le nombre des membres de manière à
conserver des structures de travail opérationnelles :
- une
formation compétente à l'égard des magistrats du
siège
comprenant, outre le Président de la République
et le Garde des Sceaux, 5 magistrats du siège et un magistrat du
parquet, un conseiller d'Etat, comme actuellement, auxquels viennent s'ajouter
6 personnalités extérieures (soit 15 membres seulement,
c'est-à-dire un nombre de membres sensiblement inférieur à
celui de la formation unique initialement prévue par le projet de loi
constitutionnelle qui comportait 23 membres) ;
- et une
formation compétente à l'égard des magistrats
du parquet
comprenant, outre le Président de la République et
le Garde des Sceaux, 5 magistrats du parquet et un magistrat du
siège, le même conseiller d'Etat, comme actuellement, auxquels
viennent également s'ajouter 6 personnalités
extérieures (soit 15 membres comme pour la formation
compétente à l'égard des magistrats du siège).
Cependant, le Sénat, toujours à l'initiative de votre commission
des Lois, a en même temps souhaité réaffirmer le principe
de l'unité de la magistrature pour bien marquer l'égale
dignité des fonctions de magistrat du siège et de magistrat du
parquet.
C'est pourquoi il a entendu consacrer l'institution d'une
formation
plénière
du Conseil supérieur de la magistrature,
jusqu'ici non prévue par la Constitution, à laquelle serait
confiée la compétence d'émettre des avis à la
demande du Président de la République et pour laquelle il a
retenu la composition suivante :
- le Président de la République, président ;
- le Garde des Sceaux, vice-président ;
- 5 magistrats du siège et 5 magistrats du parquet,
élus ;
- et 10 personnalités extérieures (soit un total de
23 membres
comme dans la formation unique initialement
prévue par le projet de loi constitutionnelle).
Afin d'éviter des risques de dérives liées au
développement de la pratique de l'autosaisine apparue depuis 1993, bien
que la Constitution ne l'ait pas non plus prévue, le Sénat a
toutefois souhaité que la possibilité reconnue à la
formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature
d'émettre des avis soit subordonnée à la seule demande du
Président de la République agissant là dans le rôle
de garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire que lui
confie l'article 64 de la Constitution.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a retenu, avec
l'approbation du Gouvernement, la rédaction du Sénat concernant
le maintien des deux formations spécialisées pour le siège
et pour le parquet et la consécration de la formation
plénière chargée d'assister le Président de la
République par sa compétence d'avis.
Mme Elisabeth Guigou, Garde des Sceaux, a en effet indiqué au
cours du débat en séance publique qu'elle était
"
sensible à l'opinion... selon laquelle les magistrats du
parquet exercent des missions d'une nature distinctes de celles du
siège, et dans un cadre différent puisqu'il est
hiérarchisé
" et que le Gouvernement n'était
"
pas opposé au maintien de deux formations au sein du Conseil
supérieur, dès lors que juges et parquetiers
bénéficieront de garanties comparables et que l'institution d'une
formation plénière pour répondre aux demandes d'avis du
Président de la République marquera nettement l'unité du
corps
".
B. LES MODALITÉS RETENUES POUR LA DÉSIGNATION DES PERSONNALITÉS EXTÉRIEURES APPELÉES À FAIRE PARTIE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE
Lors de
l'examen du projet de loi constitutionnelle en première lecture, le
Sénat s'est montré favorable à l'ouverture de la
composition du Conseil supérieur de la magistrature à une
majorité de non-magistrats, qui lui est apparue comme une
nécessaire contrepartie de l'accroissement de ses pouvoirs, afin
d'écarter tout risque de dérive corporatiste. Il a d'ailleurs
tenu à ce que cette majorité de non-magistrats soit
assurée, non seulement au sein de la formation plénière,
mais également au sein de chacune des formations
spécialisées.
Suivant les propositions de votre commission des Lois, le Sénat a
cependant modifié sur deux points les modalités de la
désignation des personnalités extérieures prévues
par le projet de loi constitutionnelle.
Après s'être interrogé sur l'opportunité de la
désignation de deux membres par le Président du Conseil
économique et social, il a jugé préférable de
substituer à cette désignation un
accroissement de deux
à quatre du nombre des membres désignés conjointement par
les trois présidents des plus hautes
juridictions
françaises
, à savoir le vice-président du Conseil
d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier
président de la Cour des comptes.
En effet, il a eu le souci d'établir un certain équilibre entre
les membres désignés par des autorités issues du suffrage
universel (le Président de la République, le Président de
l'Assemblée nationale et le Président du Sénat
désignant chacun deux personnalités) et ceux
désignés par des autorités juridictionnelles.
Par ailleurs, de manière à ne pas fausser le rapport entre
magistrats et non-magistrats au sein du Conseil supérieur de la
magistrature, le Sénat a précisé que ne pourraient
être désignées comme membre de ce Conseil que des
"
personnalités n'appartenant ni au Parlement, ni à
l'ordre judiciaire, ni à l'ordre administratif
", cette
rédaction excluant la désignation d'un parlementaire en exercice
ou d'un magistrat en exercice, qu'il soit issu des juridictions judiciaires,
administratives ou financières.
Là encore, sur ces deux points, l'Assemblée nationale, avec
l'approbation du Gouvernement, s'est rangée à la rédaction
adoptée par le Sénat.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté sans modification
l'article 1er A
introduit par le Sénat afin de
préciser explicitement à l'article 19 de la Constitution que
la nomination de membres du Conseil supérieur de la magistrature fait
partie des compétences du Président de la République que
ce dernier exerce sans contreseing.
L'Assemblée nationale a donc très largement retenu le texte du
Sénat, ne se déclarant en désaccord avec lui que sur un
seul point, même si celui-ci revêt une importance
particulière : il s'agit de la nomination des procureurs
généraux.
II. UN SEUL POINT DE DÉSACCORD IMPORTANT SUBSISTE AUJOURD'HUI ENTRE LES DEUX ASSEMBLÉES : LA NOMINATION DES PROCUREURS GÉNÉRAUX
Hormis deux modifications d'ordre technique, l'Assemblée nationale n'a modifié le texte du Sénat que sur un seul point : la nomination des procureurs généraux.
A. LE PROBLÈME DE LA NOMINATION DES PROCUREURS GÉNÉRAUX : LE RÉTABLISSEMENT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE DE L'EXIGENCE D'UN AVIS CONFORME DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE, SUPPRIMÉE PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE
En
première lecture, le Sénat a approuvé l'extension des
compétences du Conseil supérieur de la magistrature à
l'égard des magistrats du parquet, prévue par le projet de loi
constitutionnelle, mais il a souhaité maintenir l'exception actuelle
à l'intervention de ce Conseil concernant la nomination des procureurs
généraux, en adoptant à cette fin un sous-amendement
à l'amendement de votre commission des Lois, sous-amendement
présenté par notre collègue Charles Ceccaldi-Raynaud.
En effet, si le Sénat a accepté de prévoir l'exigence d'un
avis conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de
la magistrature pour la nomination de l'ensemble des magistrats du parquet
autres que les procureurs généraux, au lieu de l'avis simple
actuellement requis pour la nomination de ces magistrats, il a toutefois exclu
que l'avis conforme s'étende à la nomination des
procureurs
généraux
qui sont
actuellement nommés
en
Conseil des ministres
sans aucune intervention du Conseil supérieur
de la magistrature
.
Le Sénat s'est donc prononcé en faveur du maintien du
régime actuel de nomination en Conseil des ministres
du procureur
général près la Cour de cassation et des
35 procureurs généraux près les cours d'appel qui,
aux termes du code de procédure pénale, sont chargés de
veiller à l'application de la loi pénale dans toute
l'étendue du ressort de leur cour d'appel et ont une autorité
hiérarchique sur l'ensemble des magistrats du parquet de ce même
ressort.
En laissant la nomination de ces hauts magistrats à
l'appréciation du Gouvernement, il a entendu tenir compte de leurs
responsabilités particulières en matière de coordination
de l'action publique et d'application de la politique pénale
définie par le Garde des Sceaux.
Cependant, l'Assemblée nationale a refusé le maintien de cette
exception et a rétabli l'exigence d'un avis conforme du Conseil
supérieur de la magistrature pour la nomination des procureurs
généraux, considérant qu'il était indispensable que
ceux-ci bénéficient des mêmes garanties de nomination que
les autres magistrats du parquet.
De même que M. Jacques Floch, rapporteur de la commission des Lois
de l'Assemblée nationale, Mme Elisabeth Guigou, Garde des
Sceaux, a en effet estimé que l'exception introduite par le Sénat
concernant les procureurs généraux rompait la cohérence de
la réforme qu'elle proposait, déclarant que "
l'exigence
d'un avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature pour la
nomination de tous les magistrats du parquet, sans exception, est... seule de
nature à écarter le soupçon d'intervention de
l'exécutif dans les affaires particulières
".
B. LES DEUX MODIFICATIONS TECHNIQUES APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE AU TEXTE DU SÉNAT
Les deux
autres modifications apportées par l'Assemblée nationale au texte
du Sénat portent sur des points techniques et n'ont qu'une importance
mineure.
Tout d'abord, l'Assemblée nationale n'a pas jugé
nécessaire de faire figurer dans le texte même de la Constitution
la précision apportée par le Sénat quant aux
modalités de nomination des présidents de certaines
juridictions d'outre-mer
.
En première lecture, le Sénat, reprenant à son compte une
proposition de loi constitutionnelle présentée par notre ancien
collègue Daniel Millaud, a souhaité préciser explicitement
que les magistrats des territoires et des collectivités territoriales
d'outre-mer présidant les tribunaux supérieurs d'appel et les
tribunaux de première instance, qui constituent des juridictions
équivalentes aux cours d'appel et aux tribunaux de grande instance,
bénéficiaient des mêmes garanties de nomination que leurs
collègues de métropole et qu'ils étaient donc
nommés sur proposition de la formation du Conseil supérieur de la
magistrature compétente à l'égard des magistrats du
siège.
Cependant, Mme Elisabeth Guigou, Garde des Sceaux, ayant
déclaré en séance publique que selon une coutume constante
les présidents de ces juridictions étaient déjà
nommés sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature,
l'Assemblée nationale, animée par le souci de ne pas alourdir le
texte constitutionnel et de ne pas compliquer d'éventuelles
modifications ultérieures de l'organisation des juridictions outre-mer,
a jugé préférable de ne pas faire figurer la
précision apportée par le Sénat dans le texte même
de la Constitution et de la renvoyer à la loi organique.
La dernière des modifications apportées par l'Assemblée
nationale au texte du Sénat est d'ordre purement formel et concerne
l'
article 2
, relatif aux
dispositions transitoires
.
Le Sénat avait prévu l'insertion de ces dispositions dans le
corps même de la Constitution, en utilisant le cadre de son
article 90 laissé vacant à la suite de l'abrogation de cet
article par la loi constitutionnelle du 4 août 1995.
L'Assemblée nationale a complété formellement cette
insertion en faisant précéder le rétablissement de
l'article 90 par le rétablissement d'un titre XVII
intitulé "
Dispositions transitoires
".
III. LA PROPOSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : L'ADOPTION SANS MODIFICATION DU TEXTE RETENU PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN DEUXIÈME LECTURE
Votre
commission des Lois se félicite que l'Assemblée nationale ait
approuvé les modifications du projet de loi constitutionnelle issues de
ses travaux et ait largement facilité la recherche d'un accord entre les
deux Assemblées en adoptant un texte très voisin de celui retenu
par le Sénat.
Elle vous propose tout d'abord d'accepter les deux modifications de
caractère technique apportées par l'Assemblée nationale au
texte adopté par le Sénat.
En particulier, partageant le souci d'allégement du texte
constitutionnel manifesté par l'Assemblée nationale, votre
commission ne voit pas d'objection à ne pas faire figurer explicitement
les juridictions d'outre-mer dans le texte même de la Constitution, sous
réserve de préciser ultérieurement dans la loi organique
que ces juridictions sont assimilées aux juridictions
équivalentes de métropole quant à la procédure de
nomination de leurs présidents.
En ce qui concerne la question de la nomination des procureurs
généraux, elle constate que le texte adopté par
l'Assemblée nationale rejoint la position qu'elle avait prise lors de
l'examen du projet de loi constitutionnelle en première lecture,
puisqu'elle n'avait pas elle-même jugé nécessaire de
prévoir une exception à l'exigence d'un avis conforme de la
formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature pour
la nomination des magistrats du parquet.
Souhaitant que les deux Assemblées puissent parvenir à un accord
afin de permettre l'aboutissement de cette révision constitutionnelle
qu'elles ont toutes deux approuvé dans son principe,
votre commission
des Lois
vous propose
de retenir la rédaction de
l'Assemblée nationale sur ce point et donc
d'accepter que l'ensemble
des magistrats du parquet soient désormais nommés sur l'avis
conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de la
magistrature.
Elle considère cependant que le Garde des Sceaux doit conserver la
maîtrise de l'application de la politique pénale
qui ne peut
relever que de sa seule responsabilité.
Votre commission sera donc particulièrement vigilante sur ce point lors
de l'examen du projet de loi relatif à l'action publique en
matière pénale, car il importe que le Garde des Sceaux ne se
trouve pas démuni de moyens lui permettant d'assurer une application
uniforme de la politique pénale sur l'ensemble du territoire.
Plus généralement,
elle tient à rappeler que la
révision constitutionnelle
relative au Conseil supérieur de
la magistrature
constitue la clé de voûte d'une réforme
d'ensemble de la justice qui doit être appréciée dans sa
globalité.
Cette réforme concerne également d'autres sujets importants comme
les garanties offertes aux justiciables ou la responsabilité des
magistrats qui seront abordés à l'occasion de l'examen du projet
de loi relatif à la présomption d'innocence ou du projet de loi
organique envisagé sur le statut des magistrats, qui n'est pas
directement conditionné par le texte constitutionnel.
*
* *
Au bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission des Lois vous propose d'adopter sans modification le présent projet de loi constitutionnelle.