Rapport n° 73 - Tome III -Financement de la Sécurité sociale - Assurance vieillesse
M. Alain VASSELLE, Sénateur
Commission des Affaires sociales - Rapport n° 73 - Tome III - 1997-1998
Table des matières
-
I. ÉTAT DES LIEUX : LES DÉFICITS DE L'ASSURANCE VIEILLESSE SE STABILISENT
MAIS LA SITUATION RESTE PRÉOCCUPANTE À LONG TERME
- A. LE DÉFICIT DE LA BRANCHE VIEILLESSE SE STABILISE
- B. LES RÉGIMES COMPLÉMENTAIRES DE L'AGIRC ET DE L'ARRCO ENREGISTRENT LES PREMIERS EFFETS POSITIFS DES ACCORDS DU 25 AVRIL 1996
- C. LA SITUATION DES RÉGIMES SPÉCIAUX EST TOUJOURS AUSSI DIFFICILE A APPRÉHENDER
- D. LES PERSPECTIVES À LONG TERME DE L'ENSEMBLE DES RÉGIMES D'ASSURANCE VIEILLESSE RESTENT INQUIÉTANTES
-
II. LES MESURES PONCTUELLES ET D'INSPIRATION SOUVENT CRITIQUABLE PROPOSÉES PAR
LE PROJET DE LOI NE DISPENSERONT PAS D'UN EXAMEN DES PROBLÈMES IMMÉDIATS ET
D'UNE RÉFLEXION EN PROFONDEUR SUR L'AVENIR DE NOTRE SYSTÈME DE RETRAITE
- A. S'AGISSANT DE L'ASSURANCE VIEILLESSE, LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT NE CONTIENT QUE DES DISPOSITIONS DE PORTÉE MODESTE ET D'INSPIRATION SOUVENT CRITIQUABLE
- B. DE NOMBREUX PROBLÈMES IMMÉDIATS DOIVENT POURTANT ÊTRE RAPIDEMENT EXAMINÉS
- C. LA RÉFLEXION SUR L'AVENIR DE NOTRE SYSTÈME DE RETRAITE DOIT ÊTRE POURSUIVIE
-
III. LA PRESTATION SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE AMÈNE LA BRANCHE VIEILLESSE À
REDÉFINIR LES AXES PRIORITAIRES DE SON ACTION SOCIALE
-
A. LA LOI DU 24 JANVIER 1997 INSTITUANT LA PRESTATION SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE
DEVRAIT FAVORISER UNE MEILLEURE COORDINATION DE LA PRISE EN CHARGE DES
PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES
- 1. La loi du 24 janvier 1997 constitue une étape importante dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes
- 2. La loi instaure une coordination entre les différents intervenants
- 3. L'entrée en vigueur de la PSD en établissement reste conditionnée à la réforme de la tarification des établissements
- B. LA BRANCHE VIEILLESSE EST AMENÉE À RECENTRER SON ACTION SOCIALE SUR CERTAINES CATÉGORIES DE PERSONNES ÂGÉES
-
A. LA LOI DU 24 JANVIER 1997 INSTITUANT LA PRESTATION SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE
DEVRAIT FAVORISER UNE MEILLEURE COORDINATION DE LA PRISE EN CHARGE DES
PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES
N° 73
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 5 novembre 1997
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME III
ASSURANCE VIEILLESSE
Par M. Alain VASSELLE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jean-Pierre Fourcade,
président
; Jacques Bimbenet, Mme
Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Bernard Seillier,
Louis Souvet,
vice-présidents
; Jean Chérioux, Charles
Descours, Roland Huguet, Jacques Machet,
secrétaires
;
François Autain, Henri Belcour, Paul Blanc, Mmes Annick
Bocandé, Nicole Borvo, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis
Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Mme Dinah Derycke, M.
Jacques Dominati, Mme Joëlle Dusseau, MM. Alfred Foy, Serge Franchis,
Alain Gournac, André Jourdain, Jean-Pierre Lafond, Pierre Lagourgue,
Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain
,
Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marquès,
Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin,
MM. Sosefo Makapé Papilio, André Pourny, Mme Gisèle
Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau,
Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
303
,
385
,
386
et T.A.
22
.
Sénat
:
70
(1997-1998).
Sécurité sociale. |
Mesdames, Messieurs,
Les régimes de retraite couvrent douze millions de personnes et
pèsent d'un poids considérable dans l'économie
française. Les prestations versées par les régimes
obligatoires représentaient, en 1995, 12,5 % de la richesse
nationale.
La branche vieillesse ne donne pourtant pas lieu, dans le texte du projet de
loi de financement, à de longs développements. Nul ne peut
cependant ignorer ce qui va se passer dans les années à venir et
les problèmes que généreront les
déséquilibres grandissants.
L'adaptation de nos régimes de retraite aux évolutions
démographiques et économique est l'un des chantiers les plus
difficiles des gouvernements successifs dans les vingt années à
venir. On ne peut que regretter que l'année 1998 se présente,
à cet égard, comme une année perdue.
Votre rapporteur a d'abord souhaité dresser l'état des lieux de
la branche vieillesse : il constatera que les déficits se stabilisent
mais que la situation reste toujours préoccupante à long terme.
Dans un deuxième temps, il évoquera les mesures ponctuelles et
d'inspiration souvent critiquable contenues dans le projet de loi du
Gouvernement, mesures qui ne dispenseront pas d'un examen des problèmes
immédiats et d'une réflexion en profondeur sur l'avenir des
régimes de retraite.
Enfin, il étudiera comment l'instauration de la prestation
spécifique dépendance a conduit la branche vieillesse à
redéfinir les axes prioritaires de son action sociale.
I. ÉTAT DES LIEUX : LES DÉFICITS DE L'ASSURANCE VIEILLESSE SE STABILISENT MAIS LA SITUATION RESTE PRÉOCCUPANTE À LONG TERME
Il convient de rappeler que la population totale de la France
métropolitaine était estimée, au
1
er
janvier 1997, à 58,5 millions d'habitants dont
11,8 millions de personnes de 60 ans ou plus et 3,8 millions de
personnes de 75 ans ou plus. Le ratio des retraités
" potentiels " (d'âge supérieur ou égal à
60 ans) aux cotisants " potentiels " (d'âge compris
entre
20 et 59 ans) s'établit à 37 %.
La population des personnes de 60 ans ou plus continuera de croître
au cours des prochaines décennies : selon les projections de population
de l'INSEE (avec une hypothèse de fécondité de
1,8 enfant par femme), la part des 60 ans ou plus atteindra
26,8 % à l'horizon 2020 et le ratio retraités
potentiels/cotisants potentiels est estimé à 53 %.
Parallèlement, avec l'accroissement de l'espérance de vie, le
poids des personnes de 75 ans ou plus augmentera, notamment à
partir de 2005.
Population française de 60 ans et plus
en milliers
1975 |
1980 |
1985 |
1990 |
1995 |
1996 |
1997 |
|
60 ans et plus |
9.670 |
9.234 |
9.971 |
10.774 |
11.604 |
11.732 |
11.848 |
75 ans et plus |
2.656 |
3.117 |
3.465 |
3.847 |
3.533 |
3.702 |
3.852 |
60 ans et
plus/
|
|
|
|
|
|
|
|
75 ans et
plus/
|
|
|
|
|
|
|
|
Situation au 1
er
janvier en France
métropolitaine
En 1995, la France comptait 11,8 millions de retraités pour
21,5 millions de cotisants (19,1 millions de salariés et 2,4
millions de non salariés). 18 millions de pensions de base
étaient servis dans l'ensemble des régimes de base. Les
prestations vieillesse représentaient 12,5% du produit intérieur
brut (PIB).
Les régimes d'assurance vieillesse sont extrêmement
nombreux : plus de 120 régimes de bases, environ 180 caisses de
retraite complémentaire obligatoire dont 59 regroupées au sein de
l'Association général des institutions de retraite des cadres
(AGIRC) et 113 au sein de l'Association des régimes de retraite
complémentaire (ARRCO). En outre, il existe une centaine de caisses de
retraite complémentaire dites facultatives qui correspondent à
des dispositifs conventionnels d'entreprise.
Les régimes de retraite de base - dont une vingtaine verse 99,9% du
total des retraites de base - se répartissent en trois blocs :
· le régime général des travailleurs
salariés de l'industrie et du commerce, géré par la Caisse
nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS), et
le régime des salariés agricoles, géré par la
mutualité sociale agricole (MSA) ;
· les régimes de non-salariés :
- la caisse autonome d'assurance vieillesse des artisans (CANCAVA) ;
- la caisse autonome d'assurance vieillesse des industriels et des
commerçants (ORGANIC) ;
- la mutualité sociale agricole pour le régime des
exploitants agricoles (MSA) ;
- la caisse nationale des barreaux français (CNBF) ;
- la caisse d'assurance vieillesse des cultes (CAMAVIC) ;
- les régimes spéciaux de salariés : au nombre
de 55 et créés avant 1930, les pensions qu'ils servent
constituent à la fois la pension de base et la pension
complémentaire. Ces régimes couvrent notamment les fonctionnaires
de l'Etat, les agents des collectivités locales (Caisse nationale des
ressortissants et agents des collectivités locales - CNRACL), le
personnel d'EDF, de la SNCF et de la RATP.
L'ensemble des prestations versées par les régimes de retraite
s'élevait à 941 milliards de francs en 1996, réparties
entre le régime général (37%), les régimes
spéciaux de salariés (27%), les régimes
complémentaires de salariés (25%), les régimes de non
salariés (9%) et les régimes complémentaires de non
salariés (2%).
PRESTATIONS DES RÉGIMES DE RETRAITE
(PARTICIPANT A LA SÉCURITÉ SOCIALE)
Milliards de francs |
1994 |
1995 |
1996(p) |
% 96/94 |
Régime général |
317 |
331 |
349 |
10 |
Régimes spéciaux salariés |
237 |
247 |
256 |
8 |
Régimes complémentaires de salariés |
214 |
227 |
236 |
10 |
Régimes de non salariés |
78 |
80 |
82 |
5 |
Régimes complémentaires de non salariés |
13 |
14 |
15 |
15 |
Divers |
3 |
3 |
3 |
- 1 |
Tous régimes |
862 |
902 |
941 |
9 |
Source : Direction de la sécurité sociale
PRESTATIONS DES RÉGIMES DE
RETRAITE
Prévisions 1996
Source : Direction de la sécurité sociale
S'agissant des retraites, les éléments d'information dont on
dispose sont relativement dispersés, puisqu'ils proviennent des
différentes caisses. Cependant, le SESI a constitué un
échantillon interrégimes de retraités qui permet de
reconstituer l'ensemble des avantages vieillesse perçus par un
retraité, en 1993 (lorsqu'ils sont versés par des caisses faisant
partie des régimes de retraite obligatoires). Cet échantillon
n'est composé que de retraités de 65 ans et plus.
Selon cet échantillon, seuls 43 % des retraités de 65 ans
n'ont que le régime général comme régime
d'affiliation ; 23 % ont un régime d'affiliation unique autre que
le régime général et 34 % ont plusieurs
régimes.
Tableau 2 : Pensions perçues selon le régime de base et le type de carrière (1993)
Effectifs en % |
Retraite mensuelle en francs |
|
Un seul régime d'affiliation |
66,1 |
|
. Régime général (RG) |
43,4 |
4.869 |
- cadres (3) |
||
affiliation à l'AGIRC supérieure à 15 ans |
4,5 |
14.682 |
affiliation à l'AGIRC inférieure à 15 ans |
1,6 |
8.810 |
- autres |
37,3 |
3.612 |
. Exploitants agricoles |
11,4 |
1.712 |
. Fonctionnaires |
4,7 |
10.113 |
. Artisans commerçants |
1,2 |
2.145 |
. Salariés agricoles |
1,1 |
2.842 |
. Autre régime (mines, marine, EDF, SNCF, etc.) |
4,3 |
6.675 |
Plusieurs régimes d'affiliation |
33,9 |
|
. RG et régime salarié agricole |
6,1 |
5.195 |
. RG et régime exploitant agricole |
4,6 |
3.339 |
. RG et régime artisan ou commerçant |
4,6 |
5.028 |
. RG et régime fonctionnaire |
2,6 |
10.126 |
. RG et un autre régime de base |
5,1 |
8.649 |
Ensemble |
100,0 |
5.094 |
Champ : Ensemble des retraités de 65 ans et plus ;
avantages principaux et complémentaires hors avantages accessoires,
réversion et allocation supplémentaire du FNS.
Source : SESI, échantillon interrégimes de retraités
1993.
Il existe plusieurs types d'avantages liés à la vieillesse. Selon
l'échantillon interrégimes de retraités, les
"
avantages principaux de droit direct
" constituent
en
moyenne 86 % du montant de la retraite globale. A cela s'ajoutent des
" avantages accessoires " (tels que la bonification pour
enfants ou
la majoration pour conjoint à charge) qui constituent en moyenne
6 % de la retraite et les pensions de réversion qui comptent pour
8 % de la retraite. Ces dernières, instaurées pour limiter
les difficultés financières éventuelles liées au
veuvage, concernent essentiellement les femmes (un tiers d'entre elles en
perçoivent une pour un montant qui représente 20 % de la
retraite globale des femmes) et très peu les hommes (3 % d'entre
eux en perçoivent, pour un montant qui est inférieur à
0,5 % de la retraite globale des hommes). Au total, un retraité
perçoit en moyenne 2,5 pensions de droit direct dont 1,4 provient des
régimes de base et 1,1 des régimes complémentaires.
A. LE DÉFICIT DE LA BRANCHE VIEILLESSE SE STABILISE
La branche vieillesse du régime général
(CNAVTS) est le régime de base obligatoire pour tous les salariés
du secteur privé. Deux régimes complémentaires
obligatoires lui sont liés : l'ARRCO pour l'ensemble des
salariés, l'AGIRC pour les cadres.
La CNAVTS a distribué plus de huit millions d'avantages principaux de
droit direct en 1995, à une population qui représente près
de 70 % de la population de la France métropolitaine
âgée de 60 ans et plus. De plus, elle a versé plus de
500.000 droits de réversion à des veufs ou veuves non titulaires
de droits directs du régime général. Au total,
8,5 millions de personnes perçoivent au moins un avantage
vieillesse en provenance de la CNAVTS.
Le déficit de la branche vieillesse s'est élevé à
7,9 milliards de francs en 1996. Le déficit prévisionnel est
estimé à 8,5 milliards en 1997 et devrait atteindre en 1998,
selon l'évolution tendancielle retenue, 8,3 milliards de francs.
Les dispositions contenues dans le projet de loi de financement
1(
*
)
ramèneraient le déficit à
4,3 milliards de francs.
Si le déficit est donc à peu près stabilisé, il est
pourtant loin d'être résorbé : l'annexe
c
du
projet de loi - qui intègre l'impact des mesures qui y figurent -
prévoit un nouveau déficit de 6,8 milliards en francs en 1999 et
de 8,6 milliards de francs en 2000.
Le rythme d'évolution en volume des prestations versées se
ralentit régulièrement depuis 1995, passant pour l'ensemble des
droits directs de +3,6% en 1995 à +3,2% en 1996, à +3,0% en 1997
et à +2,8% en 1998. Cette évolution tient à un contexte
démographique plus favorable - l'arrivée des classes creuses
nées avant la guerre - ainsi qu'aux effets de la réforme des
retraites de 1993 dont l'impact financier devrait être d'environ 1
milliard de francs en 1996, de 1,5 milliard de francs en 1997 et de 2 milliards
de francs en 1998.
Il convient de rappeler que les mesures adoptées en 1993 par le
Gouvernement de M. Edouard Balladur visaient à enrayer la
dégradation de la situation financière du régime
général et prévoyaient :
- un allongement de la durée d'assurance prise en compte pour
bénéficier d'une pension à taux plein. Cette durée
passe progressivement de 150 trimestres à 160 trimestres, soit 40
annuités, par adjonction d'un trimestre supplémentaire par an
à compter du 1
er
janvier 1994 ;
- une extension de la période de référence : les
pensions du régime général seront calculées
à l'avenir sur la base des 25 meilleures années de
carrière, au lieu de 10 années actuellement. Cette
opération est également réalisée de façon
progressive, par adjonction d'une année supplémentaire tous les
ans ;
- une indexation des pensions de retraite sur les prix à la
consommation, pérennisant une pratique de fait depuis 1987. Cette mesure
est valable cinq ans, jusqu'à la fin de l'année 1998.
Pour importante qu'elle soit, cette réforme des retraites n'aurait pas
suffi à elle seule à limiter l'aggravation des déficits.
La stabilisation actuelle résulte aussi de l'augmentation des recettes
de la CNAVTS depuis 1993. Quatre dispositions législatives de recettes
ont en effet permis, depuis cette date, de redresser le solde du régime
général d'assurance vieillesse :
- le relèvement d'1,3 point du taux de la contribution sociale
généralisée au 1
er
juillet 1993 et la
création du fonds de solidarité vieillesse au 1
er
janvier 1994 ;
- la suppression de la remise mensuelle forfaitaire de 42 francs au
1er septembre 1995 ;
- la création de la Caisse d'amortissement de la dette sociale
(CADES) et de la contribution de remboursement de la dette sociale, ainsi que
la taxe de 6 % sur les contributions à la prévoyance
complémentaire, prévues par le plan de réforme de la
protection sociale de novembre 1995.
La création du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et les
recettes apportées par la CSG de juillet 1993 ont permis
d'améliorer l'équilibre de la CNAVTS de 39,2 milliards de
francs. Ce montant correspond aux versements du FSV à la CNAVTS et au
régime des salariés agricoles (dont le solde est retracé
en dépenses du régime général) qui ne correspondent
pas à des dépenses de ces régimes prises en charge,
antérieurement au 1
er
janvier 1994, par d'autres organismes,
notamment le Fonds national de solidarité et le Fonds spécial
d'allocation vieillesse. Il intègre le fait que ce dernier fonds
était lui-même financé par les régimes de
vieillesse, la création du FSV ayant conduit à supprimer la
dépense correspondante pour les régimes.
Ce chiffre est estimé à partir des transferts du FSV de
l'exercice 1996, recalculés, pour les versements liés aux
validations de période de chômage et de service national, sur la
base de l'assiette forfaitaire qui prévalait avant le plan de
réforme de la sécurité sociale de novembre 1995,
égale à 60 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance.
La suppression de la remise mensuelle forfaitaire de 42 F sur les cotisations
salariales d'assurance vieillesse, instaurée lors de la création
de la CSG en 1991, a permis de majorer les recettes de la CNAVTS et du
régime des salariés agricoles de 7,3 milliards de francs en
année pleine.
Enfin, la création de la CADES et de la CRDS, ainsi que l'instauration
de la taxe de 6 % sur les contributions à la prévoyance
complémentaire des salariés, ont permis de libérer le
Fonds de solidarité vieillesse du versement de 12,5 milliards de francs
à l'Etat, correspondant à l'amortissement, en capital et en
intérêts, de la dette du régime général de
110 milliards de francs apurée au 31 décembre 1993.
Ces recettes ont permis de majorer les transferts au profit de la CNAVTS et du
régime des salariés agricoles de 11,6 milliards de francs,
grâce au relèvement de 60 % à 90 % du SMIC de l'assiette
forfaitaire servant de base aux transferts de validation de période de
chômage et de service national.
Elles ont par ailleurs permis de rééquilibrer le FSV, qui a
parallèlement pris en charge, à compter de 1996, les majorations
de pension pour enfants du régime des exploitants agricoles.
Au total, en année pleine 1996, on peut estimer à 58 milliards de
francs l'effet sur le solde du régime général d'assurance
vieillesse de l'augmentation des flux financiers qui lui sont destinés
depuis 1993.
On mesure là l'effort important accompli par la collectivité pour
sauvegarder la branche vieillesse du régime général.
B. LES RÉGIMES COMPLÉMENTAIRES DE L'AGIRC ET DE L'ARRCO ENREGISTRENT LES PREMIERS EFFETS POSITIFS DES ACCORDS DU 25 AVRIL 1996
Pour faire face aux difficultés annoncées, les régimes complémentaires, gérés sur le mode paritaire, ont emprunté la voie de la négociation collective, ajustant progressivement les règles de fonctionnement des régimes aux nouvelles contraintes financières. Les accords du 25 avril 1996 ont permis de préserver la situation de ces régimes pour les prochaines années.
1. Les accords du 25 avril 1996
Les régimes ARRCO (qui couvrent l'ensemble des
salariés du secteur privé, y compris les cadres) et le
régime AGIRC (qui couvre les seuls cadres) ont fait l'objet de
modifications importantes entre 1993 et 1996, décidées dans le
cadre d'accords nationaux interprofessionnels. Ces accords sont principalement
destinés à assurer l'équilibre financier des
régimes complémentaires de retraite, mais ils ont
également mis en place un certain nombre de réformes
institutionnelles.
Les accords adoptés en février 1993 et en février 1994 se
sont avérés insuffisants pour équilibrer les
régimes complémentaires à long terme et les analyses
effectuées préalablement à la signature des accords de
1996 faisaient état d'un besoin de financement estimé à 37
milliards de francs pour les régimes ARRCO et à 130 milliards de
francs pour le régime AGIRC d'ici 2005. Ces perspectives ont donc
conduit à la signature de trois accords datés du 25 avril 1996,
l'un concernant l'ARRCO, l'autre AGIRC et le troisième, des dispositions
communes aux deux régimes.
Conclus pour la période allant du 1
er
janvier 1996 au 31
décembre 2005, ces accords introduisent deux modifications
institutionnelles importantes : ils prévoient la fusion de l'ensemble
des régimes ARRCO en un régime unique de retraite à
compter du 1
er
janvier 1999 et ils instaurent, par ailleurs, un
mécanisme de compensation financière entre l'AGIRC et l'ARRCO.
Ces accords prévoient également un certain nombre de dispositions
financières visant à équilibrer sur le long terme les deux
régimes :
·
Les augmentations des taux de cotisations minimaux
Pour l'ARRCO, les accords prévoient de rendre obligatoires pour les
non-cadres les taux de cotisations jusque-là facultatifs sur la tranche
B, selon un calendrier prévisionnel étalé jusqu'en 2005
où le taux sera fixé à 16 % pour tous les salariés.
Pour l'AGIRC, le calendrier de passage à un taux obligatoire de
cotisations de 16 % sur les tranches B et C est accéléré,
ce taux de 16 % devant être atteint à compter du 1
er
janvier 1999.
·
La diminution des rendements
Par ailleurs, des modifications des taux de rendement ont été
décidés pour les deux régimes. La révision des
modes de calcul du salaire de référence conduiront, pour un
salaire constant et pour un même taux de cotisation, à attribuer
moins de points en 2000 qu'en 1995 : 14,5 % de moins pour l'ARRCO et 21 % de
moins pour l'AGIRC.
Les comptes 1997-1998 de l'AGIRC et de l'ARRCO illustrent les effets
considérables de la réforme de 1996 :
" c'est un
élément majeur pour l'équilibre des régimes
complémentaires "
juge d'ailleurs le rapport de la Commission
des comptes de la sécurité sociale.
S'agissant de l'AGIRC, les accords du 25 avril 1996 ont produit -pour des
raisons évidentes- des effets très limités sur l'exercice
1996. Leurs répercussions sur les comptes 1997 et 1998 devraient en
revanche être très importantes : le solde devrait être
amélioré de 3,2 milliards de francs en 1997 et de 5,8 milliards
en 1998. Sans les dispositions prévues par les accords, les
déficits se seraient élevés à 6,5 milliards de
francs en 1997 et à 8,8 milliards de francs en 1998.
S'agissant de l'ARRCO, la mise en uvre des accords devrait se traduire par une
amélioration des soldes de 2 milliards de francs en 1997 et de
4 milliards de francs en 1998. Sans ces mesures, les soldes se seraient
élevés à - 3 milliards de francs en 1997 et à
+ 0,9 milliard de francs en 1998.
2. Le contentieux du financement des droits à retraite pour les périodes indemnisées au titre du Fond national pour l'emploi et du régime de solidarité n'est pas encore réglé
Pour votre rapporteur, il importe de trouver dans les
meilleurs délais une solution pour la mise en uvre de l'engagement de
l'Etat de financer les droits de retraite attribués par les
régimes de retraites complémentaires afférents aux
périodes pendant lesquelles les salariés sont indemnisés
au titre du Fonds national de l'emploi (FNE) ou des autres allocations du
régime de solidarité.
Selon l'ARRCO et l'AGIRC, la situation était la suivante au 31
décembre 1996 :
- l'AGIRC avait attribué au titre de ces périodes 300
millions de points qui représentaient un montant de cotisations en
valeur actualisée supérieur à 7 milliards de francs
(valeur 1996). Le montant des allocations de retraite correspondant à
ces droits, servies de 1984 à 1996, s'élève à
1,3 milliard de francs. L'AGIRC n'a reçu des pouvoirs publics qu'un
acompte de 257.000 F en mars 1988.
- Les régimes adhérant à l'ARRCO ont attribué,
au titre des périodes indemnisées par le régime de
préretraites et le régime de solidarité, des points qui
représentent un montant de cotisations de 28 milliards de francs
environ. Le montant des allocations de retraite correspondant à ces
droits, versées de 1984 à 1996, s'élève à
3,9 milliards de francs. Pour le seul exercice 1996, les allocations servies au
titre de ces périodes se sont élevées à 1,1
milliard de francs.
Dans ce contexte, les partenaires sociaux ont décidé de suspendre
les attributions de points pour les périodes indemnisées par le
régime de solidarité commençant après le 30 juin
1996 tant que les financements correspondants n'auraient pas été
reçus. Cette décision a été signifiée par
leur institution de retraite aux salariés affiliés aux
différents régimes et concernés par ces dispositions. Les
premières liquidations de pensions affectées par cette suspension
sont en cours.
Il devient donc nécessaire de trouver rapidement une solution permettant
de rétablir la liquidation complète des allocations des
salariés concernés et d'examiner parallèlement les
conditions dans lesquelles pourra être progressivement remboursée
par l'Etat la dette équivalant au nombre de points attribués de
1984 à 1996.
A l'occasion son audition par la commission des Affaires sociales, le 22
octobre 1997, votre rapporteur a interrogé Mme Martine Aubry, Ministre
de l'Emploi et de la Solidarité, sur ses intentions quant au versement
de la compensation due aux régimes ARRCO et AGIRC.
Mme Martine Aubry a répondu que cette question n'avait pas
été réglée par les gouvernements qui l'avaient
précédée et qu'elle souhaitait une mise à plat de
la situation dans ce secteur.
C. LA SITUATION DES RÉGIMES SPÉCIAUX EST TOUJOURS AUSSI DIFFICILE A APPRÉHENDER
Il n'existe aujourd'hui aucun moyen de connaître la
situation réelle des régimes spéciaux, dont le financement
est assuré par des cotisations fictives d'employeur
2(
*
)
ou par une subvention d'équilibre :
leur solde est par définition toujours nul.
Comme le souligne la Commission des comptes de la sécurité
sociale
3(
*
)
à propos du régime de
retraite des fonctionnaires civils et militaires de l'Etat, les soldes nuls qui
apparaissent dans les tableaux du rapport sur les comptes de la
sécurité sociale de septembre 1997 ne reflètent en aucun
cas l'état financier exact du régime :
" ce dernier
est, en effet, équilibré par des cotisations fictives
versées par l'Etat-employeur, les cotisations effectives des
fonctionnaires civils et militaires ne couvrant qu'environ 20 % des
charges des prestations. De plus, il est à noter que le régime
est supposé fonctionner sans frais de gestion ce qui minore d'autant les
cotisations fictives susmentionnées. ".
On ne peut donc qu'approuver la suggestion de la Commission des comptes de la
sécurité sociale qui souligne que
" les
difficultés prévisibles dues au vieillissement de la pyramide
démographique des fonctionnaires et l'importance des montants en cause
rendent plus que jamais nécessaire l'établissement d'un document
annuel détaillé retraçant la totalité des
dépenses et les sources de leur financement. Ce document devrait
être annexé à la loi de finances. "
Votre rapporteur a bien conscience que la question des régimes
spéciaux est un sujet délicat. L'annonce d'une possible
réforme de ces régimes dans le cadre du plan Juppé
présenté à l'automne 1995 a en effet été en
partie à l'origine des mouvements sociaux des mois de
novembre-décembre 1995 et l'ampleur des protestations a conduit à
un blocage des processus de réforme dans ce secteur.
Or, les perspectives financières de ces régimes ne sont pas plus
favorables que celles du régime des salariés : exprimé en
points de cotisation, le besoin de financement du régime des
fonctionnaires civils s'élève à plus de 10 points d'ici
2005 et celui des agents des collectivités locales à plus de
16 points. Ces régimes n'ont amorcé aucune réforme ni
même aucune étude prospective alors que leur rapport
démographique va se dégrader rapidement dès l'an 2000,
spécialement pour les fonctionnaires de l'Etat et des
collectivités locales.
Votre rapporteur estime par conséquent qu'il est aujourd'hui
indispensable d'engager une réflexion en profondeur sur la nature, les
conditions d'équilibre et l'avenir de ces régimes, dans le cadre
d'une très large concertation.
D. LES PERSPECTIVES À LONG TERME DE L'ENSEMBLE DES RÉGIMES D'ASSURANCE VIEILLESSE RESTENT INQUIÉTANTES
Du fait d'une évolution démographique
défavorable -le départ à la retraite de la
génération du baby-boom-, la plupart des régimes vont
connaître des difficultés à partir de 2005 : le
rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités diminuera
inexorablement. Il s'agit là d'une tendance lourde observable depuis
plusieurs décennies : le rapport entre cotisants et retraités
pour l'ensemble des régimes est passé de 4,69 en 1960 à
3,13 en 1970, 2,79 en 1980, 2,1 en 1990. Il devrait s'établir à
1,81 en l'an 2000.
Les régimes d'assurance vieillesse seront donc confrontés
à des besoins de financement croissants à partir de 2005.
Evolution du rapport cotisants/retraités de
l'ensemble des régimes de retraite
Source : Direction de la sécurité sociale, DEES
Commandé par le Premier ministre, M. Alain Juppé, le rapport
du Commissariat général au Plan sur "
Les perspectives
à long terme des retraites
", issu des travaux du groupe de
travail présidé par M. Raoul Briet, a permis d'esquisser les
grandes lignes des évolutions de nos régimes de retraite à
l'horizon des trente prochaines années. Il actualise et complète
le Livre blanc de 1991. Il enregistre les résultats des premiers
redressements opérés mais montre leurs limites dans un contexte
démographique plus déséquilibré que prévu.
La rapport Briet souligne que la détérioration du rapport
démographique s'est aggravé. Entre 1990 et 2040, la proportion
générale des personnes en âge d'être à la
retraite - si l'âge reste à 60 ans - par rapport à celles
qui sont en âge de travailler pourrait doubler. A un horizon plus proche
et dans le cadre des effectifs réels des régimes, le nombre de
cotisants par retraités tomberait entre 1995 et 2015 :
- de 1,75 à 1,22 dans le régime général ;
- de 2,53 à 1,40 pour les fonctionnaires civils ;
- de 3,62 à 1,33 pour les agents des collectivités locales.
Le rapport Briet estime que la réforme des retraites du régime
général aura à terme des effets très positifs mais
insuffisants. La réforme de 1993, dans les hypothèses
moyennes :
- replace le régime général dans une situation proche
de l'équilibre en 2005. Le besoin de financement aurait
été de plus de trois points de retraite ajouté aux 16,35
points de cotisation actuels, en l'absence de réforme ;
- réduit, mais seulement de moitié, le besoin de financement
résiduel à l'horizon 2015. Il reste plus de 4 points
supplémentaires contre près de 8 points avant la réforme.
- laisse entier le problème de la période ultérieure
pour laquelle le scénario à législation constante est
inconcevable.
Le rapport Briet met en évidence le fait qu'après 2005
l'écart entre les recettes et les dépenses du régime
général passerait d'environ 20 milliards à 107 milliards
de francs en 2015.
Le rapport démographique du régime des fonctionnaires civils et
militaires de l'Etat devrait également se détériorer
rapidement d'ici environ une dizaine d'années du fait de la forte
augmentation des pensionnés. Des prévisions à long terme
font apparaître que le nombre des seuls fonctionnaires civils pourrait
augmenter d'environ 80 % d'ici 2015 pour atteindre près
d'1,5 millions de pensionnés.
Ces chiffres sont inquiétants et appellent une véritable prise de
conscience des problèmes qui nous attendent. Il est encore temps :
il sera bientôt trop tard.
Le rapport cotisants/retraités des différents
régimes
Effectifs en milliers |
1995 |
2000 |
2005 |
2010 |
2015 |
Evolution 2015/1995 |
|
Population totale âgée de plus de 60 ans |
11.582 |
12.152 |
12.611 |
14.102 |
15.617 |
35 % |
|
Population totale |
Population active totale |
25.998 |
27.055 |
27.739 |
27.739 |
27.481 |
5 % |
rapport cotisants/retraités |
2,24 |
2,23 |
2,2 |
1,97 |
1,75 |
- 22 % |
|
Retraités |
8.052 |
9.207 |
10.226 |
11.884 |
13.590 |
69 % |
|
Régime général |
Cotisants |
14.056 |
15.276 |
16.582 |
16.854 |
16.581 |
18 % |
rapport cotisants/retraités |
1,75 |
1,66 |
1,62 |
1,42 |
1,22 |
- 30 % |
|
Retraités |
821 |
948 |
1.118 |
1.309 |
1.481 |
80 % |
|
Fonctionnaires civils |
Cotisants |
2.075 |
2.075 |
2.075 |
2.075 |
2.075 |
- |
rapport cotisants/retraités |
2,53 |
2,19 |
1,86 |
1,59 |
1,4 |
- 45% |
|
retraités |
426 |
576 |
794 |
984 |
1.177 |
176 % |
|
CRACL |
Cotisants |
1.541 |
1.561 |
1.560 |
1.560 |
1.560 |
1 % |
rapport cotisants/retraités |
3,62 |
2,71 |
1,96 |
1,59 |
1,33 |
- 63 % |
|
Retraités |
215 |
205 |
192 |
188 |
186 |
- 13 % |
|
SNCF |
Cotisants |
183 |
167 |
153 |
139 |
127 |
- 30 % |
rapport cotisants/retraités |
0,85 |
0,83 |
0,79 |
0,74 |
0,68 |
- 20 % |
|
Retraités |
5.100 |
8.100 |
6.530 |
7.260 |
8.700 |
71 % |
|
ARRCO |
Cotisants |
13.800 |
15.010 |
16.330 |
16.580 |
16.330 |
18 % |
rapport cotisants/retraités |
2,71 |
2,58 |
2,5 |
2,28 |
1,88 |
- 31 % |
|
Retraités |
1.063 |
1.277 |
1.523 |
1.930 |
2.384 |
124 % |
|
AGIRC |
Cotisants |
2.760 |
3.081 |
3.427 |
3.728 |
14.016 |
46 % |
rapport cotisants/retraités |
2,6 |
2,41 |
2,25 |
1,93 |
1,68 |
- 35 % |
|
Retraités |
2.104 |
2.007 |
1.819 |
1.691 |
1.588 |
- 25 % |
|
Exploitants agricoles |
Cotisants |
911 |
821 |
739 |
666 |
600 |
- 34 % |
rapport cotisants/retraités |
0,43 |
0,41 |
0,41 |
0,39 |
0,38 |
- 13 % |
II. LES MESURES PONCTUELLES ET D'INSPIRATION SOUVENT CRITIQUABLE PROPOSÉES PAR LE PROJET DE LOI NE DISPENSERONT PAS D'UN EXAMEN DES PROBLÈMES IMMÉDIATS ET D'UNE RÉFLEXION EN PROFONDEUR SUR L'AVENIR DE NOTRE SYSTÈME DE RETRAITE
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 se contente de proposer quelques mesures à portée essentiellement financière et renvoie à une réflexion ultérieure l'examen des problèmes de fond.
A. S'AGISSANT DE L'ASSURANCE VIEILLESSE, LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT NE CONTIENT QUE DES DISPOSITIONS DE PORTÉE MODESTE ET D'INSPIRATION SOUVENT CRITIQUABLE
L'assurance vieillesse ne figure manifestement pas parmi les
priorités du Gouvernement cette année. Le rapport annexé
au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998
se borne à constater que
" la situation de la branche vieillesse
reste déséquilibrée ".
Il ajoute :
" Cette situation devrait perdurer dans les années à
venir à législation constante, sans connaître cependant une
aggravation jusqu'en 2005. Cette situation appelle une réflexion
approfondie sur l'évolution des prestations et des ressources des
systèmes de retraite que le Gouvernement entend conduire en prenant en
compte l'évolution des conditions du vieillissement, de la durée
et du mode de vie. "
S'il ne peut qu'approuver l'idée d'une réflexion approfondie sur
l'évolution des régimes de retraite, votre rapporteur regrette
cependant que le Gouvernement ne fasse pas preuve de davantage d'ambition dans
ses projets. Votre rapporteur aurait souhaité des engagements plus
précis.
Le projet de loi de financement se borne donc à limiter le
déficit de la branche vieillesse pour 1998. Pour ramener ce dernier de
8,3 milliards de francs à 4,3 milliards de francs, le Gouvernement
a choisi la facilité :
- accroissement des prélèvements de 1,8 milliard :
élargissement de l'assiette des prélèvements de 1 %
sur les revenus du capital (1,3 milliard), relèvement du taux de la taxe
sur les contributions des employeurs à la prévoyance
complémentaire (500 millions) ;
- utilisation de l'excédent de la contribution sociale de
solidarité des sociétés (C3S) (1,2 milliard) ;
- intégration financière de la CAMAVIC (300 millions).
En outre, le Gouvernement fait procéder à une reprise partielle
de la dette par la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES), ce qui
se traduit par une diminution des charges financières de 700 millions de
francs.
Ces différentes dispositions font l'objet d'une analyse approfondie dans
le tome IV du présent rapport consacré à l'examen des
articles.
Votre rapporteur rappellera simplement qu'il regrette que le Gouvernement ait
jugé nécessaire de procéder à une nouvelle
augmentation des prélèvements.
Ces opérations ont souvent un caractère de " recettes de
poche ". De plus, les recettes procurées par l'excédent de
la C3S et par l'intégration de la CAMAVIC ne sont pas reconductibles.
B. DE NOMBREUX PROBLÈMES IMMÉDIATS DOIVENT POURTANT ÊTRE RAPIDEMENT EXAMINÉS
Deux problèmes doivent être traités
à court terme : l'impact de l'augmentation de la contribution
sociale généralisée (CSG) sur les retraités et
l'actualisation du mode de revalorisation des pensions. Tous deux peuvent avoir
une incidence forte sur le pouvoir d'achat des retraités.
A cet égard, votre rapporteur souhaite rappeler combien il est
attaché au principe du maintien du niveau de vie des retraités.
Parce que ce dernier est aujourd'hui légèrement supérieur
à celui des actifs, les retraités sont parfois abusivement
présentés comme des privilégiés. Les études
sur les niveaux de vie respectifs des actifs et des retraités ne
permettent généralement pas d'appréhender les très
fortes disparités de situations entre retraités. Beaucoup de
retraités touchent encore de très faibles pensions, un million de
personnes âgées bénéficient du minimum vieillesse.
En outre, les retraités apportent aujourd'hui une contribution
essentielle à la solidarité entre les générations
en aidant financièrement leurs enfants et petits-enfants. Il serait sans
doute intéressant d'étudier un jour le rôle et l'importance
de ces transferts intergénérationnels. Ces transferts pourraient
d'ailleurs être encouragés à l'aide d'un cadre juridique
rénové.
1. L'impact pour la retraités du basculement de la cotisation d'assurance maladie sur la contribution sociale généralisée est encore mal connu
Le projet de loi de financement prévoit une
augmentation de 2,8 % de la CSG - dont le taux s'établit
désormais à 6,2 % - pour les revenus de remplacement,
compensée par une diminution de 2,8 % des cotisations d'assurance
maladie à leur charge. Pour les retraités du régime
général, dont la cotisation d'assurance maladie s'élevait
à 2,8 %, cela signifie qu'ils ne paieront désormais plus
aucune cotisation d'assurance maladie.
Le Gouvernement prétend que cette opération sera neutre pour les
retraités. La réalité est singulièrement plus
complexe.
Pour les retraités du régime général,
l'opération est effectivement neutre pour les personnes ne
bénéficiant pas de la majoration pour enfant de 10 %. Cette
majoration n'était pas assujettie à la cotisation d'assurance
maladie : l'augmentation de la CSG se traduira donc par un
prélèvement supplémentaire de 2,8 % sur cette
majoration. Or, 42 % des retraités du régime
général touchent la majoration pour enfant de 10 %, pour un
montant total de 12 milliards de francs en 1996 à la charge du
régime général.
La situation est en revanche très favorable pour les 670.000
retraités du régime général dont le domicile fiscal
est situé à l'étranger : ils n'acquitteront plus la
cotisation d'assurance maladie et n'auront pas à verser la CSG qui n'est
pas prélevée sur leurs revenus.
Pour les retraités des régimes non salariés non agricoles,
l'augmentation de la CSG de 2,8 % ne sera pas intégralement
compensée par la suppression du précompte maladie qui
s'élève aujourd'hui à 2,4 %. En outre, les retraites
complémentaires et les pensions d'invalidité subiront ce
prélèvement supplémentaire de CSG alors qu'elles
n'étaient pas assujetties jusqu'ici au précompte maladie. Pour
ces régimes, aucune compensation n'a encore été
envisagée par le Gouvernement.
Enfin, et ceci est valable pour tous les retraités, les modalités
d'exonération de la CSG déductible sont plus restrictives que
celles du précompte maladie et conduiront à assujettir 57 %
des retraités contre 47 % auparavant.
On le voit, la situation est assez variable selon les régimes. Il sera
donc nécessaire d'étudier très précisément
les effets de cette augmentation considérable de la CSG sur les
retraités afin d'éviter que le basculement des cotisations
d'assurance maladie vers la CSG ne se traduise par une augmentation sensible
des prélèvements pesant sur les retraités. Jusqu'à
présent, Le Gouvernement semble ne pas avoir été en mesure
d'évaluer sérieusement les conséquences de l'augmentation
de la CSG sur l'ensemble des retraités.
Votre rapporteur tient donc à rappeler ici que l'évolution des
pensions n'est pas la seule variable susceptible d'influer sur le pouvoir
d'achat des retraités : l'augmentation massive de la taxation du
patrimoine concernera directement les retraités qui tirent d'une
épargne constituée pendant leur vie active, des
compléments de revenus vitaux pour leur niveau de vie.
2. Le mode d'indexation de la revalorisation des pensions de retraite doit être réexaminé avant la fin de l'année 1998
Dans le régime général et les
régimes alignés (artisans, commerçants, professions
industrielles, salariés agricoles) ainsi que pour les exploitants
agricoles, les pensions sont revalorisées le 1
er
janvier
de chaque année. Elles sont indexées sur les prix.
Le dispositif de revalorisation se compose de trois éléments :
- un coefficient de revalorisation fixé à partir du taux
prévisionnel d'évolution des prix (hors tabac) ;
- un ajustement de ce taux compte tenu de la différence entre les
évolutions prévisionnelles et constatées des prix (hors
tabac) au cours de l'année précédente (ajustement en
niveau) ;
- une compensation positive ou négative pour les assurés
titulaires, à la date de la revalorisation, d'un avantage de vieillesse
ou d'invalidité, correspondant à l'écart ainsi
constaté au titre de l'année précédente (ajustement
en masse) ;
Au 1
er
janvier 1997, les retraites ont été
revalorisées de 1,2 %. La revalorisation s'est calculée de
la manière suivante : on a considéré l'augmentation
des prix (hors tabac) prévue pour 1997 (+1,3 %), à laquelle
on a retiré la différence entre la prévision faite
l'année précédente (+2,1 % en 1996) et
l'évolution réelle des prix pendant la période
correspondante (+1,9 %). L'ajustement pour 1996 aurait donc dû
être de -0,2 %, soit une revalorisation de 1,1 %. Toutefois,
elle a fait l'objet d'un léger " coup de pouce " la portant
à 1,2 %. Le coût de cette augmentation en 1997 pour le
régime général et le régime des salariés
agricoles devrait être de près de 4 milliards de francs.
Au 1
er
janvier 1998, la revalorisation devrait être de
1,1 %. Ce taux comprend une revalorisation provisionnelle de 1,3 % au
titre de 1998 et un rattrapage négatif de 0,2 % au titre de 1997,
compte tenu de l'évolution des prix semblant de dessiner (1,1 % au
lieu de 1,3 % initialement prévus).
Comme en témoigne le tableau suivant, le système d'indexation en
vigueur a permis de préserver le pouvoir d'achat des retraités
par rapport à l'évolution des prix.
|
Prix à la consommation - Indice INSEE (hors tabac depuis 1992) |
|
1990 |
100.00 |
100.00 |
1991 |
103,20 |
102,85 |
1992 |
105,47 |
105,21 |
1993 |
107,37 |
107,67 |
1994 |
108,87 |
109,75 |
1995 |
110,72 |
111,38 |
1996 |
112,82 |
113,86 |
1997* |
114,29 |
115,31 |
* Prévisions des comptes de la Nation
Or ce dispositif d'indexation mis en place par la loi n° 93-936 du
22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la
sauvegarde de la protection sociale est provisoire : l'article 5 de cette
loi mentionne que ces dispositions sont applicables pendant cinq ans à
compter du 1
er
janvier 1994. Il sera donc nécessaire de
réexaminer avant le 1
er
janvier 1999 ces modalités de
revalorisation.
Le Gouvernement n'a pas encore indiqué quel mode d'indexation il
envisageait pour l'avenir. Lors de la campagne électorale
précédant les élections législatives du mois de mai
dernier, l'actuelle majorité avait cependant laissé entendre
qu'elle substituerait au système d'indexation sur l'évolution des
prix un système d'indexation sur l'évolution des salaires.
Le choix d'un mode d'indexation des retraites est une décision
importante qui engage l'avenir de notre système de retraites : le
Gouvernement se doit donc d'y réfléchir dès à
présent.
C. LA RÉFLEXION SUR L'AVENIR DE NOTRE SYSTÈME DE RETRAITE DOIT ÊTRE POURSUIVIE
Il faut dès à présent définir une position quant à la finalité du régime d'assurance veuvage, songer aux moyens de consolider la retraite par répartition et prendre des décisions quant à l'avenir des fonds de pension. Sur tous ces sujets, votre rapporteur ne peut qu'appeler à une reprise rapide de la réflexion et de la concertation.
1. La finalité de l'assurance veuvage doit être réexaminée
L'assurance veuvage garantit au conjoint d'un assuré
relevant du régime général ou du régime des
salariés agricoles et ayant élevé ou ayant à sa
charge au moins un enfant une allocation veuvage dégressive dans le
temps, dès lors que ses ressources sont inférieures à un
plafond de 3481 francs par mois, allocation comprise. Elle repose sur une
cotisation de 0,10 % à la charge des salariés portant sur
l'ensemble du salaire. L'allocation veuvage est versée pendant trois ans
après le décès du conjoint ; cette durée est
portée à cinq ans si le bénéficiaire était
âgé de plus de cinquante ans au moment du décès du
conjoint.
L'allocation est versée selon un mécanisme
dégressif : son montant est de 3.073 F par mois la
première année, 2.019 F par mois la deuxième
année, 1.537 F par mois de la troisième à la
cinquième année.
Dès la deuxième année, cette allocation est donc
inférieure au RMI, auquel les personnes veuves peuvent par ailleurs
prétendre. Votre rapporteur juge cette situation anormale : il
estime que l'allocation veuvage est une prestation de sécurité
sociale, correspondante à un droit acquis après cotisation. Elle
ne devrait donc pas être inférieure au RMI, prestation d'aide
sociale qui relève d'une toute autre logique.
En outre, l'assurance veuvage dégage un solde systématiquement
excédentaire de 1,5 milliard environ. Ce solde vient diminuer le
déficit de la branche vieillesse. En 1997, les dépenses devraient
être de 431 millions de francs pour un montant de cotisations de 2.014
millions de francs, soit un excédent de 1.583 millions de francs.
Pourtant, le deuxième alinéa de l'article L. 251-6 du code
de la sécurité sociale prévoit que les
" excédents du fonds national d'assurance veuvage
constatés à l'issue de chaque exercice sont affectés en
priorité à la couverture sociale du risque de veuvage ".
Cette disposition n'a jamais eu de réelle portée pratique.
Votre rapporteur estime qu'il est temps d'utiliser l'excédent de ce
fonds pour améliorer la situation des veufs et des veuves.
Les problèmes rencontrés par les veuves et les veufs appellent
une réflexion plus générale sur la question des droits
dérivés. Le risque veuvage est en effet aussi couvert par
l'assurance vieillesse dans le cadre de la pension de réversion
attribuée au conjoint survivant.
Le taux de calcul des pensions de réversion a été
porté de 52 % à 54 % par le Gouvernement de M. Edouard
Balladur, le 1
er
janvier 1995. Dans un bilan publié en
décembre 1996
4(
*
)
, la CNAVTS a tiré
les premiers enseignements de cette augmentation : 27,8 % des
retraités de droit dérivé ont tiré profit de cette
augmentation dont le coût a été, en 1995, de
537 millions de francs. Le passage éventuel et progressif de
52 % à 60 % aurait un coût annuel de 2,2 milliards
de francs.
Dans les circonstances actuelles, une augmentation du taux de la
réversion n'est donc pas envisageable. Le coût serait trop
élevé pour les régimes d'assurance vieillesse. Il n'en
reste pas moins qu'un passage progressif vers le taux de 60 % est un
objectif souhaitable.
2. L'avenir de notre système de retraites passe par une consolidation de la répartition et un développement maîtrisé de la capitalisation
Il convient tout d'abord de préciser que l'augmentation du coût des retraites pour la collectivité témoigne de l'allongement de la durée de la vie humaine, qui est, à ce rythme, une nouveauté absolue dans l'histoire de l'Humanité. On ne saurait à ce titre le déplorer.
a) La consolidation de la retraite par répartition
Votre rapporteur souhaite affirmer solennellement que la
retraite par répartition doit rester le socle de notre système
d'assurance vieillesse.
La période la plus faste des régimes de répartition est
sans doute révolue, ce qui ne signifie pas que le système mis en
place à la Libération n'ait pas rempli l'essentiel de sa mission.
Il faut désormais réfléchir aux mesures qui permettront
d'assurer sa pérennité.
A défaut de solution miracle, et pour préserver un système
fondé sur la contributivité de chacun et la mutualisation des
risques sociaux, différents leviers sont disponibles sur lesquels il est
possible d'agir simultanément. Ils ont des effets plus ou moins
différés dans le temps, mais leur utilisation doit
résulter de choix politiques, qu'ils soient effectués par les
pouvoirs publics ou par les partenaires sociaux.
Votre rapporteur souhaite simplement rappeler ici quelles sont ces
différentes possibilités théoriques :
- l'action sur les ressources : augmentation des cotisations,
élargissement de l'assiette ;
- le ralentissement des charges : modification du mode de
revalorisation des retraites et de la législation sur les droits
dérivés ;
- modification de la frontière entre périodes de
constitution et de jouissance des droits : âge de la retraite,
durée de cotisation.
b) Le développement maîtrisé de la retraite par capitalisation
La loi du 25 mars 1997 créant les plans
d'épargne retraite ouvre la voie à l'instauration en France de
fonds de pension et d'un dispositif facultatif de retraite par capitalisation.
Les décrets d'application de cette loi n'ont pas encore vu le jour et il
est douteux qu'il paraissent prochainement.
En réponse à une question de votre rapporteur, Mme Martine Aubry,
Ministre de l'Emploi et de la Solidarité, a indiqué, lors de son
audition par la commission des Affaires sociales du Sénat le
4 novembre 1997, qu'elle n'entendait pas donner suite à cette loi
avant d'avoir entrepris une réflexion d'ensemble sur l'avenir des
régimes de retraite.
La loi du 25 mars 1997 semble donc ne jamais devoir entrer en vigueur.
Votre rapporteur le regrette. Il considère qu'il s'agissait là
pourtant d'une initiative intéressante. Il rappelle qu'il est favorable
au principe des fonds de pension, même si ceux-ci ne doivent en rien
porter atteinte au principe de la retraite par répartition.
Votre rapporteur considère que la retraite par capitalisation est un
complément indispensable à la répartition.
Il ne faut cependant pas croire que les fonds de pension constituent pour
autant un remède miracle aux problèmes que connaîtront nos
régimes de retraite. Comme le montre l'exemple des pays anglo-saxons, la
crise des finances publiques oblige les gouvernements à réduire
les avantages fiscaux dont jouissent les fonds de pension, tout en imposant des
obligations nouvelles de transférabilité et de portage des droits
pour tenir compte de la plus grande mobilité qui caractérise
aujourd'hui le marché du travail.
De plus, la montée en charge d'un régime de capitalisation n'est
que très progressive. Dans les circonstances actuelles de tables de
mortalité et de taux d'intérêt, on peut estimer que pour
faire face à une baisse du taux de remplacement des régimes en
répartition de 1% à 60 ans, il faudrait consacrer 1% de son
salaire en capitalisation à partir de 42 ans. 1% de ce salaire
rapporterait 2,54% de taux de remplacement si l'effort en capitalisation
était entrepris dès l'âge de 20 ans, mais seulement 0,26%
si cet effort ne débutait qu'à 55 ans.
Enfin, la constitution des fonds de pension ne doit pas se faire au
détriment des régimes de retraite par capitalisation. En
particulier, les fonds de pension ne peuvent servir de prétexte à
des versements de salaires différés qui se substitueraient aux
salaires immédiats, privant ainsi les régimes de retraite par
répartition des cotisations sociales dont ils ont besoin.
Mais, au total, votre rapporteur considère que l'expérience des
fonds de pension, telle qu'engagée par la loi du 25 mars 1997 devrait
être poursuivie. Il est en outre choquant que le Gouvernement, sans
ouvrir un débat au Parlement sur une modification ou une abrogation de
ce texte, bloque l'application de la loi en s'abstenant de prendre les
décrets d'application.
La loi du 25 mars 1997 créant les plan d'épargne retraite
Elle crée des plans d'épargne-retraite (PER) au
bénéfice des salariés du secteur privé
(14 millions de personnes). Les PER seront créés
après accord patronat-syndicats au niveau de l'entreprise ou de la
branche professionnelle (faute d'accord après six mois de
négociations, le chef d'entreprise pourra proposer directement aux
salariés de cotiser à un plan ; en l'absence de proposition de
son employeur un an après l'entrée en vigueur de la loi, un
salarié pourra adhérer à un fond existant).
L'employeur pourra abonder le PER en versant jusqu'à quatre fois les
sommes souscrites par le salarié. Il sera exonéré de
cotisations sociales sur ses versements jusqu'à 85 % du plafond de
la Sécurité sociale (soit aujourd'hui 140.000 francs par
an). Le salarié, lui, pourra déduire ses cotisations de son
revenu imposable dans la limite de 5 % de son revenu brut ou de 20 %
du plafond de la sécurité sociale (soit actuellement 33.000
francs par an). Il aura aussi le droit de transférer ses droits d'un
plan à un autre une fois au cours de sa vie et après un
délai minimum de dix ans.
Les plans ne serviront pas de " prestations définies "
(c'est-à-dire liées au montant dû ou des derniers salaires)
: à la retraite, le salarié touchera une rente viagère,
calculée sur la base de ses versements et des performances
financières du fonds auquel il aura cotisé. La rente sera soumise
à l'impôt sur le revenu et susceptible de réversion,
sachant toutefois que le souscripteur devra prendre une contre-assurance
décès s'il souhaite qu'un descendant en ligne directe puisse
avoir droit à son PER si lui-même meurt avant la retraite.
Le retraité aura la possibilité de récupérer
jusqu'à 20 % des sommes versées sous forme de capital
plafonné à 75 % du plafond de la sécurité
sociale (soit aujourd'hui 123.000 francs).
III. LA PRESTATION SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE AMÈNE LA BRANCHE VIEILLESSE À REDÉFINIR LES AXES PRIORITAIRES DE SON ACTION SOCIALE
A. LA LOI DU 24 JANVIER 1997 INSTITUANT LA PRESTATION SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE DEVRAIT FAVORISER UNE MEILLEURE COORDINATION DE LA PRISE EN CHARGE DES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES
1. La loi du 24 janvier 1997 constitue une étape importante dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes
Le vote par le Parlement de la loi n° 97-60 du 24 janvier
1997 instituant la prestation spécifique dépendance constitue une
étape considérable dans la prise en charge des personnes
âgées dépendantes.
Jusqu'à l'intervention de cette loi, les personnes âgées
dépendantes étaient considérées comme des
handicapées et percevaient à ce titre l'allocation compensatrice
pour tierce personne (ACTP). Il n'était cependant plus possible de
continuer d'appliquer aux personnes âgées une législation
qui n'était pas destinée à prendre en charge les
sujétions particulières qui sont les leurs. En outre, la
prestation en espèces ne permettait assurément pas de s'assurer
de l'effectivité de l'aide et de proposer aux personnes
concernées un plan d'aide adapté à leur état.
La prestation spécifique dépendance vient donc se substituer,
pour les personnes dépendantes, à l'ACTP. A la différence
de l'ACTP, la PSD est une prestation en nature, c'est-à-dire
affectée au paiement de dépenses préalablement
déterminées. Elle est destinée à couvrir l'aide
dont la personne âgée dépendante a besoin à son
domicile ou dans un établissement pour l'accomplissement des actes
essentiels de la vie.
La PSD est destinée aux personnes âgées de 60 ans au moins
qui remplissent des conditions de dépendance et qui disposent de
ressources inférieures à un plafond variable selon l'importance
du besoin et donc le montant de la prestation attribuée.
L'état de dépendance qui se distingue de la
nécessité de recevoir des soins, se caractérise par le
besoin, pour la personne concernée, d'être aidée dans
l'accomplissement des actes essentiels de la vie, ou d'une surveillance
régulière. Cet état est reconnu par une équipe
médico-sociale qui comprend au moins un médecin et un travailleur
social à partir d'une grille unique nationale, la grille AGGIR
(autonomie gérontologique -groupe iso-ressources) qui comporte six
niveaux. Pour le moment, seuls les niveaux n° 1, 2 et 3 correspondant
à la grande dépendance permettront l'obtention de la prestation.
Une équipe médico-sociale est chargée d'évaluer les
besoins de la personne, de l'informer des aides existantes, d'établir un
plan d'aide et d'en suivre l'application. Le rôle de cette équipe
est primordial.
La prestation est servie et gérée par les conseils
généraux.
On estime que 190.000 personnes âgées dépendantes
percevaient l'ACTP. Dans un proche avenir, la PSD pourrait concerner
jusqu'à 300.000 personnes.
A domicile, l'aide dont a besoin le bénéficiaire de la PSD pourra
lui être apportée soit par un ou plusieurs salariés
directement recrutés en tant qu'aides à domicile, soit par
l'intermédiaire de salariés mis à la disposition du
bénéficiaire par un service mandataire, soit enfin par les
salariés d'un service prestataire d'aide à domicile. Au moins une
fois par an, l'effectivité de l'aide ainsi apportée et la
qualité du service rendu font l'objet d'un contrôle.
Dans le cas où la personne âgée est accueillie en
établissement, la PSD est versée directement à
l'établissement pour financer les surcoûts liés à
l'état de dépendance. Le versement de la PSD aux
établissements d'accueil des personnes âgées
dépendantes passe par une réforme de leur tarification. La loi
fixe le cadre général de cette réforme et prévoit
qu'elle devra intervenir avant le 31 décembre 1998. Désormais, la
tarification des établissements pour personnes âgées se
fera en fonction de l'état de ces dernières et non du statut des
établissements.
Les personnes qui bénéficiaient des prestations
expérimentales dépendance dans douze départements
continuent à le faire dans les mêmes conditions qu'initialement.
2. La loi instaure une coordination entre les différents intervenants
La loi constitue un progrès considérable car
elle ouvre la voie à une coordination des actions des différents
acteurs, coordination qui était souhaitée depuis longtemps par
tous les intervenants. Elle peut constituer les prémisses de la mise en
place d'une véritable coordination gérontologique autour de la
personne âgée qui fait gravement défaut dans notre pays.
Cette coordination est une chance pour les caisses de sécurité
sociale : elle leur permettra de réexaminer les actions
financées par leurs fonds d'action sociale.
La PSD devrait ainsi permettre d'accroître l'efficacité et la
cohérence des actions des caisses de sécurité sociale en
faveur des personnes âgées et plus généralement une
coordination entre les aides existantes grâce au partenariat des
différents acteurs dont le principe est affirmé dans la loi. A
cet égard, il convient de souligner que les expérimentations en
matière de dépendance dans douze départements,
créées suite à un amendement déposé par la
Commission des affaires sociales du Sénat à l'instigation de son
Président, M. Jean-Pierre Fourcade, ont clairement montré que le
partenariat entre les départements et les caisses de
sécurité sociale pouvait fonctionner à la satisfaction de
tous, y compris des bénéficiaires.
Cette expérimentation a fait la preuve qu'il était possible de
fédérer les contributions parfois disparates des
différentes institutions et de rassembler les différents
intervenants autour de la personne âgée. La PSD tire donc les
conséquences des expériences particulièrement concluantes
menées dans ce cadre.
Deux types de conventions vont permettre la mise en oeuvre de cette prestation.
Les premières, obligatoires, et à visée beaucoup plus
générale puisqu'elles concernent l'ensemble des prestations
servies aux personnes âgées, seront conclues entre les
départements et les organismes de sécurité sociale. Elles
doivent favoriser la coordination de ces prestations, préciser les
modalités de gestion de cette coordination et permettre l'instruction et
le suivi des prestations.
Sur le plan formel, elles devront être conformes à un cahier des
charges arrêté par le Ministre chargé des personnes
âgées, après avis de l'Assemblée des
présidents de Conseils généraux et des organismes
nationaux de sécurité sociale.
Le suivi de ces conventions et, le cas échéant, une tâche
de médiation en cas de difficulté pour les conclure, seront
confiés à un Comité national de coordination
gérontologique.
Quant aux conventions facultatives, elles portent, précisément,
sur l'instruction et le suivi de la PSD entre chaque département et les
organismes publics sociaux et médico-sociaux, comme les centres
communaux ou intercommunaux d'action sociale, les organismes régis par
le code de la mutualité et les associations. Ces conventions
facultatives devront, elles, être conformes à une convention-cadre
fixée par arrêté conjoint des ministres chargés,
respectivement, des personnes âgées et des collectivités
territoriales après avis de l'Assemblée des présidents de
Conseils généraux et de l'Association des Maires de France.
3. L'entrée en vigueur de la PSD en établissement reste conditionnée à la réforme de la tarification des établissements
Votre rapporteur ne dispose à ce jour d'aucun
véritable bilan de la mise en place de la prestation spécifique
dépendance.
Le comité national de coordination gérontologique,
institué par l'article premier de la loi, est chargé du suivi de
la mise en oeuvre des conventions entre les départements et les
organismes de sécurité sociale. Il doit rendre public chaque
année, avant l'examen par le Parlement du projet de loi de financement
de la sécurité sociale, un rapport comprenant un bilan de
l'application de la loi. La nomination de ce comité est intervenue de
façon très tardive, le 28 août 1997 : celui-ci ne s'est
toujours pas réuni à ce jour : il n'a donc pu produire le rapport
demandé.
Toutefois, en réponse à une question de votre rapporteur, lors de
son audition par la commission des Affaires sociales du Sénat le 4
novembre 1997, Mme Martine Aubry, ministre de l'Emploi et de la
Solidarité, a indiqué que la première réunion de ce
comité aurait lieu le 25 novembre 1997 et qu'un bilan serait
présenté à cette occasion.
Il faut également souligner que le dispositif réglementaire
nécessaire à l'entrée en vigueur de la loi n'est toujours
pas complet. Restent en effet à paraître :
- un décret définissant les modalités selon
lesquelles les salariés rémunérés pour assurer un
service d'aide à domicile auprès d'une personne allocataire de la
PSD bénéficient d'une formation (deuxième
alinéa de l'article 16) ;
- un décret fixant les modalités d'application de l'article
17 qui prévoit les conditions de versement de la PSD à
domicile ;
- un décret fixant les modalités d'application des contrats
de séjour dans les établissements non soumis à la loi du 6
juillet 1990 relative aux conditions de fixation des prix des prestations
fournies par certains établissements assurant l'hébergement des
personnes âgées (troisième alinéa de l'article 8
ter
de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975, introduit par
l'article 26 de la loi) ;
- un arrêté établissant le cahier des charges des
conventions pluriannuelles tripartites entre les établissements, les
départements et l'assurance maladie (I de l'article 23) ainsi qu'un
arrêté ou un décret déterminant les conditions et
délais de transmission des documents nécessaires à la
fixation des tarifs des prestations et les montants de celles-ci (II et III de
l'article 23).
Ces deux derniers textes sont attendus avec une certaine impatience car ils
sont porteurs d'une réforme de la tarification des
établissements, condition indispensable de la mise en place de la PSD en
établissement.
Les auteurs de la proposition de loi sénatoriale avaient en effet
légitimement fait valoir que la réforme de la tarification des
établissements d'accueil, en fonction de l'état de la personne
accueillie et non de la nature juridique des places, devait être un
préalable à la mise en uvre de la PSD en établissement.
Cette réforme de la tarification doit intervenir avant le
1
er
janvier 1999. L'article 5-1 de la loi n° 75-535
du 30 juin 1975, introduit par l'article 23 de la loi, dispose que pour pouvoir
continuer à héberger des personnes âgées
dépendantes après le 31 décembre 1998, les
établissements devront avoir passé une convention pluriannuelle,
tripartite avec le Président du Conseil général et
l'assurance maladie, respectant un cahier des charges établi par
arrêté conjoint du Ministre chargé des personnes
âgées et de celui chargé des collectivités
territoriales. La nouvelle tarification sera alors appliquée à
ces établissements.
Après le 31 décembre 1998, pour pouvoir continuer à
héberger des personnes âgées dépendantes, les
établissements devront avoir passé une convention pluriannuelle,
tripartite avec le président du Conseil général et
l'assurance maladie, respectant un cahier des charges arrêté
conjointement par le Ministre chargé des personnes âgées et
celui chargé des collectivités territoriales
5(
*
)
.
Cette convention définira les conditions de
fonctionnement de l'établissement ainsi que ses objectifs
d'évolution et les modalités de son évaluation.
La tarification, notifiée, au plus tard, aux établissements le
31 janvier de l'exercice en cours, sera arrêtée, pour les
prestations remboursables aux assurés sociaux par l'assurance maladie,
après avis du président du Conseil général et pour
les prestations prises en charge par la prestation spécifique
dépendance, par le président du Conseil général,
après avis de l'autorité compétente pour l'assurance
maladie.
La réforme de la tarification n'ayant pu être menée
parallèlement à l'examen de la proposition de loi, l'article 13
du décret n° 97-427 du 28 avril 1997 prévoit une
disposition transitoire : jusqu'à la passation de la convention
prévue à l'article 5-1 de la loi du 30 juin 1975, la tarification
des prestations pouvant être prises en charge par la PSD est
arrêtée par le Président du Conseil général
pour chacun des établissements et pour chacun des groupes 1, 2 et 3 de
la grille AGGIR.
Si la prestation spécifique dépendance à domicile semble
aujourd'hui fonctionner de façon relativement satisfaisante dans la
quasi-totalité des départements, la situation est moins favorable
pour l'établissement. Certaines informations font en effet état
de disparités importantes dans le montant de la prise en charge suivant
les départements.
Dans le rapport annexé au projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1998, le Gouvernement indique que
" la loi instaurant une prestation spécifique dépendance
a été votée sous la précédente
législature et sa mise en uvre est largement engagée. ".
Il souligne qu'elle
" comporte des avancées
(développement de la coordination gérontologique,
élaboration d'un plan d'action personnalisée au domicile du
demandeur...), mais aussi des risques, notamment du fait des
inégalités de traitement sur le territoire "
. Le rapport
précise également qu'un
" suivi attentif sera
assuré avec le Comité national de coordination
gérontologique "
et qu'au vu
" du bilan en 1998 de la
première année d'application de la loi, il conviendra d'envisager
les améliorations et les réformes éventuelles à
apporter au dispositif en vigueur ".
Votre rapporteur estime, quant à lui, que ces difficultés sont
essentiellement imputables à
l'absence de réforme de la
tarification
.
A cet égard, votre rapporteur observe que le rapport annexé au
projet de loi de financement précise que
" le Gouvernement
souhaite mener en 1998 l'indispensable réforme de la tarification des
établissements accueillant les personnes âgées ".
En outre, en réponse à une question de votre rapporteur, lors de
son audition par la commission des Affaires sociales du Sénat le 4
novembre 1997, Mme Martine Aubry a indiqué que la réforme de la
tarification serait présentée avant l'été 1998. A
cette occasion, elle a également annoncé une réforme
d'ensemble de l'aide à domicile.
Votre rapporteur se félicite de l'annonce de ce calendrier
prévisionnel et tient à rappeler que tout retard
supplémentaire dans la réforme de la tarification risquerait de
compromettre la mise en place de la PSD en établissement.
Par ailleurs, le rapport annexé au projet de loi indique que
"
le Gouvernement a également décidé de proposer
au Parlement de créer 7.000 lits de section de cure médicale
et 2.000 places nouvelles de services de soins à infirmiers
à domicile qui n'ont pas été ouverts faute de
financements.
". Votre rapporteur prend acte de cette
déclaration et s'en félicite.
B. LA BRANCHE VIEILLESSE EST AMENÉE À RECENTRER SON ACTION SOCIALE SUR CERTAINES CATÉGORIES DE PERSONNES ÂGÉES
Depuis 1967, la CNAVTS est chargée de promouvoir une
action sociale en faveur des personnes âgées et de gérer un
Fonds national d'action sanitaire et sociale en faveur des personnes
âgées (FNASSPA). Cette enveloppe budgétaire finance une
action sociale dont l'objectif est de permettre aux personnes
âgées qui le souhaitent de rester le plus souvent à leur
domicile, en prise avec leur milieu social. Il existe deux formes
d'actions : l'aide ménagère à domicile et la garde
à domicile.
L'aide ménagère, dispensée en cas de maladie ou de
déficience psychique ou physique, a fait l'objet de recommandations
consignées dans une convention-type de gestion élaborée au
niveau national avec les caisses régionales. L'aide accordée est
limitée à 60 heures par mois et, exceptionnellement, à 90
heures par mois. Le niveau de participation de la caisse est fonction du
montant des ressources du retraité.
Quant à la garde à domicile, elle peut être
attribuée pour répondre à des situations difficiles :
sortie d'hôpital, handicap, maladie chronique, absence momentanée
de la famille...
La loi du 24 janvier 1997 instaurant la prestation spécifique
dépendance va conduire la branche retraite du régime
général à se fixer de nouveaux objectifs d'organisation et
d'expertise pour participer à la coordination des prestations servies
aux personnes âgées dépendantes, à la mise en place
de l'instruction et du suivi de la nouvelle prestation.
Ces évolutions impliquent une réorientation de l'action sociale
de la CNAVTS pour :
- mieux identifier les besoins des personnes âgées afin de
s'assurer de l'adéquation du service rendu. Un des enseignements majeurs
de la prestation expérimentale dépendance est la position-clef du
dispositif d'évaluation. La personne âgée doit être
considérée dans son environnement, selon une approche globale
prenant en compte la diversité de ses besoins d'aide, ainsi que leur
évolution ;
- optimiser la structuration et la coordination de l'offre de service, en
particulier par l'extension des réseaux gérontologiques. Le
développement des réseaux par zone territoriale permet de
répondre plus efficacement et plus justement aux besoins de la personne
dépendante ;
- développer un partenariat avec les services de l'Etat, les
collectivités territoriales, les autres financeurs, les familles...
L'environnement de l'action sociale se distingue par la multiplicité des
instances de décision et d'intervention. La CNAVTS devra donc
développer de nouvelles méthodes la conduisant à adapter
et à diversifier ses relations avec l'ensemble des interlocuteurs, qu'il
s'agisse des associations de maintien à domicile, des professionnels de
la santé, des familles - dans le cadre de l'aide aux aidants -, ou de
l'ensemble de l'entourage des personnes âgées.
Le 5 juin 1997, suite à la parution des décrets
d'application de la loi 97-60 du 24 janvier 1997, le conseil
d'administration de la CNAVTS a arrêté les premières
adaptations de sa politique d'action sociale au regard du nouveau contexte
créé par la mise en oeuvre de la prestation spécifique
dépendance
6(
*
)
.
Il a estimé que ce nouveau contexte aboutissait à un partage des
compétences entre les départements et les organismes de la
branche retraite : les premiers devant prendre en charge les personnes
âgées les plus dépendantes (GIR 1 à 3) dont les
ressources sont inférieures au plafond de versement de la prestation
spécifique dépendance, les seconds recentrant leur action sur les
personnes âgées non éligibles à la prestation
spécifique dépendance, c'est-à-dire celles dont le niveau
de dépendance mesuré par la grille AGGIR est de 4 à 6
quels que soient leurs revenus ou de 1 à 3, mais avec des ressources
supérieures au plafond précité.
Ce partage de compétences explique l'instauration d'une règle de
non-cumul entre la prestation spécifique dépendance, d'une part,
l'aide ménagère et la garde à domicile de la CNAVTS,
d'autre part, ainsi que l'abandon de l'objectif du plan triennal de l'action
sociale de la branche retraite visant à obtenir un minimum de 10 %
de la totalité des accords délivrés par la CNAVTS et ses
organismes régionaux consacrés aux prises en charge mensuelles
supérieures à 30 heures.
Il convient toutefois de souligner que les prises en charge mensuelles d'aide
ménagère à domicile de 30 heures et plus ne seront
pas supprimées. Les personnes âgées concernées par
ces demandes feront l'objet d'une évaluation de leur degré de
dépendance, selon la grille AGGIR, afin, d'une part, de vérifier
leur non-éligibilité à la prestation spécifique
dépendance et, d'autre part, de mieux adapter la prise en charge
délivrée aux besoins réels de la personne.
La loi instaurant la prestation spécifique dépendance est
certainement perfectible. Votre rapporteur est néanmoins
profondément convaincu qu'elle pose des jalons importants pour l'avenir
de la prise en charge des personnes âgées
*
* *
Sous réserve de ces observations et des amendements qu'elle propose dans le tome IV du présent rapport, votre commission vous demande d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 pour ses dispositions relatives à l'assurance vieillesse.
1 Elles sont analysées dans la partie II-A du présent rapport.
2
Les cotisations fictives mesurent la
contribution
des employeurs au financement des régimes d'assurance sociale qu'ils
organisent eux-mêmes pour leurs propres salariés ou ayants droit.
Selon les règles de la comptabilité nationale, les cotisations
fictives équivalent aux cotisations que paierait l'employeur s'il
existait un régime d'assurance sociale distinct. Elles sont
évaluées par le montant des prestations directes versées,
net de la retenue éventuellement demandée aux salariés et,
le cas échéant, des transferts reçus de l'Etat et des
versements au titre de la compensation.
3
Les comptes de la sécurité sociale, septembre 1997,
III.2.1.2.1, p.31.
4 Retraite et société n°16, décembre 1996.
5 Après avis des organismes nationaux d'assurance maladie et de l'Assemblée des présidents des Conseils généraux.
6
Ces dispositions sont reprises dans la
circulaire CNAVTS n° 51/97 du 13 juin 1997.