B. LE DÉFICIT DE L'ASSURANCE MALADIE POUR 1998 N'EST RÉDUIT QUE GRÂCE A DE NOUVEAUX PRÉLÈVEMENTS
Le tableau de financement de la sécurité sociale
fourni par le Gouvernement laisse apparaître, pour la branche maladie,
une réduction du déficit de 12,9 milliards de francs
(déficit tendanciel) à 5,1 milliards de francs.
Outre le fait que cette réduction de déficit est moindre que
celle qui est affichée, elle repose exclusivement sur une augmentation
des prélèvements, ce que conteste votre commission.
1. Sur la forme : la réduction réelle du déficit est inférieure d'au moins 40 % à celle qui est affichée par le Gouvernement
Le Gouvernement indique que, grâce aux mesures contenues dans le projet de loi de financement, le déficit de la branche maladie serait réduit de 7,8 milliards de francs, passant de 12,9 milliards de francs tendanciels à 5,1 milliards de francs.
TABLEAU FOURNI PAR LE GOUVERNEMENT
(en millions de francs)
Solde tendanciel 1998 |
- 12.900 |
Substitution CSG/cotisation maladie |
4.600 |
Modification des règles de compensation CRPCEN/CNAM |
200 |
Relèvement de l'ONDAM |
- 500 |
Fonds de modernisation des hôpitaux |
- 300 |
Développement des actions de prévention de la CNAMTS |
- 300 |
Taxe sur les ventes directes de médicaments |
300 |
Relèvement de la taxe sur la publicité des laboratoires |
300 |
Taxe de santé publique sur les tabacs |
1.300 |
Reprise de la dette |
1.200 |
Utilisation de l'excédent de la C3S |
1.000 |
Solde prévisionnel 1998 |
- 5.100 |
Les chiffres contenus dans ce tableau sont très
contestables et affichent une réduction du déficit beaucoup plus
importante que celle qui sera réalisée en réalité.
Sur la forme, les deux chiffres contestables sont, de surcroît, les plus
importants. Il s'agit :
- de l'ampleur du déficit tendanciel pour 1998 (12,9 milliards de
francs) ;
- de l'ampleur des recettes nouvelles résultant, pour le régime
général, de la substitution de la CSG aux cotisations maladie
(4,6 milliards de francs).
a) Un déficit tendanciel surévalué
Le déficit tendanciel pour 1998, d'abord, est
évalué de manière très large par le Gouvernement.
Il repose en effet sur une évaluation faite par la Commission des
comptes de la sécurité sociale dans son rapport, qui
précise que:
" Pour établir le compte de la branche maladie, il est notamment
nécessaire de se fixer le montant de l'objectif national des
dépenses d'assurance maladie (ONDAM). Le choix qui en est fait dans le
projet de loi de financement de la sécurité sociale est l'un des
points clés de la politique sociale. Il est remplacé ici par une
hypothèse purement technique. Compte tenu de l'évolution du champ
de cette grandeur telle qu'on peut la reconstituer sur les données du
passé et de sa valeur attendue en 1997,
on a fixé l'ONDAM de
1998 sur la ligne de sa tendance récente, ce qui correspond à un
accroissement de 2,2 % par rapport à 1997. C'est évidemment
une hypothèse conventionnelle
qui ne cherche en rien à
anticiper sur ce que sera la proposition du Gouvernement et le choix du
Parlement ".
Si une autre hypothèse avait été retenue, le
déficit tendanciel aurait été inférieur. Par
exemple, si la Commission des comptes de la sécurité sociale
avait choisi de considérer que la " tendance " était
celle de la maîtrise des dépenses et qu'elle avait calculé
le déficit sur la base d'une évolution des dépenses de
1,7 % (ONDAM 1997),
le déficit tendanciel serait de
9,7 milliards de francs seulement.
La réduction de déficit opérée par le projet de loi
de financement le ferait donc passer de 9,7 milliards de francs à 5,1
milliards, soit une réduction de 4,6 milliards de francs.
Dans son tableau, le Gouvernement affiche une réduction de
déficit de 7,8 milliards de francs,
soit une estimation
supérieure de plus de 40 %
à celle qui aurait pu
être retenue dans une hypothèse de poursuite de la maîtrise
des dépenses.
b) Les effets de la substitution de la CSG aux cotisations maladie : un chiffrage bien mystérieux du surcroît de recettes pour l'assurance maladie
L'étude du principe et des modalités de la
substitution de la CSG aux cotisations maladie a été faite dans
la première partie du présent rapport. Elle ne sera donc pas
reprise ici.
Il résulte cependant de cette analyse que le chiffre de 4,6 milliards
avancé par le Gouvernement pour évaluer les recettes
supplémentaires de la branche maladie résultant de cette
substitution est bien mystérieux :
- ses modalités de calcul ne sont pas précisées par le
Gouvernement, alors que l'on peut légitimement considérer que,
surtout pour une somme aussi élevée, le Parlement est en droit de
disposer d'évaluations précises et fiables ;
- dans la mesure où la CSG va frapper très
sévèrement l'épargne, il faut tenir compte des
possibilités de substitution et de transfert ;
- l'évaluation du Gouvernement repose sur le principe selon lequel seule
la CNAMTS, à l'exclusion des autres caisses d'assurance maladie,
bénéficierait d'un surcroît de recettes.
Le rapport de l'Assemblée nationale confirme le caractère
aléatoire de la prévision gouvernementale, en estimant, selon les
pages consultées, le bénéfice pour l'assurance maladie
à 4,5 milliards de francs ou à 3,4 milliards de francs.