RAPPORT N° 422 - PROJET DE LOI, ADOPTE AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE EN DEUXIEME LECTURE, INSTITUANT UNE COMMISSION CONSULTATIVE DU SECRET DE LA DEFENSE NATIONALE
M. Nicolas ABOUT, Sénateur
COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES, DE LA DEFENSE ET DES FORCES ARMEES - RAPPORT N° 422 - 1997/1998
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Table des matières
- A. LE SOUCI DU SÉNAT : NE PAS FAIRE UNE LOI DE CIRCONSTANCE
- B. LES AMÉLIORATIONS PRATIQUES À LA PROCÉDURE, PRÉCONISÉES PAR LE SÉNAT
-
C. EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI
-
Article premier -
Création et compétence de la commission consultative du secret de la défense nationale -
Article 2 -
Composition de la commission -
Article 3 -
Fonctionnement de la commission -
Article 4 -
Procédures de saisine de la commission consultative -
Article 5 -
Les pouvoirs de la commission -
Article 6 -
Collaboration entre l'administration et la commission -
Article 7 -
L'avis de la commission -
Article 8 -
Décision de l'autorité administrative et publication du sens de l'avis de la commission -
Article 9 -
Disposition transitoire sur la durée du mandat des premiers membres -
Article 10
Application de la loi aux territoires d'outre-mer et à Mayotte
-
Article premier -
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 422
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 6 mai 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN DEUXIÈME LECTURE , instituant une commission consultative du secret de la défense nationale ,
Par M. Nicolas ABOUT,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton, Charles-Henri de Cossé-Brissac, vice-présidents ; Michel Alloncle, Jean-Luc Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë, secrétaires ; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jacques Bellanger, Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, André Gaspard, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet , Jacques Habert, Marcel Henry, Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, André Rouvière, André Vallet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale (11
ème législ.) :
Première lecture :
593
,
679
,
684
et T.A.
84
.
Deuxième lecture :
778
,
824
et T.A.
125
.
Sénat
: Première lecture :
297, 327, 337
et
T.A.
94
(1997-1998).
Deuxième lecture :
404
(1997-1998)
|
Défense nationale. |
Mesdames, Messieurs,
Le texte instituant une commission consultative du secret de la défense
nationale, après une deuxième lecture à l'Assemblée
nationale, revient devant notre Haute Assemblée sans que celle-ci y
retrouve les principales modifications qu'elle y avait apportées.
En effet, à l'exception de quelques points d'accord sur des
améliorations rédactionnelles qu'avait proposées le
Sénat, des divergences sensibles demeurent sur des dispositions
essentielles.
Si l'Assemblée nationale et le Sénat ont pu constater leur accord
sur le principe même de la création de la commission consultative
destinée à faciliter, au profit d'une juridiction, la
procédure de déclassification de documents sensibles tout en
respectant les impératifs essentiels de la défense nationale, les
deux assemblées divergent sur l'ampleur des compétences qui
peuvent lui être confiées.
Votre rapporteur se propose donc de rappeler en quoi le Sénat a
été, et reste, soucieux de ne pas faire une loi de circonstance,
mais bien de créer un instrument juridique crédible et de plein
exercice, à même de permettre tant à la justice qu'à
la représentation nationale, c'est-à-dire, en fait, au citoyen,
de bénéficier d'une transparence accrue.
*
* *
A. LE SOUCI DU SÉNAT : NE PAS FAIRE UNE LOI DE CIRCONSTANCE
Dans son approche du projet de loi portant création
d'une commission consultative du secret de la défense nationale, le
Sénat, dans sa majorité, a souhaité faire un travail
constructif en tentant notamment d'élargir la procédure de
transparence qui lui était proposée au delà du seul
dialogue entre une juridiction française et l'autorité
administrative en charge de la classification de documents sensibles.
Or le texte qui revient au Sénat en deuxième lecture tend en fait
-comme le projet de loi initial- à créer une instance dont on
peut discerner qu'elle a été conçue comme une
réponse de circonstance, inspirée par une affaire en cours depuis
six ans, impliquant d'une part une juridiction et d'autre part
l'autorité administrative, dans une procédure illégale
d'interception de sécurité.
Le principe d'une présidence commune, de droit, à la future
commission consultative et à l'actuelle CNCIS, en est un premier indice.
Un deuxième indice en est également la saisine, par le Premier
ministre, par anticipation sur le vote de la loi par le Parlement, de l'actuel
président de la CNCIS afin de recueillir son avis sur
l'opportunité de déclassifier certains documents demandés
par le juge dans le cadre de cette même affaire.
Votre commission avait et conserve, à l'égard du texte qui lui
est soumis, un double souci : donner de larges compétences à la
nouvelle instance ; en faire un organe de plein exercice avec une
présidence propre.
1. Elargir les compétences de la commission consultative du secret de la défense nationale
Le Sénat n'a pas, dans sa majorité et
malgré quelques réserves, contesté l'intérêt
d'une instance indépendante nouvelle, à même de concilier
la légitime requête d'un juge dans sa recherche de la
vérité et la non moins légitime protection dont doivent
faire l'objet les documents sensibles pour la défense nationale. Le
Sénat a toutefois souhaité
élargir les
compétences de la commission consultative
à d'autres
hypothèses où le secret défense pourrait être
opposé à une institution, et notamment aux requêtes
formulées par une commission parlementaire.
Deux raisons au moins plaident en faveur d'une telle disposition.
- La
première raison
renvoie à l'avis formulé par
le Conseil d'Etat lui-même dans son rapport de 1995 et sur lequel
s'appuie l'exposé des motifs du projet de loi. Si le Conseil d'Etat
préconisait la création d'une commission du secret de la
défense, c'était, à ses yeux,
"pour satisfaire à
la règle d'accès indirect aux données couvertes par le
secret défense,
quelles que soient les circonstances où se
trouve posé un problème touchant à celui-ci
(...) y
compris,
en cas de litige devant la juridiction administrative ou
judiciaire
."
Le Conseil d'Etat n'entendait donc pas limiter
a priori
les
compétences de la future commission aux seules procédures
engagées devant les juridictions. Le Sénat partage cette ambition
que le projet de loi initial ne retenait pas.
- La
seconde raison
se fonde sur l'accroissement -modeste- des pouvoirs
de contrôle du Parlement qui pourrait résulter de la
possibilité ainsi donnée à une commission parlementaire de
bénéficier de la procédure de saisine. Loin de modifier
l'équilibre institutionnel actuel, aucun "droit" à
déclassification n'étant évidement reconnu, un tel
dispositif laisserait à l'autorité en charge de la classification
toute latitude, pour décider,
in fine
, de ce qu'il lui
paraît approprié de faire.
La critique selon laquelle une telle disposition aboutirait à
"politiser" toute demande de déclassification par une commission
parlementaire ne peut être valablement retenue. Le caractère
"politique" de telles affaires ne provient pas de l'auteur de la demande de
déclassification, mais bien des caractéristiques
inhérentes à l'affaire elle-même. A cet égard, qui
pourrait ne pas constater le caractère "politique" de tel ou tel dossier
où la justice a eu -ou a encore en ce moment même- l'occasion
d'être confrontée au secret de la défense nationale ?
Cet ensemble de raisons -ajoutées à celles évoquées
par votre rapporteur lors de la première lecture,- incitera donc votre
commission à proposer au Sénat de revenir au texte adopté
précédemment par notre Haute Assemblée en première
lecture.
2. Faire de la commission consultative une instance de plein exercice avec une présidence propre
L'Assemblée nationale, en deuxième lecture, n'a
pas davantage retenu la modification apportée par le Sénat
tendant à permettre de doter d'une présidence spécifique
la Commission consultative du secret de la défense nationale. Reprenant
la formulation du projet de loi initial, elle a réinscrit le principe
d'une
présidence commune de droit
à cette future
commission consultative et à l'actuelle CNCIS.
L'argument d'un souci -a priori fort louable- d'économie de moyens,
résiste mal à l'examen. Il eût dans cette perspective
été préférable d'élargir les
compétences de l'actuelle CNCIS à celles prévues pour la
future commission consultative et ne créer aucune instance nouvelle.
A partir du moment où le choix est opportunément fait de
créer une autorité administrative nouvelle, la logique tant
administrative que juridique est au contraire de lui donner une
présidence autonome.
Au surplus, si les compétences de chacune de ces deux autorités
administratives indépendantes sont certes voisines, en ce qu'elles ont
trait à des informations sensibles protégées par le secret
de la défense nationale, elles sont loin de se recouper totalement et
l'on pourrait même imaginer des hypothèses où une
décision de la CNCIS pourrait être ensuite soumise à la
compétence consultative de la commission du secret de la défense
nationale.
Au demeurant, la solution préconisée par le Sénat
préserve la possibilité d'une identité provisoire des
présidences, s'il devait s'avérer opportun, pour assurer le
démarrage de la nouvelle instance, de recourir à une
personnalité ayant acquis, à la tête de la CNCIS, une
expérience utile au traitement des sujets et des procédures
sensibles liés aux questions relevant du secret de la défense
nationale. La proposition du Sénat n'a d'autre objectif que de ne pas
inscrire "dans le marbre de la loi" le principe d'une présidence commune
"de droit".
B. LES AMÉLIORATIONS PRATIQUES À LA PROCÉDURE, PRÉCONISÉES PAR LE SÉNAT
1. Les points d'accord avec l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a repris certaines des
modifications adoptées par le Sénat en première lecture
tendant à parfaire la rédaction du texte ou à
aménager certains aspects pratiques de la procédure.
C'est le cas notamment :
- à l'
article 2
où l'expression de
"membres non
parlementaires"
a été substituée à celle de
"personnalités qualifiées"
;
- à l'
article 4
où la formulation, plus conforme à
l'esprit du texte, de la possibilité, pour le juge, de demander
"la
déclassification et la communication d'informations
protégées"
a été retenue de
préférence à celle d' "
accès à des
informations classifiées
" ;
- à l'
article 7
où, à l'initiative de notre
commission des Lois, le Sénat a introduit un mécanisme permettant
à l'autorité administrative responsable de la classification de
prendre sa décision alors même que l'autorité
administrative n'aurait pas rendu son avis dans le délai de deux mois
qui lui est imparti ;
- à l'
article 8
enfin, où le Sénat a
souhaité établir un échéancier plus cohérent
concernant la publication du sens de l'avis de la commission consultative.
Cette publication sera concomitante et non antérieure à la
décision finale prise par l'autorité compétente.
2. Les autres modifications du Sénat rejetées par l'Assemblée nationale :
•
l
'
institution d'une double procédure
de déclassification
Le Sénat avait institué une disposition destinée
à limiter le recours à la procédure de saisine de la
commission aux seules demandes dont la difficulté le justifie vraiment.
Soucieux d'efficacité administrative, le Sénat avait
adopté à l'
article 4
cette double procédure de
déclassification de documents ou d'informations sensibles, permettant :
- une déclassification directe des informations demandées dans
les cas les plus simples -celles relevant notamment du "confidentiel
défense". La procédure judiciaire y gagne en
célérité et en simplicité, pour le
bénéfice de tous, singulièrement du justiciable,
- une saisine obligatoire de la Commission consultative dans tous les autres
cas.
L'Assemblée nationale s'est opposée à cette
procédure de bon sens, aux motifs :
- qu'elle priverait la commission consultative de la matière
nécessaire à l'élaboration d'une jurisprudence
substantielle. Pour votre rapporteur, ce louable souci de juriste ne doit pas
pour autant constituer une priorité législative ;
- qu'elle transformerait la commission consultative en une instance d'appel
d'un refus de déclassification. Ce dernier argument ne convainc pas
votre rapporteur : on n'engage une procédure d'appel que contre une
"décision formelle " qui, en l'occurrence, serait inexistante. Une
"non-déclassification " directe ne constitue pas une décision
implicite de rejet de la demande, elle ne fait que justifier le recours
à l'avis autorisé d'un tiers, précisément la
commission consultative, instituée à cette fin. En d'autres
termes,
le choix proposé à l'autorité responsable n'est
pas entre la déclassification et le refus de déclassifier, mais
bien plus entre la déclassification immédiate, si elle est
possible, et la saisine de la commission consultative dans les cas plus
complexes
. Rien n'empêche d'ailleurs l'autorité responsable,
en pratique, de saisir systématiquement la commission consultative, la
procédure que propose le Sénat a simplement pour objet de
prévoir une faculté de nature à apporter des solutions
rapides à des problèmes simples.
•
la
précision des
critères de
référence proposés à l'appréciation de la
Commission consultative pour la formulation de son avis.
L'article 7 du projet de loi précise les éléments que
les membres de la Commission consultative devront prendre en
considération pour formuler leur avis.
Le Sénat avait en première lecture apporté deux
modifications à cet article tendant :
- d'une part, à remplacer l'expression
"missions du service public
de la justice"
par celle de mission
"incombant à la
juridiction".
L'Assemblée nationale n'a pas retenu cette
première modification, que votre commission vous propose
néanmoins de réintroduire dans le texte. En effet, la formulation
du Sénat, plus précise, entend bien indiquer qu'il s'agit de
faciliter
in concreto
l'activité d'une juridiction dans le
cadre d'une affaire particulière
et non de prendre en compte
globalement la notion, excessivement large, de "service public de la justice".
- d'autre part, à faire explicitement référence aux
"intérêts fondamentaux de la nation tels que définis
à l'article 410-1 du code pénal".
Cet article définit
les intérêts fondamentaux de la nation en énumérant
: son indépendance, l'intégrité de son territoire, sa
sécurité, la forme républicaine de ses institutions, les
moyens de sa défense et de sa diplomatie, la sauvegarde de sa population
en France et à l'étranger, l'équilibre de son milieu
naturel et de son environnement, les éléments essentiels de son
potentiel scientifique et économique et son patrimoine culturel.
Le Sénat avait justifié cette modification en précisant
que
"le respect des engagements internationaux de la France"
et la
nécessité de
"préserver ses capacités de
défense",
figurant dans le texte du projet initial, étaient
couverts -et au-delà- par la nouvelle rédaction proposée.
Par ailleurs, votre rapporteur avait souligné qu'à l'heure d'une
globalisation croissante de la notion de défense et de
sécurité, une acception large des intérêts nationaux
à défendre se justifiait pleinement.
Au surplus, comme le précise la circulaire du 14 mai 1993
commentant les dispositions du nouveau code pénal et
singulièrement son article 410-1, "
l'intérêt juridique
[de cet article]
(...) apparaît (...) à la lecture des
dispositions du chapitre
[du nouveau code pénal]
relatives
à l'espionnage et à la trahison".
Or, il convient de ne pas
perdre de vue que la réforme proposée s'applique non seulement
aux affaires où la justice serait confrontée au secret
défense dans des affaires qui n'en relèvent pas directement
-comme celles dont on parle le plus souvent- mais également dans les
affaires touchant directement à des cas de violation
délibérée du secret, c'est-à-dire
précisément dans les cas d'actes d'espionnage, voire de trahison.
Votre rapporteur estime donc opportun de revenir sur ce point
également à la rédaction initialement proposée par
le Sénat.
•
la
préservation des pouvoirs spécifiques
d'investigation du président de la commission consultative
Le projet de loi, dans sa rédaction initiale tendait
légitimement à conférer au président de la
commission consultative une spécificité quant aux pouvoirs
d'investigation qu'il aurait à exercer, pour recueillir les informations
nécessaires aux délibérations de ladite commission.
L'Assemblée nationale a ajouté en première lecture -et a
fait de même en deuxième lecture- la faculté pour le
président de se faire assister, pour ces mêmes investigations,
d'"un membre" de la commission. Comme elle l'a fait en première lecture,
votre commission ne souhaite pas retenir une telle disposition, pour les
mêmes motifs que ceux évoqués par votre rapporteur dans son
rapport initial : reconnaître au seul président certaines
compétences d'investigation et d'enquête se justifie pleinement au
regard du domaine particulièrement sensible dans lequel il aura à
exercer ces compétences. De surcroît, le choix du membre qui
l'assistera -juriste ou parlementaire (et pour ce dernier cas, le
représentant de quelle famille politique ?)- risque de s'avérer
particulièrement délicat.
En revanche, le Président pourrait, en cas d'indisponibilité
temporaire non pas être "
assisté
" mais
"
suppléé
" par un vice-président qu'il reviendra
à la commission de désigner, dans le cadre de dispositions
ad
hoc
de son règlement intérieur. Tel sera le sens de
l'amendement que votre commission vous proposera d'adopter à l'article 5
du projet de loi.
*
* *
C. EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI
Article premier -
Création et compétence
de la commission consultative du secret de la défense nationale
Nos deux assemblées sont d'accord sur le principe de la
création de la commission consultative du secret de la défense
nationale.
Toutefois, certaines des compétences de la nouvelle instance continuent
d'opposer le Sénat et l'Assemblée nationale.
Deux modifications proposées par le Sénat à cet article
n'ont pas été retenues par nos collègues
députés.
• Le Sénat, sur proposition de sa commission des lois, avait
décidé de requalifier la nouvelle instance en "commission
administrative indépendante", compte tenu de la compétence
exclusivement consultative qui lui était reconnue et qui ne pouvait,
dès lors, lui valoir l'appellation "d'autorité administrative
indépendante". L'Assemblée nationale a rétabli cette
qualification initiale sur laquelle votre commission, dans un souci de
compromis, ne vous proposera pas cependant de revenir. En effet,
"l'autorité administrative indépendante" constitue
désormais une catégorie juridique reconnue et la notion
d'"autorité" doit être comprise davantage au sens
d'"autorité morale" que comme l'expression d'une seule compétence
décisionnelle.
• En revanche, votre commission vous propose à nouveau de
réinscrire à cet
article ler
la
possibilité
-supprimée par l'Assemblée nationale- donnée à une
commission parlementaire, de bénéficier de la procédure de
saisine de la commission consultative,
prévue pour une juridiction
française.
Votre rapporteur a déjà rappelé, dans l'exposé
général, les raisons qui légitiment une telle disposition
qui paraît d'ailleurs, à votre commission, essentielle pour
justifier l'intérêt de la nouvelle instance. Votre rapporteur a
d'ailleurs été extrêmement surpris de voir
l'Assemblée nationale priver ainsi, d'un trait de plume, le Parlement de
la possibilité, certes modeste mais malgré tout significative,
d'accroître son pouvoir de contrôle, alors même que
l'équilibre institutionnel général, auquel le Sénat
est attaché autant que quiconque, ne s'en trouve aucunement
modifié.
L'objet de
l'amendement
de votre commission tend donc à
rétablir la proposition adoptée par le Sénat en
première lecture et qui prévoit, dans trois hypothèses, la
possibilité pour une commission parlementaire de
bénéficier -via l'autorité ministérielle
responsable- de la procédure de saisine de la Commission consultative.
Plus précisément le dispositif proposé par votre
commission ouvre cette faculté :
- à des commissions spéciales ou permanentes si elles estiment
nécessaire d'entendre une personne (article 5
bis
de l'ordonnance
n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des
assemblées parlementaires) ;
- aux rapporteurs des commissions permanentes ou spéciales investies de
pouvoirs d'enquête (article 5
ter)
;
- aux commissions
d'enquête constituées conformément
à l'article 6 de la même ordonnance.
Article 2 -
Composition de la commission
L'Assemblée nationale n'a pas souhaité,
contrairement au Sénat, revenir sur le principe d'une
présidence commune de droit
à la CNCIS et à la
future commission consultative. Pour les raisons déjà
exposées par votre rapporteur, votre commission estime pour sa part
administrativement plus cohérent et juridiquement plus clair de ne pas
prévoir dans la loi une telle identité de présidence.
L'amendement
de votre commission tend donc à revenir au texte
adopté sur ce point par le Sénat en première lecture.
Article 3 -
Fonctionnement de la commission
................................................................................ ............................
Article 4 -
Procédures de saisine de la
commission consultative
A cet article, votre commission propose
deux
amendements
:
- Le premier amendement, par coordination avec la proposition d'amendement
formulée à l'article premier, vise à prendre en compte
l'hypothèse d'une saisine de la commission consultative par
l'autorité administrative,
à la suite de la demande d'une
commission parlementaire
.
- Le second amendement propose de réintroduire la procédure,
votée par le Sénat en première lecture,
permettant
à l'autorité responsable de déclassifier
d'elle-même
, dans les cas les plus simples, les documents faisant
l'objet d'une demande émanant soit d'une juridiction, soit d'une
commission parlementaire, et
réservant la saisine de la commission
consultative aux cas les plus complexes
qui requièrent une
investigation plus poussée et une analyse particulière. Cet
amendement fait l'objet d'une nouvelle rédaction destinée
à clarifier l'objet de la procédure proposée.
Article 5 -
Les pouvoirs de la commission
Contrairement à l'Assemblée nationale, le
Sénat n'a pas estimé opportun de prévoir l'assistance du
Président par "un membre" de la commission dans l'exercice de ses
pouvoirs d'investigation. Les raisons déjà
évoquées, tant pratiques que de principe, incitent donc votre
commission à supprimer cette disposition. Toutefois, votre commission
reconnaît qu'il convient de
prévoir les cas
d'indisponibilité temporaire du Président
et donc la
possibilité pour la commission de
désigner un
vice-président chargé de conduire alors -mais seul- les
activités d'investigation et d'enquête
réservées
au président.
Tels sont les objets des
deux amendements
proposés par votre
commission à cet article 5, qui institue ainsi un
mécanisme de
suppléance
, aux lieu et place du mécanisme d'assistance.
Article 6 -
Collaboration entre l'administration et
la commission
................................................................................ ..........................................
Article 7 -
L'avis de la commission
A l'issue de la deuxième lecture effectuée par
l'Assemblée nationale, deux points restent l'objet d'une
différence d'approche entre les deux assemblées.
- le premier a trait à l'expression de
"missions incombant à
la juridiction"
que votre commission continue de préférer
à celle de
"missions incombant au service public de la justice",
jugeant celle-là plus précise et en l'espèce plus
adaptée que celle-ci. C'est l'objet d'un premier amendement
proposé par votre commission.
- le deuxième concerne la référence explicite à
l'
article 410-1 du code pénal
définissant de façon
appropriée les
intérêts fondamentaux de la nation
et
qui sera l'un des critères d'appréciation proposés aux
membres de la commission lors de la préparation de leur avis. Cette
référence apparaît opportune au Sénat, en ce qu'elle
:
.
correspond à la notion de défense globale,
élargie au delà des seuls intérêts militaires ou
diplomatiques,
.
permet de prendre en compte les cas où la justice est
appelée à juger de violations caractérisées du
secret de la défense nationale lors des affaires d'espionnage ou de
trahison.
Votre commission a donc adopté un deuxième amendement en ce sens.
Article 8 -
Décision de l'autorité
administrative et publication du sens de l'avis de la commission
L'Assemblée nationale a adopté à cet
article deux des modifications préconisées par le Sénat :
- le dispositif permettant à l'autorité administrative
responsable de prendre sa décision, alors même que la commission
consultative n'aurait pas rendu son avis dans le délai imparti de deux
mois,
- la procédure de publication du sens de l'avis qui n'interviendra que
concomitamment à la décision finale de l'autorité
administrative responsable de la classification.
A cet article, votre commission n'a donc adopté qu'un
amendement de
cohérence
, lié à la possibilité reconnue
à une commission parlementaire de bénéficier de la
procédure de saisine de la commission consultative.
Article 9 -
Disposition transitoire sur la
durée du mandat des premiers membres
................................................................................ ............................
Article 10
Application de la loi aux territoires
d'outre-mer et à Mayotte
................................................................................
............................
Sous réserve des amendements qu'elle présente, votre commission
vous propose d'adopter le présent projet de loi.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission des Affaires étrangères, de la
Défense et des Forces armées, réunie sous la
présidence de M. Xavier de Villepin, président, a examiné
en deuxième lecture le présent projet de loi lors de sa
réunion du mercredi 6 mai 1998.
A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Bertrand Delanoë a
regretté que le Sénat et l'Assemblée nationale n'aient pu
se rapprocher -à quelques exceptions près- sur un texte qui
constitue un progrès du droit. Il avait donc, à titre personnel,
les mêmes accords et les mêmes désaccords à
l'égard des amendements proposés par le rapporteur, et qui
tendent, pour l'essentiel, à revenir au texte précédemment
adopté par le Sénat.
La commission a ensuite adopté les amendements présentés
par le rapporteur et tendant :
- à étendre le bénéfice de la procédure de
saisine de la commission consultative à une commission parlementaire
(articles premier, et, par coordination, articles 4, 7 et 8) ;
- à supprimer le principe de la présidence commune de droit
à la CNCIS et à la future commission consultative (article 2) ;
- à préserver la possibilité d'une procédure
directe de déclassification par l'autorité responsable (article
4) ;
- à prévoir une éventuelle suppléance du
président dans ses missions d'investigation (article 5) ;
- à reprendre la formule "mission incombant à la juridiction" de
préférence à celle de mission du "service public de la
justice" (article 7) ;
- à reprendre la référence à l'article 410-1 du
code pénal sur les "intérêts fondamentaux de la nation"
dans les critères d'élaboration de l'avis de la commission
consultative (article 7).
La commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi ainsi
modifié.