ARTICLE 11
Modification du mécanisme de la déduction en
cascade de la TVA en cas d'autoliquidation
Commentaire : cet article tire les conséquences
d'une décision récente du Conseil d'Etat relative aux rappels de
TVA en supprimant, lorsque la taxe est autoliquidée, la
possibilité pour l'entreprise qui fait l'objet du redressement de
déduire "en cascade" la TVA de son résultat imposable.
Lorsque, dans le cadre d'une vérification de comptabilité qui
porte à la fois sur la fiscalité directe et indirecte, une
entreprise fait l'objet d'un rappel de TVA, elle conserve le droit de
déduire -conformément aux règles de droit- commun la taxe
qu'elle a omis de déclarer.
En vertu de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, cette TVA
est alors déduite de son résultat imposable non pas au titre de
l'exercice de recouvrement effectif, mais au titre de l'exercice
vérifié : c'est ce qu'il est convenu d'appeler la
"déduction en cascade". Cette solution favorable au contribuable
vérifié est justifiée par le fait que la TVA
déductible ne constitue jamais une charge pour l'entreprise, et doit
rester sans incidence sur son résultat imposable.
La "déduction en cascade" est applicable de plein droit, à moins
que le contribuable y renonce expressément. En effet, dans certaines
hypothèses (résultat imposable négatif, par exemple), il
peut lui être plus favorable d'imputer la TVA rappelée sur
l'exercice de recouvrement.
Toutefois, telle quelle, cette "déduction en cascade" pourrait avoir
pour effet de permettre à l'entreprise de réaliser un gain, en
minorant de manière artificielle son résultat soumis à
l'IS, dès lors que la TVA non déclarée initialement est
déductible. Pour éviter cela, cet avantage indu, qui est
qualifié de "profit sur le Trésor", est
réintégré dans la base de l'IS au titre de l'exercice de
rappel. En revanche, il n'y a pas de "profit sur le trésor" si la TVA
rappelée reste non déductible.
Un problème particulier se pose dans le cas où la TVA est
autoliquidée, c'est-à-dire lorsque l'entreprise est à la
fois créditrice et débitrice de la TVA pour une même
opération (prestations réalisées par un prestataire
établi hors de France au profit d'un assujetti français,
livraisons à soi-même, acquisitions intracommunautaires).
Dans cette hypothèse, il n'y a ni décaissement ni encaissement
effectif de TVA et, par définition, l'opération reste sans effet
sur le résultat imposable de l'entreprise, qu'elle soit ou non
déclarée.
Par un arrêt du 6 octobre 1997, SCI Hurks, le Conseil d'Etat a
jugé que, dans ce cas de figure, l'administration fiscale
n'était pas fondée à réintégrer le "profit
sur le Trésor" dans le résultat de l'entreprise
vérifiée, au double motif suivant :
- en s'abstenant de déclarer la TVA dont il est débiteur, le
redevable se prive corrélativement d'une créance
équivalente sur le Trésor et n'accroît en rien son
résultat imposable ;
- dès lors, l'imputation d'un "profit sur le Trésor" ne peut
être justifiée par la nécessité d'équilibrer
l'incidence de l'application de la "déduction en cascade" prévue
par l'article L. 77 du code des procédures fiscales.
Le fondement de la décision du Conseil d'Etat est incontestable.
Néanmoins, il apparaît nécessaire d'en tirer toutes les
conséquences en interdisant aux entreprises qui font l'objet d'un rappel
de TVA, dans le seul cas d'une taxe autoliquidée, de
bénéficier du mécanisme de la déduction "en
cascade".
En effet, puisque l'administration fiscale ne peut pas leur imputer un "profit
sur le Trésor", réciproquement, il est logique que les
entreprises ne puissent pas déduire de leur bénéfice
imposable la TVA rappelée.
Tel est l'objet du présent article, dont le paragraphe I modifie
l'article L. 77 du code des procédures fiscales, afin de supprimer
l'application de la déduction "en cascade" pour les rappels de taxe
afférents à des opérations autoliquidées par le
redevable.
Par coordination, le paragraphe II du présent article complète le
4° du 1 de l'article 39 du code général des impôts,
afin de supprimer le droit à déduction de la TVA rappelée
du bénéfice imposable, au titre de l'exercice de recouvrement.
Le paragraphe III précise que ces dispositions s'appliquent aux rappels
de TVA notifiés à compter du 1er janvier 1998.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.