Rapport n° 328 - Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Moldavie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements
M. André BOYER, Sénateur
Commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées - Rapport n° 328 - 1997-1998
Table des matières
- A. LA SITUATION POLITIQUE INTÉRIEURE DOMINÉE PAR LA QUESTION DE LA TRANSDNIESTRIE
- B. LES DÉFIS DE LA TRANSITION ÉCONOMIQUE MOLDAVE
- C. DES RELATIONS BILATÉRALES À DÉVELOPPER
- D. L'ACCORD FRANCO-MOLDAVE DU 8 SEPTEMBRE 1997
- CONCLUSION DU RAPPORTEUR
- EXAMEN EN COMMISSION
- PROJET DE LOI
-
ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT 44 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.
N° 328
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 4 mars 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Moldavie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements ,
Par M. André BOYER,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM. Xavier
de Villepin,
président
; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet,
François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton,
vice-présidents
; Michel Alloncle, Jean-Luc
Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë,
secrétaires
; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Jacques Bellanger, Daniel Bernardet, Pierre
Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette
Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique
Cerisier-ben Guiga, MM. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Marcel
Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert
Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, André Gaspard,
Philippe de Gaulle, Daniel Goulet
,
Jacques Habert, Marcel Henry,
Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune,
Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Mme Lucette
Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard
Plasait, André Rouvière, André Vallet.
Voir le numéro
:
Sénat
:
230
(1997-1998).
|
Traités et conventions. |
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de
l'accord sur l'encouragement et la protection réciproques des
investissements, conclu à Paris le 8 septembre 1997 entre la France et
la république de Moldavie, ex-Moldavie soviétique.
Cette convention est très comparable aux quelque soixante accords
relatifs à la protection des investissements qui nous lient à nos
différents partenaires commerciaux et, notamment, aux pays issus de la
disparition de l'URSS.
Le contenu de cet accord est donc suffisamment familier à votre
commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées pour que votre rapporteur consacre l'essentiel de son
propos à la situation intérieure moldave, dominée par la
sécession de la Transdniestrie, et aux relations entre la France et la
Moldavie.
*
* *
A. LA SITUATION POLITIQUE INTÉRIEURE DOMINÉE PAR LA QUESTION DE LA TRANSDNIESTRIE
Les événements violents qui se sont
déroulés depuis la fin de la période soviétique ont
eu pour origine, comme dans tant d'autres régions de l'ex-URSS,
l'exacerbation des passions nationalistes, après que l'effondrement de
l'autorité soviétique a révélé
l'hétérogénéité ethnique de la population
moldave. Si, en effet, les Moldaves roumanophones sont largement majoritaires
(66 % de la population totale en 1989), la minorité slave (27 % en 1989)
occupe des positions socialement et économiquement décisives dans
la capitale, Chisinau, et, surtout, en Transdniestrie. Il existe
également une petite minorité gagaouze, turcophone et
chrétienne, farouchement attachée à sa langue et à
ses traditions.
Notons que la domination soviétique a favorisé le
développement du nationalisme de la population roumanophone, du fait de
la vigueur de la "déroumanisation" entreprise depuis 1945. Cette
politique a, en effet, dénié au roumain le statut de langue
officielle, et a conduit à fermer la plupart des écoles où
l'enseignement était dispensé en roumain.
Jusqu'à une date récente, l'avenir de la république de
Moldavie était fortement hypothéqué par la vigueur du
nationalisme roumanophone, et par le sécessionnisme des Turcs gagaouzes
et des russophones de Transdniestrie. Seule demeure désormais en suspens
la question de la Transdniestrie qui paraît depuis mai 1997 en voie de
règlement.
- La
minorité gagaouze,
communauté turcophone
christianisée, représente environ 3 % de la population moldave,
soit 153 000 personnes. Elle est répartie entre cinq districts
situés entre l'Ukraine et la Roumanie. Dès 1990, les Gagaouzes
avaient créé leur république et une garde nationale
spécifique. En décembre 1994, le Parlement moldave reconnut
à cette minorité un statut d'
autonomie
au sein de la
République, lui donnant le droit de posséder ses propres
emblèmes, et de se doter d'une assemblée législative et
d'organes exécutifs spécifiques. Cette même loi de
décembre 1994 permettait aux Gagaouzes de faire sécession en cas
de réunification de la Moldavie avec la Roumanie, et conférait
à la langue gagaouze le statut de langue officielle, en plus du russe et
du moldave. Le statut de 1994, confirmé par une consultation
électorale en mars 1995, a été négocié
grâce à la
médiation de la Turquie
.
- La
flambée nationaliste pro-roumaine
a connu une issue
favorable à
l'indépendance moldave
par rapport aux
velléités intégratrices de la Roumanie : un
référendum a, en effet, rejeté le projet de
réunification avec la Roumanie, à la quasi-unanimité, en
mars 1994. Quelques semaines après cette consultation, le Parlement
moldave suspendait une loi adoptée en 1989, qui faisait du moldave
-forme dialectale du roumain- la langue officielle de la République,
à la place du russe, et qui soumettait les Moldaves non roumanophones
(soit 35 % de la population) à des tests de langue pour être admis
à des postes de responsabilité.
Il est probable que les résultats du référendum de mars
1994 ont été stimulés par une certaine déception de
la Moldavie à l'égard de la faiblesse de l'aide attribuée
par la Roumanie. Les difficultés économiques auxquelles se heurte
ce pays a, en effet, empêché Bucarest d'être à la
hauteur des attentes moldaves, et a encouragé la Moldavie à
recentrer sa politique extérieure sur la Communauté des Etats
indépendants, sur la Russie et, plus récemment, sur l'Ukraine.
La république de Moldavie a ainsi adhéré à la CEI
en avril 1994. Son ambition est aujourd'hui, au sein de cet ensemble, de
reconquérir les marchés de l'ex-URSS qui, jusqu'en 1990,
absorbaient 95 % de ses exportations. Le rapprochement avec la Russie a permis
à la Moldavie de bénéficier, en août 1994, d'un
allégement de sa dette gazière, alors que ce pays subissait une
série de catastrophes naturelles qui devaient affecter gravement
l'état de ses finances publiques. Enfin, jouant des antagonismes entre
ses deux "grands frères", la Russie et l'Ukraine, afin de
préserver une certaine marge d'autonomie au sein de la CEI, la Moldavie
soutient, contre la Russie, les positions ukrainiennes sur le port militaire de
Sébastopol, en Crimée, et l'aspiration de Kiev à
intégrer l'OTAN.
- Compte tenu de l'apaisement du nationalisme pro-roumain et du conflit avec la
minorité gagaouze, le principal défi que devra surmonter la
Moldavie dans les années à venir est celui de la
sécession de la république de Transdniestrie.
La république de Transdniestrie, autoproclamée en septembre 1990,
occupe 5 000 km². Les Russes représentent moins du quart d'une
population d'environ 700 000 habitants, qui équivaut à quelque 16
% de la population moldave. Le différend entre la Transdniestrie et
Chisinau, attisé par la politique nationaliste pro-roumaine conduite par
les autorités moldaves jusqu'en 1994, a pris la forme
d'
affrontements
armés particulièrement violents
entre les troupes moldaves, d'une part et, d'autre part, les forces
nationalistes et communistes de la "république du Dniestr",
appuyées par la
XIVe Armée russe
, commandée alors
par le général Lebed. Les combats se sont apaisés avec la
signature d'un
armistice en juillet 1992
. Un accord signé entre
Chisinau et Moscou prévoyait le retrait, dans un délai de trois
ans, des troupes russes stationnées en Transdniestrie, fortes de quelque
6 000 hommes, et dotées d'un armement manifestement
surdimensionné. Cet accord est resté inappliqué, notamment
parce que la population de Transdniestrie s'est prononcée en faveur du
maintien de la présence militaire russe dans la République, si
l'on se réfère aux 23 % de réponses positives
formulées lors d'un référendum organisé en
Transdniestrie en mars 1995.
La question de Transdniestrie paraît avoir fortement influencé le
résultat des
élections présidentielles de
novembre-décembre 1996
, si l'on en juge par la victoire sur le
président sortant, nationaliste et pro-occidental, de Petru Lucinschi,
réputé russophile, élu notamment grâce aux voix des
russophones inquiets de la situation en Transdniestrie.
Le nouveau chef de l'Etat a obtenu, en mai 1997, la signature, sous le
parrainage de la Russie, de l'Ukraine et de l'OSCE (Organisation pour la
sécurité et la coopération en Europe), d'un
mémorandum sur le statut de la Transdniestrie
.
Ce compromis maintient l'
intégrité territoriale du pays,
tout en satisfaisant l'essentiel des revendications des séparatistes. Il
a permis l'ouverture de négociations sur la suppression des
frontières, l'utilisation d'une monnaie unique (revenant à
supprimer le rouble de Transdniestrie au profit du leu moldave),
l'harmonisation des législations entre la Transdniestrie et le reste de
la Moldavie, et sur le retrait effectif des troupes russes.
B. LES DÉFIS DE LA TRANSITION ÉCONOMIQUE MOLDAVE
A la fin de l'époque soviétique, la Moldavie
renvoyait l'image d'un
petit pays à l'agriculture
prospère
, aux coteaux couverts de vergers et de vignobles, et au
climat clément.
L'apparente oppulence de l'agriculture moldave (production de fruits et
légumes, de tabac, de betteraves sucrières et de "champagne"
soviétique) occultait cependant, dès les années 1970, de
sérieux problèmes de fond : incapacité du système
kolkhozien, imposé à la fin des années 1940, à
susciter un réel dynamisme de la production agricole, pollution
liée à un usage massif des engrais, incidence de la division
socialiste du travail, qui avait fait de la Moldavie le
verger de
l'URSS
, sans développer véritablement les investissements
industriels -à l'exception de la Transdniestrie.
Aujourd'hui, la Moldavie est considérée comme
le pays le plus
pauvre de la bordure occidentale de l'ex-URSS
. La
faiblesse des
ressources
naturelles
(si l'on fait exception de modestes
quantités de pétrole et de gaz), et la
dépendance qui
en résulte à l'égard de la Russie
sont actuellement
les deux principales limites au développement moldave. L'effondrement de
l'URSS a également conduit à la
disparition des
débouchés traditionnels des productions agricoles moldaves
,
et a révélé le
vieillissement d'un secteur
agro-industriel
inapte à faire face à une concurrence
mondiale accrue.
Dans le contexte de la transition post-soviétique, la modernisation du
secteur agro-industriel est devenue une priorité, car ce secteur peut
permettre de développer les exportations qui, à leur tour,
pourront financer les importations de produits énergétiques et de
nouveaux matériels.
En dépit de ces difficultés, la Moldavie n'est pas privée
d'atouts. Ainsi la présence, sur le territoire moldave, d'un
gazoduc
acheminant le gaz russe vers la Roumanie et la Bulgarie pourrait-elle
permettre à la république de Moldavie de négocier avec la
Russie des tarifs gaziers avantageux.
Les
réformes courageuses
mises en oeuvre depuis 1993 par les
autorités moldaves, sur la base des recommandations du FMI, ont permis
une diminution rapide de l'inflation, et la stabilité relative du leu
par rapport au dollar -au prix, il est vrai, d'une certaine
paupérisation de la population. Les privatisations -y compris la
privatisation des terres agricoles- et l'adoption d'une législation
relativement adaptée aux investissements étrangers ont
achevé de faire de la république de Moldavie un
marché
non négligeable
, compte tenu de l'ampleur des besoins, et du fait de
la relative solvabilité de ce pays, liée à l'importance de
l'aide internationale attribuée par le FMI, la Banque Mondiale et par
les institutions européennes (BERD, TACIS).
La Moldavie est
aujourd'hui, avec les Etats baltes, le pays qui bénéficie, de la
part des institutions internationales, du montant d'aide par habitant le plus
élevé de toute l'ex-URSS.
Quels
secteurs
sont susceptibles d'attirer les investisseurs
étrangers vers le marché moldave ?
Le
secteur viticole
pourrait offrir d'intéressantes perspectives,
pouvant aller jusqu'à 1 à 2 % du marché européen et
0,5 % du marché américain
1(
*
)
,
grâce à un climat favorable, et grâce aux cépages
prestigieux (Sauvignon, Cabernet, Chardonnay et Chablis) importés de
France sous l'ancien régime russe. Le secteur vinicole rapporte au
budget de l'Etat moldave environ un tiers de ses recettes. C'est pourquoi la
BERD a choisi ce secteur pour y réaliser son premier projet en Moldavie,
misant sur un développement que pourrait favoriser la conquête du
marché russe.
Le
tabac
est également susceptible de constituer un atout pour le
développement moldave. Il constitue encore, à ce jour, la
deuxième source de ressources budgétaires du pays. La concurrence
américaine, désormais très importante sur le marché
russe -autrefois débouché naturel des productions moldaves-
constitue néanmoins une hypothèque à considérer.
Dans le
secteur industriel,
des perspectives existent dans les
productions liées aux activités agroalimentaires (tracteurs,
machines de récolte de fruits, matériel de froid agricole et
industriel, matériels pour conserveries...). On relève
également des activités non négligeables dans le domaine
de l'électronique de télécommunications, de
l'électroménager, de la parachimie, de la transformation des
matières plastiques, et des microconducteurs. Notons que, en Moldavie
comme dans la plupart des pays issus de l'effondrement de l'URSS, le niveau de
formation élevé de la population est un élément
à considérer par tout investisseur étranger.
Enfin, le
tourisme
pourrait connaître une certaine expansion,
susceptible d'être favorisée par l'agrément du climat et
par les parcs forestiers qui bordent les rives du Dniestr. Le tourisme,
notamment thermal, était très développé à
l'époque soviétique. Il pâtit aujourd'hui de la
quasi-absence d'infrastructures d'accueil de qualité. La Moldavie ne
compte qu'un seul hôtel de classe internationale, situé dans la
capitale. L'investissement étranger pourrait donc jouer un rôle
important dans ce secteur non dénué de perspectives.
C. DES RELATIONS BILATÉRALES À DÉVELOPPER
Le relatif dynamisme de la présence culturelle française en Moldavie contraste avec la faiblesse persistante des échanges économiques entre les deux pays.
1. La francophonie moldave
Les relations franco-moldaves tirent profit de la
proximité culturelle
qui rapproche les deux pays. La Moldavie
fait, en effet, figure d'îlot latin dans un environnement slave. La
langue moldave est, comme le roumain, une
langue latine.
Comme leurs
voisins roumains, les Moldaves sont, pour une part importante de la population,
francophones.
Quelque 60 % des élèves moldaves
étudient notre langue. La Moldavie est, avec l'Arménie, le plus
francophone des pays de l'ex-URSS. Lors du sommet d'Hanoi d'octobre 1997, la
Moldavie a adhéré à la
Francophonie,
à
laquelle elle était membre associé depuis 1995.
Cette spécificité explique que l'essentiel des opérations
de
coopération bilatérale
conduites sur la base du
traité d'entente, d'amitié et de coopération
franco-moldave signé en janvier 1993, concernent le
secteur
culturel
et, essentiellement,
linguistique
(accueil de professeurs
de français moldaves en stage en France, actions de formation de hauts
fonctionnaires moldaves à l'IIAP et à l'Institut européen
des hautes études internationales, attribution de bourses
d'études à des étudiants moldaves, présence
audiovisuelle). Depuis l'automne 1994 est présent à Chisinau un
attaché culturel et linguistique, qui occupe le poste de Directeur de
l'Alliance française, ouverte en 1992.
En 1997, le budget consacré par la France à la coopération
culturelle, scientifique et technique avec la Moldavie a
représenté 2,8 millions de francs. Certes modestes, ces moyens
n'en sont pas moins en nette augmentation par rapport aux crédits de
1993 (1,5 million de francs).
On remarque, par ailleurs, une amorce de coopération dans les secteurs
des transports, de l'électronique et de l'agroalimentaire.
2. Faiblesse des relations économiques
. Les
principaux partenaires commerciaux
de la
Moldavie
demeurent la
Russie
(38 % du commerce extérieur
moldave), la Roumanie, la Biélorussie, l'Ukraine, puis la Bulgarie et
l'Allemagne, l'Italie, la Grèce, la Belgique et les Pays-Bas.
. Le
commerce franco-moldave
représentait, en 1994, une valeur de
41 millions de francs, et de 50 millions de francs en 1996. En 1994, la
Moldavie n'était que le 163e client de la France et son 167e fournisseur.
. Le commerce bilatéaral fait une place relativement importante aux
produits agroalimentaires et pharmaceutiques
.
Les
exportations françaises
sont, à raison des deux tiers,
constituées de produits phytosanitaires (22 %), d'eaux de vie naturelles
(21 %), d'aliments diététiques et pour bébés (12,1
%), et de spécialités pharmaceutiques (10 %). D'autres postes
sont constitués par les tabacs manufacturés (5 %), et par les
produits pharmaceutiques à usage industriel (5 %).
Les importations françaises sont constituées
d'
oléagineux et de viandes fraîches
à raison de 73
%. Les seuls autres postes relativement importants sont les produits de la
chimie organique et de synthèse, les objets d'art et les collections
d'antiquités, ainsi que les huiles essentielles et arômes.
Notons que l'étroitesse du marché intérieur moldave (4,4
millions d'habitants seulement) et le faible pouvoir d'achat des consommateurs
moldaves sont pour beaucoup dans les modestes performances du commerce
bilatéral. Il semble néanmoins qu'une demande certaine existe, en
Moldavie, dans les domaines de la distribution et du stockage d'énergie,
des contrôles aériens, des télécommunications et des
biens de consommation courante.
. Les
investissements étrangers en Moldavie
sont dominés
par la Roumanie et par l'Italie. On relève également une assez
forte présence allemande, autrichienne, américaine (les
Etats-Unis ont créé un Fonds régional d'investissement
pour la Moldavie, l'Ukraine et la Biélorussie, destiné à
inciter les PME américaines à investir dans ces pays au moyen de
l'octroi de prêts privilégiés) et israélienne. En
1996, le flux d'investissements en provenance d'Europe était
estimé à 37 millions de dollars sur un total de 40 millions de
dollars. Le stock d'investissements directs étrangers
représentait, à la fin du premier semestre de 1997, 115,7
millions de dollars, soit 7,35 % du PIB moldave.
On relève une forte surreprésentation des
petites
sociétés
parmi les investissements étrangers en
Moldavie. Les
secteurs
les plus concernés par les investissements
étrangers sont l'industrie, l'hôtellerie et la restauration, les
divers services collectifs, sociaux et personnels, les finances, la
réparation et les transactions immobilières
2(
*
)
.
. Depuis 1994-1995, trois
entreprises mixtes franco-moldaves
se sont
constituées dans les secteurs des parfums et des services.
L'agroalimentaire, l'énergie et l'hôtellerie-restauration
pourraient offrir un potentiel d'investissement intéressant pour les
entreprises françaises.
La présence française récente concerne essentiellement
l'installation d'infrastructures.
France-Télécom a ainsi
obtenu en mai 1997 une licence pour le marché de la
téléphonie mobile. D'autres projets, en cours de discussion, ont
trait à la construction par Alcatel du réseau
téléphonique dans le centre du pays (25 millions de francs), et
à la rénovation, par la Générale des eaux, du
système de traitement et de distribution des eaux à Chisinau (53
millions de dollars, projet financé pour moitié par la BERD).
D. L'ACCORD FRANCO-MOLDAVE DU 8 SEPTEMBRE 1997
La présente convention ne s'écarte pas du modèle-type élaboré dans le cadre de l'OCDE, et sur lequel s'appuient les accords de protection des investissements conclus par la France. Très classiquement, l'accord franco-moldave du 8 septembre 1997 renvoie à une définition relativement large de son champ d'application, détermine un régime relativement favorable au développement des investissements, et prévoit un dispositif d'arbitrage en cas de différend.
1. Une définition non limitative du champ d'application
.
Les
investissements
concernés par
l'accord du 8 septembre 1997 (article 1-1) sont les "avoirs, tels que
biens,
droits et intérêts de toutes natures" : cette définition
comprend "notamment, mais non exclusivement", les biens meubles et
immeubles,
ainsi que tous autres droits réels (hypothèques, usufruits ...),
les actions et autres formes de participation, les droits de
propriété intellectuelle, commerciale et industrielle, et les
concessions relatives à la prospection, la culture, l'extraction ou
l'exploitation de richesses naturelles.
La seule condition posée par cette convention, comme par tous les autres
accords de même objet, est que les investissements aient
été réalisés conformément à la
législation du pays d'accueil.
.
Les
revenu
s auxquels se réfère le présent
accord (article 1-4) sont "toutes les sommes produites par un
investissement,
telles que bénéfices, redevances et intérêts".
.
Les
investisseurs
sont soit les personnes physiques
possédant la nationalité de l'une des parties contractantes, soit
les personnes morales constituées sur le territoire de l'une des
parties, conformément à la législation de celui-ci, y
possédant son siège social, ou contrôlées par des
nationaux de l'une des parties contractantes (article 1-2 et 1-3).
.
Le
champ d'application géographique
du présent
accord est très classiquement défini par les territoires et par
les zones maritimes des parties contractantes (article 1-5).
2. Un régime favorable au développement des investissements
.
Chaque partie s'engage à
admettre et
encourager les investissements de l'autre partie
(article 2), et à
assurer à ces investissements un
"traitement juste et
équitable
(...) et à faire en sorte que l'exercice du droit
ainsi reconnu à un traitement juste et équitable ne soit
entravé ni en droit ni en fait" (article 3). A cet égard, la
France et la Moldavie s'engagent à examiner avec bienveillance les
demandes d'entrée et d'autorisation de séjour, de travail et de
circulation introduites au titre d'un investissement réalisé sur
son territoire. Sont également exclues par l'article 3 les restrictions
à l'achat et au transport de matières premières, de
produits énergétiques, et de moyens de production et
d'exploitation, ainsi que toute entrave à la vente et au transport de
ces produits à l'intérieur du pays et à l'étranger.
.
Le présent accord pose le principe du
traitement de la
Nation la plus favorisée
(article 4), sans toutefois que les
avantages accordés à ce titre aux nationaux et
sociétés de l'autre partie s'étendent aux
privilèges accordés en vertu de la participation à une
zone de libre-échange, une union douanière, un marché
commun ou toute autre forme d'organisation économique régionale.
.
La
liberté des transferts
effectués du fait d'un
investissement (intérêts, bénéfices, dividendes,
redevances, remboursements d'emprunts, indemnités de dépossession
...) est prévue par l'article 6. Celui-ci invite également les
parties à autoriser les nationaux de l'autre partie à
transférer dans leur pays d'origine une "quotité
appropriée de leur rémunération".
.
L'article 9 permet, par ailleurs, qu'un investissement soit
régi par des
engagements spécifiques
de la part de son
pays d'accueil, dans la mesure où cet engagement prévoit des
dispositions plus favorables que le présent accord.
3. Protection contre les risques politiques
L'accord du 8 septembre 1997 protège les investisseurs
contre les difficultés susceptibles de résulter des risques
politiques, c'est-à-dire de mesures de dépossession (par
nationalisation ou expropriation), d'un conflit armé, révolution,
révolte ou état d'urgence national.
.
L'article 5 assure aux investissements de l'autre partie "une
protection et une sécurité pleines et entières". Une
mesure d'expropriation ou de nationalisation doit donc être
motivée par une cause d'utilité publique, et donner lieu au
"paiement d'une indemnité prompte et adéquate" dont le montant
est "évalué par rapport à une situation économique
normale et antérieure à toute menace de dépossession".
Cette indemnité est librement transférable et doit être
versée sans retard.
.
De manière générale, les investisseurs ayant subi
des pertes dues à des événements tels que guerre, conflit
armé, révolution, état d'urgence national ou
révolte bénéficient de la part de la partie sur le
territoire de laquelle sont survenus ces événements, d'un
traitement non moins favorable que celui accordé aux nationaux de cette
partie.
4. Un mode de règlement des différends impliquant le recours à l'arbitrage international
Le présent accord prévoit deux cas distincts de règlement des différends, selon que le litige oppose un investisseur à un Etat, ou les deux Etats entre eux.
a) Différend opposant un investisseur à un Etat
L'article 7 renvoie, en cas de litige entre un investisseur
et
l'Etat sur le territoire duquel est effectué l'investissement en
question, le recours à l'arbitrage du CIRDI (Centre international pour
le règlement des différends relatifs aux investissements), en cas
d'échec de la tentative de règlement à l'amiable
envisagée en priorité par le présent accord.
Rappelons que le CIRDI, instauré par la convention de Washington du 18
mars 1965, comporte à ce jour 120 Etats-membres, parmi lesquels la
Moldavie. Celle-ci a adhéré à la convention
précitée en août 1992.
Le CIRDI connaît environ cinq affaires par an. Un seul investisseur
français (en l'occurrence la Générale des Eaux) a
demandé l'intervention du CIRDI, dans un litige l'opposant à
l'Argentine.
Les décisions du CIRDI sont obligatoires et définitives. La
clause relative à l'intervention du CIRDI n'empêche
néanmoins pas les investisseurs de recourir aux tribunaux internes.
b) Litige opposant les deux Etats
L'article 10 invite les parties à régler par
voie diplomatique les différends susceptibles de les opposer quant
à l'interprétation ou à l'application du présent
accord.
Si ce litige n'est pas réglé dans un délai de six mois, il
est soumis à un tribunal d'arbitrage comportant trois membres, dont un
représentant d'un Etat tiers nommé d'un commun accord par les
deux parties. Le secrétaire général des Nations unies peut
être appelé à intervenir en cas d'échec du tribunal
arbitral.
Cette clause, très classique, n'appelle pas de commentaire particulier.
CONCLUSION DU RAPPORTEUR
Votre rapporteur ne saurait que se prononcer favorablement à l'adoption d'un projet de loi qui tend à autoriser l'approbation d'un accord susceptible, non seulement de conforter la place de la France sur un marché non dénué de perspectives, mais aussi de contribuer à la difficile transition d'un de nos nouveaux partenaires issus de l'effondrement de l'URSS.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission des affaires étrangères, de la
défense et des forces armées a examiné le présent
projet de loi au cours de sa réunion du 4 mars 1998.
A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Christian de La Malène a
évoqué avec M. André Boyer la vocation européenne
de ce pays, membre du Conseil de l'Europe depuis 1994, qui, tout en se
considérant comme latin, a néanmoins, pour des raisons
diplomatiques et économiques, adhéré à la
Communauté des Etats indépendants (CEI).
Puis la commission, suivant l'avis de son rapporteur, a approuvé le
projet de loi qui lui était soumis.
PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Moldavie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, signé à Paris le 8 septembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi 3( * ) .
ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT 4(
*
)
-
Etat de droit et situation de fait existants et leurs
insuffisances
: sans objet.
- Bénéfices escomptés en termes :
* d'emploi : impossible à quantifier ;
* d'intérêt général : enrichissement de nos
relations diplomatiques ;
* financier : permettra au Gouvernement d'accorder la garantie de la Coface
pour les investisseurs français, conformément à la loi de
finances rectificative pour 1971 ;
* de simplification des formalités administrative : aucune ;
* de complexité de l'ordonnancement juridique : sans objet.
1 Selon Marie-Agnès Crosnier, Le courrier des pays de l'Est, n° 397-398, mars-avril 1995.
2
Moldavie,
coll. "Un marché",
Editions
du CFCE.
3
Voir le texte annexé au document Sénat n° 230
(1997-1998)
4
Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des
parlementaires.