N° 90
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME I
INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION :
DÉCENTRALISATION
Par M. André BOHL,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jacques Larché,
président
;
René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles
Jolibois, Robert Pagès, Georges Othily,
vice-présidents
;
Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson,
secrétaires
; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert
Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl,
Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel
Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli,
Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Jean Derian, Michel
Dreyfus-Schmidt, Michel Duffour, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault,
Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel
Millaud, Jean-Claude Peyronnet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre
Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
et
85
(annexe n°
30
)
(1997-1998).
Lois de finances.
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Réunie le mercredi 19 novembre 1997, sous la
présidence de M. Jacques Larché, président, la
commission des Lois a procédé, sur l'avis de M. André
Bohl, à l'examen des crédits consacrés à
l'administration territoriale et à la décentralisation dans le
projet de loi de finances pour 1998.
Après avoir entendu M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de
l'intérieur, et M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation,
ainsi que l'avis de M. André Bohl, la commission a
décidé de donner un avis favorable à l'adoption de ces
crédits sous le bénéfice des observations suivantes :
1/ La réflexion sur les suites à réserver au pacte de
stabilité après 1998, dernière année de son
application, devra, d'une part, concerner l'extension de cette notion aux
charges des collectivités locales et, d'autre part, mieux prendre
en compte le rôle économique des collectivités locales qui
réalisent les trois quarts des investissements publics, ce que ne permet
pas actuellement l'indexation de l'enveloppe du pacte de stabilité
sur la seule évolution des prix (hors tabac) ;
2/ les normes de sécurité, toujours plus nombreuses et les
délais de leur mise en oeuvre doivent être adaptés au
contexte économique et budgétaire qui entraîne une
contraction des ressources locales ;
3/ compte tenu de la situation de la CNRACL, une réflexion est
indispensable sur les mécanismes de compensation
généralisée et de surcompensation entre régimes
sociaux ;
4/ Le processus de déconcentration administrative doit être
poursuivi ;
5/ la codification des textes applicables aux collectivités locales doit
être complétée par l'achèvement de la partie
réglementaire du code général des collectivités
territoriales et s'accompagner d'une plus grande stabilité des
règles législatives qui concernent ces collectivités ;
6/ la mise en place d'emplois " publics ou parapublics ",
en marge
des règles ordinaires de la fonction publique territoriale, aura pour
effet de recréer une précarité que le législateur a
entendu combattre par la loi du 16 décembre 1996 et posera à
terme la question de l'intégration des intéressés dans la
fonction publique territoriale.
Mesdames, Messieurs,
Les concours de l'Etat aux collectivités locales évolueront en
1998 dans le cadre des règles du " pacte de stabilité "
qui, défini par l'article 32 de la loi de finances pour 1996, aura ainsi
régi les relations financières entre l'Etat et les
collectivités locales pendant trois ans.
Les concours de l'Etat -qui connaîtront une progression très
limitée (+ 0,25 %)- s'élèveront à 250,586 milliards
de francs. La fiscalité transférée progressera pour sa
part de 4,2 % pour atteindre 44,071 milliards de francs.
S'il convient de relever le souci du nouveau Gouvernement de ne pas remettre en
cause des règles d'évolution des concours financiers de l'Etat,
définies en 1996 pour une période de trois ans, force est
néanmoins de constater cette année encore que les budgets locaux
restent confrontés à un grand nombre d'incertitudes.
Dans un tel contexte -caractérisé à la fois par une
progression limitée des concours de l'Etat et par les incertitudes
affectant la préparation des budgets- les marges de manoeuvre des
collectivités locales demeurent réduites. Cette dernière
année d'application du " pacte de stabilité " conduit
donc votre commission des Lois à faire de nouveau valoir que la notion
de " stabilité " ne saurait s'appliquer à la seule
évolution des concours de l'Etat mais devraient également
concerner les charges imposées aux collectivités locales.
Enfin, ce contexte justifie que l'on prête la plus grande attention aux
perspectives d'élaboration et de mise en oeuvre des réformes
-notamment celle de la coopération intercommunale ou encore la
révision des évaluations cadastrales- essentielles pour nos
collectivités.
I. L'ADMINISTRATION TERRITORIALE : LA NÉCESSAIRE MODERNISATION DES ADMINISTRATIONS DE L'ÉTAT
Les crédits consacrés à l'administration
territoriale s'élèvent à
6,16 milliards de
francs
, soit une baisse de 2,7 %.
Les
dépenses de fonctionnement et d'entretien
des
préfectures diminuent de 59,7 millions de francs
(- 3,4 %). Néanmoins, ce chapitre fait l'objet d'une
économie de 220 millions de francs qui étaient
destinés à compenser le coût de la suppression de la
franchise postale sur le courrier inter-administratif et qui se sont
révélés supérieurs aux besoins. Les
dépenses d'équipement immobilier
régressent pour leur
part de 115 millions de francs.
On rappellera que les dépenses de personnel représentent les deux
tiers des crédits de l'administration territoriale, lesquels
-déconcentrés dans leur quasi-totalité- regroupent
l'ensemble des moyens de fonctionnement et d'investissement consacrés
aux préfectures, sous-préfectures, secrétariats
généraux pour les affaires régionales (SGAR),
états-majors de zones de sécurité civile (EMZ) et
secrétariats généraux de zone de défense (SGZD).
Le présent avis présentera le bilan des actions menées en
faveur des préfectures ainsi que les perspectives en matière de
déconcentration, question essentielle non seulement pour le bon
fonctionnement de l'Etat mais aussi pour le bon déroulement de la
décentralisation.
A. LES ACTIONS MENÉES EN FAVEUR DES PRÉFECTURES
Un plan de modernisation des préfectures a
été mis en oeuvre sur la période 1990-1995. Il se fondait
sur l'idée directrice -qu'on ne peut qu'approuver- que les
préfectures doivent constituer le pivot de l'administration territoriale
dans un Etat déconcentré.
Pour accompagner ce plan, un fonds de modernisation a été
créé en 1990 au sein du chapitre 37-10 " administration
préfectorale - dépenses diverses ". Les crédits
ouverts à ce titre ont été inégaux selon les
années et ont même été sérieusement
réduits entre 1990 (17,6 millions de francs) et 1992
(2 millions de francs, après 9,2 millions de francs en 1991).
Le fonds de modernisation a été mieux doté à partir
de 1993 (10,2 millions de francs en 1993 ; 8,7 millions de
francs en 1994 ; 10 millions de francs en 1995).
Les différentes actions entreprises dans ce cadre ont tendu à
moderniser les services notamment grâce à l'informatique (courrier
électronique, cartes nationales d'identité et passeports, travaux
de sécurité), à améliorer la qualité du
service rendu aux usagers (signalisation, accueil) ou encore à
développer les actions de formation des personnels.
Parallèlement à cette politique de modernisation conduite
à partir des crédits de fonctionnement, le ministère de
l'intérieur a engagé au cours de cette période un
programme d'investissement immobilier qui a consacré 228 millions
de francs aux " désimbrications " des préfectures avec
les conseils généraux. Au total,
13
désimbrications ont été
réalisées sur les 24 programmées.
La rénovation des halls d'accueil a, sur la même période,
mobilisé 498 millions de francs. Un plan de raccordement des
sous-préfectures aux grandes applications informatiques nationales
permettant d'améliorer le service rendu aux usagers, a été
mis en oeuvre dans le même temps.
A compter de 1996
, les actions prévues dans le cadre de la
réforme de l'Etat, ont permis de relayer le plan de modernisation des
préfectures. Parmi les actions développées dans ce cadre,
on relève en particulier les expérimentations pour le paiement
par cartes bancaires dans certaines préfectures ou
sous-préfectures et pour la délivrance de passeports en une heure
dans certains départements.
En 1997, 4,9 millions de francs ont été
délégués aux préfectures afin de poursuivre les
efforts engagés en 1996.
Devant votre commission des Lois, M. Jean-Pierre Chevènement, ministre
de l'intérieur, a fait part de son attachement aux missions essentielles
des préfectures et des sous-préfectures, qu'il a
qualifiées de "
colonne vertébrale de l'Etat sur le
territoire
".
Il a ajouté que l'année 1998 serait marquée par la mise en
oeuvre de missions nouvelles telles que la mise en place du programme
emplois-jeunes, la nouvelle législation sur les étrangers, le
renforcement du contrôle de légalité ou encore la
réforme de l'Etat. Aussi le ministre a-t-il précisé que
les effectifs des préfectures seraient préservés en 1998.
Par ailleurs, il a indiqué que le projet de budget dégageait les
moyens nécessaires pour rendre plus équitable le régime
indemnitaire des personnels en harmonisant les indemnités et en prenant
mieux en compte les qualifications et les sujétions de certains postes.