AVIS N° 89 TOME 6 - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998, ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - ANCIENS COMBATTANTS
Marcel LESBROS, Sénateur
COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES - AVIS N° 89 TOME 6 - 1997/1998
Table des matières
- TRAVAUX DE LA COMMISSION
-
INTRODUCTION
- I. LE PROJET DE BUDGET POUR 1998 PRÉSERVE GLOBALEMENT LES MOYENS D'ACTION POUR ASSURER LE RESPECT DES DROITS ÉLÉMENTAIRES DES ANCIENS COMBATTANTS
- II. L'ABSENCE DE MESURES NOUVELLES SIGNIFICATIVES CONFIRME QUE LA SATISFACTION DES DEMANDES DU MONDE COMBATTANT NE CONSTITUE PAS UNE VÉRITABLE PRIORITÉ
-
ANNEXE N° 1
Evolution des grandes masses -
ANNEXE N° 2
Evolution des principales dotations du budget des anciens combattants pour 1998 - ANNEXE N° 3
N° 89
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME VI
ANCIENS COMBATTANTS
Par M. Marcel LESBROS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jean-Pierre Fourcade,
président
; Jacques Bimbenet, Mme
Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Bernard Seillier,
Louis Souvet,
vice-présidents
; Jean Chérioux, Charles
Descours, Roland Huguet, Jacques Machet,
secrétaires
;
François Autain, Henri Belcour, Paul Blanc, Mmes Annick
Bocandé, Nicole Borvo, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis
Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Mme Dinah Derycke, M.
Jacques Dominati, Mme Joëlle Dusseau, MM. Alfred Foy, Serge Franchis,
Alain Gournac, André Jourdain, Jean-Pierre Lafond, Pierre Lagourgue,
Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain
,
Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marquès,
Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin,
MM. Sosefo Makapé Papilio, André Pourny, Mme Gisèle
Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau,
Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
et
85
(annexe n°
6
)
(1997-1998).
Lois de finances.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DU MINISTRE
Le
mardi 14 octobre 1997
, sous la
présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président
, la
commission a procédé à
l'audition
de
M.
Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants,
sur
les
crédits de son département ministériel pour
1998
.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens
combattants
, a rappelé que le montant des crédits
alloués à son ministère pour 1998 s'établirait
à près de 26 milliards de francs, soit une diminution de
3,5 % par rapport aux crédits pour 1997. Il a tenu à
replacer ces chiffres dans leur contexte pour leur donner toute leur
signification. Pour cela, il a rappelé que le nombre des anciens
combattants continuait de baisser, réduisant à concurrence le
montant des pensions à verser ; le ministre a également
souligné que le Gouvernement avait fait de l'emploi des jeunes sa
priorité, limitant les mesures nouvelles dans les autres
ministères.
M. Jean-Pierre Masseret
a considéré que les missions
essentielles de son administration étaient assurées. Concernant
le droit à réparation, il a rappelé que tous les droits
existants seraient honorés. Evoquant le nécessaire effort de
solidarité, il est revenu sur l'allocation différentielle et
l'allocation de préparation à la retraite en précisant
qu'une condition de ressources serait établie qui devrait concerner les
foyers qui disposent d'un revenu supérieur à 25.000 francs.
Le ministre a également insisté sur le coût que
représentaient les remboursements de cotisations de
sécurité sociale et de réductions de tarifs de transport.
Evoquant la politique de la mémoire, il a considéré que la
baisse des crédits de trois millions de francs devait être
appréciée au regard du fait que le coût de la
commémoration du 80ème anniversaire du 11 novembre 1918 ne
serait pas imputé sur les crédits du ministère.
Abordant la question du fonctionnement des structures du secrétariat
d'Etat, il a fait observer que la suppression de 87 emplois ne devrait pas
porter atteinte à l'organisation des services.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens
combattants,
a précisé qu'au titre des mesures nouvelles, les
étrangers déportés depuis la France entre 1940 et 1945 et
ayant acquis depuis la nationalité française seraient
indemnisés.
Il a également annoncé l'alignement sur le droit commun des dates
de remboursement par l'Etat de la majoration des rentes constituées par
les anciens combattants en soulignant que cette mesure n'affecterait pas les
intéressés.
M. Jean-Pierre Masseret
a conclu son propos liminaire en
considérant que la baisse des crédits de son secrétariat
d'Etat ne menaçait pas le droit à réparation et les
mesures de solidarité.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis,
a considéré que
le budget était l'élément essentiel de la politique en
faveur des anciens combattants et a souhaité, à cet égard,
évoquer quelques mesures nouvelles répondant à leurs
préoccupations.
Le rapporteur pour avis s'est ainsi interrogé sur la possibilité
d'accorder une retraite anticipée aux anciens combattants d'Afrique du
Nord chômeurs en fin de droit ayant cotisé plus de 40 ans. Il a
souhaité que toute forclusion soit levée concernant les demandes
des membres de la Résistance pour obtenir le titre de combattant
volontaire de la Résistance.
Il a demandé à ce que le secrétaire d'Etat intervienne
pour que les représentants de l'Etat cessent de faire quasi
systématiquement appel des décisions favorables aux
requérants devant les tribunaux des pensions.
Le rapporteur pour avis a souligné les difficultés que pouvait
poser le passage obligé par l'allocation différentielle pour
l'accès à l'allocation de préparation à la retraite
et a fait remarquer que ce mécanisme qui maintenait certains anciens
combattants dans une situation de pauvreté pourrait être
réexaminé.
Il a souhaité enfin une relance de la politique de la mémoire
à travers, notamment, des actions spécifiques à
l'attention des jeunes.
En réponse aux différentes questions de M. Marcel Lesbros,
rapporteur pour avis
,
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire
d'Etat aux anciens combattants,
a rappelé que les droits existants
des anciens combattants seraient honorés.
Le ministre a considéré, en revanche, que le coût de la
retraite anticipée pour les anciens combattants d'Afrique du Nord
était hors de portée des crédits de son ministère,
mais il a déclaré qu'une avancée pour les chômeurs
bénéficiant du Fonds de solidarité était possible.
En réponse à une question de
M. Jean-Pierre Fourcade,
président,
le ministre a chiffré le coût de cette
dernière disposition à 35 millions de francs pour une
retraite de base en rappelant qu'elle ne figurait pas encore au nombre des
dispositions nouvelles prévues dans le budget pour 1998.
Le ministre a estimé le coût d'une extension de deux ans de la
période de référence pour l'obtention du titre de
Reconnaissance de la Nation pour les anciens combattants d'Algérie
à 200 millions de francs en considérant les droits
attachés relatifs à la rente mutualiste.
Concernant le passage préalable par l'allocation différentielle
pour pouvoir bénéficier de l'allocation de préparation
à la retraite, le ministre a déclaré avoir demandé
à son inspection générale d'étudier les moyens de
sa suppression. Il a rappelé que l'ensemble du dispositif allocation
différentielle et allocation de préparation à la retraite
concernait 33.500 personnes pour un total de 1,5 milliard de francs.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens
combattants
, a déclaré qu'il examinerait attentivement la
question des appels des décisions des tribunaux des pensions.
Concernant la forclusion, le ministre a rappelé qu'elle avait
été juridiquement levée, mais qu'il subsistait des
conditions strictes. Il a souhaité que les préfets
procèdent à des enquêtes complémentaires chaque fois
que cela serait nécessaire sans exclure une modification à terme
du décret correspondant.
Le ministre a souhaité préciser ses prochaines priorités
concernant les demandes des anciens combattants. Il a cité des mesures
en faveur des chômeurs de longue durée, une prise en compte de la
notion de risque pour l'attribution de la carte du combattant aux anciens
combattants d'Afrique du Nord ainsi qu'une modification du mécanisme de
la rente mutualiste.
En réponse à une question de
M. Guy Fischer
qui
considérait le projet de budget comme inacceptable en l'état,
M. Jean-Pierre Masseret
a répondu que des mesures
complémentaires étaient envisagées, notamment dans le
domaine de la solidarité. Il a également annoncé la mise
en place d'un nouveau groupe de travail sur le rapport constant, la
participation des veuves aux instances de direction de l' Office national des
anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), ainsi qu'une réflexion
sur l'octroi de la carte du combattant.
Evoquant ce qu'il a appelé la " guerre d'Algérie ", le
ministre a tenu à souligner que tout homme appelé ou
engagé méritait respect et reconnaissance.
En réponse à une question de
Mme Gisèle Printz
sur
les harkis, le ministre a rappelé qu'il existait une
délégation générale aux rapatriés ne
dépendant pas de son ministère. Evoquant plus
particulièrement les problèmes rencontrés par les harkis
et les actions revendicatives en cours, il a rappelé que l'ONAC avait
participé à la formation de 300 jeunes harkis en 1997. Il a
également souligné, plus généralement, que les
harkis avaient des droits qui leur avaient été reconnus notamment
dans le cadre du code des pensions.
Toujours en réponse à
Mme Gisèle Printz
,
M.
Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants,
a
déclaré avoir bien noté que le changement de la couleur de
la carte du combattant pouvait poser un problème du fait d'une
circulation non satisfaisante de l'information entre les administrations.
En réponse à une question de
M. Louis Boyer
, le ministre a
confirmé que l'indemnisation dont bénéficieraient les
étrangers déportés pendant la seconde guerre mondiale ne
recouvrait pas le service du travail obligatoire (STO). Il a
déclaré que cette mesure nouvelle concernerait une centaine de
personnes pour un coût estimé à 10 millions de francs.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens
combattants,
a également déclaré qu'il
réfléchissait à l'évolution des structures du
ministère en rappelant qu'il n'était pas question de remettre en
cause le principe de son existence. Il a annoncé une réflexion
sur la question des tarifs de titres de transport de la société
nationale des chemins de fer (SNCF) ainsi que sur la
" décristallisation " de certaines pensions. Il a fait part
également de son souci de développer la politique en faveur de la
mémoire.
En réponse à
M. Jean-Pierre Fourcade, président
,
le ministre a fait observer que l'octroi de la carte du combattant aux
200.000 titulaires du titre de Reconnaissance de la Nation coûterait
400 millions de francs. Il a considéré que cette mesure
n'était pas pour l'instant envisageable.
II. EXAMEN DE L'AVIS
Le
mardi 28 octobre 1997
, sous la
présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président
, la
commission a procédé à
l'examen du rapport de
M. Marcel Lesbros
sur le
projet de loi de finances pour 1998
(
anciens combattants
).
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis,
a déclaré
que le projet de budget s'inscrivait dans un contexte économique
difficile marqué par des économies budgétaires et par la
poursuite d'une baisse structurelle du nombre des anciens combattants qui
diminuait d'autant le montant des prestations servies.
Le rapporteur pour avis a rappelé que l'objectif du budget
général était de limiter les déficits publics
à 3 % du produit intérieur brut (PIB) et qu'à cette
fin, les dépenses du budget général n'augmenteraient que
de 1,36 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997, soit
un rythme comparable à l'évolution prévisionnelle des prix.
Le rapporteur pour avis a rappelé que les crédits affectés
au secrétariat d'Etat aux anciens combattants et victimes de guerre
s'élevaient à 25,952 milliards de francs, ce qui
représentait une baisse de 3,5 % par rapport à la loi de
finances initiale pour 1997.
Il a considéré que cette baisse signifiait que les crédits
rendus disponibles par une réduction du nombre des pensionnés
n'étaient pas réaffectés pour l'essentiel au sein du
ministère, mais au profit des priorités du nouveau Gouvernement.
Le rapporteur pour avis a fait observer que ce budget se caractérisait
par une absence de mesures nouvelles importantes accompagnée, pour
l'essentiel, du maintien des droits et des structures.
Concernant les mesures nouvelles adoptées par le Gouvernement, le
rapporteur a distingué les dispositions inscrites dans le projet de loi
de finances déposé par le Gouvernement à
l'Assemblée nationale des dispositions qui ont été
adoptées à l'Assemblée avec l'accord du Gouvernement, que
ce soit en commission ou en séance publique.
Il a rappelé que le projet de loi de finances, déposé sur
le bureau de l'Assemblée nationale, comprenait trois dispositions
nouvelles : l'article 62 qui permet l'indemnisation des étrangers
déportés depuis la France et ayant acquis depuis lors la
nationalité française, l'alignement sur le droit commun des dates
de remboursement par l'Etat de la majoration des rentes constituées par
les anciens combattants et la prise en compte pour l'attribution de
l'allocation différentielle du Fonds de solidarité des revenus du
foyer qui devrait exclure les ménages qui perçoivent un revenu
imposable mensuel supérieur à 18.255 francs.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis
, a considéré
que ces trois mesures étaient de nature différente : la
première devant concerner environ 150 déportés et
leurs ayants cause pour 11,6 millions de francs, la deuxième ne
devant pas toucher les anciens combattants et la troisième supprimant le
bénéfice de l'allocation différentielle pour
310 personnes, soit 1% des effectifs actuels, pour une économie de
9 millions de francs.
Le rapporteur pour avis a souligné que les députés de la
commission des affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale avaient considéré que ce budget
était " inacceptable en l'état " et qu'ils avaient
réclamé de nombreuses mesures que la commission des affaires
sociales du Sénat défendait également ; il a cité
la suppression de l'obligation de passage par l'allocation
différentielle pour entrer en allocation de préparation à
la retraite (APR), la prise en compte pour l'attribution du titre de
reconnaissance de la Nation des périodes passées en
Algérie après 1962, la relance de la politique de la
mémoire, un effort sur les conditions d'attribution de la carte du
combattant et des mesures concernant la retraite anticipée pour les
anciens d'Algérie.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis
, a déclaré
que, pour tenir compte des réserves exprimées par les
députés, le secrétaire d'Etat avait obtenu du Gouvernement
l'inscription de 40 millions de francs de crédits
supplémentaires en faveur des anciens combattants lors de la discussion
de la première partie de la loi de finances. Il a fait remarquer que
cette augmentation n'était en rien considérable puisqu'elle ne
représentait qu'une hausse de 0,15 % des crédits du
département ministériel. Il a fait observer que ces
crédits étaient destinés à l'origine à
financer quatre dispositions : la fixation du plafond de la retraite mutualiste
en points d'indice de pension militaire d'invalidité, à hauteur
de 95 points, soit un montant de 7.488 francs pour le plafond
majorable en 1988 contre 7.091 francs en 1997 ; la remise à niveau
des crédits de mémoire ; l'élargissement des conditions
d'attribution de la carte du combattant en Afrique du Nord avec la prise en
compte du critère de la durée de séjour d'au moins
dix-huit mois ; et l'amélioration de l'action sociale de l'Office
national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) au profit des
anciens d'Afrique du Nord dans l'attente d'une possible avancée en
matière de retraite anticipée.
Le rapporteur pour avis a déclaré qu'il considérait, comme
les députés de la commission des affaires culturelles, familiales
et sociales, que ces mesures étaient insuffisantes dans leur montant par
rapport aux 745 millions de francs économisés du fait de la
diminution du nombre de pensionnés et, dans leur objet, au regard de
l'attente de l'ensemble des parlementaires quant à l'annonce d'une
mesure de véritable retraite professionnelle pour les anciens d'Afrique
du Nord.
Il a rappelé que la commission des affaires culturelles, familiales et
sociales de l'Assemblée nationale avait décidé de donner
un avis favorable au projet de budget sous réserve de l'adoption de
trois amendements au projet de loi de finances : le premier fixant à
95 points d'indice le montant du plafond majorable de la retraite
mutualiste et prévoyant la revalorisation de ce plafond en fonction de
la valeur du point d'indice ; le deuxième ouvrant droit à la
retraite anticipée pour les anciens combattants en Afrique du Nord
chômeurs en fin de droits pouvant justifier d'une durée de
cotisation de quarante annuités à l'assurance vieillesse
diminuée du temps passé en Afrique du Nord ; le troisième
ouvrant l'attribution de la carte de combattant aux anciens d'Afrique du Nord
justifiant d'une durée de service d'au moins douze mois en Afrique du
Nord.
Le rapporteur pour avis a rappelé que le Gouvernement, lors du
débat en séance publique, avait estimé avoir tenu compte
des amendements adoptés par la commission des affaires culturelles,
familiales et sociales de l'Assemblée nationale en modifiant la
ventilation des 40 millions de francs supplémentaires inscrits
à l'issue de la discussion de la première partie du budget ;
il a souligné que la prise en compte des voeux de la commission avait eu
pour conséquence la suppression des crédits
supplémentaires qui devaient être attribués à la
politique de la mémoire et à l'action sociale de l'ONAC.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis,
a déclaré
que le Gouvernement avait repris le premier amendement de la commission et que
pour le deuxième, il avait adopté le principe de
l'équivalence entre une opération de feu et une condition de
présence égale à dix-huit mois dans les conditions
d'obtention de la carte du combattant.
Le rapporteur pour avis a annoncé, concernant la retraite
anticipée des anciens combattants d'Afrique du Nord, que
M. Jean-Pierre Masseret avait présenté une mesure visant
à assurer la garantie d'un revenu équivalent à une
retraite anticipée, soit 5.600 francs par mois pour les
chômeurs qui pouvaient justifier de 160 trimestres de cotisations
à l'assurance vieillesse, y compris le temps passé en Afrique du
Nord. Il a précisé que cette disposition prendrait la forme d'un
relèvement de l'allocation différentielle à due
concurrence à partir du 1
er
janvier 1998 pour les
anciens combattants concernés, et que 12 à 15.000 personnes
pouvaient être intéressées.
Le rapporteur pour avis a considéré qu'il s'agissait d'un pas en
avant qui ne réglait toutefois pas la question puisque la disposition
s'apparentait plus à une mesure d'assistance que de réparation.
Pour conclure sur cet ensemble de mesures nouvelles, le rapporteur pour avis a
fait observer que 25 millions de francs iraient au chapitre 46-10 afin de
porter à 5.600 francs l'allocation différentielle, que
10 millions de francs iraient au chapitre 46-21 pour tenir compte de
l'augmentation du nombre de titulaires de la carte du combattant et que
5 millions de francs seraient destinés au chapitre 47-22 pour
financer le relèvement du plafond ouvrant droit à majoration des
rentes mutualistes.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis,
a tenu
à préciser que la réserve parlementaire avait
été sollicitée à hauteur de 25 millions de
francs pour augmenter la disposition relative au relèvement de
l'allocation différentielle sans que ce financement
complémentaire puisse garantir tout à fait le bouclage de la
mesure que le ministère ne pouvait chiffrer tout à fait. Le
rapporteur pour avis a considéré que le recours à la
réserve parlementaire ne devait pas servir à financer des mesures
structurelles en appoint ou en remplacement du budget général.
Le rapporteur pour avis s'est alors interrogé sur la façon
d'apprécier ce budget et sur les mesures complémentaires
adoptées par l'Assemblée nationale, au regard notamment des
revendications du monde combattant, telles qu'elles sont exprimées par
le Front uni.
Il a considéré que la revalorisation de la retraite mutualiste du
combattant ne pouvait constituer que l'amorce d'un rattrapage qui devrait
être confirmé à l'avenir. Le critère des
18 mois de présence en Afrique du Nord pour l'obtention de la carte
du combattant lui est apparu comme une avancée positive notamment vers
la notion de risque, bien qu'il ait considéré qu'elle ne
réglait pas la question, nombre d'anciens combattants étant
restés légèrement moins de 18 mois.
La disposition en faveur des chômeurs ayant cotisé
160 trimestres lui a semblé être un premier pas mais,
là aussi , il a considéré qu'elle était
insuffisante au regard de l'enjeu.
Le rapporteur pour avis a déclaré qu'il ne pouvait se satisfaire
du fait que la hausse des crédits affectés à la politique
de la mémoire ait été purement et simplement
annulée. De même, il a fait observer que les crédits
relatifs à l'action sociale de l'ONAC ne seraient pas abondés,
comme cela avait été prévu dans la première
ventilation des 40 millions de francs de crédits
supplémentaires, et que les conseils généraux devraient
à nouveau aider les offices départementaux des anciens
combattants et victimes de guerre (ODAC).
Le rapporteur pour avis a considéré, dans ces conditions, que le
projet de budget qui était présenté apparaissait comme une
étape bien plus que comme un règlement du contentieux qui oppose
le monde combattant au Gouvernement.
Il a déclaré qu'il serait très vigilant à ce que
des progrès substantiels soient réalisés au cours de
l'année, au regard notamment des 40 engagements pour 1998 que le
secrétaire d'Etat venait de prendre. Il a considéré qu'une
multitude de petites progrès lui semblaient possibles, notamment
à l'intention des Alsaciens et Mosellans enrôlés de force
dans les troupes allemandes, des résistants qui n'avaient toujours pas
obtenu reconnaissance, des recours devant les tribunaux de pension
exercés par les représentants de l'Etat ou de la situation des
veuves qui demandait à être réexaminée.
Il a fait observer qu'il restait à poursuivre l'évolution des
structures, des coopérations avec le ministère de la
défense, auquel le secrétariat d'Etat était
désormais rattaché, lui ont semblé possibles et
souhaitables, notamment en matière de mémoire. Il a
insisté pour que l'Institut national des invalides soit
pérennisé dans ses moyens humains, qu'il a
considéré comme menacés par la disparition du service
national, et pour que les structures de l'ONAC soient adaptées pour
satisfaire au mieux les anciens combattants.
Le rapporteur pour avis a fait observer que ce budget permettait donc quelques
améliorations de la situation des anciens combattants qui
n'étaient toutefois pas exemptes de toute ambiguïté,
l'avancée sur la retraite anticipée lui semblant tenir plus d'une
mesure d'assistance que de reconnaissance.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis,
a considéré
qu'à titre personnel, il s'était interrogé sur la
possibilité de donner un avis favorable à ce budget, assorti
toutefois de sévères critiques, mais qu'il préconisait la
sagesse et en appelait à l'opinion de ses collègues pour
déterminer la position de la commission.
M. André Jourdain
s'est alors interrogé sur les
progrès qui avaient été réalisés dans les
budgets pour 1996 et 1997. Le rapporteur pour avis lui a répondu qu'un
effort important avait été réalisé concernant la
solidarité.
M. Jean Madelain
a considéré que le rapporteur pour avis
avait bien mis en avant le caractère limité des avancées
qui avait été obtenu par l'Assemblée nationale et qu'il
n'était pas possible de s'en satisfaire. Il a souhaité que la
commission se range derrière les critiques formulées par son
rapporteur et prononce un avis défavorable.
M. Guy Fischer
a rappelé que son groupe avait souhaité des
mesures marquantes et que la baisse des crédits du ministère
était contradictoire avec cet objectif. Il a annoncé que son
groupe s'abstiendrait.
Mme Gisèle Printz
a souhaité qu'un effort soit fait
concernant le taux de réversion des pensions aux veuves.
M. Jean-Pierre Fourcade, président,
s'est prononcé pour
l'adoption d'un avis défavorable.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis,
rappelant les critiques qu'il
avait lui-même formulées à l'encontre du projet de budget,
a indiqué qu'il se ralliait à l'avis négatif qui semblait
se dégager des interventions de ses collègues.
A l'issue de ce débat, la commission a décidé
d'émettre
un avis défavorable à l'adoption du projet de
budget pour 1998 du secrétariat d'Etat aux anciens combattants
.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le projet de budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants est
paradoxal à trois égards. Alors que la conjoncture
économique s'améliore nettement et que des marges de manoeuvre
budgétaires semblent se dégager, il voit ses crédits
baisser fortement. Alors que la structure démographique du monde
combattant ouvre des possibilités de réaffectations de
crédits, le Gouvernement se limite à quelques mesures
symboliques. Alors que la nouvelle majorité s'était
engagée sur des dispositions précises, comme une véritable
retraite anticipée pour les combattants d'Afrique du Nord, l'examen du
budget à l'Assemblée nationale a mis en évidence un
constat de désaccord des différentes composantes de la
majorité, escamoté par des concessions de portée
limitée de dernière minute.
Pourtant, après ce constat, riche en désillusions pour les
associations représentant le monde combattant, il faut observer que le
secrétaire d'Etat, M. Jean-Pierre Masseret, a souhaité
prendre date à l'occasion de l'examen de ce premier budget en faisant
part de ses quarante engagements pour 1998
(voir annexe 3).
Certains de
ces engagements constituent de simples déclarations d'intention
notamment sur des points importants comme la retraite anticipée pour les
anciens combattants d'Afrique du Nord, mais cette liste constituera sans nul
doute un outil fort utile pour apprécier, à l'avenir, les
résultats de la politique en faveur des anciens combattants que
mène le Gouvernement.
Dans le projet de budget pour 1998, les dépenses du budget
général augmentent de 1,36 % par rapport à la loi de
finances initiale pour 1997, soit un rythme comparable à
l'évolution prévisionnelle des prix. Dans ce contexte,
les
crédits affectés au secrétariat d'Etat aux anciens
combattants qui s'élèvent à 25,952 milliards de francs,
enregistrent une baisse de 3,5 % par rapport au budget de 1997
.
Cette baisse signifie que les crédits rendus disponibles par une
réduction du nombre des pensionnés ne sont pas
réaffectés, même de manière partielle, au sein du
ministère. En effet, une baisse des effectifs pensionnés proche
des 3,5 % laisse penser que les moyens d'actions du ministère sont
globalement préservés.
La philosophie générale de ce budget est donc la suivante :
une absence de mesures nouvelles importantes qui doit être
appréciée au regard du maintien des droits et des structures.
Lorsque l'on analyse sommairement l'évolution du budget depuis dix ans,
on observe que la quasi stabilité du budget en francs courants masque
une forte croissance des dépenses qui ne sont pas liées
directement à la réparation de l'invalidité, en
particulier au nom de la solidarité et de la reconnaissance due aux
anciens combattants. C'est ainsi que les dépenses liées à
la réparation de l'invalidité qui s'élevaient à
81 % des crédits du ministère en 1989 représentent
75 % de ces mêmes crédits en 1998. Les dépenses de
fonctionnement quant à elles sont restées globalement stables sur
cette période puisqu'elles représenteront 5 % des
crédits en 1998 contre 4 % en 1989. Ce sont les dépenses
affectées à la mémoire, à la reconnaissance et
à la solidarité qui bénéficient de cette
évolution puisqu'elles représentent dorénavant 20 %
des crédits contre 15 % en 1989.
Lorsque l'on examine l'évolution des différentes dotations
budgétaires du ministère entre 1997 et 1998
(voir annexe
n° 1),
on constate que les dépenses de personnel sont en
hausse (+ 0,70 %) comme les investissements réalisés
par l'Etat. Il apparaît également que les crédits
affectés à l'ONAC sont en baisse (- 2,55 %), ainsi que
ceux affectés à l'INI (- 3,37 %). Les crédits de
la dette viagère sont en baisse (- 2,58 %) de même que
ceux du Fonds de solidarité pour les anciens combattants d'AFN
(- 0,75 %).
Les crédits affectés à la mémoire et à
l'action sociale sont également fragilisés dans ce projet de
budget. On constate, contrairement à un premier projet du Gouvernement,
qu'aucun crédit supplémentaire n'a été
accordé à ces deux actions prioritaires dans le cadre des
40 millions de francs de crédits supplémentaires
adoptés lors du débat à l'Assemblée nationale.
*
* *
Budget 1998 des anciens combattants et victimes de guerre
Avec près de 26 milliards de francs, le budget des anciens combattants est le 11 ème budget de l'Etat.
*
* *
Dans ces conditions, la commission des Affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs aux anciens combattants dans le projet de budget pour 1998 ainsi que sur les articles rattachés 62, 62 bis, 62 ter et 62 quater.
I. LE PROJET DE BUDGET POUR 1998 PRÉSERVE GLOBALEMENT LES MOYENS D'ACTION POUR ASSURER LE RESPECT DES DROITS ÉLÉMENTAIRES DES ANCIENS COMBATTANTS
A. LA DIMINUTION DES EFFECTIFS DE LA POPULATION COMBATTANTE DÉGAGE DES MARGES DE MANOEUVRE BUDGÉTAIRES
1. Les crédits affectés aux dépenses de réparation sont en baisse
Les crédits affectés au Secrétariat
d'Etat aux anciens combattants sont en diminution de 941 millions de
francs par rapport au budget voté en 1997, soit une baisse de
3,5 %. On observe que cette diminution s'explique de manière
importante par des économies mécaniques sur la dette
viagère et par une mesure de trésorerie.
La dette viagère, regroupant la retraite du combattant (chapitre 46-21)
et les pensions d'invalidité et allocations diverses (chapitre 46-22),
diminue de 525 millions de francs. Ce solde est lui-même la
résultante de la diminution des parties prenantes (- 745 millions
de francs), et de l'application du rapport constant (+ 220 millions
de francs) liée en particulier à la hausse de la valeur du point
Fonction publique en 1997. De même, la diminution des crédits des
soins médicaux gratuits (- 5 %), d'appareillage
(- 2 %), des remboursements SNCF (- 3 %) correspond
à des économies de constatation qui constituent autant
d'ajustements aux besoins prévisibles dans le cadre de la
réglementation existante.
On peut noter que l'application stricte du " rapport
constant " pour
calculer la revalorisation des pensions militaires d'invalidité en
fonction de l'évolution des traitements de la fonction publique,
constitue un minimum aux yeux des associations représentatives du monde
combattant. Celles-ci contestent son mode de calcul, elles le
considèrent complexe, peu transparent et incomplet.
Il n'est pas inutile de rappeler que le mode de calcul actuel a
été établi par l'article L. 8 bis du code des pensions,
issu de l'article 123 de la loi de finances pour 1990.
Cet article a prévu que le rapport constant évolue :
- en cours d'année, en fonction des mesures générales
applicables aux traitements bruts des fonctionnaires ;
- au 1er janvier de chaque année en fonction de l'évolution
de l'indice majeur annuel d'ensemble des traitements bruts calculés par
l'INSEE.
Les calculs qui ont été effectués tendent à montrer
que le nouveau système a été plus favorable aux
pensionnés que l'ancien de 1993 à 1997 comme l'illustre le
tableau ci-dessous.
Evolution en niveau du point PMI
(appréciée
au 1er janvier de chaque année)
Date d'effet |
Système actuel |
Ancien système |
Différence par rapport à l'ancien système |
1/01/90 |
67,59 (a) |
67,28
|
+ 0,31 |
1/01/91 |
68,77 |
68,96 |
- 0,19 |
1/01/92 |
70,49 (a) |
70,58
|
- 0,09 |
1/01/93 |
72,59 (a) |
72,46 |
+ 0,13 |
1/01/94 |
74,55 (a) |
74,44 |
+ 0,11 |
1/01/95 |
76,00 (a) |
75,41 |
+ 0,59 |
1/01/96 |
78,04 (a) |
77,39 |
+ 0,65 |
1/03/97 |
78,43 (c) |
77,77 |
+ 0,66 |
Le précédent ministre, M. Pierre Pasquini, avait initié un travail de réflexion sur le sujet en confiant le soin de proposer une simplification du mode de calcul à une commission spécifique. Il appartient maintenant à son successeur, M. Jean-Pierre Masseret, de faire aboutir ce travail comme il semble s'y être engagé pour 1998.
Les crédits de la dette viagère en 1996 et
1997
Crédits |
Différence |
||||
Chapitres budgétaires |
Budget 1996 voté
|
consommés
|
(I) - (II) |
Indice des crédits
consommés
|
Budget 1997 voté
|
46-21 |
2.366.826.000 |
2.294.423.000 |
+ 72.403.000 |
96,94 |
2.175.645.100 |
46-22 |
19.012.835.000 |
19.150.833.000 |
- 137.998.000 |
100,73 |
18.484.427.932 |
46-25 |
347.921.000 |
338.674.000 |
+ 9.247.000 |
97,34 |
344.750.996 |
46-26 |
164.728.000 |
131.789.000 |
+ 32.939.000 |
80,00 |
129.439.408 |
TOTAL |
21.892.310.000 |
21.915.719.000 |
- 23.409.000 |
100,11 |
21.189.457.387 |
Il convient d'ajouter qu'une mesure de trésorerie
réduit à zéro en 1998 le chapitre 47-22 relatif à
la retraite mutualiste. Les versements par l'Etat des sommes dues aux
organismes attribuant la rente mutualiste au titre de la majoration
spécifique anciens combattants seront décalés de quelques
mois, ils auront lieu au début de l'exercice suivant et non plus
à l'automne de l'exercice précédent.
L'économie générale du système de la majoration des
rentes mutualistes ne devrait pas en être trop affectée
malgré la trésorerie supplémentaire de quelques mois mise
à la charge des organismes correspondants.
Le budget 1999 devrait retrouver la dotation habituelle du chapitre
(360 millions de francs en 1997, majorés de 30 millions de
francs en prévision 1998).
2. La répartition des dépenses de réparation
La première mission de l'administration des anciens
combattants, fondatrice de son action, est d'assurer la réparation des
invalidités entraînées par les conflits ou le service dans
les forces armées. En 1998, cette action représente 75 % des
crédits totaux soit environ 19,5 milliards de francs. Aux pensions
militaires d'invalidité stricto sensu, il convient en effet d'ajouter
diverses allocations complémentaires, les soins médicaux gratuits
pour les affections pensionnées et les crédits consacrés
à l'appareillage des invalides.
Le caractère très protecteur de ce dispositif ressort du montant
important (environ 40 %) consacré aux ayants cause des invalides,
et en particulier aujourd'hui aux veuves nombreuses des pensionnés suite
à la deuxième guerre mondiale.
Depuis dix ans, une diminution globale des crédits moins rapide que
celle des effectifs pensionnés a permis d'assurer une augmentation
régulière du montant moyen des pensions jusqu'à
dépasser 33.000 francs par an.
Cet effort a bénéficié d'abord aux plus grands invalides
que le Code des pensions militaires a choisi d'indemniser plus largement, afin
de pouvoir en particulier garantir un véritable revenu de substitution
à ceux qui ne peuvent travailler.
Répartition estimée des dépenses en 1998
Les dépenses de répartition de l'invalidité sont consacrées pour près de 40 % aux ayants cause (veuves, ascendants et orphelins).
Les dépenses de pensions par conflit
Répartition estimée au 1
er
janvier 1997
Malgré une croissance régulière de la part relative des dernières générations du feu (" AFN et divers "), le poids de la seconde guerre mondiale reste prépondérant en particulier par suite du nombre important de veuves. Il reste que cette répartition est amenée à évoluer significativement dans les prochaines années, notamment du fait du départ à la retraite de nombreux travailleurs anciens combattants d'Afrique du Nord.
B. LE FINANCEMENT DES STRUCTURES ADMINISTRATIVES EST CALCULÉ AU PLUS JUSTE
Les effectifs
Année 1998
La faible part de l'administration centrale traduit la
priorité donnée au contact avec les anciens combattants et
victimes de guerre.
L'administration au service du monde combattant repose sur les services de
l'administration centrale et les services déconcentrés du
secrétariat d'Etat ainsi que sur deux établissements publics :
l'ONAC et l'INI.
1. Les moyens de l'administration
Après les fortes baisses opérées en 1992
et 1993, l'évolution des effectifs a eu tendance à se stabiliser.
Le nombre des fonctionnaires a continué à baisser en
administration centrale et dans les services déconcentrés, mais
cette tendance a été amortie par une augmentation des effectifs
de l'ONAC. L'année 1998 verra la baisse se poursuivre dans les services
du ministère avec la suppresion de 88 emplois, 2 emplois en
administration centrale et 86 emplois dans les services
déconcentrés.
L'administration des anciens combattants poursuit sa restructuration comme en
témoigne l'achèvement en 1997 de la délocalisation
à Caen de la Direction des statuts, des pensions et de la
réinsertion sociale qui aura concerné 110 agents.
En 1998, les dépenses de personnel du secrétariat d'Etat
devraient se monter à 874,2 millions de francs et celles de
matériel et de fonctionnement à 87,8 millions de francs. Les
dépenses de personnel sont en augmentation du fait de la hausse des
dépenses de pensions et d'allocations pour le personnel en retraite.
2. L'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC)
Les crédits inscrits dans le projet de budget pour 1998
pour l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre au titre
de la contribution de l'Etat à ses dépenses de fonctionnement
(chapitre 36-51) sont en baisse de 2,55 % par rapport à 1997. Ils
atteindront 221,9 millions de francs contre 227,7 millions de francs
l'année dernière. Par ailleurs, il convient de noter que la
contribution de l'Etat à l'action sociale de l'ONAC (chapitre 46-51)
enregistre une baisse importante de 5 millions de francs, soit
10,70 % pour atteindre 41,71 millions de francs.
On ne peut que rester perplexe devant cette diminution des crédits
affectés à l'ONAC et s'interroger sur la capacité de
l'Office à poursuivre ses missions dans ces circonstances. On rappellera
que l'ONAC a pour mission d'offrir un service de proximité aux anciens
combattants et que ce service, par-delà les structures, ne peut
être remis en cause. L'état numérique des ressortissants de
l'Office illustre bien le rôle d'interface que joue cet organisme entre
le monde combattant et l'administration.
On peut regretter que le Gouvernement ait renoncé à augmenter les
crédits de l'action sociale par voie d'amendement lors du débat
en séance publique. Ce geste aurait eu le mérite de lever quelque
peu les incertitudes qui entourent le financement à terme de l'Office.
Etat numérique des ressortissants de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre au 1er janvier 1998
Conflit |
Ressortissants pensionnés |
Ressortissants non pensionnés |
Total général |
Guerre 1914/1918 et TOE |
12.477 |
725 |
13.202 |
Guerre 1939/1945 |
312.678 |
1.197.830 |
1.381.620 (1) |
Indochine - Corée |
(2) |
144.252 |
144.252 |
AFN (3) |
234.876 |
1.360.361 (4) |
1.592.720 |
TRN (loi du 4/01/93) |
120.000 |
120.000 |
|
Pupilles de la Nation (5) |
146.500 |
146.500 |
|
Totaux |
560.031 |
2.969.668 |
3.398.294 |
Veuves non pensionnées |
1.000.000 |
1.000.000 |
|
3.969.668 |
4.398.294 |
(1) Compte tenu des abattements suivants pratiqués :
100 % sur CVR, automatiquement titulaire de la carte du combattant
10 % sur personnes contraintes au travail en pays ennemi
15 % sur réfractaires
7,5 % sur déportés et internés résistants et
politiques
(2) Nombre inclus dans la guerre 1939/1945.
(3) Evénements AFN et toutes opérations visées par la loi
du 6 août 1955.
(4) Correspond au nombre de TRN délivrés au 31 décembre
1994, augmenté du nombre de cartes du combattant délivrées
en 1994, au titre de l'AFN.
(5) Effectif des pupilles de la Nation de moins de 60 ans.
Taux de mortalité appliqués pour cette étude:
1914/1918 : 310 pour 1.000 par an (groupe d'âge
au-delà de 95 ans)
1939/1945 : 49 pour 1.0000 par an (groupe d'âge de 70 à 79 ans)
Indochine : 19 pour 1.000 par an (groupe d'âge de 63 à 68 ans)
AFN : 13 pour 1.000 par an (groupe d'âge de 55 à 65 ans)
Les actions de l'ONAC
3. L'Institution nationale des invalides (INI)
L'INI, érigée en établissement public
administratif depuis le 1
er
janvier 1992, a trois missions :
- accueillir dans un centre des pensionnaires, à titre permanent ou
temporaire, les invalides bénéficiaires du code des pensions
militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- dispenser dans un centre médico-chirurgical des soins en
hospitalisation ou en consultation aux malades et blessés en vue de leur
réadaptation fonctionnelle, professionnelle ou sociale ; les personnes
accueillies sont par priorité les pensionnaires de
l'établissement ainsi que les autres bénéficiaires des
dispositions du code cité ; en outre, dans la limite des places
disponibles d'autres catégories de personnes sont admises sous
réserve de garanties de prise en charge ;
- participer aux études et à la recherche sur l'appareillage
des handicapés.
Le projet de budget pour 1998 prévoit que la contribution de l'Etat aux
frais de fonctionnement de l'INI s'élèvera à
42,9 millions de francs, soit une hausse de 3,37 % par rapport
à l'année dernière. Cette augmentation s'explique par la
revalorisation des rémunérations pour tenir compte de la hausse
du point de la fonction publique et par la nécessité de pourvoir
du remplacement des appelés du contingent affectés à
l'INI. La réforme du service national pose un problème de
personnel à l'INI qui bénéficiait de militaires mis
à disposition, des créations de postes semblent
inévitables pour assurer la transition dans de bonnes conditions.
C. LES CRÉDITS RELATIFS À LA MÉMOIRE HISTORIQUE DIMINUENT
1. L'information historique est particulièrement touchée
Les crédits alloués à la politique de la
mémoire accusent une baisse importante de 30 % et se montent
à 18,45 millions de francs en 1998. Deux postes sont
particulièrement touchés ; il s'agit des interventions en faveur
de l'information historique (chapitre 43-02) qui voient leurs crédits
diminuer de près de 43 % et des moyens alloués à la
remise en état des nécropoles nationales (chapitre 57-91, article
20) qui baissent de 60 %.
En 1998, les dépenses nécessaires aux célébrations
de la victoire de 1918 seront financées par des crédits
interministériels.
Il reste que cette réduction importante des moyens affectés
à la politique de la mémoire est en contradiction avec les
déclarations du ministre qui tendaient à en faire une
priorité de son action. Une politique vigoureuse de la mémoire
est d'autant plus nécessaire aujourd'hui qu'on assiste à une
recrudescence du débat sur l'histoire des conflits en France.
La commission des Affaires sociales réitère sa volonté que
soit développée une politique de la mémoire active qui
associe étroitement le monde combattant en particulier dans sa
composante résistante. Le rapport du sénateur Jacques Baudot
contient à cet égard nombre de propositions intéressantes.
|
Actions culturelles Mémoire |
Actions restauration Patrimoine |
Opérations exceptionnelles |
|
1991 |
7.419.930 |
58.841.688 |
66.261.618 |
|
1992 |
9.404.998 |
54.143.533 |
63.548.531 |
|
1993 |
8.364.076 |
55.602.570 |
63.966.646 |
|
1994 |
10.582.183 |
43.053.632 |
100.000.000 |
153.635.815 |
1995 |
10.689.340 |
42.789.336 |
50.000.000 |
103.478.676 |
1996 |
11.771.940 |
46.285.569 |
2.638.000 |
60.695.509 |
1997 |
11.465.715 |
49.897.086 |
61.362.801 |
|
1998 |
12.500.000 |
48.500.000 |
61.000.000 |
2. Les 16 propositions du rapport de M. Jacques Baudot sur " le défi de la mémoire "
A l'initiative de son Président, M. Christian Poncelet,
la commission des finances a demandé à M. Jacques Baudot,
sénateur, en sa qualité de rapporteur spécial des
crédits du ministère des anciens combattants, d'effectuer un
contrôle, sur pièces et sur place, de l'utilisation des
crédits affectés à la Délégation à la
Mémoire et à l'Information Historique (DMIH).
Depuis plusieurs années, le Parlement est systématiquement
sollicité, lors de l'examen du budget, pour aborder de façon
exceptionnelle et non reconductible les crédits de la DMIH. Ce
contrôle devait donc permettre de vérifier si cette administration
disposait des crédits nécessaires pour accomplir ses missions.
Dans cette perspective, le rapporteur a été conduit à
évaluer la politique de la mémoire menée par le
ministère, c'est-à-dire à en apprécier le
coût, à travers une étude quantitative, mais
également le sens et les objectifs
1(
*
)
.
La commission des Affaires sociales partage les analyses de notre excellent
collègue, le sénateur Jacques Baudot lorsqu'il estime que la
mémoire collective constitue un ciment puissant pour chaque
société puisqu'elle véhicule son histoire et transmet ses
valeurs d'une génération à l'autre qu'il faut savoir
à la fois protéger, entretenir et partager, surtout avec les
jeunes.
L'analyse de la politique de la mémoire menée par la DMIH conduit
selon ce rapport à un bilan mitigé : si le ministère des
anciens combattants semble en mesure, notamment grâce au
dévouement de ses fonctionnaires, d'entretenir correctement les
nécropoles nationales et les lieux de mémoire, les actions de
célébration et de promotion de la mémoire pêchent
par un manque de vision globale à long terme.
Or, comme le souligne Jacques Baudot, la prise de conscience de cette
dérive constitue un enjeu essentiel pour la légitimité et,
en conséquence, la survie de ce ministère. En effet, la
mortalité naturelle qui affecte les anciens combattants et la diminution
du nombre des conflits font perdre de l'importance aux fonctions
traditionnelles, comme le versement des pensions d'invalidité et des
retraites des combattants. En revanche, la défense de la mémoire
apparaît d'autant plus nécessaire que les dates des conflits
reculent, que les survivants se font rares et que le souvenir s'efface.
En définitive, c'est à une véritable réflexion sur
les missions et le rôle du ministère des anciens combattants
qu'invitent les conclusions de ce rapport.
Pour nourrir cette réflexion, le rapporteur a établi 16
propositions qui portent soit sur des améliorations ponctuelles, soit
sur des réformes structurelles.
Les 16 propositions du rapport Baudot
Proposition n° 1 : respecter le programme de travaux
pour les sépultures de guerre 1996-2000 lancé par le
ministère des anciens combattants en accordant bien les 50 millions
prévus pour leur financement.
Proposition n° 2 : construire les bases prévues dans le plan
de modernisation de l'entretien des nécropoles nationales mis en place
en 1992.
Proposition n° 3 : consacrer la compétence exclusive de la
Délégation à la Mémoire et à l'Information
historique pour toutes les questions relatives à l'entretien et à
la rénovation des sépultures de guerre.
Proposition n° 4 : clarifier les relations de l'Etat avec le
" Souvenir Français " en mettant fin à la participation
financière de cette association à la rénovation des
nécropoles nationales, propriété exclusive de l'Etat.
Proposition n° 5 : revaloriser l'indemnité forfaitaire
versée par l'Etat aux communes et bloquée à 8 francs
par tombe depuis 1981 afin de l'adapter au coût réel de
l'entretien des tombes dans les carrés communaux évalué
à 36 francs par tombe.
Proposition n° 6 : rendre les cimetières militaires
français plus accueillants en installant des bancs, en construisant des
panneaux précisant le contexte historique des nécropoles
nationales (résumé des opérations militaires avec une
carte comme support, nombre de nationalité des participants ...), en
mettant à la disposition des visiteurs un plan des tombes, la liste des
noms des Morts pour la France et un livre d'or.
Proposition n° 7 : mieux signaler l'emplacement des cimetières
militaires par l'instauration systématique de panneaux de signalisation.
Proposition n° 8 : mettre à la disposition du public, dans les
mairies et les conseils généraux, des fiches précisant les
coordonnées de la direction interdépartementale des anciens
combattants de la région pour toute demande de renseignements concernant
une personne morte lors d'une guerre.
Proposition n° 9 : systématiser l'information sur les aides du
ministère des anciens combattants à la disposition des
établissements scolaires en distribuant, dans chaque collège et
lycée, une brochure récapitulant les différentes
subventions gérées par la Délégation à la
mémoire et à l'information historique et les possibilités
de prêts de documents ou de prêts d'expositions.
Proposition n° 10 : donner à la politique de la mémoire
vis-à-vis des jeunes une vision globale et à long terme par
l'établissement de relations permanentes avec les collèges et les
lycées et l'organisation, chaque année, d'une manifestation sur
un thème lié à la mémoire des conflits (exposition,
documentaire, témoignage, conférence...).
Proposition n° 11 : développer, en imitant le modèle
allemand, les camps d'été qui permettent, à travers
l'exécution de petits travaux d'entretien par les jeunes sur les
nécropoles nationales, de les sensibiliser à l'histoire de leur
pays.
Proposition n° 12 : informatiser l'ensemble des fichiers
gérés par le ministère des anciens combattants.
Proposition n° 13 : rendre les hauts lieux de mémoire plus
attractifs en les dotant de moyens techniques modernes (salle de projection,
guide vocal...) et en traduisant les commentaires des panneaux d'information en
anglais.
Proposition n° 14 : mettre fin à la polémique
suscitée par l'existence d'une carte comptabilisant dans le
Mémorial des Martyrs de la Déportation.
Proposition n° 15 : créer un grand Mémorial de la
Déportation à Compiègne qui évoquerait, d'une
manière à la fois historique et pédagogique, la
déportation dans sa réalité.
Proposition n° 16 : établir un programme pluriannuel fixant
les objectifs et les priorités de la politique de la mémoire,
prévoyant les moyens à mettre en oeuvre et instaurant une
évaluation des actions entreprises.
II. L'ABSENCE DE MESURES NOUVELLES SIGNIFICATIVES CONFIRME QUE LA SATISFACTION DES DEMANDES DU MONDE COMBATTANT NE CONSTITUE PAS UNE VÉRITABLE PRIORITÉ
A. LE GOUVERNEMENT A PROPOSÉ DES MESURES NOUVELLES QUI N'ONT PAS CONVAINCU L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Les mesures nouvelles adoptées par le Gouvernement sont d'une ampleur limitée ; on peut distinguer les dispositions inscrites dans le projet de loi de finances déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale des dispositions qui ont été adoptées à l'Assemblée avec l'accord du Gouvernement, que ce soit en commission ou en séance publique.
1. Les dispositions nouvelles du projet de loi de finances tel qu'il a été déposé à l'Assemblée nationale (dont l'article 62)
Le projet de loi de finances, déposé sur le
bureau de l'Assemblée nationale, comprenait trois dispositions
nouvelles :
- l'article 62 qui permet l'indemnisation des étrangers
déportés depuis la France et ayant acquis depuis lors la
nationalité française
(voir encadré p. 34),
- l'alignement sur le droit commun des dates de remboursement par l'Etat
de la majoration des rentes constituées par les anciens combattants,
- et la prise en compte pour l'attribution de l'allocation
différentielle du Fonds de solidarité des revenus du foyer qui
devrait exclure les ménages qui perçoivent un revenu imposable
mensuel supérieur à 18.255 francs.
Ces trois mesures sont de nature différente. La première devrait
concerner environ 150 déportés et leurs ayants cause pour
11,6 millions de francs, la deuxième ne devrait pas toucher les
anciens combattants alors que la troisième supprime le
bénéfice de l'allocation différentielle pour
310 personnes, soit 1 % des effectifs actuels et représente
une économie de 9 millions de francs.
Cette dernière disposition explique la baisse de 0,76 % de la dotation
du Fonds de solidarité pour les anciens combattants d'Indochine et
d'Afrique du nord.
Nos collègues de la commission des Affaires culturelles, familiales et
sociales de l'Assemblée nationale, réunis le
mercredi 8 octobre, ont considéré que ce budget
était " inacceptable en l'état ". Ils ont
réclamé de nombreuses mesures que votre commission défend
également, comme la suppression de l'obligation de passage par
l'allocation différentielle pour entrer en APR, la prise en compte pour
l'attribution du titre de reconnaissance de la Nation des périodes
passées en Algérie après 1962, la relance de la politique
de la mémoire, un effort sur les conditions d'attribution de la carte du
combattant et des mesures concernant la retraite anticipée pour les
anciens d'Algérie.
Un débat a eu lieu à la commission des Affaires culturelles,
familiales et sociales qui a opposé les partisans d'un rejet du budget
et ceux d'un report de l'examen dans l'attente de mesures
complémentaires. La commission a décidé finalement de
reporter l'examen de l'avis.
2. Les dispositions complémentaires proposées par le gouvernement lors de l'examen en commission
Pour tenir compte des réserves exprimées par les
députés, le secrétaire d'Etat a obtenu du Gouvernement
l'inscription de 40 millions de francs de crédits
supplémentaires en faveur des anciens combattants lors de la discussion
de la première partie de la loi de finances. On peut remarquer que cette
hausse n'est en rien considérable puisqu'elle représente une
augmentation de 0,15 % des crédits du département
ministériel. Elle devait permettre toutefois le développement de
quatre mesures nouvelles :
- la fixation du plafond de la retraite mutualiste en points d'indice de
pension militaire d'invalidité, à hauteur de 95 points, soit
un montant de 7.488 francs pour le plafond majorable en 1998 contre
7.091 francs en 1997 ;
- la remise à niveau des crédits de mémoire ;
- l'élargissement des conditions d'attribution de la carte du
combattant en Afrique du Nord avec la prise en compte du critère de la
durée de séjour d'au moins 18 mois ;
- l'amélioration de l'action sociale de l'ONAC au profit des
anciens d'Afrique du Nord dans l'attente d'une possible avancée en
matière de retraite anticipée.
Cette répartition des 40 millions de francs de crédits
supplémentaires n'a pas reçu l'approbation de l'Assemblée
nationale.
B. L'ASSEMBLÉE NATIONALE N'A PU OBTENIR QU'UN RÉAMÉNAGEMENT DES CRÉDITS COMPLÉMENTAIRES ACCORDÉS PAR LE GOUVERNEMENT
1. Les dispositions nouvelles effectivement votées par l'Assemblée nationale (art. 62 bis, art. 62 ter, art. 62 quater)
La commission des Affaires culturelles de l'Assemblée
nationale a considéré que ces mesures étaient
insuffisantes dans leur montant par rapport aux 745 millions de francs
économisés du fait de la diminution du nombre de
pensionnés et, dans leur objet, au regard de l'attente de l'ensemble des
parlementaires quant à l'annonce d'une mesure de véritable
retraite professionnelle pour les anciens d'Afrique du Nord.
Elle a décidé, dans ces conditions, de donner un avis
favorable au projet de budget sous réserve de l'adoption de trois
amendements au projet de loi de finances :
- le premier fixant à 95 points d'indice le montant du plafond
majorable de la retraite mutualiste et prévoyant la revalorisation de ce
plafond en fonction de la valeur du point d'indice ;
- le deuxième ouvrant droit à la retraite anticipée
pour les anciens combattants en Afrique du Nord en situation de chômeurs
en fin de droits pouvant justifier d'une durée de cotisation de
40 annuités à l'assurance vieillesse diminuée du
temps passé en Afrique du Nord ;
- le troisième ouvrant l'attribution de la carte de combattant aux
anciens d'Afrique du Nord justifiant d'une durée de service d'au moins
douze mois en Afrique du Nord.
Le premier amendement relatif à la retraite mutualiste était
proche de la position du Gouvernement. Le deuxième et le
troisième étaient, cependant, assez éloignés des
déclarations du secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement, lors du débat en séance publique qui s'est tenu
le vendredi 24 octobre 1997, a tenu compte des amendements
adoptés par la commission des Affaires culturelles, familiales et
sociales de l'Assemblée nationale, qui avaient été
déclarés contraires à l'article 40 de la
Constitution, en modifiant la ventilation des 40 millions de francs
supplémentaires inscrits dans la première partie du budget
à l'occasion de sa discussion. C'est ainsi que le secrétaire
d'Etat est revenu sur les crédits supplémentaires qui devaient
être attribués à la politique de la mémoire et
à l'action sociale de l'ONAC. Il a pu, de ce fait, reprendre à
son compte les trois préoccupations de la commission, sans toutefois
garder leur rédaction initiale
(voir encadré).
Le Gouvernement a accepté le premier amendement de la commission qui
fixe à 95 points d'indice le montant du plafond majorable de la
retraite mutualiste et qui prévoit la revalorisation de ce plafond en
fonction du point d'indice.
Concernant la carte du combattant, le secrétaire d'Etat a
souhaité avancer en proposant que la nécessité d'une
opération de feu soit remplacée par une condition de
présence égale à 18 mois.
Enfin, sur la question la plus complexe, la retraite anticipée des
anciens combattants d'Afrique du Nord, M. Jean-Pierre Masseret a
annoncé une mesure qui permettrait la garantie d'un revenu
équivalent à une retraite anticipée, soit
5.600 francs par mois pour les chômeurs qui justifient de
160 trimestres d'assurance vieillesse, y compris le temps passé en
Afrique du Nord. Cette disposition prendrait la forme d'un relèvement de
l'allocation différentielle à due concurrence à partir du
1er janvier 1998 pour les anciens combattants concernés. Le
secrétaire d'Etat a estimé que 12 à 15.000 personnes
seraient concernées par cette mesure. Il s'agit là d'un pas en
avant qui doit être souligné à sa juste valeur, même
s'il ne règle pas complètement la question.
Ainsi, 25 millions de francs abonderont le chapitre 46-10 afin de
porter à 5.600 francs l'allocation différentielle,
10 millions de francs iront au chapitre 46-21 pour tenir compte de
l'augmentation du nombre de titulaires de la carte du combattant et
5 millions de francs seront destinés au chapitre 47-22 pour
tenir compte du relèvement du plafond ouvrant droit à majoration
des rentes mutualistes. En conséquence, ont été
adoptés les amendements correspondant à ces mesures nouvelles et
le budget a été voté. Votre rapporteur tient à
préciser que la réserve parlementaire a été
sollicitée à hauteur de 25 millions de francs pour abonder
la disposition relative au relèvement de l'allocation
différentielle sans que ce financement complémentaire puisse
garantir tout à fait le bouclage de la mesure que le ministère
peine encore à chiffrer aujourd'hui.
Les articles rattachés adoptés par
l'Assemblée nationale
Article 62
Au titre VII du livre II du code des pensions militaires
d'invalidité et des victimes de la guerre est inséré un
article L. 252-5 ainsi rédigé :
" Art. L. 252-5. - Bénéficient des dispositions du chapitre
Ier du titre III du présent livre, dans les conditions
prévues au paragraphe 2 de la section 1 et à la section 2
dudit chapitre, les étrangers arrêtés en France et
déportés, s'ils ont acquis la nationalité française
depuis lors et obtenu le titre de déporté politique ; il en est
de même de leurs ayants cause de nationalité
française. "
Article 62 bis (nouveau)
Le dernier alinéa de l'article L. 321-9 du code de la
mutualité est ainsi rédigé :
" Le montant maximal donnant lieu à majoration par l'Etat de la
rente qui peut être constituée au profit des
bénéficiaires visés par les dispositions du présent
article est calculé par référence à l'indice 95 des
pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Il est
exprimé en francs au 1er janvier de chaque année en fonction de
la valeur du point des pensions militaires d'invalidité à cette
date. "
Article 62 ter (nouveau)
L'article L. 253 bis du code des pensions militaires
d'invalidité et des victimes de la guerre est complété par
un alinéa ainsi rédigé :
" Une durée des services en Algérie d'au moins dix-huit mois
est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu et
de combat exigée au deuxième alinéa ci-dessus ".
Article 62 quater (nouveau)
Le septième alinéa de l'article 125 de la loi de
finances pour 1992 (n° 91-1332 du 30 décembre 1991) est
complété par une phrase ainsi rédigée :
" Afin de leur permettre de bénéficier d'un revenu
équivalent à une retraite anticipée de 5.600 F net par
mois et par dérogation aux dispositions précédentes, le
montant de l'allocation différentielle est augmenté à due
concurrence au 1er janvier 1998 pour les chômeurs qui justifient d'une
durée d'assurance vieillesse de 160 trimestres, y compris les
périodes équivalentes et notamment le temps passé en
Afrique du Nord. "
2. Les mesures supplémentaires ne sont pas à la hauteur des enjeux
Comment peut-on apprécier ce budget et les mesures
supplémentaires adoptées par l'Assemblée nationale, au
regard notamment des demandes du monde combattant, telles qu'elles sont
exprimées par le Front Uni ?
La revalorisation de la retraite mutualiste du combattant ne peut constituer
que l'amorce d'un rattrapage qui devra être confirmé à
l'avenir. Le critère des 18 mois de présence en Afrique du
Nord pour l'obtention de la carte du combattant représente une
avancée positive notamment vers la notion de risque, mais ne
règle pas la question, nombre d'anciens combattants étant
restés légèrement moins de 18 mois.
La disposition en faveur des chômeurs ayant cotisé
160 trimestres est également la bienvenue, mais, là aussi,
elle reste insuffisante au regard de l'enjeu. On espère de plus qu'un
effort sera fait concernant la politique de la mémoire, même si la
commémoration de l'Armistice de 1918 est prise en charge par des
crédits interministériels. On ne peut, à cet égard,
se satisfaire du fait que la hausse des crédits affectés à
la politique de la mémoire ait été purement et simplement
annulée. De même, les crédits relatifs à l'action
sociale de l'ONAC ne seront pas abondés, comme cela avait prévu
dans la première ventilation des 40 millions de francs de
crédits supplémentaires.
Dans ces conditions, le projet de budget qui nous est présenté
apparaît comme une étape bien plus que comme un règlement
du contentieux qui oppose le monde combattant au Gouvernement.
C. LES DEMANDES DU MONDE COMBATTANT RESTENT LARGEMENT EN SUSPENS
Les demandes du monde combattant n'ont donc pas
été véritablement entendues. La commission des Affaires
sociales souhaite que le Gouvernement apporte une solution aux dossiers
prioritaires parmi lesquels on peut citer notamment :
1. La politique de la mémoire
2. La retraite anticipée des anciens combattants d'Afrique du Nord
3. Les veuves de guerre
4. Les conditions d'attribution de la carte du combattant et du TRN
5. Les mesures en faveur des harkis
6. La situation des incorporés de force dans l'armée allemande
pendant la seconde guerre mondiale.
Ces dossiers, comme beaucoup d'autres, appellent une réponse urgente
notamment au regard de l'âge des intéressés. Il est
nécessaire que des avancées significatives puissent être
constatées sur tous ces points si l'on souhaite effectivement accorder
une véritable reconnaissance aux anciens combattants. Ces
avancées, qui ne se traduiraient pas toutes par des dépenses
supplémentaires, sont d'autant plus accessibles que la situation
économique actuelle n'a jamais été aussi favorable depuis
cinq ans.
*
* *
En conséquence, la commission des Affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits des anciens combattants dans le projet de loi de finances pour 1998 ainsi que sur les articles 62, 62 bis, 62 ter et 62 quater rattachés.
ANNEXE N° 1
Evolution des grandes masses
(en millions de francs)
Crédits votés pour 1997 |
Crédits demandés pour 1998 |
Evolution en % |
|
Titre III - moyens des services |
1.197,9 |
1.199,8 |
- 0,16 % |
Personnel |
843,2 |
847,2 |
+ 0,70 % |
Matériel et fonctionnement des services |
85,5 |
87,8 |
+ 0,60 % |
Subventions de fonctionnement : |
|||
. à l'ONAC |
227,7 |
221,9 |
- 2,55 % |
. à l'INI |
41,5 |
42,9 |
+ 3,37 % |
Titre IV - Interventions publiques |
25.681,5 |
24.736,2 |
- 3,68 % |
. dont dette viagère |
21.189,5 |
20.641,8 |
- 2,58 % |
. dont Fonds de solidarité pour les anciens combattants d'AFN |
1.535,4 |
1.523,8 |
- 0,75 % |
Titre V - Investissements exécutés par l'Etat |
|||
. crédits de paiement |
13,7 |
16,2 |
+ 18,25 % |
Total général (dépenses ordinaires + crédits de paiement) |
26.893,2 |
25.952,2 |
- 3,50 % |
La structure du budget du ministère des anciens combattants est caractéristique d'un budget d'intervention : en 1998 seuls 4,62 % des crédits sont consacrés aux moyens des services, tandis que 95,38 % le sont aux dépenses d'intervention, dont l'essentiel est constitué par la dette viagère qui représente à elle seule plus des trois quarts (79,5 %) de l'ensemble des crédits.
ANNEXE N° 2
Evolution des principales dotations du
budget des anciens combattants pour 1998
(en millions de francs)
DROIT À RÉPARATION |
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Différence entre
|
Evolution
|
|||||
Chapitre 46-21
|
2.230,84 |
2.175,65 |
- 55,19 |
- 2,47 % |
|||||
Chapitre 46-22 (46-20 en 1998)
|
18.484,43 |
18.038,70 |
- 445,73 |
- 2,41 % |
|||||
Chapitre 46-25 et 46-26 (46-20
en
1998)
|
747,19 |
427,46 |
- 46,73 |
- 9,86 % |
|||||
Dépenses
indexées
|
21.189,46 |
20.641,80 |
- 547,66 |
- 2,58 % |
(en millions de francs)
SOINS |
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Différence entre
|
Evolution
|
|||||
Chapitre 46-24
|
1.416,65 |
1.453,61 |
36,96 |
2,61 % |
|||||
Chapitre 46-27
|
996,39 |
945,00 |
- 51,39 |
- 5,16 % |
|||||
Chapitre 46-28
|
62,29 |
61,00 |
- 1,29 |
- 2,07 % |
|||||
Santé
|
2.475,33 |
2.459,61 |
- 15,72 |
- 0,64 % |
(en millions de francs)
ACTION SOCIALE |
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Différence entre
|
Evolution
|
|||||
Chapitre
46-03
|
62,93 |
60,93 |
- 2,00 |
- 3,18 % |
|||||
Chapitre 46-04
|
2,16 |
2,12 |
- 0,04 |
- 1,62 % |
|||||
Chapitre 46-10
|
1.535,40 |
1.523,80 |
- 11,60 |
- 0,76 % |
|||||
Chapitre 46-31
|
0,38 |
0,30 |
- 0,08 |
- 21,05 % |
|||||
Chapitre 46-51
|
46,71 |
41,71 |
- 5,00 |
- 10,70 % |
|||||
Total |
1.647,57 |
1.628,86 |
- 18,71 |
- 1,14 % |
(en millions de francs)
MÉMOIRE |
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Différence entre
|
Evolution
|
|||||
Chapitre 34-96 (art. 30) ;
34-98 (en
1998)
|
0,28 |
0,28 |
0,00 |
0,00 % |
|||||
Chapitre 31-96 (art. 30)
|
3,57 |
3,57 |
0,00 |
0,00 % |
|||||
Chapitre 37-61 art. 10 (pro
parte)
|
5,20 |
5,20 |
0,00 |
0,00 % |
|||||
Chapitre 41-91
|
2,35 |
2,25 |
- 0,10 |
- 4,43 % |
|||||
Chapitre 43-02
|
6,82 |
3,90 |
- 2,92 |
- 42,85 % |
|||||
Chapitre 57-91 (art. 20)
|
8,13 |
3,25 |
- 4,88 |
- 60,02 % |
|||||
Total |
26,35 |
18,45 |
- 7,91 |
- 30,01 % |
ANNEXE N° 3
LES QUARANTE ENGAGEMENTS POUR 1998 DU SECRÉTAIRE d'ETAT AUX ANCIENS COMBATTANTS
Poursuivre la concertation sur les grandes revendications du
monde ancien combattant.
1. Etablir une plus grande lisibilité des mécanismes
du rapport constant
2. Améliorer les critères d'attribution de la carte
du combattant d'Afrique du Nord/AFN
3. Mieux prendre en compte la situation des anciens combattants
d'AFN au regard de l'âge de la retraite
4. Réformer les mécanismes d'évolution du
plafond majorable de la retraite mutualiste des anciens combattants
5. Faire le bilan de l'exercice de droit à réparation
dans les départements des régions annexées d'Alsace-Moselle
Assurer une juste place aux représentants de toutes les
catégories de ressortissants
6. Donner une voix délibérative aux veuves d'anciens
combattants au Conseil d'Administration de l'ONAC
7. Renforcer la présence des anciens d'AFN dans les
commissions départementales de la carte du combattant et d'aide sociale.
Développer le devoir de reconnaissance et d'hommage
8. Reconnaître officiellement l'état de guerre pour
le conflit algérien
9. Lever les obstacles administratifs à l'attribution de la
carte CVR
10. Attribuer une décoration liée au TRN pour toutes les
générations du feu
11. Mettre en place une commission pour la création d'un
mémorial de la guerre d'Algérie
12. Impulser la création d'un mémorial de l'annexion de
fait en Alsace-Moselle
13. Impulser la création d'un mémorial du camp de Tambow
14. Redéfinir la politique générale en faveur des
anciens combattants des armées françaises ressortissant de pays
devenus indépendants
15. Accroître la participation du département
ministériel dans la politique en faveur des harkis
16. Impulser l'érection d'une stèle aux victimes
d'attentats.
Impulser une politique de mémoire ambitieuse et moderne
17. Coordonner les célébrations du 80
ème
anniversaire de 1918 dans un cadre international
18. Participer aux journées d'appel de préparation à
la Défense
19. Oeuvrer à l'inscription de Verdun parmi les sites mondiaux de
l'UNESCO
20. Ouvrir largement aux chercheurs les archives du SEAC et celles
d'Arolsen
21. Elargir le champ d'action du département ministériel
dans le domaine des nécropoles
22. Inscrire le patrimoine des guerres et conflits contemporains dans la
politique économique et touristique
23. Ouvrir au grand public l'accès aux fichiers des Morts pour la
France
24. Créer un Comité d'Histoire du Ministère des
Anciens Combattants
25. Refonder la commission nationale consultative du camp de
Natzweiler-Struthof
26. Concevoir un musée-mémorial du camp de concentration de
Natzweiler-Struthof
27. Accroître et diversifier l'aide apportée par le
secrétariat d'Etat aux anciens combattants aux structures associatives
28. Définir une politique d'ensemble de la mémoire des
camps d'internement
29. Créer une commission de travail sur la vie commémorative
Mettre en place des moyens renforcés et plus efficaces
30. Créer un véritable bureau des décorations
doté de l'outil informatique
31. Achever la mise en place d'une cellule de communication et de ses
moyens (bulletin mensuel...)
32. Ouvrir un site Internet du secrétariat d'Etat aux anciens
combattants
33. Achever la réforme de la DSPRS sur le site de Caen
34. Rendre à la Délégation à la
mémoire le dynamisme d'une administration de mission
35. Assurer la refondation des commissions départementales
d'information historique (CDIHP)
36. Renforcer avec des emplois jeunes les moyens de l'ONAC (services
départementaux, écoles de rééducation
professionnelle et maisons de santé) et de l'INI
37. Assure la place de l'INI au regard du dispositif national de
financement des dépenses de santé
38. Renouveler la gestion du Bleuet de France
39. Moderniser les soins médicaux gratuits
40. Mener à son terme une réflexion prospective approfondie
sur les voies et moyens d'une adaptation des services du département et
des établissements publics sous tutelle aux défis de la
démographie et de la professionnalisation des armées
1 Cf. " Le Défi de la mémoire " - Rapport d'information n° 6 (1997-1998) de M. Jacques Baudot, sénateur, sur la politique de la mémoire menée par le ministère des Anciens combattants et victimes de Guerre.