AVIS N° 88 Tome VI - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - DEFENSE FORCES TERRESTRES
M. Serge VINCON, Sénateur
Commission des Affaires étrangères de la defense et des forces armées - Avis n° 88 Tome VI - 1997/1998
Table des matières
-
PRINCIPALES OBSERVATIONS ET CONCLUSIONS DE LA
COMMISSION SUR LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR
1998 1-
I. VERS L'ARMÉE DE TERRE PROFESSIONNELLE
-
A. L'ARMÉE DE TERRE DU FUTUR : UNE MUTATION RÉVOLUTIONNAIRE À L'ÉCHÉANCE DE
2002
- 1. Les missions de la nouvelle Armée de terre
- 2. Un format sensiblement réduit
- 3. La "refondation" de l'Armée de terre
-
4. Une organisation inédite pour l'Armée de terre
- a) Les principes : modularité et économie de moyens 44 voir La réorganisation de l'Armée de terre : l'élaboration d'un modèle professionnel " objectif 2002 " - Le Casoar, avril 1997 ; et Pierre Labbé, L'organisation future de l'Armée de terre, Revue Droit et défense, 97/2.
- b) L'organisation du commandement en deux chaînes distinctes
-
B. LA PROFESSIONNALISATION À L'ÉPREUVE DES FAITS
- 1. 1997-1998 : des évolutions conformes à la loi de programmation
- 2. Des éléments de vulnérabilité d'ores et déjà perceptibles dans le processus de professionnalisation
-
A. L'ARMÉE DE TERRE DU FUTUR : UNE MUTATION RÉVOLUTIONNAIRE À L'ÉCHÉANCE DE
2002
-
II. LA DOTATION DE L'ARMÉE DE TERRE EN 1998
-
A. UN TITRE III PERMETTANT LA MISE EN OEUVRE DE L'ANNUITÉ 1998 DE LA
PROFESSIONNALISATION
- 1. Un pari audacieux mais cohérent : réaliser la professionnalisation à titre III stable en francs constants
-
2. Les crédits du titre III alloués à l'Armée de terre par le projet de budget
sont conformes à la loi de programmation
-
a) L'augmentation des rémunérations et des charges sociales
- (1) L'augmentation " automatique " des rémunérations
- (2) L'impact limité des créations et suppressions d'emplois liées à la programmation
- (3) L'effort en faveur du recrutement des engagés
- (4) L'amélioration de la condition militaire
- (5) La rémunération des personnels servant à l'étranger
- (6) Les mesures d'incitation au départ
- b) La baisse des besoins en alimentation
- c) Poursuite de la baisse des crédits consacrés à l'entretien des immeubles
- d) Inquiétudes relatives à l'activité des forces terrestres
-
a) L'augmentation des rémunérations et des charges sociales
-
3. Un décalage inadmissible entre les crédits d'équipement prévus par la loi
de programmation et les crédits inscrits au projet de budget pour 1998
- a) Présentation générale du titre V
- b) Le suivi des programmes terrestres gravement ébranlé par le non-respect de la loi de programmation
-
c) Une compression générale des autres dépenses
- (1) La baisse problématique des crédits d'entretien programmé des matériels
- (2) Habillement, couchage, campement et ameublement : des besoins croissants malgré la réduction du format contrastant avec une évolution négative des moyens
- (3) Les infrastructures, un poste sensible pendant la période de transition
-
A. UN TITRE III PERMETTANT LA MISE EN OEUVRE DE L'ANNUITÉ 1998 DE LA
PROFESSIONNALISATION
-
I. VERS L'ARMÉE DE TERRE PROFESSIONNELLE
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
-
ANNEXE -
LE SUIVI DES PRINCIPAUX PROGRAMMES EN 1997-1998
N° 88
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME VI
DÉFENSE - FORCES TERRESTRES
Par M. Serge VINÇON,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM. Xavier
de Villepin,
président
; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet,
François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton,
vice-présidents
; Michel Alloncle, Jean-Luc
Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë,
secrétaires
; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Pierre Biarnès,
Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel
Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
MM. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel
Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert
Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe
de Gaulle, Daniel Goulet
,
Jacques Habert, Marcel Henry, Roger
Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice
Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul
d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Régis
Ploton, André Rouvière, André Vallet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
et
85
(annexes n°
s
43
et
44
) (1997-1998).
Lois de finances.
PRINCIPALES OBSERVATIONS ET CONCLUSIONS DE LA
COMMISSION
SUR LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR
1998 1(
*
)
1/-
L'enveloppe globale des
crédits du titre
III
du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi
de finances pour 1998, qui s'élève à 103,7 milliards de
francs, traduit la priorité affichée en faveur de la
professionnalisation des armées.
Toutefois,
la compression des dépenses de fonctionnement
(hors
rémunérations et charges sociales) est
préoccupante
et menace, avec l'insuffisance des crédits d'entretien programmé
des matériels,
l'entraînement et l'activité des
forces
.
La période de
transition
est par ailleurs fragilisée par
les conséquences potentielles, particulièrement pour
l'armée de terre, des dispositions adoptées en matière de
reports d'incorporation pour les jeunes gens titulaires d'un contrat de
travail
qui rendront nécessaire l'adoption de mesures de
compensation.
2/-
La
brutale diminution des crédits du titre V
(- 8,7%
en francs courants, -9,9% en francs constants), qui sont réduits
à 81 milliards de francs dans le projet de loi de finances pour 1998,
donne à penser que les crédits d'équipement militaire ont
joué le rôle de
" variable d'ajustement " du budget
de l'Etat
. Il s'agit là d'un
signal négatif adressé
à la Nation dans son ensemble
.
Au sein même des crédits d'équipement militaire,
les
crédits consacrés au nucléaire
subissent une
amputation encore supérieure de 13 %
(alors que la programmation
ne prévoyait qu'une diminution de 1,4%), évolution qui
représente un motif d'inquiétude pour l'avenir.
3/-
Cette réduction des crédits d'équipement
constitue
un mauvais signal adressé aux industries de la
défense
en raison :
- du
coût
de ces réductions budgétaires
en
matière
d'
emplois
,
- du
surcoût
des équipements faisant l'objet de mesures
d'étalement ou de moratoires,
- de la
perte de " lisibilité "
que la loi de
programmation avait précisément pour objet d'apporter aux
industriels,
- et de
l'affaiblissement
qui en résultera pour les industriels
français dans la perspective des restructurations indispensables de
l'industrie européenne de l'armement.
4/-
Le projet de budget de la défense pour 1998 constitue
surtout
un signal très négatif adressé à nos
armées
au moment même où un effort d'adaptation
exceptionnel leur est demandé.
Les orientations de ce budget, si elles n'étaient pas corrigées
après 1998, poseraient deux interrogations majeures pour l'avenir :
- ne risquent-elles pas de compromettre
la cohérence de la
réforme entreprise
dans son ensemble ?
- ne risquent-elles pas de remettre en cause
le futur modèle
d'armée professionnelle
lui-même ?
5/-
Si les économies imposées à la Défense
pour 1998 avaient - comme il est annoncé - un
caractère
exceptionnel
, leurs conséquences, pour regrettables et dommageables
qu'elles soient, seraient peut-être surmontables.
Si, en revanche, la Défense ne retrouvait pas
à partir de
1999
le niveau de ressources prévu par la loi de programmation
militaire 1997-2002,
l'ensemble de l'édifice et la loi de
programmation elle-même se trouveraient remis en cause
.
Or, la
loi de programmation
- contrairement à ses
devancières - comportait déjà une forte réduction
des crédits d'équipement militaire et constituait la traduction
d'une réforme d'ensemble devant aboutir à la mise en place d'un
nouveau modèle d'armée.
Son non respect ou - a fortiori - son
abandon ne pourrait donc conduire qu'à l'affaiblissement progressif de
notre défense ou à la révision à la baisse de ce
modèle d'armée
.
La commission réaffirme en conséquence son
ferme attachement
à l'exécution
intégrale de la loi de programmation
pour les années 1997-2002.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des Affaires
étrangères, de la Défense et des forces armées a
émis un
avis défavorable
à l'adoption de l'ensemble
des crédits du ministère de la Défense pour 1998.
Mesdames, Messieurs,
La dotation de l'Armée de terre inscrite dans le projet de budget de la
défense pour 1998 représentera 47,94 milliards de francs, soit
près du quart du budget de la Défense.
Les crédits impartis à l'Armée de terre en 1998 appellent
en apparence un jugement contrasté. En effet, si les crédits
d'équipement se situent très en retrait par rapport à ce
qu'aurait dû être la deuxième annuité de la loi de
programmation 1997-2002, ce que ne sauraient admettre ceux qui ont voté
cette loi, en revanche les crédits de fonctionnement paraissent
définis de manière à permettre la poursuite de la
professionnalisation des forces terrestres dans les conditions prévues
par la loi de programmation. Au sein d'une dotation au demeurant très
critiquable, cet élément appellerait un jugement positif.
Or, votre rapporteur craint que les conditions de la professionnalisation
soient, dans les faits, assez sensiblement altérées par diverses
évolutions récentes et, plus particulièrement, par la
réforme du service national. Celle-ci introduira, en effet,
d'importantes vulnérabilités dans le processus de
professionnalisation et, au premier chef, dans la professionnalisation des
forces terrestres.
Le projet de budget pour 1998 aurait pu tirer les conséquences des
difficultés d'ores et déjà prévisibles pour
l'Armée de terre, auxquelles des solutions -certes probablement
coûteuses- auraient pu être apportées. Votre rapporteur
regrette qu'il n'en soit rien, à un moment où l'ampleur des
réformes devant être mises en oeuvre par l'Armée de terre
aurait dû exonérer celle-ci de tout effort supplémentaire.
*
* *
Avant de commenter le contenu de la dotation des forces terrestres prévue pour 1998, votre rapporteur rappellera ce qu'implique la conduite de la transition par l'Armée de terre, et présentera un bilan d'étape de la professionnalisation de celle-ci qui, positif à ce jour, semble susciter quelques interrogations pour l'avenir.
*
* *
I. VERS L'ARMÉE DE TERRE PROFESSIONNELLE
Conduite sous une contrainte budgétaire
particulièrement forte, la professionnalisation implique une contraction
sensible du format de l'Armée de terre du futur, dont l'organisation
devra être adaptée à des missions nouvelles, où la
projetabilité est devenue un impératif prioritaire.
Confrontée à l'épreuve des faits, la mise en oeuvre de la
professionnalisation appelle encore, à ce jour, un bilan favorable,
même si des éléments de vulnérabilité
paraissent d'ores et déjà affecter ce processus pourtant
décisif de la réforme de nos armées.
A. L'ARMÉE DE TERRE DU FUTUR : UNE MUTATION RÉVOLUTIONNAIRE À L'ÉCHÉANCE DE 2002
La professionnalisation des forces, annoncée par le Président de la République le 22 février 1996 et confirmée par la loi de programmation 1997-2002, a eu pour conséquence, pour l'Armée de terre, l'élaboration d'un plan de réorganisation qui, d'une ampleur sans précédent, tire les conséquences des nouvelles conditions d'emploi des forces terrestres et s'inscrit dans une perspective de maîtrise des dépenses publiques.
1. Les missions de la nouvelle Armée de terre
La stratégie d'emploi des forces terrestres a profondément évolué du fait de la fin de l'affrontement Est-Ouest, et de la prolifération des conflits locaux constatée depuis l'effondrement du communisme.
a) L'évolution stratégique
Pendant la guerre froide et au cours des premiers mois qui ont suivi la chute du mur de Berlin, " l'Armée de terre était essentiellement l'instrument d'une stratégie de dissuasion nucléaire -son éventuel engagement en Centre Europe (...) augmentait la menace nucléaire française, surtout depuis la mise en place des armes nucléaires tactiques 2( * ) ". Ce n'est qu'à la marge qu'intervenait la " stratégie d'action ", mise en oeuvre avant tout pour des interventions outre-mer. Le conflit du Golfe a mis en évidence la nécessité de disposer d'une capacité de projection suffisante pour intervenir dans des conflits régionaux et, ce faisant, a souligné l'intérêt que présenterait, dans cette perspective, la professionnalisation de nos forces.
b) Priorité à la projection
Le " contrat opérationnel " dont est
assortie
la professionnalisation impose à l'Armée de terre d'être en
mesure d'engager simultanément quelque 50 000 hommes, soit globalement
dans le cadre de l'Alliance, soit sur deux théâtres
différents :
- 30 000 hommes doivent ainsi pouvoir être projetés, et leur
soutien assuré, pendant un an, sans relève, au sein d'une
coalition, dans le cadre d'une opération de maintien ou de
rétablissement de la paix ;
- 5 000 hommes doivent pouvoir être projetés, avec relèves,
notamment dans le cadre d'accords bilatéraux de défense.
Parallèlement devra être assuré l'entretien du dispositif
prépositionné en outre-mer, dans des conditions faisant toutefois
une part accrue aux compagnies tournantes.
2. Un format sensiblement réduit
Motivée notamment par la constatation qu'une armée mixte répond de manière moins satisfaisante qu'une armée professionnelle à l'impératif de projetabilité des forces, la professionnalisation se traduira, pour l'Armée de terre, par une rapide et importante contraction de son format, qui passera par une déflation rapide de ses effectifs, et par la mise en oeuvre de restructurations qui modifieront sensiblement la géographie de ses implantations.
a) Une importante réduction des effectifs
Entre 1997 et 2002, pendant la période de transition,
les
effectifs
militaires
de l'Armée de terre passeront
(compte tenu de la composante "service national" constituée
d'appelés, puis de volontaires) de 236 626 à 138 626,
soit - 41,4 %. Il s'agirait donc d'une déflation
particulièrement importante, si l'apport que constitueront les
personnels civils
ne venait atténuer la portée de cet
effort. Les effectifs de personnels civils de l'Armée de terre, au
nombre de 31 946 en 1996, ayant été portés à
32 276 en 1997 et devant passer à 34 000 en 2002, la contraction du
format portera sur 95 946 personnels, soit - 35,7 % entre 1996 et 2002.
L'Armée de terre a déjà, par le passé,
assumé des réductions de format importantes. Ainsi la
réforme de 1977 a-t-elle induit une réduction d'effectifs
(militaires d'active et appelés) de - 6,8 %. Les déflations
pratiquées à un rythme plus rapide à partir de 1984, mais
surtout entre 1990 et 1993 (- 16,3 %), se sont traduites, entre 1984 et
1993, par une baisse d'effectifs de - 22 % environ, compte non tenu des
personnels civils, et de - 23,6 % pour la période 1984-1996.
L'Armée de terre a donc intégré à sa
" culture " une certaine habitude des réductions de format.
La réduction d'effectifs qui sera conduite pendant la période de
professionnalisation sera d'une importance sans précédent, non
seulement en raison de son ampleur (entre - 35,7 % et - 41,4 % selon que l'on
prend en compte ou non l'augmentation des effectifs civils), mais aussi du fait
de sa brièveté (six annuités), et, surtout, en raison de
la révision profonde des missions confiées aux différentes
composantes de l'Armée de terre, parallèlement à
l'extinction progressive de la ressource appelée.
Évolution des différents composants de l'Armée de terre
entre 1996 et 2002
1996 |
1997 |
2002 |
Évolution 2002/1996 |
|
Officiers (carrière - contrat) |
17 461 |
17 242 |
16 080 |
- 7,9 % |
Sous-officiers |
56 644 |
55 608 |
50 365 |
- 11 % |
Militaires du rang engagés |
30 202 |
36 077 |
66 681 |
+ 120 % |
Sous-total militaires d'active |
104 307 |
108 927 |
133 126 |
+ 27,6 % |
Composante service national (appelés puis volontaires) |
132 319 (appelés) |
111 039 (appelés) |
5 500 (volontaires) |
- 95,8 % |
Sous-total effectifs militaires |
236 626 |
219 966 |
138 626 |
- 41,4 % |
Personnels civils |
31 946 |
32 276 |
34 000 |
+ 6,4 % |
TOTAL |
268 572 |
252 242 |
172 627 |
- 35,7 % |
b) Des restructurations sans précédent
Soucieuse de rallier au plus vite son format futur,
l'Armée de terre a souhaité procéder entre 1997 et 1999,
c'est-à-dire pendant les trois premières années
d'application de la loi de programmation, à la restructuration de ses
forces. Les mesures relatives aux structures territoriales ainsi qu'au soutien
et à l'environnement des forces devraient intervenir à partir de
2000, pendant les deux dernières années de la programmation.
Ces restructurations s'ajouteront aux quelque 19 états-majors, 54
régiments et 86 organismes de soutien qui ont été dissous
entre 1993 et 1996.
Pour la seule année 1997, les restructurations ont impliqué la
dissolution de 20 régiments et de quelque 23 formations (centres
mobilisateurs, états-majors, organismes de formation, organismes de
soutien des forces...), ainsi que le transfert de deux régiments et de
cinq formations.
L'année 1998 pourrait marquer une pause dans les restructurations, si
étaient effectivement appliquées les mesures annoncées en
juillet 1996 (dissolution de cinq régiments des forces, de trois centres
mobilisateurs, de trois états-majors -dont celui de la FAR- et
organismes de formation, de cinq organismes de soutien, de douze centres
d'instruction de préparation militaire et de six autres formations.).
La tranche 1999 des restructurations concernerait la dissolution de douze
régiments des forces, de trois états-majors -parmi lesquels celui
de la lère Division blindée-, de deux organismes de soutien, de
huit centres mobilisateurs et de huit autres formations.
Les dissolutions prévues en 1997, 1998 et 1999 conduiront donc à
la dissolution de :
- 37 régiments des forces,
- 11 états-majors et organismes de formation,
- 14 centres mobilisateurs,
- 18 organismes de soutien,
- 18 autres formations,
- 12 centres d'instruction de préparation militaire
3(
*
)
,
soit un total assez impressionnant de
110 formations et organismes de
l'Armée de terre
,
qui ne prend pas en compte les quelque dix
mesures de transfert qui seront appliquées entre 1997 et 1999.
Votre rapporteur souhaite ici rappeler
l'épreuve morale que constitue
la dissolution d'un régiment
, auquel les personnels sont toujours
très attachés. Il faut prendre la mesure de cette épreuve
pour véritablement comprendre ce que signifient les réformes en
cours pour les personnels qui les vivent.
3. La "refondation" de l'Armée de terre
La professionnalisation se traduira par une véritable révolution dans la gestion des effectifs de l'Armée de terre. L'augmentation des effectifs de militaires d'active prévue entre 1996 et 2002 (+ 27,6 %) recouvre une diminution nette du nombre d'officiers (- 7,9 %) et de sous-officiers (- 11 %), et une augmentation considérable (+ 120 %) du nombre de militaires du rang engagés. La disparition du service national obligatoire induira, en revanche, une baisse de - 41,4 % des effectifs militaires, que l'apport des personnels civils (+ 6,4 %) permettra de ramener à - 35,7 %.
a) L'importance des militaires du rang engagés dans le processus de professionnalisation
La nécessité de procéder au
doublement
des effectifs de militaires du rang engagés pendant la période
1996-2002
pose trois séries de difficultés, par ailleurs
liées entre elles :
-
augmenter substantiellement les recrutements
, de manière
à atteindre un accroissement annuel net de plus de 6 000 personnes,
ce qui représente un volume annuel de recrutements de l'ordre de
10 000 EVAT, compte tenu d'un volume de départs compris entre 4 000
et 5 000 engagés pendant la période 1986-1995 et de 6 695 en 1996
: ce volume doit être rapproché des 4 000 à 5 000
EVAT qui se sont engagés entre 1986 et 1995 pour souligner l'ampleur de
l'effort de recrutement à effectuer ;
- prévoir une hausse des moyens devant être consacrés
à la
reconversion des EVAT dans la vie civile,
car les flux
annuels de départs d'EVAT augmenteront parallèlement aux
effectifs de militaires du rang engagés ;
-
aménager le cursus des engagés
,
afin d'attirer
vers ce type de carrière militaire des personnels de qualité,
susceptibles de faire gagner par l'Armée de terre le pari de la
professionnalisation.
(1) La question du recrutement d'un effectif sensiblement accru d'EVAT
Le tableau ci-après montre la part dominante du recrutement ultérieur (à partir du service national) dans le recrutement des EVAT depuis 1989, par rapport au recrutement initial, effectué à partir du secteur civil.
Recrutement des EVAT depuis 1989
1986 |
1987 |
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
|
Recrutement initial |
3 847 |
3 000 |
2 571 |
2 269 |
2 380 |
2 155 |
2 263 |
2 342 |
1 930 |
2 566 |
2 602 |
Recrutement ultérieur |
836 |
1 125 |
1 514 |
2 774 |
2 710 |
2 095 |
1 480 |
1 765 |
1 218 |
2 369 |
4 093 |
Total |
4 683 |
4 125 |
4 085 |
5 043 |
5 090 |
4 295 |
3 743 |
4 107 |
3 148 |
4 935 |
6 695 |
Part du recrutement ultérieur |
17,8% |
27,2% |
37% |
55 % |
53,2% |
49,3% |
39,5% |
42,9% |
38,6 % |
48 % |
61,1% |
En 1996, la part du recrutement ultérieur a
été la plus importante jamais observée depuis dix ans.
Cette constatation impose, dans la perspective de la disparition du service
national, l'élaboration d'une
stratégie de recrutement
adaptée à l'obligation d'attirer vers ce type d'engagement des
jeunes issus du secteur civil
, qui n'auront eu d'autre contact avec
l'armée que l'"appel de préparation à la défense"
créé par la loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant
réforme du service national. Les actions de communication entreprises en
1997 par l'Armée de terre doivent donc être poursuivies, et il
conviendra de concevoir l'"appel de préparation à la
défense" de manière à faire connaître aux jeunes, et
à leur présenter de manière attractive, les perspectives
offertes par un engagement dans l'Armée de terre.
La
féminisation des EVAT
, jusqu'à
10 % des effectifs de
cette catégorie
, constitue une perspective d'autant plus pertinente
en vue d'augmenter les recrutements d'EVAT, que le personnel féminin est
généralement considéré comme une ressource de
qualité. Le recours à ce vivier de recrutement appelle
néanmoins une gestion délicate des effectifs féminins, ce
dont il convient d'avoir d'ores-et-déjà conscience.
Par ailleurs,
l'implication des
régiments
dans le recrutement
des militaires du rang engagés
, inspiré de la méthode
suivie au Royaume-Uni, devrait permettre de renforcer les liens entre les
régiments et les bassins d'emploi dans lesquels ils se situent. Cette
évolution pourrait, à terme, contribuer à créer des
relations nouvelles entre le secteur militaire et le milieu civil qui constitue
son environnement et, ce faisant, participer à l'instauration d'un
lien inédit entre l'armée et la Nation
.
(2) La définition d'un cursus plus attractif, cohérent avec les impératifs de la professionnalisation
Le cursus désormais proposé aux EVAT devrait
conduire à l'apparition d'une véritable catégorie de
personnel, comme celles des officiers et sous-officiers. Le nouveau cursus se
fonde sur deux types de carrière distincts, qui se substitueront au
cursus élaboré en 1986. Celui-ci repose, rappelons le, sur le
principe du contrat long (jusqu'à 15 ans de service, voire 22 ans en cas
de réussite aux certificats militaires conditionnant l'accès aux
grades requis), ou du contrat court de 3 à 5 ans.
Les
nouvelles carrières courtes,
conçues dans le cadre de
la professionnalisation, pourront durer jusqu'à onze ans, quel que soit
le grade obtenu par les intéressés. Les personnels
concernés seront principalement affectés à des missions
opérationnelles. Ces carrières courtes pourront aussi être
conçues comme une première phase de la carrière des
engagés.
Cette première phase sera susceptible de déboucher, pour les
caporaux-chefs, sur des
carrières longues
(entre onze et
vingt-deux ans). Celles-ci offriront des possibilités de
mobilité professionnelle
aux EVAT, ce qui ne sera pas le cas des
carrières courtes. La diversification des itinéraires
professionnels des militaires du rang engagés pourrait ainsi passer,
dans cette seconde phase de leur carrière, par la succession de
fonctions opérationnelles projetables, puis de fonctions base ou soutien.
Ce nouveau cursus repose sur la
volonté d'ouvrir les carrières
longues à un plus grand nombre d'EVAT
, essentiellement par
l'assouplissement des conditions d'avancement.
Ainsi l'accès aux
carrières les plus longues sera-t-il subordonné à la
réussite au CT1 (certificat technique du ler degré), au lieu du
CAT2 (certificat d'aptitude technique du 2e degré), en vigueur dans
l'ancien cursus, et critiqué pour son excessive
sélectivité. Parallèlement seront
privilégiées les possibilités de
promotion vers le
corps des sous-officiers
: 50 % de ces derniers seront, à terme,
issus de la catégorie des EVAT.
(3) Un effort nécessaire en faveur de la reconversion des EVAT
- Le
dispositif d'aide à la reconversion
ouvert
aux militaires du rang engagés,
à partir de quatre
années de service
, repose sur :
- la participation à des sessions d'orientation approfondies et à
des sessions de technique de recherche d'emploi,
- la préparation aux examens d'accès aux emplois
réservés,
- l'inscription à des cours par correspondance destinés à
leur insertion professionnelle (préparation aux concours de la fonction
publique, remise à niveau...),
- la participation à un stage de formation professionnelle en milieu
professionnel et civil (type Fontenay-le-Comte).
Les EVAT ont aussi accès, sous réserve de satisfaire aux
conditions d'ancienneté exigées, à des
congés de
reconversion sous statut militaire
, dont la durée peut être
comprise entre six et douze mois.
Le budget devant être consacré à la
reconversion des
EVAT
a été évalué à
335 millions de
francs par an
, soit un coût estimé à 144 000
francs par intéressé, sur la base des hypothèses suivantes
:
- durée moyenne des congés de reconversion de 6 mois,
- effectif annuel de 2 330 personnes.
Le flux annuel de départs d'EVAT susceptible d'intervenir quand la
professionnalisation sera achevée n'a pas fait, à ce jour,
l'objet d'évaluation précise. Il est plus que probable que cette
dotation de 334 millions de francs devra être augmentée pour
financer la reconversion de la totalité des personnels engagés
ayant vocation à bénéficier de ce dispositif.
Mentionnons aussi que la loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant
réforme du service national, en ouvrant aux
futurs volontaires du
service national
ayant effectué un volontariat militaire les
mêmes droits que les personnels engagés et de carrière
en matière de reconversion
, contribuera certainement à
alourdir le coût de ce dispositif dans des proportions encore
difficilement évaluables.
b) Officiers et sous-officiers
Les effectifs des cadres de l'Armée de terre devront
diminuer dans la perspective de la professionnalisation (- 7,9 % pour les
officiers, et - 11 % pour les sous-officiers), ce qui impose la suppression
annuelle, entre 1997 et 2002, de quelque 233 postes d'officiers et de 1 000
postes de sous-officiers.
Le nombre des départs volontaires régulièrement
enregistrés devrait permettre de maintenir le volume annuel de
recrutement dans les proportions actuellement observées, qu'il s'agisse
du recrutement direct, à partir des écoles, ou de la promotion
interne.
(1) Les perspectives d'évolution du corps des officiers
- Le volume annuel de recrutement est de l'ordre de 600 officiers par an, ainsi répartis entre les trois filières de recrutement des officiers : direct, semi-direct (ORSA...) et issus du rang.
Recrutement des officiers de l'Armée de terre depuis 1987
Filière de recrutement |
1987 |
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997* |
1998* |
Direct(dont St-Cyr) |
181 |
186 |
181 |
208 |
203 |
197 |
194 |
189 |
198 |
195 |
198 |
193 |
Semi-direct (dont EMIA...) |
339 |
347 |
348 |
321 |
311 |
309 |
307 |
313 |
308 |
308 |
285 |
263 |
Rang |
147 |
160 |
147 |
149 |
151 |
147 |
148 |
146 |
125 |
110 |
120 |
110 |
TOTAL |
667 |
693 |
676 |
678 |
665 |
653 |
649 |
648 |
631 |
613 |
603 |
566 |
* (prévisions) |
- Le
maintien d'un niveau soutenu de recrutement dans le
corps des officiers de l'Armée de terre
vise notamment à
limiter le vieillissement de cette population. Cet objectif est compatible avec
la suppression de 1 380 postes d'officiers entre 1997 et 2002
,
prévue par la loi de programmation
.
En effet, la loi n° 96-1111 du 19 décembre 1996 relative aux
mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la
professionnalisation et, plus particulièrement, l'attribution de
pécules,
auxquels un budget global de 239 millions de francs sera
consacré en 1997, devrait avoir pour conséquence
d'augmenter
le nombre
de départs volontaires d'officiers et de
sous-officiers,
et de respecter ainsi les objectifs de la loi de
programmation.
En 1997, l'attribution des pécules financera le départ
anticipé de quelque 127 officiers (14 colonels, 84 lieutenants-colonels
et 29 capitaines), ce qui devrait permettre, cumulé aux autres motifs de
départ, un volume total compatible avec les objectifs de la
programmation (qui portent, rappelons le, sur la suppression annuelle de 233
postes d'officiers). Notons que le budget consacré aux pécules
des cadres de l'Armée de terre augmentera de
120 millions de
francs en 1998
, ce qui permettra le départ volontaire d'un effectif
accru d'officiers.
Les possibilités offertes aux officiers par le statut
général des militaires afin de
favoriser leur deuxième
carrière
concernent, par ailleurs :
. l'institution d'un congé de conversion d'une durée de six mois,
éventuellement prolongé pendant six mois,
. l'aide à la création ou à la reprise d'entreprises
(protocole d'accord ministère de la Défense/BNP),
. la participation à des stages de formation dont le financement est au
moins partiellement assuré par le ministère de la Défense,
. la possibilité d'effectuer des périodes d'essai en entreprise
en position d'activité, c'est-à-dire en étant
rémunéré par le ministère de la Défense,
. l'ouverture de postes dans des administrations civiles.
- Le recrutement des officiers, à la différence de celui des
EVAT, est relativement
peu dépendant du service national, à
l'exception du recrutement des ORSA
(officiers de réserve en
situation d'activité), qui constituent une catégorie
spécifique, dont la durée de service est limitée à
20 ans.
En 1997, le recrutement d'
ORSA
est estimé à quelque
350 officiers, soit plus de la moitié de l'ensemble des
recrutements d'officiers effectués en 1997. A titre de comparaison,
l'école spéciale militaire de St-Cyr a représenté
26,2 % du volume total des recrutements d'officiers en 1997.
La part importante de la catégorie des ORSA dans le recrutement des
officiers des force terrestres impose une
réflexion sur le
remplacement de cette ressource de très bon niveau,
qui va
progressivement disparaître en même temps que la ressource
appelée, et dont la succession ne pourra être assumée
intégralement par du personnel civil ou par d'autres personnels de
carrière. La création d'un
nouveau statut d'officier
contractuel,
actuellement à l'étude, pourrait constituer une
solution envisageable au problème plus particulier que constitue le
recrutement de successeurs des ORSA spécialistes.
- Enfin, et de manière générale, la réduction du
format et les restructurations de l'Armée de terre conduiront à
une
diminution sensible des perspectives de commandement pour les
officiers,
et, partant, à une
évolution assez nette du
métier des armes
, liée à une
diversification
d'ores et déjà prévisible des postes de
responsabilité
(ressources humaines, relations internationales,
communications...). Le cursus des officiers pourra donc ne plus passer par des
périodes de commandement. Dans cette perspective, une politique de
" seconde partie de carrière " des officiers a
été récemment élaborée, de manière
à ne plus faire nécessairement des périodes de
commandement le moment fort de la carrière d'un officier qu'il est
encore actuellement.
Cette évolution pose la question du
profil à venir des
officiers
, et de la possibilité de maintenir l'attrait
présenté par cette carrière, pour ceux qu'intéresse
avant tout la spécificité du métier des armes.
(2) Difficultés spécifiques au corps des sous-officiers
- La réforme des limites d'âge instaurée
par la loi n° 91-1241 du 13 décembre 1991 a encouragé les
sous-officiers à reporter leur départ des armées, et a
donc eu pour conséquence un
vieillissement du corps des
sous-officiers.
Une situation de
sureffectifs
a
résulté des effets conjugués de la loi
précitée, de la mise en oeuvre du protocole Durafour, et de la
situation du marché du travail, ces divers facteurs combinés
décourageant de nombreux sous-officiers de tenter un retour
anticipé à la vie civile.
- Le
plan de résorption
mis en oeuvre en 1994 afin de limiter ce
sureffectif a eu pour objectif une
sensible réduction du
recrutement
, dont les conditions ont été
considérablement durcies. Le nombre de sous-officiers recrutés a
ainsi diminué de moitié entre 1994 (2 809) et 1995 (1 480).
Cette baisse du recrutement est à l'origine de
classes creuses chez
les jeunes sous-officiers
, et donc d'une pyramide très
déséquilibrée. L'Armée de terre a prévu de
reprendre un niveau équilibré de recrutement à partir de
1998.
- Le tableau ci-après montre que la reprise des objectifs de recrutement
de sous-officiers à partir de 1998, qui pourraient atteindre un flux
annuel de 2 500 personnels, devrait assurer une part
équilibrée aux deux filières (recrutement effectué
à partir des écoles, et recrutement à partir des corps de
troupe). La reprise des recrutements vise, en effet,
le nécessaire
rajeunissement de cette catégorie
, et s'inscrit dans le souci
d'améliorer le taux d'encadrement des forces terrestres.
Recrutement des sous-officiers depuis 1987
Recrutement |
1987 |
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997* |
1998* |
Voie école |
2 189 |
2 230 |
1 980 |
2 020 |
1 945 |
2 094 |
1 998 |
1 932 |
890 |
909 |
970 |
1 284 |
Voie corps de troupe |
1 145 |
1 765 |
1 510 |
1595 |
1 520 |
1 357 |
824 |
877 |
590 |
730 |
790 |
1040 |
TOTAL |
3 334 |
3 995 |
3 490 |
3 615 |
3 465 |
3 451 |
2 822 |
2809 |
1 480 |
1639 |
1 760 |
2 324 |
*prévisions
- Les objectifs définis pendant la période de transition à
l'égard des sous-officiers comprennent non seulement la
résorption du sureffectif des sous-officiers ci-dessus
évoquée, mais aussi la
déflation annuelle de quelque 1
000 postes
, induite par la loi de programmation. Celle-ci prévoit,
rappelons-le, que les effectifs de sous-officiers devront passer de 56 644 en
1996 à 50 365 en 2002.
L'obligation de réduire les effectifs de sous-officiers
parallèlement à la reprise des recrutements
passe par le
succès des
mesures
d'incitation au départ
élaborées dans le cadre de la loi n° 96-1111 du 16 janvier
1996.
En 1996, le
nombre de départs volontaires
a été de
816 (716 en 1995) soit, compte tenu des autres facteurs de départs
(limite d'âge, non renouvellement des contrats...), un volume total de
1 313 départs, avant qu'intervienne le dispositif des
pécules créés par la loi du 16 décembre 1996.
Ce volume représente la moitié du nombre de départs
enregistrés en 1990 (2 707) et 1991 (2 798).
Notons, à cet égard, que les pécules créés
par la loi n° 96-1111 du 19 décembre 1996 ont concerné,
à eux seuls, en 1997,
1 062 sous-officiers
(254 majors, 651
adjudants-chefs et 157 adjudants), ce qui représente un effectif
considérable par rapport aux
1 313 départs enregistrés,
en 1996, avant la mise en oeuvre du dispositif des pécules
.
Celui-ci devrait donc permettre de procéder sans grandes
difficultés aux déflations prévues par la loi de
programmation pour la catégorie des sous-officiers. Le dispositif des
pécules a été conçu, en effet, de manière
assez attractive, puisqu'il consiste à attribuer à ceux qui
satisfont aux conditions exigées (se trouver à plus de trois ans
de la limite d'âge de son grade, et justifier d'une ancienneté de
vingt-cinq ans pour les officiers, et de quinze ans pour les officiers), une
indemnité de départ non imposable pouvant représenter, en
théorie, jusqu'à quarante-cinq mois de la solde indiciaire brute
pour les personnels se trouvant à dix ans au moins de leur limite
d'âge. Le fait que l'on ait constaté, en 1997, un
phénomène de " file d'attente " dans la
détermination des bénéficiaires de pécules, puisque
l'on a enregistré trois candidats au moins pour un pécule inscrit
au budget de l'Armée de terre, montre que le système des
pécules avait été défini sur des bases
incontestablement attractives. Mais il est probable que, dans les faits, le
dispositif n'ait pas répondu aux espoirs suscités
ab
initio
, les pécules ayant été attribués, pour
des raisons de pyramidage, aux personnels n'ayant pas nécessairement
droit aux dotations les plus élevées.
(3) Vers l'amélioration du taux d'encadrement de l'Armée de terre
La diminution des effectifs de cadres de carrière et
sous contrat inscrite dans la loi de programmation (- 10,3 % entre 1996 et
2002), jointe à l'accroissement significatif du nombre de militaires du
rang engagés, permettra d'améliorer le taux d'encadrement de
l'Armée de terre française, conformément à ce
qu'implique notamment le développement de la projection.
Le taux d'encadrement de l'Armée de terre s'établirait ainsi
à 49 % en 2002, soit un ratio équivalant à celui des
forces terrestres britanniques (50 %), mais encore nettement
inférieur à celui des forces américaines (55 %). Notons
que l'actuel taux d'encadrement (31 % en 1996) situe l'Armée de terre
française en-deçà du taux de son équivalent
allemand (36 %), organisée pourtant également en fonction du
principe de conscription.
c) L'augmentation des effectifs civils
La diminution du format des forces terrestres et la
professionnalisation obligent, de manière générale,
à
réserver les emplois opérationnels aux
militaires
, et à
affecter les personnels civils aux fonctions de
soutien
-gestion du personnel, gestion budgétaire et comptable,
marchés, informatique, maintenance, formation, affaires juridiques et
contentieux.
Les personnels civils devraient être affectés principalement
à la composante non projetable de l'Armée de terre, et, plus
particulièrement, dans la chaîne territoriale de commandement.
Pour une part plus modeste, les personnels civils seront affectés dans
les régiments des forces, où ils tiendront des fonctions
" sédentaires ", de nature technique ou administrative,
compatibles avec leur statut, qui devrait exclure toute participation à
des opérations extérieures.
Chaque régiment pourrait ainsi intégrer 30 à 40 civils en
moyenne. Les affectations se feront essentiellement à partir des
effectifs rendus disponibles par les dissolutions et restructurations de divers
organismes de la défense, et notamment de la Délégation
générale pour l'armement. Les
redéploiements internes
au ministère de la Défense
, en vue de résorber le
sureffectif de la DGA, joueront donc un rôle majeur dans cette
évolution.
Les effectifs du ministère de la Défense compteront ainsi 19 % de
civils en 2002, au lieu de 14 % actuellement, ce qui recouvre la
création de 8 018 postes de personnels civils entre 1997 et 2003,
soit 1 710 pour l'Armée de terre, 1 653 pour l'Armée de l'air,
835 pour la Gendarmerie, 4 338 pour la Marine, et 1 514 pour les autres
services de la Défense " employeurs " de personnels civils.
Le service de santé, la Délégation générale
pour l'armement et le service des essences perdront, en revanche, 2 032 postes
de personnels civils entre 1997 et 2002. Au terme de la loi de programmation,
c'est l'Armée de terre qui emploiera la plus grande part des personnels
civils de la Défense. En effet, en 2002, 40,9 % des effectifs civils du
ministère de la Défense seront affectés aux forces
terrestres (13,9 % seront employés par la Marine ; 8,11 % par
l'Armée de l'air ; 2,72 % par la Gendarmerie ; 7 % par le service de
santé ; et 15,8 % par la Délégation
générale pour l'armement).
En revanche, la part des civils dans les effectifs de l'Armée de terre
(19,7 %) sera, en 2002, légèrement inférieure à la
proportion constatée dans la Marine (20,5 %). Les personnels civils
représenteront en 2002, par ailleurs, 9,4 % des effectifs de
l'Armée de l'air et 2,3 % des effectifs de la Gendarmerie.
d) L'indispensable apport des réserves à l'Armée de terre professionnalisée
Le passage à une armée professionnelle implique
l'abandon du système de réserves issu de la conscription, assis
sur des effectifs surdimensionnés (195 000 hommes), que la contrainte
budgétaire ne permet plus désormais ni d'équiper, ni
d'entraîner.
La
diminution du format des réserves
est donc le corollaire du
"reformatage" des armées prévu par la loi de programmation
1997-2002. Celle-ci a conduit à une distinction entre les 30 000 hommes
pour l'Armée de terre (dont 15 000 cadres) de la
première
réserve,
et les 100 000 réservistes susceptibles de renforcer
les armées en cas de besoin. La
deuxième réserve
n'aura pas besoin, en effet, d'être financée ni
gérée en permanence. Sa vocation pourra être de contribuer
au
maintien et au renouvellement du lien armées-Nation.
L'une des
pistes à explorer pourrait être de faire participer ces
réservistes à l'" enseignement des principes de la
défense " créé dans le cadre scolaire par la loi
portant réforme du service national.
La vocation de la première réserve sera de constituer des
" militaires à temps partiel ",
susceptibles de
compléter et renforcer les unités d'active, en occupant des
fonctions de spécialistes, en remplaçant les personnels d'active
engagés dans des opérations extérieures, et en tenant des
postes qu'il est désormais impossible ou peu opportun de maintenir en
permanence.
Le succès de la réforme des réserves est
subordonné, dans le contexte issu de la disparition du service national,
à la
possibilité de recruter et de fidéliser des
réservistes qui n'auront pas eu de contact privilégié avec
les armées, par exemple en accomplissant un volontariat militaire.
L'autre hypothèque tient à la
définition d'un
statut suffisamment favorable et attractif
pour permettre
véritablement aux réservistes de participer à la vie
militaire, sans négliger leurs contraintes professionnelles. En effet,
l'échec relatif de la formule des " engagements spéciaux
dans la réserve " issue de la loi du 4 janvier 1993 -les quelque 8
000 engagements souscrits ne représentant qu'un modeste cinquième
des objectifs définis lors de l'élaboration de ladite loi-
illustre les difficultés liées
au manque naturel de
disponibilité des nombreux candidats à la réserve
,
pour
d'imparables motifs d'ordre professionnel
. Il convient donc
d'espérer que le projet de loi relatif aux réserves, qui pourrait
être soumis au Parlement en 1998, parvienne à
concilier les
intérêts des employeurs, des candidats à la réserve
et des armées
pour bâtir les forces de réserve sans
lesquelles les armées professionnelles ne sauraient mener à bien
leurs missions.
4. Une organisation inédite pour l'Armée de terre
Le modèle d'organisation de l'Armée de terre
élaboré en février 1997, un an après l'annonce de
la professionnalisation des armées par le Président de la
République, traduit la priorité désormais assignée
à la projection, dans un contexte de contrainte budgétaire qui
devrait perdurer.
Cette nouvelle organisation s'appuie sur la constatation
que le nouveau "contrat opérationnel" de l'Armée de terre, qui
repose sur la nécessité de répondre à des crises
imprévisibles à l'avance par la projection, sur des
théâtres d'opération plus ou moins éloignés,
de forces de volumes variables, n'impose plus le maintien, en temps de paix,
d'une organisation militaire conçue pour temps de guerre.
Le plan élaboré au début de 1997 se fonde donc sur les
principes de
modularité
et
d'économie de moyens
. Il
conduira à la création de deux grandes chaînes de
commandement distinctes.
a) Les principes : modularité et économie de moyens 4( * )
- Au système des grandes unités
organisées dès le temps de paix (Corps d'armée et
divisions) se substituera un
dispositif au format réduit
, assis
sur la
dissociation entre des structures opérationnelles de
circonstance et l'organisation permanente
. Les formations projetables
seront regroupées au sein d'un ensemble unique, permettant la mise sur
pied, à partir des structures du temps de paix, des états-majors
et des forces requis par les différentes opérations
envisagées. Dans cette perspective, c'est le système de la
Brigade qui a été retenu, ainsi que celui des régiments.
Au sein de ceux-ci, la modularité sera assurée par la distinction
entre, d'une part, la partie " mission majeure projetable ",
composée de l'unité de combat et d'appui et de l'unité de
commandement et de logistique, et, d'autre part, la partie
" base ",
constituée d'une unité de base et d'instruction et d'une
unité de réserve.
Les onze Brigades, de dimensions variables (entre 5 000 et 10 000 hommes),
seront constituées à partir de démembrements des neuf
divisions appelées à disparaître prochainement. Elles
auront toutes vocation à la projection, et seront responsables de
l'entraînement opérationnel des régiments qui leur seront
subordonnés.
Les fonctions administratives seront, par ailleurs, en temps de paix,
confiées à une chaîne régionale de commandement,
assurant le lien entre l'état-major de l'Armée de terre et les
régiments.
- L'économie de moyens, imparable dans le contexte budgétaire
actuel, sera réalisée non seulement par la
concentration
des forces terrestres
(89 régiments en 2002 au lieu de 123
actuellement), mais aussi par la
diminution du nombre
d'états-majors
. Ainsi les cinq états-majors prévus
dans la chaîne régionale de commandement se substitueront aux neuf
circonscriptions militaires de défense et aux états-majors des
quatre régions militaires actuelles. Dans cette perspective, les
compétences de la chaîne régionale seront
élargies
, notamment par la déconcentration d'une part des
attributions actuelles de l'état-major de l'Armée de terre.
b) L'organisation du commandement en deux chaînes distinctes
L'organisation du commandement sera assise sur deux
chaînes séparées : la chaîne territoriale et la
chaîne des forces.
- La
chaîne territoriale,
fixe et non projetable, sera
constituée de
cinq régions militaires,
destinées
à remplacer les neuf circonscriptions militaires de défense. Les
états-majors régionaux seront situés à Paris,
Rennes, Bordeaux, Lyon et Metz. Ils assureront le soutien matériel et
administratif de l'Armée de terre, jouant ainsi le rôle de
" chaîne nourricière ".
- La
chaîne des forces
relèvera du
Commandement de la
force d'action terrestre (CFAT
) implanté à Lille et
activé à partir de 1998, simultanément à la
dissolution des états-majors de la FAR et du 3e Corps. Le CFAT aura pour
mission d'assurer la
préparation opérationnelle des
états-majors et des forces projetables
, ainsi que la mise en oeuvre
de PC de théâtre multinational (de 15 000 à 20 000 hommes),
ou de PC de corps d'armée de classe OTAN (entre 50 000 et 70 000 hommes).
B. LA PROFESSIONNALISATION À L'ÉPREUVE DES FAITS
Si le bilan de 1997, première étape de la mise en oeuvre de la professionnalisation, paraît globalement positif, et si les perspectives pour 1998 permettent d'envisager que soient respectés les objectifs définis pour la deuxième année de la programmation 1997-2002, des éléments de vulnérabilité sont d'ores et déjà prévisibles à terme rapproché, notamment du fait des options retenues dans le cadre de la loi portant réforme du service national, telle que l'a adoptée l'Assemblée nationale.
1. 1997-1998 : des évolutions conformes à la loi de programmation
a) 1997, l'an I de la professionnalisation
En 1997, les effectifs de l'Armée de terre ont
évolué conformément aux objectifs définis par la
loi de programmation. C'est ainsi que 5 875 postes d'EVAT ont été
créés, de même que 330 emplois civils.
21 280 postes d'appelés ont, par ailleurs, été
supprimés, l'essentiel (66,5 %) de la déflation des effectifs
appelés ayant incombé à l'Armée de terre.
Les postes de cadres supprimés ont concerné 219 emplois
d'officiers, et 1 036 postes de sous-officiers. Dans ce contexte de
réduction des effectifs, une légère reprise du nombre des
recrutements de sous-officiers a été rendue possible par les
pécules d'incitation au départ, tandis qu'une baisse des
recrutements d'officiers était constatée en 1997 (voir supra,
A-3).
b) Les effectifs de l'Armée de terre en 1998
En 1998, la composition de l'Armée de terre se
rapprochera de la maquette définie par la loi de programmation militaire
à l'échéance de 2002.
Le
nombre de postes supprimés
(229 officiers, 1 153
sous-officiers, 21 249 appelés) est conforme à ce qu'implique le
respect de la " tranche " 1998 de la professionnalisation,
de
même que le
nombre d'emplois créés
(344 civils et 5
879 militaires du rang engagés), si l'on se réfère aux
effectifs budgétaires prévus pour 1998.
Effectifs budgétaires 1997-1998
1997 |
1998 |
cible 2002 |
|
Officiers |
17 242 |
17 013 |
16080 |
Sous-officiers |
55 608 |
54 455 |
50 365 |
EVAT |
36 077 |
41 956 |
66 681 |
Sous-total militaires d'active |
108 927 |
113 424 |
133 126 |
Composante Service national |
111 039(appelés) |
89 790(appelés) |
5 500(volontaires) |
Sous-total militaires |
219 966 |
203 214 |
138 626 |
Civils |
32 276 |
32 620 |
34 000 |
TOTAL |
252 242 |
235 834 |
172 627 |
2. Des éléments de vulnérabilité d'ores et déjà perceptibles dans le processus de professionnalisation
En dépit du respect des objectifs d'effectifs prescrits par la loi de programmation, on peut à ce jour déceler trois failles susceptibles d'altérer les conditions de la professionnalisation de l'Armée de terre. Il s'agit des difficultés qui caractérisent le recrutement des civils, des hésitations qui paraissent affecter la réforme des forces de réserve et, enfin, des contraintes liées à l'application de la réforme du service national
a) Des effectifs civils encore théoriques
En dépit de la
création effective des postes
budgétaires correspondant aux emplois civils prévus par la loi de
programmation
, la réalisation de la totalité de ces emplois
tarde à être effective. En effet, le principe retenu lors de
l'élaboration de la loi de programmation 1997-2002 consistait à
affecter au soutien des formations militaires des personnels civils rendus
disponibles par les restructurations des industries de défense et, plus
particulièrement, par le redimensionnement de la DGA. Il aurait
été regrettable de procéder au recrutement de nouveaux
personnels, alors que les restructurations allaient libérer des emplois,
et permettre des
redéploiements
au sein même du
ministère de la Défense.
Or, l'affectation de personnels civils aux régiments et
établissements de l'Armée de terre prend du temps, car ces
personnels ne sont pas, à la différence des personnels miliaires,
soumis à
l'obligation de mobilité géographique.
Les personnels civils constituent, dans la perspective de la
professionnalisation, une composante essentielle de l'Armée de terre,
dont la raison d'être est de permettre aux personnels militaires de se
consacrer aux missions projetables.
Il serait regrettable que des raisons
d'ordre statutaire conduisent, soit à alourdir le coût de la
professionnalisation, en rendant nécessaire le recrutement
ex
nihilo
des personnels civils supplémentaires prévus par la
loi de programmation (ou une proportion équivalente d'EVAT
destinés à occuper des postes de soutien), soit à
altérer les conditions de la professionnalisation, en privant
l'Armée de terre de personnels dont la contribution conditionne pourtant
l'aptitude des forces terrestres à remplir leur "contrat
opérationnel".
b) A quand l'élaboration d'un statut du réserviste adapté aux nouvelles missions des forces de réserve ?
L'insuffisance des moyens consacrés aux forces de
réserve introduit un deuxième doute dans la réalisation de
la professionnalisation. Il ne s'agit pas tant des crédits
budgétaires prévus pour 1998 (4 millions de francs
supplémentaires seront consacrés, dans le projet de budget pour
1998, à la rémunération des réservistes de
l'Armée de terre) que des atermoiements qui semblent caractériser
l'élaboration du projet de loi tant attendu, qui tirera les
conséquences de la professionnalisation sur le rôle et le
statut des réservistes au sein des armées
.
Le bilan de l'intégration des réservistes dans les unités
d'active est, à ce jour, globalement satisfaisant. Les interrogations
sur le statut des réservistes et sur les moyens susceptibles
d'être affectés aux rémunérations et à la
protection sociale des réservistes (les périodes ne sont, en
effet, pas prises en compte en vue de l'ouverture des droits à pension
de retraite) ne semblent en revanche pas tranchées. Or les forces de
réserve sont appelées à jouer un rôle majeur dans la
future Armée de terre professionnalisée. Il importe donc de
définir prochainement les contours législatifs du statut des
réservistes, et d'affecter aux forces de réserve des moyens
adaptés à leurs nouvelles missions.
c) Les contraintes liées à la réforme du service national
La loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national pose deux types de problèmes tenant, d'une part, au coût à venir du volontariat dans les armées, et, d'autre part, aux conséquences, sur la conduite de la période de transition, des reports d'incorporation destinés aux titulaires d'un emploi.
(1) Le coût du volontariat dans les armées
Fondé sur les mêmes principes que les
" emplois-jeunes ", le futur volontariat dans les armées
induira un coût sensiblement plus élevé que le volontariat
auquel renvoyait le projet de loi élaboré par le
précédent gouvernement.
Les futurs volontaires seront en effet assimilés aux titulaires
d'emplois-jeunes et, à ce titre, percevront une
rémunération assise sur le SMIC, comprenant en outre
l'hébergement et l'alimentation. Sur le titre III de l'Armée de
terre pèsera donc la rémunération de 5 500 volontaires,
dont le coût sera à peine moins élevé que celui des
EVAT. Certes, on peut objecter à cette remarque que la loi de
programmation 1997-2002 avait, dans l'attente de la loi portant réforme
du service national, été définie sur la base d'un
volontariat rémunéré au SMIC, et que le coût du
futur volontariat a été pris en compte dans la
détermination des moyens de fonctionnement de l'Armée de terre
pendant la période 1997-2002.
Il aurait néanmoins été probablement plus prudent de
prévoir pour les futurs volontaires une rémunération plus
conforme à la logique du service national qui implique, de la part du
jeune, l'idée de service rendu à la collectivité et donc,
par conséquent, une certaine générosité n'appelant
pas nécessairement une rémunération proportionnelle aux
efforts fournis.
L'argument selon lequel une indemnité plus modeste n'aurait pas permis
d'attirer une ressource suffisante et de qualité ne paraît pas
nécessairement recevable. En effet, les craintes exprimées
à l'égard de l'attractivité des pécules ont conduit
à définir ceux-ci sur des bases suffisamment
généreuses pour que l'on enregistre actuellement, dans
l'Armée de terre, trois demandes au moins pour un pécule. Le
même raisonnement appliqué au volontariat militaire incite
à penser que celui-ci n'aurait pas nécessairement moins de
succès si la rémunération avait été
fixée à un niveau moins élevé, permettant, par
exemple, d'allouer des moyens supplémentaires à l'activité
des forces (voir ci-dessous II).
(2) L'incidence des nouveaux reports d'incorporation sur la période de transition
L'article 3 de la loi n° 97-1019 portant réforme
du servie national a pour objet d'insérer, dans le code du service
national qui s'appliquera jusqu'en 2002, un nouvel article L. 5 bis A
créant une catégorie inédite de reports d'incorporation,
destinés aux jeunes gens titulaires d'un emploi. Rappelons que cette
disposition vise à attribuer un report d'incorporation, susceptible
d'être renouvelé, aux jeunes gens titulaires d'un
contrat
à durée indéterminée
. Cette disposition
pourrait permettre aux intéressés, par le biais de reports
successifs, d'échapper
de facto
au service national
jusqu'à l'extinction définitive de celui-ci.
Notons que, dans le cas des titulaires d'un
contrat à durée
déterminée
, les reports créés par le nouvel
article L 5 bis A du code du service national ont un effet plus limité,
puisqu'ils viennent à échéance avec le contrat de travail
du jeune homme incorporable.
L'article L 5 bis A du code du service national pourrait avoir
des conséquences très défavorables pour l'Armée de
terre. Celle-ci pourrait en effet subir, du fait de ces reports, un
" manque à gagner " compris, selon les infrormations
transmises à votre rapporteur, entre 12 000 et 16 000 appelés. Or
la transition vers l'armée professionnelle a été
bâtie, pour l'Armée de terre, sur un effectif
régulièrement décroissant d'appelés,
dont la
contribution à la défense nationale demeure importante
jusqu'à la suspension définitive du service national.
Tel qu'il est conçu, le dispositif des nouveaux reports d'incorporation
pose un problème d'
incertitude sur les contours de la ressource
incorporable.
Cette incertitude pourrait
affecter l'organisation de
l'Armée de terre, si celle-ci était obligée de subir une
évolution incontrôlée de sa ressource appelée
.
Dans ce contexte, les dispositions de l'article 3 de la loi du 28 octobre 1997
portant réforme du service national conduisent à envisager des
correctifs.
Ceux-ci pourraient reposer sur le
recrutement
supplémentaire d'un effectif de militaires du rang engagés
correspondant au coût des appelés soustraits par la nouvelle loi
aux ressources de l'Armée de terre.
Cette mesure n'est toutefois pas
neutre financièrement, car un EVAT a vocation à être pris
en compte par le titre III des armées plus longtemps qu'un
appelé.
Une autre mesure pourrait consister à
accélérer le
rythme des restructurations,
afin que l'Armée de terre puisse
rallier plus vite le format défini à l'échéance de
2002. Selon les informations transmises à votre rapporteur, 5 000
personnels environ pourraient être rendus disponibles par ces
restructurations anticipées (il pourrait s'agir de procéder,
dès 1998, à la tranche de restructurations annoncée pour
1999).
Cette solution induirait toutefois une charge budgétaire
supplémentaire non négligeable, du fait du coût des
changements de résidence des personnels militaires.
Les deux catégories de mesures susceptibles d'atténuer les
conséquences de la création de reports d'incorporation
destinés aux titulaires d'un contrat de travail soulignent l'incidence
budgétaire d'une mesure pourtant présentée, de
manière hâtive, comme de nature à susciter des
économies en matière de lutte contre le chômage...
L'alternative est donc la suivante :
- soit l'Armée de terre reçoit des moyens suffisants pour
compenser, au moins partiellement, le " manque à gagner " en
ressource appelée résultant de ces nouveaux reports,
- soit aucun des correctifs ci-dessus évoqués n'est
adopté, et les conditions de la professionnalisation de l'Armée
de terre seront affectées par d'ingérables incertitudes sur le
niveau de la ressource susceptible d'être incorporée. La
capacité de l'Armée de terre à remplir
l'intégralité de ses missions pendant la période de
transition pourrait, dans ce cas, être altérée.
C'est au gouvernement qu'il revient de donner un signal fort en faveur de la
professionnalisation, sauf à donner à penser qu'il ne souhaite
pas donner à cette réforme tous les moyens de réussir.
*
* *
II. LA DOTATION DE L'ARMÉE DE TERRE EN 1998
Le projet de budget de la défense
s'élèvera, en 1998, à 238,2 milliards de francs, contre
243,3 en LFI 1997, soit une diminution de 3,2 % en francs courants, qui atteint
4,6 % en francs constants, compte tenu de l'objectif gouvernemental de hausse
des prix pour 1998 (+ 1,4 %). Hors dépenses de pensions (soit
l'agrégat pertinent au regard des prescriptions de la loi de
programmation militaire), les crédits se montent à 184,7
milliards de francs, contre 190,9 en LFI 1997 (réduction de 3,3 % en
francs courants et de 4,7 % en francs constants).
Cette évolution d'ensemble négative affecte différemment
les dépenses ordinaires et les crédits d'équipement :
alors que les premières connaissent, hors dépenses de pensions,
une progression apparente de 1,5 %, limitée à 0,5 %
à structures constantes, les
crédits d'équipement
accusent, également à structures constantes, une chute de 8,7 %
par rapport à 1997 (soit 7,7 milliards de francs en moins) liée
à l' " encoche " perpétrée dans
l'application de la loi de programmation, sous prétexte de contribution
à l'effort général de réduction de dépenses
publiques.
En 1998, les crédits de l'Armée de terre représenteront
25,96 % de l'ensemble du budget de la défense, soit une proportion
stable par rapport à 1997 (25,74 %), qui atteste de la relative
uniformité des " coupes " pratiquées lors de la
préparation du budget. Les
47,946 milliards de francs
qui
constitueront la dotation de l'Armée de terre en 1998 se situeront en
effet, à l'instar du total du budget de la défense, en net
retrait par rapport aux moyens alloués en 1997 : - 2,3 % en francs
courants, et - 3,7 % en francs constants.
S'agissant des
dépenses ordinaires
, le taux d'évolution
s'établit à 2,3 % en francs courants et à
périmètre constant
5(
*
)
, soit
une
augmentation en francs constants
de 0,9 %.
Les crédits d'équipement,
a contrario,
sont en retrait
de 10,8 % par rapport à la dotation de 1997 et de 11 % par rapport
à ce qu'aurait dû être la deuxième annuité de
la loi de programmation
.
Un tel décalage n'est pas acceptable.
A. UN TITRE III PERMETTANT LA MISE EN OEUVRE DE L'ANNUITÉ 1998 DE LA PROFESSIONNALISATION
Il convient de rappeler l'ampleur des contraintes qui, pendant la période de transition, pèseront sur le titre III du budget de la défense et, au premier chef, sur celui de l'Armée de terre, avant d'aborder l'analyse des moyens inscrits dans le projet de budget pour 1998 au titre des dépenses ordinaires.
1. Un pari audacieux mais cohérent : réaliser la professionnalisation à titre III stable en francs constants
La loi de programmation 1997-2002 repose sur le pari de
procéder à la professionnalisation en stabilisant les
dépenses militaires.
L'objectif est donc de financer la professionnalisation, qui implique
inéluctablement une hausse des dépenses liées aux
rémunérations, sans pour autant faire dériver le titre
III. Il s'agit de couvrir l'augmentation des frais de
rémunérations et des charges sociales induites par le recours
à un effectif accru de professionnels, au moyen des économies
attendues de la réduction du format sur les dépenses de
fonctionnement.
La dotation consacrée aux rémunérations et aux charges
sociales de l'ensemble du Ministère de la Défense passera ainsi
de 77,7 milliards de francs en 1997 à 80,4 milliards de francs en 1998.
La part de cette dotation dans l'ensemble du titre III du budget de la
défense est, d'ores et déjà, passée de 74 % (en
1996) à 78 % (en 1998)
6(
*
)
.
D'où la nécessité, inscrite dans la loi de programmation,
de parvenir à réduire de quelque 20 % les crédits
consacrés au fonctionnement courant de l'ensemble du budget de la
défense. Entre 1997 et 1998, conformément à la dynamique
prévue par la programmation, ces crédits baisseront ainsi de
5 %, parallèlement à la diminution du format des
armées.
Les
contraintes budgétaires qui pèseront plus
particulièrement sur l'Armée de terre pendant la période
de transition
tiennent essentiellement à trois facteurs :
- c'est cette armée qui
assumera l'essentiel des mutations induites
par le passage de l'armée mixte vers l'armée professionnelle :
l'extinction rapide de la ressource appelée induira, en effet,
une diminution de 41,4 % des effectifs militaires des forces terrestres
entre 1996 et 2002 ;
- c'est elle, de même, qui
supportera la plus lourde part des
restructurations,
pour des raisons évidentes liées à
son
reformatage complet,
parallèlement à la suppression du
service militaire dans ses formes actuelles ;
- l'Armée de terre devra, enfin, pendant la période de
transition,
supporter les coûts induits par la professionnalisation
(rémunération d'un effectif croissant d'engagés),
et par les restructurations (
poursuite de l'entretien des emprises
libérées par les formations dissoutes ou
transférées, tant que ces immeubles ne seront pas vendus),
tout en continuant à faire face aux dépenses liées aux
structures d'une armée qui demeurera mixte jusqu'en 2002.
La conduite de la professionnalisation à titre III constant implique
donc, spécialement pour l'Armée de terre, sur laquelle
pèse l'essentiel de cette réforme, une
gestion
particulièrement rigoureuse des crédits de fonctionnement,
afin que les contraintes inhérentes à la période de
transition n'altèrent pas les capacités opérationnelles
des forces terrestres
2. Les crédits du titre III alloués à l'Armée de terre par le projet de budget sont conformes à la loi de programmation
La somme de 30,590 milliards de francs prévue au titre
III de l'Armée de terre par le projet de budget traduit une augmentation
de 980 millions de francs par rapport à la LFI 1997.
Cette évolution d'ensemble résulte :
- d'une augmentation des dépenses de rémunérations et
charges sociales de 1,071 milliard de francs qui, en progression de 4,8 %,
atteignent 23,5 milliards,
- de l'inscription au budget de l'Armée de terre d'une dotation de 296
millions de francs pour les pécules d'incitation au départ,
- d'une diminution des autres postes (alimentation, fonctionnement, entretien
programmé des matériels) de 385 millions (- 5,4 %),
parallèlement au resserrement du format.
Le tableau ci-après détaille ces différents
mouvements :
Évolution du titre III de l'Armée de terre
(1997-1998)
(en millions francs)
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Evolution 1998/1997 |
Part dans l'ensemble du titre III en 1998 |
|
Chapitres 31-31, 31-32 et
|
20 391 |
21 372 |
+ 4,8 % |
69,9 % |
Chapitre 31-96 : pécules |
(2) |
296 |
- |
0,9 % |
Chapitres 33-90 et 33-91 : charges sociales payées par l'Etat |
2 057 |
2 147 |
+ 4,3 % |
7 % |
Sous-total rémunérations + charges sociales |
22 449 |
23 816 |
+ 6 % |
77,8 % |
Chapitre 34-10 : alimentation |
1 550 |
1 415 |
- 8,7 % |
4,6 % |
Chapitre 34-04 : fonctionnement |
5 375 |
5 135 |
- 4,4 % |
16,7 % |
Chapitre 34-20 : entretien programmé des matériels |
228 |
218 |
- 4,3 % |
0,7 % |
Sous-total titre III hors Musée de l'Armée |
29 604 |
30 586 |
+ 3,3 % |
99,98 % |
Musée de l'Armée |
4,7 |
4,7 |
- |
0,02 % |
Total titre III |
29 609 |
30 590 |
+ 3,3 % |
- |
(1) Chapitre 31-03 dans la nomenclature de la LFI 1997
(2) Dépense non imputée sur les crédits de l'Armée
de terre en 1997
Par ailleurs, le titre III de l'Armée de terre représentera
à lui seul 30 % de l'ensemble des crédits de fonctionnement
du budget de la Défense, soit une proportion nettement plus importante
que celle que l'on observera pour les autres armées, qui s'explique par
des différences évidentes en termes d'effectifs.
Répartition du titre III par armées et par
services
Crédits de fonctionnement en 1998 (en millions de francs) |
Part dans le titre III du budget de la Défense en 1998 |
|
Terre |
30 591 |
30 % |
Gendarmerie |
19 972 |
19 % |
Air |
15 713 |
15 % |
Marine |
13 086 |
13 % |
Autres services |
24 360 |
23 % |
Total |
103 722 |
- |
a) L'augmentation des rémunérations et des charges sociales
L'augmentation très forte des crédits de rémunérations et charges sociales résulte de cinq facteurs : l'incidence des mécanismes d'augmentation " automatiques " des rémunérations publiques, l'impact des créations et suppressions d'emplois prévues par la programmation, l'amélioration de la condition militaire, deux mesures nouvelles au titre des rémunérations des personnels servant à l'étranger et notamment en Afrique et, enfin, l'inscription au budget de l'Armée de terre des crédits destinés aux pécules d'incitation au départ.
(1) L'augmentation " automatique " des rémunérations
Celle-ci résulte à la fois de l'extension en année pleine des mesures de revalorisation des rémunérations publiques intervenues en 1997 et de l'inscription de crédits supplémentaires au titre du " glissement-vieillesse-technicité ".
(2) L'impact limité des créations et suppressions d'emplois liées à la programmation
La création de 5 879 postes d'engagés volontaires se traduit par une augmentation des crédits de 560 millions de francs. Corrélativement, toutefois, une économie de montant similaire est enregistrée, du fait des suppressions d'emplois de sous-officiers et d'appelés. Les créations d'emplois civils, en revanche, impliquent une légère augmentation des crédits.
(3) L'effort en faveur du recrutement des engagés
La professionnalisation s'est traduite par un ensemble de
mesures destinées à revaloriser la rémunération des
militaires du rang engagés, afin d'encourager le recrutement de ceux-ci.
Leur solde est, conformément à la loi de programmation 1997-2002,
assise sur le SMIC depuis le 1er juillet 1997 (indice 226 majoré, soit
une rémunération mensuelle nette de 5 600 F), compte non tenu des
avantages en nature (hébergement, alimentation, réduction SNCF)
dont bénéficie traditionnellement cette catégorie.
Par ailleurs, l'indemnité de départ des caporaux-chefs quittant
l'armée entre 8 et 11 ans de service a été
revalorisée (24 mois de solde au lieu de 14). Dans la même
logique, le dispositif des primes d'engagement a été
amélioré : un contrat initial supérieur à trois ans
ouvre ainsi droit à une prime de 7 000 francs dès le
treizième mois de service ; les contrats ultérieurs
entraînent le versement d'une prime de 2 500 francs par mois. Le total
des primes d'engagement peut atteindre la somme de 17 000 francs pour un
contrat de huit ans.
Enfin, l'allocation d'une prime équivalant à 5 % de la solde
brute, soit environ 470 francs par EVAT dépassant quinze ans de service,
serait à l'étude pour les fidéliser, et les encourager
à rester en service au-delà de quinze ans.
(4) L'amélioration de la condition militaire
Les
mesures prises en faveur de la condition militaire
sont de portée relativement modeste :
- revalorisation de l'indemnité pour charges militaires (+ 0,54 %) pour
un coût de 11,02 millions de francs ;
- augmentation du prêt des appelés (+ 1 %), pour un coût de
11,12 millions de francs ;
- mesure en faveur de la prime de qualification des officiers brevetés,
pour un coût de 14,44 millions de francs.
Enfin, la
mensualisation des élèves-officiers
induira un
coût de 9,95 millions de francs.
(5) La rémunération des personnels servant à l'étranger
Une première mesure, d'un montant de 29,07 millions de
francs, a pour objet de traduire l'augmentation des taux de l'indemnité
de résidence servies aux agents en poste à l'étranger. Il
s'agit, en l'occurrence, des personnels prépositionnés en Afrique.
Une seconde mesure (260 millions de francs au total pour le budget de la
défense, principalement destinés à l'Armée de
terre) tend, selon les termes du document " bleu ", à
ajuster
les crédits de rémunération des personnels au titre du
dispositif en Afrique, c'est-à-dire à prendre en compte,
dès la loi de finances initiale, les surcoûts, en termes de
rémunérations, induits par notre présence permanente en
Afrique. Jusqu'à présent, seule une partie de ces surcoûts
était budgétisée, rendant nécessaires des
ouvertures de crédits en cours d'année.
Les rémunérations supplémentaires servies à une
partie de ces personnels (bases au Tchad et en République
centrafricaine) n'étaient, en effet, jusqu'à présent, pas
prévues au budget, mais ouvertes au cours de son exécution.
La réforme, par le décret du 1
er
octobre 1997, des
modes de rémunération des personnels effectuant de courts
séjours à l'étranger (au sein de " compagnies
tournantes "), devrait, par ailleurs, permettre de limiter le coût
de notre dispositif en Afrique et celui des opérations
extérieures. Cette réforme vise à remplacer l'actuel
dispositif de rémunération en fonction de l'indemnité de
résidence à l'étranger par une indemnité
égale à 1,5 fois le montant de la solde.
(6) Les mesures d'incitation au départ
Un crédit de
296,2 millions de francs
sera, dans
le cadre du projet de loi de finances pour 1998, imputé sur la dotation
de l'Armée de terre au titre des
mesures d'accompagnement de la
professionnalisation,
pour financer les
pécules.
Ceux-ci
sont
destinés à favoriser les départs d'officiers
et de sous-officiers qui disposent de l'ancienneté requise pour
bénéficier d'une retraite à jouissance immédiate
(respectivement vingt-cinq et quinze ans de service), et qui se trouvent
à plus de trois ans de la limite d'âge de leur grade. Notons que
la totalité des moyens consacrés aux pécules (dont,
principalement, les " pécules rénovés ",
créés par la loi de 1996 pour l'ensemble des officiers et
sous-officiers) s'élèvera, en 1998, à
939 millions de
francs, soit une augmentation substantielle de 14 % par rapport aux
crédits de même objet inscrits dans le budget de 1997.
Les
crédits alloués aux " pécules
rénovés ", pour leur part, passeront de 572 à 822
millions de francs.
Rappelons que le montant moyen des pécules attribués en 1997 a
été de 410 000 francs pour les officiers, et de 235 000 francs
pour les sous-officiers.
Le pécule , non imposable, peut
représenter, selon la loi, jusqu'à 45 mois de solde
pour les
militaires se trouvant à plus de dix ans de la limite d'âge de
leur grade, c'est-à-dire pour une population
de facto
limitée parmi les bénéficiaires du dispositif
.
Tel qu'il est conçu, le dispositif des pécules appelle deux
constatations :
- d'une part, les pécules, tels que les définit la loi n°
96-1111 du 19 décembre 1996, ont pu attirer un nombre assez important de
candidats ; néanmoins les critères devant présider
à l'attribution de ces pécules répondant pour l'essentiel
à l'objectif d'assainir la pyramide des grades des officiers et
sous-officiers, il en est résulté une forte concentration des
bénéficiaires sur les catégories qui, se trouvant assez
près de la limite d'âge de leur grade (4 ans et demi en 1997,
vraisemblablement 5 ans en 1998), n'ont pas vocation à percevoir les
pécules les plus importants ;
- d'autre part, on observe une forte représentation des
adjudants-chefs
7(
*
)
parmi les sous-officiers de
l'Armée de terre bénéficiaires des pécules en 1997,
(61,3 % de l'ensemble). Dans le même ordre d'idée, 77 % des
officiers bénéficiaires de pécules en 1997 sont des
colonels et des lieutenants-colonels
8(
*
)
. Cette
répartition a, rappelons-le, pour objet d'assainir la pyramide des
grades du corps des officiers.
b) La baisse des besoins en alimentation
Les crédits inscrits au chapitre 34-10 enregistrent une
diminution de 8,7 % par rapport à 1997, et passent ainsi de 1 550,9
à 1 415,45 millions de francs.
Cette évolution résulte des mesures d'effectifs correspondant
à la deuxième annuité de la loi de programmation.
En 1998 sera maintenue la prime globale d'alimentation de 1997 et de 1996
(24,40 F en métropole).
L'absence d'actualisation de ce taux pourrait se traduire par une
légère baisse du pouvoir d'achat du poste alimentation. Pour
regrettable qu'elle soit, cette situation paraît à votre
rapporteur moins critiquable que la différence de traitement
constatée, depuis plusieurs années, entre l'Armée de terre
et les autres armées au regard de la prise en charge du repas de service
de midi. Les personnels de l'Armée de terre sont, en effet, les seuls
à ne pas bénéficier de la prise en charge du repas de
service de midi.
Comme votre rapporteur l'a déjà fait observer lors de l'examen du
précédent budget, il ne sera plus acceptable, une fois
l'armée de terre professionnalisée, de refuser d'aligner
l'Armée de terre sur les autres armées, au motif que les
effectifs particulièrement importants servant dans les forces terrestres
rendraient cette mesure impossible à financer. Il sera donc
indispensable, quand l'Armée de terre aura rejoint les effectifs
prescrits par la loi de programmation à l'échéance de
2002, de mettre fin à cette différence de traitement, à
moins que le souci de l'équité se traduise par l'alignement des
autres armées sur la situation de l'Armée de terre...
c) Poursuite de la baisse des crédits consacrés à l'entretien des immeubles
Les crédits consacrés à l'entretien des
immeubles sont inscrits au chapitre 34-04 (fonctionnement), et répartis
entre les articles 92 (entretien des immeubles et du domaine militaire) et 10
(entretien et activité des forces-masse de casernement). Les
crédits destinés à l'entretien réalisé par
les formations en tant que " locataires " sont, depuis 1992,
déconcentrés.
Après la baisse de 9,3 % constatée entre la loi de finances
initiale de 1996 et le budget 1997, la contraction de - 2 % qui devrait
concerner les crédits d'entretien des casernements entre 1997 et 1998
paraît relativement moins défavorable.
Les principales réalisations effectuées depuis 1996 et
prévues pour 1998 concernent essentiellement la réfection des
toitures, façades et fermetures des bâtiments, la réfection
intérieure des logements des militaires du rang et des sous-officiers
célibataires, la sécurité des personnes et des biens,
ainsi que les réseaux d'eau, d'électricité et de
téléphone.
Comme votre rapporteur l'a précédemment relevé, sur le
chapitre 34-04 pèse l'entretien des immeubles devenus inutiles à
la suite des restructurations, mais dont l'aliénation n'est pas encore
acquise. Le maintien de l'entretien répond au souci d'éviter la
dégradation de ces locaux.
L'Armée de terre n'est donc pas en mesure de transformer les
restructurations en économies nettes
. Le décalage dans le
temps entre l'abandon des casernements et la vente de ceux-ci limiterait
à 14 millions de francs, d'après les informations transmises
à votre rapporteur, les économies attendues des dissolutions
effectuées en 1997.
d) Inquiétudes relatives à l'activité des forces terrestres
Le taux d'activité de l'Armée de terre
dépend du niveau des
crédits de carburant et de munitions.
En 1998, la dotation en carburant s'établira à 469 millions de
francs, soit une baisse de 8 % par rapport aux 510 millions de francs
prévus en 1997.
En 1998, les dotations de munitions d'instruction, qui figurent au titre V,
seront de 241 millions de francs en crédits de paiement (- 18,5 % par
rapport à 1997).
Cette baisse sensible des crédits de paiement s'explique, selon les
informations communiquées à votre rapporteur, par trois facteurs :
- la
réduction du format
de l'Armée de terre se traduit
par une diminution des besoins en munitions d'instruction ;
- les
progrès de la simulation
tendent aussi à
réduire les besoins en munitions d'instruction ;
- la
baisse de la consommation des munitions d'instruction
s'explique
également, depuis plusieurs années, par la consommation d'une
part des
stocks de munitions " guerre "
constitués
pendant la guerre froide en vue d'un affrontement en Centre-Europe, qui repose
aujourd'hui sur des hypothèses modérément envisageables.
Par ailleurs, le taux d'activité des forces terrestres s'établit,
depuis 1996, à
80 jours de sortie, dont 40 avec matériels
organiques.
Il s'agit là d'une diminution assez sensible par rapport
aux 100 jours de sortie, dont 50 avec matériels organiques, qui
caractérisaient l'activité de l'Armée de terre jusqu'en
1995. Certes, ces grandeurs ne constituent que des moyennes, et n'excluent pas
que certaines unités connaissent un taux d'activité plus
satisfaisant, en raison notamment d'un engagement sur un théâtre
d'opération extérieure.
Il est néanmoins probable que le niveau d'entraînement d'une
armée professionnelle ne saurait être satisfaisant avec 80 jours
d'activité, dont 40 avec matériel organique. Il importera donc de
restaurer un taux d'activité permettant de motiver les personnels et de
garantir des capacités opérationnelles exigeantes, conformes
à ce que l'on peut attendre d'une armée professionnelle.
3. Un décalage inadmissible entre les crédits d'équipement prévus par la loi de programmation et les crédits inscrits au projet de budget pour 1998
Votre rapporteur est très préoccupé de
l'amputation effectuée dans le titre V de la dotation de l'Armée
de terre par le projet de loi de finances pour 1998, par rapport aux
crédits prévus par la loi de programmation. Les 1 800
millions de francs ainsi soustraits aux crédits d'équipement des
forces terrestres représentent un
manque à gagner de 11 % par
rapport à ce qu'aurait dû être la deuxième
annuité de la programmation 1997-2002.
S'agit-il d'une "encoche" sans lendemain, ou d'une rupture dans
l'application
de la loi de programmation susceptible de conduire à une révision
durable de celle-ci ? Le débat n'est, à ce jour, pas
tranché. Quelle qu'en soit l'issue, votre rapporteur constate que le
non-respect de la loi de programmation suscite d'ores-et-déjà des
interrogations sur la capacité du budget de la défense
à assurer, à terme, la modernisation des équipements
terrestres.
La faille constatée entre ce qu'aurait dû
être l'annuité 1998 de la programmation et le projet de budget
affectera probablement les conditions de la transition
, car elle
concerne tous les postes du titre V sans se limiter aux fabrications
d'armements
stricto sensu.
a) Présentation générale du titre V
Le tableau ci-après retrace l'évolution des différents postes du titre V entre 1997 et 1998.
Évolution des principaux postes du titre V
(en millions de francs)
AP |
CP |
Part dans le titre
V en 1998
|
||||||
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Variation 1998/1997 |
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Variation 1998/1997 (en francs courants) |
AP |
CP |
|
Espace (chapitre 51-60) |
14 |
21 |
+ 53,6 % |
50 |
40,7 |
- 18,6 % |
0,10 % |
0,23 % |
Etudes-développement (chapitre 51-80) |
|
|
|
|
|
|
|
|
Fabrications (chapitre 53-80) dont : |
|
|
|
|
|
|
|
|
Fabrication de matériels d'armement |
|
|
|
|
|
|
|
|
HCCA (habitation, couchage, campement, ameublement) |
|
|
|
|
|
|
|
|
EPM (entretien programmé des matériels) (1) titre V |
|
|
|
|
|
|
|
|
Infrastructures |
2 610 |
2 822 |
+ 5,1 % |
2 662 |
2 329 |
- 12,5 % |
13,7 % |
13,4 % |
TOTAL Titre V |
19 082 |
20 551 |
+ 7,3 % |
19 449 |
17 355 |
- 10,8 % |
- |
- |
(1) Compte non tenu des crédits inscrits au titre III
(chapitre 34-20)
Ce tableau confirme la part prédominante du chapitre fabrications
(53-80), qui représentera 76,5 % des AP et 68,6 % de CP en 1998,
malgré la baisse sensible constatée en CP (- 9,8 % en francs
courants, et - 10,8 % en francs constants).
L'augmentation des autorisations de programme du titre V (+ 7,3 % en francs
courants ; + 6,1 % en francs constants) contraste avec la
diminution
très préoccupante des crédits de paiement
(- 10,8 % en
francs courants ; - 11,8 % en francs constants). Ce hiatus appelle une
interrogation : les crédits de paiement des années 1999 et
suivantes permettront-ils d'honorer des autorisations de programme en
croissance ?
Par ailleurs, le titre V de l'Armée de terre représentera, en
1998,
21,4 % de l'ensemble des crédits d'équipement du
Ministère de la Défense
(en CP), soit une proportion stable
par rapport à celle que l'on observait en 1997, comme le montre le
tableau ci-après :
Part des crédits d'équipement des
armées et services dans les crédits d'équipement du
Ministère de la Défense (CP)
Crédits d'équipement 1997 (en millions de francs) |
Crédits d'équipement 1998 (en millions de francs) |
|
Part dans les crédits d'équipement de la Défense 1997 |
Part dans les crédits d'équipement de la Défense 1998 |
|
Marine |
22 319 |
19 555 |
- 12,4 % |
25,1 % |
24,1 % |
Air |
21 624 |
19 162 |
- 11,4 % |
24,4 % |
23,6% |
Terre |
19 450 |
17 356 |
- 10,8 % |
21,9 % |
21,4% |
Gendarmerie |
2 165 |
2 099 |
- 3 % |
2,4 % |
2,6 % |
Autres services |
23 148 |
22 829 |
- 1,4 % |
26,0 % |
28,2 % |
TOTAL |
88 705 |
81 000 |
- 9 % |
- |
- |
b) Le suivi des programmes terrestres gravement ébranlé par le non-respect de la loi de programmation
Rappelons tout d'abord que la loi de programmation 1997-2002
repose sur l'objectif prioritaire de professionnalisation, pour l'essentiel, et
que le renouvellement du matériel de l'Armée de terre du futur a
été reporté à une période ultérieure
à la transition.
La priorité dont fait l'objet la réalisation de la
professionnalisation ne saurait toutefois justifier les difficultés qui
résulteront nécessairement, en matière de
réalisation des grands programmes, du budget de 1998, qu'il s'agisse de
la diminution très significative des moyens destinés à la
préparation de l'avenir, ou du moratoire d'un an sur d'importants
programmes auxquels est contrainte l'Armée de terre.
(1) Une baisse inquiétante des crédits consacrés à la préparation de l'avenir
Les crédits consacrés à l'espace
(chapitre 51-60) et aux études-développement (chapitre 51-80)
traduisent la place de la préparation de l'avenir parmi les
crédits d'équipement de l'Armée de terre.
La baisse des crédits de paiement liés à l'espace (- 18,6
%) contraste avec la forte hausse (+ 138 %) constatée dans le projet de
budget de 1997. De même, la contraction des études
développement (- 12,9 % en CP) succède à l'effort
très significatif accompli en 1997 (+ 18,7 % en CP). Le projet de budget
de la Défense pour 1998 paraît donc traduire une
préoccupation modérée pour la préparation de
l'avenir des équipements terrestres
, ce qui est
particulièrement regrettable compte tenu des "grands chantiers" à
prévoir dans les domaines suivants :
- mise au point d'un missile à fibre optique, destiné à
des missions d'appui-feu, et au traitement d'objectifs ponctuels dans la
profondeur (plus de 30 km) ;
- élaboration d'un système
Battlefield identification friends
and foes
(BIFF), susceptible de réduire les risques de tirs
fratricides : les besoins existants en matière d'identification sur le
champ de bataille ont été mis en évidence par la Guerre du
Golfe ;
- introduction d'éléments robotiques sur le champ de bataille,
afin d'améliorer l'efficacité opérationnelle des
systèmes d'armes par l'automatisation des certaines tâches,
notamment le déminage ;
- mise au point d'un "système combattant", destiné à
équiper le combattant à pied de moyens prenant en compte les
défis du combat moderne (mobilité, protection, notamment
balistique et NBC, armement individuel de haute précision, transmissions
internes au groupe de combat).
(2) D'importantes altérations dans le processus de réalisation des principaux programmes
Les crédits consacrés à la fabrication
des matériels d'armement terrestres connaîtront une
évolution contrastée en 1998 : augmentation des autorisations de
programme (+ 16,9 %) et baisse des crédits de paiement
(- 6,3 %). 12 038 millions de francs seront ainsi, en AP,
consacrés à la fabrication de matériels d'armement
terrestres en 1998, les CP représentant 8 658 millions de francs
(au lieu de 9 246 en 1997).
Le décalage entre ce qu'aurait dû être l'annuité 1998
de la loi de programmation et les crédits effectivement inscrits au
projet de loi de finances pour 1998 conduiront à
interrompre pour un
an certains grands programmes
9(
*
)
:
développement du lance-roquettes multiple de nouvelle
génération, industrialisation de l'obus antichar à effet
dirigé, valorisation du système Roland, fabrication des missiles
antichar à courte portée Eryx, des missiles sol-air Mistral, et
des obus flèche de 120 mm. Les livraisons du char Leclerc passeront de
33 à 30 exemplaires en 1998 : cette modification du déroulement
de ce programme majeur est présentée comme n'induisant aucune
modification de l'état global des livraisons ni de la cible. Elle
devrait, néanmoins, aggraver les difficultés de GIAT industries,
entreprise publique que l'Etat est par ailleurs conduit à recapitaliser.
Il est, en outre, surprenant que notre pays ne soit pas à même,
dans le cadre des programmes en coopération, de commander les
matériels produits dans les mêmes délais que nos
partenaires. Ainsi, la marine néerlandaise et l'armée de terre
allemande pourraient percevoir l'hélicoptère NH 90 en 2003, alors
que l'Armée de terre française n'en recevrait le premier
exemplaire qu'en 2011. Dans le même ordre d'idée, le
système antichar AC3GLP devrait équiper la version allemande du
Tigre dès 2001, l'Armée de terre française n'étant
supposée être dotée de cet équipement qu'en 2011.
c) Une compression générale des autres dépenses
Les efforts d'économie imputables à la baisse des crédits d'équipement pèsent sur l'ensemble des crédits du titre V, y compris sur des postes liés à la mise en oeuvre de la professionnalisation.
(1) La baisse problématique des crédits d'entretien programmé des matériels
Les crédits d'entretien programmé des
matériels sont
partagés entre le titre III
(chapitre
34-20), qui finance les opérations de maintenance sous-traitées
au secteur industriel, et le
titre V
(chapitre 53-80), qui concentre
l'essentiel de la dotation, et sur lequel est imputée l'acquisition de
l'ensemble des pièces de rechange nécessaires au soutien des
matériels terrestres.
Le tableau ci-après montre que, après avoir progressé dans
des proportions relativement importantes en 1997, les crédits d'EPM
connaîtront des évolutions négatives en 1998, qu'il
s'agisse des moyens inscrits sur le titre III ou sur le titre V.
Crédits d'entretien programmé des
matériels en 1997-1998
Titre III |
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Variation 1998/1997 |
|
Matériels terrestres
(chapitre 34-20,
|
201,8 |
192,9 |
- 4,4 % |
|
Matériels de transmissions (chapitre 34-20, article 22) |
26,8 |
25,7 |
- 4,1 % |
|
Sous-total Titre III |
228,6 |
218,6 |
- 4,3 % |
|
Titre V
|
AP
|
1 893
|
1 783,5
|
- 5,8 %
|
Matériels aériens
(chapitre 53-80,
|
AP
|
643,5
|
573
|
- 11 %
|
Matériels de transmission (chapitre 53-80, article 57) |
AP
|
77
|
78,3
|
+ 1,7 %
|
Sous-Total titre V |
AP
|
2 613,5
|
2 434,8
|
- 6,84 %
|
TOTAL |
AP
|
2 842,1
|
2 653,4
|
- 6,6 %
|
Titre III et titre V confondus, la dotation consacrée
à l'entretien programmé des matériels terrestres
représentera en 1998 2 348,1 millions de francs en crédits
de paiement (2 764 millions de francs en autorisations de programme), soit
une baisse de - 15 % (- 6,6 % s'agissant des autorisations de programme).
Selon les informations transmises à votre rapporteur, les crédits
d'EPM pour 1998 ont été calculés en fonction de
l'anticipation de l'état des parcs à entretenir à
l'échéance de l'an 2000. Cette anticipation tient compte des
délais de réalisation industrielle, qui imposent un intervalle de
deux ans entre les commandes de pièces indispensables au soutien des
matériels, et la livraison de ces rechanges. La baisse des
crédits d'EPM ne traduirait, dans cette logique, que la réduction
du format de l'Armée de terre, et devrait être suffisante pour
assurer l'entretien des parcs à venir.
Il est certes clair que la réduction du format de l'Armée de
terre peut avoir pour conséquence une baisse des besoins d'EPM,
parallèlement à la diminution des parcs en service. Il
conviendrait de ne pas éluder cependant les difficultés
susceptibles de résulter des
besoins croissants liés à
la montée en puissance des matériels de nouvelle
génération
, comme le char Leclerc, et à la
rénovation des matériels anciens qui ne seront pas
remplacés, parmi lesquels le canon AUF 1. Par ailleurs, il n'est pas
exclu que la
remise en état de matériels excédentaires,
en attente de cession
, ou que la destruction de ces matériels
pèse sur les chapitres liés à l'entretien programmé
des matériels.
Enfin, les crédits d'EPM ne permettront d'atteindre en 1998 qu'un
taux de disponibilité opérationnelle des matériels de
80 %,
considéré comme le maximum potentiel actuellement
envisageable. Les crédits d'entretien programmé des
matériels supporteront donc une part très importante de l'effort
d'économies, bien qu'il soit contestable de faire de ce poste une
variable d'ajustement du titre V.
(2) Habillement, couchage, campement et ameublement : des besoins croissants malgré la réduction du format contrastant avec une évolution négative des moyens
Les crédits consacrés au poste habillement,
couchage, campement et ameublement (HCCA), parfois dénommé
"entretien programmé des personnels" en vertu d'une symétrie
quelque peu impropre avec l'entretien programmé des matériels,
sont inscrits au chapitre 53-80 (fabrications), article 58 (habillement) et 59
(campement, couchage et ameublement).
Ces crédits connaîtront une évolution négative en
1998, alors que l'on avait relevé, entre 1996 et 1997, une augmentation
assez favorable en crédits de paiement (+ 6,2 %).
Dotation HCCA en 1997-1998
PLF 1997 |
PLF 1998 |
Evolution 1998/1997 |
||||
AP |
CP |
AP |
CP |
AP |
CP |
|
Art. 58 (habillement) |
1 169,7 |
1 126,9 |
988,2 |
893,8 |
- 15,5 % |
- 20,7 % |
Art. 59 (couchage, campement et ameublement) |
262 |
297,4 |
247,8 |
228,1 |
- 5,4 % |
- 23,3 % |
Total HCCA |
1 431,7 |
1 424,3 |
1 231 |
1 121,9 |
- 13,7 % |
- 21,2 % |
Les crédits d'HCCA sont destinés à
financer l'habillement du combattant (paquetages, effets de protection -gilets
pare-balles, casques composites...-, effets dits complémentaires -sac de
vie en campagne...-), les tentes et les matériels d'hébergement
en campagne, les articles de literie, ainsi que le mobilier pour les chambres
et les bureaux.
Notons que les
opérations de renouvellement
, destinées
à compenser l'usure des équipements, représentent la plus
grosse part de la dotation (80 %) . Parmi les
mesures nouvelles
,
liées aux besoins opérationnels ou conjoncturels, citons les
équipements de protection nucléaire, bactériologique et
chimique, auxquels quelque 30 millions de francs devraient être
consacrés en 1998, ainsi que les équipements de démineur
(4,5 millions de francs en 1998 ; 2,4 en 1997).
En 1998, la priorité ira, comme en 1997, aux effets qui
améliorent la
sécurité individuelle du combattant
:
tenues de combat "Outre-mer" traitées dans le cadre de la lutte contre
le paludisme, tenues de combat bariolées "théâtre
européen", et ensembles de protection contre les intempéries et
le froid.
Alors que la dotation de 1997 anticipait très sagement des besoins
croissants à court terme, puisque les crédits de paiement
augmentaient de 6,2 %,
la dotation prévue pour 1998 pourrait ne pas
permettre de faire face aux nombreux besoins liés tant à la fois
à la professionnalisation qu'à la participation de l'Armée
de terre aux opérations extérieures.
En effet, la
professionnalisation
créera, parallèlement
à l'augmentation des effectifs de militaires du rang engagés, de
nouveaux besoins de matériels de couchage et d'ameublement, du fait de
l'attention dont font l'objet, à très juste titre, les conditions
de vie des EVAT.
Par ailleurs, les
opérations extérieures
ont pour
conséquence une
usure rapide des matériels
et induisent
des
besoins croissants de renouvellement
, tandis que la priorité
assignée à la projection implique d'être en mesure
d'équiper un nombre plus élevé de combattants en
matériels de protection.
Il n'est donc pas possible d'envisager d'économies sur les
crédits d'HCCA du fait de la réduction des effectifs des forces
terrestres.
La baisse de ces crédits ne doit, dès lors, pas
être poursuivie en 1999.
(3) Les infrastructures, un poste sensible pendant la période de transition
La dotation consacrée aux infrastructures baissera de - 12,5 % en crédits de paiement (+ 5,1 % en autorisations de programme). Les crédits d'infrastructure se répartiront, en 1998, entre l'Allemagne, la métropole, l'Outremer et les services, conformément au tableau ci-après :
Infrastructures en 1998 (en millions de francs)
AP |
CP |
|
Métropole |
2 069,0 |
1 770,2 |
Allemagne |
70,4 |
46,7 |
Outre-mer |
110,2 |
78,5 |
Titre VI et divers (dont acquisitions) |
84,0 |
101,2
|
Infrastructures des services |
489,3 |
333,1 |
TOTAL |
2 822,9 |
2 329,7 |
Parmi les principales opérations d'infrastructure
financées en 1997, mentionnons la mise en oeuvre du plan VIVIEN,
destiné à l'
amélioration des conditions de vie des
militaires du rang engagés,
ainsi que la construction ou la
réhabilitation de bâtiments ayant vocation à accueillir
des EVAT ou des cadres célibataires.
Le poste infrastructures devra donc financer d'
importantes opérations
liées à la professionnalisation
.
Par ailleurs, la dotation de l'Armée de terre devra assumer un
sur
coût transitoire lié aux restructurations
: les
transferts d'établissements et de régiments induisent, en effet,
des dépenses d'entretien minimal qui pourraient être comprises
entre 18 et 40 millions de francs.
De plus, l'Armée de terre devra faire face aux travaux d'infrastructures
dûs à l'accueil des nouveaux matériels.
Une baisse des crédits d'infrastructure n'est donc pas sans
conséquences dans le contexte actuel de montée en puissance de la
professionnalisation et de restructurations. A titre d'exemple,
l'économie de 332 millions de francs imposée à
l'Armée de terre sur le chapitre 54-40 pourrait se traduire, en 1998,
par le
sacrifice de dix bâtiments pour cadres célibataires, et
de quinze bâtiments pour EVAT.
Or, il est clair qu'une armée
professionnelle ne saurait se passer de bâtiments adaptés à
la configuration de ses effectifs.
On ne peut donc exclure que
l'économie réalisée sur le poste infrastructures en 1998
altère les conditions de mise en oeuvre de la professionnalisation.
CONCLUSION
La première étape de la transition de
l'Armée de terre, en cette fin de l'an I de la professionnalisation,
appelle un bilan globalement positif. Il convient ici de
rendre hommage aux
personnels de l'Armée de terre
, qui abordent les réformes en
cours avec le dévouement et la compétence qu'on leur
connaît.
La deuxième annuité de la loi de programmation 1997-2002 ne
saurait toutefois être abordée avec optimisme, compte tenu des
menaces potentielles qui pourraient altérer prochainement les
conditions de la professionnalisation
, et, surtout, du fait d'un
décalage inadmissible entre les prescriptions de la loi de
programmation et le niveau des crédits d'équipement inscrits dans
la dotation de l'Armée de terre pour 1998.
Votre rapporteur constate que le "manque à gagner" ainsi subi par
l'Armée de terre, s'il n'affecte pas encore, à ce jour, le rythme
de la modernisation de ses équipements, ne sera pas sans
conséquences sur les conditions de la mise en oeuvre de la
professionnalisation. En effet, l'"encoche" inscrite dans le projet
de budget
de la Défense affecte tous les crédits d'équipement de
l'Armée de terre, y compris des postes qui, comme les infrastructures,
se situent au coeur de l'accompagnement de la professionnalisation, et qui ne
sauraient sans préjudice pour celle-ci être
considérés comme des variables d'ajustement.
En tout état de cause, si la théorie de l'" encoche "
se trouvait démentie par les faits et si les crédits militaires
ne retrouvaient pas, à partir de 1999, le niveau de ressources
prévu par la loi de programmation 1997-2002, la cohérence de la
réforme entreprise et la loi de programmation elle-même se
trouveraient remises en cause. Il est, selon votre rapporteur, inconcevable
d'admettre au nom de la contribution du budget de la défense à la
réduction des déficits publics, le sacrifice d'une loi de
programmation, elle-même fondée sur des hypothèses
budgétairement réalistes, et sur le souci de stabiliser les
dépenses militaires.
Sous le bénéfice de ces observations,
v
otre rapporteur
pour avis conclut au rejet des crédits du ministère de la
Défense pour 1998.
*
* *
EXAMEN EN COMMISSION
La commission des Affaires étrangères, de la
Défense et des Forces armées a examiné le présent
rapport pour avis au cours de sa réunion du 19 novembre 1997.
A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Xavier de Villepin,
président, s'est interrogé sur le coût induit par la
décision, annoncée par le ministre de la défense lors de
l'examen de son budget par l'Assemblée nationale, d'abaisser à 52
ans l'âge de la retraite des ouvriers de l'Etat travaillant à la
Direction des constructions navales et à GIAT-Industries. M. Serge
Vinçon, rapporteur pour avis, a estimé que cette mesure avait
constitué une concession destinée à obtenir le vote du
budget de la défense par la majorité de l'Assemblée
nationale.
M. Philippe de Gaulle a estimé que les difficultés susceptibles
de résulter, pendant la période de transition, de nouveaux
reports d'incorporation créés dans le cadre de la loi portant
réforme du service national, justifiaient plus encore une
accélération de la professionnalisation, dont le processus devait
être, selon lui, le plus rapide possible.
Revenant alors sur les problèmes liés à l'affectation
à l'armée de terre de personnels civils dont les effectifs
budgétaires étaient pourtant créés, M. Maurice
Lombard s'est demandé si ces difficultés ne devraient pas
conduire à augmenter les recrutements de militaires du rang
engagés, qui seraient affectés à des fonctions de soutien.
A cet égard, M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis, a
rappelé que la professionnalisation reposait sur le partage des
tâches entre, d'une part, des militaires, qui devaient être
consacrés à des missions opérationnelles, et des civils
affectés à des missions de soutien.
M. Maurice Lombard a enfin évoqué avec le rapporteur pour avis la
question de l'affectation, au budget de la défense, conformément
à un engagement du précédent Gouvernement, des fonds de
concours résultant de la cession d'immeubles des armées.
M. Xavier de Villepin, président, a alors rappelé que la
commission ne voterait sur l'ensemble des crédits de la défense
pour 1998 qu'après avoir entendu tous ses rapporteurs pour avis.
*
* *
La commission a examiné l'ensemble des crédits
du ministère de la défense pour 1998 au cours de sa
réunion du mercredi 26 novembre 1997.
M. Xavier de Villepin, président,
a exprimé les raisons de
sa forte inquiétude devant le projet de budget proposé.
S'agissant des crédits du titre III, dont l'enveloppe globale traduisait
la priorité affichée en faveur de la professionnalisation, il a
néanmoins exprimé une double préoccupation : d'une part,
la compression des crédits de fonctionnement (hors
rémunérations et charges sociales) qui, avec l'insuffisance des
crédits d'entretien programmé des matériels,
menaçait l'activité des forces ; d'autre part, les
conséquences potentielles, particulièrement pour l'armée
de terre, des dispositions adoptées en matière de reports
d'incorporation pour les jeunes gens titulaires d'un contrat de travail, qui
fragilisaient la période de transition et rendaient nécessaire
l'adoption de mesures de compensation.
En ce qui concerne les crédits du titre V -qui connaissaient une brutale
diminution (de 8,7 % en francs courants et de 9,9 % en francs constants)- M.
Xavier de Villepin, président,
a formulé les observations
suivantes :
- il a d'abord déploré que les crédits d'équipement
militaire jouent le rôle de " variable d'ajustement " du
budget
de l'Etat, ce qui constituait un signal négatif adressé à
la nation dans son ensemble ; il a particulièrement souligné les
conséquences de ces coupes budgétaires sur les crédits
consacrés au nucléaire (- 13 %), évolution qui constituait
un important sujet d'inquiétude pour l'avenir ; il a également
regretté les incidences de ces diminutions de crédits sur les
programmes spatiaux militaires et sur le programme Rafale ;
-
M. Xavier de Villepin, président,
a ensuite
estimé que le projet de budget de la défense pour 1998
constituait un mauvais signal adressé aux industries de la
défense pour quatre raisons : le coût élevé, et
quasi mécanique, de ces réductions budgétaires en termes
d'emplois, le surcoût inévitable des équipements faisant
l'objet de mesures d'étalement ou de moratoires, la perte de
" lisibilité " que la loi de programmation avait
précisément pour objet d'apporter aux industriels, et enfin
l'affaiblissement qui en résultera pour les industriels français
dans la perspective des restructurations indispensables de l'industrie
européenne de l'armement ;
- puis M. Xavier de Villepin, président,
a souligné que ce
projet de budget constituait surtout un signal très négatif
adressé à nos armées au moment même où un
effort exceptionnel leur était demandé ; il a estimé que
les orientations de ce budget, si elles n'étaient pas corrigées
après 1998, poseraient des interrogations majeures pour l'avenir : ne
risqueraient-elles pas de compromettre la cohérence de la réforme
entreprise dans son ensemble ? ne risqueraient-elles pas de remettre en cause
le futur modèle d'armée lui-même ?
- M. Xavier de Villepin, président,
a estimé que toutes
ces interrogations revenaient finalement à poser la question de la
validité de la théorie dite de l' " encoche " ; il a
estimé que, si les économies imposées à la
défense en 1998 avaient un caractère exceptionnel, leurs
conséquences, pour regrettables et dommageables qu'elles soient,
seraient peut-être surmontables ; si, en revanche, la défense ne
retrouvait pas, à partir de 1999, le niveau de ressources prévu
par la loi de programmation 1997-2002, l'ensemble de la réforme
engagée se trouverait gravement fragilisée et la dernière
loi de programmation devrait être considérée comme caduque.
Or, a souligné M. Xavier de Villepin, président,
la
dernière loi de programmation -contrairement à ses
devancières- comportait déjà une forte réduction
des crédits d'équipement militaire et constituait la traduction
d'une réforme d'ensemble devant aboutir à la mise en place d'un
nouveau modèle d'armée. Son non-respect ou -a fortiori- son
abandon ne pourrait donc conduire qu'à l'affaiblissement progressif de
notre défense ou à la révision de ce modèle
d'armée. Il a en outre estimé que, si l'élaboration
éventuelle d'une nouvelle programmation venait à être
envisagée, il vaudrait mieux alors renoncer à sa traduction
législative, devenue sans valeur.
Concluant son propos, M. Xavier de Villepin, président,
a
estimé que la commission n'avait d'autre choix que de rejeter les
crédits du ministère de la défense pour 1998 et l'a
invitée à réaffirmer son ferme attachement au respect de
la loi de programmation votée en 1996. Il a enfin suggéré
à la commission, pour expliquer son avis négatif, d'adopter les
principales observations qu'il venait de présenter et de les faire
figurer dans chacun de ses rapports pour avis au titre des conclusions de la
commission.
M. Bertrand Delanoë
a alors indiqué que, s'il partageait
certaines des inquiétudes exprimées par M. Xavier de Villepin,
président -pour des raisons qui étaient d'ailleurs
antérieures au projet de budget pour 1998-, il était globalement
en désaccord avec les conclusions proposées et approuvait la
démarche générale suivie par le Gouvernement. Il a
relevé que les programmes conduits en coopération avec nos
partenaires européens étaient poursuivis de manière
satisfaisante. Il a estimé que les difficultés rencontrées
venaient essentiellement de la méthode employée pour
professionnaliser nos forces armées qui ne pouvait aboutir qu'à
des pressions de plus en plus fortes sur les crédits
d'équipement. M. Bertrand Delanoë
a conclu en
considérant qu'une " épreuve de vérité "
était souhaitable et ne devrait écarter aucun des choix
nécessaires, qu'il s'agisse des missions assignées à nos
forces ou des équipements retenus.
M. Michel Caldaguès
a indiqué qu'il partageait pleinement
chacune des observations formulées par M. Xavier de Villepin,
président. Il a estimé que le budget très
inquiétant qui était présenté trouvait son origine,
non pas dans la méthode suivie pour professionnaliser nos armées,
mais, beaucoup plus largement, dans la mise en cause progressive des
différentes spécificités des forces françaises et
dans le processus de " mutualisation " des forces qui ne
pouvait
conduire, de manière insidieuse, qu'à la réduction de
notre effort national de défense. Il a enfin souligné que la
politique conduite par le Gouvernement en matière de dépenses
publiques civiles conduisait inévitablement à la compression de
nos dépenses militaires.
M. Jean Faure
a exprimé son entier soutien à chacune des
conclusions présentées par M. Xavier de Villepin,
président. S'agissant des crédits consacrés au
nucléaire, il a estimé indispensable de respecter les calendriers
prévus et souligné, dans ce domaine plus que dans tout autre,
l'enjeu majeur que représentait la question de la transmission du savoir
et du maintien des compétences scientifiques.
M. Philippe de Gaulle
a relevé qu'une quinzaine d'années
auront été nécessaires entre le lancement du programme
Rafale et la constitution de la première flottille de ces appareils.
M. Claude Estier
a enfin indiqué que les commissaires socialistes
ne s'associaient pas aux conclusions proposées par M. Xavier de
Villepin, président.
La commission a alors adopté, le groupe socialiste votant contre, les
principales observations présentées par M. Xavier de Villepin,
président, et décidé de les faire figurer en tête de
chacun de ses rapports pour avis sur le budget de la défense pour 1998,
au titre des conclusions de la commission.
Elle a enfin émis un avis défavorable à l'adoption de
l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour
1998.
ANNEXE -
LE SUIVI DES PRINCIPAUX PROGRAMMES EN
1997-1998
-
Le
char Leclerc
2 203 millions de francs seront consacrés au char Leclerc en 1998 (en
crédits de paiement), dont 39 millions de francs au titre du
développement.
L'" encoche " effectuée dans la loi de programmation
conduira
à réduire les livraisons 1998 à 30 chars au lieu de 33. En
1998 seront commandés 88 chars, la cible totale étant de 406
exemplaires, en cohérence avec le format de l'Armée de terre
à l'échéance de la programmation.
Depuis l'origine du programme, 14,857 milliards de francs ont été
consommés au 31 décembre 1996, sur un coût total
estimé à 34,36 milliards de francs.
Outre les 390 chars commandés par les Emirats arabes unis (129 devant
être livrés pour le 31 décembre 1997), des perspectives
à l'exportation pourraient exister en Arabie saoudite et,
éventuellement, en Corée, en Turquie et au Qatar. Notons
néanmoins que la Suède a préféré le
Léopard II A5 allemand.
- L'
hélicoptère
Tigre
(HAP-HAC)
D'ici 2015 devraient être livrés 120 exemplaires sur les 215 qui
constituent la cible française (115 en version appui protection, et 100
en version antichar). L'Allemagne a, pour sa part, confirmé une cible de
212 appareils.
802 millions de francs seront affectés à ce programme en 1998 en
crédits de paiement, dont 475 au titre du développement (605
millions de francs en 1997, dont 455 au titre du développement).
Les crédits consommés au 31 décembre 1996
s'élevaient à 6,451 milliards de francs, sur un coût total
évalué à 45,73 milliards de francs.
Afin de réduire les coûts de ce programme, une révision des
spécifications a conduit à supprimer certains équipements
(détecteur d'alerte et de veille, détecteur d'obstacles, ...) ;
il est par ailleurs envisagé de concevoir des équipements en
commun avec ceux du NH 90 à des fins d'économie d'échelle.
-
L'hélicoptère NH 90
Conçu dans le cadre d'une coopération européenne dont la
France assure une part importante (41,6 %), cet hélicoptère de
transport tactique se situe encore en phase de développement. 326
millions de francs lui seront consacrés en crédits de paiement en
1998 (726 millions de francs en 1997). Au 31 décembre 1996 avaient
été consommés 1,340 milliard de francs courants, sur la
dotation de l'Armée de terre. La contribution totale de la dotation de
l'Armée de terre au développement représenterait 3,041
milliards de francs.
La cible globale compte 609 appareils, dont 160 pour la France. La cible
allemande est de 205 hélicoptères, celle de l'Italie, de 224
appareils.
Les deux années de retard qu'enregistre ce programme sont dues aux
difficultés rencontrées lors de la sélection des
équipements.
Les perspectives d'exportation pourraient éventuellement s'élever
à 600 appareils.
-
Le VBCI (véhicule blindé de combat d'infanterie)
Ce programme a pris la suite de l'ancien véhicule blindé
modulaire. Les modalités de mise en oeuvre de ce programme n'ont pas
été arrêtées : le VBCI pourrait être
réalisé en coopération avec le Royaume-Uni et l'Allemagne,
ou dans un cadre strictement national.
29 millions de francs seront affectés au développement de ce
programme en 1998 en crédits de paiement (54 millions de francs en
1997). En dépit d'un besoin opérationnel très réel,
les premières livraisons ne devraient intervenir qu'en 2004. Pour une
cible de 600 véhicules, le coût total du programme est
estimé à 8 milliards de francs, le prix unitaire s'inscrivant
dans une fourchette comprise entre 7 et 8 millions de francs.
-
Le lance-roquettes multiples nouvelle génération
Héritier du programme LRM phase III, abandonné dans le cadre de
la programmation 1997-2002 pour des raisons budgétaires, et après
le retrait des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et du Royaume-Uni du
consortium initial, le lance-roquettes multiples nouvelle
génération résulte de la définition de roquettes
aux performances moins ambitieuses que celles du LRM phase III.
Ce programme sera
retardé d'une année du fait du
décalage entre la dotation de l'Armée de terre pour 1998 et les
crédits prévus par la loi de programmation
.
-
Le radar de contrebatterie Cobra
Programme mené en coopération avec l'Allemagne et le Royaume-Uni,
le radar de contrebatterie Cobra bénéficiera de 136 millions de
francs en 1998 en crédits de paiement (64 millions de francs en 1997).
684 millions de francs avaient été consommés au 31
décembre 1996, sur un total de 2,450 milliards de francs. Notons que
cette estimation intègre la baisse de cible de 15 à 10
systèmes, en cohérence avec la contraction du format de
l'Armée de terre.
Des perspectives à l'exportation existeraient au sein de l'OTAN, ainsi
qu'au Koweït et dans les Emirats arabes unis. Les commandes britanniques
et allemandes s'élèvent respectivement à 7 et 12
systèmes.
Le retard de sept mois enregistré dans le suivi de ce programme est
imputable à des difficultés techniques, liées à la
coopération entre partenaires européens.
-
Les systèmes de défense sol-air
.
Le
programme SATCP
(sol-air très courte portée)
Mistral version H
, s'inscrit dans une cible de 345 postes de tir et de 3
000 missiles. 52 millions de francs seront consacrés à la
fabrication de ce système en 1998, en crédits de paiement (193 en
1997). Les entorses à la loi de programmation se traduiront par un
moratoire d'un an sur les commandes de missiles qui auraient dû
être effectuées en 1998.
.
Le
programme SAMP
(sol-air moyenne portée) a une cible
révisée par la loi de programmation à 400 missiles et
à 8 unités de tir. 348 millions de francs seront
affectés à ce programme en crédits de paiement en 1998,
dont 34 millions de francs au titre des fabrications.
L'échéancier de commandes et de livraisons de ce matériel
est encore indéterminé. 1,276 milliard de francs avaient
été consommés au 31 décembre 1996. Le prix unitaire
du lanceur est de 19,5 millions de francs, et celui du missile de
7,8 millions de francs.
.
La
valorisation du Roland
, dans la perspective de son
intégration au programme Martha, concerne une cible de 72 postes de tir
(98 avant les révisions induites par la loi de programmation 1997-2002).
191 millions de francs seront affectés à ce programme en 1998, en
crédits de paiement (271 millions de francs en 1997). 449 millions de
francs avaient été consommés au 31 décembre 1996,
sur un coût total de 5 634 millions de francs. Un
moratoire d'un an
a été appliqué sur les commandes initialement
prévues pour 1998, à cause du décalage entre la loi de
programmation et les crédits d'équipement effectivement inscrits
au budget de 1998.
-
Les systèmes antichar
.
Le système antichar
AC3G-MP
(moyenne portée)
s'inscrit dans une cible révisée par la loi de programmation
à 600 postes de tir, 8 000 missiles guerre et 3 000 missiles d'exercice.
Conçu en coopération internationale (avec l'Allemagne, le
Royaume-Uni, les Pays-Bas et la Belgique), ce programme a un coût total
estimé à 5 milliards de francs, 871 millions de francs ayant
été consommés au 31 décembre 1996. 142 millions de
francs seront affectés en 1998 à ce système en
crédits de paiement (dont 57 millions de francs au titre du
développement). 147 millions lui ont été consacrés
en 1997.
.
Le système
AC3G-LP
(longue portée) est
destiné à s'intégrer sur l'hélicoptère Tigre
version antichar. La cible finale est de 100 postes de tir et 3 600
missiles. En 2015 devraient avoir été livrés 50 postes de
tir et 1 800 missiles. 132 millions de francs seront consacrés en
crédits de paiement à ce programme en 1998 (134 millions de
francs en 1997). Système développé avec le Royaume-Uni et
l'Allemagne, cet armement antichar s'inscrit dans un coût total de 3,983
milliards de francs pour la part française.
.
Au système
ACCP-Eryx
(courte portée) seront
affectés 177 millions de francs en crédits de paiement en 1998
(228 millions de francs en 1997), sur un coût total de 2,498 milliards de
francs, 1 230 millions de francs avaient été consommés au
31 décembre 1996. La cible finale comporte 700 postes de tir et 12 000
missiles (avant la loi de programmation 1997-2002, la cible portait sur 1 100
postes de tir et 21 600 missiles). 310 postes de tir et 3 900 missiles ont
été livrés avant 1998.
Les perspectives de livraison pour 1998 portent sur 2 000 missiles et 50 postes
de tir. Le système AC3G-LP fait partie des programmes affectés
d'un
moratoire d'un an en 1998
, du fait de la réduction des
crédits d'équipement du ministère de la Défense.
C'est pourquoi aucune commande n'est prévue en 1998.
-
Les moyens d'observation du champ de bataille
.
Héritier du programme Orchidée, le
programme Horizon
vise la surveillance du champ de bataille dans une profondeur de 150 km.
La réalisation de ce système héliporté induirait un
coût total de 910 millions de francs, dans lequel ne sont pas pris en
compte -de manière d'ailleurs contestable- les crédits
consommés par le programme Orchidée. Au 31 décembre 1996
avaient été consommés 613 millions de francs. En 1998,
83 millions de francs seront, en crédits de paiement,
affectés à ce programme, dont 64 au titre du
développement. La cible finale comporte deux systèmes Horizon,
comprenant chacun une station sol et deux hélicoptères,
équipés de radars Doppler et d'un poste d'intervention de bord.
L'échéancier des commandes et des livraisons porte sur deux
commandes et une livraison avant 1998, et une livraison en 1998.
. Les systèmes d'information et de commandement des forces (SIC-F)
visent à améliorer la chaîne de commandement par
automatisation du traitement de l'information. Conçu de manière
à assurer l'interopérabilité de données dans un
cadre interarmées et interallié, le programme SIC-F comporte deux
versions, dont le coût global serait compris entre 815 et 1 020 millions
de francs. 87 millions de francs seront, en 1998, consacrés à ce
programme en crédits de paiement, dont 65 au titre du
développement.
1
Texte adopté par la commission au
cours de sa réunion du mercredi 26 novembre 1997, le groupe socialiste
votant contre.
2
voir Pierre Labbé,
L'organisation future de
l'Armée de terre,
Droit et Défense, 97/2
3
Notons que la place faite aux préparations militaires par
la loi portant réforme du service national pourrait conduire à
maintenir des centres d'instruction dont la dissolution avait été
prévue avant l'élaboration des hypothèses sur lesquelles
repose cette loi.
4
voir
La réorganisation de
l'Armée de terre : l'élaboration d'un modèle professionnel
" objectif 2002 " - Le Casoar,
avril 1997
;
et
Pierre
Labbé,
L'organisation future de l'Armée de terre, Revue Droit
et défense,
97/2.
5
Sur le montant total de 30,590 milliards de francs retracé
dans le document bleu au titre des dépenses ordinaires de
l'agrégat Armée de terre sont en effet inscrits cette
année 296 millions de francs destinés aux pécules. Ce type
de dépenses figurait, dans le PLF pour 1997, à l'agrégat
" administration générale ".
6
Il convient toutefois d'observer que cette progression très
forte résulte, pour partie, de la budgétisation au titre de III
de ressources figurant auparavant au titre V (partie dite étatique de la
Direction des constructions navales) ou en dehors du budget de la
défense (rémunérations des gendarmes affectés
à la surveillance du réseau autoroutier).
7
En 1997, sur 1 062 sous-officiers ayant
bénéficié d'un pécule, on compte 254 majors, 651
adjudants-chefs et 157 adjudants.
8
Sur 127 officiers bénéficiaires de pécules en
1997, on compte 14 colonels, 84 lieutenants-colonels et 29 capitaines.
9
Voir en annexe la fiche relative au suivi des principaux
programmes concernant l'équipement de l'Armée de terre.