EXAMEN DES ARTICLES

Article premier - Convocation par officier de police judiciaire

Cet article a pour objet de modifier l'article 5 de l'ordonnance du 2 février 1945, relatif à l'exercice des poursuites pénales contre un mineur. Il constitue ce que l'on pourrait appeler une disposition d'introduction, annonçant que le procureur de la République pourrait désormais requérir lors de l'ouverture de la procédure la comparution à délai rapproché (dont les modalités sont fixées par l'article 5 du projet de loi), ainsi que la convocation par officier de police judiciaire (dont les modalités font l'objet de l'article 2).

La loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative a consacré au sein de cet article 5 la pratique dite de la convocation par officier de police judiciaire (OPJ). Il s'agit de la faculté, ouverte au procureur de la République, de donner instruction à un officier (ou à un agent) de police judiciaire de notifier à un mineur contre lequel il existe des indices laissant présumer qu'il a commis un délit, une convocation à comparaître devant le juge des enfants en vue de sa mise en examen.

Cette procédure visait à assurer une réponse judiciaire plus rapide à la délinquance juvénile.

L'article premier du présent projet de loi vise essentiellement à élargir le champ d'application de la convocation par OPJ en prévoyant qu'elle pourra avoir pour objet non seulement, comme aujourd'hui, la mise en examen du mineur, mais également son jugement.

Cette convocation par OPJ aux fins de jugement ne pourra intervenir que dans les hypothèses où il existera contre le mineur des charges suffisantes d'avoir commis un délit. Cette solution devrait donc être choisie par le procureur de la République pour les affaires simples, destinées à être jugées par le juge des enfants sans que des interrogations supplémentaires soient nécessaires à la recherche de la vérité.

Le fait qu'il s'agisse d'une convocation à comparaître devant le juge des enfants est fondamental car il signifie que la convocation par officier de police judiciaire ne pourra en aucun cas déboucher sur le prononcé d'une sanction pénale.

En effet, ainsi qu'il sera indiqué lors de l'examen de l'article 2, le juge des enfants ne pourra alors prononcer immédiatement qu'un simple rappel à la loi (dispense de peine, remise aux parents ou admonestation) ou une mesure de médiation-réparation. Encore convient-il de souligner que, comme nous le verrons, le prononcé d'une telle sanction est subordonné à une bonne connaissance de la personnalité du mineur.

Enfin, la convocation par officier de police judiciaire ne saurait en aucune manière être considérée comme une forme de comparution immédiate. En particulier la convocation, qui vaudra citation à comparaître, entraînera l'application des délais prévus à l'article 552 du code de procédure pénale lequel exige le respect d'un délai minimum de dix jours (et parfois de un mois, voire de trois mois) entre le jour où la citation est délivrée et celui fixé pour la comparution devant le tribunal. Par ailleurs, comme le précise l'article 3 du présent projet de loi, le juge des enfants ainsi saisi ne saurait prendre de décision sans avoir préalablement consulté le service éducatif auprès du tribunal (SEAT).

Dans de telles conditions (affaire simple, connaissance du mineur et impossibilité de prononcer une sanction pénale), la convocation par officier de police judiciaire aux fins de jugement paraît de nature à accélérer la réponse judiciaire à la délinquance juvénile sans pour autant remettre en cause les principes de l'ordonnance de 1945.

Lors de sa journée d'auditions publiques du 25 avril 1996, l'attention de votre commission a cependant été attirée sur deux points susceptibles de poser des difficultés d'application :

- la suppression de la requête obligatoire du procureur de la République pour saisir le juge des enfants peut être à l'origine de demandes en nullité qui pourraient en définitive se révéler préjudiciables à l'objectif recherché d'une accélération du cours de la justice

En effet, en cas d'instruction orale donnée à l'OPJ, rien ne permettra de prouver que le ministère public aura eu effectivement l'intention de saisir le juge des enfants.

Pour éviter toute difficulté de cet ordre, votre commission vous propose donc d'exiger que l'instruction donnée à l'OPJ par le procureur de la République soit délivrée par écrit. Cette exigence ne doit cependant pas conduire à un formalisme excessif. Aussi votre commission estime-t-elle que l'instruction pourra être délivrée notamment par télécopie ;

- l'objectif de la référence à l'article 552 du code de procédure pénale est en soit bien compréhensible : il s'agit d'ériger un délai minimum (de dix jours en principe) entre la convocation par l'OPJ et l'audience.

Il pourra néanmoins poser des difficultés pratiques dans les départements frontaliers puisque le délai minimum est porté à 2,5 mois si la partie citée réside à l'étranger. Cette exigence n'est-elle pas contraire à l'objectif d'une justice plus rapide dans les affaires les plus simples ?

Pour éviter toute rigidité excessive, tout en prévoyant un délai minimum entre la convocation par l'OPJ et l'audience, votre commission vous propose donc de supprimer la référence à l'article 552 du code de procédure pénale et de préciser que ce délai ne saurait être inférieur à dix jours.

Au demeurant, la fixation d'un délai précis dans l'ordonnance de 1945 en lieu et place d'un renvoi au code de procédure pénale renforce le caractère expressif de la loi : il souligne la spécificité de l'ordonnance et le souci du législateur d'exclure la comparution immédiate pour les mineurs.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article premier ainsi modifié.

Article 2 - Jugement après convocation par officier de police judiciaire

Cet article a pour objet d'insérer au sein de l'ordonnance du 2 février 1945 un article 8-1 précisant les modalités du jugement lorsque le juge des enfants est saisi selon le procédé de la convocation par officier de police judiciaire.

Après avoir précisé qu'il appartiendrait à ce magistrat de constater l'identité du mineur et de s'assurer qu'il est assisté d'un avocat, le texte proposé envisage deux séries d'hypothèses faisant l'objet de deux paragraphes distincts : les affaires que l'on peut qualifier de simples et les affaires complexes.

1) Les affaires simples (paragraphe I)

Il s'agit des faits pour lesquels aucune investigation supplémentaire n'est nécessaire pour parvenir à la recherche de la vérité.

Le projet de loi prévoit alors que le juge des enfants statuera sur la prévention en chambre du conseil et, s'il y a lieu, sur l'action civile.

S'il estime que l'infraction est établie, le juge des enfants pourra retenir l'une des solutions suivantes : prononcer immédiatement une mesure qui ne saurait aller au-delà du rappel à la loi ou de la médiation-réparation ou bien recourir à la « césure » du procès.

a) Le rappel à la loi dès la première comparution

Si le juge estime que des investigations sont suffisantes sur la personnalité du mineur et entend prononcer un simple rappel à la loi, il peut alors prononcer immédiatement cette mesure, laquelle peut consister :

- en une dispense de peine (article 8-2° de l'ordonnance) ;

- en l'admonestation (article 8-3° de l'ordonnance) ;

- en la remise aux parents, au tuteur ou à une personne digne de confiance (article 8-4° de l'ordonnance) ;

- en une mesure ou une activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime, avec son accord, ou dans l'intérêt de la collectivité.

b) La césure pénale

Elle peut intervenir dans deux hypothèses :


Première hypothèse : le juge constate que des investigations suffisantes sur la personnalité du mineur ont déjà été effectuées mais envisage de prononcer une mesure plus contraignante.

Dans cette hypothèse, qui suppose que le juge des enfants entend prononcer soit la mise sous protection judiciaire (article 8-5° de l'ordonnance) soit le placement (article 8-6°) du mineur, il doit renvoyer l'affaire à une prochaine audience de la chambre du conseil qui devra avoir lieu dans les six mois (délai fixé par l'Assemblée nationale, avec l'accord du Gouvernement, alors que le projet de loi initial le fixait à quatre mois).

Nous sommes alors en présence d'une « césure » du procès pénal, caractérisée par un décalage dans le temps entre la déclaration de culpabilité et la mesure prononcée.


• Deuxième hypothèse : le juge estime que les investigations sur la personnalité du mineur ne sont pas suffisantes

Dans ce cas, il renvoie l'affaire à une prochaine audience de la chambre du conseil qui doit intervenir dans les six mois. Il appartient alors au juge de recueillir des renseignements sur la personnalité du mineur et sur la situation matérielle et morale de sa famille par une enquête sociale (article 8, quatrième alinéa de l'ordonnance) et un examen médical (article 8, cinquième alinéa).

C'est la seconde hypothèse de césure pénale prévue par le projet de loi.

Il convient de souligner que, dans l'une ou l'autre de ces hypothèses, le juge des enfants pourra ordonner à l'égard du mineur, à titre provisoire, une mesure de placement, de liberté surveillée ou d'aide ou de réparation à l'égard de la victime ou de la collectivité.

2) Les affaires complexes (paragraphe II)

Si le juge des enfants estime que la complexité de l'affaire nécessite des investigations approfondies, il procède selon les modalités traditionnelles : instruction, puis (sauf non-lieu) jugement.

* *

*

Le tableau figurant ci-après résume les différentes solutions offertes au juge par ce nouveau dispositif de jugement accéléré.

Investigations déjà

effectuées sur la

personnalité du mineur

Décision du juge

Affaires simples

Suffisantes

- rappel à la loi (dispense, admonestation, remise ou réparation) dès la première comparution ;

- césure (déclaration de culpabilité puis nouvelle audience dans les 6 mois) si mesure de placement ou de mise sous protection judiciaire envisagée

Insuffisantes

Césure : déclaration de culpabilité puis nouvelle audience dans les 6 mois (avec entretemps enquête de personnalité)

Affaires complexes

Retour à la procédure traditionnelle

* *

*

Pour les raisons déjà indiquées, votre commission approuve le principe de la convocation par officier de police judiciaire qui devrait permettre d'accélérer les procédures concernant des jeunes délinquants dans les affaires simples sans pour autant remettre en question les principes fondamentaux de l'ordonnance de 1945.

Elle vous propose néanmoins huit amendements au dispositif du présent article 2. L'un de ceux-ci est d'ordre rédactionnel ; un autre opère une meilleure présentation des deux paragraphes de l'article 8-1. Les autres amendements peuvent être regroupés en quatre catégories tendant respectivement à :


S'assurer que le juge des enfants ne pourra statuer que s'il dispose de toutes les informations utiles sur le mineur.

En l'état actuel du projet de loi, le juge des enfants saisi sur le fondement de la convocation par officier de police judiciaire pourra prononcer une mesure à l'égard du mineur dès la première comparution s'il dispose d'informations suffisantes « sur la personnalité » de celui-ci.

Mais les informations dont on peut disposer sur un mineur ne se limitent pas à sa personnalité. Elles peuvent notamment concerner sa famille, sa fréquentation scolaire...

Dans le cadre des procédures traditionnelles, l'article 8 de l'ordonnance prend en compte ces différentes considérations en exigeant que le juge ait connaissance non seulement de « la personnalité du mineur » , mais également « des moyens appropriés à sa rééducation » .

Il ne faudrait pas que le juge dispose de moins d'informations dans le cadre de la convocation par OPJ que dans le cadre d'une procédure traditionnelle.

C'est pourquoi votre commission vous propose de reprendre au sein du nouvel article 8-1 les termes mêmes de l'article 8 en exigeant que le juge ne statue que s'il dispose d'informations suffisantes non seulement sur la personnalité du mineur, mais également sur les moyens appropriés à sa rééducation.


Mieux encadrer la faculté pour le juge de prononcer une mesure de réparation

En l'état actuel du droit, le prononcé d'une mesure de réparation est soumis à de strictes conditions et notamment à l'accord de la victime et, lorsqu'il est envisagé par la juridiction de jugement, à la consultation préalable du mineur et des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale (article 12-1 de l'ordonnance).

S'agissant du prononcé de cette mesure, à l'issue d'une convocation par OPJ, le projet de loi se limite à prévoir l'accord de la victime, condition certes essentielle mais insuffisante. Il convient en effet de recueillir également l'avis du mineur et des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, tout comme dans le cadre de l'article 12-1. C'est pourquoi votre commission vous propose un amendement à cette fin.


S'assurer que le juge des enfants ne pourra prononcer qu'une mesure éducative

D'après le projet de loi, si le juge « envisage de prononcer une autre mesure que celles prévues aux 2°, 3° et 6° de l'article 8 » (c'est-à-dire une mesure autre qu'un simple rappel à la loi), il peut le faire mais lors d'une prochaine audience. La formule retenue parait doublement ambiguë :

- d'abord, en permettant au juge des enfants de prononcer « une autre mesure » qu'un rappel à la loi, ne lui permet-on pas implicitement de prononcer « toute autre mesure », y compris une sanction pénale ? Votre commission ne le pense pas car ceci serait contraire à la fois à l'esprit de l'ordonnance de 1945 et, n'en doutons pas, à l'objectif des rédacteurs du projet de loi. Il conviendrait néanmoins de lever toute ambiguïté sur ce point ;

- en second lieu, la formule précitée pose un problème de rédaction : si le juge ne peut prononcer une mesure autre que celles prévues aux 2° à 4° de l'article 8 que lors d'une prochaine audience, cela signifie qu'il ne peut prononcer immédiatement une médiation-réparation (qui n'est pas prévue par les 2° à 4° précités). Il y a dès lors une contradiction qu'il convient de lever entre deux alinéas du projet de loi puisque, précisément, celui-ci prévoit plus haut que le juge pourra ordonner immédiatement une mesure de réparation.

Telles sont les deux raisons pour lesquelles votre commission vous propose de retenir une formule plus précise que celle précitée en exigeant que le juge des enfants renvoie l'affaire à une prochaine audience du conseil, non pas s'il envisage de prononcer « une mesure autre que celles prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article 8 » , mais, plus simplement, s'il envisage de prononcer « l'une des mesures prévues aux 5° et 6° » dudit article (à savoir la mise sous protection judiciaire du mineur ou son placement).


S'assurer que le juge ne pourra statuer selon la procédure de la convocation par OPJ que dans les affaires simples

Le paragraphe II du texte proposé pour l'article 8-1 de l'ordonnance de 1945 prévoit le retour à la procédure traditionnelle « si la complexité de l'affaire nécessite des investigations approfondies » .

Cette rédaction n'est pas pleinement satisfaisante pour deux raisons :

- la référence expresse à la complexité est malheureuse car elle sous-entend que la convocation par OPJ peut concerner des affaires complexes (dès lors que celles-ci ne nécessitent pas d'investigations approfondies). Or, en aucune manière la convocation par OPJ ne saurait concerner une affaire complexe, quelle qu'elle fut : elle devra se limiter aux affaires simples ;

- ensuite, l'expression « investigations approfondies » laisse penser que le jugement après convocation par OPJ est possible, même si des investigations supplémentaires restent à effectuer, dès lors que ces investigations ne sont pas approfondies. Il va de soi qu'il ne saurait en être ainsi et que la dérogation au principe selon lequel le juge des enfants ne peut statuer qu'après une information préalable n'est admissible que si une telle information est inutile, autrement dit, que si aucune investigation supplémentaire sur les faits n'est nécessaire.

C'est pourquoi, votre commission vous propose de préciser que la procédure traditionnelle s'appliquera dès lors que les faits nécessiteront des investigations supplémentaires (et non seulement quand la complexité de l'affaire nécessitera des investigations approfondies).

Au demeurant, cette rédaction présente l'avantage d'être complémentaire de celle retenue par le paragraphe I qui limite la convocation par OPJ aux faits ne nécessitant « aucune investigation supplémentaire » .

Votre commission vous propose d'adopter le présent article 2 ainsi modifié.

Article 2 bis - Convocation des parents devant le juge d'instruction ou le juge des enfants

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de Mme Véronique Neiertz, avec l'accord de la commission des Lois et du Gouvernement, a pour objet de compléter l'article 10 de l'ordonnance du 2 février 1945 afin de prévoir que, quelle que soit la procédure de comparution, le mineur et ses représentants légaux seront simultanément convoqués pour être entendus par le juge.

Ce faisant, il vise, pour reprendre les propos de Mme Neiertz, « à responsabiliser le plus possible les parents » , à éviter une « démission parentale » .

Votre commission partage cette analyse et vous propose même de compléter le dispositif prévu par cet article 2 bis en prévoyant, par amendement, que l'avocat du mineur sera également informé de l'évolution de la procédure.

Elle vous soumet également un amendement purement rédactionnel ainsi qu'un amendement de précision.

Elle vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 3- Consultation du service éducatif auprès du tribunal pour enfants

Cet article a pour objet de modifier l'article 12 de l'ordonnance du 2 février 1945, relatif à la consultation du service éducatif auprès du tribunal pour enfants (SEAT).

En sa rédaction actuelle, cet article prévoit deux cas de consultation du SEAT :

- la rédaction, à la demande du procureur de la République, du juge des enfants ou de la juridiction, d'un rapport écrit, joint à la procédure, contenant tous renseignements utiles sur la situation du mineur ainsi qu'une proposition éducative ;

- une consultation obligatoire, avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire du mineur ou de prolongation de la détention provisoire.

Les modifications proposées par l'article 3 du présent projet de loi procèdent à une mise à jour terminologique (consistant à remplacer la référence à l'éducation surveillée par la référence à la protection judiciaire de la jeunesse) et imposent également la consultation du SEAT préalablement :

- à toute décision du juge des enfants saisi selon la procédure de la convocation par officier de police judiciaire ;

- à toute réquisition du procureur de la République présentée aux fins de mise en oeuvre de la comparution à délai rapproché (article 8-2 de l'ordonnance prévu par l'article 4 du projet).

Compte tenu du fait que la comparution à délai rapproché pourra également être demandée en cours de procédure, en vertu de l'article 8-3 que le projet de loi propose d'insérer dans l'ordonnance de 1945 (article 4), il paraît souhaitable d'exiger également la consultation du SEAT dans cette hypothèse. Aussi votre commission vous soumet-elle un amendement à cette fin.

Elle vous soumet également un amendement ayant pour simple objet de consacrer un alinéa à la modification prévue par le présent article 3.

Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 4 - Comparution à délai rapproché

Cet article a pour objet d'insérer au sein de l'ordonnance du 2 février 1945 deux articles, portant les références 8-2 et 8-3, prévoyant la comparution à délai rapproché du mineur devant la juridiction de jugement.

1) La comparution à délai rapproché ab initio (article 8-2)

C'est au procureur de la République qu'il appartiendrait de requérir la comparution à délai rapproché d'un mineur, laquelle pourrait alors intervenir dans un délai (fixé par le juge des enfants) compris entre un et trois mois. L'ouverture de cette faculté est cependant soumise à trois conditions :

- être en matière correctionnelle ;

- que les diligences et investigations utiles pour connaître la personnalité du mineur et les moyens appropriés à sa rééducation aient été accomplies. Tel pourra notamment être le cas si le mineur a fait l'objet d'une procédure antérieure (qu'elle soit judiciaire ou administrative) ;

- que des investigations sur les faits ne soient pas nécessaires.

Si le procureur de la République demandait la comparution à délai rapproché du mineur, celui-ci serait immédiatement présenté au juge des enfants. On rappellera que, selon l'article 3 du projet de loi, la réquisition du procureur de la République devrait être précédée d'une consultation du SEAT.

Dès sa présentation devant le juge des enfants, le mineur serait assisté d'un avocat de son choix ou commis d'office qui pourrait consulter le dossier et communiquer librement avec le mineur. Dès cette présentation, le juge des enfants notifierait à ce dernier les faits retenus à son encontre ainsi que leur qualification juridique ; il recueillerait, après avoir entendu l'avocat, les déclarations du mineur par procès-verbal.

Cette présentation du mineur pourrait donner lieu à deux hypothèses :


première hypothèse : le juge des enfants fait droit aux réquisitions du procureur de la République. Il notifie alors au mineur le lieu, la date et l'heure de l'audience (dont les représentants légaux seront avisés par tout moyen).

Jusqu'à la comparution devant la juridiction de jugement, le juge des enfants peut alors ordonner les mesures prévues par les articles 8, 10 et 11 de l'ordonnance (enquête de personnalité, enquête sociale, contrôle judiciaire, détention provisoire, liberté surveillée...).


deuxième hypothèse : le juge d'instruction ne fait pas droit aux réquisitions du procureur de la République

Dans ce cas, il doit rendre une ordonnance motivée qui est susceptible d'appel par le procureur de la République, et lui seul, au plus tard le jour suivant la notification de ladite ordonnance. Cet appel est porté devant le président de la chambre spéciale des mineurs (ou son remplaçant), lequel doit statuer dans les quinze jours. Ce dernier peut soit confirmer l'ordonnance du juge des enfants, soit ordonner la comparution du mineur devant le tribunal pour enfant ou devant la chambre du Conseil. En cas de renvoi devant la juridiction de jugement, le président de la chambre spéciale des mineurs fixe le délai au cours duquel le procureur de la République devra citer le mineur à comparaître. Jusqu'à la comparution, le juge des enfants peut alors ordonner les mesures prévues aux articles 8, 10 et 11 de l'ordonnance.

2) La comparution à délai rapproché en cours de procédure
(article 8-3)

L'article 8-3 que le projet de loi propose d'insérer au sein de l'ordonnance de 1945 permettrait au procureur de la République de demander la comparution à délai rapproché à tout moment de la procédure, sous réserve que les conditions prévues par l'article 8-2 soient remplies (matière correctionnelle, accomplissement des diligences et investigations prévues par l'article 8, investigations sur les faits non nécessaires).

Dans ce cas, le juge des enfants devra statuer dans les cinq jours de la réception des réquisitions, par une ordonnance susceptible d'appel dans les mêmes conditions que celles prévues pour la comparution à délai rapproché ab initio.

À défaut de décision du juge des enfants dans ce délai de cinq jours, le procureur de la République pourrait saisir le président de la chambre spéciale des mineurs.

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Si les auditions auxquelles tant votre commission que votre rapporteur a procédé ont permis de mettre en avant un certain consensus sur le dispositif de la convocation par officier de police judiciaire (et notamment sur la césure pénale), la procédure de comparution à délai rapproché a donné lieu à davantage d'objections, dont la principale consistait à dénoncer une rupture de l'égalité des parties. Cette situation résulterait de la faculté reconnue au parquet de faire appel de l'ordonnance du juge refusant la comparution à délai rapproché alors que le mineur ne pourra contester la décision de recourir à cette procédure.

Force est néanmoins de constater que, d'une manière générale, la faculté des parties d'interjeter appel d'une mesure de procédure n'est pas absolue, alors que le parquet peut toujours faire appel d'une telle décision.

Il serait d'ailleurs contraire à l'objectif recherché d'une décision judiciaire plus proche des faits chaque fois que la personnalité du mineur est connue de prévoir l'appel d'une décision qui révélerait le plein accord du parquet et du juge des enfants.

Inversement, si le procureur est certain que le juge détient toutes les informations utiles sur le mineur, le bon fonctionnement de la justice suppose que, en cas de refus du juge de prendre une mesure à bref délai, un tiers puisse fixer la date de l'audience, après avoir constaté le bien-fondé des réquisitions du procureur.

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Votre commission vous soumet, outre un amendement rédactionnel et deux amendements de précision, des amendements tendant à :


Assurer la pleine information de l'avocat dès la présentation du mineur au juge des enfants

Selon le projet de loi, l'avocat pourra consulter le dossier dès la première présentation du mineur au juge des enfants.

Cette précision, pour nécessaire qu'elle soit, n'en est pas moins insuffisante puisque, à ce moment précis, le dossier ne comprendra pas encore les mesures d'investigations relatives à la connaissance du mineur diligentées au cours d'une procédure antérieure. Celles-ci ne seront en effet versées au dossier qu'une fois la décision prise de recourir à la comparution à délai rapproché.

C'est pourquoi votre commission vous propose de permettre à l'avocat du mineur de consulter, dès la présentation de celui-ci au juge des enfants, les renseignements dont dispose le magistrat sur la personnalité du mineur et sur les moyens appropriés à sa rééducation.


Préciser que les formalités relatives à la protection des droits de la défense lors de la présentation du mineur devront, à peine de nullité, être mentionnées au procès-verbal

Bien entendu, en vertu du principe posé par l'article 802 du code de procédure pénale, la nullité ne peut être prononcée que si l'irrégularité a porté atteinte aux intérêts de la partie concernée.


Élargir le champ des mesures d'investigations versées au dossier

Selon le projet de loi, une fois la décision de recourir à la comparution à délai rapproché prise, le juge doit verser au dossier les mesures d'investigations sur la personnalité du mineur diligentées « avant l'engagement des poursuites » .

Or, en pratique, il pourra arriver que le juge dispose d'investigations diligentées, dans le cadre d'une autre procédure, après l'engagement des poursuites. Cette hypothèse devrait concerner le cas où la comparution à délai rapproché serait décidé non pas ab initio mais en cours de procédure, sur le fondement du nouvel article 8-3 de l'ordonnance.

Afin de tenir compte de cette hypothèse, et de prévoir que le dossier comprendra également les éventuelles investigations diligentées après l'engagement des poursuites, votre commission vous propose d'exiger que soient versés au dossier tous les résultats dés mesures d'investigations sur la personnalité du mineur dont il dispose.

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Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 4 - Ajournement devant le tribunal pour enfants

Après l'article 4, votre commission vous propose un amendement tendant à insérer un article additionnel afin de permettre l'ajournement devant le tribunal pour enfants dans des conditions plus souples que devant les juridictions pour adultes.

Actuellement, le recours à l'ajournement est subordonné à trois conditions de fond :

- que le reclassement du coupable soit en voie d'être acquis ;

- que le dommage causé soit en voie d'être réparé ;

- que le trouble résultant de l'infraction soit sur le point de cesser.

L'ajournement étant particulièrement propice à la réinsertion -car il permet le prononcé rapide sur la culpabilité tout en s'accordant un délai de réflexion sur la peine-, il vous est proposé de le rendre plus aisé pour les mineurs : dans les cas où ces trois conditions ne seraient pas remplies, il suffirait que la personnalité du mineur permette d'espérer sa rapide réinsertion.

Ce faisant, il serait répondu à ce qui fut une demande de plusieurs intervenants lors de la journée d'auditions à laquelle a procédé votre commission (avocats, juges des enfants, éducateurs) à savoir étendre la césure pénale devant le tribunal pour enfants. On arriverait en effet à un résultat identique sans pour autant créer une nouvelle procédure devant cette juridiction.

Le dispositif que vous propose votre commission, qui ferait l'objet d'un article 27-1 de l'ordonnance, excluerait cependant l'ajournement avec mise à l'épreuve, la mise à l'épreuve ne présentant en effet pas d'utilité dès lors que, dans l'attente du prononcé de la peine, le tribunal peut, comme vous le suggère votre commission, soumettre le délinquant à une activité de réparation ou le placer sous le régime de la liberté surveillée.

Article 5 - Application de la loi outre-mer

Cet article a pour objet de rendre applicable dans les territoires d'outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte la loi soumise à notre examen.

Votre commission vous demande de l'adopter sans modification.

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