2. Un dispositif qui pourrait favoriser la délocalisation des activités de télévision par satellite à l'intérieur de l'Union
Si la directive comporte des dispositions destinées à préserver la « fuite » hors de la Communauté des activités de diffusion directe par satellite, elle n'offre pas en revanche de garanties sérieuses contre le risque de transfert de ces activités dans les États membres où la protection des droits est la moins élevée.
a) Les dispositions permettant le rattachement à un État membre d'émissions réalisées à partir d'États tiers
L'article 1 er -2-d de la directive prévoit deux cas dans lesquels des diffusions directes par satellite provenant d'États tiers où le niveau de protection des droits est inférieur à celui prévu par la directive pourront être réputées avoir eu lieu dans un État membre :
ï le premier cas est celui dans lequel la liaison montante vers le satellite est effectuée à partir d'un État membre : les titulaires de droits pourront alors les faire valoir auprès de l'exploitant de la station. On peut penser que cette disposition ne trouvera guère à s'appliquer, aucune exigence technique n'imposant de « monter » sur un satellite arrosant l'Europe à partir du territoire d'un État membre.
ï le second cas est celui d'un diffuseur établi dans la Communauté et ayant « délégué » la communication au public effectuée dans un État tiers : celle-ci sera alors réputée avoir eu lieu dans l'État membre où le diffuseur a son principal établissement ( ( * )5) et le diffuseur sera responsable de l'exploitation des droits.
b) Le risque de délocalisation de la diffusion directe par satellite à l'intérieur de la Communauté
•
Certes,
la directive écarte
certains risques de distorsions entre les niveaux de protection
assurés dans les différents États
membres :
- elle pose le principe du droit exclusif de l'auteur d'autoriser la télédiffusion de son oeuvre (art. 2) et exclut donc tout régime de licence légale (elle laisse en revanche la possibilité aux États membres qui le souhaitent, dans certaines conditions et pour certaines catégories d'oeuvres, de prévoir l'extension de contrats collectifs entre des sociétés de gestion collective et des diffuseurs à des titulaires de droits non représentés) ;
- elle prévoit une protection minimale des droits voisins, par référence à la directive n° 92/100 ;
- elle reconnaît la qualité d'auteur ou de co-auteur d'une oeuvre audiovisuelle à son réalisateur principal ;
- - enfin, l'intervention de la directive n° 93/98 a, postérieurement à celle de la directive n° 93/83, harmonisé la durée de protection des droits patrimoniaux.
• Pour autant les
graves lacunes de
l'harmonisation communautaire du droit de la propriété
littéraire et artistique,
en matière de
titularité des droits, de règles de rémunération,
de sanctions, et surtout de droit moral, laissent subsister des
différences importantes entre les niveaux de protection des droits que
l'application des dispositions « satellite » ne fera que
renforcer, en favorisant notamment l'installation des activités de
diffusion dans les pays où la protection du droit moral est la plus
faible, et préparant peut-être ainsi, à terme, une
harmonisation au plus bas niveau du droit moral.
Un véritable souci de la protection et de l'harmonisation à un haut niveau du droit d'auteur aurait donc dû conduire à choisir une autre règle que celle de l'injection, en l'occurrence beaucoup plus favorable aux diffuseurs qu'aux auteurs.
* (5) Au sens de l'article 58 du Traité, le lieu du « principal établissement » d'une personne morale de droit public ou privé, qui peut être distinct de celui de son « siège statutaire » ou de son « administration centrale » correspond à son centre d'exploitation, à l'endroit où sont rassemblés les moyens lui permettant d'exercer son activité.