N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 6b

COHÉSION DES TERRITOIRES - AMÉNAGEMENT DES TERRITOIRES

(Programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement
du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État »)

Rapporteur spécial : M. Bernard DELCROS

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, MM. Vincent Capo-Canellas, Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Jean-Baptiste Olivier, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean-Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8

Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

Les programmes 112 « impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « interventions territoriales de l'État » mobilisent, en 2025, un total de 325,9 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 289,3 millions d'euros en crédits de paiement (CP). À cela s'ajoutent 747 millions d'euros de dépenses fiscales adossées au programme 112. Bien que les crédits qui leur sont consacrés paraissent peu élevés, ces deux programmes ont en réalité un effet levier important sur le tissu économique local et l'amélioration de l'accès aux services.

I. LE PROGRAMME 112 « IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE » : UN PROGRAMME TRÈS FORTEMENT MIS À CONTRIBUTION

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit d'affecter au seul programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » 248,3 millions d'euros en AE et 211,7 millions d'euros en CP, contre 397,9 millions d'euros en AE et 348,5 millions d'euros en CP, en 2024. Les crédits prévus pour le programme 112 évoluent à la baisse de 37,59 % et 39,24 % par rapport à la loi de finances initiale de 2024.

Évolution des crédits par action du programme 112

(en euros ou en %)

 

LFI 2024

PLF 2025

Variation 2025/2024 
en volume

Variation 2025/2024 en %

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 11 - Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) - section locale

190 525 726

130 812 235

65 024 932

21 064 187

125 500 794

- 109 748 048

- 65,87 %

- 83,90 %

Action 12 - Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) -section générale

114 344 299

117 349 540

111 846 538

114 331 532

- 2 497 761

- 3 018 008

- 2,18 %

- 2,57 %

Action 13 - Soutien aux opérateurs

93 061 442

93 061 442

71 461 442

71 461 442

- 21 600 000

- 21 600 000

- 23,21 %

- 23,21 %

Action 14 - Prime d'aménagement du territoire (PAT) - contrats de ruralité - pactes État-métropoles

-

7 297 312

-

4 888 151

-

- 2 409 161

-

- 33,01 %

Total

397 931 467

348 520 529

248 332 912

211 745 312

- 149 598 555

- 136 775 217

- 37,59 %

- 39,24 %

Source : réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

A. UNE FORTE DIMINUTION DES CRÉDITS DÉDIÉS À LA POLITIQUE CONTRACTUELLE DE L'ÉTAT DANS LES TERRITOIRES QUI ENTRAÎNERA LE REPORT D'OPÉRATIONS

Les différents partenariats contractuels entre l'État et les collectivités visent la mise en oeuvre de projets structurants pour les territoires. Ils se déclinent sous plusieurs formes : les contrats de plan État-régions pour la génération 2021-2027 (CPER), les contrats de plan interrégionaux de fleuves et de massifs (CPIER), les pactes de développement territorial, les contrats de convergence et de transformation (CCT) ainsi que les contrats territoriaux locaux.

Les CPER, les CPIER ainsi que les douze pactes de développement territorial sont particulièrement impactés par la baisse des crédits, pour un montant total alloué de 43,7 millions d'euros en AE en 2025, contre 148,1 millions d'euros en 2024 et aucun CP.

Les CCT dont l'objet est de soutenir le développement des outre-mer, voient quant à eux leurs crédits maintenus en 2025 : 5,4 millions d'euros en AE et 4 millions d'euros en CP.

La variation entre 2024 et 2025 est ainsi particulièrement importante, à hauteur de - 65,8 % en AE et - 83,9 % en CP. Cette baisse n'est pas une annulation des crédits des contrats concernés mais un report de la plupart des opérations initialement programmées pour 2025.

Le rapporteur spécial souligne que les crédits prévus en 2025 et reportés devront être inscrits lors des exercices budgétaires ultérieurs en application des accords conclus entre l'État et les collectivités locales. Il en va du respect de l'engagement de l'État pris lors de la signature de ces contrats et de la préservation du rapport de confiance entre l'État et les collectivités.

B. UNE DIMINUTION IMPORTANTE DES CRÉDITS ALLOUÉS À L'AGENCE NATIONALE DE LA COHÉSION DES TERRITOIRES QUI FAIT CRAINDRE UNE BAISSE DES MOYENS CONSACRÉS À L'INGÉNIERIE LOCALE

L'ANCT est un établissement public dont l'objectif est de renforcer la cohésion sociale et de réduire les inégalités territoriales, en particulier à travers les réponses qu'elle apporte aux projets des collectivités. Dans ce cadre, l'agence assure la coordination de nombreux programmes nationaux territorialisés, parmi lesquels :

- le programme « Action coeur de ville » (ACV), destiné à renforcer l'attractivité des villes « moyennes », a été prorogé et a mobilisé depuis sa création environ 9,2 milliards d'euros ;

- « Petites villes de demain » est une déclinaison du programme ACV axée sur des communes de plus petite taille ayant un rôle de centralité (1 600 communes de moins de 20 000 habitants, 3 milliards d'euros sur 5 ans dont 2,8 milliards d'euros déjà engagés) ;

- « Villages d'avenir », lancé en 2023, accompagne les communes rurales dans l'élaboration et la réalisation de leurs projets de développement : l'ANCT anime le réseau des 100 chefs de projet déployés dans les départements depuis le début de l'année ;

- « Fabriques de territoires » soutient la mise en place de « tiers lieux ». L'État a lancé plusieurs appels à manifestation d'intérêt (AMI) successifs pour identifier des « fabriques de territoire », existantes ou en projet, dont certaines implantées en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et d'autres dans les territoires ruraux ;

- « Territoires d'industrie » soutient l'activité industrielle (127 sites labellisés, portant 2 400 projets) ;

- le « Volontariat territorial en administration » (VTA), finance des contrats de mission pour de jeunes diplômés, de niveau bac + 2, pour effectuer une mission de 12 à 18 mois au service du développement des projets de territoires ruraux. En 2025, seul le volet VTA jeunes est maintenu, les VTA experts ne seront plus financés, soit 4 millions d'euros reconduits contre 6 millions d'euros l'an dernier.

Enfin, les « Conseillers numériques » accompagnent les usagers en difficulté avec le « numérique du quotidien », pour 41,8 millions d'euros en 2025. Si leur financement est porté par une autre mission, ils sont indissociables du dispositif France services.

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une diminution de 17 millions d'euros de la subvention pour charges de service public (SCSP) allouée à l'ANCT, qui passe de 81,3 millions d'euros en 2024 à un peu plus de 64 millions d'euros en 2025. Il intègre également une diminution de sa subvention pour charges d'investissement (SCI), qui passe à 3 millions d'euros en 2025 contre 3,8 millions d'euros en 2024. La baisse des crédits alloués à l'ANCT n'influera pas sur la mise en oeuvre des différentes actions ci-dessus rappelées, dans la mesure où celles-ci dépendent de crédits distincts de ceux de l'agence. En revanche, cette diminution pourrait impacter le fonctionnement interne de l'agence, ainsi que le soutien à l'ingénierie qu'elle apporte aux collectivités dans le cadre de ses moyens propres.

Dans ce contexte difficile pour l'agence qui la conduira nécessairement à faire des choix, le rapporteur spécial souligne la nécessité de préserver le soutien à l'ingénierie locale, qui est déterminant pour permettre la mise en oeuvre des projets sur mesure portés notamment par les plus petites collectivités.

C. LA PRÉSERVATION DES CRÉDITS DU RÉSEAU FRANCE SERVICES : UN POINT DE SATISFACTION POUR UN DISPOSITIF AU SUCCÈS INDÉNIABLE

Le réseau France services, initié en 2019, permet aux usagers d'avoir un accès de proximité à un socle minimal de services portés par 9 opérateurs : la Poste, France Travail, la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), la caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (MSA), le ministère de l'intérieur, le ministère de la justice, et la direction générale des finances publiques. En 2024, le réseau s'est enrichi de deux nouveaux opérateurs, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et l'agence nationale de l'habitat.

Le rapporteur spécial souligne le succès indéniable que rencontre le dispositif auprès des usagers ainsi que son importance pour le maintien du lien de proximité entre les services publics et les habitants des territoires. Chaque mois, 834.000 usagers bénéficient d'un accompagnement sur mesure. L'objectif d'un million d'accompagnements par mois prévu pour 2026 devrait donc être atteint dès la fin de l'année 2024.

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une augmentation de 23,10 % des crédits alloués à ce dispositif, tant en AE qu'en CP. Ceux-ci passent ainsi de 53,2 millions d'euros en 2024, à 65,5 millions d'euros en 2025. Cette augmentation devrait permettre la hausse de la dotation attribuée à chaque France services qui passerait de 40 000 euros en 2024 à 45 000 euros en 2025.

Enfin, la loi de finances pour 2024 prévoyait une majoration pour les structures implantées en zones France ruralités revitalisation (FRR) de 10 000 euros par site. Or, l'augmentation du nombre de communes classées en FRR dans le PLF 2025 et la hausse du nombre de France services impliquent mécaniquement une augmentation des crédits nécessaires pour atteindre cet objectif alors que l'enveloppe consacrée à la majoration reste stable. Pour contrevenir à cette problématique, le rapporteur spécial proposera une majoration des crédits affectés à la « bonification FRR » afin de la porter à 13 050 575 euros, soit une augmentation de 5 500 575 euros.

D. L'AUGMENTATION DES DÉPENSES FISCALES POUR PERMETTRE LA MISE EN oeUVRE DES DISPOSITIFS ESSENTIELS DE ZONAGE

Outre les dépenses budgétaires, le programme 112 intègre des dépenses fiscales qui prennent la forme d'exonération de fiscalité. En 2025, le coût total de ces dépenses est estimé à 747 millions d'euros et regroupent notamment le plan pour la Corse et les zones France ruralités revitalisation (FRR). Ces dépenses fiscales ont augmenté de 16,4 % entre 2020 et 2025, passant de 642 à 747 millions d'euros.

Le rapporteur spécial souligne l'importance de ces dispositifs incitatifs qui soutiennent le développement de l'économie locale et le maintien des services au public. En particulier, le dispositif des FRR revêt un rôle prépondérant en matière de cohésion sociale et territoriale. Le rapporteur spécial est ainsi favorable à l'article 27 du PLF pour 2025, qui permet aux communes bénéficiaires de l'ancien dispositif ZRR, mais qui ne sont pas éligibles aux FRR, de continuer à bénéficier des mesures en vigueur.

En conclusion de l'examen du programme 112, le rapporteur spécial tient à souligner le rôle essentiel joué par le FNADT, outil financier de l'État souple et efficace, dont l'effet levier sur les politiques de développement local des territoires est considérable et avéré. Dès lors, il soutient que le FNADT, qui subit en 2025 une coupe budgétaire importante en raison du report d'un an des opérations contractualisées, devra être rétabli et renforcé en 2026.

II. LE PROGRAMME 162 « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT » : UN DISPOSITIF SOUPLE POUR SEPT ACTIONS TERRITORIALISÉES EN 2025

Le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE), créé en 2006, est composé de sept actions territorialisées répondant à des enjeux locaux très spécifiques qui nécessitent l'action transversale de différents acteurs. Le PITE présente ainsi deux caractéristiques : les actions mises en oeuvre sont limitées à un périmètre géographique donné et non à une politique publique nationale, et son outil comptable lui permet de mutualiser des moyens provenant des différents ministères qui sont rendus fongibles et à disposition des préfets. Ces spécificités font de ce programme un outil souple et performant, à même de répondre à des problématiques complexes et d'encourager les mutualisations et les effets leviers.

Les sept actions distinctes du programme doivent être appréhendées individuellement sur le plan budgétaire, du fait de leur indépendance les unes par rapport aux autres. Au regard de la complexité des problématiques traitées, de leur évolution dans le temps et du caractère limité de leurs financements, le programme connait chaque année de multiples évolutions qui correspondent à des situations spécifiques. Le tableau suivant en fait le récapitulatif. Le rapporteur spécial souligne le report important de 2024 à 2025 d'investissements en Corse qui laisse apparaitre une hausse des crédits de paiement de 1210,40 %.

Autorisations d'engagement et crédits de paiement
du programme 162 par action (comparaison LFI 2024 - PLF 2025)

Action

Intitulé

LFI 2024

PLF 2025

Évolution

LFI 2024 -PLF 2025 (en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

02

Eau - Agriculture en Bretagne

1 885 122

1 866 265

1 721 215

1 714 336

- 8,69 %

- 8,14 %

04

Plans d'investissement en Corse

47 907 005

3 787 563

46 663 124

49 632 370

- 2,66 %

+ 1210,40 %

08

Plan Chlordécone
en Martinique et Guadeloupe

4 263 723

4 277 500

4 088 704

4 084 102

- 4,10 %

- 3,39 %

09

Plan littoral 21

8 000 000

4 205 454

8 233 063

5 516 942

+ 2,91 %

+ 31,19 %

10

Fonds interministériel transformation de la Guyane

11 608 184

11 539 668

10 395 001

10 400 248

- 10,45 %

- 9,87 %

11

Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire

57 002

658 732

Action supprimée

- 100 %

- 100 %

12

SIS Wallis-et-Futuna

2 067 544

2 049 874

2 054 163

2 049 674

- 0,65 %

- 0,01 %

13

Plan Sargasses II

4 857 770

4 816 500

4 200 000

4 200 000

- 13,54 %

- 12,80 %

Total

80 646 350

33 151 556

77 597 672

77 597 672

- 4,12 %

+ 134,07 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances

Réunie le mardi 12 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par un amendement de crédits réallouant 5,5 millions d'euros vers la bonification des maisons France services en zone France ruralités revitalisation portée par le programme 112.

Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite

pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2024, étaient parvenues au rapporteur spécial :

- 89 % des réponses relatives au programme 162 « Interventions territoriales de l'État » ;

- 93 % des réponses relatives au programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire ».

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS DE LA MISSION 

Les crédits de la mission « Cohésion des territoires » s'élèvent, dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025, à 23,49 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 23,78 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), contre 19,59 milliards d'euros en AE et 19,19 milliards d'euros en CP en 2024, soit une augmentation, en valeur absolue, de 3,9 milliards d'euros en AE et 4,6 milliards d'euros en CP.

Ces crédits sont répartis, comme les années précédentes, entre six programmes dont les périmètres n'ont évolué que très marginalement. Ces programmes, par ordre décroissant d'importance budgétaire, sont les suivants :

- le programme 109 « Aide à l'accès au logement » qui porte principalement les crédits des aides personnelles au logement ;

- le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » qui vise à répondre aux situations d'hébergement d'urgence et à permettre l'accès au logement ;

- le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » qui finance, via des fonds de concours, les aides à la pierre et, au moyen de crédits budgétaires, d'autres actions relatives au logement, à la construction, à l'urbanisme et à l'aménagement ;

- le programme 147 « Politique de la ville » qui porte les moyens de l'État consacrés aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et au nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU) ;

- le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » qui comprend le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), qui finance une partie des contrats de plan État-régions ainsi que de nombreux dispositifs à destination des territoires, dont France Services ;

- et, enfin, le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) qui porte en 2025 sept actions spécifiques de portée régionale ou interrégionale.

Ces crédits portent donc des politiques publiques très variées. Dans leur immense majorité, ils sont destinés à soutenir l'action de l'État en faveur du logement et de l'habitat. Ils comprennent, dans des proportions bien moindres, des moyens alloués aux territoires peu densément peuplés afin, entre autres, de porter des dispositifs contractualisés entre l'État et les territoires, et de favoriser l'accès aux services publics et au numérique dans ceux-ci. C'est l'objet du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire ». En parallèle, la mission comporte un programme finançant des actions territorialisées particulièrement transversales : le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (le « PITE »), répondant à des enjeux divers.

Le présent rapport commente les crédits affectés à ces deux programmes. Contrairement à la mission dans son ensemble dont les crédits augmentent substantiellement, sous l'effet notamment d'une mesure de périmètre, ces deux programmes sont particulièrement mobilisés en 2025 en vue de contribuer à l'objectif de redressement des finances publiques.

Évolution des crédits de la mission « Cohésion des territoires »

(en millions d'euros et en pourcentage)

   

Exécution 2023

LFI
2024

Crédits totaux 2024

format 2025

PLF 2025

PLF 2025 / crédits totaux 2024 format 2025

FDC
et ADP 2025

   

montant

en %

corrigé inflation

177 - Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

AE

3 068,7 

2 900,9 

2 900,9 

2 906,1 

5,2

+ 0,2 %

- 1,6 %

0,2 

CP

3 076,5 

2 925,7 

2 935,0 

2 930,9 

- 4,1 

- 0,1 %

- 1,9 %

 

109 - Aide à l'accès au logement

AE

13 290,8 

13 656,4 

16 730,4 

17 015,6

285,2 

1,7 %

- 0,1 %

 

CP

13 290,8 

13 656,4 

16 730,4 

17 015,6

285,2 

1,7 %

- 0,1 %

 

135 - Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

AE

1 395,6 

1 917,9 

4 607,8 

2 688,1 

- 1 919,7 

- 41,7 %

- 42,7 %

493,5 

CP

1 089,2 

1 583,7 

3 641,4 

2 995,8 

- 645,6 

- 17,7 %

- 19,2 %

403,1 

112 - Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

AE

396,8 

397,9 

388,5 

248,3 

- 140,2 

- 36,1 %

- 37,2 %

48,0 

CP

340,1 

348,5 

339,1 

211,7 

- 127,4 

- 37,6 %

- 38,7 %

48,0 

147 - Politique de la ville

AE

565,4 

639,5 

639,5 

549,6 

- 89,9 

- 14,1 %

- 15,6 %

0,5 

CP

565,5 

639,5 

639,5 

549,6 

- 89,9 

- 14,1 %

- 15,6 %

0,5 

162 - Interventions territoriales de l'État

AE

116,4 

80,6 

80,6 

77,3 

- 3,3 

- 4,1 %

- 5,8 %

22,6 

CP

148,5 

33,2 

33,2 

77,6 

44,4 

134,1 %

129,9 %

95,1 

Total mission

AE

18 833,7 

19 593,3 

25 347,8 

23 485,0

- 1 868,4 

- 7,3 %

- 9,0 %

564,7 

CP

18 510,6 

19 186,9 

24 318,6 

23 781,2

- 537,3 

- 2,2 %

- 3,9 %

546,6 

Crédits totaux 2024 format 2025 : loi de finances initiale (LFI) + mesures de périmètre et de transfert en PLF 2025. AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Par ailleurs, le Gouvernement a fait état de sa volonté, postérieurement au dépôt du PLF pour 2025 à l'Assemblée nationale, de réaliser 5 milliards d'euros supplémentaires d'économies, ce qui pourrait, d'après les informations recueillies, affecter le programme 112 à hauteur de 137 935 euros et le programme 162 à hauteur de 3 millions d'euros, en AE comme en CP.

S'agissant des réflexions générales sur la mission dans son ensemble, le rapporteur spécial précise enfin qu'il prend acte des données mentionnées dans le rapport relatif à l'impact environnemental du budget annexé au PLF pour 2025, lequel précise que les crédits budgétaires, taxes affectées et dépenses fiscales de la mission « Cohésion des territoires » comptabilisent 5,11 milliards d'euros de crédits, taxes affectées et dépenses fiscales favorables, contre 0,58 milliard d'euros de crédits défavorables. Néanmoins, 85 % de ces crédits sont considérés comme neutres, et compte tenu de la part minime que les programmes 112 et 162 représentent dans la mission, il n'en tire pas de conclusion particulière.

Cotation environnementale de la mission « Cohésion des territoires »

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir du rapport sur l'impact environnemental du budget de l'État et du projet de loi de finances

II. LE PROGRAMME 112 « IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE » : UN PROGRAMME TRÈS FORTEMENT MIS À CONTRIBUTION EN VUE DU REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES

Représentant seulement 1,05 % des crédits, en autorisations d'engagement, de l'ensemble de la mission Cohésion des territoires dans le PLF pour 2025 (contre 1,7 % en loi de finances initiale - LFI - pour 2024), le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » porte paradoxalement des actions particulièrement suivies par les territoires concernés, en raison de leur effet levier sur le développement local.

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit d'affecter au programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » 248,3 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 211,7 millions d'euros en crédits de paiement (CP), contre 397,9 millions d'euros en AE et 348,5 millions d'euros en CP en 2024, ce qui correspond à des baisses respectives de 37,59 % et 39,24 % par rapport à la loi de finances initiale1(*).

Si l'on fait abstraction d'une très légère modification à la baisse du périmètre2(*) du programme 112, dont l'impact est marginal, cette importante diminution s'explique avant tout par la volonté gouvernementale de soumettre le programme à une très lourde contribution à l'objectif de redressement des comptes publics.

Si le rapporteur spécial souscrit à la volonté du gouvernement de réduire le niveau de déficit et plus généralement le niveau d'endettement, il considère que la diminution sensible des crédits du programme 112 en 2025 doit demeurer exceptionnelle compte tenu de l'effet démultiplicateur des financements portés par le présent programme3(*) et des engagements contractuels pris par l'État.

Évolution des crédits par action du programme 112

(en euros ou en %)

 

LFI 2024

PLF 2025

Variation 2025/2024 
en volume

Variation 2025/2024 en %

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 11 - Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) - section locale

190 525 726

130 812 235

65 024 932

21 064 187

- 125 500 794

- 109 748 048

- 65,87 %

- 83,90 %

Action 12 - Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) -section générale

114 344 299

117 349 540

111 846 538

114 331 532

- 2 497 761

- 3 018 008

- 2,18 %

- 2,57 %

Action 13 - Soutien aux opérateurs

93 061 442

93 061 442

71 461 442

71 461 442

- 21 600 000

- 21 600 000

- 23,21 %

- 23,21 %

Action 14 - Prime d'aménagement du territoire (PAT) - contrats de ruralité - pacte États-métropoles

-

7 297 312

-

4 888 151

-

- 2 409 161

-

- 33,01 %

Total

397 931 467

348 520 529

248 332 912

211 745 312

- 149 598 555

- 136 775 217

- 37,59 %

- 39,24 %

Source : réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Cette diminution de presque 40 % apparaît d'autant plus abrupte que les exercices précédents avaient été caractérisés par une hausse des crédits qui avait vocation à se poursuivre, au regard de la trajectoire annoncée jusqu'en 2026, pour permettre l'accompagnement et la montée en puissance de nouveaux dispositifs lancés4(*).

Toutefois, le rapporteur spécial observe que cette diminution n'est pas appliquée mécaniquement par le recours à un rabot qui frapperait uniformément tous les dispositifs mais qu'elle est principalement centrée sur le report de certaines opérations, en particulier en étalant dans le temps la réalisation de dispositifs contractuellement appuyés par l'État. C'est la raison pour laquelle l'action 11 « FNADT - Section locale » est la plus impactée par les diminutions de moyens envisagées (- 65,87 % en AE et - 83,9 % en CP).

Les deux opérateurs portés par le programme, l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) et Business France, sont également touchés par la diminution des crédits, mais dans une moindre mesure comparativement à la baisse qui frappe les dispositifs contractuels : l'action 13 « Soutien aux opérateurs » perd ainsi 23,21 % de ses moyens en AE comme en CP (71,5 millions d'euros pour 2025 contre 93,1 millions d'euros en LFI pour 2024). Bien que plus modeste, cette diminution aura un impact sur les territoires, en particulier au travers d'une contraction des mécanismes d'aide à l'ingénierie dont bénéficient les communes rurales au travers de l'ANCT.

L'action 12 « FNADT - section générale » qui porte un ensemble de dispositifs d'accompagnement des territoires ruraux dans l'accès à certains services publics ou au numérique, apparaît comme l'action la plus protégée des baisses envisagées même si elle perd 2,18 % de ses moyens en AE et 2,57 % en CP. Le rapporteur spécial considère que cette relative préservation était indispensable, au regard de l'importance des dispositifs et du niveau modéré des crédits portés en valeur absolue.

Enfin, l'action 14 « Prime d'aménagement du territoire (PAT) - contrats de ruralité - pacte États-métropoles » ne comporte plus que des restes à payer, d'où l'absence d'autorisations d'engagement et l'ouverture de crédits de paiement en baisse de 33,01 % pour 2025 (4,88 millions d'euros contre 7,29 millions d'euros en LFI pour 2024).

Crédits budgétaires par dispositif au sein des différentes actions
du programme 112

   

Loi de finances initiale pour 2024

PLF 2025

Action 11

FNADT contractualisé

HT2

AE

190 525 726

65 024 932

CP

130 812 235

21 064 187

Anciennes générations

CPER 2007-2014

HT2

AE

591 427

0

CP

CPER 2015-2020

HT2

AE

19 306 375

0

CP

Générations actuelles

CPER 2021-2027

HT2

AE

148 135 726

43 697 648

CP

76 641 303

0

dont CPER

HT2

AE

117 207 155

34 141 490

CP

59 948 379

0

dont CPIER

HT2

AE

30 928 571

9 556 158

CP

16 692 924

0

CCT

CCT

HT2

AE

5 490 000

5 490 000

CP

4 244 819

4 002 790

Pactes

Pactes de développement territorial

HT2

AE

36 900 000

15 837 284

CP

30 028 311

17 061 397

Action 12

FNADT hors CPER

HT2

AE

104 944 299

100 739 299

CP

107 949 540

103 224 293

FNADT hors CPER

T2 et HT2

AE

112 944 299

108 846 538

CP

115 949 540

111 331 532

France Services

Dispositif France Services

HT2

AE

53 205 000

65 500 000

CP

53 205 000

65 500 000

Animation départementale du dispositif

HT2

AE

2 500 000

2 500 000

CP

2 500 000

2 500 000

France Ruralités

France Services - bonification France ruralités

HT2

AE

7 550 000

7 550 000

CP

7 550 000

7 550 000

Autres mesures France Ruralités

(VTA, lieux de convivialité, PVD)

HT2

AE

19 000 000

16 000 000

CP

19 000 000

16 000 000

100 chefs de projets village d'avenir

T2

AE

8 000 000

8 107 239

CP

8 000 000

8 107 239

dont chefs de projets village d'avenir

T2

AE

6 000 000

6 000 000

CP

6 000 000

6 000 000

dont chefs de projets village d'avenir

T2

AE

2 000 000

2 107 239

CP

2 000 000

2 107 239

Hors France Ruralités

Section générale (= soutien à des associations)

HT2

AE

1 889 299

1 889 299

CP

3 327 282

2 574 943

Restructuration des sites de défense

HT2

AE

0

0

CP

1 567 258

299 350

Politique de la Montagne

HT2

AE

800 000

800 000

CP

800 000

800 000

Territoires d'industrie

HT2

AE

2 000 000

4 000 000

CP

2 000 000

5 500 000

Numérique - tiers-lieux (géré par les préfectures pour l'ouverture de nouveau tiers-lieux)

HT2

AE

14 000 000

0

CP

14 000 000

0

Soutien à l'animation du réseau des tiers lieux

(via l'ANCT et le groupement d'intérêt public tiers lieu)

HT2

AE

4 000 000

2 500 000

CP

4 000 000

2 500 000

Action 13

Partenariat national 112

HT2

AE

1 400 000

3 000 000

CP

1 400 000

3 000 000

Soutien aux opérateurs

ANCT

HT2

AE

88 261 442

68 261 442

CP

88 261 442

68 261 442

Mesures complémentaires LFI 24 (cités éducatives et

Fonds pour la souveraineté numérique)

HT2

AE

2 100 000

 

CP

2 100 000

 

Soutien et fonctionnement demandes complémentaires

 : SCI

HT2

AE

3 000 000

 

CP

3 000 000

 

Business France

HT2

AE

4 800 000

3 800 000

CP

4 800 000

3 800 000

Action 14 -Restes à payer

PAT

HT2

AE

4 988 489

104 720

CP

Contrats de ruralité

HT2

AE

1 691 263

1 410 602

CP

Pacte État métropoles

HT2

AE

617 561

372 829

CP

Total

Total P112 hors titre 2

HT2

AE

389 931 467

240 825 673

CP

340 520 529

204 238 073

Total P112

T2 et HT2

AE

397 931 467

248 332 912

CP

348 520 529

212 345 312

Source : Direction générale des collectivités locales (DGCL)

A. UNE FORTE DIMINUTION DES CRÉDITS DÉDIÉS À LA POLITIQUE CONTRACTUELLE DE L'ÉTAT DANS LES TERRITOIRES QUI ENTRAÎNERA LE REPORT D'OPÉRATIONS

Le partenariat contractuel entre l'État et les territoires se décline sous plusieurs formes de contrats : les contrats de plan État-régions (CPER), les contrats de plan interrégionaux de fleuves et de massifs pour la génération 2021-2027 (CPIER), ainsi que les pactes territoriaux. Ce sont principalement des dispositifs territoriaux contractualisés qui sont touchés par la forte diminution des crédits sur le programme en 2025.

1. Des crédits CPER et CPIER qui représentaient plus des deux tiers du programme 112 jusqu'alors et qui s'effondrent en 2025

L'action 11 « section locale du Fonds National d'Aménagement et de Développement du Territoire (FNADT) » contribue au financement du partenariat contractuel de l'État à travers les contrats de plan État-régions (CPER), les contrats de plan interrégionaux (CPIER) de fleuves et de massifs pour la génération 2021-2027, ainsi que plusieurs contrats territoriaux, incluant les contrats de convergence territoriale.

Cette action couvre également le soutien aux pactes de développement territorial, spécifiques aux territoires les plus fragiles. Ces pactes visent à mieux coordonner l'action des pouvoirs publics, mais aussi des acteurs économiques et sociaux autour de la mise en oeuvre de projets stratégiques partagés. Ils agrègent divers financements, offrant ainsi plus de cohérence à l'action de l'État dans ces territoires.

Enfin, l'État, à travers cette action, vient en soutien aux territoires qui subissent le « redéploiement des implantations territoriales des armées », ainsi que sont qualifiées les fermetures de caserne par l'État, à travers les contrats de redynamisation de site de défense (CRSD) qui ont vocation à accompagner la transition de ces territoires.

a) Aucun moyen alloué à la finalisation des CPER 2015-2020 dans le PLF pour 2025.

Les CPER 2015-2020 ont été signés entre l'État et les régions et ont fait l'objet depuis de plusieurs ajustements pour tenir compte :

- en 2016, du nouveau découpage régional5(*) ;

- du remplacement des CPER ultramarins par les contrats de convergence et de transformation (CCT) 2019-20226(*) ;

- de la prolongation des volets « mobilité multimodale » des CPER 2015-2020 jusqu'en 2022 ;

- de l'intégration dans le dispositif des crédits du plan « France relance » afin de coordonner les calendriers du plan et des contrats.

L'État a ainsi contractualisé, hors crédits de l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), un total de 13,7 milliards d'euros sur la durée de cette génération 2015-2020 des CPER hexagonaux. Le taux d'engagement des autorisations d'engagement (AE) de cette génération de CPER est à ce jour de 93 %, soit près de 12,8 milliards d'euros d'AE. Toutefois, seule une petite partie de ces crédits transite par le programme 112.

À fin 2023, cinq CPER présentent des taux d'exécution supérieurs à cette moyenne nationale (93 %) : il s'agit des CPER d'Auvergne-Rhône-Alpes, de Bourgogne-Franche-Comté, d'Île-de-France, de Nouvelle-Aquitaine et des Pays de la Loire. À l'inverse, les taux d'exécution des Hauts-de-France, de l'Occitanie, de la Normandie et de la Corse restent inférieurs à la moyenne nationale même s'ils sont en progrès depuis 2021. Les écarts constatés entre les régions sont essentiellement liés à l'avancement du volet mobilité multimodale, dont les taux d'exécution sont hétérogènes.

De la même manière, si l'on envisage cette fois-ci les taux d'exécution par type de politique publique, on constate des disparités importantes. Les taux d'exécution à fin 2023 des volets enseignement supérieur et recherche, emploi et transition écologique et énergétique sont en effet plus élevés.

Taux d'engagement par volet des CPER 2015-2021, à fin 2023

(en euros)

Volet thématique / programme budgétaire ou Opérateur

Montants contractualisés

2015-2020

2015-2022 pour le volet mobilité

AE 2015 - 2020

2015-2022 pour le volet mobilité

 % d'exécution

CP 2015-2020

2015-2023 pour le volet mobilité

 % de paiement

Culture

248 336 165 euros

210 216 242 euros

85 %

129 332 901 euros

52 %

131 - Création

70 707 165 euros

54 364 546 euros

77 %

27 877 585 euros

39 %

175 - Patrimoine

108 389 000 euros

84 963 862 euros

78 %

56 924 499 euros

53 %

224 - Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

69 210 000 euros

70 887 834 euros

102 %

44 530 816 euros

64 %

334 - Livre et industries culturelles

30 000 euros

0 euros

0 %

0 euros

0 %

Emploi

196 100 000 euros

182 344 784 euros

93 %

180 835 317 euros

92 %

103 - Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

196 100 000 euros

182 344 784 euros

93 %

180 835 317 euros

92 %

Enseignement supérieur, recherche

1 452 473 400 euros

1 351 625 460 euros

93 %

956 200 787 euros

66 %

142 - Enseignement supérieur et recherche agricoles

51 881 200 euros

49 973 123 euros

96 %

48 438 356 euros

93 %

144 - Environnement et prospective de la politique de défense et autres programmes

18 690 000 euros

6 994 564 euros

37 %

6 431 000 euros

34 %

150 - Formations supérieures et recherche universitaire

886 054 000 euros

799 750 396 euros

90 %

448 983 080 euros

51 %

172 - Organismes de recherche

170 030 000 euros

171 762 034 euros

101 %

147 395 119 euros

87 %

172 - Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

203 113 200 euros

213 107 703 euros

105 %

213 018 703 euros

105 %

192 - Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

25 464 000 euros

17 454 620 euros

69 %

17 020 723 euros

67 %

205 - Affaires maritimes

1 300 000 euros

550 000 euros

42 %

550 000 euros

42 %

231 - Vie étudiante

94 957 000 euros

91 049 020 euros

96 %

73 379 807 euros

77 %

613 - Soutien aux prestations de l'aviation civile

984 000 euros

984 000 euros

100 %

984 000 euros

100 %

Mobilité multimodale

8 282 240 940 euros

7 972 146 060 euros

96 %

5 809 080 484 euros

70 %

Agence de financement des infrastructures de transport de France (ex : P203 - Infrastructures et services de transports)

7 965 159 660 euros

7 662 474 687 euros

96 %

5 564 969 524 euros

69,9 %

Voies navigables de France

317 081 280 euros

309 671 373 euros

98 %

244 110 960 euros

77 %

Territorial

894 011 800 euros

753 456 997 euros

84 %

527 403 843 euros

59 %

112 - Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

721 000 360 euros

581 238 340 euros

81 %

382 554 610 euros

53 %

135 - Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

162 661 440 euros

161 868 657 euros

100 %

142 096 147 euros

87 %

212 - Soutien de la politique de la défense

1 250 000 euros

1 250 000 euros

100 %

1 250 000 euros

100 %

Agence nationale du sport (ex : Centre national du développement du sport)

9 100 000 euros

9 100 000 euros

100 %

1 503 086 euros

17 %

Transition écologique et énergétique

2 627 704 000 euros

2 286 341 343 euros

87 %

1 354 769 742 euros

52 %

113 - Paysages, eau et biodiversité

146 064 000 euros

160 381 372 euros

110 %

150 398 287 euros

103 %

159 - Expertise, information géographique et météorologique (ex : 217 - Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables)

5 211 000 euros

2 941 013 euros

56 %

2 941 013 euros

56 %

174 - Énergie, climat et après-mines

9 000 000 euros

9 244 284 euros

103 %

9 210 092 euros

102 %

181 - Prévention des risques

1 550 000 euros

1 087 524 euros

70 %

1 033 224 euros

67 %

Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie

663 010 000 euros

657 413 415 euros

99 %

303 331 274 euros

46 %

Agences de l'eau - AEAG

378 600 000 euros

399 984 283 euros

106 %

197 223 570 euros

52 %

Agences de l'eau - AEAP

66 600 000 euros

71 412 642 euros

107 %

36 332 599 euros

55 %

Agences de l'eau - AELB

286 080 000 euros

254 249 791 euros

89 %

171 017 531 euros

60 %

Agences de l'eau - AERM

119 400 000 euros

99 242 300 euros

83 %

62 688 784 euros

53 %

Agences de l'eau - AERMC

297 660 000 euros

219 352 044 euros

74 %

92 198 605 euros

31 %

Agences de l'eau - AESN

231 120 000 euros

237 007 750 euros

103 %

154 369 837 euros

67 %

Fonds de prévention des risques naturels majeurs

423 409 000 euros

174 024 926 euros

41 %

174 024 926 euros

41 %

Total général

13 700 866 305 euros

12 756 130 886 euros

93 %

8 957 623 074 euros

65,4 %

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

b) Une forte amputation en 2025 des crédits destinés à la génération 2021-2027 des CPER qui se traduira par des reports

Par la suite, une nouvelle génération de CPER et de CPIER pour 2021-2027 a pris le relai. Au 27 septembre 2024, exceptés les CPER de la Corse et de la Normandie et du CPIER de la Vallée de la Seine, faisant encore l'objet d'échanges avec l'Autorité environnementale, tous les protocoles d'accord CPER 2021-2027 ont fait l'objet d'une signature État-Région. Ces contrats font l'objet, par la direction générale des collectivités locales, d'un outil de suivi et d'évaluation, dénommé « Contrats-Territoires ».

Ouvert en juin 2023 aux services de l'État et progressivement enrichi, il permet de partager entre les acteurs des données sur l'aménagement du territoire et les investissements publics. Au 31 décembre 2023, le taux d'exécution sur la période 2021-2023 des crédits contractualisés de l'État - qui s'élèvent au total à 8,3 milliards d'euros, hors crédits mobilité 2021-2022 des volets mobilité prolongés 2015-2022, s'élève à 38 % pour l'ensemble des 11 CPER et 9 CPIER, soit 20 CP(I)ER signés.

Le taux de paiement 2021-2023 est pour sa part de 16 %. Au 31/12/2023, les CP(I)ER Loire, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est, Hauts-de-France, Nouvelle-Aquitaine, Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte d'Azur ont un taux d'exécution cumulé supérieur à la moyenne nationale (33 %).

Exécution 2021-2023 des crédits contractualisés de l'État
inscrits aux CP(I)ER 2021-2027 signés au 27/09/2024

CP(I)ER

Crédits contractualisés Enveloppe étatique 2021-2027

Taux d'exécution cumulé 2021-2023

Taux de paiement cumulé 2021-2023

Taux de couverture des AE par des CP

Auvergne-Rhône-Alpes

1 051 024 619,00

31 %

15 %

47 %

Bassin de la Loire

124 800 000,00

36 %

21 %

59 %

Bourgogne-Franche-Comté

332 131 081,00

49 %

16 %

33 %

Bretagne

477 345 892,00

23 %

8 %

34 %

Centre-Val de Loire

338 316 439,00

31 %

15 %

50 %

Garonne

31 464 000,00

8 %

2 %

32 %

Grand Est

382 667 403,00

54 %

16 %

29 %

Hauts-de-France

994 262 400,00

49 %

17 %

34 %

Ile-de-France

961 140 000,00

30 %

15 %

51 %

Massif central

53 130 000,00

26 %

6 %

24 %

Massif des Alpes

71 062 000,00

33 %

22 %

66 %

Massif du Jura

17 972 667,00

29 %

9 %

31 %

Nouvelle Aquitaine

856 826 455,00

51 %

24 %

47 %

Occitanie

1 144 300 915,00

20 %

13 %

64 %

Pays de la Loire

429 057 415,00

46 %

21 %

46 %

Provence-Alpes-Côte d'Azur

765 669 036,00

55 %

22 %

41 %

Pyrénées

47 648 000,00

21 %

20 %

95 %

Rhône-Saône

140 508 000,00

28 %

5 %

17 %

Vallée du Lot

20 065 000,00

10 %

2 %

18 %

Vosges

26 816 000,00

28 %

16 %

58 %

Total général

8 266 207 322,00

38 %

16 %

43 %

À ces crédits étatiques contractualisés s'ajoutent des crédits régionaux. Le tableau suivant récapitule le montant total engagé au 27 septembre 2024 pour chacun des 20 CPIER.

Crédits État-Régions des CPER et CPIER 2021-2027 signés au 27 septembre 2024

Le rapporteur spécial constate que le PLF pour 2025 réduit sensiblement les moyens prévus en 2025 pour financer les CPIER. Ainsi, aucun crédit de paiement ne leur sera consacré, tandis que les autorisations d'engagement chuteront : 43,69 millions d'euros en 2025 contre 148,13 millions d'euros un an plus tôt. Cet effondrement de moyens se traduira par le report, de 2025 à 2026, d'un nombre important d'opérations financées par ce support contractuel. Même s'il le regrette, le rapporteur spécial considère qu'il s'agit d'un report et non d'un désengagement de l'État tenu par un engagement contractuel. Il anticipe donc un net ralentissement du taux d'exécution des CP(I)ER pour 2025 et insiste sur le fait que ces crédits soient rétablis en 2026.

En parallèle, le rapporteur spécial a été alerté par une propension des services de l'État à geler et à surgeler des crédits depuis le mois d'août 2024 pour ralentir au maximum l'exécution des CPIER en 2024 : compte tenu de l'absence de crédits de paiement en 2025, cela revient à mettre l'exécution de certains CPIER en difficulté ou à reporter d'office d'un an et demi, au moins, l'exécution de certaines opérations pourtant imminentes. Le rapporteur spécial et plusieurs de ses collègues ont alerté la DGCL sur ce point d'attention fort.

2. D'autres dispositifs de contractualisation portés par le programme 112 qui subiront la baisse des crédits entraînant aussi le report d'opérations
a) Douze pactes de développement territorial lourdement impactés sur le plan budgétaire en 2025

Conclus entre l'État et les collectivités territoriales concernées, les pactes territoriaux visent à couvrir deux types de situation : ils accompagnent des territoires confrontés à des difficultés socio-économiques structurelles, comme les bassins miniers ainsi que des territoires qui rencontrent des difficultés conjoncturelles en raison d'un facteur exogène comme l'abandon par le Gouvernement du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes ou la fermeture de l'usine Whirlpool à Amiens.

Le programme 112 porte une part significative du soutien de l'État, à travers ces pactes, au titre du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire qu'il s'agisse de l'engagement pour le renouveau du bassin minier (22 millions d'euros), le pacte pour la réussite de la Sambre-Avesnois-Thiérache (10 millions d'euros), le plan Lourdes (1,5 million d'euros) ou le contrat de relance et de transition écologique du Boulonnais (2,5 millions d'euros).

Au total, 10 pactes ou contrats de développement territorial demeurent actifs et financés au moins pour partie sur le programme 112 :

- l'engagement pour le renouveau du bassin minier, signé le 17 mars 2017, conçu pour accélérer la transition urbaine ;

- le pacte pour la réussite de la Sambre-Avesnois-Thiérache, signé le 7 novembre 2018 afin d'accompagner un territoire concentrant des difficultés socio-économiques, et dont l'acte II est en cours de négociation ;

- le projet d'avenir pour le territoire de Fessenheim : signé le 1er février 2019 dans le contexte de la fermeture du Centre Nucléaire de Production d'Électricité de Fessenheim et de l'arrêt successif de ses deux réacteurs (février et juin 2020) ;

- le contrat d'action publique pour la Bretagne, signé le 8 février 2019, comportant un volet « mobilités », à la suite de l'abandon du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et un volet « différenciation », notamment en matière d'eau et de biodiversité ;

- le contrat d'avenir pour les Pays de la Loire, signé le 8 février 2019, à la suite de la décision du Gouvernement d'abandonner le projet de Notre-Dame-des-Landes ;

- le pacte de développement de la Nièvre, conclu le 15 février 2019, pour soutenir ce département rural en déprise ;

- le pacte Ardennes, signé le 15 mars 2019, pour acter la mobilisation collective autour de ce territoire en difficulté ;

- le plan particulier pour la Creuse (PPC), signé le 5 avril 2019, à la suite de la reprise partielle de l'activité de l'entreprise GM&S7(*) ;

- le contrat triennal de Strasbourg 2021-2023, signé le 9 mai 2021, pour permettre à Strasbourg, siège du Parlement européen, d'assumer des obligations qui incombent habituellement à une capitale d'État ;

- et, enfin, le plan « Avenir Lourdes », signé le 17 février 2022, afin de doter cette commune d'un projet de destination touristique, en théorie en 2025.

Trois autres pactes qui avaient été signés sont considérés comme éteints parce que d'autres dispositifs ont pris le relais des mesures d'accompagnement qu'ils portaient :

- le contrat de développement territorial pour Calais et le Calaisis, signé le 13 novembre 2015 pour renforcer l'attractivité d'un territoire marqué par la crise migratoire. Ce contrat constituait un avenant au CPER 2015-2020 pour le Nord et le Pas-de-Calais. Il a été remplacé par le CRTE Grand Calais Terres et Mers en avril 2023 ;

- le contrat de développement territorial de l'Amiénois, signé le 16 mars 2017, conclu à la suite de la fermeture de l'usine Whirlpool. Le CRTE du Pôle métropolitain du Grand Amiénois a pris le relais du pacte en 2021 ;

- le contrat d'accompagnement à la redynamisation de Châlons-en-Champagne, conclu à la suite de l'annonce en 2014 de la dissolution du 1er régiment d'Artillerie de Marine (RAMa), de l'état-major de la 1ère Brigade mécanisée (BM) et de sa compagnie de commandement et des transmissions. Rattaché au CPER 2015-2020 de la région Champagne-Ardenne, ce contrat a été remplacé par le CRTE Pays de Châlons-en-Champagne en 2021.

Les pactes de développement territorial perdent 58,3 % de leurs moyens en AE (15,84 millions d'euros en 2025 contre 36,9 millions d'euros en 2024) et 43,3 % de leurs crédits de paiement étatiques (17,06 millions d'euros en 2025 contre 30,03 millions d'euros en LFI pour 2024). Là encore, le rapporteur spécial considère que ce report d'engagement contractuel de l'État entrainera un net ralentissement du taux d'exécution des pactes de développement territorial en 2025 et il formule le voeu que ces dispositifs reprennent leur rythme normal d'exécution en 2026.

b) Les contrats de convergence et de transformation préservés sur le plan budgétaire par le PLF 2025 : une exception parmi les dispositifs contractualisés

Aux termes de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer (EROM), des contrats de convergence ont été conclus entre l'État, d'une part, et les cinq régions, départements (ou collectivités uniques) et EPCI des DROM. Ces plans définissent une stratégie de convergence sur 10 à 20 ans adaptée à chaque territoire en vue de réduire les écarts de développement avec la métropole.

Rebaptisés plans de convergence et de transformation (CCT), ils ont fait l'objet d'une nouvelle génération de contractualisation pour la période 2024-2027.

Les dotations en AE de 2024 ont été reconduites sur la base de l'annuité théorique de la précédente génération de contrats. Le rapporteur spécial, au regard de la situation des outre-mer, considère que cet « effort » consistant à maintenir le niveau d'AE des CCT est appréciable.

Ces contrats cherchent à contribuer à six objectifs : accompagner la transition numérique, structurer l'offre de soutien aux projets de territoire et à l'ingénierie de projet, renforcer l'accessibilité aux services publics et au public, poursuivre et amplifier les politiques de revitalisation des centres-villes anciens et des bourgs, encourager les initiatives locales et stimuler la coopération inter-territoriale.

B. LA DIMINUTION DES CRÉDITS DE L'ANCT AMPUTERA NÉCESSAIREMENT LES AMBITIONS DES COLLECTIVITÉS RURALES EN MATIÈRE D'AIDE À L'INGÉNIERIE ET NE SAURAIT SE POURSUIVRE APRÈS 2025

1. Une année 2024 marquée par la montée en puissance du soutien à l'ingénierie

L'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) a été créée par la loi du 22 juillet 20198(*). Elle reprend une partie des missions du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) ainsi que les missions de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux (Epareca) et de l'Agence du numérique.

L'ANCT déploie les grands programmes nationaux d'intervention, d'aménagement numérique et mobile, de revitalisation des centres-villes ou encore d'accès aux services, afin de soutenir les projets portés par les collectivités. Elle intervient également en appui spécifique aux territoires à travers la mobilisation d'une ingénierie dédiée.

Lors de sa mise en place au 1er janvier 2020, l'agence disposait d'un soutien à hauteur de 54 millions d'euros, en AE comme en CP, au titre de sa subvention pour charges de service public (SCSP), portée par le programme 112. Ce montant a été porté à 61 millions d'euros en 2021 pour permettre notamment le doublement du montant de l'ingénierie destinée à appuyer des projets sur mesure portés par les territoires, passant de 10 à 20 millions d'euros. La SCSP a ensuite été stable en 2022 et en 2023 à 63,2 millions d'euros en AE et en CP. Jusqu'alors, cette évolution, compte tenu de la réappropriation de certains moyens portés dans le plan de relance traduisait finalement une baisse relative des moyens de l'ANCT que le rapporteur spécial avait eu l'occasion d'expliciter par le passé9(*).

Le PLF pour 2024 a conféré une hausse substantielle de la SCPS d'environ 20 millions d'euros pour atteindre 81,461 millions d'euros : il s'agissait de doubler (de 20 à 40 millions d'euros) les crédits consacrés à l'aide à l'ingénierie des collectivités territoriales.

Cette montée en puissance des crédits d'ingénierie de l'ANCT s'est traduite par des possibilités supplémentaires donnés aux préfets d'activer d'avantage, via des marchés publics, le recours à des interlocuteurs qui peuvent conseiller les collectivités, en particulier les plus petites, sur le cheminement à suivre pour tel ou tel besoin en ingénierie et les orienter vers le dispositif le plus à même d'y répondre. À travers ce dispositif, c'est un maillage plus fin de l'action combinée de l'ANCT et des préfectures, auxquelles le rapporteur spécial souscrit pleinement, qui permet de mieux conseiller les collectivités rurales sur des projets qui leur semblent parfois trop lourds à porter bien que nécessaires et finançables dès lors qu'une aide adéquate leur est apportée. L'année 2024 s'est donc traduite par une montée en puissance des crédits de son propre budget que l'ANCT a consacré à l'ingénierie territoriale, ainsi que par une diversification des formes que ce soutien à l'ingénierie a pu prendre : une enveloppe de 15 millions d'euros a été allouée à l'ensemble des préfets, depuis le ler mars 2024 pour accompagner des mesures d'ingénierie à destination des collectivités territoriales (les « enveloppes déconcentrées »).

Répartition interne à l'ANCT des crédits consacrés à l'ingénierie territoriale

Note : PVD : petites villes de demain, TI : Territoires d'industrie.

Source : Commission des finances du Sénat à partir des données fournies par l'ANCT

Toutefois, la montée en puissance opérée au cours de l'année 2024 n'a pas été conduite au terme de ce qui avait été envisagé initialement puisque l'agence a été impactée en cours d'exercice par diverses mesures budgétaires infra-annuelles, ce qui s'est traduit par l'adoption d'un budget rectificatif10(*). Néanmoins, celles-ci n'ont pas porté atteinte, en 2024, au soutien à l'ingénierie. Elles ont pu être absorbées en particulier par la rationalisation des moyens dédiés aux fonctions support et par une attention toute particulière pour contenir les dépenses de personnel.

2. Une diminution substantielle des subventions allouées à l'ANCT en 2025 qui aura un impact sur le soutien à l'ingénierie

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une diminution tant de la subvention pour charges de service public (SCSP), ramenée à 64,261 millions d'euros en 2025 contre 81,261 millions d'euros en 2024, que de la subvention pour charges d'investissement (SCI) limitée à 3 millions d'euros en 2025 contre 3,8 millions d'euros en 2024. Ces diminutions annihilent intégralement l'effort qui avait été consenti en 2024 au titre de la montée en puissance de l'agence dans son rôle de soutien à l'ingénierie territoriale.

Lors de son audition, M. Stanislas Bourron, directeur général de l'ANCT, a fait savoir que cette diminution des moyens publics alloués à l'ANCT en 2025, à hauteur de 18 millions d'euros, se traduirait par une diminution d'environ 10 millions d'euros des crédits consacrés à l'ingénierie territoriale, le delta étant absorbé par une nouvelle contraction des dépenses de personnel et par une moindre participation aux activités de coopération territoriale européenne de l'ANCT11(*), ce que regrette vivement le rapporteur spécial.

La diminution de 800 000 euros de la SCI pour 2025 de l'ANCT se traduira concrètement par une moindre implication de l'opérateur en faveur des commerces de proximité et de l'activité artisanale dans les villes moyennes et dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV).

Cette baisse des crédits alloués en 2025 est à mettre en regard avec la situation budgétaire plus globale de l'agence qui, malgré une gestion objectivement rigoureuse, a restreint sa marge de manoeuvre et ne sera plus en capacité d'absorber de restriction supplémentaire de moyens ou d'élargissement de périmètre de compétences à moyens constants.

Ainsi, à fin 2023, l'ANCT ne disposait plus que de 19 millions d'euros de trésorerie effectivement disponible, c'est-à-dire de trésorerie non fléchée12(*). Ce montant devrait tomber à 8,5 millions d'euros à fin 2024, ce qui ne couvre même pas l'équivalent d'un mois de dépenses de l'ANCT. Le rapporteur spécial considère que cette situation doit être prise en compte dans les éventuelles modifications budgétaires infra-annuelles qui pourraient intervenir en cours d'exercice 2025 et dans la préparation du projet de loi de finances pour 2026.

Le rapporteur spécial attire donc l'attention sur l'impact que pourrait avoir cette diminution des moyens de l'ANCT en 2025. Il considère que l'absence totale de marge de manoeuvre de l'agence est inquiétante. Il a d'ailleurs attiré l'attention de la DGCL, qui assure la tutelle de l'ANCT, sur cette situation peu confortable.

3. Une limitation des moyens en personnel en 2025 qui ne saurait être accentuée par la suite, au risque d'empêcher l'agence d'exécuter les missions confiées

Par ailleurs, la montée en charge des agents, au niveau central comme au niveau territorial s'est poursuivie en 2024 avec le recrutement de plusieurs contractuels de catégorie A. L'ANCT s'est ainsi rapprochée, sans jamais le dépasser, de son plafond d'emploi.

Crédits et emplois des opérateurs rattachés à la mission
« Cohésion des territoires »

(en milliers d'euros et en équivalents
temps plein travaillés (ETPT))

Opérateur et programme

 

LFI 2024

PLF 2025

PLF 2025 / LFI 2024

Agence nationale de l'habitat (ANAH)

135

AE

1 124,7

2 291,9

+ 1 167,2

CP

1 124,7

2 521,9

+ 1 397,2

Emplois

287

287

-

Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS)

135

AE

-

-

-

CP

-

-

-

Emplois

136

136

-

Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)

135

AE

-

-

-

CP

-

-

-

Emplois

29

29

-

Fonds national des aides à la pierre (FNAP)

135

AE

-

-

-

CP

-

-

-

Emplois

-

-

-

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

112

AE

85,3

67,3

- 18,0

CP

85,3

67,3

- 18,0

Emplois

379*

358

- 21

Note : Autorisations d'engagement (AE) et crédits de paiement (CP) attribuées par le programme indiqué. Emplois rémunérés par l'opérateur.

* Pour l'ANCT, dont 8 emplois hors plafond.

Source : commission des finances du Sénat, à partir du projet annuel de performances

Plafond d'emplois en ETPT de l'ANCT et exécution de 2021 à 2024

 

2021

2022

2023

2024

Plafond d'emplois en ETPT

327

345

367

371

ETPT effectivement exécutés

324,65

310,88

335,64

369,18*

*Note : Pour 2024, il s'agit d'une prévision d'exécution.

Source : Commission des finances du Sénat à partir des données fournies par l'ANCT

Toutefois, compte tenu de la diminution des moyens budgétaires alloués en 2025 et de l'abaissement du plafond d'emploi de l'opérateur qui passera de 371 en 2024 à 350 en 2025, une diminution du nombre de personnes physiques, d'ores et déjà anticipée par l'agence, a conduit à une répartition revue des emplois au sein de l'opérateur. Cette répartition dans les différentes directions s'établit comme dans le tableau ci-après.

Répartition prévisionnelle par fonction et par programme
des effectifs de l'ANCT (à fin 2024)

 

Encadrement supérieur (DGD, directeur de programme, chef de service

Encadrement intermédiaire (adjoint, chef de projet, responsable de pôle/d'unité, commissaire...)

Sans encadrement (chargé de projet/de mission)

Total

DG + Cabinet (dont communication)

3

1

9

13

Politique de la ville

11

13

65

89

Appui opérationnel et stratégique

11

22

75

108

Numérique

5

4

39

48

Territoire et ruralité

3

6

31

40

Secrétariat général et agence comptable

9

5

35

49

Total

42

51

254

347

Source : réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Plus de quatre ans après sa création, l'ANCT fait l'objet d'une série de bilans, effectués en particulier par le Sénat portant sur son activité, ses moyens et le niveau de satisfaction qu'elle apporte aux collectivités territoriales.

La délégation aux collectivités territoriales du Sénat a ainsi lancé une évaluation de l'ANCT trois ans après sa création, intitulée « ANCT : quel bilan pour les élus locaux ? », qui a abouti, à 14 recommandations regroupées autour de trois idées forces auxquelles le rapporteur spécial s'associe : rapprocher l'agence des élus locaux, oeuvrer pour permettre aux collectivités d'avoir accès à de l'ingénierie et davantage consolider l'existant. La délégation aux collectivités territoriales du Sénat a d'ailleurs effectué, 18 mois après ce rapport, un travail de suivi de l'avancement de ces recommandations13(*).

De même, la question de l'adéquation des moyens de l'ANCT aux missions conférées a fait l'objet, à la demande de la commission des finances, d'une enquête de la Cour des comptes sur le fondement de l'article 58-2° de la loi organique relative aux lois de finances qui a donné à lieu à l'établissement de huit recommandations. Une audition pour suites à donner a été organisée le 14 février 2024 à la suite de laquelle un rapport d'information a été publié14(*).

4. Le soutien aux territoires à travers France ruralités également freiné par les contraintes budgétaires en 2025

Au-delà de ses moyens généraux, l'action de l'ANCT se traduit à travers une multitude de ramifications qui peuvent avoir trait à la politique de la ville, au numérique et aux territoires ruraux. Dans chacune de ces manifestations, peuvent intervenir des programmes nationaux d'appui, des dispositifs de contractualisation et enfin une offre d'ingénierie « sur mesure » aux collectivités territoriales dont les besoins ne recouvrent pas exactement les programmes.

Dans ce dernier cas, postérieurement à la création de l'ANCT, ont été annoncées diverses mesures de soutien aux territoires, à travers le renforcement des programmes pour un meilleur appui à l'ingénierie territoriale, qui s'est traduit par la mise en place de l'agenda rural auquel a succédé « France Ruralités ».

De l'Agenda rural à France Ruralités

À la demande de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, une mission composée d'élus locaux et de parlementaires a remis en juillet 2019 un rapport comportant 200 mesures destinées à favoriser le développement des territoires ruraux et à améliorer la vie quotidienne de leurs habitants, dans les domaines de l'éducation, de l'accès aux services, de la santé, du numérique, des transports, etc. Parmi celles-ci, 181 propositions ont été sélectionnées et sont mises en oeuvre par l'ensemble des ministères sous le pilotage de l'ANCT.

Ces mesures sont d'ampleur très variable, et concernent différents champs (scolaire au travers des cordées de la réussite, accès aux services administratifs avec les maisons France services, programmes localisés, etc.). Certaines mesures préexistaient d'ailleurs à l'Agenda rural mais y ont été intégrées. Une mission d'évaluation de l'Agenda rural a donc été lancée et a abouti à l'annonce le 6 juillet 2022, par la Première ministre, lors de son discours de politique générale, de la mise en oeuvre d'une nouvelle étape en faveur de la ruralité.

Le 13 octobre 2022, lors de son audition devant la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale portant sur l'action du Gouvernement en faveur des zones rurales, la Secrétaire d'État chargée de la ruralité a annoncé la création de six groupes de travail dans le cadre de la préparation d'une nouvelle feuille de route à destination des territoires ruraux. Des ateliers se sont réunis en complément des réunions thématiques lancées dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR). Ces groupes de travail ont formulé 300 propositions qui ont été remises au Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la Ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, à la fin du mois de janvier 2023.

Le 15 juin 2023, la Première ministre a présenté une nouvelle feuille de route que le Gouvernement souhaite engager au profit des territoires ruraux, dénommée France Ruralités à travers quatre axes : Villages d'Avenir, la dotation aménités rurales, 50 mesures en faveur de la ruralité et une réforme des zonages qui s'est traduite par la création des zones « France ruralités revitalisation » (FRR) le 1er juillet 2024.

Source : Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires

5. L'ANCT : le levier de plusieurs programmes nationaux territorialisés qui devra composer avec des crédits 2025 en berne

L'ANCT assure la coordination d'autres programmes nationaux territorialisés qui contribuent à la cohésion territoriale. D'ampleur inégale, certains de ces programmes sont aujourd'hui particulièrement identifiés dans les territoires. Pour certains d'entre eux, ils ne sont que partiellement financés sur le programme 112 mais le rapporteur spécial souhaite en souligner le caractère stratégique. Ainsi, certains développements ci-après peuvent porter sur des dispositifs qui n'apparaissent pas dans l'architecture budgétaire de la mission.

a) Le programme « Action Coeur de ville »

Lancé en décembre 2017 à la suite d'une expérimentation15(*), « Action Coeur de Ville » (ACV) est un programme national destiné à renforcer et développer l'attractivité des villes « moyennes », en faisant le choix d'investir prioritairement dans la revitalisation des centres-villes. Initialement destiné à mobiliser 5 milliards d'euros, le dispositif a été prorogé et a mobilisé depuis sa création environ 9,2 milliards d'euros16(*), dont une petite partie provient du programme 112.

Budgétairement, le programme repose sur trois principaux contributeurs nationaux, à savoir le groupe Caisse des dépôts et consignations à travers la Banque des territoires (3,9 milliards d'euros investis, au 1er octobre 2024, depuis la création du programme), Action logement (2,5 milliards d'euros), l'Agence nationale de l'habitat (1,6 milliard d'euros) et l'État, pour partie à travers le programme 112 (pour 1,2 milliard d'euros).

Prorogé, pour l'instant jusqu'en 2026, dans le cadre d'un nouveau volet du plan (qualifié d'action coeur de ville 2 ou ACV2), le programme a donné lieu au cours de l'année 2024 à la signature de 182 avenants « ACV 2 ». Ce deuxième volet intègre désormais un dispositif dédié aux entrées de ville17(*) et porte une attention accrue à l'embellissement des quartiers situés autour des gares ferroviaires.

Les 4 priorités de l'acte 2 du programme action coeur de ville (ACV)

- Accompagner les villes dans leur transition écologique ;

- Conforter le socle de services, le vivier d'emplois et le rôle de centralité des villes moyennes pour l'ensemble de leur territoire ;

- Revitaliser les villes moyennes dans un cadre de vie accueillant et inclusif 

- Accélérer le déploiement des actions, en apportant aux villes l'accompagnement nécessaire à la mise en oeuvre de projets transversaux plus complexes et des financements adaptés.

Source : Réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Le programme accompagne 232 territoires qui représentent 245 communes, soit 11 communes supplémentaires18(*) sur les douze derniers mois glissants. Les 245 communes sont désormais réparties sur une large part du territoire comme l'illustre la carte ci-après.

Répartition sur le territoire des communes bénéficiaires
du programme « action coeur de ville » (ACV)

Source : réponse de l'ANCT au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Le rapporteur spécial tire un bilan largement positif d'ACV si l'on croit plusieurs indicateurs :

- depuis 2020, la vacance commerciale a diminué dans les communes ACV, malgré une hausse observée en 2023 (dynamique également constatée au niveau national cette dernière année)19(*) ;

- depuis 2018, le taux de vacance structurelle (deux ans ou plus) a diminué plus fortement dans les villes ACV que dans le reste de la France bien qu'il y demeure plus élevé20(*) ;

- 81 % des habitants des villes ACV jugent le programme très utile ou plutôt utile21(*).

b) Le programme « Petites villes de demain »

Dans le prolongement du programme « Action coeur de ville », le programme « Petites villes de demain » (PVD), lancé le 1er octobre 2020, constitue une des mesures reprises dans le plan France Ruralités.

Sur la période 2021-2026, 3 milliards d'euros sont prévus pour le programme, au travers de crédits de droit commun et de crédits du plan France « relance », dont 2,8 milliards d'euros, soit 93,3 %, avaient été, au 31 mars 2024, déjà engagés en incluant 1,2 milliard d'euros au titre des subventions à l'investissement pour des projets (subventions des directions régionales de l'action culturelle, dotations d'équipement des territoires ruraux /dotation de soutien à l'investissement local 2021-2022, Fonds vert, etc.), 1,5 milliard d'euros au titre de l'Anah, environ 155 millions au titre du « fonds friche » ainsi que 190 millions d'euros issus de prêts accordés par la Banque des territoires.

Près de 1 600 communes de moins de 20 000 habitants sont ainsi accompagnées, principalement des communes de plus petite taille que pour le programme ACV mais ayant un rôle de centralité, réparties sur l'ensemble du territoire. En effet, 52 % des communes bénéficiaires comptent moins de 3 500 habitants et 75 % des communes sont rurales22(*).

Répartition des communes bénéficiaires
du programme Petites villes de demain en 2024

Source : réponse de l'ANCT au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Les deux programmes ACV et PVD s'appuient sur l'opération de revitalisation du territoire (ORT). L'ORT constitue pour schématiser leur outil juridique central. Créée par la loi n° 2018-1021 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique du 23 novembre 2018, dite loi Elan, l'ORT se matérialise par une convention permettant aux collectivités locales de mettre en oeuvre un projet de territoire dans les domaines urbain, économique et social, pour lutter prioritairement contre la dévitalisation des centres-villes. Au 1er mars 2024, les habitants des communes PVD représentent environ 11 % de la population nationale. 90 % des communes PVD ont terminé la rédaction de leurs plans d'actions, dont une partie fait office de convention ORT et ont ont engagé la phase opérationnelle de mise en oeuvre des actions. Le rapporteur spécial prête une attention particulière au rythme de signature de ces conventions qui sécurisent les démarches entreprises par les communes concernées dans le cadre de ces deux programmes.

c) Villages d'avenir

Le programme Villages d'avenir, vise à aider des communes rurales à réaliser leurs projets de développement à travers un accompagnement en ingénierie. Il vient compléter l'offre d'ingénierie déjà déployée par l'ANCT en zone rurale par exemple à travers les « petites villes de demain » ou le « volontariat territorial en administration ».

Il s'agit avant tout d'accompagner les communes dans la conception et la réalisation de leurs projets, en veillant à fluidifier les rapports, dans les politiqués menées, avec l'établissement public de coopération intercommunale auquel elle appartient. Cet accompagnement se traduit par une diffusion des dispositifs et outils déjà mis en oeuvre par l'État et ses opérateurs, par les collectivités territoriales et par les acteurs privés présents sur le territoire. L'ANCT veille, dans la mise en oeuvre de ces projets, à la prise en compte par les communes concernée des objectifs de transition écologique.

Le programme est décliné en lien avec les moyens d'ingénierie locaux existants au sein des services de l'État et des collectivités ou de leurs groupements. Sans que cette liste soit exhaustive, plusieurs thèmes ont été identifiés comme prioritaires à ce stade : construction, réhabilitation et rénovation de logements, valorisation et réhabilitation du patrimoine culturel, organisation de l'offre de soins et d'initiatives « d'aller-vers »23(*) dans le domaine médical, etc.

Une fois entrées dans le programme, les communes bénéficiaires doivent arrêter une feuille de route pour la durée de leur accompagnement. Cette feuille de route permet d'identifier les projets prioritaires que la collectivité souhaite conduire pour son développement à 5 ans.

Là aussi, les communes éligibles au programme sont des communes rurales, au sens de l'Insee, ou des « petites centralités » qui ne seraient pas déjà couvertes par d'autres dispositifs d'appui de l'ANCT. Ce sont donc bien des territoires ruraux, éprouvant des difficultés à mobiliser des capacités d'ingénierie, qui constituent la cible du dispositif « Villages d'avenir ».

2 458 communes de moins de 3 500 habitants ont ainsi été sélectionnées lors de la première vague de labellisation.

Ce soutien à la ruralité à travers « villages d'avenir » se traduit depuis le 1er janvier 2024 par l'ouverture de 100 postes de chef de projet24(*), mutualisés à l'échelle départementale et placés sous l'autorité des préfets de département. Selon l'organisation retenue par ce dernier, ils peuvent être positionnés au sein des préfectures ou des directions départementales interministérielles (DDI). Ces 100 postes de chefs de projets sont répartis dans 94 départements, les cinq départements25(*) comptant 95 % de communes rurales et 60 % de population rurale bénéficiant de deux chefs de projets tandis que les quatre départements26(*) les plus fortement urbanisés du bassin parisien et certains DROM27(*) ne bénéficient pas de chefs de projets. Cette répartition territoriale a fait l'objet d'une instruction ministérielle28(*).

Au 31 août 2024, 96 agents29(*) avaient pris leurs fonctions répartis géographiquement comme indiqué dans le graphique ci-après.

Répartition territoriale des chefs de projet « villages d'avenir »

(au 31 août 2024)

Source : réponse de l'ANCT au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Le plafond de rémunération de chaque chef de projet été porté à 80 000 euros, charges comprises, pour un total qui s'élevait à 8 millions d'euros pour 2024 et qui sera porté, le rapporteur tient à le souligner dans ce contexte de diminution drastique des crédits du programme 112 pour 2025, à 8,1 millions d'euros dans le PLF pour 2025. Cette augmentation, d'exactement 107 239 euros, découle du relèvement du taux de cotisation au compte d'affectation spécial afférent. À ce stade, le rapporteur spécial relève par ailleurs qu'aucun indicateur de performance n'a été mis en place, compte tenu du caractère récent du dispositif, mais il ne manquera pas pour autant de solliciter rapidement son évaluation

d) Fabrique de territoires et manufactures de proximité

Pour accompagner et accélérer la dynamique de développement des tiers-lieux dans les territoires, en garantissant leur diversité et consolidant les projets existants, l'État a lancé, en 2019, un appel à manifestation d'intérêt (AMI) des « fabriques de territoire », existantes ou en projet,

300 fabriques ont ainsi été initialement identifiées - 150 implantées en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et 150 dans les territoires ruraux - avant une nouvelle vague de labellisation de 82 fabriques supplémentaires qui a porté à 382 le nombre de tiers-lieux identifiés à fin 2023.

Concrètement, le programme vise à soutenir les tiers-lieux dédiés à la production. Il s'agit de petites unités de production locale qui animent et apportent des services à une communauté professionnelle, en capacité de recréer de l'activité localement tout en préservant les savoir-faire dans les territoires. Ainsi, le dispositif se décline en quatre grands objectifs : des créations d'activités pour redynamiser les territoires, le développement d'espaces de travail partagés, le déploiement de la formation et la transmission des savoir-faire ou encore la relocalisation de la production, notamment via un soutien aux artisans.

Les tiers-lieux sont des espaces physiques dédiés au « faire ensemble » : il peut s'agit d'espaces de coworking, de micro-folies30(*), de campus connecté, d'atelier partagé, de fablab31(*), de garage solidaire32(*), de social place, de makerspace33(*) ou encore de friche culturelle qui contribuent à la vitalité des territoires. Ces lieux des transformations du travail, de la transition écologique ou encore de l'apprentissage, offrent un accès flexible et convivial à des usagers qui y trouvent aussi un accès au numérique.

Les critères de sélection ont garanti une diversité des projets finalement retenus : agriculture partagée, médiation numérique, aide aux démarches administratives, fabrication - création et réparation, formation et enseignement, accès à la culture, etc. Il y a environ 6 candidatures pour un tiers-lieu labellisé, ce qui montre la sélectivité et l'attractivité du mécanisme. Les zones rurales ont été particulièrement ciblées, puisqu'une Fabrique sur trois est située dans des zones peu denses ou très peu denses au sens de la grille communale de densité de l'Insee, et une sur quatre dans des communes de moins de 2 000 habitants. Une attention particulière a été portée, lors de cette deuxième vague de labellisation, aux départements ruraux ne comptant aucun ou quasiment aucun tiers-lieu (Ariège, Haute-Corse, Haute-Saône, Haute-Savoie, Cher, Corrèze, Indre-et-Loire, Pyrénées-Orientales, Vosges et Mayotte). Début 2024, 51 % des tiers-lieux soutenus se trouvaient en QPV et 29 % en zones de revitalisation rurale, dispositif auquel ont succédé les zones « France ruralités revitalisation » le 1er juillet dernier (cf. infra).

Chaque fabrique est financée par l'État pour trois ans, le temps pour ces structures de conforter leur équilibre économique. En 2024, le programme a continué de se concentrer sur ces priorités, avec un budget de 8,8 millions d'euros, visant à couvrir les arrondissements encore non desservis et à soutenir les fabriques existantes. Seule une partie des crédits de fabrique des territoires relève du programme 112.

Implantation des 382 fabriques de territoires

Source : réponse de l'ANCT au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

En parallèle, depuis 2021, 100 manufactures de proximité ont été labellisées et soutenues (directement par un soutien en dépenses de fonctionnement, d'investissement et indirectement via une aide à l'ingénierie) à hauteur de 250 000 euros annuels par manufacture, en moyenne pour 3 ans. Ces manufactures de proximité, tiers-lieux emblématiques pour la relocalisation de la production dans les territoires, sont réparties dans 16 régions et 64 départements. Sur les 100 manufactures labellisées, 48 sont situées en zones rurales, 39 en petites et moyennes villes, 18 en territoires prioritaires34(*). Les principales filières représentées sont les métiers d'art (20 %), le réemploi (20 %) et le textile (10 %).

Implantation géographique des 100 lauréats « manufactures de proximité »

Source : réponse de l'ANCT au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

e) Le programme « territoires d'industrie » : des autorisations d'engagement reconduites

Lancé fin 2018 par le Premier Ministre, pour une durée initiale de 3 ans, et s'inscrivant dans une stratégie de tentative de reconquête industrielle du territoire, le programme « territoires d'industrie » (TI) a fait l'objet, en mai 2023, d'une annonce, par le Président de la République d'un renouvellement jusqu'en 2027.

Ce programme cherche à soutenir l'activité industrielle sur certains territoires, la formation et la mobilité des salariés, l'attractivité des métiers industriels et, dans la mesure du possible, la transition écologique des friches industrielles, ces sujets étant impactés par le débat, toujours en cours35(*), sur le zéro artificialisation nette (ZAN).

Compte tenu de l'ensemble des éléments, 127 sites labellisés TI, portant 1 800 projets portés par 2 400 lauréats, font l'objet d'un accompagnement prioritaire de l'État, en lien avec Business France, la Banque des Territoires et les collectivités territoriales concernées. Concrètement, des moyens sont mobilisés en ingénierie et en investissements par l'État et les opérateurs impliqués afin d'accompagner la reconversion de friches industrielles (en lien avec le Fonds Friches), de favoriser l'acquisition de foncier et d'immobilier d'entreprise et, à terme, de sécuriser des chaînes d'approvisionnement.

Ces 127 sites sont répartis sur 20 territoires36(*) dans le cadre d'un dispositif qualifié de « rebond industriel », pour lequel le programme 112 cofinance ainsi une cinquantaine de chefs de projets, ainsi que des mesures d'ingénierie à travers l'ANCT37(*).

Le rapporteur spécial constate avec satisfaction l'augmenation des crédits fléchés vers les territoires d'industrie via le programme 149 (4 millions d'euros en AE et 5,5 millions d'euros en CP en 2025, contre 2 millions d'euros en AE comme en CP en 2024). Toutefois, il ne dispose pas à ce stade du détail de l'ensemble des crédits qui seront destinés au dispositif en 2025 et rappelle que le label TI n'est que très partiellement financé sur ce programme comme l'illustre le tableau suivant récapitulatnt l'origine, par programme, des crédits TI depuis 2019.

Origine par programme des principaux financements du dispositif
Territoires d'industrie depuis son lancement en 2019

(au 30 septembre 2024)

Programme

Action

Crédits engagés depuis 2019 (en millions d'euros)

112

Financement des chefs de projets

4,2

112

Ingénierie sur-mesure ANCT et partenariats

6

134

VTE et accélérateurs

4

363

Fonds d'accélération des investissements industriels dans les territoires - France Relance

712

424

AMI Rebond industriel - France 2030

35

Source : réponse de l'ANCT au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

f) Le volontariat territorial en administration également victime

Dans le cadre de l'Agenda rural, le Gouvernement a annoncé la mise en place, en 2021, du volontariat territorial en administration (VTA), dispositif permettant par des contrats de mission pour de jeunes diplômés de niveau bac + 2 minimum d'effectuer une mission de 12 à 18 mois au service du développement des projets de territoires ruraux (au-delà de 12 mois, le dispositif doit être financé par la collectivité). Le rapporteur spécial se réjouit de l'existence du dispositif tout en regrettant, comme les années précédentes, que le VTA ne puisse donner lieu à plus de 12 mois de financement, les plus petites collectivités n'ayant pas les moyens de compléter le financement.

Ce dispositif se poursuit dans le cadre de France Ruralités. Toutefois, l'enveloppe a été ramenée de 6 millions d'euros en 2024 à 4 millions d'euros en 2025, en AE comme en CP.

Le rapporteur spécial prend acte de la réduction des crédits alloués au dispositif tout en considérant, au regard de la contrainte budgétaire que le choix qui a été fait d'impacter l'un des deux volets seulement du dispositif est le plus judicieux : aucun « VTA expert38(*) » ne sera financé en 2025, tandis que le volet « VTA jeune » bénéficiera du même financement qu'en 2024 (il se verra alloué l'intégralité des 4 millions d'euros ouverts).

C. LA PRÉSERVATION DES CRÉDITS DU RÉSEAU FRANCE SERVICES : UN POINT DE SATISFACTION POUR UN DISPOSITIF AU SUCCÈS INDÉNIABLE

Inscrit initialement comme une priorité de l'Agenda rural avec pour ambition de faciliter l'accès aux services publics pour tous les usagers, et repris depuis à travers France Ruralités, le réseau France Services qui porte les « maisons France services » (MFS), créé en 2019, résulte en partie de la structuration au niveau national d'initiatives locales antérieures.

Il s'agit d'un réseau de services publics mutualisés devant permettre aux usagers d'effectuer différentes démarches administratives dans un lieu unique vers lequel ils se rendent, ou qui vient à eux via les maisons France services mobiles, et au sein duquel ils bénéficient de l'aide de conseillers « France services » polyvalents.

a) Une nouvelle extension du bouquet de services des MFS qui s'est opérée en 2024

Les sites France services permettent aux usagers d'accéder à un bouquet de services du quotidien. Ils peuvent bénéficier, dans chaque structure, de l'accès à un socle minimal de onze missions de services publics39(*). Ce socle minimal comprend La Poste, France travail, la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), la caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (MSA), le ministère de l'intérieur, le ministère de la justice, et la direction générale des finances publiques auxquels se sont ajoutés, le 1er janvier 2024, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) du ministère st un service du ministère de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques, ainsi que l'agence nationale de l'habitat.

Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2025, deux autres opérateurs (l'Agirc Arcco ainsi que les Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales - URSAFF) intégreront le bouquet de services dans plusieurs départements.

Concrètement, les MFS ont été installées soit au sein de structures préexistantes (MSAP, bureau de poste, etc.) soit, le plus souvent, « créées » ex nihilo par les collectivités territoriales.

Parmi les 2 751 MFS labellisées au 1er août 2024, en activité, 67 % sont portées par une collectivité territoriale ou leur groupement40(*), 15 % par La Poste, 13 % par une association locale ou un réseau d'association, 2 % par la MSA, 1 % par les sous-préfectures elles-mêmes et 2 % seulement résultent d'un co-portage entre plusieurs organismes41(*).

Enfin, la MSA et les services déconcentrés de l'État (préfectures et sous-préfectures) portent respectivement 2 % et 1 % des France services. Il est à noter que 2 % des France services sont co-portées par plusieurs organisations.

Au-delà de ce socle de services, les structures porteuses peuvent déployer des offres de services complémentaires, en fonction de besoins locaux.

Répartition des maisons France services, en valeur absolue et en pourcentage, sur le territoire national au 8 novembre 2024

Régions
(sauf mention contraire)

Départements

Nombre de France services ouvertes

Auvergne-Rhône-Alpes

Ain

24

Allier

23

Ardèche

29

Cantal

19

Drôme

26

Haute-Loire

21

Haute Savoie

22

Isère

28

Loire

24

Puy-de-Dôme

38

Rhône

34

Savoie

31

Bourgogne France Comté

Côte-d'Or

26

Doubs

30

Haute-Saône

26

Jura

25

Nièvre

33

Saône-et-Loire

48

Territoire de Belfort

4

Yonne

34

Bretagne

Côte d'Armor

33

Finistère

32

Ille-et-Vilaine

32

Morbihan

32

Centre-Val de Loire

Cher

23

Eure-et-Loir

25

Indre

26

Indre-et-Loire

29

Loir-et-Cher

23

Loiret

23

Corse

Corse-du-Sud

15

Haute Corse

23

Grand Est

Ardennes

28

Aube

22

Bas-Rhin

27

Haut-Rhin

21

Haute-Marne

16

Marne

24

Meurthe-et-Moselle

28

Meuse

21

Moselle

33

Vosges

26

Hauts-de-France

Aisne

30

Nord

52

Oise

35

Pas-de-Calais

50

Somme

26

Ile-de-France

Essonne

25

Hauts-de-Seine

13

Paris

11

Seine-et-Marne

35

Seine-Saint-Denis

30

Val-d'Oise

27

Val-de-Marne

18

Yvelines

23

Normandie

Calvados

42

Eure

32

Manche

32

Orne

21

Seine-Maritime

37

Nouvelle Aquitaine

Charente

35

Charente-Maritime

35

Corrèze

23

Creuse

21

Deux-Sèvres

26

Dordogne

36

Gironde

43

Haute-Vienne

24

Landes

19

Lot-et-Garonne

22

Pyrénées-Atlantiques

31

Vienne

26

Occitanie

Ariège

14

Aude

25

Aveyron

32

Gard

30

Gers

24

Haute-Garonne

25

Hautes-Pyrénées

19

Hérault

42

Lot

23

Lozère

18

Pyrénées-Orientales

27

Tarn

26

Tarn-et-Garonne

22

Pays de la Loire

Loire-Atlantique

31

Maine-et-Loire

28

Mayenne

18

Sarthe

26

Vendée

22

Provence-Alpes-Côte-d'Azur

Alpes-de-Haute-Provence

17

Alpes-Maritimes

34

Bouches-du-Rhône

34

Hautes-Alpes

17

Var

30

Vaucluse

26

Guadeloupe

30

Guyane (Collectivité unique)

23

La Réunion

29

Martinique (Collectivité unique)

18

Mayotte

13

Saint Martin (Collectivité d'outre-mer)

3

Source : réponse de l'ANCT au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Le rapporteur spécial souligne le succès que remporte le dispositif. Il considère que les MFS constituent un noyau dur de la « cohésion » entre les territoires, au sens premier du terme. Le nombre d'accompagnements d'usagers et la fréquentation des France services n'ont cessé de croître depuis leur création début 2020. Alors qu'une MFS accompagnait en moyenne 7,8 demandes par jour en 2020, la moyenne quotidienne des accompagnements est aujourd'hui de 16. Chaque mois, 834.000 usagers sollicitent une maison France services ce qui correspond à 960.000 démarches. L'objectif d'1 million d'accompagnements par mois prévu pour 2026 devrait donc être atteint dès la fin de 2024.

Lors de son audition par le rapporteur spécial, la DGCL a fait savoir que les MFS permettent de résoudre plus de quatre démarches administratives sur cinq42(*). Les demandes les plus sollicitées sont liées aux démarches auprès de l'administration fiscale (20 %), aux pré-demandes de titre d'identité et de voyage ainsi qu'aux immatriculations de véhicules (20 %), aux démarches en lien avec la liquidation des droits de retraite et le calcul de la pension (15 %), à l'assurance maladie (14 %) et aux allocations familiales (14 %).

En outre, le rapporteur spécial a été informé de la volonté de procéder à la labellisation de presque 300 France services supplémentaires lors des deux prochaines années, ce qui conduirait à atteindre 2 900 MFS en 2025 et 3 000 MFS en 2026, toutes structures comprises (en incluant les structures mobiles qui peuvent prendre des formes très variées : outre les bus itinérants dans les zones les plus rurales ou les plus difficiles d'accès43(*), on note même l'existence d'une maison France Services mobile sur pirogue, la « pirogue France services de l'Est guyanais » qui circule sur le Maroni de commune en commune). Toutefois, pour 2025, cette volonté pourrait se heurter à des considérations budgétaires (cf infra).

Une 14ème phase de labellisation est ainsi en cours. La finalisation et la pérennité de France services repose désormais sur une nouvelle étape que le rapporteur spécial avait eu l'occasion de présenter à l'issue d'une mission gouvernementale qu'il a conduite avec Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, alors députée de Seine-Maritime.

En effet, alors que la couverture territoriale est en passe d'atteindre les objectifs fixés, il souhaite insister sur la nécessité de donner au dispositif les moyens d'une amélioration continue de la qualité du service et, d'autre part, sur la politique d'« aller-vers » l'usager, pour lutter contre le non-recours aux droits, laquelle a abouti à un rapport comprenant 33 préconisations réparties autour de trois axes44(*).

Concernant, en premier lieu, le périmètre du bouquet de services proposé, le rapporteur spécial a eu l'occasion, dans le prolongement de la mission précitée, d'échanger longuement avec plusieurs organismes concernés pour aboutir à la conclusion que des extensions étaient nécessaires afin de couvrir davantage les besoins de services aujourd'hui non satisfaits. Il se réjouit qu'une première étape ait été franchie avec l'entrée, au 1er janvier dernier, de deux nouveaux opérateurs dans le dispositif : l'Anah et le ministère de la transition écologique. France Services est désormais en capacité de conseiller les particuliers dans leurs démarches administratives pour bénéficier des aides de type MaPrimeRénov' ou MaPrimeAdapt' et une montée en puissance des demandes en ce sens est d'ailleurs d'ores et déjà observée45(*).

Il renouvelle sa préconisation que soient intégrés au dispositif d'autres opérateurs comme le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) ou encore la fédération des particuliers employeurs.

Il entend les difficultés techniques qu'il faut surmonter ainsi que les efforts de concertation que suppose l'élargissement du périmètre proposé aux usagers.

Toutefois, le rapporteur spécial insiste tout particulièrement sur un aspect qu'il est régulièrement amené à rappeler aux décisionnaires. L'élargissement des opérateurs accessibles via les MFS ne fait en rien peser un risque sur la capacité « d'absorption » par les conseillers France services d'usagers supplémentaires et de nouvelles demandes. Au contraire, dans la pratique, les conseillers France services cherchent déjà systématiquement à aider l'usager, y compris lorsqu'il les sollicite pour accomplir des démarches qui ne relèvent pas en théorie de leurs compétences.

Concrètement, le fait d'élargir le nombre d'opérateurs facilite donc le travail des conseillers France services. Il est plus simple pour ces derniers d'orienter l'usager vers un opérateur, lorsque la demande ne relève pas de leurs compétences. De manière contre intuitive, c'est donc l'intérêt des conseillers France services, tout autant que des usagers, que de viser un nouvel élargissement des opérateurs associés.

Le rapporteur spécial renouvelle également certaines préconisations. Il plaide de nouveau pour généraliser les agendas partagés afin de garantir à l'usager la possibilité d'une prise de rendez-vous immédiate avec chaque partenaire pour les demandes complexes. Ces rendez-vous pourraient s'effectuer à la maison France services lors d'une permanence de l'opérateur, dans les locaux de l'opérateur ou en visioconférence, en fonction du type de demande et du souhait de l'usager. Il insiste sur la possibilité de compléter, dans chaque France services, les permanences physiques des opérateurs par des rendez-vous en visioconférence, évitant des déplacements aux usagers, parfois géographiquement éloignés des locaux des opérateurs. Cette offre apparaît d'autant plus indispensable que le nombre de permanences effectuées dans les locaux des France Services reste faible, même si des améliorations ont été apportées au cours de l'année 2024.

Le second axe que le rapporteur spécial suit tout particulièrement, également dans le prolongement de sa mission ministérielle, concerne les démarches engagées pour aller vers les usagers les plus en retrait des services publics. Cet objectif est également en passe d'être atteint puisque 99,4 % de la population française (hors Mayotte) est domiciliée à moins de 20 minutes46(*) et, 99,9 % de la population française (hors Mayotte) est domiciliée à moins de 30 minutes d'une implantation France services.

Par ailleurs, le rapporteur spécial a été informé, lors de l'audition du cabinet de M. Kasbarian, ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la transformation de l'action publique du fait que la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) travaille actuellement à la réalisation d'une cartographie des services publics afin de disposer d'une carte de France des « zones blanches du service public ». Le rapporteur spécial appuie cette démarche en considérant qu'il n'est pas entendable qu'en l'état actuel des choses, on ne dispose pas des données d'implantation des guichets des opérateurs partenaires : l `implantation des France services ne peut pas se faire à l'aveugle, sans disposer de toutes les données sur l'existant.

Le rapporteur spécial préconise, comme il l'avait déjà indiqué l'an dernier, d'aller plus loin en offrant, en l'absence de transports en commun, la possibilité d'une prise en charge partielle du coût d'un service de transport à la demande vers les structures fixes, ou éventuellement vers les structures mobiles qui n'ont pas vocation à se déplacer à chaque domicile d'usager.

Dans les zones où l'offre de transport en commun est faible ou inexistante, un service de transport à la demande doit pouvoir répondre aux besoins de déplacement des personnes non motorisées ou âgées. C'est notamment le cas dans les zones rurales où ce type de transport souple et adapté pallie souvent l'absence de transports en commun réguliers.

b) Progressivement, un financement par structure France services davantage à la hauteur de l'intérêt du dispositif

Le financement du réseau France Services suit différents canaux : des crédits sont alloués à l'animation du réseau départemental, tandis que depuis 2019, un financement forfaitaire, par MFS a été acté.

Initialement de 30 000 euros47(*), ce financement forfaitaire, répondant à l'une des principales préconisations formulées par le rapporteur spécial48(*), sera progressivement porté à 50 000 euros, forfait qui s'appliquera à compter de 2026, en maintenant le principe d'un co-financement entre l'État et les opérateurs. En 2023, l'État a donc majoré sa participation de 5 000 euros, portant ainsi à 35 000 euros le forfait par structure, à travers une revalorisation du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Les opérateurs ont ensuite majoré leur participation en 2024 pour financer les 5 000 euros supplémentaires par structure, en parallèle de l'arrivée des deux nouveaux opérateurs dans le dispositif au 1er janvier 2024. Cette arrivée a d'ailleurs conduit à une nouvelle répartition du financement du fonds national France services (FNFS) entre les opérateurs comme l'illustre le tableau ci-après.

Alimentation du FNFS par les opérateurs

(en euros)

Opérateur

2023

2024

Ministère de l'Intérieur

13,75 %

5 051 750

13,92 %

7 038 029

DGFIP

13,75 %

5 051 750

10,21 %

5 161 221

CNAV

6,50 %

2 388 100

9,28 %

4 692 020

MSA

6,50 %

2 388 100

4,33 %

2 189 609

CNAF

11,75 %

4 316 950

11,86 %

5 995 358

CNAM

13,75 %

5 051 750

12,69 %

6 412 427

France Travail

13,75 %

5 051 750

8,97 %

4 535 619

La Poste

13,75 %

5 051 750

7,32 %

3 701 482

Ministère de la Justice

6,50 %

2 388 100

3,92 %

1 981 075

DGEC

   

6,71 %

3 390 800

Anah

   

10,78 %

5 451 170

TOTAL

100,00 %

36 740 000

100,00 %

50 548 810

Source : Commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Alternativement, jusqu'en 2026, l'État et les opérateurs majoreront donc de nouveau leur participation de 5 000 euros pour atteindre le montant forfaitaire de 50 000 euros par structure. Cette hausse du montant forfaitaire est d'autant plus à souligner qu'elle s'accompagne d'une progression du nombre de maisons France services ouvertes. Pour l'instant, la trajectoire telle qu'elle résulte de la loi de programmation des finances publiques49(*) (LPFP) est donc respectée.

Financement par structure France services

(en euros)

 

Part du FNADT

Part du FNFS

Total par structure France services*

2023

20 000

15 000

35 000

2024

20 000

20 000

40 000

2025

25 000

20 000

45 000

2026 (prévisionnel)

25 000

25 000

50 000

Note : total hors bonification pour les France services portées par les collectivités territoriales en zone FRR (cf. infra).

Source : Commission des finances du Sénat

C'est pourquoi l'enveloppe du FNADT sur le programme 112 avait été revalorisée en 2024, passant de 36,3 millions d'euros à 53,2 millions d'euros, en AE comme en CP, dans le PLF 2024. Ajoutons qu'une partie de l'abondement supplémentaire de la subvention pour charges de service public dont avait bénéficié l'ANCT en 2024 était destinée à l'animation nationale du programme.

En 2025, les crédits prévus en PLF au titre de ce dispositif permettent de maintenir cette trajectoire et d'augmenter la part FNADT à 25 000 euros par structure, d'où un total de 65,5 millions d'euros en AE comme en CP (soit une hausse de 23,10 % par rapport aux 53,2 millions d'euros ouverts en LFI 224).

Cette progression couvre la montée en puissance du financement par structure sur la base 2 800 MFS qui devraient être labellisées à fin 2024. En revanche, à ce stade, les crédits ne permettent pas de financer davantage de MFS dont on indique pourtant au rapporteur spécial qu'elles ont bien vocation à ouvrir en 2025 : le rapporteur spécial pose donc la question du financement de ce nouvelles structures en 2025 et de la réalité de l'ampleur de la nouvelle vague de labellisation à venir (+ 100 en 2025 et + 100 en 2026 pour atteindre la cible mentionnée supra de 3 000 MFS).

Il faut souligner, enfin, comme l'an dernier qu'une enveloppe de 7 550 000 euros est ouverte en PLF pour 2025 sur le programme 112, afin de majorer la dotation forfaitaire des MFS situées, au 1er janvier 2025, en zone France ruralités revitalisation (FRR)50(*), uniquement pour les MFS portées par des collectivités territoriales. Toutefois, le rapporteur spécial souligne que cette dotation visant à financer une bonification MFS dans les FRR a été calculée sur le fondement du périmètre des FRR tel qu'arrêté au 1er juillet 2024. Or, l'article 27 du projet de loi de finances pour 2025, dans sa rédaction initiale, ferait entrer 2 168 communes supplémentaires en FRR. Une partie d'entre elles porte des structures France services qui seraient donc éligibles à la bonification.

Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial qui a interrogé la DGCL sur ce point, à l'issue du PLF pour 2025, ce sont 1 305 MFS portées par des collectivités qui devraient être éligibles à la bonification, à l'issue du PLF pour 2025. Selon les estimations du rapporteur spécial, les crédits ouverts ne couvriraient pas la bonification prévue à hauteur de 10 000 euros par MFS. Le rapporteur spécial propose donc, par le biais d'un amendement adopté par la commission des finances, une majoration des crédits afférents qui passeraient de 7 550 000 euros à 13 050 575 euros, soit une augmentation de 5 500 575 euros51(*).

Au-delà des crédits budgétaires du programme 112, l'attractivité des territoires nécessite des dépenses fiscales efficaces et un soutien à des dispositifs satellites.

2. Plusieurs dispositifs de zonage sont associés au programme 112 : les dépenses fiscales représentent une proportion croissante du total des dépenses du programme

Le nouvel état F, annexé au projet de loi de finances pour la deuxième année consécutive en application de l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), récapitule les moyens globaux des missions.

Aux crédits de paiement décrits supra, il ajoute le montant des dépenses fiscales, des ressources affectées et, pour les missions concernées, des prélèvements sur recettes et des crédits des comptes spéciaux qui concourent à la mise en oeuvre des politiques publiques financées par cette mission.

Dans le périmètre des dépenses de l'État, la mission « Cohésion des territoires » constitue le cinquième poste en termes de crédits ouverts, hors remboursements et dégrèvements, et représente 7,1 % de l'engagement total prévu pour 2025.

En outre, la mission se distingue des autres par le montant élevé des dépenses fiscales qui lui sont rattachées. Ces dernières atteignent 10,9 milliards d'euros en 2025, ce qui classe la mission troisième en termes de volume de dépenses fiscales rattachées, après les missions « Solidarité, insertion et égalité des chances » et « Travail et emploi ».

La mission se caractérise enfin par un niveau notable de fonds de concours et d'attributions de produit, atteignant 0,5 milliard d'euros, et de ressources affectées, qui s'élèvent à 1 milliard d'euros.

Moyens globaux alloués à la mission « Cohésion des territoires »

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, à partir de l'état F annexé au projet de loi de finances

Au sein de la mission, le programme 112 ne pesant que 1,05 % du total des crédits ouverts en AE dans le PLF pour 2025, le montant des dépenses fiscales qui lui sont rattachées demeure corrélativement modeste en valeur absolue. Néanmoins, en proportion, au sein du programme, les dépenses fiscales représentent une part très importante et croissante du total des dépenses.

D'après les chiffres fournis par la DGFiP, le coût total des dépenses fiscales en PLF pour 2025 est en effet estimé à 747 millions d'euros dont 328 millions d'euros spécifiquement destinées à la Corse. Ces dépenses fiscales ont ainsi augmenté de 16,4 % entre 2020 et 2025 (passant de 642 à 747 millions d'euros).

Le programme 112 recouvre vingt-six dépenses fiscales.

Parmi celles-ci, onze sont relatives à des dispositifs qui sont rattachés au programme 112 bien qu'elles soient éloignées de son coeur de mission (sept dépenses se rapportent à des exonérations ciblées sur le territoire de la Corse tandis que quatre dépenses se rapportent à des exonérations de droits et déductions d'actifs en matière de propriété immobilière).

Le rapporteur spécial note donc que, parmi ces 26 dépenses fiscales formellement rattachées, seules 15 concernent exclusivement les dispositifs pris sur le fondement du programme 112. Ces diverses dépenses comprennent principalement des exonérations ou des réductions d'impôt associées au classement dans divers dispositifs de zonages. L'objet des 15 dépenses fiscales relevant des missions exécutées au titre du programme 112 sont récapitulées dans le tableau infra.

Liste et nature des 15 dépenses fiscales
dont l'objet relève directement du programme 112

Numéro de la dépense fiscale

Nature de la dépense fiscale

Montant 2025 en millions d'euros

220 104

Exonération d'impôt sur les bénéfices pour les entreprises créées ou reprises dans les zones de revitalisation rurale (ZRR)

345

220 109

Exonération d'impôt sur les bénéfices pour les entreprises créées ou reprises dans les zones France ruralités revitalisation (FRR)

10

230 602

Exonération totale ou partielle des bénéfices réalisés par les entreprises nouvelles qui se créent dans les zones d'aide à finalité régionale ou qui se sont créées entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 2010 dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) et de redynamisation urbaine (ZRU)

56

230 606

Exonération d'impôt sur les bénéfices pour les entreprises qui exercent ou créent une activité dans les bassins d'emploi à redynamiser (BER)

10

530 206

Exonération du droit budgétaire de 2 % de mutation pour les acquisitions de fonds de commerce dans certaines zones prioritaires d'aménagement du territoire (ZRR-ZRU-Zones Franches Urbaines)

nc

230 303

Majoration de la base de calcul des amortissements des immobilisations acquises au moyen de primes de développement régional, de développement artisanal ou d'aménagement du territoire (PAT)

1

230 609

Exonération d'impôt sur les bénéfices pour les entreprises créées dans les zones de développement prioritaire (ZDP)

1

050 112

Exonération des immeubles situés dans une zone de développement prioritaire (ZDP) et rattachés à un établissement implanté dans une ZDP pouvant bénéficier de l'exonération de cotisation foncière des entreprises

0

050 113

Exonération des immeubles situés dans une zone de revitalisation des commerces en milieu rural et rattachés à un établissement implanté dans une ZoRCoMiR pouvant bénéficier de l'exonération de cotisation foncière des entreprises

Inférieur à 0,5

090 101

Exonération en faveur de certaines opérations réalisées dans les ZRR

Inférieur à 0,5

040 101

Exonération en faveur des entreprises réalisant certaines opérations en ZRR pouvant ouvrir droit à une exonération de Contribution foncière des entreprises (CFE) en l'absence de délibération contraire d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale

1

040 112

Exonération en faveur des établissements créés entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2020 dans une zone de développement prioritaire (ZDP) pouvant bénéficier de l'exonération de cotisation foncière des entreprises

0

040 113

Exonération en faveur des établissements exerçant une activité commerciale dans une zone de revitalisation des commerces en milieu rural pouvant bénéficier de l'exonération de cotisation foncière des entreprises

0

090 113

Exonération en faveur des établissements créés dans une zone de développement prioritaire

Inférieur à 0,5

090 114

Exonération en faveur des établissements exerçant une activité commerciale dans une zone de revitalisation des commerces en milieu rural

0

Source : Commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Compte tenu de l'importance relative de ces dépenses fiscales rattachées, qui représentent pour 2025 le triple des crédits budgétaires affectés au programme 112, sous le double effet de leur augmentation et de la baisse des crédits budgétaires, le rapporteur spécial souligne qu'il lui semble indispensable d'assurer un suivi précis de ces coûts.

3. Une refonte initiée des zonages l'an dernier qui fait l'objet d'ajustements en 2025 pour coller au mieux aux attentes des territoires

La question de l'efficience de ces dépenses fiscales liées aux dispositifs de zonage, dont une partie est portée par le programme 112, a conduit le Gouvernement à solliciter de quatre inspections générales52(*), par une lettre de mission du 13 janvier 2020, une évaluation des dispositifs zonés de soutien du développement économique et de l'emploi dans les territoires.

L'évaluation conduite prête trois caractéristiques principales à ces dispositifs :

- une faible part des entreprises éligibles recourait effectivement au dispositif le plus couteux pour l'État, à savoir celui des ZRR ;

- les activités libérales, peu créatrices d'emploi, mais très au fait de l'existence de dispositifs d'exonération, sont les plus concernées. Le commerce ou l'industrie ne bénéficient que très peu de mécanismes pourtant initialement pensés pour eux ;

- l'absence d'harmonisation des paramètres des exonérations (conditions, durée, etc.) altère leur efficacité.

Tout en reconnaissant que ces points sont susceptibles de faire l'objet d'amélioration, le rapporteur spécial avait alors souligné qu'il ne partageait pas l'intégralité des conclusions tirées par la mission sur l'inefficacité partielle de ces dépenses fiscales en matière de création d'entreprises, lesquelles ne peuvent être envisagées qu'à une échelle modeste sur les territoires concernées. Il note d'autre part l'attachement des élus locaux et des administrés à ces dispositifs fiscaux dans les zones rurales.

Il note qu'une première initiative de rationalisation des zonages a été prise, en particulier pour harmoniser les dispositifs et leur durée de validité, au titre de l'article 73 de la loi de finances pour 2024.

La réforme portée a entraîné la fusion des zones de revitalisation rurales (ZRR) et des zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR), au 1er juillet 2024, sous l'appellation de zones « France Ruralités revitalisation » (FRR). Le tableau suivant récapitule les principales caractéristiques des différents types de zonages incluant les nouvelles FRR (dont une parte seulement est rattachée au programme 112).

Principales caractéristiques des zonages fiscaux

Type de Zonage (année de création)

Critères

Exonérations d'impôts sur les bénéfices

Exonérations d'impôts locaux

Dispositifs
non fiscaux

Activités économiques ciblées

Coût annuel pour l'État

en millions d'euros

FRR

(2024)

Communes de moins de 30 000 habitants dans un EPCIFP avec faible densité de population et faible revenu médian par habitant + toutes les communes des départements métropolitains dont la densité est inférieure à 35 habitants par km2 avec faible revenu médian (maille intercommunale)

IR et IS

5 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %)

Exonération de CFE sous réserve de délibération de l'entité compétente du bloc communal

Exonérations de cotisations sociales

Majoration de la dotation de solidarité rurale (DSR), de la dotation d'intercommunalité et de certaines dotations spécifiques (dotation France services dans les « FRR + », etc.)

Création ou reprise d'une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale par une entreprise relevant de la catégorie des micros, petites et moyennes entreprises

nc53(*)

BER

(1995)

Taux de chômage, déclin démographique, déclin de l'emploi

5 ans

Exonération sauf délibération contraire, de

TFPB et de CET de 5 ans

Exonérations de cotisations sociales

Création d'entreprises activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale

(850 sociétés environ)

8

ZDP

(2019)

Taux de pauvreté, chômage des jeunes, densité

Maille régionale et intercommunale

2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %)

Exonération obligatoire de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %) pour 50 % de la base nette imposable.

CET et TFPB, sur délibération, de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans pour les 50 % restant

 

Création d'une PME qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale.

Non connu

QPV

Population minimale, revenu maille infra-communale

 

TFPB, sauf délibération contraire 5 ans

CET, sauf délibération contraire, 5 ans puis dégressivité sur 3 ans pour TPE (60 %, 40 % et 20)

Utilisé pour la répartition de la dotation politique

de la ville (DPV)

Création par une entreprise de moins de 50 salariés et 10 M€ de CA d'une activité commerciale

74

ZRD

Zones affectées par la réorganisation des unités militaires et touchées par une baisse d'activité des entreprises et une chute significative de l'emploi

Exonération d'impôts sur les bénéfices

Exonération de cotisation foncière des entreprises et

de taxe foncière sur les propriétés bâties

Exonération des cotisations patronales

Toutes les entreprises (individuelle ou société), quel que soit leur régime d'imposition (microentreprise, régime réel normal ou simplifié)

Activité industrielle, artisanale ou commerciale ou libérale si celle-ci s'exerce en société soumise à l'impôt sur les sociétés (activités agricoles exclues)

Activité de location d'immeubles professionnels munis de leurs équipements

Non connu

ZFU-TE (1996)

Population, taux de chômage, jeunesse, déscolarisation, potentiel fiscal par habitant

5 ans puis dégressivité sur 3 ans (60 %, 40 % et 20 %)

   

Création par une entreprise de moins de 50 salariés et 10 millions d'euros de CA d'une activité industrielle, artisanale,

commerciale ou libérale

163

BUD

(2018)

Densité, revenu médian, taux de chômage

(maille communale et intercommunale)

2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %)

Exonération obligatoire de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %) pour 50 % de la base nette imposable.

Sur délibération, de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans pour les 50 % restant

 

Création d'une PME exerçant une activité industrielle, commerciale ou artisanale

2

ZRCV

(2020)

Conclusion d'une ORT, revenu

Maille communale

 

TFPB, CET, sur délibération

   

Non connu

ZAFR

(1980)

PIB par habitant, taux de chômage, densité

Maille communale

2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %)

TFPB, CET, 2 ans sur délibération, jusqu'à 5 ans pour certaines activités

 

Création d'entreprises exerçant une activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale

81

ZAI-PME

Communes non situées en ZAFR (en IDF, communes de zone urbaine sensible ou de ZRR)

 

CET, sur délibération, jusqu'à 5 ans pour certaines activités

 

Création par une PME d'une activité industrielle ou de recherché scientifique et technique

Non connu

Note : FRR : France ruralités revitalisation, BER : Bassins d'emplois à redynamiser, ZDP : Zones de développement prioritaire, QPV : Quartiers prioritaires de la ville, ZRD : Zones de restructuration de la défense, ZFU-TE : Zones franches urbaines - Territoire Entrepreneur, BUD : Bassins urbains à dynamiser, ZRCV : Zones de revitalisation des centres-villes, ZAFR : Zones d'aide à finalité régionale, ZAI-PME : Zones d'Aide à l'Investissement des petites et moyennes entreprises.

Source : commission des finances du Sénat

Le dispositif FRR comprend un niveau socle et un niveau « FRR plus » donnant droit à davantage de soutien. Toutefois, la réforme a abouti à ce que 2 168 communes sur les 17 720 qui bénéficiaient d'un classement en ZRR jusqu'au 30 juin 2024 n'intègrent pas le dispositif FRR. Compte tenu de l'impact de cette situation sur les tissus économiques déjà fragiles dans les zones concernées, l'article 27 du projet de loi de finances pour 2025 vise à faire accéder de droit ces 2 168 communes dans le zonage FRR.

Le rapporteur spécial sera très attentif aux évolutions de ceux de ces dispositifs qui relèvent du programme 112, compte tenu de l'importance des différents zonages pour les territoires ruraux : il considère que leur réforme doit être à la hauteur des ambitions du nouveau Gouvernement pour la ruralité.

La cartographie suivante présente la répartition géographique des zonages fiscaux - FRR et BER - qui serait issue de l'adoption, en l'état, de l'article 27 du projet de loi de finances.

Cartographie des FRR, FRR » plus » et BER au 1er janvier 2025

Source : Commission des finances du Sénat

4. La diminution des crédits destinés aux conseillers numériques, portés par un autre programme, n'en constitue pas moins une source d'inquiétude

Alors que l'usage des services numériques est devenu indispensable pour effectuer une très grande partie des démarches du quotidien, la fracture numérique qui résulte de l'incapacité à les maîtriser concernerait un français majeur sur trois53(*). Par ailleurs, un français sur deux connaîtrait des difficultés matérielles ou techniques pour accéder à ces outils, même si leur taux de diffusion s'améliore (prix des équipements, absence de connexion internet fixe à domicile, etc)54(*).

a) Les Conseillers numériques : un dispositif porté par un autre programme mais très lié au programme 112

Dans ce contexte, a été mis en place un dispositif destiné à financer des conseillers numériques qui cherchent à accompagner les usagers en difficulté avec le « numérique du quotidien », le plus souvent au travers d'ateliers collectifs d'initiation au numérique.

Les crédits destinés à financer ce dispositif n'ont jamais figuré sur le programme 112, ce que regrette le rapporteur spécial compte tenu du caractère indissociable de cette mission et des France services, mais ont d'abord été financés via le plan national de relance et de résilience (PNRR). Au 31 juillet 2024, l'enveloppe globale de ces crédits initialement dédiés au dispositif des conseillers numériques (222,9 millions d'euros en AE comme en) avait été intégralement consommée : 200 millions d'euros d'AE et 80 millions d'euros de CP en 2021, 22,9 millions d'euros d'AE et 134 millions d'euros de CP en 2022 et 8,9 millions d'euros de CP en 2023.

Entre temps, le financement du dispositif a été transféré à l'action n° 3 « Inclusion numérique » du programme 343 « Plan France Très haut débit » de la mission « Économie »55(*).

Les enveloppes issues de ce financement étatique ont permis de financer les premières reconductions de postes à hauteur de 39 millions d'euros en loi de finances pour 2023 et 55 millions d'euros en loi de finances pour 202456(*).

Pour 2025, cette action est dotée, de 41,8 millions d'euros en AE comme en CP. Les financements portent sur la formation et l'activité des conseillers numériques, qui sont accueillis par des collectivités territoriales et des acteurs privés associatifs ou relevant de l'économie sociale et solidaire. Les conseillers sont chargés d'assurer des permanences, des ateliers et des formations afin de faciliter l'appropriation par ceux qui ont besoin des usages numériques du quotidien.

Au 30 août 2024, 4 010 conseillers numériques (incluant les coordinateurs) étaient mis à disposition de 1 539 structures publiques (59 % des postes) et de 1 355 structures privées (41 % des postes). Ils couvrent l'ensemble du territoire métropolitain ainsi que la Martinique, la Réunion, la Guyane, la Guadeloupe et Mayotte, pour 40 postes par département en moyenne, selon un maillage répondant aux spécificités de chaque territoire. 995 postes sont situés en QPV et 706 dans les anciennes ZRR (zone de revitalisation rurale).

À la même date, 4,2 millions d'accompagnements ont été réalisés par les conseillers numériques sur des thèmes variant selon l'âge et le statut des personnes accompagnées. L'utilisation des équipements (tablette, téléphone portable et ordinateur) ainsi que la réalisation de démarches administratives en ligne figurent parmi les thèmes d'accompagnement les plus récurrents, récapitulés dans le graphique qui suit.

Répartition des thèmes d'accompagnement
réalisés par les conseillers numériques (au 30 août 2024)

Source : Metabase du déploiement des conseillers numériques

b) Les conseillers numériques : un financement 2025 qui ne respecte pas les engagements pris.

La DGCL a fait savoir au rapporteur spécial que le maintien du dispositif dans son périmètre actuel pour 2025 supposerait une autorisation d'engagement à hauteur de 73 millions d'euros. Les 31 millions d'euros manquants, au regard des 41,8 millions d'euros prévus pour être ouverts, se traduiront donc par le non renouvellement du financement d'une partie des contrats arrivant à échéance, à charge pour la collectivité de supprimer le poste concerné ou d'en assurer désormais le financement.

Plus grave, et le rapporteur spécial le dénonce tout particulièrement, il lui a été fait état de la perspective qu'en raison de cette situation, des avenants soient notifiés aux collectivités pour réduire le financement des contrats encore en cours, s'appuyant sur une disposition juridique figurant dans les conventions avec les collectivités concernées selon laquelle les financements sont assurés sous réserve des crédits alloués. Concrètement, les collectivités qui ont embauché un conseiller numérique n'auraient alors pas d'autre choix que de prendre en charge le delta de rémunération résultant de cette diminution unilatérale du financement étatique. Sans qu'elle soit juridiquement dénonçable, cette situation n'en est pas moins inacceptable, tant pour les collectivités que pour les personnes exerçant ces fonctions, et semble de nature à porter une nouvelle fois atteinte à la crédibilité de la parole de l'État.

Afin d'inscrire ces postes de conseillers numériques dans la durée et d'assurer les conditions durables de transfert de responsabilité financière vers les structures d'accueil, plusieurs initiatives sont à l'oeuvre dans le cadre de la feuille de route France Numérique Ensemble. En premier lieu, un engagement de développement de l'emploi et des compétences (EDEC) de médiation numérique57(*) a été initié afin de « renforcer l'employabilité des médiateurs numériques et sécuriser leur mobilité professionnelle ». En second lieu, une mobilisation des préfets de département - par voie de circulaire du 28 juillet 2023 - a été effectuée par anticipation afin « d'accélérer la territorialisation de la politique publique d'inclusion numérique et la constitution de fonds d'ingénierie locaux pour financer la pérennisation des dispositifs locaux d'inclusion numérique »58(*).

Ces initiatives, fort louables, ne doivent néanmoins pas masquer le caractère regrettable du désengagement de l'État en 2025 sur le dispositif. Dans la mesure où il n'est pas porté par le programme 112, le financement des conseillers numériques ne saurait être pris en compte dans l'appréciation des crédits du programme. Néanmoins, le rapporteur spécial considère qu'il s'agit de politiques publiques « satellites » indissociables des MFS et il s'interroge sur l'impact de ces choix sur l'accès au numérique.

III. LE PROGRAMME 162 « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT » : UN DISPOSITIF SOUPLE POUR SEPT ACTIONS TERRITORIALISÉES DONT LES CRÉDITS SONT GLOBALEMENT PRÉSERVÉS

Le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE), créé en 2006, est composé de sept actions territorialisées répondant à des enjeux divers.

En effet, pour 2025, son périmètre évolue avec la suppression, comme cela était prévu, de l'action 11 consacrée à la « Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire ». Il s'agit d'un programme qui, par définition, en ce qu'il a vocation à financer sur quelques exercices des dispositifs territorialisés et ponctuels, est assez mouvant. Cette nouvelle modification intervient après des évolutions qui ont affecté la maquette du programme au cours des années précédentes, du fait de la création d'une action concernant les services d'incendie et de secours à Wallis-et-Futuna, de la clôture de celle portant sur le Marais poitevin, de l'élargissement de l'action 04 dorénavant intitulée « plans d'investissement pour la Corse » afin de porter le plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC) ou encore, de la création, début 2023 d'une nouvelle action consacrée à la mise en oeuvre du plan de lutte contre les sargasses dans les Antilles.

Ce caractère fluctuant rend les comparaisons du programme dans son ensemble d'un exercice sur l'autre peu révélatrices et le rapporteur spécial s'attache principalement à vérifier que les crédits permettent, au sein de chaque action, d'exécuter les engagements pris par l'État sur une année. Toutefois, cet exercice s'est avéré plus ardu pour 2025 que les années précédentes en raison de l'annonce par le Gouvernement de 5 milliards d'euros supplémentaires d'économies à réaliser qui affecte le programme 162 à hauteur de 3 millions d'euros, en AE comme en CP.

Le montant des crédits alloués au programme 162 en PLF pour 2025 diminue de 4,12 % en autorisation d'engagements mais augmente de 134,07 % en crédits de paiement. Cet écart important s'explique par la spécificité de ce programme dont les actions sont étanches et dont les crédits de paiement au sein d'une même action peuvent être très variables d'une année sur l'autre. En l'espèce, les crédits de paiement alloués en 2025 au plan d'investissement pour la Corse passent de 3,8 millions d'euros à 49,6 millions d'euros (soit une hausse de 1 210,40 %) liés à des reports d'opération de 2024 sur 2025. Cet élément explique en valeur absolue la quasi totalité de la hausse des CP d'un exercice sur l'autre mais n'est pas particulièrement révélatrice et le rapporteur spécial ne s'étend pas sur ce point dans le rapport. Le tableau ci-après présente les moyens en AE et en CP pour 2025 par action.

Autorisations d'engagement et crédits de paiement du programme 162 par action (comparaison LFI 2024 - PLF 2025)

(en euros)

Action

Intitulé

LFI 2024

PLF 2025

Évolution LFI 2024-PLF 2025 (en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

02

Eau - Agriculture en Bretagne

1 885 122

1 866 265

1 721 215

1 714 336

- 8,69 %

- 8,14 %

04

Plans d'investissement en Corse

47 907 005

3 787 563

46 663 124

49 632 370

- 2,66 %

+ 1210,40 %

08

Plan Chlordécone
en Martinique et Guadeloupe

4 263 723

4 277 500

4 088 704

4 084 102

- 4,10 %

- 3,39 %

09

Plan littoral 21

8 000 000

4 205 454

8 233 063

5 516 942

+ 2,91 %

+ 31,19 %

10

Fonds interministériel transformation de la Guyane

11 608 184

11 539 668

10 395 001

10 400 248

- 10,45 %

- 9,87 %

11

Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire

57 002

658 732

Action supprimée

- 100 %

- 100 %

12

SIS Wallis-et-Futuna

2 067 544

2 049 874

2 054 163

2 049 674

- 0,65 %

- 0,01 %

13

Plan Sargasses II

4 857 770

4 816 500

4 200 000

4 200 000

- 13,54 %

- 12,80 %

Total

80 646 350

33 151 556

77 597 672

77 597 672

- 4,12 %

+ 134,07 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

La gestion de ces 7 actions repose sur un outil comptable spécifique, le programme des interventions territoriales de l'État (PITE), lequel regroupe des actions régionales de nature interministérielle et territorialisée, caractérisées par la nécessité d'une action rapide et concentrée de l'État. Il permet la mise à disposition des acteurs locaux d'une enveloppe budgétaire unique, elle-même financée par plusieurs programmes ministériels, qui ont vocation à concourir à la mise en oeuvre de l'action. Ce choix permet de bénéficier à la fois d'une souplesse dans la gestion de l'enveloppe budgétaire dédiée à chaque action et d'une réactivité accrue pour affecter, en cours d'année, les crédits aux priorités opérationnelles constatées en fonction de l'avancée des différentes mesures.

La contrepartie à cette souplesse est le caractère très volatile des crédits. Pour mesurer l'importance de ces mouvements de crédits qui ne s'amenuisent pas d'un exercice sur l'autre, le rapporteur a consulté59(*) les mouvements de crédits sur le programme 162 pour l'exercice 2024 en cours. Malgré 33,1 millions d'euros de CP ouverts en 2024, ce sont en tout 243,6 millions d'euros de CP qui apparaissent sur le programme 162 en 2024 : en raison d'ouvertures de fonds de concours (104,7 millions), de reports de fonds de concours de 2023 à 2024 (46,2 millions d'euros) ou tout simplement de reports de crédits de paiement de 2023 sur 2024.

A. LE PITE, UN OUTIL BUDGÉTAIRE EFFICACE

1. Un programme permettant de mettre en avant des politiques publiques interministérielles et territorialisées

Le PITE présente deux caractéristiques qui le distinguent des autres programmes budgétaires :

- il se compose d'actions répondant à des enjeux locaux spécifiques, dont la mise en oeuvre est limitée à un périmètre géographique donné et non à une politique publique nationale ;

- il est financé par des contributions issues de programmes de différents ministères, rendus fongibles au niveau de chaque action. Le PITE a ainsi vocation à mutualiser des moyens consacrés par chaque ministère à la réalisation de l'action.

Ce programme représente un faible enjeu budgétaire en termes de montants de crédits. Il est toutefois pertinent pour répondre à certaines problématiques locales complexes, sur lesquelles l'État souhaite mettre l'accent.

En outre, le PITE présente l'avantage de constituer un effet levier pour les partenaires de l'État sur les politiques publiques concernées, la mobilisation financière de l'État entraînant généralement celle d'un certain nombre de co-financeurs.

Enfin, le PITE présente des avantages notables pour les gestionnaires, en leur offrant une grande souplesse de gestion, tandis qu'il garantit aux acteurs locaux une meilleure visibilité de l'engagement de l'État sur leur territoire, en complément de crédits de droit commun des ministères concernés par la politique publique en question.

2. Une programmation initiale généralement peu révélatrice, du fait du financement des principales actions par des transferts en cours de gestion

Comme chaque année, il faut souligner que la principale difficulté concernant l'exécution du programme 162 est l'importance des mouvements de crédits pour certaines actions, qui limitent la portée de la prévision en loi de finances initiale et aboutit à des sur ou sous-consommations artificielles.

Les modalités de gestion liées à ces transferts en gestion sont difficilement compréhensibles. Elles n'apportent aucune garantie quant au montant qui sera in fine transféré en faveur du plan ou quant au calendrier de ce versement. Le rapporteur spécial en appelle depuis des années à un rebasage des crédits, ce qui permettrait de clarifier la gestion et de restaurer l'autorisation budgétaire donnée par le Parlement, qui ne se prononce actuellement en loi de finances initiale que sur une minorité des crédits.

L'année 2025 confirmera malheureusement de nouveau cette interprétation compte tenu de l'extrême volatilité d'une année sur l'autre des moyens ci-après commentés.

B. SEPT ACTIONS TERRITORIALISÉES IMPACTÉES TRÈS DIFFÉREMMENT SUR LE PLAN BUDGÉTAIRE EN 2025 

1. Les crédits du plan d'investissement pour la Corse

L'action 04 « Plans d'investissement pour la Corse » porte des crédits destinés à répondre à certaines spécificités du territoire Corse. À titre principal, il s'agit de financer le plan de transformation et d'investissement de la Corse (PTIC) lequel comprend notamment un volet dédié au développement durable de l'île.

Sont également inscrits sur cette action des crédits correspondant aux dernières opérations du plan exceptionnel d'investissement (PEI). Le PEI en faveur de la Corse a été institué par l'article 53 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse et codifié à l'article L. 4425-28 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Il vise à « aider la Corse à surmonter les handicaps naturels que constituent son relief et son insularité » et à « résorber son déficit en équipements et en services collectifs ».

Par convention-cadre signée le 22 avril 2002, l'État et la collectivité territoriale de Corse ont fixé les grandes orientations et les masses financières du PEI dont le montant global a initialement été fixé à un peu moins de 2 milliards d'euros. La programmation des dernières opérations inscrites au PEI a été finalisée conformément aux dispositions de l'article 234 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN). Les dernières opérations ont été engagées en 2022, tandis que les paiements interviendront jusqu'en 2026.

C'est la raison pour laquelle les dépenses engagées au titre de cette action ont vocation à se tarir progressivement.

Tout en s'interrogeant particulièrement sur les « spécificités » qui ont justifié, à l'origine, l'ouverture d'une telle action, au regard de l'existence de besoins et de contraintes tout à fait similaires sur le reste du territoire national, le rapporteur spécial constate qu'est observé en crédits de paiement pour 2025, après avoir observé l'inverse l'an dernier, un rythme de décaissements très soutenu, porté à 49 632 370 euros, ce qui représente une augmentation de 1 210,40 % des CP.

Sur le même exercice, 46,6 millions d'euros sont ouverts en AE, en légère diminution par rapport à 2024, pour financer, à terme, plusieurs investissements identifiés comme prioritaires. Il s'agira de développer divers aménagements urbains et d'investissements liés à la gestion des déchets et de l'eau.

2. Le Plan chlordécone IV

L'action 08 « Volet territorialisé du plan national d'action Chlordécone » finance, de manière transversale, les dispositifs destinés à tirer les conséquences de la pollution en Martinique et en Guadeloupe par la chlordécone, pesticide utilisé de 1972 à 1993 pour lutter contre le charançon du bananier, alors même que son utilisation avait rapidement été interdite dans plusieurs pays dont les États-Unis, en raison de ses effets cancérigènes.

Ce pesticide, par l'ampleur de ses effets et sa persistance dans le temps, entraîne des conséquences terribles sur le plan sanitaire, environnemental, agricole, économique et social. Il contient une molécule toxique, très persistante dans les sols, susceptible de contaminer certaines denrées végétales ou animales ainsi que les milieux aquatiques.

La lutte contre cette pollution a fait l'objet d'un ensemble d'actions coordonnées, regroupées sous l'appellation « plan Chlordécone » dont l'action finance une partie du 4e volet sur la période 2021-2027.

Ce « plan Chlordécone IV (2021-2027) » est issu d'un processus de co-construction qui a associé les services de l'État, les collectivités territoriales, des associations et organisations professionnelles et a débouché sur une consultation publique. Il comporte six stratégies (communication, recherche, formation et éducation, santé, environnement et alimentation, santé et travail, et enfin stratégie socio-économique) dont cinq sont mises en oeuvre dans le cadre du PITE.

Sur la base des consultations publiques menées, et toujours dans le cadre des six stratégies précitées, sont régulièrement identifiés de nouveaux volets de mesures à développer. Ont ainsi été identifiés en 2023 quatre types de mesures dont la mise en oeuvre se poursuit en 2025 :

- le financement d'une aide aux éleveurs de bovins pour sécuriser leur production à partir d'outils à leur disposition, comme des prises de sang prédictives du temps de décontamination avant abattage ;

- la prise en charge, de façon exceptionnelle et dérogatoire, du surcoût du traitement de l'eau potable des usines de production dont la ressource est impactée par la chlordécone ;

- la simplification de l'aide aux pêcheurs en opérant des déductions automatiques des contributions CGS-CRDS ;

- le doublement des financements sur la recherche et l'innovation à horizon 2030 pour la santé des femmes, la dépollution des sols et l'expérimentation en grandeur nature des découvertes des chercheurs.

Ces actions sont financées en 2025 à hauteur d'un peu plus de 4,09 millions d'euros, en AE comme en CP, contre 4,27 millions d'euros environ l'an dernier. Cette variation n'est pas révélatrice d'un désengagement de l'État mais simplement de l'application des engagements pris dont le rapporteur spécial ne tire pas de conclusion particulière sur le plan budgétaire.

Ce plan a été envisagé de manière à tirer les conséquences de l'évaluation du précédent plan qui avait fait apparaître plusieurs lacunes.

Les conclusions de la mission d'évaluation
du plan chlordécone III (2014-2020)

Cette mission a été confiée à l'inspection générale des affaires sociales, au conseil général de l'environnement et du développement durable, au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux et à l'inspection générale de l'administration, de l'éducation nationale et de la recherche, qui a rendu son rapport en février 2020. Le bilan du plan III dressé par la mission est assez sévère.

Celle-ci conclut à d'importantes lacunes dans l'organisation du pilotage du plan, jugée « peu efficace » du fait de l'absence d'implication directe des trois ministères de l'agriculture et du développement durable et de la recherche, à la direction générale de la santé (DGS) et à la direction générale des outre-mer (DGOM).

En outre, le financement des 30 millions d'euros du plan pour les premières années (2014-2017) reposait sur une articulation avec des crédits européens. Mais, selon la mission, les collectivités territoriales gestionnaires des fonds structurels européens ne se sont pas senties engagées par un plan auquel elles n'avaient pas été associées.

La mission fait également le constat d'un état d'avancement très inégal des actions. Selon elle, « des actions aussi essentielles que la surveillance médicale des professionnels et anciens professionnels de la banane et la cartographie des sols n'ont pas ou ont été insuffisamment réalisées ».

Autre critique, le volet recherche du plan présente un bilan mitigé au regard des objectifs du plan : « en continuité des deux plans précédents avec des actions et des projets largement autonomes, sans réelles hiérarchie ni cohérence avec les autres actions du plan, sa conception apparaît déficiente ». La mission pointe en particulier une absence de clarté sur la gouvernance du plan, entraînant un manque d'efficacité du pilotage.

La mission recommande en conclusion de revoir en profondeur le pilotage du plan IV afin de créer une synergie entre toutes les parties prenantes. Le Gouvernement semble avoir entendu cette recommandation et met en avant la « co-construction » du plan IV avec l'ensemble des acteurs.

Source : Commission des finances du Sénat à partir des programmes annuels de performances

3. Le Plan littoral 21 en Occitanie

La loi de finances pour 201860(*) a créé une nouvelle action « plan littoral 21 » au sein du PITE. Celle-ci a pour objectif de participer au financement du plan de reconversion du littoral de la région Occitanie à l'horizon 2050, défini conjointement par l'État et la région accompagnés de la Caisse des dépôts et consignations.

Ce plan cherche à revenir sur le vieillissement des stations touristiques, en rénovant les infrastructures, et à faire face aux conséquences du réchauffement climatique, dans le cadre de la stratégie nationale pour la mer et le littoral.

Le coût total prévisionnel du plan littoral 21 est estimé à près de 1 milliard d'euros, mobilisant des crédits de la région, d'une part, et de l'État, d'autre part, dont une partie seulement passe par le PITE, le reste étant financé par des crédits budgétaires de droit commun et des crédits européens.

Le plan littoral 21 bénéficiera en 2025 de financements en hausse de 2,91 % en AE par rapport à l'année précédente, soit 8, 23 millions d'euros en AE contre 8 millions d'euros un an plus tôt. En CP, les crédits augmentent de 31,19 % (5,5 millions d'euros en 2025 contre 4,2 millions d'euros en 2024).

Le plan Littoral 21 finance trois types d'interventions : des études à caractère général et souvent prospectives, des études préalables à la réalisation de dossiers complexes, qui doivent également permettre de mettre en cohérence ces projets avec les objectifs du Plan Littoral 21, et la réalisation d'investissements entrant dans le plan d'aménagement du territoire littoral.

Les principaux projets portés par l'action concernent le développement et l'accompagnement de la filière halieutique, la valorisation de l'offre culturelle du littoral occitan, la connaissance des risques et la gestion de l'eau, le développement de la filière sportive en particulier concernant les sports de glisse, l'amélioration des ports de plaisance, la modernisation et le développement équilibré des stations littorales ou encore l'aménagement des voies de circulation douce le long de la côte.

Tout comme pour l'action 04 « Plans d'investissement pour la Corse », le rapporteur spécial, tout en reconnaissant l'efficacité des opérations menées, s'interroge sur les particularités qui justifient que le littoral occitan ait bénéficié d'un tel dispositif, au travers d'une action spécifique, même si l'on peut convenir du caractère contestable de l'aménagement littoral conduit par l'État dans les années 1960.

4. L'action 02 « Eau et agriculture en Bretagne » : des crédits de nouveau en baisse qui ne signifient pas que cesse le combat contre les algues vertes

La part « État » du financement de la lutte contre les algues vertes passe entièrement par l'action 02 « Eau et agriculture en Bretagne ». Il s'agit de l'action la plus ancienne du programme, inscrite depuis 2006. Initialement, cette action comporterait trois axes : un volet préventif visant à faire évoluer les pratiques et systèmes agricoles pour réduire les flux de nitrates dans les cours d'eau, un volet curatif axé sur la sécurité des personnes grâce au ramassage et au traitement des algues échouées sur les plages et un volet scientifique visant à renforcer la connaissance du phénomène.

L'action contribue au financement du plan de lutte contre les algues vertes (PLAV) mis en oeuvre pour la période 2010-2015, renouvelé pour la période 2017-2021, puis prolongé dans un contrat de plan État-Région de lutte contre la prolifération des algues vertes (PLAV) 2021-2027.

Ce plan permet un suivi spécifique de la concentration moyenne des eaux en nitrates de plusieurs bassins versants dans huit baies prioritaires bretonnes. Il finance également des projets de territoire préventifs destinés à limiter les rejets d'azote dans l'environnement. L'État contribue à hauteur de 40 % au financement du PLAV, via le PITE. Il participe cependant de manière différenciée aux différents volets. Ce volet PLAV constitue formellement un axe qui est venu compléter les volets initiaux.

Après avoir été longtemps stable autour de 2 millions d'euros en AE comme en CP, les crédits sont en diminution de 8,69 % en AE et de 8,14 % en CP. L'action est dotée de 1 721 215 euros en AE et 1 714 336 euros en CP. Toutefois, ces chiffres ne tiennent pas compte du transfert en gestion de 5 millions d'euros effectué chaque année, soit deux tiers du montant de l'action.

L'action est dotée de 4 200 000 euros en AE (-13,54 %) comme en CP (- 12,80 %).

5. Le Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane

L'action 10 traduit les engagements de l'État dans le cadre, d'une part, de l'application des accords de Cayenne du 21 avril 2017 et, d'autre part, de l'adoption du contrat de convergence et de transformation (CCT) pour la Guyane signé le 8 juillet 2019.

L'actuel contrat a pris fin le 31 décembre 2022. Un CCT de transition en 2023 a permis d'amorcer des projets qui s'inscrivent sur la période

L'année 2024 a marqué le début de l'exécution du nouveau contrat de convergence et de transformation (CCT). Il bénéficiera d'un total de 11,6 millions d'euros en AE et 11,53 millions d'euros en CP.

Le mandat de négociation a été transmis à la fin du mois de septembre 2023 au préfet de la Guyane par la DGOM qui pilote au niveau national le dispositif de négociation et de mise en oeuvre des CCT pour l'outre-mer.

Les contributions des différentes agences parties au CCT de la période antérieure via des fonds de concours (Office français de la biodiversité, Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, Agence de financement des infrastructures de transport de France) ainsi que de la collectivité territoriale de Guyane devront être précisées à l'occasion de la négociation qui vient de s'engager pour les années 2024 et suivantes.

6. Le transfert encore retardé du service d'incendie et de secours à Wallis-et-Futuna

En application de la loi statutaire61(*) du 29 juillet 1961, le service d'incendie et de secours de Wallis-et-Futuna relève de la compétence de l'État. Constitué de deux îles principales distantes de 250 kilomètres, l'archipel est exposé à des aléas naturels aux conséquences potentiellement très importantes. Sa capacité opératoire face à la survenance d'éventuels aléas est apparue insuffisante, en particulier au regard de son relatif isolement vis-à-vis du reste du territoire national.

L'action du PITE porte, depuis 2021, les crédits permettant à l'établissement public territorial « service d'incendie et de secours » (SIS) d'assurer les interventions courantes et les missions de gestion des crises pour le territoire, dans l'attente d'une éventuelle révision du statut qui pourrait attribuer cette compétence à l'assemblée territoriale.

Une convention de délégation provisoire de compétence en matière d'incendie et de secours entre l'État et l'établissement public a ainsi été signée en janvier 2021. Celle-ci a de nouveau nécessité un avenant de prolongation.

Le service d'incendie et de secours est composé de deux centres de secours mobilisant 29 sapeurs-pompiers professionnels ainsi qu'un agent chargé du secrétariat et de la comptabilité. Quelques sapeurs-pompiers volontaires, dont le nombre peut varier, complètent le dispositif opérationnel. Avec 2,05 millions d'euros en AE comme en CP prévus pour 2025, l'action 12 finance en premier lieu les charges de personnel à hauteur de 1,7 million d'euros, comprenant les vacations des sapeurs-pompiers volontaires ainsi que les charges liées à l'agent administratif, des charges à caractère général, tenant compte d'une délibération de l'Assemblée Territoriale qui a supprimé des exonérations de taxes pour le service d'incendie et de secours (200 000 euros) et enfin divers investissements comme l'achat d'un véhicule incendie à Futuna pour 330 000 euros, maintes fois reporté.

7. Le Plan Sargasse II

Au cours des dernières années, des échouages importants d'algues brunes dites sargasses ont eu lieu sur les côtes, de manière quasi-continue, dans les Antilles françaises. Ce phénomène n'est plus conjoncturel, mais est devenu pérenne et annuel au regard des conditions climatiques et des courants.

Comme dans les régions soumises à des échouages d'algues vertes, l'accumulation massive des algues sur les littoraux et leur putréfaction constituent des enjeux forts sur les plans sanitaires, économiques et environnementaux, conduisant à des situations de crise.

L'État a réagi dès 2014, en mettant en place des mesures de conseil et d'appui aux collectivités, un plan d'urgence au niveau local, puis un plan d'urgence au niveau national en 2018. Le plan Sargasse II comporte 26 mesures, réparties en cinq axes : action préventive, réponse opérationnelle, gouvernance, recherche-développement-innovation et coopération internationale.

La création d'une action destinée à gérer le plan Sargasses II a notamment pour objectif de financer la collecte et le traitement des algues et d'apporter un soutien aux collectivités territoriales.

La création d'une action PITE destinée à gérer le plan « Sargasses II », couvrant la période 2022-2025, a été actée lors d'une réunion interministérielle du 13 décembre 2021.

Il s'agit de passer d'une approche curative à une approche préventive, en allant chercher les sargasses en mer, ce qui implique de répondre au défi que constitue le stockage en travaillant sur la valorisation économique de ces algues.

Le plan représente un budget annuel prévisionnel de 7,6 millions d'euros, mettant à contributions plusieurs programmes, dont 4,2 millions d'euros financés par le programme 162 en 2025.

EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Cohésion des territoires », et donc des programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 12 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Bernard Delcros, rapporteur spécial, sur les programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État » de la mission « Cohésion des territoires ».

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville ». - Comme chaque année, nous serons deux rapporteurs spéciaux pour vous présenter les crédits de la mission « Cohésion des territoires » : je commencerai avec les quatre programmes portant les crédits destinés à la politique du logement, de l'urbanisme, de l'hébergement et de la ville ; M. Delcros prendra le relais avec les crédits de la politique d'aménagement du territoire et des interventions territoriales de l'État.

Je voudrais pour commencer vous proposer une analyse de l'évolution importante que connaît l'enveloppe de la mission. En effet, en crédits de paiement (CP), celle-ci passe de 19,4 milliards d'euros en loi de finances initiale (LFI) de 2024 à 23,8 milliards d'euros dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Il s'agit d'une hausse de 17,7 % des crédits après correction de l'inflation, ce qui est inédit pour la mission. Néanmoins, ne nous y trompons pas, cette hausse est liée à des mesures de périmètre, et non à un soudain accroissement des crédits. En effet, dans le contexte budgétaire contraint que nous connaissons, il aurait été peu raisonnable d'augmenter de 4,6 milliards d'euros les dépenses liées à la mission.

Par conséquent, les crédits, à périmètre constant, sont bien plutôt - hélas - en baisse de 4 %, y compris dans les missions qui relèvent du logement et de l'urbanisme. Je salue cette rationalisation des crédits ouverts qui correspond pour une grande partie à une mise en cohérence des ouvertures des années précédentes avec les actions concrètement menées. Cela ne m'empêchera pas de mettre en évidence certains risques portés par la baisse de ces crédits.

Pour commencer par le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », il convient d'abord de saluer l'objectif affiché par le Gouvernement de maintenir 203 000 places dans le parc en 2025, soit autant qu'en 2024. En tendance longue, cela correspond à une augmentation de 50 000 places par rapport à 2017.

Cela est d'autant plus notable que le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile (DNA), à destination des personnes en situation irrégulière, connaît une baisse de plus de 9 000 places l'an prochain. Cela conduira probablement à un report sur le parc d'hébergement d'urgence classique, qui pourra tenir le choc d'autant mieux qu'il ne réduit pas le nombre de places offertes.

Outre l'accroissement de ce parc, il convient de noter la baisse depuis trois ans du nombre de nuitées hôtelières, permise par l'action résolue de la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal). Ces dernières sont en baisse de 11,8 %.

Cela favorise un accueil plus digne des hébergés, qui sont pris en charge dans des structures d'accueil plus adaptées comme les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS). Ces derniers bénéficient, en effet, de crédits en augmentation de 5 % pour l'année 2025. Ces structures offrent un accompagnement social en plus du simple hébergement et doivent continuer à se développer.

Je relève néanmoins deux difficultés dans les crédits proposés pour ce programme. D'une part, il apparaît que les crédits ouverts peuvent sembler sous-évalués. En effet, ils sont en légère baisse par rapport à ceux qui ont été ouverts en LFI de 2024.

Or l'exécution au titre de l'exercice en cours a mené le Gouvernement à proposer une ouverture de crédits de 250 millions d'euros dans le projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG). Ainsi, avec un objectif de places similaire à l'année précédente, il pourrait manquer 250 millions d'euros pour boucler l'année 2025.

D'autre part, et je sais combien Mme Sollogoub, qui nous fait l'honneur de rapporter ce programme au nom de la commission des affaires sociales, saisie pour avis, y est aussi attentive, le PLF pour 2025 ne prévoit pas de mesures d'accompagnement spécifique pour les Ukrainiens.

L'engagement en faveur de l'intermédiation locative, qui permet à ces réfugiés de bénéficier d'une aide bienvenue pour se loger, est en effet en baisse de 2,6 %. Je suis conscient de l'importance de maintenir un dispositif fonctionnel pour ces personnes que la guerre a poussées à quitter leur pays. Je resterai donc attentif à ce que l'action gouvernementale puisse s'inscrire dans le temps long et favorise un accueil décent pour les Ukrainiens en France.

Je serai bref, ensuite, sur les crédits du programme 109 « Aide à l'accès au logement », même s'il porte la très grande majorité des crédits. Il s'agit en effet des aides au logement, une aide de guichet qui ne connaît pas de réforme particulière cette année.

Le coût prévu pour l'État est de 17 milliards d'euros pour 2025. Ici encore, il faut mentionner une évolution de périmètre qui fait bondir de 24,6 % les crédits du programme. En effet, pour se mettre en conformité avec les dispositions de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), le Fonds national d'aide au logement (Fnal) ne pourra plus, à partir du 1er janvier 2025, recevoir d'affectations de taxes.

Par conséquent, le montant des cotisations patronales qui lui étaient transférées, à savoir 3 milliards d'euros, et celui de la fraction de taxe sur les bureaux, à savoir 24 millions d'euros, sont réintégrés au budget de l'État. Cela explique une grande part de la hausse d'environ 3,6 milliards d'euros des crédits du programme.

Je salue cette évolution positive pour la lisibilité du coût des aides au logement et de l'effort de l'État.

Je me réjouis que l'effet des réformes passées, qui ont contribué à réduire le montant versé de 20,8 milliards d'euros à 15,6 milliards d'euros entre 2017 et 2023, soit désormais derrière nous et que le montant se stabilise pour l'année qui vient : cela vaut moins pour les bénéficiaires, qui n'ont pas vu leur taux d'effort augmenter durant ces années, que pour les bailleurs sociaux. En effet, la baisse des aides a pesé sur leurs fonds propres par le transfert de la charge de la réduction de loyer de solidarité (RLS).

Cette question de la RLS me permet d'en venir au programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat », qui porte le coeur de la politique du logement du Gouvernement. Or, la crise actuelle est principalement une crise de la construction, notamment celle du logement social.

Les bailleurs, en effet, ont vu leurs capacités de financement de nouveaux projets grevées par la RLS, ainsi que par le maintien d'un taux élevé du livret A. Ces deux difficultés devraient néanmoins s'atténuer au cours de l'exercice 2025. L'inflation diminue, ce qui permettra une baisse du taux du livret A. En outre, le gouvernement soutient un gel de la RLS, ce qui pourra permettre de ne pas accentuer les difficultés des bailleurs. Je souhaite que les possibles évolutions à la baisse de la RLS soient menées de concert avec une contractualisation exigeante qui mène à un redémarrage de la construction.

Les bailleurs privés, qui connaissent une conjoncture particulièrement défavorable, pourraient bénéficier d'une relance du logement social, dans la mesure où de nombreuses opérations sont désormais mixtes.

Je souligne ici que le Gouvernement a donné un avis favorable à un amendement de l'Assemblée nationale pour l'élargissement du prêt à taux zéro (PTZ). Cela pourrait entraîner un regain de la demande, qui est l'autre volet nécessaire pour que le marché reparte. Je suis favorable à cette initiative, ainsi qu'à toutes celles qui favoriseront la relance de la construction.

Les crédits du programme 135 portent une autre politique d'ampleur, qui est celle de la rénovation thermique des logements privés.

C'est grâce à une évolution de la maquette budgétaire concernant ces aides à la rénovation que les crédits du programme sont en hausse de 1,4 milliard d'euros, soit 89,2 % de croissance. En effet, les deux tiers des aides provenaient du programme 174 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et pour un tiers seulement du présent programme. Elles sont désormais regroupées dans le programme 135. À nouveau, cette clarification de la maquette budgétaire est à saluer.

En outre, les évolutions des crédits prévus par l'unification du versement à l'Agence nationale de l'habitat (Anah), qui porte la politique de rénovation des logements, sont bénéfiques pour la cohérence et la sincérité du budget de l'État.

En effet, les ressources dont bénéficie l'Anah ont doublé entre 2021 et 2024, passant de 2 milliards d'euros à 4 milliards d'euros, crédits budgétaires et taxes affectées compris. Pour 2025, ce sont 3 milliards d'euros qui lui seront octroyés, dont 2,3 milliards d'euros de subvention budgétaire.

Ces crédits sont cohérents avec l'exécution constatée en 2024, qui a conduit le Gouvernement à annuler 359 millions d'euros en février, puis à proposer l'annulation de 381 millions d'euros supplémentaires dans le PLFG. En effet, le volume de travaux accomplis a mené au versement d'un montant de subventions largement inférieur aux crédits votés.

Cette baisse est d'autant plus justifiée que la trésorerie de l'Anah a été multipliée par trois depuis 2019 et lui permettra largement de tenir le choc en cas d'augmentation soudaine du nombre d'opérations de rénovation en 2025.

Enfin, je mentionne ici que notre collègue Bernard Delcros vous présente un amendement visant à augmenter les crédits à hauteur de 5,5 millions d'euros, en les ponctionnant du programme 135 pour les allouer au programme 112. Cela représente moins de 0,1 % des crédits ouverts sur le programme et ne pénalise pas l'accomplissement de la politique du logement, mais pourra avoir une action utile pour la cohésion des territoires.

Pour finir, je présenterai les crédits de la politique de la ville, portée par le programme 147.

Ces derniers sont en baisse de 15,6 % en euros constants, notamment en lien avec l'absence de crédits présentés à ce jour pour la participation de l'État au nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU).

Alors que l'État s'est engagé à apporter 300 millions d'euros à l'horizon 2028, seuls 106,9 millions d'euros ont été jusqu'alors versés. L'année 2024 sera en outre une année blanche, car le PLFG prévoit l'annulation des crédits ouverts - 50 millions d'euros. Pour 2025, le montant n'est pas encore arbitré, mais le Gouvernement déposera un amendement en ce sens.

Je resterai donc attentif à toute initiative qui permettra de garantir, sans les retarder, les opérations de renouvellement urbain.

Pour les autres enjeux de la politique de la ville, je salue le fait que tous les nouveaux contrats de ville sont désormais signés. Attendus depuis 2022, ces derniers donneront un cadre au déploiement de cette politique.

Si les crédits sont en diminution, en lien avec un contexte budgétaire contraint, il n'en demeure pas moins que nombre de dispositifs portent leurs fruits. J'en citerai deux, qui auront besoin d'un soutien de l'État, même si les moyens sont limités : les adultes-relais d'une part, qui sont des médiateurs efficaces pour favoriser la tranquillité publique et le lien social dans les quartiers ; les cités éducatives, d'autre part, qui permettent de créer une synergie de moyens autour de l'école et de l'enseignement.

Je conclurai mon intervention en vous disant que je ne suis évidemment pas dupe de l'état difficile du marché immobilier et que je mesure que les crédits pour l'hébergement d'urgence et la politique de la ville pourraient être accrus. Néanmoins, il me semble que nous devons agir aujourd'hui pour faciliter le travail entrepris par ce gouvernement pour aller dans le bon sens. C'est déjà le cas sur plusieurs sujets, comme le PTZ ou le gel de la RLS.

Par conséquent, confiant dans les initiatives gouvernementales et lucide sur les contraintes que connaît notre pays en termes de finances publiques, je vous propose d'adopter ces crédits.

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État ». - Le volet « politique des territoires » de la mission « Cohésion des territoires » comprend principalement le programme 112, pour des montants prévus en 2025, respectivement de 248 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 211 millions d'euros en CP.

Ce programme, financé en grande partie par le fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), qui comporte une section locale et une section générale, intègre, d'une part, des crédits pour financer les politiques contractuelles de l'État, notamment le volet territorial des contrats de plan État-région (CPER) et les contrats de plan interrégionaux État-régions (CPIER), d'autre part, des crédits destinés à différents dispositifs d'aménagement du territoire, pilotés par l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) ou financés directement par l'ANCT au travers de la subvention pour charges de service public. Ces montants peuvent paraître peu élevés, mais je tiens à rappeler qu'ils ont un effet de levier significatif dans les territoires.

Je suis par ailleurs chargé d'assurer le suivi du programme 162, qui comprendra en 2025 sept actions territorialisées pour un peu plus de 77 millions d'euros, en AE comme en CP. Je vais principalement consacrer mon propos au programme 112, qui connaît une réduction très importante de ses crédits dans le PLF qui nous est présenté par le Gouvernement.

Entre la LFI de 2024 et le projet de budget pour 2025, on passe sur ce programme de 398 millions d'euros environ à 249 millions d'euros, soit une baisse de près de 40 % !

Je l'avoue, quand j'ai découvert cette baisse drastique et avant même de l'avoir examinée en détail, j'ai craint une remise en cause sur le fond des politiques de soutien aux territoires que nous avons réussi à mettre en place progressivement et qui commencent aujourd'hui à porter leurs fruits sur le terrain, une remise en cause qui ne serait pas, pour moi, acceptable, mais j'y reviendrai.

En y regardant de plus près, la baisse de crédits est essentiellement concentrée sur deux postes de dépenses : 83 % de la baisse portent sur les politiques contractuelles de l'État pour un montant de 125 millions d'euros et 17 % concernent une réduction des subventions pour charges de service public et pour investissement versées à l'ANCT, qui passeraient de 88 millions d'euros à 68 millions d'euros, soit une réduction de 20 millions d'euros.

Alors, quelles seront les conséquences concrètes de cette baisse importante sur les politiques contractuelles, d'une part, et sur les actions de l'ANCT, d'autre part ?

Sur le premier point, sont concernés le volet territorial des CPER 2021-2027, les CPIER et les pactes de développement territorial. Les baisses devraient se traduire, non par une annulation des opérations prévues, mais par un report d'un an de bon nombre d'entre elles et donc par un glissement de la durée de ces contrats.

Je tiens à préciser qu'il doit bien s'agir d'un report et que les crédits nécessaires au respect des engagements de l'État lors de la signature de ces contrats avec les collectivités devront être inscrits en 2026. Le contraire ne serait pas acceptable !

Concernant la réduction de 20 millions d'euros des subventions versées à l'ANCT, elle pourrait être, en grande partie, absorbée par un resserrement des dépenses internes à l'Agence.

En revanche, j'attire l'attention sur la nécessité de préserver de toute baisse massive le soutien à l'ingénierie locale financé directement par l'ANCT. Ce dispositif créé il y a seulement trois ans est désormais bien connu et apprécié des élus locaux, tandis que les préfets se le sont approprié. Il est particulièrement utile pour les plus petites collectivités.

De 10 millions d'euros à sa création en 2022, il a été rehaussé à 20 millions d'euros en 2023 puis à 40 millions d'euros en 2024. Un montant de 30 millions d'euros pour 2025 me semble absolument nécessaire. Il y va pour moi de la crédibilité de l'action de l'État dans les territoires, afin de poursuivre cette action récente.

Les autres actions du programme 112 qui concernent les nombreux soutiens de l'État aux politiques locales sont dans l'ensemble préservées, voire améliorées. Il en est ainsi des contrats de convergence et de transformation (CCT) qui concernent le soutien aux outre-mer, du plan France ruralités, de l'accompagnement des opérations Coeur de ville, Petites villes de demain (PVD) ou Villages d'avenir, en particulier au travers d'emplois portés directement par l'État ou accompagnés par l'État.

Sont également préservés d'autres volets comme les Territoires d'industrie qui bénéficient d'ailleurs d'un doublement de leurs crédits. Concernant les maisons France Services, un sujet qui nous tient à coeur compte tenu de l'intérêt qu'elles représentent pour les territoires, les engagements qui avaient été pris à la suite des propositions que j'avais faites dans le rapport que je vous avais présenté sont tenus.

Ainsi les crédits affectés aux France Services augmentent de près de 25 %, passant de 53,2 millions d'euros à 65,5 millions d'euros. Cette hausse permettra notamment d'accroître, là aussi comme prévu, le montant de la dotation aux collectivités qui les portent. Cette dotation financée à parité avec les opérateurs s'élèvera en 2025 à 45 000 euros par France Services.

Toutefois, les 7,55 millions d'euros inscrits sur le programme 112 pour financer la majoration accordée aux France Services implantées dans les communes classées France Ruralités Revitalisation (FRR) sont insuffisants pour respecter la trajectoire prévue de 10 000 euros par France Services.

Je vous proposerai donc un amendement à hauteur de 5,5 millions d'euros pour corriger cette insuffisance, préparé avec la bienveillance de notre collègue Jean-Baptiste Blanc que je remercie, puisque ce montant sera prélevé sur une action d'un programme relevant de sa compétence.

Sur le programme 162, je serai bref. Il s'agit de sept actions territorialisées : il y en avait huit l'an dernier, mais, comme prévu, nous achevons en 2024 l'exécution de l'action consacrée à l'eau dans les Pays de la Loire.

Deux remarques toutefois : si les crédits consacrés à la Corse augmentent de manière très importante, c'est parce que, depuis deux ans, un certain nombre d'opérations ont été reportées et qu'elles devraient être exécutées en 2025.

Par ailleurs, les crédits des autres actions évoluent conformément aux prévisions et devraient permettre une exécution conforme à celle qui a été envisagée lors de la signature de ces conventions.

Pour conclure et dans un contexte de nécessaire redressement des comptes publics auquel contribue le programme 112, je voudrais faire quatre observations qui m'amènent à vous proposer l'adoption des crédits.

Premièrement, la baisse importante des crédits du programme 112 ne se traduit pas par une remise en cause du financement des opérations contractualisées, mais par un report d'un an et le glissement de la durée des contrats.

Deuxièmement, le soutien à l'ingénierie locale portée par l'ANCT peut demeurer à un niveau suffisant pour répondre aux besoins des territoires. Il n'est pas remis en cause dans son principe par la baisse de la subvention pour charges de service public versée à l'ANCT.

Troisièmement, les autres actions de soutien aux territoires, construites au fil du temps ne sont pas impactées par des réductions significatives de crédits, à l'instar des France Services.

Enfin, je rappelle que le vote se fait globalement sur la mission que nous menons conjointement avec notre collègue Jean-Baptiste Blanc et pas seulement sur les programmes 112 et 162 dont j'assure le suivi.

Avant de terminer, permettez-moi, monsieur le président, d'ajouter dès maintenant, deux points de vigilance pour l'avenir.

Première observation, la coupe budgétaire de cette année sur le programme 112, si elle peut se justifier compte tenu de la nécessité de redresser les comptes publics et du fait qu'elle ne remet pas en cause, sur le fond, les soutiens de l'État aux territoires, doit rester exceptionnelle et attachée à la seule année 2025. Je le répète, il ne serait pas envisageable, à mes yeux, que l'engagement de l'État pris lors de la signature de plusieurs contrats territoriaux ne soit pas respecté !

Deuxième observation, les montants affectés au programme 112 restent depuis longtemps modestes, mais le FNADT qui les finance est un outil de l'État souple et efficace qui a un fort effet de levier sur les territoires. C'est aujourd'hui reconnu.

Je pense donc qu'il ne faut pas réduire sa portée, mais au contraire la consolider et j'y serai de ce point de vue très attentif dans le cadre de la préparation du budget pour 2026.

D'ailleurs, je vous proposerai de réaliser, dans le cadre des contrôles budgétaires, un rapport sur le rôle du FNADT dans les politiques de développement local, qui pourra nous éclairer sur ce sujet.

M. Claude Raynal, président. - Je reste dubitatif quant à la notion de coupe budgétaire « exceptionnelle », le programme gouvernemental de redressement des comptes publics devant se déployer au moins jusqu'à 2029. Dans ce cadre, il faudra trouver environ 25 milliards d'euros chaque année, et j'ai bien peur qu'une partie des coupes « exceptionnelles » ne soient renouvelées.

Mme Nadia Sollogoub, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales sur le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Cohésion des territoires ». - Le programme 177 est le filet de sécurité de la solidarité nationale, il est celui qui offre un toit, qui accompagne, qui défend la dignité des plus précaires.

Dans le PLF pour 2025, ce programme voit ses crédits être pérennisés à hauteur de 2,9 milliards d'euros. C'est un élément que je tiens à saluer, alors que nous savons tous que le contexte budgétaire est à la consolidation. Il faut le marteler : l'État ne fait pas d'économies sur les personnes sans domicile.

Pour autant, je souhaiterais attirer votre attention sur trois points d'alerte.

Tout d'abord, si les crédits sont globalement maintenus, je m'inquiète de certains transferts. La ligne budgétaire dédiée à l'hébergement d'urgence est en baisse de 70 millions d'euros, en précisant qu'il s'agit des nuitées hôtelières, les moins coûteuses. L'objectif est d'en transformer une partie en places de CHRS, plus qualitatives, mais également plus coûteuses : il est évident que l'objectif d'un parc de 203 000 places n'est pas tenable dans ces circonstances.

Ensuite, je tiens à vous alerter sur l'absence de ligne budgétaire pour l'hébergement des Ukrainiens. Les plus vulnérables d'entre eux, ceux qui n'ont pas réussi à acquérir leur autonomie, risquent des expulsions dès janvier 2025. Ce manque de financement, estimé à 27,5 millions d'euros, est de nature à créer un risque diplomatique et d'embolisation du système d'asile.

Enfin, je souhaite attirer votre attention sur la sous-budgétisation chronique du programme 177, qui a des conséquences majeures. Le PLFG pour 2024 prévoit, comme tous les ans, de l'abonder à hauteur de 250 millions d'euros. On le sait, avec le budget actuel, il faudra une nouvelle fois débloquer ces 250 millions d'euros en fin d'année prochaine.

Il ne s'agit pas d'une dérive budgétaire, mais du report d'année en année d'une dépense exceptionnelle d'un exercice antérieur. Ce fonctionnement a posteriori conduit les associations à avancer sur leur trésorerie l'hébergement d'urgence, sans garanties de remboursement des services faits. Aujourd'hui, elles ne supportent plus ce stop and go et la moitié d'entre elles disparaîtront en 2025 si ce fonctionnement est maintenu.

Or ces associations sont aussi celles qui s'occupent des personnes handicapées, de l'aide alimentaire, parfois même des Ehpad, d'où ma grande inquiétude.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Le contexte est particulièrement difficile et l'effort proposé par le Gouvernement l'est tout autant. Dans ce contexte, personne ne fait preuve de vanité et je pense que nous nous associons tous aux messages des rapporteurs spéciaux quant à leur mission.

Pour ce qui est de l'alerte de Mme Sollogoub, nous continuerons à mener à un travail avec le Gouvernement, même s'il sera difficile de trouver les 250 millions d'euros qui sont abondés d'année en année. La mise en pratique du principe des vases communicants n'a rien d'évident, et je remercie Jean-Baptiste Blanc d'être venu appuyer Bernard Delcros afin qu'il puisse présenter la meilleure copie possible.

Certains dispositifs se sont essoufflés et n'ont pas prouvé toute leur efficacité en termes de dépense publique, d'où l'intérêt de faire mieux et de concentrer les efforts. Les politiques du logement sont confrontées à de véritables difficultés alors que le secteur traverse une grave crise, qu'il s'agisse de la construction de logements neufs ou des logements aidés sous toutes leurs formes.

L'urgence est grande dans ce domaine, et nous devrons articuler ces politiques avec les enjeux d'aménagement et de cohésion des territoires. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la dissonance politique entre les territoires urbains et les territoires plus ruraux qui s'est exprimée lors des derniers scrutins, celle-ci n'ayant rien d'inévitable. Il importe de ne pas se résigner et de modifier la manière dont nous avons appréhendé ces différentes politiques jusqu'à présent, en lien avec les opérateurs chargés de les mettre en oeuvre. Nous serons force de proposition et nos rapporteurs continueront à nous aider en ce sens.

M. Michel Canévet. - Je remercie les deux rapporteurs spéciaux. J'avais bon espoir que nous parvenions à réaliser des économies substantielles sur les 36 milliards d'euros de cette mission, mais il semble qu'elle comporte un volet lié à l'aménagement du territoire particulièrement important et qu'elle réponde à de réels besoins.

Comme l'a souligné le rapporteur général, la question du logement est particulièrement problématique dans notre pays. D'après les remontées du terrain, obtenir les aides de l'Anah s'apparente à un véritable parcours du combattant : ne pourrait-on pas simplifier les dispositifs de manière à ce qu'ils ne rebutent pas les acteurs qui souhaitent améliorer leur logement sur le plan énergétique ? De la même manière, un certain nombre d'aides sont accordées à cette transition énergétique, mais ne pourrait-on pas envisager d'autres mécanismes que des subventions, tels que des prêts ?

Par ailleurs, confirmez-vous qu'un certain nombre de crédits font défaut pour ce qui concerne les volets relatifs à l'aménagement du territoire des CPER pour l'exercice 2025 ?

Le programme 112, quant à lui, englobe le programme Territoires d'industrie et les tiers-lieux : observe-t-on une baisse des crédits dédiés à l'animation de ces espaces, qui jouent un rôle important dans l'accompagnement des entrepreneurs individuels, afin qu'ils ne travaillent pas de manière isolée ? Enfin, confirmez-vous que les crédits alloués au programme Territoires d'industrie évoluent à la hausse ?

M. Stéphane Sautarel. - Sur la partie logement et urbanisme, la dépense fiscale représente quasiment 11 milliards d'euros : comment a-t-elle évolué en tendance ?

Concernant les CPER, qui ne sont malheureusement pas exécutés comme ils devraient l'être, faut-il redouter une aggravation du phénomène du fait de la réduction des crédits ?

Sur un autre point, je suis plutôt réservé sur les missions de l'ANCT, et j'espère que la baisse des crédits permettra une meilleure coordination sur le terrain avec les autres acteurs de l'ingénierie.

Je me réjouis, par ailleurs, de la déclinaison des mesures du programme FRR dans différents dispositifs et notamment pour les France Services. Le nombre de ces structures évolue-t-il encore ?

Enfin, à l'instar de M. Canévet, j'ai été surpris par l'évolution positive des crédits relatifs au programme Territoires d'industrie, puisqu'il me semblait qu'une diminution de l'accompagnement de l'animation du dispositif avait été décidée. Comment expliquer cette hausse ?

Mme Frédérique Espagnac. - Je remercie à mon tour les deux rapporteurs. Nous voterons défavorablement sur cette mission dans la mesure où nous avons de sérieux doutes sur le renouvellement des crédits. Je tiens à alerter mes collègues sur les retards de déploiement des CPER, qui affectent les investissements et qui auront des conséquences majeures pour nos territoires et nos entreprises. S'y ajoutent des rumeurs dont Bernard Delcros a dû avoir vent au sujet d'une fusion de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et du fonds vert.

Pour ce qui est du programme Territoires d'industrie, les retours dont je dispose laissent penser que les objectifs de réindustrialisation sont loin d'être atteints. L'an dernier, ce programme avait bénéficié du fonds vert à hauteur de 70 millions d'euros, mais quid de ces crédits compte tenu des ponctions prévues ?

Quant aux France Services, ces structures correspondent-elles bien aux attentes des territoires ? Je rappelle que plus de 2 000 communes avaient été sauvées d'une sortie du dispositif des zones de revitalisation rurale (ZRR) par Gabriel Attal, mais qu'elles risquent de se retrouver en difficulté dans la mesure où le plan est prévu jusqu'en 2027, et non pas jusqu'en 2029.

Enfin, je rappelle que des ponctions sont prévues sur les chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) et les chambres de commerce et d'industrie (CCI), alors qu'il me paraît difficile de demander davantage d'efforts à des chambres consulaires qui sont déjà « à l'os ».

M. Laurent Somon. - Le sujet de l'Anah est à creuser, la rapidité de la réponse laissant en effet à désirer.

Pour ce qui est du FNADT, un manque de lisibilité et une hétérogénéité des fonds versés dans les territoires sont à déplorer. Dispose-t-on d'un observatoire permettant de suivre leur ventilation dans les territoires, ainsi que d'un mécanisme de contrôle pour tous les types de projets ?

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. - Monsieur Canévet, la diminution la plus importante concerne les CPER, de 148 millions d'euros à 44 millions d'euros en autorisations d'engagement, et plus aucun crédit de paiement. Si l'on peut entendre la nécessité de redresser les comptes publics et le report de certaines opérations, l'État doit honorer sa signature et verser les fonds prévus.

Par ailleurs, une baisse de crédits est bien à l'oeuvre sur les tiers-lieux, mais elle porte sur la création de nouveaux tiers-lieux et non pas sur l'animation de ces espaces. D'ailleurs, il serait sans doute utile de dresser un bilan des tiers-lieux.

Pour ce qui est du programme Territoires d'industrie, la hausse des crédits reflète la volonté de réindustrialiser le pays. Lesdits crédits visent à financer l'accompagnement humain et l'ingénierie, en précisant que l'enveloppe reste limitée puisqu'il est question de passer de 2 millions d'euros à 5 millions à l'échelle nationale. L'idée est de ne pas abandonner le soutien à des chefs de projets et à l'ingénierie sur mesure.

Monsieur Sautarel, un glissement dans l'exécution des CPER n'est pas forcément pénalisant pour les territoires, en rappelant que le programme 112 ne concerne que le volet territorial des CPER et non pas l'ensemble des crédits.

S'agissant de l'ANCT et de la coordination avec les autres dispositifs d'ingénierie - notamment ceux qui sont portés par les départements -, l'articulation doit se mettre en place à l'échelon local. Dans certains départements, l'ingénierie est uniquement technique ; dans d'autres, elle inclut un volet administratif : le travail doit se coordonner par le biais d'un dialogue entre le préfet, qui est le délégué territorial de l'ANCT, et les départements. Il faut bien évidemment éviter les doublons, dans le cadre, encore une fois, d'une décision locale.

J'ai bien entendu la remarque sur la majoration de la dotation de l'État pour les espaces France services implantées des communes relevant du zonage FRR. Je demande des crédits supplémentaires, car 7,5 millions d'euros avaient été inscrits l'année dernière, ce qui avait permis d'apporter 5 000 euros supplémentaires par France Services. Le dispositif avait démarré au 1er juillet et l'aide portait donc sur un semestre, ce qui justifie de solliciter des crédits supplémentaires pour couvrir une année pleine. Cette majoration se justifie pour des départements souvent très ruraux qui conjuguent une immense surface et une faible densité de population, ce qui les oblige à déployer quatre à cinq France Services afin que chaque bassin soit desservi, et donc à assumer davantage de restes à charge. Il s'agit donc de tenir compte de ces spécificités.

Le nombre de France Services n'évolue qu'à la marge et s'établit actuellement à un peu moins de 2 800 structures, avec un plafond estimé à 3 000 maisons d'ici 2026. Le rapport d'information que j'avais consacré à ces structures comprenait trois volets : un volet dédié à la valorisation du métier des conseillers France Services ; un volet financier ; et enfin un volet relatif à l'adéquation des services proposés aux besoins des territoires. Au départ, neuf opérateurs étaient présents ce qui ne permettait pas de couvrir l'ensemble des besoins des usagers. J'avais donc proposé l'entrée d'autres opérateurs : au 1er janvier 2024, l'Anah et la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) sont entrées dans le dispositif, ce qui permet de répondre aux demandes liées à MaPrimRénov' et aux chèques énergie ; à compter du 1er janvier 2025 ; une expérimentation sera lancée afin que l'Urssaf et l'Agirc-Arrco intègrent ces structures. L'absence de la caisse de retraite complémentaire était en effet dénuée de sens, puisque les usagers ont besoin de réponses à toutes leurs questions lorsqu'ils liquident leur retraite.

Madame Espagnac, je suis franchement opposé à la fusion de la DETR, de la DSIL et du fonds vert, qui présenterait bien des inconvénients car la DETR est fléchée sur les seuls territoires ruraux alors que la DSIL et le fonds vert sont ouverts à toutes les collectivités.

Monsieur Somon, le FNADT finance davantage du fonctionnement que de l'investissement, ce qui lui confère une souplesse intéressante. Il ne me semble pas qu'un observatoire dédié à ces fonds existe.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial. - Nous resterons très vigilants sur les points soulevés par Mme Sollogoub au sujet des demandeurs d'asile et des Ukrainiens.

Monsieur Canévet, le montant des subventions de l'État pour l'Anah diminue de 39,4 % en autorisations d'engagement et de 20,5 % en crédits de paiement, ce qui n'est pas négligeable. L'Agence a indiqué qu'elle pourrait faire face à cette diminution des crédits. Pour ce qui est de la rapidité des réponses, elle a recruté 55 équivalents temps plein (ETP) en 2023 pour l'améliorer. Du reste, les banques développent déjà des produits pour permettre aux clients de ne pas avancer les frais de rénovation. Ces dernières paient la partie éligible à la subvention des travaux et, ensuite, font la démarche auprès de l'Anah pour se faire rembourser.

Quant au niveau de la dépense fiscale, il est lié à l'existence d'une politique publique de la rénovation. Il importe de mettre le sujet en perspective avec la RLS, que la ministre entend approfondir afin d'inciter à la construction et à la rénovation. Il faudrait donc, dans cette perspective, contractualiser avec les bailleurs par le biais de conventions d'utilité sociale (CUS).

Concernant l'hébergement d'urgence, je partage votre constat : avec 330 000 personnes sans domicile en France, dont 40 % de femmes, nous ne sommes pas à la hauteur malgré nos efforts. Nous resterons très vigilants sur ce point.

Article 42

M. Claude Raynal, président. - L'amendement II-1 (FINC.1) vise à abonder le financement de la « bonification FRR » pour qu'elle permette la prise en charge prévue, pour un total en année pleine de 13 050 575 euros, d'où un besoin de financement de 5 500 575 euros. Ces crédits seraient ponctionnés sur le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission.

M. Pascal Savoldelli. - Je n'ai pas de difficulté sur le principe de cette dotation forfaitaire - tout en restant vigilant à ne pas opposer milieu rural et milieu urbain -, mais je voudrais savoir à quoi correspondent les crédits pris sur l'autre programme.

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. - Il s'agit de crédits qui seraient pris sur l'action nº 7 du programme 135, qui comprend 268 millions d'euros. Il reste chaque année un reliquat compris entre 13 millions et 18 millions d'euros, le prélèvement de 5,5 millions d'euros proposé ne remettant donc pas du tout en cause ce dispositif. Il n'est pas question d'opposer le rural et l'urbain, mais de distinguer l'équité et l'égalité, deux concepts bien différents.

L'amendement II-1 (FINC.1) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Cohésion des territoires », sous réserve de l'adoption de son amendement.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mme Catherine VAUTRIN, Ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation.

Mme Françoise GATEL, ministre déléguée chargée de la Ruralité, du Commerce et de l'Artisanat.

Cabinet de M. Guillaume KASBARIAN, Ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l'action publique

- M. Alexandre BONIS, chef de cabinet adjoint, chargé des relations avec le Parlement ;

- M. Gabriel BEHAGHEL, conseiller budget et efficience ;

- M. Wahid FERCHICHE, conseiller administration territoriale de l'État.

Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL)

- M. Alexandre SANZ, sous-directeur de la cohésion et de l'aménagement du territoire.

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

- M. Stanislas BOURRON, directeur général.

Contribution écrite

Sous-direction de l'administration territoriale de la Direction de la modernisation et de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES).

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2025.html


* 1 Il convient toutefois de souligner que le Gouvernement a, par le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits, procédé à l'annulation de 26 114 412 euros en AE comme en CP sur le programme 112 soit 6,7 % des AE et 7.67 % des CP de la ressource allouée au programme 112 réparties entre une diminution de 20,2 millions d'euros en AE et 17,5 millions d'euros en CP de la mise en réserve initiale, de 1,5 million d'euros en CP au titre de la section locale du FNADT, de 4,4 millions d'euros en AE et en CP au titre de la politique en faveur des tiers-lieux, de 1 million d'euros en AE et en CP au titre des volontaires territoriaux en administration (VTA), de 500 000 euros en AE et en CP au titre de la subvention pour charge de service public de Business France et 1,2 million d'euros en CP au titre de la prime d'aménagement du territoire.

* 2 Le programme 112 fera l'objet d'une mesure de transfert en 2025 : le financement de la plateforme «  mon stage de troisième », géré par l'Agence Nationale de la cohésion des territoires (ANCT), sera désormais porté par le programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale » de la mission « Enseignement scolaire », pour un total de 600 000 euros inscrits en AE comme en CP.

* 3 Sur ce point, cf. rapport d'information n° 337 (2023-2024), déposé le 14 février 2024, de M. Bernard DELCROS, déposé au nom de la commission des finances du Sénat, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes, transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, intitulée « l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), un outil à consolider - exécution 2020 2022 ».

* 4 La trajectoire votée en loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 ( loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023) prévoyait une augmentation des crédits de la mission « Cohésion des territoires », dont relève le programme 112, de 5,3 % entre 2024 et 2025, une stabilisation en 2026 puis une diminution de 4,5 % en 2027 en raison de l'extinction de certains programmes.

* 5 Loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

* 6 En application de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

* 7 GM&S était une entreprise spécialisée dans l'emboutissage et l'assemblage de pièces pour l'industrie automobile.

* 8 Loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires.

* 9 Cf. Rapport général n° 115 (2022-2023), tome III, annexe 6, volume 2, de M. Bernard Delcros, déposé le 17 novembre 2022 sur le projet de loi de finances pour 2023 : Cohésion des territoires - Aménagement des territoires.

* 10 Le conseil d'administration de l'Agence a adopté ce budget rectificatif lors de sa séance du 20 juin 2024 et a arrêté le budget de l'ANCT à 205,83 millions d'euros en AE et 197,30 millions d'euros.

* 11 Il s'agit en particulier de la participation de l'ANCT aux 22 programmes « Interreg 2021-2027 » qui sera sensiblement réduite en 2025.

* 12 À cette trésorerie non fléchée, s'ajoutaient, à fin 2023, 44 millions d'euros de dispositifs dits fléchés (crédits relance, crédits du pass numérique, fonds de soutien à l'activité commerciale) et 138 millions d'euros correspondant à des versements à venir au titre du Plan France très haut débit, géré pour compte de tiers depuis le 1er janvier 2023, hors budget de l'agence, soit un total de 200 millions d'euros.

* 13 Les conclusions de ce rapport d'information du 7 novembre 2024 peuvent être consultées en ligne.

* 14 Rapport d'information n° 337 (2023-2024) précité de M. Bernard Delcros, déposé le 14 février 2024, au nom de la commission des finances du Sénat, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes, transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, intitulée « l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), un outil à consolider - exécution 2020 2022 ».

* 15 Le Gouvernement a souhaité, à partir de 2014, conforter la présence de centres-bourgs plus dynamiques dans les zones rurales ou périurbaines, considérant que la perte d'attractivité de nombreuses petites communes et villes moyennes est un phénomène qui touche tout autant la qualité de vie et la cohésion sociale que le développement économique local. 23 % de la population française vit dans des villes moyennes, et 26 % de l'emploi total, en France, y est concentré. Dans ce contexte, le Commissariat général à l'égalité des territoires - CGET (intégré depuis à l'Agence nationale de la cohésion des territoires - ANCT) a piloté, en partenariat avec la Direction de l'habitat, l'urbanisme et des paysages (DHUP) et l'Agence nationale d'amélioration de l'habitat (ANAH), une expérimentation visant à donner aux collectivités territoriales des outils pour agir sur la revitalisation des centres-bourgs.

* 16 Au 30 juin 2024.

* 17 Afin d'inciter à l'embellissement de certains aménagements, l'association Paysage de France « distingue » chaque année depuis 2020 quatre endroits de France qu'elle considère comme « moches » : la médiatisation de cette démarche et le débat public qui en a résulté a grandement contribué à l'intégration du dispositif « entrées de ville » dans le deuxième volet d'ACV.

* 18 Les 11 nouvelles villes ACV ayant rejoint le programme au second semestre 2023 ou au premier semestre 2024 sont : Sin-le-Noble (Nord), Castelsarrasin (Tarn-et-Garonne), Hazebrouck (Nord), Saint-Gaudens (Haute-Garonne), Pontoise (Val-d'Oise), Châteaudun (Eure-et-Loir), Sélestat (Bas-Rhin), Saint-Louis de la Réunion, Brétigny-sur-Orge (Essonne), Frontignan (Hérault) et Annemasse (Haute-Savoie).

* 19 Le taux de vacance commerciale s'établit à 12,10 % dans les villes ACV en 2023 selon les données du Codata.

* 20 Ce taux de vacance structurelle des communes ACV s'établit à 4,6 % en 2022 selon les données Lovac.

* 21 D'après le baromètre du centre-ville et des commerces.

* 22 Au sens de la grille communale de densité de l'Institut national de la statistique et des études économiques.

* 23 C'est-à-dire de transporter le corps médical vers le patient.

* 24 À ces 100 postes financés sur le programme 112 s'ajoutent 20 postes financés par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

* 25 Il s'agit des Hautes-Alpes, du Cantal, de Loir-et-Cher, de la Haute-Marne et des Vosges.

* 26 I s'agit de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.

* 27 La Réunion et Mayotte.

* 28 Instruction interministérielle IOML2320999 relative à la mise en oeuvre du programme « Villages d'Avenir ».

* 29 À la suite de démissions, quatre postes demeurent vacants dans les départements des Landes, du Morbihan, de la Sarthe et de la Corse-du-Sud pour lesquels un processus de recrutement est en cours.

* 30 Une micro-folie est une plateforme culturelle qui intègre un musée numérique au coeur d'un équipement déjà existant.

* 31 Un fablab est un lieu ouvert à des personnes pour les aider à formaliser un projet au stade de prototype.

* 32 Il s'agit d'un garage participatif - ou garage associatif- qui permet de réparer soi-même, ou de faire réparer, son véhicule à moindre coût.

* 33 Il s'agit d'un atelier de fabrication numérique.

* 34 Le total est supérieur à 100 car certaines manufactures peuvent être en quartier prioritaire de la ville et dans un ville moyenne simultanément.

* 35 Une proposition de loi n° 124 (2024-2025) visant à instaurer une trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux a d'ailleurs été déposée au sénat par MM. Guislain Cambier et Jean-Baptiste Blanc, le 7 novembre 2024.

* 36 Situés sur le Bassin Minier des Hauts-de-France, à Rodez, à Decazeville, dans l'Yonne, la Nièvre, la Creuse, le Haut-Jura, à Châteauroux, Issoudun, etc.

* 37 Toutefois, l'essentiel des crédits provient du plan France 2030 ainsi que du fonds d'accélération des investissements industriels dans les territoires qui ne relèvent pas du présent programme.

* 38 Le dispositif « VTA expert » consiste à verser à une collectivité les crédits pour rémunérer un VTA sur un sujet spécialisé avec un plafond de crédits porté de 20 000 à 30 000 euros pour prendre en charge une partie de sa rémunération, le défraiement de ses frais de déplacements et certains équipements de son poste.

* 39 D'autres opérateurs pressentis comme l'Association générale des institutions de retraite des cadres-Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (AGIRC ARRCO) ou le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) n'ont, à ce jour, pas rejoint le dispositif.

* 40 Parmi les MFS portées par les collectivités, 47 % le sont par des communes, 48 % par des EPCI et 5 % par d'autres strates de collectivités.

* 41 Ces éléments issus des réponses au questionnaire budgétaire ont été confirmés par l'ANCT lors de l'audition de son directeur général.

* 42 La DGCL a fait savoir au rapporteur que 84,2 % des démarches administratives effectuées à l'aide des MFS sont résolues. Par ailleurs, 96,1 % des utilisateurs se déclarent satisfaits de l'accompagnement reçu en France services et 98 % recommandent France services à leurs proches.

* 43 Il existe 160 structures mobiles et à peu près autant de structures multi-sites. Dans les outre-mer, 10 % des MFS sont des structures de type mobile pour adapter au mieux le service à la réalité de territoires parfois très difficiles d'accès.

* 44 Le rapport de Bernard Delcros et Marie-Agnès Poussier-Winsback « France Services, une nouvelle étape vers un « service universel » remis en juin 2023 est consultable en ligne.

* 45 Les accompagnements en lien avec France Rénov' ont augmenté au cours de l'année 2024, passant de 5 787 accompagnements dès le mois de janvier 2024 à 9 546 accompagnements en septembre 2024.

* 46 C'est une progression de 4 points par rapport à la même donnée exprimée l'an dernier par le rapporteur spécial dans le tome III, annexe 6, volume 2 « Cohésion des territoires - Politique des territoires » déposé le 23 novembre 2023 du Rapport général n° 128 (2023-2024) sur le projet de loi de finances pour 2024.

* 47 Ce montant est financé différemment selon qu'il s'agit de structures postales (26 000 euros venant du fonds postal national de péréquation territoriale et 4 000 euros provenant du fonds national France Services) ou de structures non postales (15 000 euros provenant des crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire et 15 000 euros du fonds national France Services).

* 48 Rapport d'information n° 778 (2021-2022) sur le premier bilan du financement des maisons France services fait par M. Bernard Delcros au nom de la commission des finances, déposé le 13 juillet 2022.

* 49 Loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

* 50 Instaurées par l' article 73 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

* 51 Résultant du financement de 4 215 euros supplémentaires pour chacune des 1 305 MFS concernées soit 5 500 575 euros.

* 52 Cette inspection a été conduite par l'Inspection générale des finances (IGF), l'Inspection générale de l'administration (IGA), l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD).

* En année pleine fondée sur le coût des dispositifs antérieurs, superposant le coût des ZRR, ayant vocation à s'éteindre progressivement, celui des Zorcomir et celui des FRR, le rapporteur spécial évalue ce montant à 355 millions d'euros. À ce stade, et malgré les demandes du rapporteur spécial auprès de l'administration fiscale, ce montant n'a pas été confirmé.

* 53 Baromètre du numérique - édition 2022 - Rapport publié en janvier 2023, consultable en ligne.

* 54 Baromètre du numérique - édition 2023 - Rapport publié en janvier 2024, consultable en ligne.

* 55 Loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 56 Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

* 57 Le dispositif EDEC est présenté sur le site du ministère compétent en matière de travail.

* 58 Ces éléments sont issus des réponses apportées par la DGCL au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 59 Le 13 novembre 2024, via Chorus, pour des chiffres arrêtés au 6 novembre 2024.

* 60 Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

* 61 Loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer.

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