N° 34

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 octobre 2024

RAPPORT

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi,
rejeté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée,
relative aux
résultats de la gestion et portant approbation des comptes
de l'année 2023,

Par M. Jean-François HUSSON,
Rapporteur général,

Sénateur

TOME II
CONTRIBUTION DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 12
Économie

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS OU À DES ORGANISMES PRIVÉS

Rapporteur spécial et rapporteure spéciale :
M. Thierry COZIC et Mme Frédérique ESPAGNAC

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 3, 291 et T.A. 3

Sénat : 32 (2024-2025)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

MISSION « ÉCONOMIE »

1. L'exécution des crédits de la mission « Économie » pendant l'exercice 2023 fait apparaître un risque de divergence substantiel entre l'autorisation parlementaire et le montant effectif des crédits disponibles pour les responsables de programmes. En effet, l'exercice 2023 a été marqué par le report de 5 184 millions d'euros de crédits non consommés depuis l'année 2022 vers l'année 2023, soit 66 % des crédits ouverts en loi de finances sur les programmes de la mission. Les rapporteurs spéciaux relèvent par surcroît que ce report de crédits a été surdimensionné, en conséquence de quoi seul 28 % des crédits disponibles sur la mission ont été consommés pendant l'exercice 2023.

2. La mission « Économie » a été fortement sollicitée pour soutenir la compétitivité des entreprises dans le contexte d'inflation du prix de l'énergie depuis le début de la guerre en Ukraine en février 2022. Le maintien d'une partie de ces aides, qui est concomitant d'une hausse tendancielle de la compensation carbone versée aux entreprises électro-intensives, se traduit par une croissance substantielle de 220 % des dépenses d'intervention de la mission entre 2021 et 2023. Les rapporteurs spéciaux seront attentifs à la compatibilité entre cette tendance haussière et le financement des autres politiques publiques de la mission dans un contexte de dégradation des finances publiques.

3. L'exercice 2023 est également marqué par une extension du périmètre des programmes de la mission « Économie » du fait notamment de la budgétisation au sein du programme 305 « Stratégies économiques » de la compensation versée à La banque postale au titre de sa mission d'accessibilité bancaire (MAB) pour un montant de 303 millions d'euros.

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : « PRÊTS ET AVANCES
À DES PARTICULIERS OU À DES ORGANISMES PRIVÉS »

1. Le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » a de nouveau été exécuté en déficit à hauteur de 412 millions d'euros en 2023. Ce déficit correspond néanmoins à une amélioration du solde par rapport à la prévision en loi de finances initiale qui était de - 453 millions d'euros.

2. La dynamique de dégradation du solde cumulé du compte de concours financiers depuis 2020 devrait se poursuivre dans les années à venir, notamment sous l'effet de l'exécution du prêt accordé au gestionnaire d'infrastructure de la future ligne CDG Express, dont l'ouverture a été repoussée à 2027.

LA MISSION « ÉCONOMIE »

La mission « Économie » rassemble les crédits de politiques publiques visant à favoriser l'emploi, la croissance, la compétitivité des entreprises, le développement des exportations, la concurrence et la protection des consommateurs.

Elle est composée de cinq programmes :

le programme 134 « Développement des entreprises et régulation » regroupe les instruments de soutien aux entreprises, notamment sous forme de dépenses d'intervention au profit des petites et moyennes entreprises (PME), de l'industrie, du commerce, de l'artisanat et du tourisme. Il porte également les crédits des administrations en charge de ces politiques publiques, d'autorités administratives indépendantes (AAI) et d'opérateurs. Enfin, il porte le financement des compensations versées au groupe La Poste au titre de trois de ses missions de service public1(*) ;

le programme 343 « Plan France très haut débit » (PFTHD), créé en 2015, porte les financements de l'État en vue d'assurer la couverture intégrale du territoire par le réseau de fibre optique2(*) ;

le programme 220 « Statistiques et études économiques » porte principalement les crédits de l'Institut national des statistiques et des études économiques (Insee) ;

le programme 305 « Stratégies économiques » porte principalement les crédits de la direction générale du Trésor et de son réseau international, ainsi que les crédits de plusieurs opérateurs et la subvention versée à la Banque de France au titre des prestations qu'elle effectue pour le compte de l'État.

le programme 367 « Financement des opérations patrimoniales en 2023 sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », créé en 2021 en cours d'année, vise à doter le CAS « PFE »3(*), géré par l'Agence des participations de l'État, en recettes supplémentaires en fonction des besoins d'intervention identifiés. L'exécution des crédits de ce programme fait l'objet d'une analyse détaillée dans l'annexe spécifique consacrée au compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

La mission « Économie » se voit adjointe une part importante des dépenses fiscales du budget de l'État, pour un coût total estimé à 9,6 milliards d'euros pour le budget de l'État et 11,6 milliards d'euros pour l'ensemble des administrations publiques en 2023.

Évolution des crédits de la mission « Économie » en 2023

(en millions d'euros)

   

2022

2023

Exécution / prévision 2023

Exécution

2023 / 2022

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

variation absolue

variation relative

variation absolue

variation relative

134 - Développement des entreprises et régulations

AE

1 790,4

2 683,2

6 304,5

3 394,2

- 2 910,3

- 85,7 %

711

21%

CP

1 795,1

2 533,4

6 310

3 469,4

- 2 840,6

- 81,9 %

936

27%

343 - Plan France Très haut débit

AE

21,8

106,2

74,1

72,6

- 1,5

- 2,1 %

- 33,6

- 46 %

CP

621,8

417,5

437,7

426,7

- 11

- 2,6 %

9,2

2 %

220 - Statistiques et études économiques

AE

432,5

444,8

458,9

456,6

- 2,3

- 0,5 %

11,8

3 %

CP

435,3

445,8

454,8

454,9

0,1

0,0 %

9,1

2 %

305 - Stratégies économiques

AE

416,7

420,2

714,5

709,2

- 5,3

- 0,7 %

289

41 %

CP

417,3

409,7

715,9

704,8

-  1,1

- 1,6 %

295,1

42 %

367 - Financement des opérations patrimoniales en 2023 sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État »

AE

CP

748,0

748,0

11 457,1

11 457,1

0

0

0

0

0

0,0 %

- 11 457,1

0 %

0

0,0 %

- 11 457,1

0 %

Total mission

AE

3 409,4

15 111,5

7 552

4 632,6

- 2 919,4

- 63, %

- 10 478,9

- 226 %

CP

4 017,6

15 263,6

7 918,4

5 055,8

- 2 862,6

- 56,6 %

- 10 207,7

- 202 %

AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. Prévision : prévision en loi de finances initiale, hors fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP).

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

I. L'EXÉCUTION EN 2023 DES CRÉDITS DE LA MISSION « ÉCONOMIE » TÉMOIGNE D'UNE DIVERGENCE EXCESSIVE ENTRE L'AUTORISATION PARLEMENTAIRE ET LES DÉPENSES RÉALISÉES

A. LE REPORT MASSIF DE CRÉDITS NON CONSOMMÉS DEPUIS L'ANNÉE 2022 VERS L'ANNÉE 2023 AFFAIBLIT LE LIEN ENTRE L'AUTORISATION PARLEMENTAIRE ET LES CRÉDITS DISPONIBLES

La loi de finances initiale pour 2023 a ouvert 7 918 millions d'euros en crédits de paiement (CP) sur les programmes de la mission « Économie », soit un montant en hausse de 97 % par rapport aux crédits adoptés pour la mission en loi de finances initiale pour 2022. Cette augmentation s'expliquait en grande partie par le renforcement du guichet d'aides pour le paiement des factures d'électricité et de gaz des entreprises.

Par ailleurs, les crédits ouverts en loi de finances initiale ont été complétés par des reports de crédits non consommés en 2022 vers l'exercice 2023 pour un montant total de 5 184 millions d'euros à l'échelle de la mission, soit 66 % des crédits votés pour l'exercice 2023.

Alors que l'un des objectifs de la réforme récente du cadre organique des lois de finances était de limiter le recours aux mécanismes de report de crédits non consommés, ce report significatif, autorisé par dérogation au nouveau plafond de 3 % de crédits reportés par programme, affaiblit la lisibilité de la trajectoire budgétaire du programme et l'effectivité du principe d'annualité budgétaire.

En effet, le report substantiel de crédits non consommés sur les programmes de la mission « Économie » a pour effet que les crédits reportés représentent 40 % des crédits disponibles en 2023, ce qui limite le lien entre le vote annuel du Parlement sur les crédits de la mission et le financement annuel des politiques publiques de la mission « Économie ».

Crédits disponibles en 2023 pour la mission « Économie »

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Cet écart entre le montant des crédits disponibles et le montant des crédits votés en loi de finances initiale pour 2023 soulève d'autant plus de questions que les crédits reportés depuis 2022 vers 2023 proviennent d'une loi de finances rectificative adoptée en cours de gestion pendant l'exercice 2022 par laquelle le Gouvernement avait sollicité le Parlement pour ouvrir 15 088 millions d'euros sur la mission « Économie ». Avec le recul, les crédits ouverts en cours de gestion puis reportés font apparaître un risque de « budgétisation parallèle »4(*) dénoncé par la Cour des comptes, qui nuit à la lisibilité du débat parlementaire et auquel les rapporteurs spéciaux seront particulièrement attentifs dans le cadre de l'examen des projets de la loi de finances à venir.

B. LA SURBUDGÉTISATION DES DISPOSITIFS D'AIDE AUX ENTREPRISES S'EST TRADUITE PAR UNE SOUS-EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION POUR LA DEUXIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE

Le report massif de crédits non consommés dans le périmètre de la mission « Économie » est d'autant plus regrettable qu'il se cumule avec une importante surbudgétisation des crédits de la mission, en particulier pour financer deux dispositifs d'aide aux entreprises : la compensation carbone et le guichet « gaz et électricité ». Alors même que l'administration disposait d'informations supplémentaires par rapport à la programmation pour 2022, et en particulier d'un retour d'expérience sur le coût de ces aides en 2022, le volume des crédits reportés excédait largement les besoins en crédits de paiement comme en témoigne l'annulation par décret de 4 000 millions d'euros de crédits sur le périmètre de la mission en cours de gestion.

Crédits exécutés en 2023 pour la mission « Économie »

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Les rapporteurs spéciaux relèvent par conséquent que les crédits votés en loi de finances initiale pour 2023 auraient suffi à couvrir les crédits exécutés pendant cet exercice. Le choix fait par le Gouvernement de procéder à un report massif de crédits non consommés, puis de ne pas annuler l'excédent de crédits en fin de gestion qui a été reporté sur l'exercice 2024 à hauteur de 3 107 millions d'euros, témoigne d'un risque de décalage entre le vote des crédits de la mission en loi de finances et le montant effectif des crédits disponibles pour financer les politiques publiques associées à la mission.

Il en résulte une nouvelle sous-exécution de la mission « Économie » dont les crédits ont été exécutés à hauteur de 5 056 millions d'euros en 2023, en crédits de paiement soit 58 % de la prévision. Cette sous-exécution intervient malgré le schéma similaire observé en 2022 (avec une exécution à hauteur de seulement 67 % des crédits de la mission), sans que le Gouvernement n'ait suffisamment tenu compte de ce précédent pour réduire la surbudgétisation des dispositifs d'aide aux entreprises.

II. L'EXERCICE 2023 A ÉTÉ MARQUÉ PAR L'EXTENSION DU PÉRIMÈTRE DE LA MISSION ET LA POURSUITE DE LA HAUSSE TENDANCIELLE DES DÉPENSES D'INTERVENTION QUI FRAGILISE LA TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE DE LA MISSION

A. LA HAUSSE TENDANCIELLE DES DÉPENSES D'INTERVENTION DE LA MISSION FRAGILISE LA TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE ADOPTÉE EN LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES (LPFP)

Les crédits de la mission « Économie », qui abondent plusieurs dispositifs d'aide aux entreprises pour garantir leur compétitivité et protéger les consommateurs, financent un montant croissant de dépenses d'intervention, c'est-à-dire de transferts directs aux acteurs économiques qui constituent des dépenses non pilotables pour les responsables de programme.

Le montant des dépenses d'intervention de la mission est ainsi passé de 1 117 millions d'euros en 2021 à 3 569 millions d'euros en 2023. Les dépenses d'intervention ont représenté 71 % des crédits de la mission en exécution, ce qui limite la marge de manoeuvre des gestionnaires de la mission pour piloter les dépenses qu'elle finance.

Dépenses d'intervention de la mission « Économie »

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Les différents programmes de la mission « Économie » financent plusieurs types de guichet d'aide aux entreprises dont les principaux sont abondés par les crédits du programme 134 « Développement des entreprises et régulation ». Ce programme finance notamment les trois principales dépenses d'intervention de la mission :

- le dispositif de compensation carbone qui rembourse aux entreprises électro-intensives une partie du coût du système européen d'échange de quotas d'émission (SEQE) incorporé dans le prix de l'électricité pour un montant de 793 millions d'euros en 2023 ;

- le guichet « gaz et électricité » ouvert en 2022 dans le cadre du plan de résilience économique et sociale qui vise, dans le contexte du déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022, à compenser les surcoûts de dépenses de gaz ou d'électricité des entreprises très consommatrices d'énergie pour un montant de 1 108 millions d'euros en 2023 ;

- la compensation versée au groupe La Poste pour ses trois missions de service public hors accessibilité bancaire5(*), pour un montant de 665 millions d'euros en 2023.

Les rapporteurs spéciaux relèvent que la dynamique de hausse des dépenses d'intervention de la mission est appelée à se poursuivre dans les années à venir au regard notamment de la hausse à venir du prix des quotas carbone sur le marché européen et de la prolongation décidée par décret en mars 2024 du guichet « gaz et électricité ». Par conséquent, les rapporteurs spéciaux seront particulièrement attentifs à ce que la place croissante occupée par les dépenses d'intervention de la mission soit compatible, d'une part, avec la trajectoire pluriannuelle de la mission adoptée en loi de programmation des finances publiques6(*) (LPFP) 2023-2027 qui prévoit un léger recul des crédits de la mission entre 2024 et 2026 et, d'autre part, avec le maintien d'un niveau de crédits suffisant pour assurer l'ensemble des politiques publiques financées par la mission, notamment en matière de répression des fraudes et de soutien à l'exportation.

B. LES CRÉDITS DE LA MISSION « ÉCONOMIE » SONT ÉGALEMENT AFFECTÉS PAR L'INTÉGRATION À CETTE MISSION DE LA SUBVENTION À L'OPÉRATEUR ATOUT-FRANCE EN 2023

L'évolution du montant des crédits de la mission « Économie » en 2023 est également en partie induite par les modifications intervenues sur le périmètre de la mission qui expliquent une augmentation de 339 millions d'euros des crédits de la mission.

Le périmètre de la mission « Économie » s'est élargi sous l'effet de trois extensions en 2023. En premier lieu, le rattachement de la politique publique du tourisme dans le champ de responsabilité du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique (MEFSIN) s'est traduit par un transfert budgétaire de 36 millions d'euros au bénéfice du programme 134 « Développement des entreprises et régulation » auquel se rattache désormais l'opérateur Atout-France et sa subvention pour charges de service public de 28 millions d'euros en 2023.

En deuxième lieu, le périmètre du programme 305 « Stratégies économiques » a été étendu à hauteur de 5 millions d'euros pour tenir compte de la reprise par Bpifrance Assurance Export de la gestion des dispositifs de soutien aux exportations assurée auparavant par Natixis.

Enfin en troisième lieu, le programme 305 « Stratégies économiques » a vu son périmètre élargi de 303 millions d'euros dans le cadre de la budgétisation de la compensation annuelle versée à La banque postale au titre de sa mission d'accessibilité bancaire (MAB) qui était auparavant financée de manière extrabudgétaire par un versement depuis le Fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations.

Évolution du périmètre de la mission « Économie » en 2023

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Parallèlement, la mise en place d'une police unique en charge de la sécurité sanitaire des aliments s'est traduite par un transfert sortant depuis la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) vers le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA) pour un montant de 6 millions d'euros.

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS
« PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS
OU À DES ORGANISMES PRIVÉS »

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS EN 2023

L'article 24 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) dispose que « les comptes de concours financiers retracent les prêts et avances consentis par l'État. Un compte distinct doit être ouvert pour chaque débiteur ou catégorie de débiteurs ». Les dépenses du compte de concours financiers sont les prêts et avances consentis, tandis que ses recettes consistent dans les remboursements de ces derniers. En principe, le solde pluriannuel est donc neutre (à l'exception des intérêts qui sont reversés au budget général), mais des décalages se produisent dans le temps entre les dépenses et les recettes, tandis que certains prêts ou avances ne sont, dans certains cas, pas remboursés7(*).

Au titre de l'année 2023, le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » est composé des six programmes suivants :

- le programme 861 « Prêts et avances pour le logement des agents de l'État », qui a pour objet de faciliter la prise de poste à l'étranger de certains agents de l'État ;

- le programme 862 « Prêts pour le développement économique et social » qui vise à octroyer des prêts aux entreprises (via le fonds de développement économique et social, FDES) afin de faciliter leur restructuration financière et commerciale. Les recettes associées au remboursement des prêts accordés à la filière automobile entre 2010 et 2015 sur le programme 863 « Prêts à la filière automobile », supprimé en 2018, sont rattachées au programme 862 ;

- le programme 878 « Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie », créé en 2021, qui a pour objet le financement du prêt de l'État à la société qui reprend l'activité d'extraction de minerai et de production de nickel et de cobalt de la société Vale Nouvelle-Calédonie ;

- le programme 876 « Prêts octroyés dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir », créé en loi de finances initiale pour 2020 ;

- le programme 869 « Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle » pour faciliter le financement de la construction de la ligne ;

- le programme 877 « Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid-19 », créée par la loi de finances rectificative n° 2020-1719 du 25 avril 2020.

Pendant l'exercice 2023, les dépenses du compte de concours financiers sont concentrées dans deux programmes qui représentent 89 % de l'intégralité des dépenses du compte : le programme 869 « Prêt à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle » pour un montant de 352 millions d'euros et le programme 862 « Prêts pour le développement économique et social » pour un montant de 92 millions d'euros.

Répartition des dépenses exécutées sur le compte de concours financiers en 2023

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Le solde d'exécution du compte est de - 412 millions d'euros en 2023 soit un déficit moindre que celui prévu par la loi de finances initiale pour 2023 qui était de 453 millions d'euros. L'amélioration du solde du compte en cours d'exercice s'explique par deux facteurs principaux : la sous-exécution des crédits du programme 869 « Prêt à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle » à hauteur de 36 millions d'euros qui s'explique par le fait que l'échéancier des dépenses est dépendant de l'avancée des travaux de construction de l'infrastructure concernée, et la sur-exécution des recettes du programme 862 « Prêts pour le développement économique et social » à hauteur de 21 millions d'euros.

Depuis sa création en 2006, ce compte de concours financiers a un solde cumulé négatif qui a connu une importante dégradation depuis 2020 après une période de stabilisation. La dégradation observée du solde cumulée du compte s'explique par plusieurs éléments de conjonctures intervenus à partir de 2020 : la mobilisation du compte pour soutenir les entreprises frappées par la crise sanitaire ou le déclenchement de la guerre en Ukraine, la mobilisation du compte pour soutenir la filière nickel en Nouvelle-Calédonie et enfin la mobilisation du compte au soutien du développement de l'infrastructure du futur « CDG Express ».

Solde cumulé du compte de concours financiers

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

En intégrant le déficit en exécution de 412 millions d'euros en 2023, le solde cumulé du compte de concours financiers est de - 4 404 millions d'euros à la fin de l'année 2023.

II. LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

A. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS DANS LES PROGRAMMES ACTIFS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS SE SONT CONCENTRÉS DANS LES PROGRAMMES DÉDIÉS AU SOUTIEN À LA LIGNE « CDG EXPRESS » D'UNE PART ET AU FONDS DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

En premier lieu, le programme 869 « Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle » a pour objet d'apporter un soutien direct de l'État pour couvrir le besoin de financement de la société « Gestionnaire d'infrastructure CDG Express » (GI CDG Express), détenue à parts égales par SNCF Réseau, le groupe Aéroports de Paris et la Caisse des dépôts et consignations, pour la réalisation de l'infrastructure correspondant à une liaison ferroviaire express reliant directement l'aéroport de Roissy et le centre-ville de Paris.

Alors que la mise en service était initialement prévue en 2023, elle a été plusieurs fois repoussée et elle est désormais fixée à 2027. Les crédits exécutés à hauteur de 352 millions d'euros en 2023 sur le programme correspondent à l'octroi de prêts pour financer des dépenses de travaux de la ligne.

Les rapporteurs seront attentifs à l'évolution de ce programme, qui était initialement présentée comme une infrastructure exploitable dès les Jeux olympiques de Paris en 2024 et dont l'horizon d'amortissement est situé en 2060.

Répartition de la couverture du besoin de financement
pour la réalisation des travaux d'infrastructure du CDG Express

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

En second lieu, le programme 862 « Prêts pour le développement économique et social » permet de financer les prêts accordés par le Fonds de développement économique et social (FDES) au bénéfice des entreprises en difficulté sur instruction du comité interministériel de restructuration industriel (CIRI) ou des comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises (CODEFI).

Pour maintenir la capacité d'intervention du FDES, il a été procédé à un report de crédit à hauteur de 483 millions d'euros, soit 644 % du montant ouvert en loi de finances initiale. Au regard du montant des crédits votés, le programme a donc été sur-exécuté à hauteur de 122 %.

Enfin en troisième lieu, les autres programmes actifs du compte de concours financiers ont connu un volume d'exécution des crédits moins significatif avec :

- 31 millions d'euros de crédits de paiement consommés sur le programme 876 « Prêts octroyés dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir » qui correspondent à l'échéancier pluriannuel du prêt consenti à l'entreprise SOITEC pour financer ses investissements dans le cadre du plan Nano 2022 ;

- 22 millions d'euros de crédits de paiement consommés sur le programme 877 « Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid-19 ou par le conflit en Ukraine » pour l'octroi de trois prêts en 2023 dont deux dans le cadre du dispositif de soutien aux entreprises touchées par la guerre en Ukraine ;

- 0,5 million d'euros de crédits de paiement consommés sur le programme 861 « Prêts et avance pour le logement des agents de l'État » pour financer deux prêts au bénéfice de deux agents affectés à l'étranger pour leur prise en location à proximité de leur affectation.

B. EN TENANT COMPTE DE LA SUPPRESSION DU PROGRAMME 868, DEUX DES PROGRAMMES DU COMPTE SONT RESTÉS INACTIFS EN 2023

Les rapporteurs spéciaux relèvent qu'aucun mouvement n'a été effectué en 2023 sur le programme 878 « Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie » qui sert de support au prêt accordé à la société Prony Ressources qui a repris l'activité d'extraction de minerai et de production de nickel et de cobalt de la société Vale Nouvelle-Calédonie. De même, pour la deuxième année consécutive, aucun mouvement n'a été effectué en 2023 sur le programme 864 « Prêts aux petites et moyennes entreprises ».

Enfin, pour mémoire, à compter de l'exercice 2023, le compte de concours financiers ne comporte plus le programme 868 « Prêts et avances pour le développement du commerce avec l'Iran » qui a été supprimé par la loi de finances initiale pour 2023, conformément à la position des rapporteurs spéciaux.


* 1 Service postal universel, transport de presse et aménagement du territoire.

* 2 Le PFTHD est financé par le programme 343 mais est également abondé par d'autres biais, voir infra.

* 3 Compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

* 4 Cour des comptes, avril 2024, Analyse de l'exécution budgétaire 2023. Mission « Économie ».

* 5 Service universel postal, transport de presse, aménagement du territoire.

* 6 Loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

* 7 Les créances qui ne sont pas honorées sont admises en non-valeur et ont un effet sur le déficit public.

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