II. UN OUTIL CONTESTÉ MAIS POURTANT NÉCESSAIRE POUR CONTRIBUER À L'ATTRACTIVITÉ DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER
A. LES DÉPENSES FISCALES : DES OUTILS CONTESTÉS DE LONGUE DATE MALGRÉ LES TENTATIVES DE RATIONALISATION INTERVENUES CES DERNIÈRES ANNÉES
En sus des crédits budgétaires, les dépenses fiscales contribuent à la dynamisation de l'économie, à l'attractivité des territoires et à l'effort général de rattrapage de l'écart de niveau socio-économique entre l'outre-mer et la métropole.
Sur les deux programmes de la mission, elles devraient s'établir, en 2024, à 5 559 millions d'euros soit quasiment 2 fois plus que les crédits budgétaires portés par la mission « outre-mer ».
En raison des montants en jeu, les dépenses fiscales sont cependant des outils contestés pour plusieurs raisons mises en exergue de manière récurrente, en particulier par la Cour des comptes dans ses rapports sur l'exécution budgétaire, dans son rapport sur le logement outre-mer32(*), et dans son rapport sur les financements de l'État en outre-mer.
Elle estime, en effet, que l'efficacité de ces dépenses n'est pas avérée et que leur surcoût est important par rapport à d'autres dispositifs en raison notamment :
- des difficultés de chiffrage et, de fait, du coût réel qu'elles représentent pour l'État ;
- des difficultés de pilotage ;
- de l'absence d'évaluation de l'efficacité et de l'efficience des dépenses fiscales et, à tout le moins, des plus significatives ;
- de l'absence de règles précises et formalisées relatives à la définition et à la modification du périmètre des dépenses fiscales.
Dans ce contexte, le Gouvernement et le Législateur ont tenté de rationaliser les dépenses fiscales et notamment celles applicables à l'outre-mer. Ainsi, récemment, les réformes de 2019 ont notamment concerné :
- la suppression du dispositif de la TVA non perçue récupérable33(*) (ce qui représente une économie d'environ 100 millions d'euros) rattachée au programme 138 ;
- la réfaction de la réduction d'impôt sur le revenu spécifique pour les contribuables résidant dans les DOM34(*) (ce qui représente une économie d'environ 7035(*) millions d'euros) rattachée au programme 123 ;
- la diminution du régime classique de défiscalisation prévu aux articles 199 undecies B et C du CGI au profit d'un crédit d'impôt en faveur de l'investissement dans les DROM (article 244 quater W du CGI) ce qui a diminué la dépense fiscale de 700 millions d'euros à 377 millions d'euros et a augmenté parallèlement le crédit d'impôt qui atteint un niveau de 150 millions d'euros en 2021.
De surcroit, la loi de finances pour 202036(*) a supprimé deux dispositifs non chiffrables :
- dépense fiscale n° 170308 : exclusion temporaire du revenu imposable des bénéfices provenant de l'exploitation de terrains auparavant non cultivés affectés à des cultures agréées pour la détermination du revenu imposable afférent aux exploitations agricoles situées dans les DOM ;
- dépense fiscale n° 710106 : exonérations de TVA relatives à la mise en valeur agricole de terres dans les DOM.
La LFI 2022 a acté la suppression de l'exonération des bénéfices réinvestis dans l'entreprise pour les sociétés de recherche et d'exploitation minière dans les départements d'outre-mer, cette dépense fiscale apparaissant comme obsolète et sans objet depuis l'extinction de son fait générateur en 2001.
Enfin, la LFI 2023 a supprimé l'exonération d'impôt sur les sociétés pour les entreprises nouvellement créées en outre-mer dans la mesure où cette dépense fiscale était devenue sans objet depuis l'extinction de son fait générateur depuis le 31 décembre 2006.
* 32 Cour des comptes, Le logement dans les départements et les régions d'outre-mer, rapport public thématique, septembre 2020.
* 33 Article 17 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.
* 34 Article 15 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.
* 35 Chiffrage direction du budget. Celui de la DGOM s'établit à 55 millions d'euros.
* 36 Article 29 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.