Rapport n° 464 (2021-2022) de Mme Vivette LOPEZ , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 9 février 2022

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N° 464

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 février 2022

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de la convention relative à la nationalité entre la République française et le Royaume d' Espagne ,

Par Mme Vivette LOPEZ,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon , président ; MM. Pascal Allizard, Olivier Cadic, Olivier Cigolotti, André Gattolin, Guillaume Gontard, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Philippe Paul, Cédric Perrin, Gilbert Roger, Jean-Marc Todeschini , vice-présidents ; Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, Isabelle Raimond-Pavero, M. Hugues Saury , secrétaires ; MM. François Bonneau, Gilbert Bouchet, Mme Marie-Arlette Carlotti, MM. Alain Cazabonne, Pierre Charon, Édouard Courtial, Yves Détraigne, Mmes Catherine Dumas, Nicole Duranton, MM. Philippe Folliot, Bernard Fournier, Mme Sylvie Goy-Chavent, M. Jean-Pierre Grand, Mme Michelle Gréaume, MM. André Guiol, Abdallah Hassani, Alain Houpert, Mme Gisèle Jourda, MM. Alain Joyandet, Jean-Louis Lagourgue, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Panunzi, François Patriat, Gérard Poadja, Stéphane Ravier, Bruno Sido, Rachid Temal, Mickaël Vallet, André Vallini, Yannick Vaugrenard .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

4789 , 4919 et T.A. 776

Sénat :

418 et 465 (2021-2022)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

À la suite de l'Assemblée nationale, qui l'a adopté sans modification le 27 janvier 2022 après engagement de la procédure accélérée, le Sénat est saisi du projet de loi n° 418 (2021-2022) autorisant la ratification de la convention relative à la nationalité entre la République française et le Royaume d'Espagne.

Signé au sommet franco-espagnol de Montauban du 15 mars 2021, ce texte, qui est une priorité politique pour le Gouvernement, s'inscrit dans un contexte de relance et de densification de notre relation bilatérale.

Il va permettre désormais aux ressortissants des deux pays de cumuler leurs nationalités , mettant fin à une asymétrie juridique puisque si la France reconnaissait déjà la double nationalité espagnole, ce n'était pas le cas pour l'Espagne. Les Espagnols pourront ainsi acquérir la nationalité française sans perdre leur nationalité d'origine et les Français, pour pouvoir acquérir la nationalité espagnole, n'auront plus à déclarer qu'ils renoncent à la nationalité française.

Par ailleurs, cette convention permettra aux ressortissants ayant perdu leur nationalité en adoptant celle du pays d'accueil de la retrouver, cette mesure pouvant s'étendre, par le biais d'une loi espagnole, aux descendants d'Espagnols.

Au-delà des facilités pratiques qu'elle procure, cette convention, cette convention vient donc reconnaître l'histoire partagée entre nos deux pays et la contribution significative de l'immigration espagnole à la société française.

L'Espagne a d'ores et déjà procédé à la ratification de cette convention qui revêt une forte portée symbolique et fait l'objet d'une forte attente des deux côtés des Pyrénées.

Lors de sa réunion du 9 février 2022, la commission des affaires étrangère, de la défense et des forces armées du Sénat a adopté à l'unanimité ce projet de loi de ratification .

I. UNE CONVENTION DESTINÉE À CONFORTER LES LIENS HUMAINS ENTRE LA FRANCE ET L'ESPAGNE, DANS UN CONTEXTE DE DENSIFICATION DE LEUR RELATION BILATÉRALE

A. UNE CONVENTION QUI S'INSCRIT DANS UN CONTEXTE DE DENSIFICATION DE NOTRE RELATION BILATÉRALE AVEC L'ESPAGNE

La relation franco-espagnole est naturellement dense , compte tenu de notre frontière commune et des multiples liens humains entre nos deux pays. Ainsi, en 2021, la France est le deuxième pays d'accueil des Espagnols vivant à l'étranger alors que l'Espagne est le septième pays d'accueil pour les Français résidant hors de France. Le réseau de nos lycées français en Espagne est le premier d'Europe et l'un des premiers de la France à l'échelle mondiale.

Avec 74 milliards d'euros d'échanges chaque année, nos relations sont aussi importantes au plan économique. Il faut mentionner par ailleurs nos convergences sur nombre de dossiers européens et nos importantes coopérations capacitaires dans le domaine de la défense. De fait, la France et l'Espagne représentent l'un pour l'autre des partenaires importants et sur la même ligne, avec relativement peu d'irritants ou de divergences, si ce n'est, parfois, sur la politique migratoire.

Le sommet de Montauban du 15 mars 2021 au cours duquel la présente convention a été signée a également été l'occasion de tracer de nouveaux axes pour l'avenir de notre relation . Le premier axe est le lancement d'une « stratégie transfrontalière globale », un enjeu important car la frontière franco-espagnole est la plus longue frontière terrestre de l'Hexagone. Le deuxième axe est un projet d'un traité de coopération bilatéral, sur le modèle du traité du Quirinal récemment signé avec l'Italie, qui serait un traité-cadre fixant les objectifs et les moyens de notre relation bilatérale. Le travail d'écriture a déjà commencé et les diplomates espèrent avancer rapidement.

B. UNE CONVENTION QUI VISE À CORRIGER UNE ASYMÉTRIE ENTRE LA FRANCE ET L'ESPAGNE CONCERNANT LA DOUBLE NATIONALITÉ

La présente convention sur la nationalité vise à corriger une forme d'asymétrie liée au fait que la France reconnaît la double nationalité franco-espagnole alors que l'Espagne ne l'autorise pas en principe, en vertu de sa constitution, sauf exceptions consenties par traité au profit des pays entretenant des liens privilégiés avec l'Espagne.

Même si ça n'a pas toujours été le cas dans le passé, la France admet aujourd'hui la pluri-nationalité, de sorte que les Français qui acquièrent une nationalité étrangère ne perdent pas la nationalité française et les étrangers qui acquièrent la nationalité française ne sont pas tenus de renoncer à leur nationalité d'origine.

En Espagne en revanche, en application de l'article 24 du titre I du code civil, la renonciation à la nationalité d'origine est une condition d'accès à la nationalité espagnole (des exceptions étant cependant prévues pour les cas de mariage et d'adoption).

De la même manière, les citoyens espagnols résidant à l'étranger qui acquièrent la nationalité de leur pays d'accueil perdent la nationalité espagnole dans un délai de trois ans, sauf s'ils manifestent, avant cette échéance, leur volonté de la garder auprès de leur consulat.

Cependant en vertu de l'article 11.3 de la Constitution de 1978, l'Espagne reconnaît la double nationalité pour les pays ibéro-américains ou pour ceux avec qui elle maintient des liens particuliers et peut signer des traités bilatéraux dédiés avec ces pays.

C'est ainsi que l'Espagne accepte la double nationalité avec les pays d'Amérique latine, mais aussi le Portugal, la Guinée équatoriale ou encore les Philippines. En revanche, les Espagnols qui accèdent à la nationalité française doivent renoncer à leur nationalité d'origine. De même que des Français qui voudraient obtenir la nationalité espagnole devraient renoncer à la nationalité française (ce qu'ils ne souhaitent pas, en général, de sorte qu'il y a peu de démarches faites en ce sens).

Cette convention, demandée au départ surtout par l'Espagne, permettra aux ressortissants des deux pays d'acquérir la nationalité de l'autre Etat - sous réserve bien entendu de satisfaire les conditions posées par sa législation - sans renoncer à la leur (article 2). Sont potentiellement concernés de l'ordre de 250 000 Espagnols vivant en France et quelque 150 000 Français résidant en Espagne.

Les voies d'accès à la nationalité selon la loi espagnole en vigueur

- origine directe familiale d'au moins un des deux parents

- par option : si le père ou la mère a été espagnol ou est né en Espagne.

- par résidence en Espagne :

. après 10 ans pour le régime général (celui applicable aux français),

. 5 ans pour les réfugiés,

. 2 ans pour les nationaux ibéro-américains, d'Andorre, des Philippes, de la Guinée Equatoriales, du Portugal ou les personnes d'origine juive séfarades ;

. 1 an pour les personnes nées en dehors de l'Espagne de père ou mère (également né hors d'Espagne), de grand-père ou grand-mère, lorsque ceux-ci ont été originellement espagnols.

C. UNE LARGE PORTÉE

La convention a une portée particulièrement large.

Ainsi, elle aura un effet rétroactif , puisqu'elle permettra (article 3) aux ressortissants des deux pays ayant perdu automatiquement leur nationalité antérieure, de la retrouver. En pratique, cela concernerait surtout des citoyens français d'origine espagnole, présents en France souvent depuis plusieurs décennies et dont le nombre est estimé à au moins 172 000.

Par ailleurs, la convention va étendre la portée de la loi espagnole de mémoire démocratique de 2007 . Celle-ci ouvre la nationalité espagnole aux descendants d'Espagnols ayant perdu leur nationalité en acquérant celle de leur pays d'accueil ou en se mariant avec un ressortissant étranger (pour les femmes), avant l'entrée en vigueur de la Constitution espagnole de 1978.

Plus spécifiquement, elle permet, sous condition d'un an de résidence en Espagne, aux personnes « nées en dehors de l'Espagne de père ou mère (également né hors d'Espagne), de grand-père ou grand-mère, lorsque ceux-ci ont été originellement espagnols », d'acquérir la nationalité espagnole. Sont essentiellement visés les descendants d'émigrés espagnols ayant perdu leur nationalité en s'exilant pendant la guerre civile ou la dictature.

L'entrée en vigueur de la convention sur la double nationalité vient donc permettre aux Français descendants d'Espagnols de se prévaloir de cette disposition pour acquérir la nationalité espagnole sans avoir à renoncer à la nationalité française. Ils seront sans doute d'autant plus incités à le faire que la condition de résidence d'un an devrait être prochainement levée par une loi modifiant la loi de mémoire historique de 2007, actuellement en discussion au Parlement.

II. UNE CONVENTION QUI REVÊT UNE IMPORTANCE PARTICULIÈRE DE PAR SON CARACTÈRE INÉDIT ET L'ATTENTE QU'ELLE SUSCITE

A. LES DISPOSITIONS DE LA CONVENTION

La convention comporte un court préambule qui présente les objectifs de la convention :

- rendre hommage aux relations historiques entre les deux pays ainsi qu'à l'existence d'un patrimoine commun entre la République française et le Royaume d'Espagne ;

- renforcer les liens qui unissent les deux nations ;

- garantir à leurs ressortissants de plus grandes facilités pratiques ;

- éviter le risque d'apatridie.

L'article 1 er permet aux ressortissants des deux pays d'acquérir la nationalité de l'autre État, sous réserve de satisfaire aux conditions posées par sa législation, tout en conservant leur nationalité d'origine.

Aux termes de l'article 2, les bénéficiaires de la convention peuvent obtenir et renouveler leurs passeports ou documents d'identité conformément aux dispositions de la réglementation de chacun des États.

L'article 3 stipule que peuvent prétendre au bénéfice de la convention les Français et les Espagnols ayant, avant son entrée en vigueur, perdu automatiquement leur nationalité antérieure en acquérant la nationalité de l'autre Etat.

L'article 4 prévoit une consultation périodique entre les deux gouvernements, en vue d'assurer l'application harmonieuse de la convention et envisager d'éventuelles modifications.

L'article 5 indique que la convention entrera en vigueur, pour une période indéterminée, le premier jour du mois suivant la date à laquelle les parties se seront notifié l'accomplissement de leurs procédures internes, et prévoit les modalités de dénonciation de la convention.

B. UNE CONVENTION INÉDITE POUR CHACUN DES DEUX PAYS

Il convient d'insister sur le caractère inédit et peut-être même précurseur de cette convention.

Il s'agira en effet de la seule convention de double nationalité signée par la France (il est vrai que la France reconnaissant la double nationalité par principe, elle n'a pas l'obligation d'en passer par une convention).

Pour l'Espagne, ce sera la première convention de ce type signée avec un pays non hispanophone ou lusophone . A ce titre, elle suscite d'ores et déjà l'intérêt d'autres pays ayant des liens humains importants avec l'Espagne, comme la Roumanie.

C. UNE CONVENTION QUI FAIT L'OBJET D'UNE FORTE ATTENTE DES DEUX CÔTÉS DES PYRÉNÉES

La signature de la convention a suscité une forte attente tant en Espagne qu'en France.

En retrouvant leur nationalité espagnole, les citoyens français d'origine espagnole vont pouvoir vivre pleinement à l'avenir leur double appartenance et leur double culture. Cela répondra à une aspiration qui est essentiellement affective mais néanmoins très forte et profonde. Les représentants du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ont indiqué lors de leur audition que de nombreux Français d'origine espagnole ayant entendu parler de la signature de la convention l'interrogeaient pour savoir quand elle serait en vigueur . L'attente suscitée au sein de cette population est donc très forte.

Elle l'est également chez les résidents français en Espagne , dont le nombre est estimé à environ 150 000. Nos concitoyens vivant de l'autre côté des Pyrénées seraient en effet assez contents de pouvoir solliciter la nationalité espagnole, essentiellement pour les facilités administratives et pratiques que cela leur apporterait : obtention plus facile de papiers d'identité (actuellement, les Français vivant par exemple en Andalousie doivent se rendre au consulat général à Madrid pour faire renouveler leur passeport ou leur carte d'identité), possibilité de travailler légalement sans avoir à reconduire un permis de travail, détention de deux passeports facilitant le passage des frontières...

A ces facilités s'ajoutent les droits citoyens, droit de vote, bien sûr, mais aussi la possibilité de postuler à un emploi public...

Alors même que le texte n'est pas encore ratifié, des associations d'expatriés ou entreprises s'adressant à ceux-ci en font déjà la promotion auprès des Français résidant en Espagne.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 9 février 2022, sous la présidence de M. Cédric Perrin, vice-président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de Mme Vivette Lopez sur le projet de loi n° 418 (2021-2022) autorisant la ratification de la convention relative à la nationalité entre la République française et le Royaume d'Espagne.

Mme Vivette Lopez, rapporteur. - Nous examinons en urgence ce texte qui fait l'objet d'une priorité politique, le gouvernement souhaitant le voir adopter avant la fin de la législature.

Il est vrai que cette convention a été signée par les présidents des deux pays en personne lors du sommet franco-espagnol qui s'est tenu à Montauban le 15 mars 2021, dont l'ambition était de donner un nouvel élan à notre relation bilatérale.

Celle-ci est naturellement dense, compte tenu de nos relations de voisinage et des multiples liens humains entre nos deux pays. Ainsi, en 2021, la France est le deuxième pays d'accueil des Espagnols vivant à l'étranger, alors que l'Espagne est le septième pays d'accueil pour les Français résidant hors de France. Le réseau des lycées français en Espagne est le premier d'Europe et le deuxième de la France à l'échelle mondiale. Avec 74 milliards d'euros d'échanges chaque année, nos relations sont aussi importantes au plan économique. Il faut souligner, par ailleurs, nos convergences de vues sur nombre de dossiers européens ainsi que les importantes coopérations capacitaires que nous entretenons dans le domaine de la défense. De fait, la France et l'Espagne représentent l'un pour l'autre des partenaires importants et sur la même ligne, avec relativement peu d'irritants ou de divergences, si ce n'est, parfois, sur la politique migratoire.

Je rappelle que le sommet de Montauban, au cours duquel la présente convention a été signée, a également été l'occasion de tracer de nouveaux axes pour l'avenir de notre relation.

Pour revenir à la convention sur la nationalité qui nous intéresse aujourd'hui, elle vise à corriger une forme d'asymétrie liée au fait que la France reconnaît la double nationalité franco-espagnole, alors que l'Espagne ne l'autorise pas en principe, en vertu de sa constitution, sauf exception consentie par traité au profit des pays entretenant des liens privilégiés avec l'Espagne.

C'est ainsi que l'Espagne accepte aujourd'hui la double nationalité avec les pays d'Amérique latine, mais aussi le Portugal, la Guinée équatoriale ou encore les Philippines. En revanche, les Espagnols qui accèdent à la nationalité française doivent renoncer à leur nationalité d'origine, de même que des Français qui voudraient obtenir la nationalité espagnole devraient renoncer à la nationalité française, ce qu'ils ne souhaitent pas, en général.

Cette convention, demandée au départ surtout par l'Espagne, permettrait désormais aux ressortissants des deux pays d'acquérir la nationalité de l'autre État -sous réserve bien entendu de satisfaire les conditions posées par sa législation - sans renoncer à la leur. Sont potentiellement concernés quelque 250 000 Espagnols en France et 150 000 Français en Espagne. Il faut souligner que la convention ne crée pas en elle-même de nouvelles voies d'accès à la nationalité dans chacun des deux pays, les conditions pour y prétendre restant les mêmes.

En revanche, la convention va permettre aux ressortissants des deux pays ayant perdu automatiquement leur nationalité antérieure de la retrouver. Cette mesure, prévue par l'article 3 de la convention, vise en pratique des citoyens français d'origine espagnole présents en France souvent depuis plusieurs décennies et ayant dû renoncer à leur nationalité d'origine. Elle va également donner une dimension supplémentaire à la loi espagnole de mémoire démocratique de 2007, qui ouvre la nationalité espagnole aux descendants de personnes d'origine espagnole l'ayant perdu en acquérant celle de leur pays d'accueil ou en se mariant à un ressortissant étranger avant l'entrée en vigueur de la Constitution de 1978. Jusqu'à présent, une condition de résidence d'un an en Espagne était requise pour s'en prévaloir, mais celle-ci devrait être prochainement supprimée par une loi en cours de discussion. En conséquence, ces descendants de citoyens d'origine espagnole vivant en France, dont il est difficile d'estimer le nombre, pourront retrouver leur nationalité espagnole sans forcément résider en Espagne et vivre pleinement, à l'avenir, leur double identité et leur double culture. Il s'agit d'une aspiration essentiellement affective, mais très profonde. Le ministère des affaires étrangères a indiqué lors de l'audition que de nombreux Français d'origine espagnole ayant appris la signature de la convention l'interrogeaient pour connaître sa date d'entrée en vigueur.

L'attente est également forte chez les résidents français en Espagne, dont le nombre est estimé à environ 150 000. Nos concitoyens vivant de l'autre côté des Pyrénées seraient en effet assez contents de pouvoir solliciter la nationalité espagnole, essentiellement pour les facilités administratives et pratiques que cela apporterait : obtention plus facile de papiers d'identité, possibilité de travailler légalement sans avoir à reconduire un permis de travail, détention de deux passeports facilitant le passage des frontières... À ces facilités s'ajouteraient notamment le droit de vote et la possibilité de postuler à un emploi public.

Je voudrais insister sur le caractère inédit, et peut-être précurseur, de cette convention.

À notre connaissance, il s'agit de la seule convention de double nationalité signée par la France. Il est vrai que la France reconnaissant la double nationalité par principe, elle n'a pas l'obligation d'en passer par une convention.

Pour l'Espagne, ce sera la première convention de ce type signée avec un pays non hispanophone ou lusophone. À ce titre, elle suscite d'ores et déjà l'intérêt d'autres pays ayant des liens humains importants avec l'Espagne, comme la Roumanie.

L'Espagne a déjà procédé à la ratification de cette convention. En ce qui concerne la France, le projet de loi de ratification a été adopté le 27 janvier dernier par l'Assemblée nationale. Il est inscrit à l'ordre du jour du Sénat du mardi 15 février, en principe selon la procédure d'examen simplifié. Ce texte consensuel, qui ne soulève pas de difficulté technique particulière, est très attendu et revêt de surcroît une forte portée symbolique. Je ne peux donc que vous inviter à l'adopter, mes chers collègues.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Pour le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères

M. Jean-Michel CASA, ambassadeur de France en Espagne

Mme Isabelle PEROT, sous-directrice de l'Europe méditerranéenne, direction de l'Union européenne

M. Lucas GARDENAL, rédacteur Espagne, sous-direction de l'Europe méditerranéenne, direction de l'Union européenne

Mme Claire GIROIR, rédactrice, mission des accords et traités, direction des affaires juridiques

Pour le ministère de la Justice

Mme Isabelle PAULIK, cheffe du bureau de la nationalité, sous-direction du droit civil, direction des affaires civiles et du Sceau

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