II. LA CONFIRMATION DE LA POSSIBILITÉ D'UNE TELLE MESURE DE SÛRETÉ PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Face à cet enjeu majeur, le Parlement a adopté le 27 juillet 2020 la loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine Cette loi visait, à titre principal, à introduire une nouvelle mesure judiciaire de suivi et de surveillance post-sentencielle pour les individus condamnés pour des faits de terrorisme, à leur sortie de détention, poursuivant deux finalités : prévenir la récidive et accompagner leur réinsertion . Elle est issue d'initiatives convergentes du Sénat et de l'Assemblée nationale, les présidents des commissions des lois des deux chambres ayant chacun déposé une proposition de loi tendant au même objectif à la suite de la recommandation exprimée par Marc-Philippe Daubresse dans son rapport établissant le bilan des deux premières années d'application de la loi « SILT ».
Le Conseil constitutionnel, saisi a priori de la loi adoptée par le Parlement, a toutefois jugé que la mesure envisagée n'était ni adaptée ni proportionnée à l'objectif poursuivi et a donc déclaré la mesure de sûreté contraire à la Constitution.
Malgré la censure du dispositif de la mesure de sûreté en août 2020, le Conseil constitutionnel n'a pas remis en cause le principe même d'une telle mesure.
Le Conseil constitutionnel a en effet en premier lieu confirmé que le dispositif créé constituait bien une mesure de sûreté , en lui déniant tout caractère de peine ou de sanction. Conformément à l'argumentaire développé par Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur au Sénat de la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine, il a fondé son appréciation sur trois critères :
- la mesure n'est pas prononcée par la juridiction de jugement mais à l'expiration de la peine ;
- « elle repose non sur la culpabilité de la personne condamnée, mais sur sa particulière dangerosité » ;
- « elle a pour but d'empêcher ou de prévenir la récidive ».
En second lieu, il a souligné qu' il était « loisible au législateur de prévoir des mesures de sûreté fondées sur la particulière dangerosité, évaluée à partir d'éléments objectifs, de l'auteur d'un acte terroriste et visant à prévenir la récidive de telles infractions », à condition :
- d'une part, qu'aucune mesure moins attentatoire aux droits et libertés constitutionnellement garantis ne soit suffisante pour prévenir la commission de ces actes ;
- et, d'autre part, que les conditions de mise en oeuvre de ces mesures et leur durée soient adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi.