EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 20 janvier 2021, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Édouard Courtial sur le projet de loi n° 223 (2020-2021) autorisant la ratification du protocole portant amendement de la convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs.
M. Christian Cambon, président. - Nous examinons maintenant le projet de loi autorisant la ratification du protocole portant amendement de la convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs, sur le rapport de notre collègue Édouard Courtial.
M. Édouard Courtial, rapporteur. - Élaboré sous l'égide de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), le cadre juridique international s'est progressivement étoffé pour répondre aux menaces pesant sur la sûreté aérienne. La première convention, dite « convention de Tokyo », a été adoptée en 1963. Elle établit les mesures de contrainte, prises sous l'autorité du commandant de bord, destinées à lutter contre les comportements indisciplinés de passagers, qui peuvent, dans certains cas, compromettre la sécurité à bord.
Au début des années 1970, deux autres conventions ont complété ce dispositif, à la suite d'une vague d'attentats commis contre les avions et parfois accompagnés de prises d'otages. Ces conventions ont notamment imposé aux États d'ériger en infractions pénales la commission d'actes violents mettant en cause la sécurité d'un aéronef, ainsi que les détournements d'avions civils.
Au cours des vingt-cinq dernières années, nous avons assisté à une recrudescence des comportements perturbateurs à bord des avions. Ces incidents sont plus fréquents et plus graves qu'auparavant. Il s'agit d'infractions à l'interdiction de fumer à bord, d'agissements dus à l'absorption excessive d'alcool, de dégradations volontaires, ainsi que d'agressions verbales et physiques, voire de tentatives d'intrusion dans le poste de pilotage.
D'après un sondage réalisé par l'Association du transport aérien international (IATA), principal syndicat professionnel du secteur, le nombre de ces incidents a été multiplié par 5 en vingt ans.
Ce phénomène a mis en lumière les insuffisances de la convention de Tokyo de 1963. Pour y répondre, les États ont jugé nécessaire de réviser le cadre juridique international en matière de sûreté aérienne, en amendant cette convention. L'objet de cette révision est de rendre le cadre juridique suffisamment dissuasif pour prévenir les infractions, et le cas échéant, mieux sanctionner leurs auteurs.
Parallèlement, à la suite des attentats du 11 septembre 2001, les dispositions relatives à la répression des détournements d'avions ont été renforcées, et le champ des infractions à caractère terroriste a été étendu à l'usage d'armes nucléaires, bactériologiques et chimiques (NBC) à bord des avions, de même que l'usage de matières explosives ou radioactives.
Le protocole que nous examinons aujourd'hui, plus connu sous le nom de protocole de Montréal de 2014, porte amendement à la convention de Tokyo de 1963. Ce nouveau protocole vise à réprimer des actes que l'on pourrait majoritairement qualifier d'incivilités. Les conséquences de ces incivilités peuvent être graves dans certaines situations ; en effet, dans 40 % des cas, le commandant de bord est contraint de dérouter l'avion afin de débarquer le passager fautif, et dans 20 % des cas, l'intervention des forces de l'ordre s'avère nécessaire.
Plusieurs dispositions du protocole de Montréal méritent d'être soulignées.
Tout d'abord, le protocole de Tokyo prévoyait la compétence générale de l'État d'immatriculation de l'aéronef, ainsi que celle de l'État contractant, au titre de la compétence territoriale, si l'infraction compromet sa sécurité ou enfreint ses règles en matière de navigation. Le protocole de Montréal renforce ces règles de compétence et prévoit à cet égard l'extension de la compétence juridictionnelle à l'État exploitant et, dans une moindre mesure, à l'État d'atterrissage.
En outre, les États sont encouragés à engager des procédures pénales ou administratives contre les actes les plus graves, c'est-à-dire lorsqu'une personne à bord commet, ou menace de commettre, un acte de violence contre un membre d'équipage, ou lorsqu'elle refuse d'obéir à une instruction du commandant de bord.
Par ailleurs, sans préjudice de ses pouvoirs et de leur primauté, le commandant de bord pourra solliciter ou autoriser l'assistance des agents de sûreté en vol dans le but d'appliquer des mesures de contrainte contre les passagers indisciplinés ou perturbateurs. En cas d'intervention illicite, ces mêmes agents pourront également prendre, de leur propre initiative, toute mesure préventive visant à assurer la sécurité de l'aéronef et des personnes à bord. En cas de perpétration d'un acte grave, le commandant de bord pourra remettre le responsable aux autorités compétentes de tout État contractant sur le territoire duquel atterrit l'aéronef.
Enfin, dans l'hypothèse où un passager indiscipliné serait débarqué, les compagnies aériennes pourront recouvrer des dommages et intérêts auprès dudit passager au titre du préjudice subi. À l'inverse, ce passager ne pourra pas engager la responsabilité du personnel de bord ou de l'exploitant de l'avion en raison d'un préjudice qu'il aurait lui-même subi.
Pour conclure, ce protocole répond aux besoins de renforcement de la lutte contre les actes d'infraction à bord des aéronefs. À cet égard, il offre un cadre plus solide et une plus grande sécurité juridique, en donnant aux États les moyens nécessaires pour réprimer de manière plus systématique les actes d'indiscipline commis par les passagers.
Il convient de souligner que le protocole de Montréal de 2014 est entré en vigueur le 1 er janvier 2020, puisqu'un nombre suffisant d'États l'a déjà ratifié.
En conséquence, je préconise l'adoption de ce projet de loi. Son examen en séance publique est prévu le jeudi 28 janvier, selon la procédure simplifiée, ce à quoi la conférence des présidents, de même que votre rapporteur, ont souscrit.
M. Pascal Allizard. - Au nom du groupe Les Républicains, je remercie notre rapporteur Édouard Courtial pour son travail sur ce protocole de Montréal. Il s'agit d'un sujet d'actualité et ce texte répond à un besoin concret. En effet, les personnels à bord des aéronefs font face à une insécurité croissante et à une recrudescence des incivilités, mais aussi des actes de piraterie. Vous l'avez rappelé : un sondage de l'IATA montre que le nombre d'incidents a été multiplié par 5 en vingt ans...
Nous avons donc besoin d'une législation dissuasive avec des sanctions proportionnées qui soient appliquées. Il faudra que le plus grand nombre de pays ratifient ce texte. Le groupe Les Républicains est donc favorable à son adoption.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité.
Conformément aux orientations du rapport d'information n° 204 (2014-2015) qu'elle a adopté le 18 décembre 2014, la commission a autorisé la publication du présent rapport synthétique.