N° 628

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 juillet 2018

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , de règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2017 ,

Tome I : Exposé général et examen des articles

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Rapporteur général,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Mme Fabienne Keller, MM. Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Arnaud Bazin, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

980 , 1055 et T.A. 137

Sénat :

595 (2017-2018)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

PREMIÈRE PARTIE - L'EXERCICE 2017 ET SON CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

I. UNE CROISSANCE DE « RATTRAPAGE »

A. UN RYTHME DE CROISSANCE INÉDIT DEPUIS 2007...

1. Une forte accélération de l'économie française dont l'ampleur n'avait pas été anticipée

Après quatre années décevantes, l'activité économique a fortement accéléré en 2017 .

Le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) en volume a ainsi atteint 2,2 % .

Taux de croissance de la France
depuis 2011

(taux d'évolution du PIB en volume et en moyenne annuelle)

Source: commission des finances du Sénat

Corrigé des effets calendaires 1 ( * ) , il s'élève même à 2,3 % , soit un niveau inédit depuis 2007 2 ( * ) .

L'examen du profil infra-annuel de la croissance témoigne par ailleurs d'une forte accélération de l'économie française au cours de l'année : limitée à 1,4 % au premier trimestre, l'évolution en glissement annuel du PIB en volume a atteint 2,8 % au dernier trimestre.

Évolution en glissement annuel du PIB
depuis 2013

(taux d'évolution en volume)

Source: commission des finances du Sénat

Une telle accélération de l'activité n'avait pas été anticipée : l'économie française a ainsi déjoué l'ensemble des prévisions gouvernementales formulées au cours de l'exercice.

Comparaison des prévisions de croissance et de l'exécution
pour l'année 2017

(taux d'évolution en volume)

Source: commission des finances du Sénat

Ce constat est d'autant plus remarquable que les hypothèses gouvernementales étaient initialement entachées d'un biais optimiste , en comparaison avec les prévisions des instituts privé de conjoncture et des organisations internationales 3 ( * ) .

Il peut être noté que ce surcroît de croissance s'est accompagné d'un taux d'inflation plus faible qu'escompté. Le déflateur du PIB est ainsi supérieur de 0,25 point à l'estimation sous-jacente au projet de loi de finances (0,9). De ce fait, le taux de croissance en valeur de l'économie française s'élève à 2,8 %, pour une prévision initiale de 2,4 %.

2. Une embellie portée par l'investissement et le commerce extérieur, dans un contexte de « rattrapage »

Il ressort de l'analyse des contributions à la croissance que l'accélération observée l'an passé a été tirée par l'investissement.

Évolution du PIB en volume et contributions
à cette évolution

(en points de PIB)

Note de lecture : la somme des arrondis peut différer de l'arrondi de la somme.

Source: commission des finances du Sénat (d'après les données de l'Insee)

Ce dynamisme de l'investissement s'explique par l'accélération de l'investissement des entreprises non financières (+ 4,4 %) mais aussi par celui des ménages (+ 5,6 %) 4 ( * ) , dans un contexte marqué par un fort rebond de la construction et des transactions immobilières, après la phase baissière observée sur la période 2012-2015 5 ( * ) .

Le commerce extérieur , qui avait fortement pesé sur la croissance française entre 2014 et 2016, contribue positivement à cette dernière en 2017, sous le double effet du regain de la demande mondiale et de l'extinction des facteurs exceptionnels (effet des attentats sur le tourisme, mauvaises récoltes) qui avaient grevé les exportations françaises en 2016.

L'analyse des contributions à la croissance suggère ainsi que l'économie française se situe actuellement dans une phase de « rattrapage » .

À ce titre, il peut être souligné que le rythme de croissance atteint l'an passé (2,2 %) est fortement supérieur aux estimations de croissance potentielle retenues tant par le Gouvernement (1,25 %) que par l'ensemble des instituts privés de conjoncture (entre 0,9 % et 1,5 %).

Consensus de la croissance potentielle de la commission des finances
du Sénat pour l'année 2017

(en %)

2017

Euler Hermes

1,5

Axa

1,3

BNP Paribas (recherche économique groupe)

1,2

Exane

1,1

Coe-Rexecode

1,2

PAIR Conseil

1,2

Oxford Economics

1,5

Citi

1,2

BIPE

1,3

OFCE

1,3

Natixis

0,9

Moyenne

1,2

Source: commission des finances du Sénat

À l'issue de l'exercice 2017, le Gouvernement estime toutefois que l'essentiel du « rattrapage » a été effectué : l'écart de production atteindrait désormais - 0,6 point de PIB potentiel, contre - 1,5 point de PIB potentiel en 2016, en ligne avec les estimations de la Commission européenne et des principales institutions internationales.

L'écart de production et la croissance potentielle

La position de l'économie dans le cycle est traditionnellement appréhendée à l'aide du concept d' écart de production , qui représente la différence entre le PIB effectif et le niveau d'activité « soutenable » sur longue période sans provoquer de déséquilibre sur les marchés des biens et du travail, appelé PIB potentiel. L'écart de production constitue ainsi une estimation, en bas de cycle, du « potentiel de rebond » de l'économie et, en haut de cycle, de son niveau de « surchauffe ».

Chaque année, l'évolution de l'écart de production dépend de l'écart entre la croissance effective et la croissance potentielle : si la croissance effective est inférieure à la croissance potentielle, l'écart de production se creuse ; inversement, si la croissance effective est supérieure à la croissance potentielle, le « potentiel de rebond » de l'économie diminue.

Dans ce cadre, la croissance potentielle, qui correspond au taux d'évolution du PIB potentiel, joue le rôle d'un « limitateur de vitesse » : une fois l'écart de production résorbé, la croissance effective doit se rapprocher de la croissance potentielle. Autrement dit, la croissance effective ne peut durablement s'écarter de la croissance potentielle.

Source : commission des finances du Sénat


* 1 Les comptes peuvent être corrigés des jours ouvrables pour neutraliser ce qui relève de simples effets calendaires sans lien avec l'évolution macroéconomique sous-jacente.

* 2 Insee, « Ciel voilé en Europe », note de conjoncture, juin 2018, p. 9.

* 3 L'hypothèse de croissance initialement retenue par le Gouvernement était ainsi supérieure à l'ensemble des prévisions disponibles, qu'il s'agisse de celles de la Commission européenne (+ 1,4 %), du Fonds monétaire international (FMI) (+ 1,3 %), de l'OCDE (+ 1,3 %) ou encore du Consensus Forecasts (+ 1,2 %).

* 4 L'investissement des ménages comprend la construction de logements neufs, les dépenses d'entretien-amélioration et les frais liés à l'acquisition dans le neuf et dans l'ancien.

* 5 Voir sur ce point : « Le redressement de l'investissement immobilier est-il durable ? », Trésor-éco, n° 201, juillet 2017.

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