II. DES POLITIQUES SECTORIELLES MAINTENUES MALGRÉ LE CONTEXTE BUDGÉTAIRE
La mission « Médias, livre et industries culturelles » se caractérise par un montant élevé de dépenses consacrées au soutien financier des secteurs concernés.
En effet, les fonctions de soutien du ministère de la culture sont retracées budgétairement dans le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la mission « Culture ». La présente mission ne porte donc aucune dépense de personnels , les crédits de titre 2 étant entièrement inscrits dans le programme précité.
En revanche, la mission « Médias, livre et industries culturelles » comporte une importante proportion de dépenses d'intervention, 302 millions en crédits de paiement en 2018 , ce qui représente plus de 50 % des crédits de la mission. Ces dépenses contribuent ainsi au sein des deux programmes au soutien des secteurs concernés : grâce aux aides à la presse, par la compensation des missions d'intérêt général de l'Agence France presse ou encore au travers des dispositifs de soutien au livre, à la lecture et aux industries culturelles.
A. LE PROGRAMME « PRESSE ET MÉDIAS »
1. L'aide à la modernisation de la presse au coeur des dispositifs de soutien à la presse
Les aides à la presse , qui représentent 120 millions d'euros en crédits de paiement en 2018, sont réparties en trois catégories :
- les aides à la diffusion, majoritairement constituées des aides au portage de la presse ;
- les aides au pluralisme ;
-les aides à la modernisation, parmi lesquelles le fonds stratégique pour le développement de la presse créé en 2012.
Elles sont marquées dans le présent projet de loi de finances par une diminution des aides à la diffusion et un maintien du niveau des aides à la modernisation de la presse.
L'évolution à la baisse du montant des aides à la diffusion découle du constat de la diminution des volumes portés . Le fonds d'aide au portage de la presse a ainsi fait l'objet d'une réforme récente 9 ( * ) , qui adapte le soutien au secteur aux évolutions du marché . En conséquence, l'aide au portage de la presse s'élève à 31,5 millions d'euros en 2018, en diminution de 4,5 millions d'euros.
Évolution des aides à la presse de 2014 à 2018 (projets de loi de finances)
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
Parallèlement, les aides à la modernisation ont été adaptées aux évolutions numériques avec une réforme du fonds stratégique pour le développement de la presse en 2016 10 ( * ) , qui a notamment conduit à une augmentation de ses taux de subvention.
Répartition et évolution des aides
directes à la presse écrite
entre 2015 et 2018
(en euros)
(AE = CP) |
LFI 2015 |
LFI 2016 |
LFI 2017 |
PLF 2018 |
Programme 180 - Presse |
130 117 332 |
127 754 707 |
125 839 207 |
119 430 676 |
Aides à la diffusion |
58 543 125 |
56 700 000 |
51 308 083 |
45 741 273 |
Aide au portage de la presse |
36 000 000 |
36 000 000 |
36 000 000 |
31 500 500 |
Exonérations charges patronales pour les porteurs |
22 543 125 |
20 700 000 |
15 308 083 |
14 241 273 |
Aides au pluralisme |
11 475 000 |
15 475 000 |
16 025 000 |
16 025 000 |
Aides aux quotidiens nationaux d'IPG à faibles ressources publicitaires** |
8 655 000 |
12 655 000 |
13 155 000 |
13 155 000 |
Aides aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'IPG à faibles ressources de petites annonces |
1 400 000 |
1 400 000 |
1 400 000 |
1 400 000 |
Aides à la presse régionale |
1 420 000 |
1 420 000 |
1 470 000 |
1 470 000 |
Aides à la modernisation |
60 099 707 |
55 579 707 |
58 506 124 |
57 664 403 |
Aides à la modernisation sociale |
7 000 000 |
3 400 000 |
1 250 000 |
500 000 |
Aide à la distribution de la presse |
18 850 000 |
18 850 000 |
18 850 000 |
18 850 000 |
Aide à la modernisation des diffuseurs |
3 800 000 |
3 680 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
Fonds stratégique pour le développement de la presse |
30 449 707 |
29 649 707 |
27 406 124 |
27 314 403 |
Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse |
- |
- |
5 000 000 |
5 000 000 |
Programme 134* - Aides au transport postal |
130 000 000 |
119 000 000 |
119 000 000 |
111 500 000 |
Total des crédits budgétaires dédiés aux aides à la presse écrite |
260 117 832 |
246 754 707 |
244 839 207 |
230 930 676 |
* Programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie ».
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
Le décret du 26 août 2016 a par ailleurs créé un fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse , doté de 5 millions d'euros en 2018. Ce fonds aide les porteurs de projet en amont, en mettant à leur disposition des bourses d'un montant maximum de 50 000 euros, afin de soutenir une forme éditoriale novatrice avant que le projet soit éligible aux dispositifs de droit commun. 36 bourses ont ainsi été accordées en 2016, mais seulement une dizaine en 2017.
Par ailleurs, une mission sur la distribution de la presse par vente au numéro a été confiée par Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, Françoise Nyssen, ministre de la culture et Gérald Darmanin, ministre de l'action des comptes publics, à Gérard Rameix , afin d'élaborer un diagnostic de la situation industrielle et financière de la filière de distribution et de formuler des recommandations à court et à moyen terme .
2. La situation financière de l'AFP continue d'être préoccupante
Le versement de l'État à l'Agence France presse (AFP) s'élève à 131,5 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances. Ce montant est en diminution de 1 million d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, mais il reste supérieur de 3,6 millions d'euros à la trajectoire prévue par le contrat d'objectifs et de moyens en raison du financement complémentaire dont avait bénéficié l'AFP l'année dernière au vu de sa situation économique difficile.
Le versement de l'État se décompose désormais en deux parties , à la suite du contentieux communautaire relatif au financement de l'AFP, réglé en 2015 par une nouvelle répartition du soutien financier de l'État. Celle-ci a été actée par le contrat d'objectifs et de moyens pour la période 2014-2018, signé en juin 2015. La première partie correspond à la compensation des missions d'intérêt général de l'Agence et l'autre au paiement des abonnements commerciaux de l'État . Cette distinction doit permettre de mettre en évidence une éventuelle surcompensation des missions d'intérêt général susceptible de fausser la concurrence.
En réalité, la commission financière de l'AFP souligne chaque année depuis 2015 l' absence de surcompensation de ces missions d'intérêt général, et au contraire l'existence d'une sous-compensation d'environ 9 millions d'euros par an .
Les missions de l'AFP s'exercent aujourd'hui dans un cadre de concurrence mondiale exacerbée , puisque l'agence doit faire face à la concurrence des agences anglo-saxonnes, mais aussi des agences de Chine et de Russie, alors que le marché de l'information est dans une phase de déflation générale et que la compétition sur les prix est forte.
L'agence réalise désormais 10 % de son chiffre d'affaires avec la vidéo , et ce marché représente un important potentiel de croissance 11 ( * ) .
Par ailleurs, l'AFP a réalisé des réformes de structure mais continue de faire face à des coûts de fonctionnement importants .
L'AFP exprime un besoin de financement d'environ 60 millions d'euros afin de permettre le désendettement de l'Agence, qui n'a pas d'actionnaires, et de soutenir l'investissement dans l'innovation en assurant la transition vers un nouveau modèle de développement basé sur le marché de la vidéo.
* 9 Décret n° 2017-1332 du 11 septembre 2017 relatif à la réforme du fonds d'aide au portage de la presse.
* 10 Décret n° 2016-1161 du 26 août 2016 relatif au soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse et réformant les aides à la presse.
* 11 Certaines agences réalisent la moitié de leur chiffre d'affaires avec la vidéo.