II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Des dépenses de personnel supérieures aux prévisions du fait de la révision en cours d'exercice du schéma d'emplois à la suite des attentats de janvier 2015

En 2015, les dépenses de personnel , désormais portées en totalité par le programme 212 « Soutien de la politique de la défense », ont diminué de plus de 225 millions d'euros par rapport à 2014, passant de 19,57 milliards d'euros en 2014 à 19,34 milliards d'euros en 2015.

Évolution des écarts entre les prévisions de la loi de finances initiale
et la réalisation :
dépenses de personnel et équivalents temps plein travaillé (ETPT)

(en milliards d'euros et ETPT)

Source : commission des finances du Sénat, d'après réponses au questionnaire du rapporteur général

Pour autant, ces dépenses ont été significativement supérieures aux crédits inscrits en loi de finances (19,05 milliards d'euros).

Cet écart s'explique pour partie par la révision du schéma d'emplois en cours d'exercice. En effet, à la suite des attentats de janvier 2015, la trajectoire de diminution des effectifs du ministère de la défense fixée par la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019 (LPM) 32 ( * ) a été modifiée par la loi du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 33 ( * ) , portant l'objectif de suppressions de postes de - 33 675 ETP à - 14 925 ETP.

Pour 2015, la LPM actualisée fixait un objectif de stabilité des effectifs. Si cet objectif n'a pas été atteint, la diminution des effectifs a cependant été contenue . Au total, le schéma d'emplois pour 2015 s'est élevé à - 645 ETP, pour une prévision s'établissant initialement à - 7 500 ETP.

Par ailleurs, dans son discours prononcé devant le Parlement au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 , le Président de la République a fixé l'objectif d'une stabilité des effectifs après l'augmentation prévue en 2016 , portant le nombre de suppressions de postes à 5 707 ETP sur la période 2014-2019.

Si le déficit constaté en 2015 (- 645 ETP) n'était ni compensé ni aggravé dans les années à venir, les suppressions de postes devraient atteindre 6 352 ETP .

Évolution du schéma d'emplois

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

LPM initiale

- 7 881

- 7 500

- 7 397

- 7 397

- 3 500

0

- 33 675

LPM

actualisée

- 8 007

0

2 300

- 2 600

- 2 800

- 3 818

- 14 925

Discours PR

- 8 007

0

2 300

0

0

0

- 5 707

Source : Cour des comptes, d'après ministère de la défense

2. Une budgétisation des ressources exceptionnelles permettant de sécuriser les ressources du ministère de la défense

La loi de finances pour 2015 prévoyait de doter la mission « Défense » de 31,4 milliards d'euros, dont 29 milliards d'euros au titre de crédits budgétaires et 2,4 milliards d'euros au titre de ressources exceptionnelles (dont 2,17 milliards d'euros au titre du CAS « Fréquences » et 0,23 milliard d'euros au titre du CAS « Immobilier »).

Considérant que cette recette ne pourrait être réalisée dès l'année 2015 et qu'en conséquence le budget présenté par le Gouvernement était insincère , le Sénat avait, sur la proposition de votre commission des finances, rejeté les crédits de la mission « Défense ».

Or, comme le note la Cour des comptes dans son analyse de l'exécution 2015, « la cession des fréquences s'est concrétisée le 8 décembre 2015 avec l'attribution par l'ARCEP des autorisations pour 2 798 M€. Toutefois, conformément aux dispositions fixées en juin 2015, seul un quart du prix de cession (700 M€) était exigible en 2015 et, en pratique, aucune recette n'a pu être effectivement encaissée au titre de la cession des fréquences de 700 MHz », confirmant ainsi l'analyse de votre commission des finances.

L'actualisation de la LPM a répondu à la critique formulée par le Sénat et a permis de sécuriser les ressources financières du ministère de la défense , en substituant des crédits budgétaires aux recettes exceptionnelles prévues sur le CAS « Fréquences » .

La loi de finances rectificative du 30 décembre 2015 34 ( * ) a ainsi procédé à une majoration des crédits de la mission « Défense » à hauteur de 2,2 milliards d'euros en CP, dont 2,144 milliards d'euros au titre de la rebudgétisation des crédits issus du CAS « Fréquences ».

Évolution de la structure des ressources financières
du ministère de la défense pour 2015 (périmètre LPM)

(en milliards d'euros)

LPM

LFI

Actualisation

Crédits budgétaires

29,6

29

31,2

Ressources exceptionnelles

1,8

2,4

0,2

Total

31,4

31,4

31,4

Source : commission des finances du Sénat

Au-delà de la seule annuité 2015, cette tendance devrait se poursuivre sur l'ensemble de la programmation . Ainsi, entre 2015 et 2019, les ressources exceptionnelles (REX) ne représenteront plus qu'un montant de 0,93 milliard d'euros, contre 6,26 milliards d'euros prévus par la loi de programmation des finances publiques 2015-2017 . Compte tenu de l'incertitude liée à ces recettes (pour 2015, le montant des recettes issues du CAS « Immobilier » ne s'est élevé qu'à 186 millions d'euros alors que la prévision avait été fixée à 230 millions d'euros), une rebudgétisation de l'ensemble des ressources du ministère devrait cependant être envisagée .

Évolution des crédits du ministère de la défense
pour la période 2015-2019

(en milliards d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Ressources totales

LPM

31,38

31,38

31,38

31,56

31,78

32,51

LPFP

31,4

31,4

31,6

LPM actualisée

31,38

31,98

32,26

32,77

34,02

Dont crédits budgétaires

LPM

29,61

29,61

30,13

30,65

31,5

32,36

LPFP

29

29,52

30,05

LPM actualisée

31,15

31,73

32,11

32,62

33,87

Dont ressources issues de cessions

LPM

1,77

1,77

1,25

0,91

0,28

0,15

LPFP

2,4

1,88

1,55

LPM actualisée

0,23

0,25

0,15

0,15

0,15

Source : commission des finances du Sénat

Malgré son caractère tardif, qui a pu engendrer des difficultés en gestion (cf. infra ), la minoration des prévisions de recettes exceptionnelles répond à une inquiétude exprimée par le Sénat lors de l'examen de la loi de finances pour 2015 .

3. La sous-estimation récurrente et volontaire du « surcoût OPEX », des modalités de calcul du « surcoût OPINT » qui restent à définir

Le surcoût opérations extérieures (OPEX) s'est élevé en 2015 à 1,117 milliard d'euros . Il a été financé à hauteur de :

- 450 millions d'euros au titre de la provision inscrite en loi de finances, conformément au montant fixé par la LPM 2014-2019 ;

- 34,4 millions d'euros de ressources de fonds de concours (remboursements de l'ONU et des nations alliées soutenues par la France en Afghanistan) ;

- 6,8 millions d'euros de ressources reçues par décret de transfert ;

- 625,3 millions d'euros par décret d'avance du 27 novembre 2015.

La sous-budgétisation volontaire des OPEX pose un problème de sincérité budgétaire dans la mesure où le montant prévu chaque année au titre du surcoût OPEX est significativement inférieur au montant exécuté . Aussi, et compte tenu des difficultés liées aux modalités de financement du « surcoût OPEX », votre rapporteur spécial a souhaité réaliser un contrôle budgétaire sur cette question.

Les conclusions de ces travaux seront rendues en octobre 2016 , concomitamment à la remise par la Cour des comptes d'une enquête sur ce sujet réalisée à la demande de votre commission des finances en application de l'article 58§2 de la loi organique relative aux lois de finances.

Évolution du « surcoût OPEX »

(en millions d'euros)

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

PLF 2016

Surcoût des OPEX

Loi de finances initiale

24

24

100

175

375

475

510

570

630

630

630

450

450

450

Coûts non prévus par la LFI

630

609

453

428

310

376

361

290

617

243

620

668

666

Total

654

633

553

603

685

851

871

860

1247

873

1250

1118

1116

Financement du surcoût des OPEX non prévu en LFI

Décrets d'avances

400

540

421

453

273

222

228

247

538

187

578

611

625

Crédits ouverts en LFR

420

495

269

223

247

Autres (dont fonds de concours)

14

41

79

50

79

56

50

54

41

Total

400

540

421

453

287

263

307

297

617

243

628

665

666

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire 2016

Par ailleurs, l'année 2015 a été marquée par le lancement et la pérennisation de l'opération « sentinelle » à la suite des attentats de janvier . Le surcoût des opérations intérieures (176,1 millions d'euros) a été compensé au ministère de la défense à hauteur de 170,6 millions d'euros , dont 51,6 millions d'euros de dépenses de titre 2 par le décret d'avance du 27 novembre 2015.

Les modalités de calcul ayant abouti à ce montant ne sont toutefois pas arrêtées. En effet, contrairement au calcul du « surcoût OPEX », dont la méthode a été arrêtée conjointement par la direction des affaires financières et le ministère du budget, le montant du « surcoût OPINT » pour 2015 a été chiffré par le seul ministère de la défense. Or le chiffrage de l'impact des opérations intérieures sur certains coûts n'est pas évident. Ainsi, la moindre dépense liée au versement de l'indemnité pour service en campagne (ISC) 35 ( * ) a été estimée par le ministère à 15 millions d'euros sans que la méthode ayant permis d'aboutir à ce montant n'ait été explicitée. Il conviendrait par conséquent que, dès l'exercice 2016, une méthode de calcul fasse l'objet d'une définition commune entre le ministère de la défense et celui du budget.

4. Le règlement du contentieux « Mistral » : une méthode contestable, un schéma contraire aux dispositions organiques

À la suite de négociations entamées entre la France et la Russie dès 2009, un contrat prévoyant la fourniture par DCNS de deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) a été signé le 10 juin 2011 entre DCNS et la société russe ROSOBORONEXPORT (ROE). La livraison d'un premier BPC devait intervenir en novembre 2014 et celle d'un second BPC en novembre 2015.

Au total, le prix devant être réglé par la Russie s'élevait à 1,2 milliard d'euros, dont 893 millions d'euros ont versés à titre d'avance à DCNS .

En raison de la crise ukrainienne, le Gouvernement français n'a pas délivré à DCNS l'autorisation d'exportation que celle-ci sollicitait pour pouvoir livrer le premier BPC, dont la construction avait suivi le calendrier prévu. Cette livraison n'est donc pas intervenue et un refus de licence d'exportation de ce matériel militaire est implicitement né le 25 juin 2015, du fait du silence gardé par l'administration. Une décision explicite de refus de la licence d'exportation a ensuite été prise le 4 août 2015 concernant le second BPC, à la veille de la signature des accords réglant le différend avec la Russie.

En effet, la France et la Russie ont décidé en février 2015 d'engager des négociations pour aboutir à un règlement négocié. Celui-ci prend la forme de deux accords intergouvernementaux, signés concomitamment le 5 août 2015 . Ces accords prévoient le versement par la France d'une indemnité s'élevant à 949,7 millions d'euros.

Ce montant a été réglé en totalité à partir du programme 146 « Équipement des forces » de la mission « Défense » .

Ce programme a ensuite bénéficié du rattachement de 893 millions d'euros par fonds de concours à la suite du reversement à l'État des sommes que DCNS avait reçues de son client.

Le Gouvernement avait indiqué que le solde, soit 56,7 millions d'euros, serait rendu au programme lors de la fin de gestion 2015 .

Ce différentiel a effectivement été compensé par la loi de finances rectificative du 30 décembre 2015.

La mise en oeuvre de cet accord appelle deux remarques :

- d'une part, le Parlement a été placé devant le fait accompli , l'accord ayant été exécuté dès le 5 août 2015 alors que la loi l'autorisant n'a été promulguée que le 9 octobre 2015 36 ( * ) ;

- d'autre part, la régularité budgétaire d'un tel schéma apparaît incertaine . En effet, aux termes de l'article 7 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), « une mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie ». Or l'indemnité versée à la Russie ne se rattachant pas à la politique publique de défense, elle n'aurait donc pas dû être imputée sur un programme de la mission « Défense ».

5. Un exercice marqué par d'importantes tensions en gestion

La rebudgétisation tardive des ressources du CAS « Fréquences », la révision du schéma d'emplois en cours d'exercice, la mise en oeuvre de l'accord France-Russie et le coût lié aux opérations extérieures et aux opérations intérieures se sont traduits par des tensions en gestion dès le début du second semestre 2015, qui ont nécessité des ouvertures de crédits ainsi que le « dégel » d'une partie de la réserve de précaution.

La mise en oeuvre de l'accord France-Russie a tout d'abord nécessité la levée de la réserve de précaution du programme 146 « Équipement des forces » à hauteur de 615 millions d'euros dès le 4 août 2015.

S'agissant de la rebudgétisation des crédit du CAS « Fréquences », la Cour des comptes note dans son analyse de l'exécution budgétaire 2015 du CAS « Fréquences » que « les délais entre la décision de rebudgétisation du CAS et sa mise en oeuvre effective en LFR ont aggravé les tensions en trésorerie sur le programme 146 " Emploi des forces " de la mission " Défense " et accru les intérêts moratoires 37 ( * ) versés par ce programme en 2015 », qui ont connu un quasi doublement , passant de 4,4 millions d'euros en 2014 à 8,5 millions d'euros en 2015 . Ces crédits n'ont pu être consommés que grâce à leur « fléchage » en amont par des effectifs réquisitionnés en toute fin d'année.

Par ailleurs, une partie de ces crédits ouverts ont été neutralisés par les annulations de crédits au titre de la solidarité interministérielle prévues en décret d'avance et en loi de finances rectificative (200 millions d'euros) et le gel intervenu en fin d'année (590 millions d'euros).

S'agissant des dépenses de personnel, la modification de la trajectoire de réduction des effectifs actée par la LPM actualisée s'est traduite par une insuffisance des crédits de titre 2. Ces difficultés ont en outre été renforcées par les dysfonctionnements du système de paie Louvois, à l'origine d' indus qui se sont élevés à 41 millions d'euros en 2015 . Or ces indus, dont la survenance était quasi certaine, n'avaient pas été inscrits en loi de finances , le Gouvernement ayant indiqué que « dans la perspective de la résorption progressive des dysfonctionnements, comme de l'amélioration de la récupération en flux des indus versés, aucun nouvel indu, ni nouvelle imputation budgétaire, ne sont prévus, pour 2015 et au-delà, au titre des dépenses prévisionnelles ».

Le remplacement progressif de Louvois par le logiciel Source Solde à compter de 2017 doit permettre de corriger ces dysfonctionnements. Pour autant, comme le note la Cour des comptes dans son rapport public 2016 38 ( * ) , « Source Solde est un projet informatique de gestion parmi les plus complexes par ses spécificités et le nombre des personnels concernés . Des difficultés majeures, susceptibles de peser sur sa mise en production à la date prévue et avec le niveau de qualité exigé, ne sont pas encore complètement maîtrisées , alors que le planning du déroulement du projet comporte peu de marge ».

Votre rapporteur spécial sera par conséquent particulièrement attentif à ce que la mise en place de Source Solde ne connaisse pas les mêmes errements que Louvois.

Enfin, la sous-évaluation volontaire des OPEX et le surcoût constaté des OPINT a nécessité l'ouverture de crédits à hauteur de 625 millions d'euros au titre des OPEX et 171 millions d'euros au titre des OPINT par décret d'avance du 27 novembre 2015 .

Pour faire face à ces tensions en gestion, une partie des fonds dont dispose la France à l'OCCAr (Organisme conjoint de coopération en matière d'armement) a été sollicitée. Selon la Cour des comptes, 187 millions d'euros ont ainsi été rapatriés (151 millions d'euros au titre des intérêts accumulés, 20 millions d'euros au titre des pénalités payées par les industriels et 16 millions d'euros au titre de recouvrements divers). Le traitement budgétaire de ces fonds, qui n'ont pas été inscrits comme une recette au budget de l'État, n'apparaît pas conforme au principe de non-contraction entre les dépenses et les recettes prévu à l'article 6 de la loi organique relative aux lois de finances. La Cour des comptes note ainsi que « les intérêts générés sur les comptes de l'OCCAr servant à régler des dépenses du budget général, ils devraient être mis en recettes au budget général et non conduire à des atténuations de dépenses ».

6. Un report de charges contenu mais dont le niveau demeure élevé

Le report de charges correspond à l'ensemble des dépenses ayant fait l'objet d'un service fait impayées à la fin de la gestion et les avances dues non réglées sur des contrats passés avant le 31 décembre de l'année considérée.

Au 31 décembre 2014, le report de charges s'élevait à 3,5 milliards d'euros. En 2015, le report de charges a été contenu à hauteur de 3,1 milliards d'euros, même s'il demeure supérieur aux prévisions (2,9 milliards d'euros) .

Évolution des reports de charges

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

2014

Fin 2015 (prévision)

Fin 2015 (réalisation)

2 734,5

3 159,5

3 451,8

3 498,1

2 911,7

3 088,9

Source : commission des finances du Sénat, d'après des données ministère de la défense

Par ailleurs, compte tenu de son niveau, le report de charges doit faire l'objet d'une vigilance, le montant des crédits votés en loi de finances n'étant pas à eux seuls suffisants pour en assurer la maîtrise. Lors de son audition par la commission de la défense et des forces armées de l'Assemblée nationale le 7 octobre 2015, Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement, indiquait ainsi qu'« à la veille de la loi de finances rectificative, les créances dues par ce programme atteindront près de quatre milliards d'euros. Si la loi de finances rectificative est au rendez-vous au montant prévu, le report de charge sera [...] maîtrisé, mais à la condition qu'il n'y ait pas d'annulations de crédits pour couvrir les surcoûts induits par les OPEX, Sentinelle ou une éventuelle insuffisance sur le titre 2 ».

Dans sa note sur l'exécution budgétaire, la Cour des comptes rappelle en outre que, s'agissant des programmes 178 et 212, la maîtrise du report de charges a été permise par des « retards de notification de marchés et de recettes plus importante que prévues (P178) » ainsi qu'un « mouvement de fongibilité asymétrique en fin de gestion (20 M€ pour le P212) ».

7. Une forte activité opérationnelle qui s'est traduite par d'importantes conséquences sur les personnels et les matériels

Les indicateurs de performance « Niveau de réalisation des activités et de l'entraînement » et « Disponibilité des matériels par rapport aux exigences des contrats opérationnels » fournissent une image utile des conséquences de la surutilisation des hommes et des matériels dans le cadre des OPEX et des OPINT.

S'agissant de l'armée de terre, le rapport annuel de performances note que le nombre de journées de préparation opérationnelles (mises en condition avant projection, préparation opérationnelle générique et formation individuelle) a chuté de 24 % passant de 84 à 64 en un an , cette situation se traduisant par « une usure du personnel de l'armée de terre qui vit sur un capital opérationnel qu'elle peine à régénérer ». Le rapport annuel de performances rappelle que si « la remontée des effectifs de la FOT [force opérationnelle terrestre] devrait redonner des marges de manoeuvre permettant une reprise progressive de la préparation opérationnelle interarmes fin 2016. Cette remontée sera toutefois conditionnée par le volume des forces maintenues sur l'opération Sentinelle ». Par ailleurs, si le nombre d'heures de vol effectuées par les pilotes d'hélicoptère de l'armée de terre est resté stable par rapport à 2014, leur répartition se fait au détriment des pilotes plus jeunes « qui peinent à faire leurs heures » . La surutilisation des matériels a également d'importantes conséquences alors que « la production de matériels régénérés reste insuffisante car une partie des personnels de maintenance est engagée » au titre de l'opération Sentinelle.

S'agissant de la marine, le rapport annuel de performances note que « la génération de pilotes opérationnels est pénalisée par l'emploi des pilotes instructeurs dans des missions opérationnelles et les tensions sur la dotation et la disponibilité de certaines flottes d'hélicoptères ». La disponibilité des matériels navals connaît également peut également s'avérer inférieure aux objectifs, notamment pour les plus anciens d'entre eux.

Enfin, s'agissant de l'armée de l'air, il rappelle que « l'intensité des engagements actuels, en accélérant le vieillissement des appareils , pourrait, en l'état, compromettre la disponibilité technique nécessaire à cette remontée d'activité. Enfin, l'activité aérienne est en grande partie réalisée en opérations pour la chasse comme pour le transport, obérant l'activité de préparation opérationnelle en métropole ».


* 32 Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

* 33 Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

* 34 Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

* 35 L'indemnité pour service en campagne est versée au militaire qui, dans le cadre des activités d'instruction, d'entraînement ou d'intervention effectue, hors de sa garnison, une sortie de plus de 36 heures consécutives.

* 36 Loi n° 2015-1254 du 9 octobre 2015 autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie sur le règlement des obligations complémentaires liées à la cessation de l'accord du 25 janvier 2011 relatif à la coopération dans le domaine de la construction de bâtiments de projection et de commandement.

* 37 Ces intérêts sont versés lorsqu'il existe un retard de paiement.

* 38 Cour des comptes, rapport public annuel, février 2016.

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