Rapport n° 92 (2014-2015) de M. Hugues PORTELLI , fait au nom de la commission des lois, déposé le 12 novembre 2014

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N° 92

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 novembre 2014

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi constitutionnelle de M. Jacques MÉZARD et plusieurs de ses collègues visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable ,

Par M. Hugues PORTELLI,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; Mme Catherine Troendlé, MM. Jean-Pierre Sueur, Jean-René Lecerf, Alain Richard, Jean-Patrick Courtois, Alain Anziani, Yves Détraigne, Mme Éliane Assassi, M. Pierre-Yves Collombat, Mme Esther Benbassa , vice-présidents ; MM. François-Noël Buffet, Michel Delebarre, Christophe-André Frassa, Thani Mohamed Soilihi , secrétaires ; MM. Christophe Béchu, Jacques Bigot, François Bonhomme, Luc Carvounas, Gérard Collomb, Mme Cécile Cukierman, M. Mathieu Darnaud, Mme Jacky Deromedi, M. Félix Desplan, Mme Catherine Di Folco, MM. Vincent Dubois, Christian Favier, Pierre Frogier, Mme Jacqueline Gourault, MM. François Grosdidier, Jean-Jacques Hyest, Mlle Sophie Joissains, MM. Philippe Kaltenbach, Jean-Yves Leconte, Roger Madec, Alain Marc, Didier Marie, Jean Louis Masson, Michel Mercier, Jacques Mézard, François Pillet, Hugues Portelli, André Reichardt, Bernard Saugey, Simon Sutour, Mme Catherine Tasca, MM. René Vandierendonck, Jean-Pierre Vial, François Zocchetto .

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Sénat :

779 (2013-2014)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 12 novembre 2014, sous la présidence de M. Philippe Bas, président , la commission des lois a examiné le rapport de M. Hugues Portelli sur la proposition de loi constitutionnelle n° 779 (2013-2014), déposée par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues du groupe RDSE, visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable .

En premier lieu, le rapporteur a rappelé la pratique institutionnelle de la fonction présidentielle depuis 1958 , confortée par l'attitude des partis politiques, qui a conduit à donner un rôle politique dominant au Président de la République au-delà du texte de la Constitution, rôle accentué depuis le quinquennat adopté en 2000, en faisant de lui le chef de l'État et le chef de la majorité parlementaire , en effaçant la fonction de Premier ministre sauf en période de cohabitation.

Le rapporteur a ensuite exposé la finalité affichée de la proposition de loi constitutionnelle, selon laquelle rétablir le septennat en lui conférant un caractère non renouvelable pourrait permettre de revenir à une fonction présidentielle plus arbitrale et axée sur le long terme , donnant davantage d'espace au Gouvernement et au Parlement pour conduire l'action publique quotidienne. Cependant, le rapporteur a considéré que la proposition de loi, compte tenu du système politique français, aurait pour effet d' affaiblir la fonction présidentielle , en la déconnectant du rythme désormais accéléré du temps politique, en faisant réapparaître la cohabitation et en supprimant toute responsabilité politique en fin de mandat présidentiel.

La commission a estimé que la proposition de loi constitutionnelle présentait le mérite certain de poser le débat sur la présidentialisation et la personnalisation du pouvoir politique sous la V ème République , accentuées par le passage au quinquennat, qui a introduit un réel déséquilibre dans les institutions. Elle n'a pas approuvé pour autant son dispositif, jugé insuffisant et inapproprié pour corriger la prépondérance de la fonction présidentielle et rééquilibrer les institutions dans un sens plus démocratique. Plusieurs idées permettant de faire évoluer les institutions en ce sens ont été avancées.

La commission n'a pas adopté la proposition de loi constitutionnelle visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

La proposition de loi constitutionnelle n° 779 (2013-2014) déposée le 23 juillet 2014 par notre collègue Jacques Mézard et plusieurs membres du groupe RDSE vise à rétablir le septennat présidentiel, mais en interdisant son renouvellement. Elle rouvre un débat provisoirement clos en 2008, lorsque la révision constitutionnelle adoptée alors a interdit plus d'un renouvellement consécutif d'un mandat que la révision de 2000 avait ramené à cinq ans.

En fait, depuis 1958, ce débat n'a jamais cessé puisque la fonction présidentielle a vu son mandat modifié à trois reprises :

- la conception initiale de la Constitution du 4 octobre 1958 (article 7 de la Constitution) est celle d'un Président élu pour sept ans et rééligible, mais dont le corps électoral est celui des sénateurs : les élus locaux ;

- en 1962, le référendum du 28 octobre modifie l'article 7 en introduisant l'élection au suffrage universel direct ;

- en 2000, le mandat présidentiel est ramené à cinq ans à la suite du référendum constituant du 24 septembre ;

- en 2008, la révision constitutionnelle du 23 juillet a limité à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs.

Ces changements dans la rédaction de la Constitution ont traduit des changements importants dans l'exercice de la fonction présidentielle.

I. UN DEMI-SIÈCLE DE PRATIQUE PRÉSIDENTIELLE

Dans sa version initiale, la fonction présidentielle était définie comme celle d'un « arbitre » (article 5 de la Constitution), au-dessus des partis, qui veille à la continuité de l'État mais qui exerce des fonctions éminentes en cas de crise (articles 12 et 16 de la Constitution) et en tant que chef de l'État (défense et politique étrangère).

Cette conception n'a jamais été vraiment celle du Général de Gaulle, qui est intervenu d'entrée dans les décisions de politique intérieure en donnant ses directives au Gouvernement, qui a interdit au Premier ministre de se faire qualifier de chef du Gouvernement et qui a suppléé à l'absence d'élection au suffrage direct en recourant fréquemment au référendum (1961 et 1962).

La révision de 1962 n'a fait que concrétiser cette pratique en y ajoutant la légitimité donnée par l'élection populaire du chef de l'État. Pour autant, la conception gaullienne de la fonction n'a pas été infléchie : celle d'un chef d'État en charge du long terme (d'où le mandat de sept ans) mais qui vérifie qu'il bénéficie du soutien populaire en recourant régulièrement au référendum. Si ce soutien disparaît, le Président doit en tirer les conséquences en démissionnant, ce qui fut le cas à la suite de l'échec du référendum du 27 avril 1969.

Cette conception, charismatique pour les uns, plébiscitaire pour les autres, de la fonction présidentielle, n'a été partagée par aucun des successeurs du Général de Gaulle, qui se sont bien gardés de remettre en jeu leur mandat à l'occasion d'un référendum ou d'une dissolution. Le mandat présidentiel a donc été conçu et appliqué comme un mandat de sept ans exercé par celui qui est devenu, du fait du choix des partis de présenter leur leader à l'élection présidentielle d'une part, de la consolidation de la conception gaullienne du Président chef incontesté de l'exécutif et de la majorité parlementaire (car c'est le Général qui, dès la dissolution de 1962, puis lors de la dissolution de 1968, demande aux électeurs de lui donner une majorité pour agir) de l'autre, la « clé de voûte des institutions ».

Dès 1973, la question de la durée du mandat présidentiel a été soulevée par Georges Pompidou. Celui-ci avait compris que le risque pour le Président de se retrouver sans majorité parlementaire en cours de mandat, du fait de la durée inégale du mandat présidentiel et du mandat législatif, pouvait mettre en péril la primauté présidentielle. Son projet de réduction à cinq ans du mandat allait dans ce sens mais, bien qu'ayant une majorité dans les deux Chambres pour cette révision, il y renonça, craignant de ne pas atteindre les trois cinquièmes des suffrages exprimés au Congrès.

Le mandat présidentiel est donc resté à sept ans et la pratique des institutions n'a pas varié jusqu'à ce que trois « cohabitations » successives (1986-1988, 1993-1995 et 1997-2002) ne viennent réduire chaque fois aux acquêts constitutionnels la fonction présidentielle. Si pourtant la conception maximaliste de la fonction présidentielle a survécu à ces aléas, c'est que d'une part les partis (et notamment les partis dominants) sont restés fidèles à la primauté présidentielle en présentant leurs chefs à l'élection et surtout en organisant toute leur vie interne (calquée d'ailleurs sur les institutions de la V ème République) autour de la compétition pour la conquête et l'exercice du pouvoir présidentiel, et que d'autre part les premiers ministres de cohabitation (Jacques Chirac, Édouard Balladur et Lionel Jospin), qui ont été les seuls à bénéficier de tous les pouvoirs prévus par la Constitution, n'ont eu de cesse de devenir à leur tour Président de la République en étant candidat dès le lendemain de la cohabitation et en veillant durant celle-ci à préserver, même formellement, la fonction et les pouvoirs qu'ils aspiraient à exercer. Le fait qu'aucun d'entre eux n'ait réussi à être élu Président au lendemain de leur exercice du pouvoir gouvernemental n'a pas eu d'effet sur cette attraction.

C'est dans cet esprit qu'a été introduite la réduction à cinq ans du mandat présidentiel. Voulue par le Premier ministre de la plus longue cohabitation de la V ème République, cette réduction était une réponde directe à l'affaiblissement du pouvoir présidentiel afin d'éviter à l'avenir, autant que possible, de nouvelles cohabitations, en alignant la durée des mandats des députés et du Président de la République. Il est significatif que cette primauté présidentielle ait été assurée jusque dans les détails. En prolongeant la durée du mandat des députés élus en mai et juin 1997 (du fait de la dissolution d'avril) pour organiser désormais les élections législatives en juin, afin qu'elles se déroulent au lendemain de celle du Président et soient conditionnées par elle (ce qui était généralement réalisé par une dissolution comme en 1981 et en 1988 mais qui était difficilement concevable en 2002 à quelques mois de la fin du mandat), les initiateurs de cette double opération ont voulu garantir la primauté présidentielle et la fonction d'un Président à la fois chef de l'État et chef de la majorité parlementaire.

La pratique des institutions a parfaitement correspondu à leurs attentes puisqu'à trois reprises, le Président élu s'est trouvé conforté par l'élection d'une majorité de députés élus par le même mode de scrutin, sur son nom et son programme au terme d'un marathon électoral ponctué par quatre tours de vote en moins de trois mois.

La réduction à deux mandats consécutifs de l'exercice du pouvoir présidentiel lors de la révision constitutionnelle de 2008 (que Jacques Chirac avait refusée en 2000) n'a été qu'un ajustement destiné à éviter que la domination présidentielle ne prenne une dimension interminable. Pourtant, il ne faut pas oublier qu'à l'occasion de la révision de 2008, tant les travaux du « comité Balladur » que l'avant-projet de loi constitutionnelle prévoyaient un renforcement significatif des pouvoirs présidentiels, en attribuant au président « la détermination de la politique de la Nation » et en lui transférant l'intégralité de la politique de défense. Si la première hypothèse disparut dès le stade du projet de loi, la seconde ne franchit pas le stade des travaux parlementaires et ne fut pas soumise au Congrès.

Le renforcement du pouvoir présidentiel sur le Gouvernement n'a pas été consécutif à une modification des articles 5 et 20 de la Constitution, mais à l'affaiblissement des pouvoirs du Premier ministre dans ses rapports avec le Parlement (dans la procédure législative et l'engagement de responsabilité) : les pouvoirs nouveaux du Parlement bénéficiant essentiellement à la majorité parlementaire et celle-ci étant liée - à l'Assemblée nationale du moins - par une communauté de destin avec le Président de la République, il est inévitable que le dialogue entre le Président et la majorité parlementaire s'effectue par-dessus la tête du Premier ministre, comme la pratique des institutions l'a montré, notamment durant le deuxième quinquennat entre 2007 et 2012.

C'est dans ce contexte qu'est déposée la présente proposition de loi constitutionnelle de notre collègue Jacques Mézard, soumise à l'examen de votre commission.

II. LA PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE, SON OBJET ET SES EFFETS PRÉVISIBLES

La proposition de loi constitutionnelle a un objet manifeste et un objet latent.

Son objet manifeste est de revenir à une fonction présidentielle moins conjoncturelle, axée sur le long terme, et laissant le Gouvernement se charger, avec le Parlement, de l'action à court terme. Cette conception de l'action présidentielle doit cependant tenir compte de l'ambivalence du septennat tel qu'il a pu être pratiqué jusqu'en 2002. En effet, si le Général de Gaulle, le premier, sut manier le long terme pour gérer les domaines qu'il jugeait essentiels (défense, politique étrangère, mais aussi planification et aménagement du territoire, qui furent confiés dix ans durant aux mêmes titulaires), il laissa pourtant d'autres secteurs évoluer de façon chaotique, avec de fréquents changements de ministres, notamment l'éducation qui fut son talon d'Achille. Quant à la vision à long terme des présidents sur leur septennat, elle fut constamment corrigée par la crainte de voir des élections législatives intermédiaires ruiner leur leadership : Charles de Gaulle s'en inquiète en 1967, Georges Pompidou en 1973, Valéry Giscard d'Estaing en 1978 avant que François Mitterrand (en 1986 et 1993) et Jacques Chirac (en 1997) ne parviennent pas à surmonter l'obstacle. Vision à long terme et pilotage à court terme ont constamment cohabité avant 2002.

Le fait de ne pas permettre au Président sortant de se représenter n'est pas secondaire : il introduit en effet une scansion définitive qui n'est pas susceptible de rebondissement. Jusqu'à présent, les présidents qui ont été réélus après un premier septennat se sont trouvés dans deux cas de figure : le premier est celui du Général de Gaulle, réélu en 1965 et remportant les élections législatives de 1967 et 1968, mais quittant le pouvoir sur l'échec référendaire de 1969 ; le second est celui de François Mitterrand et Jacques Chirac, réélus après un premier septennat mais après avoir vécu une cohabitation durant la deuxième partie de leur premier mandat. Cette cohabitation a permis aux deux présidents sortants de laisser aux premiers ministres avec qui ils avaient cohabité, devenus leurs adversaires de l'élection présidentielle, la charge d'endosser le bilan : leur réélection a été ainsi facilitée par ce changement de statut. En sortant le Président en fin de mandat de la compétition de la nouvelle élection présidentielle, comme le propose la présente proposition de loi, les compteurs politiques seraient en quelque sorte remis à zéro, qu'il y ait eu ou non cohabitation durant le mandat qui s'achève. De même, le Président, n'étant plus encombré par le souci de mener une nouvelle campagne et de se fabriquer une nouvelle posture, peut se consacrer totalement à sa charge durant tout son mandat, qu'il y ait ou non cohabitation et même concevoir autrement l'usage de celle-ci.

Mais ces avantages supposés du septennat non renouvelable ne doivent pas masquer que le but latent des auteurs de la proposition de loi constitutionnelle est d'abaisser la fonction présidentielle. La lecture des discours et propositions de loi constitutionnelle de la tradition radicale sous la V ème République, à commencer par ceux de notre regretté président Gaston Monnerville, montre une nostalgie du régime parlementaire à la française, un régime où le chef de l'État est cantonné dans un rôle secondaire, celui d'une magistrature d'influence, laissant Gouvernement et Parlement jouer l'essentiel de la partition. Faute de pouvoir abolir l'élection directe du chef de l'État par le peuple, élection qui est la dernière à susciter une forte participation parce que considérée par l'opinion comme dotée d'un réel enjeu, les auteurs de la proposition de loi s'en remettent à la version de la fonction présidentielle la plus susceptible de l'amoindrir : celle d'un septennat condamné à se terminer en cohabitation et celle d'un septennat non renouvelable qui ne permettrait pas au Président de sortir de la cohabitation en retrouvant sa toute-puissance.

Peut-on justifier cette proposition en l'enracinant dans ce qui était le projet initial de la V ème République, ou du moins dans la rédaction originelle de la Constitution avant 1962 ? Ce serait oublier que les auteurs de la Constitution sont aussi ceux qui ont imposé le tournant de 1962 et imprimé la pratique présidentialiste qui s'imposera par la suite. Et la comparaison avec la III ème République montre que la pratique ultra-parlementaire qui s'est imposée après 1879 - la fameuse « constitution Grévy » - a été suffisamment forte pour empêcher tout retour ultérieur au texte de la Constitution ; Alexandre Millerand en fit la cruelle expérience.

Il est intéressant de relever que la plupart des propositions de révision de la Constitution qui ont fleuri sur le rôle du Président de la République depuis 1958 ont concerné le mandat présidentiel, comme si c'était de lui que dépendait le pouvoir du chef de l'État, et que rares sont celles qui ont proposé de limiter plus directement ses prérogatives, par exemple en introduisant une vraie séparation des pouvoirs entre lui et le Parlement, afin de l'empêcher de cumuler ses fonctions avec celles de chef de la majorité parlementaire.

La présente proposition de loi constitutionnelle a le grand mérite d'ouvrir un débat sur cinquante ans de pratique présidentielle. Mais elle ne propose en fin de compte qu'un retour en arrière qui fait fi du sentiment dominant des citoyens, fortement attachés à l'élection d'un Président doté de vrais pouvoirs et si possible d'un vrai leadership. Elle va également à rebours de l'évolution générale du temps politique vers une scansion plus brève qui permet d'affirmer la responsabilité politique du principal détenteur du pouvoir. Dans ces conditions, votre rapporteur ne peut que conclure au rejet de la proposition de loi constitutionnelle.

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Votre commission n'a pas adopté la proposition de loi constitutionnelle visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable.

EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 12 NOVEMBRE

M. Hugues Portelli , rapporteur. - Cette proposition de loi constitutionnelle de nos collègues du groupe RDSE, comme celle qu'ont récemment déposée des députés issus d'un groupe politique différent, rétablit le septennat sous une forme non renouvelable. J'ai vu son auteur en audition. Nous rouvrons ainsi un débat pendant depuis 1958. En effet, dans sa rédaction initiale, la Constitution prévoyait un septennat renouvelable pour un Président de la République élu par un collège électoral qui était celui du Sénat. Cette disposition a été modifiée en 1962, par un référendum, controversé, sur la base de l'article 11 de la Constitution, le Général de Gaulle proposant que le Président soit élu au suffrage universel direct. En 2000, la durée du mandat présidentiel a été réduite à cinq ans, par référendum, en application de l'article 89 de la Constitution. Enfin, depuis la réforme constitutionnelle de 2008, le Président de la République ne peut être réélu qu'une seule fois consécutive.

L'article 5 de la Constitution, inchangé depuis 1958, définit le Président de la République comme un arbitre doté de fonctions importantes en situation de crise (droit de dissolution de l'article 12 et pleins pouvoirs de l'article 16). Le Président de la République est également le chef des armées ; il négocie et ratifie les traités en politique étrangère. Cette conception d'un chef d'État n'était pas celle du Général de Gaulle. Dès le début de son premier mandat, il est intervenu dans le domaine de la politique intérieure, a surveillé l'ordre du jour du conseil des ministres et refusé au Premier ministre le titre de chef du Gouvernement, imité en cela par Georges Pompidou. Avant la révision de 1962, il n'a pas hésité à recourir au référendum à deux reprises pour vérifier qu'il conservait le soutien populaire dans l'exercice de son mandat. La révision de 1962 a concrétisé cette pratique.

Pour le Général de Gaulle, le septennat trouvait un correctif dans l'utilisation du référendum pour s'assurer de la confiance des Français, en cours de mandat. Par conséquent, lorsque le 27 avril 1969, 53 % des électeurs ont voté contre le projet de réforme du Sénat, il a démissionné. En revanche, ses successeurs se sont bien gardés de faire leur cette interprétation de la responsabilité du chef de l'État. Jamais ils n'ont utilisé l'article 11 à des fins constitutionnelles. Ils n'ont pas non plus engagé leur responsabilité. Même quand Jacques Chirac a échoué lors de la dissolution de 1997 ou lors du référendum de 2005, il s'est gardé d'en tirer des conséquences politiques, optant pour une pratique du septennat où le Président de la République s'accommode des situations politiques qui surgissent, sans remettre en cause sa responsabilité.

À trois reprises, la présidence a subi une cohabitation - l'invention du terme, sinon du concept, revient à Édouard Balladur -, période durant laquelle les pouvoirs du Président sont réduits aux acquêts de la Constitution, c'est-à-dire aux dispositions de l'article 5. Le Premier ministre gouverne en s'appuyant sur la majorité de l'Assemblée nationale.

En 2000, une révision, à l'initiative de plusieurs auteurs dont le Premier ministre de l'époque, réduit la durée du mandat présidentiel de sept à cinq ans dans le but de limiter la possibilité d'une cohabitation. Cette révision a paradoxalement été initiée par celui qui a le plus bénéficié des prérogatives du Premier ministre en temps de cohabitation, Lionel Jospin. La loi organique de 2001 a mené la logique à son terme, en inversant le calendrier électoral, de sorte que les élections des députés sont désormais conditionnées par celle du Président. François Mitterrand avait dissous à deux reprises l'Assemblée nationale pour obtenir une majorité compacte au lendemain de son élection. La loi organique de 2001 répond à la difficulté rencontrée par Jacques Chirac d'organiser une dissolution juste avant la fin de son mandat.

Lors de l'institution du quinquennat en 2000, Jacques Chirac était hostile à toute limitation du nombre des mandats consécutifs, c'était le « quinquennat sec ». La révision de 2008 a fait de l'élection présidentielle la seule élection où le nombre des mandats consécutifs est limité - suivant en cela le modèle américain.

La proposition de loi constitutionnelle que nous examinons aujourd'hui a deux objets, l'un affiché, l'autre latent. D'une part, elle rend la fonction présidentielle moins conjoncturelle, axée sur le long terme. De Gaulle a été le premier à manier le long terme dans les domaines essentiels (défense, politique étrangère, planification, aménagement du territoire), avec des responsables politiques et administratifs qui sont restés en place longtemps. Dans d'autres secteurs, sa gestion des affaires a été plus chaotique : à l'éducation nationale et aux universités, talon d'Achille de sa politique, les ministres se sont succédé à une cadence rapide.

La vision à long terme des présidents dans le cadre du septennat s'est toutefois constamment heurtée à la crainte de voir leur autorité ruinée par la perte des élections législatives. Cela a été le cas pour de Gaulle en 1967, pour Pompidou en 1973, avec déjà le projet du quinquennat, pour Valéry Giscard d'Estaing en 1978, avec le discours de Verdun-sur-le-Doubs, pour Chirac et Mitterrand, à trois reprises. Tous avaient une vision à long terme, mais un pilotage à court terme de l'action politique.

Le non-renouvellement du mandat présidentiel introduirait une scansion définitive qui interdirait tout rebondissement. Tandis que le Général de Gaulle, réélu, a été confronté à l'échec et a préféré partir, François Mitterrand et Jacques Chirac ont été réélus après une cohabitation : le Premier ministre avec lequel ils ont cohabité est devenu leur adversaire à l'élection présidentielle. Plutôt que de tirer parti de leur fonction de Premier ministre, chacun - Jacques Chirac en 1988, Édouard Balladur en 1995 et Lionel Jospin en 2002 - a préféré essayer de devenir Président de la République, sans tirer les conclusions de ces échecs : c'est le Premier ministre de cohabitation qui est le candidat du bilan, le Président retrouvant la capacité de se forger un nouveau statut politique : François Mitterrand avait été simultanément chef de l'État et chef de l'opposition, situation assez confortable...

L'objet latent de la proposition de loi constitutionnelle, que son auteur ne cherche pas à cacher, est l'abaissement de la fonction présidentielle. Toutes les révisions proposées par des personnalités de tradition radicale depuis 1958, à commencer par Gaston Monnerville, sont marquées par la nostalgie du régime parlementaire et veulent donner au Président de la République un rôle secondaire. Faute de pouvoir abolir son élection au suffrage universel direct - seule élection qui suscite un engouement dans la population - la proposition crée un septennat condamné à se terminer en cohabitation et non renouvelable. Y voir un retour à la version originelle de la Constitution de 1958 reviendrait à oublier que les auteurs de celle-ci ont imposé le tournant de 1962 et la pratique présidentialiste qui a suivi.

Dans la mise en oeuvre de la III ème République, à l'inverse, la pratique ultra-parlementaire s'est imposée à partir de 1879, avec la fameuse « constitution Grévy ». Alexandre Millerand, Président de la République après la victoire du cartel des gauches...

M. Alain Richard . - ... mais élu par la Chambre bleu horizon !

M. Hugues Portelli , rapporteur . - ... n'ayant pas pu résister à la Chambre des députés, a dû démissionner. Il est impossible de revenir sur une pratique durablement installée.

La proposition de révision de Jacques Mézard, si elle a le mérite de relancer le débat sur la fonction présidentielle, propose un retour en arrière à l'opposé du sentiment des citoyens, formellement exprimé par un référendum en 2000 - c'est la seule révision constitutionnelle adoptée régulièrement par référendum. Elle est en outre à rebours de l'accélération actuelle du temps politique, illustrée par la réduction du mandat des sénateurs.

M. René Vandierendonck . - Nous pourrions rétablir le mandat de neuf ans...

M. Hugues Portelli , rapporteur . - Je propose donc de ne pas adopter cette proposition de loi constitutionnelle.

M. Philippe Bas , président . - Les raisons de l'institution du septennat furent des plus contingentes. S'il a été reconduit par la IV ème et la V ème Républiques, la fonction a considérablement évolué depuis 1958. Il fait figure d'exception dans les régimes démocratiques européens...

M. Michel Mercier . - Vous oubliez l'Italie !

M. Philippe Bas , président . - ...au regard des pouvoirs confiés au Président. Depuis 1981, aucun septennat ne s'est déroulé sans cohabitation ; c'était elle qui était visée par la révision de 2000. Cette proposition veut rétablir la présidence dans une fonction arbitrale. À condition que cela soit souhaitable, suffirait-il d'instituer un septennat non renouvelable pour y parvenir ? Cette dernière disposition est préoccupante. Une cohabitation sans espoir de réélection affaiblirait la fonction présidentielle. Un tel choix doit être opéré en connaissance de cause.

Le calendrier actuel de l'élection présidentielle est déterminé par la date de la mort du président Pompidou, il n'a pas été décidé. En revanche, les élections législatives avaient lieu en mars malgré les dissolutions ; elles sont désormais en juin, tant que les élections présidentielles se déroulent à la même date.

M. Alain Richard . - Malgré l'exposé lumineux d'Hugues Portelli, mon appréciation est différente de la sienne. La révision de 2000 a créé un déséquilibre dans un système devenu présidentialiste sans cesser d'être dualiste. Il repose aujourd'hui sur une élection présidentielle intensément anticipée : nous souffrons du syndrome de la campagne pré-présidentielle permanente que l'on peut observer depuis un siècle aux États-Unis. Le Président de la République garde néanmoins un pouvoir de dissolution d'une chambre qui est pourtant élue dans la fidélité à ses options. Nous pouvons considérer que la situation actuelle ne peut être que transitoire.

Lionel Jospin sympathisait d'ailleurs avec le régime présidentiel. Dans le tohu-bohu des idées plus ou moins structurées de changement institutionnel qui circulent, il y a une ambivalence entre le rétablissement, largement utopique, d'un régime parlementaire et le renforcement des pouvoirs législatifs du Parlement, au prix de la suppression de la fonction de Premier ministre et donc de la responsabilité devant le Parlement, pour basculer dans un régime présidentiel.

Le Président de la République est élu au suffrage direct dans quatre régimes parlementaires en Europe : en Pologne, en Autriche, en Finlande et au Portugal. Pour ceux qui veulent, comme moi, éviter des emportements redoutables pour la gouvernabilité du pays et revenir à une fonction présidentielle forte mais arbitrale, la proposition de loi est une condition nécessaire, quoique non suffisante. Ce qui la rendrait suffisante serait que les deux familles politiques habituellement au second tour changent le profil de leurs candidats - cela aurait été possible en 2002. Tant que nous en restons au quinquennat et aux législatives consécutives, les candidats seront des « super » premiers ministres, se présentant avec un programme gouvernemental, de sorte qu'il est impossible de retrouver la fonction de Président arbitre. Le droit de dissolution est désuet : on voit mal le Président congédier la majorité dont il a bénéficié, car le précédent de 1997 reste dans les mémoires.

Les fonctions du Président, à l'exception de l'article 16, reproduisent presque à l'identique les dispositions de la loi constitutionnelle de 1875, qui étaient dans l'esprit de leurs auteurs celles d'un monarque constitutionnel. Le septennat était d'ailleurs calqué sur l'espérance d'un rétablissement de la monarchie. La position du rapporteur est étayée, mais la proposition de loi a ses mérites pour qui veut un régime démocratique et un pays gouvernable.

M. Jean-Yves Leconte . - La révision de 2000 a cassé la flexibilité de la Constitution. Avec le phasage absolu entre élection présidentielle et élections législatives, l'élection de l'Assemblée nationale dépend totalement de celle du Président de la République. Quand bien même celui-ci se retrouverait dans la même situation qu'en 1974, il dissoudrait malgré tout. Les partis politiques s'organisent autour de l'élection présidentielle.

Mme Cécile Cukierman . - Nous l'avons vu !

M. Jean-Yves Leconte . - Ils changent de nature et voient s'affronter des écuries plutôt que des idées. Que le pouvoir exécutif n'ait pas réussi à convaincre les Français à l'issue des trois derniers quinquennats incite à réfléchir à une évolution de nos institutions.

Le projet principal de la politique française ne peut être que de déterminer la place de notre pays dans l'Europe. Comme cela ne dépend pas que de l'élection du Président, prétendre la réorienter tient de l'imposture. Nous sommes la seule démocratie européenne en voie de présidentialisation : tous les autres pays ont des régimes parlementaires. Cela empêche un discours de vérité sur l'Europe ; la proposition de loi a l'avantage de renverser la tendance.

M. Christophe Béchu . - Nous avons découvert avec le rapport d'Hugues Portelli combien notre collègue passionne ses étudiants...

Quelque chose ne va pas dans le système actuel. Le déplacement en 2000 d'un seul curseur a causé un déséquilibre global de nos institutions. Une pratique nouvelle, celle des primaires, n'a fait qu'accentuer le raccourcissement du temps politique : déjà passé de sept à cinq ans, l'intervalle entre deux campagnes est réduit d'un an par la primaire, et d'une autre année par les déclarations de candidature. Dans notre famille politique, l'intervalle n'a été que de douze  mois... L'élection présidentielle domine aujourd'hui et biaise tout le débat politique.

Un rééquilibrage pourrait être tentant, mais j'ai peur de jouer les apprentis sorciers en ne déplaçant que le curseur du septennat non renouvelable, qui pourrait causer un nouveau déséquilibre. Outre le non-alignement des majorités, il y aura forcément un moment où le Président n'aura plus rien à perdre s'il n'est pas rééligible, car il ne sera plus responsable. Le quinquennat biaise notre logique institutionnelle. Mieux aurait valu que le premier vainqueur d'une primaire perde : le fait que 100 % des vainqueurs aient gagné est une incitation à s'y plier. Au lieu d'épouser un effet de mode comme avec le quinquennat, il faudrait envisager un toilettage en profondeur. Sans aller jusqu'à une VI ème République, nous pouvons trouver un nouvel équilibre entre Président de la République et Parlement.

Je ne voterai pas cette proposition de loi.

M. Michel Mercier . - La seule constante dans l'histoire constitutionnelle depuis 1875 - et nous pourrions sans doute remonter à la Monarchie de Juillet - est la distance du texte à la pratique. Mes préférences personnelles vont à la république parlementaire, cet idéal démocratique que nous n'avons pas souvent rencontré. Depuis 1958, nous assistons à une vraie personnalisation - plus qu'à une présidentialisation - du pouvoir, comme nous l'enseignait Jacques Cadart.

M. Philippe Bas , président . - Pas seulement en France.

M. Michel Mercier . - Comment lutter contre cette personnalisation ? La cause n'en est pas tant le quinquennat que la suppression de fait de l'autonomie des élections législatives. Les deux derniers présidents ont eu presque les mêmes mots : le Premier ministre exécute la politique que j'ai choisie, il fait ce que je dis... Sauf à prendre les Français pour des girouettes, il est naturel qu'ils votent un mois après comme à la présidentielle. Lorsque le président Mitterrand a demandé à la télévision : « De grâce, ne me donnez pas une majorité ! », il l'a eue quand même, et avec Michel Rocard en prime ! Certes, c'était avec le soutien de quelques centristes occasionnels - comme c'était avec l'approbation d'un grand professeur de droit constitutionnel, cela ne posait pas de problème.

Comment avoir une vraie démocratie ? La question de fond est celle du Premier ministre : il ne joue un rôle qu'en période de cohabitation, désormais difficile à imaginer. La France peut-elle continuer à être représentée internationalement par deux personnes ? Elle est le seul État à être représenté par le chef de l'État au Conseil européen ; au G20, elle l'est par le Président, avec le Premier ministre en période de cohabitation - nous avons vu ce que cela donnait avec François Mitterrand et Édouard Balladur, qui disaient exactement le contraire l'un de l'autre.

Ne faudrait-il pas préférer améliorer le système actuel, plutôt que de poursuivre un rêve, dont je crains qu'il ne se réalise jamais, et mettre en accord le droit et le fait ?

M. Hugues Portelli , rapporteur . - Argument peu glorieux mais important : une révision constitutionnelle d'initiative parlementaire doit être adoptée par les deux chambres puis par référendum. Soumettre une telle révision au référendum n'améliorerait pas grandement notre image. Il faut parfois s'abstenir de prendre des initiatives qui vont tellement à l'encontre du sentiment dominant.

Alain Richard explique que, dans les régimes parlementaires où le président est élu au suffrage direct, les partis sont d'accord pour présenter leurs leaders pour le poste de premier ministre, et non à celui de président, qui est réservé à des personnalités en fin de parcours ou d'importance secondaire. Dans le cas du Portugal, de la Pologne, de la Croatie et de la Finlande, où le président était véritablement le chef de l'exécutif, la constitution a été révisée pour transférer certains de ses pouvoirs au premier ministre, notamment en matière européenne, tout en gardant l'élection au suffrage direct. Ils ont alors pris le modèle irlandais, où la présidence a un rôle sociétal. Le cas le plus intéressant est l'Islande, où l'élection n'a lieu que si les partis ne se sont pas mis d'accord sur un nom.

La personnalisation est un argument réversible. Nous constatons la même personnalisation de la vie politique en Allemagne et au Royaume-Uni, où le chef du parti ayant la majorité à la Chambre est un patron incontesté de la vie politique. Cela ne fonctionne pas ainsi dans un seul cas : en l'absence de majorité. David Cameron a ainsi dû renoncer, à la demande des libéraux, à l'usage du droit de dissolution.

Le débat constitutionnel en France est marqué par l'obsession de réduire le pouvoir du Président. Or le problème réside aussi dans les autres pouvoirs. Si nous ne voulons pas que le Président soit à la fois le chef de l'État et le chef de la majorité, nous devons supprimer le droit de dissolution et la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement.

La France est un pays deux fois centralisé : politiquement, parce que le Président de la République fait tout, et administrativement, à cause de l'absence de contre-pouvoirs, notamment locaux, contrairement à l'Allemagne, où les ministres-présidents des Länder parlent d'égal à égal avec le chancelier au Bundesrat. Avec ce cumul de centralisations au profit du Président, notre système ne peut pas être démocratique, au sens de M. Mercier.

M. Philippe Bas , président . - Ces régimes très différents sur le papier fonctionnent de la même façon : le fluide politique emprunte des voies différentes, mais aboutit à une démocratie de l'alternance, avec la nuance du fédéralisme allemand et la possibilité pour la majorité britannique de changer de chef à l'approche des élections, comme ce fut le cas pour Tony Blair et Margaret Thatcher. On ne pourrait pas l'imaginer pour notre pays à l'approche de l'élection présidentielle. Mettre fin à la personnalisation du pouvoir me semble une ambition difficile à réaliser.

La proposition de loi constitutionnelle n'est pas adoptée.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

M. Jacques Mézard , auteur de la proposition de loi

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