II. LE PROTOCOLE, UN NOUVEAU MÉCANISME DE PLAINTES
A. L'ENJEU : UNE MISE EN OEUVRE DU PACTE AU-DELÀ DES PROMESSES
La présente ratification vise à renforcer la mise en oeuvre du PIDESC , en permettant aux personnes dont les droits n'ont pas été respectés, dans le cadre notamment d'expulsions forcées, de refus de scolarisation, de sécurité alimentaire et de soins ou encore des conditions de travail de faire valoir leurs droits.
En effet, ainsi que l'a constaté Mme Geneviève Garrigos, Présidente d' Amnesty International France : « Les droits économiques, sociaux et culturels (DESC) sont toujours considérés comme des droits de « seconde génération », des aspirations politiques qui ne pourraient être satisfaites qu'en périodes de vaches grasses ou pire, des avantages sociaux qui alourdiraient les finances de l'Etat et nuiraient à la santé économique et à la compétitivité des entreprises.
Or avec les droits civils et politiques (DCP), les DESC constituent le socle des droits indispensables au respect à la dignité humaine et consacrés par la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948. Des droits que les Etats ayant ratifiés le Pacte international relatif aux Droits économiques sociaux et culturels (PIDESC), en vigueur depuis 1976, se sont engagés à respecter.
Cependant des millions de personnes continuent d'en être privées, creusant ainsi le fossé entre les plus riches et ceux qui s'enfoncent dans la pauvreté. Des violations qui entachent la dignité, la sécurité et la liberté en toute impunité. » 9 ( * )
C'est pourquoi, le Protocole tend à lutter contre la violation de ces droits, en accordant aux victimes, individuellement ou en groupe, un recours effectif contre le manquement des Etats à l'égard de leur engagement de respecter les droits énoncés dans le Pacte.
Ce mécanisme de plainte a également pour conséquence de préciser la portée et le contenu des droits , d'une part, et d'en prévenir la violation , d'autre part. On peut espérer une évolution des législations nationales en cas de plainte contre un Etat.
Votre rapporteure relève que dès 1998, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) a appelé à une adoption rapide d'un Protocole relatif au PIDESC. Réitérant sa position dans un avis du 5 mai 2011 relatif au Protocole, elle « recommande au gouvernement de signer et de soumettre à ratification dans les meilleurs délais le Protocole facultatif relatif aux droits économiques sociaux et culturels » 10 ( * ) .
La Commission n'a émis aucune réserve ou objection dans la perspective de ratification du Protocole. Au contraire, elle relève l'importance de ce Protocole pour la cohérence du système international de protection conventionnelle des droits de l'Homme et celle des engagements de la France en matière de droits économiques, sociaux et culturels.
De même, les organisations non gouvernementales se sont fortement mobilisées en faveur d'une large ratification du Protocole.
Enfin, votre rapporteure rappelle qu'un tel système existe déjà dans le cadre des droits civils et politiques 11 ( * ) . Bien que les deux pactes soient intimement liés 12 ( * ) , une inégalité existe entre les victimes de violation des droits civils et politiques et celles de droits économiques, sociaux et culturels. Les premières peuvent introduire un recours auprès du Comité des droits de l'Homme contrairement aux secondes.
Le Protocole tend à réparer cette inégalité, en introduisant un nouveau mécanisme de recours international. Il contribue donc à réaffirmer l'universalité, l'indivisibilité et l'interdépendance de tous les droits de l'Homme 13 ( * ) ainsi que leur égalité d'importance .
* 9 In Huffingtonpost.fr le 3 mai 2013
* 10 Cf. Annexe.
* 11 Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966, adopté le même jour que le PIDESC, ne prévoit pas non plus un mécanisme de plainte. Ce dernier a été introduit dans le Protocole facultatif du 16 décembre 1966.
* 12 Ce constat avait été dressé lors de la Conférence mondiale sur les droits de l'Homme, tenue à Vienne en 1993, qui a clairement réaffirmé que « les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés ».
* 13 Rappelons que La Charte Internationale des Droits de l'Homme est composée de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.