B. DE SOLIDES GARANTIES EN FAVEUR DE LA FRANCE

Contrairement à la situation qui aurait prévalu si FATCA était resté un dispositif unilatéral, l'accord signé entre la France et les États-Unis s'accompagne d'un certain nombre de garanties qui offrent à la France, à ses établissements financiers et à leurs clients une véritable sécurité juridique . Ces garanties sont prévues aux articles 4 et 7 du traité.

Ainsi, le paragraphe 7 de l'article 4 prévoit que « la France peut utiliser et autoriser ses Institutions financières à utiliser une définition de la réglementation pertinente édictée par le Trésor des États-Unis en lieu et place de la définition correspondante du présent Accord » : en d'autres termes, la France pourrait invoquer les définitions produites dans les commentaires administratifs de l'IRS si celles-ci étaient plus favorables que celles de l'accord, ce qui constitue une garantie supplémentaire pour les banques françaises 9 ( * ) . Ces commentaires administratifs américains sont susceptibles de faire l'objet de modifications futures de la part de l'administration américaine, mais la France ne serait pas tenue d'appliquer ces dispositions si elles lui étaient défavorables .

En complément, le C du I de l'annexe I prévoit que la France peut autoriser ses institutions financières à choisir entre les démarches d'identification prévues par l'annexe I ou celles qui figurent dans les commentaires administratifs du Trésor américain , soit pour l'ensemble des comptes concernés, soit pour un groupe de comptes d'un même secteur d'activité ou d'un même établissement financier.

Surtout, l'article 7 de l'accord prévoit une « clause de la nation la plus favorisée » de portée générale : ainsi, « la France bénéficie de toute clause plus favorable accordée à une autre juridiction partenaire dans le cadre d'un accord bilatéral » similaire. Il appartient aux États-Unis d'informer la France de toute clause plus favorable 10 ( * ) , et d'en assurer automatiquement l'application - sauf si la France le refuse. Cette clause de la nation la plus favorisée s'étend à la question de la réciprocité (cf. infra ).

Pour résumer, les termes de l'accord pourraient évoluer dans un sens plus favorable pour la France, mais en aucun cas dans un sens moins favorable .

C. LA QUESTION CENTRALE DE LA RÉCIPROCITÉ

L'accord franco-américain prévoit explicitement la réciprocité des transferts d'informations au paragraphe 1 de son article 6 : « Réciprocité. Le Gouvernement des États-Unis convient de la nécessité de parvenir à des niveaux équivalents d'échanges automatiques de renseignements avec la France ». Il s'agit là d'un élément clé du modèle « FATCA 1 » négocié à l'initiative des pays du « G5 », dont fait partie la France.

Toutefois, cette réciprocité ne s'étend pas au solde des comptes ni à la valeur de rachat des contrats d'assurance . Cette situation ne résulte pas d'une volonté du Gouvernement américain dans les négociations mais d'un blocage institutionnel interne aux États-Unis. En effet, la transmission par l' Internal Revenue Service d'informations bancaires est subordonnée à l'accord du Congrès , où les élus Républicains - notamment Rand Paul, sénateur de l'État du Kentucky, et Bill Posey, représentant de l'État de Floride - bloquent actuellement la possibilité de communiquer le solde des comptes bancaires, invoquant l'inconstitutionnalité de ces transferts d'informations.

Dans une lettre du 24 avril 2013 adressée au ministre français de l'économie et des finances Pierre Moscovici, le secrétaire américain au Trésor Jack Lew a fait part de sa compréhension envers la demande de la France ; il indique toutefois qu'il ne peut pas s'engager sur une date, compte tenu des blocages au Congrès.

Le sujet a par ailleurs été évoqué lors du déplacement du bureau de votre commission des finances en mai 2013 aux États-Unis.

L'accord a donc été signé sans que ce point ait été définitivement tranché. Toutefois, le Gouvernement américain s'est engagé à transmettre ces informations dès que le droit interne le permettra : l'article 6 de l'accord prévoit ainsi explicitement que « l e Gouvernement des États-Unis s'engage à améliorer davantage la transparence et à renforcer la relation d'échange avec la France en continuant à adopter des mesures de nature réglementaire et en soutenant l'adoption de lois appropriées afin d'atteindre ces niveaux équivalents d'échanges automatiques réciproques de renseignements ».

Le troisième alinéa de la déclaration d'intention annexée à l'accord réitère cet engagement : « lorsque la législation des États-Unis autorisera la déclaration d'un quelconque renseignement eu égard auquel les États-Unis ont exprimé leur engagement de mettre en oeuvre la réciprocité (...), notamment le solde du compte , les États-Unis s'engageront à déclarer ce renseignement complémentaire à l'autorité compétente française conjointement aux renseignements déclarés en application de l'alinéa b du paragraphe 2 de l'article 2 de l'Accord ».

Il convient toutefois de ne pas surestimer les conséquences pour la France de l'absence de réciprocité complète à ce stade.

D'une part, les comptes seront bien identifiés par l'IRS, et rien n'empêchera l'administration française d'obtenir, dans un second temps, communication du solde des comptes dans le cadre habituel de l'échange à la demande prévu par la convention fiscale franco-américaine en vigueur 11 ( * ) .

D'autre part, la réciprocité est soumise à la « clause de la nation la plus favorisée » prévue à l'article 7 de l'accord (cf. supra ). En d'autres termes, si les États-Unis venaient à accorder la réciprocité à un autre pays, la France serait en droit d'en réclamer le bénéfice pour elle-même - et réciproquement.


* 9 Le document de référence de l'IRS est le Federal Register/Vol. 78 No.18/M/Rules and Regulations, 26 CFR Parts 1 and 301 TD 9610, RIN 1545-BK68 du 28 janvier 2013, intitulé « Regulations Relating to Information Reporting by Foreign Financial Institutions and Other Foreign Entities », ainsi que ses notices complémentaires. Selon les informations transmises à votre rapporteure, la dernière mise à jour de ces commentaires date du 20 février 2014 et vient préciser certaines définitions et les aligner avec les accords signés par les États-Unis.

* 10 Ces clauses figurent dans le modèle « FATCA 1 » publié par le Trésor américain, qui est régulièrement mis à jour. Ce modèle a donc connu des modifications mineures depuis la signature de l'accord du 14 novembre 2013 ; celles-ci s'appliquent à la France dans le seul cas où elles sont plus favorables.

* 11 Article 27 de l'accord franco-américain du 31 août 1994 précité.

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