B. UNE ÉVOLUTION DES EMPLOIS REFLÉTANT LA TRAJECTOIRE PRÉVUE PAR LA LPM

1. Précisions méthodologiques sur la notion de plafond d'emplois

L'article 6 de la LPM 2009-2014 définit la politique d'effectifs par deux dispositions dont la compatibilité ne va pas nécessairement de soi en pratique :

- des réductions d'effectifs, définies par rapport à l'année précédente en équivalents temps plein (ETP), notion dont on rappelle qu'elle correspond aux effectifs « physiques » à la mi-année ;

- des plafonds d'emplois, notion budgétaire définie en équivalents temps plein travaillé (EPTP), c'est-à-dire en ETP corrigés en fonction de leur présence effective sur l'année, définis en niveau.

Le tableau ci-après indique les hypothèses retenues pour mettre ces deux notions en cohérence.

La notion de plafond d'emplois doit être retenue en priorité, dans la mesure où elle permet davantage des comparaisons d'une année sur l'autre.

2. Une sous-exécution chronique des plafonds d'emplois à hauteur de plus de 4 000 ETPT

Comme le montre également le tableau ci-après, il est prévu une réduction des effectifs à hauteur de 53 310 ETPT sur la période 2008-2016, essentiellement concentrée sur la durée initiale de la LPM (2009-2014).

Le plafond d'emplois doit ainsi être abaissé de 314 200 ETPT en 2009 à 276 000 ETPT en 2014, soit une baisse de 38 200 ETPT (ou 12 % des effectifs du plafond d'emplois en 2009) .

L'année 2013 poursuit la mise en oeuvre de la diminution du format des armées, avec une diminution du plafond d'emplois des programmes de la mission « Défense » de 7 162 postes à périmètre constant.

Si les plafonds fixés par les lois de finances se conforment globalement à la LPM (malgré des écarts annuels de l'ordre de 200 à 500 ETPT au-dessus du plafond de la LPM), ces plafonds sont sous-exécutés de manière chronique, à hauteur d'environ 4 500 ETPT (4 197 en 2010, 4 775 en 2011 et 4 480 en 2012) .

Manifestement, cette sous-exécution intervient à périmètre constant , hors transfert (opéré en 2009) de la délégation à l'information et à la communication de la défense, ainsi que du service historique de la défense, de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » vers la mission « Défense ».

Cette sous-exécution s'accompagne du fait que la déflation des effectifs a été plus rapide que prévu en 2008 (à périmètre courant, 7 842 ETPT ont été supprimés en exécution, alors que la LFI et la LPM prévoyaient une diminution de seulement 4 852 ETPT, soit un différentiel de 2 990 ETPT).

Mais il peut également s'agir d'un phénomène structurel plus ancien, sur lequel vos rapporteurs spéciaux ne disposent pas de l'ensemble des éléments d'explication nécessaires.

Plusieurs critères peuvent intervenir, comme le taux de non-renouvellement des contrats d'engagement, les difficultés éventuelles de reclassement et des décalages entre les prévisions de départs en retraite et les départs effectifs.

Il n'apparaît toutefois pas d'écart entre les prévisions et les réalisations de reclassement mesurées par l'indicateur n° 1 associé à l'objectif n° 5 du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », et qui vise à « Améliorer l'accès à l'emploi en maîtrisant les coûts ».

Les suppressions d'effectifs prévues par la loi de programmation militaire : mises en cohérence des chiffres en ETP et en ETPT figurant à l'article 4 de la loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014

(mission « Défense », à périmètre 2008)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Total

2009-2014

4 852

7 999

7 926

7 577

7 462

7 462

7 462

2 570

53 310

45 888

+ Effet report n-1

2 426

4 000

3 963

3 789

3 731

3 731

3 731

1 285

- Effet report n+1

- 2 426

- 4 000

- 3 963

- 3 789

- 3 731

- 3 731

- 3 731

-1 285

Suppressions d'ETPT en résultant

2 426

6 426

7 963

7 752

7 520

7 462

7462

5 016

1 285

53 310

30 697

Plafonds d'emplois en ETPT (chiffres figurant dans la LPM)

320 612

314 200

306 200

298 500

291 000

283 500

276 000

Plafonds en LFI (2009, 2010, 2011, 2012), et nouvelle programmation (2013 et 2014)

320 612

314 670

306 564

299 006

291 611

283 735

276 253

Exécution (1)

316 381

309 848

302 367

294 231

287 131

Sous-exécution par rapport à la LFI

4 231

4 822

4 197

4 775

4 480

ETP : équivalent temps plein (emploi corrigé pour prendre en compte sa durée hebdomadaire). Défini à un moment précis. ETPT : équivalent temps plein travaillé (ETP corrigé pour prendre en compte la durée de présence de la personne sur l'année). Défini en moyenne annuelle.

Explication : les suppressions d'emplois en ETP sont définies à mi-année. Une suppression de N ETP une année n signifie donc que les ETP diminuent de N entre le 1 er juillet de l'année n-1 et le 1 er juillet de l'année n . Si on suppose que la diminution est linéaire, cela signifie que l'emploi (défini en ETPT) diminue de N/2 l'année n-1 puis N/2 l'année n .

(1) Pour 2012, il s'agit de l'exécution prévisionnelle actualisée au 30 juin.

Sources : ministère de la défense et rapport de nos collègues députés Patrick Beaudouin et Yves Fromion sur le projet de loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014 (commission de la défense de l'Assemblée nationale, n° 1615, XIII e législature, 8 avril 2009)

Lors de l'examen des crédits de la mission « Défense » dans le cadre du projet de loi de règlement pour 2011, vos rapporteurs spéciaux avaient déjà fait part de leurs interrogations à ce sujet, qui rejoignaient celles de la Cour des comptes et des services de contrôle budgétaire et comptable ministériel (CBCM). Ils avaient déploré le manque d'outils disponibles pour effectuer des calculs fiables :

« Comme l'observe le CBCM dans son rapport annuel 2011, l'objectif fixé par la loi de programmation militaire (LPM) de diminution de 8 250 ETP au ministère de la défense n'a pas été atteint, puisque seulement 7 946 ETP ont été supprimés (hors transferts).

« Cependant, l'objectif de déflation des effectifs sur les quatre derniers exercices est dépassé, puisqu'il s'est établi à 31 131 pour une cible de 29 800 suppressions.

« La sous-réalisation chronique du plafond d'emplois traduit donc, à moyen terme, une diminution des effectifs plus rapide que prévu, sous une réserve - de taille - ainsi libellée par le CBCM : « ces chiffres doivent être pris avec prudence compte tenu des problèmes liés à la base de départ du calcul » 15 ( * ) » 16 ( * ) .

Toujours sans réponse , la question d'une sous-réalisation chronique du plafond d'emplois devra être posée dans le cadre des travaux du Livre blanc et de la prochaine LPM .

Elle est par ailleurs corrélée à l'attractivité de la carrière militaire, et constitue l'un des enjeux ayant motivé la demande à la Cour des comptes d'une enquête, en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur les primes et indemnités du ministère de la défense.


* 15 Rapport annuel du CBCM près le ministère de la défense et des anciens combattants relatif à l'exécution budgétaire et à la situation financière et comptable ministérielle pour l'année 2011. Citation p. 27.

* 16 Sénat, rapport n° 658, tome II (2011-2012). Analyse de la mission « Défense » par vos rapporteurs spéciaux.

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