B. UNE MISSION QUI SUBIT PLEINEMENT LES EFFETS DE LA POLITIQUE DE RÉDUCTION DES NICHES FISCALES
1. L'effort fiscal de l'Etat en faveur de l'outre-mer est en baisse
Comme l'indique le tableau ci-après, le montant des dépenses fiscales sur impôt d'Etat rattachées à la mission « Outre-mer » diminue fortement entre 2012 et 2013, puisqu'il subit une baisse de 126 millions d'euros, soit - 3,9 % . Cette diminution fait suite à une précédente baisse de 150 millions l'an dernier.
Cette évolution résulte principalement de deux évolutions négatives :
- le coût de la défiscalisation au titre de l'investissement productif visé à l'article 199 undecies B du CGI passe de 480 millions d'euros en 2012 à 410 millions d'euros en 2013. Cette diminution résulte du « coup de rabot » de 15 % voté en loi de finances pour 2012, qui a réduit le taux de l'avantage fiscal de 45 % à 38,25 % ;
- le montant de la dépense fiscale à raison des investissements locatifs dans le logement libre et intermédiaire, visé à l'article 199 undecies A du CGI, passe de 355 millions d'euros à 265 millions. Cette baisse de 90 millions est due à trois facteurs :
o la suppression de l'avantage fiscal pour le logement libre pour les investissements engagés après le 31 décembre 2011 ;
o la suppression de l'avantage fiscal pour le logement intermédiaire pour les investissements engagés après le 31 décembre 2012 ;
o le « coup de rabot » de 15 % voté en loi de finances pour 2012 qui a réduit le taux de l'avantage fiscal de 35 % à 30 % pour ce type d'investissement.
Le coût des principales dépenses fiscales
sur impôts d'Etat
rattachées à la mission
« Outre-mer »
(en millions d'euros)
Dispositif |
Base légale |
Impôt concerné |
Chiffrage
|
Chiffrage pour 2012 |
Chiffrage
|
Taux de TVA minoré |
Art. 296 du code général des impôts (CGI) |
TVA |
1 140 |
1 225 |
1 255 |
Défiscalisation des investissements productifs |
Art. 199 undecies B du CGI |
IR |
700 |
480 |
410 |
Défiscalisation des investissements en matière de logement |
Art. 199 undecies A et 199 undecies D du CGI |
IR |
355 |
355 |
265 |
Réduction du barème de l'impôt sur le revenu |
Art. 197-I-3 du CGI |
IR |
295 |
295 |
300 |
Défiscalisation des investissements productifs |
Art. 217 undecies et 217 duodecies du CGI |
IS |
175 |
180 |
180 |
Exonération de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers |
Art. 295 du CGI |
TVA |
185 |
190 |
190 |
Abattement applicables aux bénéfices des entreprises provenant d'exploitations |
Art. 44 quaterdecies du CGI |
IR et IS |
72 |
74 |
74 |
TVA dite « non perçue récupérable » |
Art. 295 A du CGI |
TVA |
100 |
100 |
100 |
Réduction de base fiscale pour les exploitations situées dans les départements d'outre-mer |
Art. 217 bis du CGI |
IS |
185 |
- |
- |
Exclusion du champ d'application de la TIPP |
Art. 267 du code des douanes |
TIPP |
104 |
104 |
104 |
Défiscalisation du logement social |
Art. 199 undecies C du CGI |
IR |
68 |
210 |
non chiffré |
Autres dépenses fiscales rattachées à la mission |
35 |
51 |
50 |
||
Total (en estimant constant, en 2013, le coût de la défiscalisation du logement social, non chiffrée) |
3 414 |
3 264 |
3 138 |
Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2013
Vos rapporteurs spéciaux s'interrogent en revanche sur le non-chiffrage de la dépenses fiscale au titre des investissements dans le logement social outre - mer, en application de l'article 199 undecies C du CGI.
Celle-ci est estimée à 210 millions d'euros pour 2012, dans le projet annuel de performance annexé au présent projet de loi de finances. Ils tiennent cependant à rappeler, comme ils l'ont souligné dans leur rapport 5 ( * ) de contrôle budgétaire consacré à ce dispositif, que cette dépense fiscale avait été largement sous-estimée l'an dernier : le projet de loi de finances pour 2012 n'avait prévu que 80 millions d'euros.
Les demandes auprès des services de l'Etat sur le non-chiffrage de la mesure n'ont pas obtenu de réponse.
Vos rapporteurs spéciaux émettent d'autre part certaines réserves sur la fiabilité des chiffrages effectués par le Gouvernement . En effet, entre les évaluations présentées en 2012 et celles présentées en 2013, des variations très importantes sont constatées.
Cette variation provient notamment de l'évaluation de la dépense fiscale au titre du taux de TVA réduit et au titre des investissements dans le logement libre et intermédiaire.
2. Une diminution qui n'est pas compensée par la hausse des crédits de la mission
Vos rapporteurs spéciaux s'inquiètent de la baisse de la dépense fiscale en faveur de l'outre-mer.
Bien que la politique de réduction des niches fiscales puisse se justifier au regard de l'impératif de redressement des finances publiques, ils soulignent néanmoins qu'elle est le principal outil utilisé par l'Etat pour favoriser le développement des outre-mer français, devant les dotations budgétaires. Ainsi, les dispositifs de défiscalisation rattachés à la mission « Outre-mer » s'élèvent dans le présent projet de loi de finances à 3,1 milliards d'euros, soit un montant largement supérieur aux 2,19 milliards d'euros en AE et aux 2,04 milliards d'euros en CP de la mission.
La diminution de 126 millions d'euros du montant des dépenses fiscales entre les années 2012 et 2013 n'est pas compensée par l'augmentation des crédits de la mission (+ 93 millions d'euros en AE et + 96 millions d'euros en CP, à périmètre constant).
Vos rapporteurs spéciaux rappellent que le projet de loi de finances pour 2013 propose de maintenir le plafond actuel pour les réductions d'impôt sur le revenu en faveur des investissements outre-mer et soulignent les propos du ministre des outre-mer, Victorin Lurel, qui a annoncé qu'une évaluation des niches fiscales outre-mer serait menée courant 2013 , en vue de la préparation du projet de loi de finances pour 2014. Cette évaluation permettra d'intervenir en toute connaissance de cause sur les dispositifs d'incitation fiscale, en différenciant les niches selon leur efficacité, contrairement au « coup de rabot » de 2012.
* 5 Rapport d'information n° 48 (2012-2013), « Soutenir le logement social outre-mer : retour sur trois ans de défiscalisation ».