F. L'AVENIR DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE (TGI) DE PARIS EN SUSPENS
Le déménagement du TGI de Paris représente le dossier le plus lourd, et de loin, en matière d'immobilier des juridictions . Le coût de cette opération avait en effet été estimé en 2009 à 623,5 millions d'euros 25 ( * ) , soit une enveloppe supérieure à la totalité de celle consacrée au reste de la carte judiciaire (367 millions d'euros).
Ce projet a aussi souvent constitué un sujet de polémiques, au point d'en faire un véritable « serpent de mer » de l'institution judiciaire. Toutefois, en 2009, la décision a été prise de transférer le TGI de Paris (actuellement situé sur l'Ile de la Cité) sur le site des Batignolles (17 ème arrondissement de Paris). Le projet consiste en la construction d'une nouvelle « Cité judiciaire », livrable en principe en 2015.
Un établissement public du Palais de Justice de Paris (EPPJP) a été créé en 2004 26 ( * ) pour assurer, notamment, le rôle de maître d'ouvrage dans cette opération immobilière de très grande envergure. Opérateur du programme « Justice judiciaire » jusqu'en 2010, cet établissement public relève, depuis le 1 er janvier 2011, du programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice » 27 ( * ) . Il a perçu en 2012 une subvention pour charges de service public de 2,4 millions d'euros . L'EPPJP n'a, en revanche, plus de personnels en gestion directe : il rembourse à l'Agence pour l'immobilier de la justice (APIJ) le coût des agents recrutés et gérés pour son compte par cet établissement (soit douze agents prévus en 2013).
L'opération du nouveau Palais de justice de Paris s'appuie en principe sur un partenariat public-privé (PPP) . En juin 2010, l'avis d'appel public à la concurrence a été lancé. Le dialogue compétitif a été ouvert en juillet 2010 sur la base de six projets architecturaux et deux ont finalement été retenus pour la phase finale. En février 2012, le contrat de partenariat a été signé. Le dossier de permis de construire a été déposé en avril 2012. Son instruction, qui comporte une enquête publique, doit se terminer au cours du premier trimestre de l'année 2013.
En juillet 2012, Madame la Garde des sceaux, ministre de la justice, a confié à l'Inspection générale des services judiciaires (IGSJ) un audit sur les conditions de financement de cette opération .
Le 30 octobre 2012, à l'Assemblée nationale, lors de la discussion du budget de la mission « Justice » 28 ( * ) , elle a indiqué que « sur la base de ce rapport, trois options sont possibles. La première serait le maintien du contrat en l'état. Mais il est important que la représentation nationale sache que le contrat prévoit un investissement de 671 millions d'euros , et que le partenariat public-privé conduira à un loyer annuel moyen de 90 millions d'euros . Il sera de 84 millions d'euros la première année et atteindra 114 millions d'euros. Au terme de ce contrat de vingt-sept ans, en 2043, l'Etat, deux générations après nous, aura payé 2,7 milliards d'euros pour un investissement de 679 millions d'euros (...). Une deuxième option consisterait à renégocier ce contrat. Signalons néanmoins que la clause de renégociation n'a pas été prévue dans ce contrat - signé deux mois avant les élections... La troisième option serait le renoncement à projet, en sachant que les magistrats et les greffiers travaillent dans des conditions extrêmement difficiles et que ce projet de cité judiciaire qui a dix ans d'âge répond à un réel besoin ».
Madame Christiane Taubira a ajouté que « compte tenu des lourdes conséquences des trois options que je viens d'exposer, le dossier a été présenté au Premier ministre » qui rendra un arbitrage.
S'agissant de ce PPP comme d'ailleurs de ceux concernant l'administration pénitentiaire ( cf. infra ), votre rapporteur spécial souligne l'importance de préserver une maîtrise d'ouvrage en capacité d'assurer le suivi et le contrôle de ce type de marché, afin d'éviter un dérapage des coûts dans le temps . Il renvoie par ailleurs à des considérations plus détaillées sur la formule du PPP dans ses développements sur le programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice » ( cf . PartieVI. E).
* 25 Sénat, rapport d'information n° 38 (2009-2010) « La future implantation du tribunal de grande instance (TGI) de Paris : la fin des hésitations », Roland du Luart.
* 26 Décret n° 2004-161 du 18 février 2004.
* 27 Il a ainsi rejoint dans ce programme l'Agence pour l'immobilier de la justice (APIJ).
* 28 Assemblée nationale, compte rendu des débats de la deuxième séance du mardi 30 octobre 2012.