3. Le « Stamp duty » britannique
Le Royaume-Uni connaît un droit de timbre - « Stamp duty » - sur les transactions sur actions - dont les prémices historiques remontent à 1694 (afin de lever des ressources pour mener la guerre contre la France).
Le « Stamp duty reserve tax » (SDRT), applicable aux transactions dématérialisées, a été introduit par le Finance Act de 1986. Il frappe l'achat d'actions anglaises au taux de 0,5 %.
L'action étant un titre de propriété, elle peut être « saisie » juridiquement par un droit national. Il est ainsi possible de priver un acheteur étranger de ses droits sur ses actions britanniques s'il n'acquitte pas la taxe. En ce sens, le « Stamp duty » sur actions permet de territorialiser la taxe et d'éviter le reproche habituellement adressé aux taxes sur les transactions financières, à savoir la délocalisation de la base imposable. Mais un phénomène d'évitement est toujours possible : les investisseurs peuvent se désintéresser de la place et préférer détenir des actions cotées sur d'autres places.
Le redevable de la taxe est l'acquéreur de l'action mais elle est collectée soit au niveau du dépositaire central ( cf. infra ), le système CREST, soit au niveau des courtiers en titres.
Par ailleurs, le système britannique prévoit également un taux plus élevé de 1,5 % au titre d'une « exit tax » en cas de transferts des actions vers des dépositaires centraux étrangers. En effet, ces derniers ne seront pas collecteurs de la taxe et toutes les futures transactions ne seront pas taxées.
D'après les chiffres de l'administration fiscale britannique, le SDRT rapporte annuellement entre 4,2 milliards de livres (2007) et 2,9 milliards de livres (2009), soit respectivement environ 5 milliards d'euros et 3,5 milliards d'euros .
4. Le projet de directive européenne
Sous la pression de plusieurs Etats membres, dont la France, et le Parlement européen 168 ( * ) , la Commission européenne a proposé, le 28 septembre 2011, une directive du Conseil établissant un système commun de taxe sur les transactions financières.
A la différence du « Stamp duty », la proposition européenne se réfère à une règle de territorialité différente pour « saisir » les transactions financières. L'Union européenne bénéficie en effet d'une taille critique suffisante lui permettant d'établir une taxe en fonction du principe de résidence de la partie à une transaction financière : la taxe est donc due par les acheteurs et les vendeurs établis dans l'Union européenne.
L'article 1 er énonce ainsi : « la présente directive s'applique à toute transaction financière dès lors qu'au moins une des parties à la transaction est établie dans un Etat membre et qu'un établissement financier établi sur le territoire d'un Etat membre est partie à la transaction, pour son compte propre ou pour le compte d'un tiers, ou agit au nom d'une partie à la transaction ».
Elle concerne toutes les transactions financières , à l'exception des changes au comptant et du marché des émissions de valeurs mobilières (marché primaire). Comme le rappelle l'exposé des motifs de la proposition de directive, « le champ d'application de la taxe est large, car il vise à couvrir les transactions concernant tous les types d'instruments financiers, ces derniers étant souvent de proches substituts les uns des autres ».
La proposition de directive prévoit deux taux minimaux. Les produits dérivés seraient imposés, au minimum, au taux de 0,01 % (applicable au montant notionnel du contrat). Les autres produits financiers, principalement les actions et les obligations, seraient imposés, au minimum, au taux de 0,1 % .
D'après l'étude d'impact de la Commission européenne, le produit d'une telle taxe pourrait s'élever à près de 57 milliards d'euros , ce chiffre fait cependant l'objet de nouveaux calculs de la part des services de la Commission.
Le Parlement européen devrait examiner ce texte fin avril en commission et fin juin en séance plénière. Toutefois, le Conseil doit réunir, comme pour toute question fiscale, l'unanimité en vue d'adopter la proposition. Or la ferme opposition britannique - et dans une moindre mesure suédoise et néerlandaise - semble augurer d'un échec. Début février, neuf Etats-membres dont la France ont demandé à la présidence danoise « d'accélérer les travaux en cours » sur ce projet.
* 168 Cf . conclusions du Conseil européen du 11 mars 2011 et les résolutions du Parlement européen du 10 et 25 mars 2010 et du 8 mars 2011.