2. Une réforme indispensable pour préserver le système de retraite par répartition
La loi portant réforme des retraites, que le Parlement a adoptée le 27 octobre dernier, s'organise autour de cinq axes essentiels 5 ( * ) :
- le relèvement progressif de l'âge d'ouverture des droits à la retraite et de l'âge du bénéfice d'une pension à taux plein ;
- la mise en place d'un pilotage des régimes de retraite et le renforcement du droit à l'information des assurés ;
- la convergence des différents régimes ;
- la prise en compte de la pénibilité du travail et la réforme de la médecine du travail ;
- le renforcement de dispositifs de solidarité.
Votre commission souhaite ici insister sur la mesure la plus emblématique du texte , à savoir le relèvement progressif de l'âge d'ouverture des droits à la retraite et de l'âge d'obtention d'une pension à taux plein .
L'évolution de l'espérance de vie, les réformes entreprises dans les principaux pays européens et les caractéristiques du système de retraite français plaident en faveur de ce relèvement .
Depuis que l'âge de soixante ans a été retenu comme âge d'ouverture des droits à la retraite, l'espérance de vie à soixante ans n'a cessé de croître. Elle a progressé de plus de quatre ans et devrait continuer à le faire dans les prochaines décennies.
Confrontés à des évolutions similaires, un grand nombre de pays développés ont d'ores et déjà relevé, ou prévu de relever, leurs âges légaux de retraite. La France figurait encore parmi les rares pays à maintenir un âge de liquidation des droits fixé à soixante ans malgré l'allongement de l'espérance de vie.
La loi prévoit ainsi le passage progressif de l'âge d'ouverture des droits à la retraite de soixante à soixante-deux ans à raison de quatre mois par génération à compter de juillet 2011. Ainsi, les assurés nés en 1956 et atteignant l'âge de soixante ans en 2016 ne pourront liquider leur pension qu'à compter de 2018.
Parallèlement, l'âge permettant de bénéficier d'une pension de retraite à taux plein quelle que soit la durée d'assurance, aujourd'hui fixé à soixante-cinq ans, sera relevé progressivement jusqu'à soixante-sept ans , également à raison de quatre mois par génération. Les assurés nés en 1956 ne pourront bénéficier d'une pension sans décote, s'ils n'ont pas réuni la durée d'assurance nécessaire, qu'à compter de 2023.
Suivant le même principe, l'ensemble des âges et des durées de services dans la fonction publique font l'objet d'un relèvement ou d'un allongement de deux années . Il en est ainsi des âges permettant aujourd'hui aux fonctionnaires des catégories actives de partir en retraite avant l'âge de soixante ans (généralement à cinquante ou à cinquante-cinq ans).
Dans son rapport sur le rendez-vous de 2010, la Mecss de la commission des affaires sociales avait estimé possible le relèvement de l'âge légal de la retraite à condition qu'une politique active soit conduite en faveur de l'emploi des seniors, que la pénibilité de certains travaux puisse être prise en compte et que le dispositif de retraite anticipée pour carrière longue puisse être préservé et étendu.
La réforme votée prend pleinement en compte ces observations :
- le dispositif carrière longue est maintenu et même élargi. Les assurés ayant commencé à travailler tôt devront certes prolonger leur activité mais continueront à pouvoir partir avant d'avoir atteint l'âge légal de départ s'ils réunissent certaines conditions de durée d'assurance et d'âge. Le dispositif, qui ne s'appliquait jusqu'à présent qu'aux salariés entrés dans la vie active entre quatorze et seize ans concernera également désormais ceux qui ont commencé à travailler à dix-sept ans . Le 8 septembre dernier, le Gouvernement a en outre annoncé un lissage qui permettra d'éviter que certains salariés concernés par ce dispositif soient contraints de retarder fortement leur départ ;
- en ce qui concerne l'emploi des seniors , le Gouvernement conduit depuis trois ans une politique active, qui sera renforcée avec la création d'une aide à l'embauche des salariés âgés de plus de cinquante-cinq ans ;
- enfin, la pénibilité fait pour la première fois l'objet d'une reconnaissance dans la loi.
Si votre commission approuve pleinement ces mesures de relèvement des âges, elle souhaite néanmoins formuler deux remarques :
- leurs effets sur l'emploi devront être observés avec une particulière attention au cours des prochaines années afin de vérifier que le relèvement des âges ne se traduit pas par un chômage massif des assurés qui auraient été auparavant en retraite ;
- elles ne doivent en aucun cas avoir pour conséquence de priver de ressources des personnes écartées du marché du travail qui pourraient se trouver en fin de droits avant de réunir les conditions pour avoir droit à une pension 6 ( * ) .
* 5 L'analyse détaillée de ce texte figure au rapport Sénat n° 733 (2009-2010) de Dominique Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, projet de loi portant réforme des retraites.
* 6 Un dispositif d'accompagnement transitoire des chômeurs âgés a été joint au texte à l'initiative du Sénat.