II. UNE SITUATION BUDGÉTAIRE « TENDUE »
S'il souscrit aux priorités précédemment définies, votre rapporteur spécial s'interroge sur les conditions budgétaires de leur mise en oeuvre .
A. QUELLE SOUTENABILITÉ BUDGÉTAIRE POUR LA POLITIQUE AGRICOLE ?
1. Des reports de charges en forte augmentation
Le ministère de l'agriculture et de la pêche, s'agissant tout particulièrement des politiques qu'il mène dans le cadre de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », fait face à une situation budgétaire dégradée , qu'est venu diagnostiquer un récent rapport du Conseil général de l'agriculture, de l'alimentation et des espaces ruraux 5 ( * ) .
Ce rapport évalue en effet les reports de charges, pour la seule mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », à 677,6 millions d'euros à la fin de l'exercice 2006 et à 1.171,9 millions d'euros à la fin de l'exercice 2007, soit un montant équivalent à 40 % des crédits de paiement demandés pour 2008 . Ces reports aboutissent à un solde de gestion très fortement déficitaire , puisque les reports de crédits à fin 2006 s'élevaient à 12 millions d'euros et que, selon les estimations du contrôle budgétaire et comptable ministériel, ils ne devraient pas être significativement plus importants fin 2007.
Il résulte de cette situation l'obligation récurrente, pour le ministère, de procéder à des redéploiements en gestion de grande ampleur , voire à recourir à ce que le rapport qualifie d'« expédients », tels que la souscription d' emprunt par les offices agricoles auprès des établissements bancaires pour pallier l'insuffisance de crédits budgétaires.
Compte tenu de ce qui précède, votre rapporteur spécial estime que les demandes de crédits détaillées dans le projet annuel de performances pour 2008 donnent une idée imparfaite de l'exécution qui s'ensuivra. Un tel hiatus relativise d'autant la portée de l'autorisation parlementaire .
2. Les problèmes et leurs solutions sont connus
S'il salue la démarche empreinte de lucidité et de transparence qui a conduit le nouveau ministre de l'agriculture et de la pêche à réaliser un audit approfondi de la situation budgétaire de son ministère, votre rapporteur spécial rappelle que les problèmes que cet audit révèle et les solutions qu'il formule ne sont pas nouveaux .
Ces problèmes sont liés :
1) à la mise en oeuvre de politiques publiques dans des secteurs très exposés aux aléas climatiques, sanitaires et économiques, aléas qui génèrent autant de plans d'aide et de dispositifs d'accompagnement qui pèsent sur les finances publiques ;
2) à l'enfermement des initiatives du ministre dans un cadre très contraint , notamment lié à l'existence de dispositifs communautaires dont il ne maîtrise pas le fonctionnement ;
3) à la pression très forte que fait peser la profession agricole sur les choix opérés.
Les solutions plusieurs fois avancées, notamment par la Cour des comptes, consistent à assainir la situation financière du ministère par la couverture des nombreux engagements anciens, à passer en revue et à réformer l'ensemble des dispositifs d'aide fonctionnant à « guichet ouvert » ou susceptibles de créer des charges sur plusieurs années, ainsi qu'à éliminer les pratiques pouvant entraîner des sanctions pécuniaires communautaires particulièrement lourdes.
* 5 Rapport d'audit de la situation budgétaire du ministère de l'agriculture et de la pêche de juin 2007, réalisé par le Conseil général de l'agriculture, de l'alimentation et des espaces ruraux.