B. AUDITION DE MM. NICOLAS SARKOZY, MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, BRICE HORTEFEUX, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, ET CHRISTIAN ESTROSI, MINISTRE DÉLÉGUÉ À L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Réunie le mardi 22 novembre 2005 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'audition de MM. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales, et Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, sur le projet de loi de finances pour 2006.

M. Nicolas Sarkozy a présenté la mission « Sécurité » pour 2006. Il a indiqué, avant tout, que l'année 2006 serait la quatrième année d'application de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI).

Concernant, en premier lieu, la police nationale, il a d'abord fait valoir que 3.900 emplois de policiers avaient été créés depuis 2003, et que 1.300 recrutements supplémentaires interviendraient en 2006, soit au total 5.200 créations d'emplois de policiers, représentant 80 % des 6.500 créations prévues par la LOPSI. Il a signalé, ensuite, que les moyens de fonctionnement, d'intervention et d'investissement de la police se trouveraient, en 2006, en hausse de 3,5 %, soit une augmentation de 38 millions d'euros, à périmètre constant, par rapport aux crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2005. Il a ajouté que les grands programmes d'amélioration de l'équipement et de la protection des fonctionnaires définis par la LOPSI seraient poursuivis :

- d'une part, près de 80 % des policiers devraient être dotés, à la fin de l'année 2006, de pistolets SIG-SAUER ;

- d'autre part, 45.500 nouvelles tenues d'uniforme devraient être achetées en 2006, et toutes les commandes achevées afin d'équiper l'ensemble des fonctionnaires.

Enfin, il a indiqué que le financement de la troisième tranche de la réforme des corps et carrières serait entièrement assuré en 2006, pour un total de 59 millions d'euros.

Concernant, en second lieu, la gendarmerie, il a constaté que des retards, dans la mise en oeuvre de la LOPSI, affectaient les effectifs comme les moyens financiers d'investissement. Mais il a assuré que des progrès significatifs, en la matière, seraient réalisés en 2006. En particulier, il a annoncé que 2.000 recrutements devraient permettre d'atteindre 73 % des effectifs prévus par la LOPSI.

Puis M. Nicolas Sarkozy s'est attaché à exposer les prolongements, en 2006, de la politique menée à l'encontre des violences urbaines survenues entre le 27 octobre et le 16 novembre 2005. De manière liminaire, il a insisté sur le caractère pérenne de ces mesures, visant à renforcer la sécurité des habitants des quartiers en cause.

Il a d'abord annoncé que, sur les sites les plus difficiles, 17 unités de CRS et 7 escadrons de gendarmerie, soit 2.000 policiers et gendarmes, seraient employés de façon permanente. Il a souligné que ces effectifs seraient mobilisés, notamment, aux heures nocturnes.

Il a annoncé, ensuite, que 2.000 adjoints de sécurité supplémentaires seraient recrutés dans les quartiers « sensibles » et pour ces quartiers, sur le fondement de contrats d'accès à l'emploi.

Il a également déclaré que 500 caméras embarquées étaient prévues dans le projet de loi de finances pour 2006, portant à 600 le nombre de ces caméras dont dispose la police nationale. Il a fait remarquer l'efficacité dissuasive de ce dispositif à l'égard des délinquants, et son utilité aux fins de constituer les preuves nécessaires dans le cadre des procédures judiciaires. Il a précisé qu'un amendement au projet de loi de finances pour 2006 serait proposé par le gouvernement en vue de financer une nouvelle caméra embarquée pour l'hélicoptère de la préfecture de police de Paris. Il a souligné la grande utilité, à ses yeux, de l'intervention de ce dernier matériel durant les récentes émeutes.

Il a encore annoncé que 1.000 pistolets à impulsion électrique seraient acquis pour la police nationale, et 700 pour la gendarmerie. Il a précisé que cette arme non létale permettait de mettre hors d'état de nuire un individu dangereux en offrant, pour lui comme pour les victimes et pour les policiers intervenants, le maximum de sécurité. Il en a détaillé les modalités techniques de fonctionnement. En outre, il a indiqué que 5 millions d'euros seraient dégagés afin de financer la reconstitution des stocks de munitions non létales et d'équipements spécialisés, en particulier des fusils « flashball » et des grenades à fragmentation.

Par ailleurs, il a signalé qu'un amendement au projet de loi de finances pour 2006 serait proposé par le gouvernement en vue de financer une prime exceptionnelle pour les policiers. Il a tenu à souligner le caractère exemplaire du comportement et de la mobilisation de ces derniers durant les récentes violences urbaines. De même, il a signalé qu'un amendement au projet de loi de finances serait proposé en vue de financer les heures supplémentaires et indemnités d'absence des fonctionnaires de police durant ces émeutes.

M. Nicolas Sarkozy a alors dressé le bilan chiffré de la politique de sécurité menée depuis 2002. Ainsi, il a fait valoir que le nombre de crimes et délits constatés par les services de police et de gendarmerie, entre 2002 et 2004, avait baissé de 7 %. Il a ajouté que, sur les neuf premiers mois de l'année 2005, on constatait, en ce domaine, une diminution supplémentaire de 1,6 %. Il a souligné que la délinquance de voie publique baissait davantage, à hauteur de 17 % entre 2002 et 2004, et de 5 % sur les neuf premiers mois de l'année 2005. Il a précisé que les instruments statistiques employés pour l'élaboration de ces chiffres étaient les mêmes que ceux qui avaient révélé, sur la période 1997-2002, une hausse de 15 % de la criminalité.

En outre, il a indiqué que le taux d'élucidation des affaires, qui était de moins de 25 % en 2001, se situait à près de 32,4 % en 2005.

M. Jean Arthuis, président, a souligné la pertinence de ces indications au regard de l'objectif général de performance fixé par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

M. Nicolas Sarkozy a alors présenté la politique menée depuis 2002 en matière d'immigration irrégulière, et a tracé les perspectives de celle-ci pour les prochaines années. Il a d'abord souligné que la totalité des 38 millions d'euros, susmentionnés, constituant l'augmentation des crédits affectés aux moyens de la police nationale en 2006 par rapport à 2005, se trouverait consacrée à la lutte contre l'immigration illégale.

En premier lieu, il a annoncé qu'un effort important serait consenti afin d'augmenter le nombre des places en centres de rétention administrative. Il a indiqué que ces centres comptaient moins de 1.000 places en juin 2002, et déclaré qu'ils devaient atteindre près de 1.800 places en juin 2006, puis 2.540 en juin 2007 et 2.880 en juin 2008.

En second lieu, il a signalé que les crédits supplémentaires précités financeraient également le coût des reconduites aux frontières. Il a indiqué que 12.000 de ces reconduites avaient été pratiquées en 2001, et que 25.000 le seraient en 2005. Il a déclaré son intention de voir ces opérations se multiplier dans l'avenir. Dans cette perspective, il a annoncé la mise en place de visas biométriques, qui devraient permettre d'identifier avec certitude les migrants en situation illégale et faciliter leur éloignement. Il a précisé que 7 consulats étaient équipés de ce dispositif en 2005, et annoncé que 25 consulats devraient l'être en 2006.

Il s'est ensuite attaché à présenter la mission « Sécurité civile » pour 2006. Il a d'emblée indiqué que, hors masse salariale, les moyens de la sécurité civile apparaissaient en baisse de 3,8 %, mais que cette baisse traduisait seulement l'achèvement des programmes d'acquisition de deux avions bombardiers d'eau de type « Dash 8 ». Il a souligné l'efficacité de ces appareils, de même que celle de l'hélicoptère bombardier d'eau.

En outre, il a annoncé que les avions tragiquement accidentés en 2004 et 2005 seraient remplacés, comme suit :

- l'appareil remplaçant le Canadair perdu en mars 2004 sera définitivement acquis en 2006 ;

- l'appareil remplaçant le Canadair perdu en 2005 sera acheté pour la saison de risques d'incendies en 2006 ;

- les deux appareils « Tracker » perdus en 2005 seront remplacés par un avion « Dash » qui serait livré en 2008.

M. Nicolas Sarkozy a alors rappelé les trois accidents mortels dont des pilotes s'étaient trouvés victimes durant l'été 2005. Il a fait part de son émotion à cet égard, et a indiqué que ces évènements l'avaient conduit à réviser la stratégie de la sécurité civile aérienne. Ainsi, il a insisté sur l'absence de nécessité de faire courir des risques vitaux aux pilotes lorsqu'aucune vie humaine ne se trouvait en danger.

Pour conclure sa présentation, il a annoncé une augmentation de la contribution de l'Etat au financement de la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires. Soulignant que les sinistres s'avéraient de plus en plus complexes et durables, il a insisté sur le besoin de valoriser le volontariat en ce domaine. Il a indiqué que des réformes étaient à l'étude, en vue d'éviter aux entreprises employant ces volontaires de devoir supporter l'intégralité des charges liées aux heures de travail qu'ils ne pouvaient effectuer, en raison de leur engagement dans la lutte contre le feu.

Un large débat s'est ensuite instauré.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a tenu à féliciter le ministre d'Etat pour l'action qu'il menait. Il a demandé des informations complémentaires sur les objectifs de performance associés à la lutte contre l'immigration irrégulière. Il a souhaité obtenir, également, des précisions quant au sort des étrangers délinquants. En outre, il s'est enquis des modifications éventuelles qu'il conviendrait d'apporter aux règles relatives au regroupement familial.

M. Nicolas Sarkozy s'exprimant d'abord sur la situation des étrangers délinquants, a rappelé que la loi permettait d'ores et déjà l'expulsion des étrangers, en situation régulière, qui constitueraient une menace pour la paix civile et l'ordre public. Il a précisé que cette procédure ne requérait pas l'intervention préalable d'une décision judiciaire. Il a indiqué qu'une centaine de personnes étrangères ont été interpellées dans le cadre des récentes violences urbaines, précisant qu'environ une dizaine d'entre elles, en situation régulière, faisaient actuellement l'objet de procédures d'expulsion. Il a, en outre, signalé que 4.740 interpellations, au total, avaient été effectuées à la suite des émeutes précitées. Il a fait remarquer que ce nombre témoignait de l'efficacité des services de la police nationale, mais également de l'ampleur de la délinquance. Il a indiqué que la majeure partie des personnes interpellées étaient déjà connues, défavorablement, de la police et que de nouvelles interpellations restaient à venir.

En ce qui concerne le regroupement familial, il a rappelé que ce droit avait été accordé, en France, au milieu des années 1970, et avait été consacré par la ratification de la Convention européenne des droits de l'homme, afin de permettre aux travailleurs immigrés d'être rejoints par leur famille. Il s'est déclaré favorable à cette garantie dans son principe, mais il a souligné la nécessité que les conditions matérielles d'accueil des familles soient mieux vérifiées qu'elles ne le sont actuellement. Il a annoncé qu'une réflexion était en cours en vue d'apporter à cette situation les améliorations souhaitables.

Sur le plan de la lutte contre l'immigration irrégulière, il a signalé que tous les consulats français, en 2007, devraient être équipés d'un dispositif de biométrie. Il a insisté sur la grande efficacité attendue de cette mesure en vue de réduire les fraudes au droit de séjour sur le territoire national. En outre, il a fait part de son souhait que soit instaurée une obligation, pour les étrangers autorisés à séjourner en France, de signaler leur sortie définitive du territoire.

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la mission « Sécurité », a souligné l'importance de la présence policière sur le terrain. Il a interrogé le ministre d'Etat sur la clé de répartition des forces de police. Il a d'ailleurs signalé les réticences à une présence dans les zones périurbaines dont témoignait, selon lui, la gendarmerie. Il a également demandé au ministre d'Etat si les effectifs policiers affectés aux quartiers « difficiles » joueraient le rôle d'une police de proximité. Il l'a encore interrogé sur la présence des renseignements généraux dans ces quartiers. De même, il s'est enquis de la manière dont il était tenu compte, par le ministère de l'intérieur, de l'exemple des autres pays européens. A cet égard, il a notamment cité le cas du Royaume-Uni, employant de nombreuses caméras de surveillance. Il a souligné que ce matériel était moins coûteux qu'une présence humaine. Enfin, il s'est interrogé sur la signification des 28 millions d'euros que représentaient les saisies de drogue annoncées au titre du bilan des groupements d'intervention régionaux (GIR).

M. Nicolas Sarkozy, en réponse, a d'abord indiqué que la répartition des forces de police déterminée depuis 2002 n'avait donné lieu à aucune contestation de la part des élus locaux. Cependant, il a annoncé que la révision des effectifs de référence était en cours, en vue d'un redéploiement concernant l'ensemble des départements. Il a, d'ailleurs, reconnu que la petite comme la grande couronne parisienne se trouvaient insuffisamment dotées, à cet égard, par rapport aux effectifs mis à la disposition de la préfecture de police de la capitale.

Il a, ensuite, indiqué que la discussion avec les syndicats avait permis la révision des horaires de travail des CRS, assurant leur présence sur le terrain jusqu'à quatre heures du matin. Il a ajouté qu'un changement dans la stratégie opérationnelle de ces compagnies, mis en place depuis cinq mois, avait témoigné de son efficacité lors des récentes émeutes urbaines. Il a expliqué que ce changement consistait dans une intervention des agents par binôme, en remplacement de l'ancienne stratégie de « cordon ». Il a souligné que cette nouvelle stratégie facilitait les interpellations. Il a fait part de la confiance qu'il plaçait dans les CRS en vue du rétablissement de l'ordre public dans les zones difficiles. Il a d'ailleurs invité la commission à venir constater, sur place, les nouvelles méthodes de travail mises en oeuvre.

S'agissant des renseignements généraux, il a déclaré que ce service avait été pleinement utilisé dans le cadre de la répression des violences urbaines, et le serait systématiquement, dans l'avenir, au sein des quartiers « sensibles ».

Quant à l'exemple des autres pays européens, il a indiqué qu'il était pris en compte, citant en particulier la couverture de vidéosurveillance déployée par le Royaume-Uni. Il a indiqué que la France, dans l'avenir, devrait s'inspirer, notamment, de ce dernier modèle. Toutefois, il a fait remarquer que la référence la plus pertinente, dernièrement, avait été notre propre pays. En particulier, il a relevé que, contrairement à d'autres pays touchés par des violences urbaines comparables, aucun mort n'avait été à déplorer à l'occasion des récentes émeutes. Il a d'ailleurs souligné, pour s'en féliciter, le sang-froid dont avaient fait preuve, dans ce cadre, les forces de l'ordre.

S'agissant des saisies de drogue par les GIR, il a estimé que la somme de 28 millions d'euros lui paraissait modeste compte tenu de l'ampleur des trafics existants. Il a, cependant, souligné la difficulté d'appréhender des trafiquants très bien organisés.

M. Claude Haut, rapporteur spécial de la mission « Sécurité civile », a relevé que l'un des deux avions « Tracker » perdus dans les combats contre le feu ne serait pas remplacé. Par ailleurs, il a fait observer le caractère problématique du déficit actuel de sapeurs-pompiers volontaires. Il a également exprimé son inquiétude quant à la dotation, pour 2006, du Fonds d'aide à l'investissement des services départementaux d'incendie et de secours (FAI-SDIS), qu'il a jugée insuffisante. Il a en outre fait observer que les crédits votés pour ce fonds, au titre de l'année 2005, n'avaient toujours pas été débloqués.

M. Nicolas Sarkozy , en réponse, a d'abord indiqué que les crédits du FAI-SDIS, doté de 743 millions d'euros en 2006, avaient enregistré une augmentation de 50 % sur les trois dernières années. Il a annoncé que, pour remédier au retard de déblocage des crédits de ce fonds, une dérogation à la règle d'interdiction des reports de crédits serait aménagée.

En ce qui concerne les deux « Tracker » perdus, il a rappelé que ces appareils seraient remplacés par un avion « Dash ». Il a précisé que la charge d'eau de ce dernier était trois fois supérieure à celle d'un « Tracker ». Il a annoncé qu'une commande en 2006 permettrait une livraison pour 2008.

S'agissant du manque de sapeurs-pompiers volontaires, il a rappelé ses propos précédents sur ce point. En outre, il a fait observer l'absence de mouvement social parmi les pilotes d'avions bombardiers d'eau de la base aérienne de Marignane, ce qui témoignait, selon lui, d'une bonne gestion de la situation.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », a souligné l'importance des sapeurs-pompiers volontaires. S'appuyant sur l'exemple du département du Rhône, qui compte 4.000 volontaires sur un total de 6.000 pompiers, il a évoqué le rôle de ces volontaires lors des récentes émeutes dans les banlieues de l'agglomération lyonnaise, notamment ceux des 14 centres ruraux qui envoyaient chaque soir des volontaires en ville. Il a relevé que, grâce à cette aide, aucune heure supplémentaire n'avait eu à être payée aux sapeurs-pompiers professionnels, et que le département du Rhône avait même pu envoyer des renforts en région parisienne. Expliquant cette implication par la considération dont ils jouissent et par la formation professionnelle poussée dont ils bénéficient, il a donné raison au ministre d'Etat de faire porter son effort sur le volontariat et il lui a demandé s'il envisageait d'aider les départements sur cette question.

Il a ensuite évoqué l'harmonisation du système de liaison radio entre les sapeurs-pompiers et les forces de police. Il a estimé que celle-ci risquait d'être coûteuse et il a demandé au ministre d'Etat si la gendarmerie serait à l'avenir concernée par ce changement.

M. Nicolas Sarkozy a félicité M. Michel Mercier pour l'action du département du Rhône en faveur des sapeurs-pompiers volontaires et a insisté sur l'importance qu'il attachait au développement du volontariat. Il a également précisé que la gendarmerie serait en effet concernée, à l'avenir, par la création d'un système commun de liaison radio entre la police et les pompiers. Il a souligné la nécessité de l'interopérabilité entre les diverses forces de sécurité.

M. Jean Arthuis, président, a remercié le ministre d'Etat pour son intervention devant la commission et l'a en couragé à poursuivre son action.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, a ensuite remercié la commission de lui permettre d'exposer les grandes lignes du budget du programme « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires » pour l'année 2006.

Il a indiqué que ce budget était un budget tout entier au service des territoires français, précisant que le programme « Aménagement du territoire » totalisait 382 millions d'euros d'autorisations d'engagement, soit une augmentation de 11 % par rapport à 2005, et 275 millions d'euros de crédits de paiement, soit une augmentation de 3,5 %. Il a ajouté que ce programme représentait environ 40 % de la mission « Politique des territoires ».

Il a déclaré que le programme « Aménagement du territoire » se déclinait en quatre actions.

La première action vise à renforcer la compétitivité des territoires et représente 23 % du total des autorisations d'engagement, soit 87 millions d'euros. M. Christian Estrosi a indiqué que c'était, en premier lieu, les crédits de la prime à l'aménagement du territoire (PAT) qui devraient permettre de faire face à toutes les demandes prévisibles en 2006, rappelant en exemple, que la PAT avait aidé à la création de plus de 6.000 emplois sur les neuf premiers mois de 2005. Il a ajouté que, dans cette action, figurait également la subvention versée par l'aménagement du territoire à l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) ainsi que les subventions versées aux agences régionales de développement.

S'agissant des pôles de compétitivité, il a indiqué qu'il en avait visité près de la moitié, précisant que le Comité interministériel à l'aménagement et au développement des territoires (CIADT) avait retenu, le 12 juillet 2005, 67 projets, devenus 66 à la suite de la fusion de 2 pôles et que le Comité interministériel pour l'aménagement du territoire (CIAT) avait validé 55 projets de contrats cadre permettant désormais de saisir le Conseil d'Etat sur les projets de zonage R & D. Il a ajouté que les onze contrats restant à valider devraient l'être dès le début 2006 et qu'ainsi, près de 200.000 emplois pourraient être créés dans les 10 ans grâce à cette politique.

En ce qui concerne la deuxième action du programme « Aménagement du territoire », qui exprime la solidarité nationale envers les territoires les plus fragiles, il a précisé qu'elle représentait 59 % du total, soit 227 millions d'euros, en augmentation de 11 %. Elle permettait, notamment, de respecter la part de l'aménagement du territoire dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, soit 150 millions d'euros de crédits. Il a noté que, grâce à ces crédits, près de 3.000 projets étaient soutenus dans des secteurs variés, le développement économique, le tourisme, les nouvelles technologies d'information et de la communication (NTIC), l'emploi et la formation, les équipements publics...

Il a précisé que cette action reflétait aussi les grandes politiques d'aménagement du territoire lancées lors des CIADT depuis 2002 telles que la couverture du territoire en téléphonie mobile et en haut débit, la politique du littoral, l'accès aux services publics, la politique des métropoles ainsi que les futurs pôles d'excellence ruraux.

Concernant la fracture numérique du territoire, il a souhaité que tous les Français bénéficient, d'ici à 2007, de l'accès aux nouvelles technologies de l'information et de communication. S'agissant de la téléphonie mobile, il a noté que plus de 175 sites étaient d'ores et déjà opérationnels dans le cadre du plan national de résorption des zones blanches, couvrant plus de 250 communes, relevant qu'il avait obtenu, de la part des opérateurs mobiles, des engagements supplémentaires pour assurer que le programme serait bien réalisé d'ici à 2007. Il a précisé que, d'ici à fin 2006, plus de 300 sites devraient être opérationnels, couvrant plus de 500 communes.

M. Christian Estrosi a indiqué que, pour le haut débit, le nombre de lignes éligibles à l'ADSL progressait très rapidement, le nombre de communes couvertes par l'Internet à haut débit étant passé de 7.600 à fin 2002 à plus de 30.000 aujourd'hui, l'objectif étant que 100 % des communes puissent bénéficier du haut débit d'ici à 2007.

Abordant le sujet de la TNT, il a considéré que tous les Français devaient avoir droit à la télévision numérique gratuite, proposant, dès septembre, la mise en oeuvre d'un bouquet satellite sans abonnement qui reprendrait notamment les chaînes gratuites de la TNT; il a espéré que ce bouquet pourrait être diffusé dès 2006 et, au plus tard, en 2007.

M. Christian Estrosi a abordé ensuite le problème de l'accès aux services dans les territoires les plus fragiles dont l'action est guidée par trois principes :

- suspendre jusqu'à la fin de l'année les réorganisations, sauf accord local ;

- se concerter au niveau local à l'initiative des préfets avec le triple objectif d'écouter les besoins pour placer l'usager au centre de la réflexion, de faire émerger des solutions locales adaptées aux territoires, et de dégager certaines mesures ou orientations à l'échelle nationale ;

- proposer des mesures d'envergure destinées à améliorer la qualité et l'accès aux services aux publics en milieu rural à l'occasion du Congrès des maires, avec les orientations suivantes : améliorer la concertation, permettre la polyvalence des agents, faciliter les collaborations entre prestataires de services, privés ou publics, dégager un concours financier permettant de financer les améliorations de service.

Concernant la troisième action du programme, il a rappelé que celle-ci regroupait les crédits destinés aux grands projets interministériels d'aménagement du territoire, soit 14 % du total des crédits, représentant 55 millions d'euros, en augmentation de 35 % par rapport à 2005. Il a signalé que ces crédits permettaient la mise en oeuvre concrète de projets globaux coordonnés par l'aménagement du territoire : le programme Mont-Saint-Michel en Normandie-Bretagne, l'opération Euromed à Marseille, la valorisation du canal Saône-Rhin, le plan d'aménagement du littoral languedocien... Cette action regroupe également les crédits de la politique de la montagne en faveur des grands massifs qui représentent le cinquième du territoire.

S'agissant de la quatrième et dernière action du programme, qui regroupe les crédits de fonctionnement et de personnel de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) représentant 4 % du total des crédits, il a indiqué que cette enveloppe était volontairement maîtrisée pour affecter la quasi-totalité des crédits aux territoires. Il a précisé que le plafond d'emplois de la DATAR était fixé à 117 équivalents temps plein travaillés (ETPT), auxquels s'ajoutent 50 personnels mis à disposition par les autres ministères.

Il a précisé, par ailleurs, que le CIADT était devenu un Comité interministériel à l'aménagement et à la compétitivité des territoires et que son objet serait le même, mais complété d'une dimension liée à la compétitivité, l'attractivité et aux mutations économiques. De même, il a noté que cette décision s'accompagnait d'une évolution significative des missions de la DATAR et de son organisation : la DATAR et la Mission interministérielle aux mutations économiques (MIME) doivent fusionner pour donner naissance à la Délégation à l'aménagement et à la compétitivité du territoire (DIACT).

S'agissant des crédits mis en place par l'Etat au sein des contrats de plan Etat - Régions, soit 17,7 milliards d'euros sur la période 2000-2006, il a rappelé qu'ils ne relevaient pas du programme « Aménagement du territoire », mais qu'ils concouraient néanmoins à la politique d'aménagement du territoire. Il a souligné que leur taux d'exécution devrait avoisiner 66 % fin 2005. Il a ajouté que c'était également le cas des crédits permettant des exonérations de charges fiscales et sociales dans des territoires précisément délimités, pour un montant de 879 millions d'euros en 2006 et que, bien sûr, les zones de revitalisation rurale étaient également concernées. S'agissant des crédits européens de la politique régionale, il a précisé que ceux-ci s'élevaient à 2,3 milliards d'euros par an.

Pour terminer son propos, M. Christian Estrosi a abordé le sujet des pôles d'excellence ruraux. En effet, il a indiqué que le Premier ministre lui avait demandé de formuler des propositions d'actions pour valoriser, au sein des territoires ruraux, d'autres activités que l'industrie, afin de prolonger la démarche des pôles de compétitivité dans d'autres domaines. Il a annoncé qu'il avait proposé d'engager une démarche de reconnaissance de « pôles d'excellence ruraux » qui prendrait la forme d'un appel à candidatures largement ouvert pour encourager des initiatives réellement innovantes dans des territoires allant de la taille d'un canton à celle d'un bassin de vie rural, précisant que les projets qui s'inscrivent dans des territoires défavorisés (ZRR) seraient examinés avec une attention particulière et qu'il proposerait au Premier ministre que le taux de subvention puisse y atteindre 50 %.

Il a ajouté qu'à condition qu'ils soient créateurs d'emplois et innovants, ces projets pourraient s'inscrire dans l'une des thématiques suivantes : la promotion et la valorisation des richesses culturelles, artistiques, touristiques, patrimoniales, environnementales, la valorisation et la gestion durable des bio-ressources, l'accueil de nouvelles populations et de nouvelles activités et l'offre de nouveaux services à la population notamment en matière de télémédecine, de visioguichets, de services à la personne. La préférence serait accordée aux projets les plus créateurs d'emplois. Il a ajouté qu'il espérait pouvoir retenir au moins 200 projets dès le printemps prochain.

Un large débat s'est ensuite engagé.

M. Roger Besse, rapporteur spécial de la mission « Politique des territoires », a demandé au ministre délégué de préciser quels seraient le montant et l'origine des crédits bénéficiant aux pôles de compétitivité. Il a relevé que les documents budgétaires fixaient une cible de 30 % de la prime d'aménagement du territoire (PAT), soit environ 10,7 millions d'euros, attribués aux pôles de compétitivité. Il a exprimé son inquiétude quant à la pertinence de cette cible, estimant que, compte tenu de la réforme des aides à finalité régionale, la PAT aurait vocation à se concentrer sur les zones en difficulté économique et non sur les pôles les plus compétitifs.

Il a ensuite demandé au ministre délégué si les pôles d'excellence ruraux seraient dotés de moyens réels, exprimant la crainte que les pôles de compétitivité n'assèchent l'ensemble des ressources disponibles.

Puis M. Roger Besse, rapporteur spécial de la mission « Politique des territoires », a interrogé le ministre délégué sur la baisse des crédits consacrés à l'assistance technique assurée dans le cadre de l'action « Développement territorial et solidarité » et pour savoir si celle-ci ne risquait pas de pénaliser les actions du réseau de la DATAR.

Il a de plus demandé au ministre délégué quels étaient les critères d'inscription des différentes actions dans le programme « Interventions territoriales de l'Etat » (PITE). Il s'est en particulier étonné de la présence dans le programme de l'action n° 8 « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes », qui semble plus relever, au sein de la mission « Solidarité et intégration », du programme 104 « Accueil des étrangers et intégration ».

Ensuite, il a décrit les conséquences des aménagements de la carte scolaire dans les départements défavorisés. Prenant l'exemple du Cantal, qui a perdu 127 postes d'enseignants dans le premier degré en moins de dix ans alors même que le nombre d'élèves a augmenté ces deux dernières années, il a expliqué que les taux d'encadrement pédagogique ne pouvaient être appliqués seuls sans tenir compte de la spécificité des zones de montagne. Il a demandé au ministre délégué ce qu'il comptait faire dans ce sens.

Enfin, M. Roger Besse, rapporteur spécial de la mission « Politique des territoires », a exprimé son inquiétude au sujet de la réorganisation territoriale de la direction départementale de l'équipement (DDE) du Cantal, qui prévoit le regroupement de 24 subdivisions sur trois centres opérationnels situés dans la préfecture et dans les deux sous-préfectures du département.

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis de la mission « Politique des territoires » au nom de la commission des affaires économiques, a félicité le ministre délégué pour son action en faveur de la réduction de la fracture numérique. Il a souligné l'importance croissante de ce problème sous l'effet de l'arrivée de populations urbaines dans les territoires ruraux.

M. Aymeri de Montesquiou a interrogé le ministre délégué au sujet de la carte des dégrèvements fiscaux pour activité de recherche et de développement. Il a expliqué que celle-ci recouvrait des territoires urbains alors que les territoires ruraux pourraient utilement en bénéficier sans nécessiter l'installation de grandes infrastructures.

M. Christian Estrosi a expliqué que ce zonage correspondait aux pôles de compétitivité. Il a rappelé que ceux-ci seraient financés à hauteur de 300 millions d'euros par des exonérations fiscales et sociales et de 1,2 milliard d'euros par le biais d'agences de moyens. Il a expliqué qu'il fallait disposer d'un accord de la Commission européenne pour bénéficier de ces aides et que celui-ci était conditionné à l'adoption d'une politique de concentration d'activités de recherche et de développement sur une zone précise. Il a souligné que le choix de 67 pôles de compétitivité, au lieu de 15 dans le schéma initial, montrait l'importance que le gouvernement attachait à l'aménagement du territoire par ces pôles mais que par définition, un zonage impliquait que tout le monde ne pouvait bénéficier de ces aides. Il a néanmoins estimé que le zonage était modifiable, dans une certaine mesure, si des sociétés extérieures désiraient participer à l'activité du pôle, et que, par le biais de la sous-traitance, les effets induits de ces aides dépassaient le cadre de ces pôles.

M. Jean Arthuis, président, ayant objecté que la numérisation rendait moins pertinente la notion de zonage géographique, M. Christian Estrosi a rappelé les contraintes européennes ainsi que le rôle des pôles de compétitivité dans l'aménagement du territoire.

Au sujet des pôles d'excellence ruraux, M. Christian Estrosi a répondu qu'ils disposeraient d'importants moyens financiers. Les crédits viendraient du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) et de redéploiements de crédits d'autres ministères. Il a expliqué qu'il plaidait pour que les aides soient d'un montant significatif, de l'ordre de 500.000 à 1 million d'euros et a souligné que les pôles bénéficieraient également d'aides fiscales importantes.

Concernant les associations du réseau de la DATAR, il a répondu que leurs subventions ne figuraient pas sur la ligne de crédit dont la baisse avait été relevée par M. Roger Besse. Il a affirmé que leur budget resterait stable en 2006.

Au sujet du PITE, il a souligné que ce programme avait des objectifs territoriaux et non thématiques, et qu'il revenait aux préfets de région de proposer ces actions. Revenant sur la présence dans le PITE d'une action n° 8 « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes », il a indiqué que la procédure d'inscription normale avait été suivie. Il a aussi rappelé que les ressources budgétaires qui figuraient au PITE étaient retranchées des programmes ministériels où elles auraient eu vocation à apparaître.

Revenant sur la PAT, il a estimé qu'en cas de non utilisation de l'ensemble de ses crédits, il n'était pas illogique d'utiliser cette ressource budgétaire pour aider les pôles de compétitivité.

Puis M. Christian Estrosi a évoqué les préoccupations de M. Roger Besse concernant la carte scolaire. Il a indiqué avoir donné des instructions claires pour qu'aucune fermeture brutale de classe ou d'école ne se produise plus, une concertation avec les élus locaux sur une durée de trois ans devant précéder toute décision en ce sens. Il a estimé qu'un tel processus, qui ferait l'objet d'une charte avec l'association des maires de France, donnerait aux élus le temps nécessaire pour attirer de nouvelles activités susceptibles de sauver l'école.

Il a enfin expliqué que le même esprit de concertation prévaudrait pour la réorganisation territoriale des DDE.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », a ensuite exprimé son souhait de voir le ministère délégué aux collectivités territoriales devenir pleinement le ministère desdites collectivités. Après avoir donné acte au gouvernement du respect de ses engagements en termes de dotation, il a jugé, toutefois, que la suppression de la première part de la dotation globale d'équipement (DGE) des départements, prévue à l'article 24 du projet de loi de finances pour 2006, « assombrissait le tableau ».

Puis il a souhaité attirer l'attention du ministre délégué sur le problème de la maîtrise de leurs ressources et de leurs dépenses par les départements. Notant qu'une part croissante des ressources des départements était constituée de transferts d'impôts non modulables, il a estimé que la réforme de la taxe professionnelle accentuerait encore cet état de fait, seules les ressources issues de la taxe d'habitation et la taxe foncière sur les propriétés bâties devant alors demeurer sous le contrôle des départements. Il a également souligné qu'une part élevée des dépenses des départements correspondait à des prestations sociales, dont le montant et les conditions d'attribution étaient déterminés par l'Etat. Il a ensuite interrogé le ministre délégué sur la compensation du revenu minimum d'insertion (RMI) aux départements et sur les ressources de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

M. Christian Estrosi a tout d'abord remercié M. Michel Mercier pour ses remarques liminaires.

Puis il a abordé la question de la réforme de la DGE. Il a précisé que le gouvernement en attendait une économie structurelle de 130 millions d'euros par an, et a expliqué que la réforme de la DGE présentait le triple avantage de correspondre pour l'Etat à une recette pérenne, faisant participer tous les départements et ne comportant pas d'effet de seuil.

Au sujet de l'évolution des dépenses et des ressources des départements, il a fait valoir qu'il fallait apprécier leur évolution dans le temps, et non sur une seule année. Il a évoqué, de plus, le cas de certains départements, qui ont connu en 2005 une juste compensation des recettes au titre des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », a objecté, s'appuyant sur l'exemple du département du Rhône, que les départements supportaient des charges croissantes au titre du RMI et de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA).

M. Christian Estrosi a insisté sur le dynamisme des DMTO.

M. Jean Arthuis, président, a fait valoir qu'une hausse des taux d'intérêt, qui risquerait d'entraîner une baisse des prix de l'immobilier et du nombre des transactions, était susceptible de les faire diminuer.

M. Christian Estrosi a estimé que globalement, les départements connaîtraient pour 2005 un déficit de compensation de l'ordre d'un milliard d'euros au titre du RMI. Il a toutefois précisé qu'une fois déduit le montant que l'Etat aurait à verser pour respecter le considérant n° 23 de la décision n° 2003-489 DC du Conseil constitutionnel rendue sur la loi de finances pour 2004, ce déficit serait réduit à 815 millions d'euros tandis que le supplément de recettes des DMTO pour les départements s'élèverait à 836 millions d'euros.

M. Serge Dassault s'est inquiété que 1,5 milliard d'euros soit attribué, sur trois ans, aux 55 pôles de compétitivité validés en 2005, alors que 750 millions d'euros avaient été prévus en 2004, sur la même période, au bénéfice de 15 pôles seulement.

M. Christian Estrosi , en réponse, a expliqué que les 15 pôles de compétitivité envisagés en 2004 correspondaient à de grands pôles d'activité, alors que les 40 pôles supplémentaires labellisés en 2005 étaient de petite dimension. Il a précisé que l'attribution des crédits prévus serait, naturellement, proportionnée à l'importance de chaque pôle.

M. Jean Arthuis, président, a fait valoir le taux de consommation insuffisant des crédits inscrits aux contrats de plan Etat-régions. Il a précisé que les crédits associés à la période 2000-2006 n'avaient commencé à être utilisés qu'en 2002. En conséquence, il a indiqué qu'il était nécessaire de proroger l'actuelle génération de ces contrats, au-delà de 2006.

Puis la commission a entendu M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales, qui a présenté l'effort financier consacré par l'Etat, en 2006, aux collectivités territoriales. Il a d'abord indiqué que cet effort représentait plus de 64,9 milliards d'euros, soit environ le cinquième du budget de l'Etat, et qu'il s'inscrivait dans le cadre de la reconduction du contrat de croissance et de solidarité. Il a signalé que l'enveloppe associée à ce contrat de croissance progresserait de 2,49 % en 2006 par rapport à 2005, ayant déjà enregistré une progression de 2,87 % en 2005 par rapport à 2004, de 1,7 % en 2004 par rapport à 2003, et de 2,3 % en 2003 par rapport à 2002. Il a précisé que la dotation globale de fonctionnement (DGF), à elle seule, progresserait de 2,73 % en 2006 par rapport à 2005, ce qui représentait une augmentation de plus de 1,10 milliard d'euros. Il a signalé que la DGF des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) progresserait ainsi de plus de 577 millions d'euros, celle des départements de 297 millions d'euros, et celle des régions de 135 millions d'euros.

S'agissant des communes, il a fait valoir que l'alimentation de la dotation de solidarité urbaine (DSU), telle que prévue par la loi n° 205-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, ne serait pas remise en cause. Au contraire, il a indiqué que cette dotation, en 2006, devrait progresser de 120 millions d'euros par rapport à 2005. En outre, il a signalé que la DSU serait consolidée par trois mesures :

- en premier lieu, la consolidation de la majoration, intervenue en 2005, de 20 millions d'euros de l'enveloppe des communes de 5.000 à 10.000 habitants ;

- en deuxième lieu, l'extension aux communes de plus de 200.000 habitants des deux coefficients multiplicateurs proportionnels à la population en zone franche urbaine (ZFU) et en zone urbaine sensible (ZUS). M. Brice Hortefeux a précisé que six villes seraient concernées par cette mesure, dont Strasbourg, Lille, Marseille et Toulouse ;

- en troisième lieu, la mise en place d'une deuxième tranche de garantie pour les communes ayant perdu leur éligibilité à la DSU en 2005, à hauteur de 50 % du montant perçu précédemment.

M. Brice Hortefeux a déclaré qu'il souhaitait accentuer la solidarité au sein du système de dotations de l'Etat au bénéfice des collectivités territoriales. Il signalé qu'il avait proposé d'abonder la DGF des communes et des EPCI pour 2006 du montant de la régularisation effectuée au titre de l'année 2004, soit 92 millions d'euros. Ainsi, cette régularisation ne serait pas allouée aux communes et EPCI au prorata des attributions de 2004, mais principalement affectée à la péréquation. Il a précisé que cette mesure permettrait notamment d'assurer, parallèlement à la croissance de la DSU (de 15,8 % en 2006 par rapport à 2005), une croissance similaire de la dotation de solidarité rurale (DSR).

En outre, il a annoncé qu'un amendement au projet de loi de finances pour 2006 serait proposé par le gouvernement en vue de réserver, sur la régularisation de la DGF pour 2004, 20 millions d'euros, afin d'alimenter un nouveau « Fonds d'aide au relogement d'urgence ». Il a indiqué que cette mesure tenait compte des événements dramatiques survenus à Paris au cours du printemps et de l'été 2005, qui avaient mis en évidence la nécessité de pouvoir remédier rapidement aux risques encourus par les occupants d'immeubles en situation manifeste d'insalubrité ou de péril, notamment lorsque l'occupation était irrégulière. Il a ajouté que le nouveau fonds précité, destiné à soutenir financièrement les communes dans la mise en oeuvre des mesures d'urgence accompagnant l'évacuation d'immeubles en situation d'insalubrité ou de péril, pourrait être mobilisé pendant 5 ans.

Puis il a évoqué deux mesures visant à rénover le soutien à l'investissement des collectivités territoriales : la réforme de la dotation globale d'équipement (DGE) des départements d'une part, la clarification des règles d'attribution du Fonds de compensation de la TVA (FCTVA) d'autre part.

Concernant la première mesure, il a rappelé que le taux de concours de la fraction principale de la première part de la DGE des départements était très faible (2,77 % en 2005, contre 14 % pour le taux de concours de la deuxième part). Il a expliqué que la réforme consistait, par conséquent, dans la suppression de la première part de la DGE des départements. Il a fait valoir qu'une analyse similaire avait conduit à décider, en 1996, la suppression de la première part de la DGE des communes. Il a précisé les contreparties dont cette suppression serait accompagnée :

- d'une part, les opérations en cours seront intégralement soldées, conduisant à l'inscription de 98,4 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2006 ;

- d'autre part, les crédits correspondant à l'actuelle fraction « voirie » ainsi qu'à la majoration « potentiel fiscal », à hauteur de 54,3 millions d'euros, seront basculés dans la dotation de compensation de la DGF des départements ;

- enfin, la suppression de la première part de la DGF des départements sera compensée, partiellement, et incluse dans la dotation de compensation de la DGF. M. Brice Hortefeux a indiqué que, dans la version initiale du gouvernement, cette compensation devait s'élever à 73,6 millions d'euros et bénéficier à 71 départements, mais que, à l'issue de la première lecture à l'Assemblée nationale, elle concernait désormais 76 départements, pour un montant de 89,5 millions d'euros.

S'agissant de la clarification des règles d'attribution du FCTVA, il a indiqué que la réforme ouvrait le bénéfice de ce fonds aux biens mis à disposition de tiers, dès lors que l'utilisation de l'équipement par le tiers constituait une simple modalité d'exécution d'un service public ou répondait à un besoin d'intérêt général. Il a expliqué qu'en pratique, une collectivité, à l'avenir, pourrait bénéficier plus sûrement du FCTVA lorsqu'elle construirait une maison de retraite et en confierait la gestion à un tiers, ou encore lorsqu'elle mettrait à la disposition d'une association dépourvue d'activité concurrentielle les locaux dont elle est propriétaire. Il a ajouté que cette réforme réglait également le cas des biens confiés par les collectivités territoriales à l'Etat pour l'exercice de ses missions de service public, en les rendant éligibles aux attributions du FCTVA.

Il a souligné que cette réforme revêtait un double intérêt pour les collectivités :

- d'une part, un intérêt financier, dans la mesure où le montant du FCTVA inscrit dans le projet de loi de finances pour 2006 apparaissait supérieur à 4 milliards d'euros, soit une augmentation de 6,3 % par rapport à 2005 ;

- d'autre part, un intérêt opérationnel, étant donné que les conditions d'intervention du FCTVA ne viendraient plus interférer dans les choix effectués par les collectivités pour la gestion de ses services publics.

En outre, M. Brice Hortefeux a indiqué que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie lui avait fait part de son accord pour que les collectivités territoriales concernées par les violences urbaines exceptionnelles intervenues entre le 27 octobre et le 16 novembre dernier puissent bénéficier des attributions du FCTVA l'année même de la réalisation des dépenses d'équipement qu'elles effectueront en réparation ou reconstruction des dégâts causés aux équipements publics. Il a expliqué que cette mesure permettrait d'apporter une aide en trésorerie, l'année même des dépenses, aux collectivités territoriales confrontées à des travaux urgents qu'elles n'auraient pas pu provisionner.

Puis il a relevé l'effort consacré par le projet de loi de finances pour 2006 en faveur des espaces ruraux. Il a signalé que cet effort recouvrait :

- en premier lieu, comme il l'avait déjà mentionné, la péréquation en faveur des collectivités rurales, l'affectation de la régularisation de la DGF pour 2004 garantissant une progression de la DSR de plus 15 % ;

- en deuxième lieu, un soutien spécifique à l'investissement, tous les départements éligibles à la dotation de fonctionnement minimale (DFM) bénéficiant d'une compensation de la réforme précitée de la DGE ;

- en troisième et dernier lieu, une enveloppe de 20 millions d'euros pour soutenir les projets innovants de services au public en milieu rural, projets d'ores et déjà prêts ou qui émergeront de la concertation menée par les préfets.

En conclusion de sa présentation, M. Brice Hortefeux a souligné que l'Etat n'avait pas souhaité imposer aux collectivités territoriales les contraintes budgétaires qu'il s'imposait à lui-même.

Un large débat s'est de nouveau instauré.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », a fait part de son souhait que le domaine de compétence du ministère chargé des collectivités territoriales soit élargi à l'ensemble des mesures qui concernent ces dernières. Il a donné acte au ministre délégué que le projet de loi de finances pour 2006 répondait aux exigences légales en matière de dotations de l'Etat aux collectivités territoriales. Cependant, il a estimé que la suppression de la première part de la DGE des départements, représentant une économie faible pour l'Etat, constituait une réforme superflue.

Par ailleurs, il a déploré que les charges transférées aux collectivités territoriales, et notamment aux départements, ne soient compensées que par des attributions d'impôts non modulables. Il a souligné que la réforme de la taxe professionnelle conduirait à limiter la capacité de modulation des collectivités. En particulier, il s'est inquiété des moyens qui seraient à la disposition des départements en vue de financer les prestations sociales leur incombant désormais.

M. Brice Hortefeux, en réponse, a d'abord remercié M. Michel Mercier pour son souhait de voir élargie l'autorité du ministère chargé des collectivités territoriales. En ce qui concerne la réforme de la DGE, il a assuré qu'il s'agissait d'une économie structurelle et réelle, de l'ordre de 130 millions d'euros. Il a précisé que l'ensemble des départements étaient associés à l'effort correspondant.

S'agissant de la modulation des impositions attribuées aux collectivités territoriales en compensation des charges qui leur sont transférées, il a précisé que celle-ci serait ouverte, pour ce qui concerne la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP), par la loi de finances rectificative pour 2005. En effet, il a rappelé que le Conseil des ministres de l'Union européenne avait autorisé la France, le 24 octobre 2005, à instaurer ce mécanisme.

Puis M. Brice Hortefeux et M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ont procédé à un large échange de vues concernant les dépenses que devraient assumer les départements en 2006, rapportées aux ressources dont elles disposeraient, notamment les droits de mutation à titre onéreux.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », a regretté l'absence de simulations non anonymes. Il a été rejoint dans cette opinion par M. Jean Arthuis, président. En outre, il a souhaité que les départements ayant témoigné d'une bonne gestion, traduite par le maintien de taux de taxe professionnelle à un niveau faible, ne se trouvent pas pénalisés par les modalités de calcul retenues pour la compensation.

M. Brice Hortefeux, reconnaissant la difficulté de ce problème, a fait savoir que le gouvernement étudiait la possibilité de mettre en place un ticket modérateur, visant à corriger d'éventuels effets pervers.

M. Yves Fréville s'est déclaré favorable à l'instauration d'un tel ticket modérateur. Il a évoqué cependant la possibilité que des départements disposent de taux de taxe professionnelle faibles en raison d'une base d'imposition très forte. Il s'est interrogé sur les modalités de mise en oeuvre du correctif annoncé par le ministre délégué.

M. Jean Arthuis, président, a jugé que cette mise en oeuvre serait vraisemblablement délicate.

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