Annexe 34 bis - LA CONTAMINATION DU LOT PAR LE CADMIUM
Pendant un siècle, l'exploitation de minerai de zinc à Viviez (département de l'Aveyron) a entraîné le rejet de cadmium dans la rivière Lot, via son affluent, le Riou mort. Le minerai était apporté sur le site et l'extraction du zinc était accompagnée d'éléments métalliques comme le cadmium, le cuivre et le plomb. Ces métaux se sont accumulés dans les boues déversées dans la rivière ou dans les « crassiers », c'est-à-dire les dépôts de résidus en surface. La production de 3,4 millions de tonnes de zinc a ainsi conduit à la production de dix mille tonnes de cadmium.
L'entraînement de cadmium par lessivage par les pluies s'est ajouté aux masses stockées dans le lit du Lot estimées à 200 tonnes, dont les trois quarts ont été piégés dans les sédiments. L'apport de cadmium est caractérisé par un flux de 4,8 tonnes sous forme dissoute et 1,5 tonne sous forme particulaire. Cependant, 97 % de la charge dissoute passe sous forme particulaire.
L'ensemble a donc généré une importante pollution de la rivière jusqu'à l'estuaire et entraîné plusieurs risques, liés à l'ingestion d'eau pendant les activités de loisirs, à la contamination des produits maraîchers arrosés avec l'eau du Lot, à la contamination des poissons et des coquillages dans les parcs ostréicoles de la Gironde (les concentrations de cadmium atteignant jusqu'à 100 milligrammes par matière sèche soit cinquante fois plus que celles mesurées dans les parcs en sortie de l'estuaire).
Les travaux de lutte contre la pollution, démarrés en 1970, se sont accélérés au milieu des années 80 après une importante pollution accidentelle entraînant la mort de plusieurs tonnes de poissons. Trois types de mesures ont été adoptés :
- Isolement des zones contaminées en surface par une couche d'argile.
- Pompage des eaux polluées de la nappe phréatique.
- Traitement des eaux pompées et stockage des boues chargées en métaux sur des sites appropriés.
Le flux de cadmium a ainsi été abaissé de 70 kilos par jour à 5 kilos par jour.
Annexe 35 - RÉGLEMENTATION ET MESURES DES POLLUTIONS INDUSTRIELLES DANS L'EAU DE SURFACE
1. Le cadre juridique
a) Le code de l'environnement
Le cadre juridique reprend la loi relative aux installations classées pour la protection de l'environnement -ICPE- (loi n° 76-663 du 19 juillet 1976) et la loi sur l'eau (loi n° 92-3 du 3 janvier 1992), dont les principales dispositions ont été abrogées par l'ordonnance 2000-914 du 18 septembre 2000 . Selon l'Article L 214-8 du dit code, « Les installations soumises à autorisation ou à déclaration (...) permettant d'effectuer à des fins domestiques des prélèvements en eau superficielle ou des déversements (...) doivent être pourvues de moyens de mesures ou d'évaluation appropriés (...). »
L'Arrêté modifié du 2 février 1998 relatif aux prélèvements et à la consommation d'eau spécifie les conditions de rejet dans le milieu naturel des effluents liquides des installations classées soumises à autorisation et fixe les valeurs limites de rejet à respecter pour chaque polluant. L'arrêté précise qu'une approche « milieu » est indispensable. Ainsi, dans le cas d'un rejet en milieu sensible, ces valeurs limites peuvent être revues à la baisse.
L'application de l'ancienne réglementation sur les ICPE permet de connaître les principaux rejets industriels (eau, air, sol). Les données sont collectées auprès des exploitants. Le Ministère chargé de l'environnement publie les principaux rejets depuis 1985 (principaux rejets industriels).
Concernant les pollutions aquatiques, la législation ICPE distingue, outre les paramètres de base (matières en suspension, DBO/DCP, azote, phosphore, etc...) pour lesquels il est prévu de réaliser un bilan annuel,
- les « substances très toxiques pour l'environnement aquatique » (27 substances),
- les « substances toxiques ou néfastes à long terme pour l'environnement aquatique » (37 substances),
- les « substances nocives pour l'environnement » (40 substances),
- les « substances susceptibles d'avoir des effets néfastes pour l'environnement » (80 substances).
b) L'inventaire communautaire des pollutions
La Directive 96/61/CE du Conseil relative à la prévention et la réduction intégrées de la pollution prévoit l'inventaire des principales pollutions. Cet inventaire a été créé par la décision de la Commission du 17 juillet 2000 -JOCE 2000/479/CE sous forme d'un registre européen des émissions de polluants -EPER- European Pollutant emission Register, qui couvre 26 polluants pour l'eau. Un premier registre européen est attendu pour 2003.
La France s'apprête à réaliser ce registre sous forme d'un registre national des émissions polluantes significatives des installations classées en annonçant que les substances visées seraient plus nombreuses que celles prévues par les registres européens.
c) La directive-cadre européenne
Enfin, la Directive cadre européenne 2000/60/CE impose une identification des pressions anthropiques auxquelles sont soumises les masses d'eau de surface, et un suivi des principaux polluants en distinguant les substances prioritaires et les substances dangereuses...
Les substances dangereuses mentionnées à l'annexe IX de la directive-cadre (cadmium, mercure...) dite directive mère doivent respecter les seuils de concentration maximum fixés par les directives filles, pour atteindre un « bon état chimique ». Elles doivent être éliminées pour atteindre un « bon état écologique ». Ces seuils sont aujourd'hui fixés par les directives suivantes :
- Directive relative aux rejets de mercure (82/176/CEE - JO L 81 du 27.3.1982)
- Directive relative aux rejets de cadmium (83/513/CEE - JO L 291 du 24.10.1983)
- Directive relative au mercure (84/156/CEE - JO L 74 du 17.3.1984)
- Directive relative aux rejets d'hexachlorocyclohexane (84/491/CEE- JO L 274 du 17.10.1984)
- Directive relative aux rejets de substances dangereuses (86/280/CEE - JO L 181 du 4.7.1986).
Les substances prioritaires prévues à l'annexe X et listées par une décision du Parlement européen et du Conseil n° 2455/2001/CI du 20 novembre 2001 (JO L 331 du 15.12.2001) doivent être progressivement réduites. Les seuils ne sont pas encore fixés. La liste comprend 33 substances. Elle concerne principalement les micropolluants organiques utilisés en agriculture (principaux pesticides), mais aussi quelques micropolluants organiques issus principalement de l'activité industrielle : HAP, nickel.
2. Paramètres de mesures de la pollution de l'eau (législation ICPE)
L'exploitant d'une installation classée doit identifier les points d'entrée et de sortie des eaux qui transitent dans son installation et les quantités mises en jeu. Ce bilan permet de choisir les solutions adéquates de traitement qui lui permettront de faire des économies d'eau et de diminuer (voire supprimer) les rejets dans le milieu naturel.
La pollution de l'eau d'origine industrielle peut prendre plusieurs formes, dont les principales sont :
Les matières en suspension, minérales (rejets de minerais) ou organiques (rejets des industries agroalimentaires, des papeteries, etc.)
Les métaux
Les autres micropolluants organiques , résultant principalement de combustions (HAP) et de traitements de surface (PCB) -Voir annexe précédente-.
3. Quantification de l'impact d'un rejet
Mesurer la concentration (Cp) des paramètres ci-dessus permet d'évaluer le caractère nocif du rejet, mais ne suffit pas à rendre compte de la charge polluante effectivement rejetée dans le milieu. Pour cela, il faut calculer le flux (Fp) , c'est-à-dire la masse de polluant transférée au milieu récepteur pendant une période donnée, selon la formule suivante :
Fp = Cp X q q : débit des eaux rejetées
Paramètres de comparaison
Ø Les Matières Oxydables (M.O.)
sont calculées à partir de la DBO5 et de la DCO. La DBO est la
quantité d'oxygène consommée pour oxyder les
matières organiques biodégradables, la DCO représente la
quantité d'oxygène nécessaire pour oxyder les
matières organiques dissoutes ou en suspension. C'est le
paramètre utilisé par les Agences de l'eau pour le calcul des
redevances en matière de rejets aqueux industriels
M.O.
=
(2 X DBO
5
+ DCO)
3
Ø L'équivalent-habitant :
pour « illustrer » les données de flux de
pollution de matière organique issue de l'industrie, il est
intéressant de les convertir en pollution domestique équivalente
rejetée par une tranche de population. Pour cela, on estime qu'un
habitant engendre un rejet moyen journalier de 57 g de Matières
Oxydables (Les équivalents habitants sont des normes administratives qui
peuvent varier d'un pays à l'autre. Elles permettent essentiellement de
dimensionner les stations d'épuration.
Exemple : Une
distillerie rejette des effluents pendant ses 195 jours de
fonctionnement.
Si M.O. = 265 tonnes/an = 1 358 975 g / jour de
fonctionnement 24 000 équivalent-habitants, la pollution annuelle
de cette distillerie est équivalente à celle d'une ville de
24.000 habitants ».
L'article 32 de l'arrêté modifié du 2 février 1998 fixe ainsi les valeurs limites de concentration des eaux résiduaires rejetées au milieu naturel selon le flux journalier maximal autorisé
Extrait du Tableau récapitulatif « Pollution de l'eau »
cas général (*)
Substances |
Flux maximal autorisé (F) |
Valeurs limites de rejet* |
Débit |
L'arrêté préfectoral d'autorisation fixe le débit maximal journalier |
|
Température |
Doit être inférieure à 30° |
|
pH |
Doit être compris entre 5,5 et 9,5 |
|
Matières en suspension totales |
Si F = 15 kg/j
|
100 mg/l
|
DBO5 (sur effluent non décanté) |
Si F = 30 kg/j
|
100 mg/l
|
DCO (sur effluent non décanté) |
Si F = 100 kg/j
|
300 mg/l
|
Hydrocarbures totaux |
Si F = 100 kg/j |
10 mg/l |
Plomb et composés (en Pb) |
Si F = 5 g/j |
0,5 mg/l |
... |
... |
... |
* De nombreux cas particuliers sont susceptibles de modifier ces valeurs de « cas général ».