CHAPITRE IV - CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
A. UN DOUBLE CONSTAT D'ÉCHEC
1. Le bilan très médiocre des actions de protection de la ressource
Les réglementations relatives à la protection des eaux et les actions de prévention des pollutions diffuses ont, au mieux, un bilan médiocre. Lorsqu'un contrôle fait apparaître que 10 % seulement des prélèvements d'eau sont régulièrement déclarés ou autorisés, lorsque l'on constate que guère plus d'un tiers des captages fait l'objet de périmètres de protection, alors qu'il s'agit, pour certains captages, d'une obligation légale vieille de près de 40 ans, lorsque la police de l'eau, handicapée par une organisation anarchique, est absente ou inefficace, lorsque les sanctions ne sont que théoriques, lorsque la loi est régulièrement bafouée et n'est pas appliquée parce qu'elle est inapplicable, alors tout confirme que la protection des eaux, souvent présentée comme une priorité, n'en est pas une .
Les propositions doivent s'inspirer de quelques idées simples. D'une part, il paraît inutile de poursuivre dans des voies qui ont montré leurs limites. Quand une loi n'est pas appliquée pendant 10 à 30 ans, il y a peu de chance qu'elle le devienne sans modification substantielle. La principale modification attendue par tous - par ceux qui gèrent l'eau et par ceux qui la contrôlent-, est la simplification. Aucune réforme ne sera efficace si elle ne parvient pas à simplifier cet enchevêtrement inextricable de dispositions inapplicables.
D'autre part, il n'y a pas d'application efficace qui ne soit soutenue par une volonté politique forte. Il peut être observé que les règles de protection de la ressource sont à peu près les mêmes pour les trois secteurs impliqués dans la qualité de l'eau : l'industrie, les collectivités locales et l'agriculture.
Mais l'efficacité repose sur trois piliers : l'image que souhaite donner une profession, la réglementation et les subventions, ou, en d'autres termes, le désir, la contrainte et l'argent. Quand l'un manque, le succès tarde. Quand les trois sont coordonnés, les résultats apparaissent. Le succès de l'industrie est sur ce point incontestable. La volonté de changer d'image, d'éviter d'être en position d'accusé, la réglementation des installations classées et les subventions des agences de l'eau ont permis des améliorations très sensibles des rejets industriels. Il en va de même pour les collectivités locales qui ont massivement investi dans l'assainissement des eaux usées, longtemps responsables d'une part importante des pollutions des cours d'eau. Même si des accidents restent possibles, même si des efforts restent à conduire, les avancées dans ces deux secteurs sont significatives.
C'est au tour maintenant de l'agriculture de faire sa révolution environnementale .
Elu local depuis trente ans, agriculteur de formation, c'est avec regret que je voyais l'agriculture au banc des accusés, alors qu'elle avait atteint les objectifs que la collectivité lui avait fixés il y a quarante ans. L'agriculture n'est pas seule en cause. La ressource en eau est dégradée parce que l'environnement est dégradé ; il existe aussi de multiples sources de pollutions ponctuelles, individuelles, qui sont dédaignées. L'origine des pollutions est multiple et les responsabilités sont partagées mais il ne faut non plus nier l'évidence : l'agriculture est bien à l'origine de la plupart des pollutions en cause aujourd'hui.
La prise de conscience fait son chemin. Le temps de l'action est venu. La reconquête de la qualité de l'eau se fera avec les agriculteurs et grâce à eux, ou ne se fera pas.