EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE PREMIER
AMNISTIE DE DROIT

Article 1er
Champ d'application de l'amnistie de droit

A la différence des précédentes lois d'amnistie et avec la volonté louable d'une présentation plus rationnelle, l'article 1 er du projet de loi fixe, pour l'ensemble des infractions concernées, la date butoir définissant la période couverte par l'amnistie de droit.

Ce procédé évite les répétitions qui alourdissaient inutilement les lois antérieures : la période couverte par l'amnistie est la même quelle que soit la façon dont sont visées les infractions (nature de l'infraction, quantum...) et la mise en facteur commun de la date considérée est tout à fait opportune.

Conformément à la tradition observée sous la Vème République, la date à compter de laquelle l'amnistie cesse de s'appliquer correspond à la date d'entrée en fonction du Président de la République nouvellement élu. Le projet de loi prévoit donc que les infractions amnistiées sont celles commises avant le 17 mai 2002 : les infractions intervenues postérieurement ne sont pas couvertes par l'amnistie.

Le second alinéa de l'article 1 er précise que l'amnistie bénéficie tant aux personnes physiques qu'aux personnes morales. Pour la première fois, une loi d'amnistie prévoit expressément l'amnistie des personnes morales. Rappelons que la responsabilité pénale des personnes morales a été instituée par le nouveau code pénal entré en vigueur le 1 er mars 1994 : aussi le législateur de 1995 n'a-t-il pas éprouvé la nécessité d'inscrire une mention visant les personnes morales. Les cas de responsabilité pénale de personnes morales prévus par la loi se sont depuis lors multipliés et il apparaît aujourd'hui pertinent que la loi prévoie expressément leur amnistie.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 1 er sans modification .

SECTION 1
Amnistie en raison de la nature de l'infraction
ou des circonstances de sa commission
Article 2
Amnistie de droit des contraventions de police
et de certains délits en raison de leur nature

Les articles 2 et 3 circonscrivent le champ de l'amnistie réelle : celle-ci est définie par la nature des infractions concernées.

L'article 2 vise ainsi très traditionnellement :

1°) Les contraventions de police et les contraventions de grande voirie.

L'amnistie, en bloc, des contraventions de police est cependant relativisée par la liste des exclusions figurant à l'article 13. Sont ainsi exclues du champ de l'amnistie par le 9° de l'article 13 l'ensemble des contraventions de troisième, quatrième et cinquième classes définies par le code de la route ainsi que certaines des contraventions de la deuxième classe prévues par ce code relatives à la conduite ou à l'équipement des véhicules et au stationnement sur les emplacements réservés aux véhicules de transport public de voyageurs, aux taxis, aux véhicules affectés à un service public ou encore aux véhicules arborant un macaron Grand Invalide de Guerre (GIG) ou Grand Invalide Civil (GIC) (article R. 417-10, 2° et 8° du code de la route).

Le projet de loi en matière d'amnistie des contraventions est donc beaucoup plus strict qu'en 1995.

Comme en 1988 et 1995, l'amnistie des contraventions de grande voirie est prévue. Cette mention a été rendue nécessaire par l'évolution de la jurisprudence du Conseil d'Etat puis du Conseil constitutionnel en 1987 opérant une distinction entre contraventions de police et contraventions de grande voirie.

2°) Les délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue, à l'exception de toute autre peine ou mesure.

L'amnistie des délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue est prévue par toutes les lois d'amnistie présidentielle depuis 1966. La précision selon laquelle le délit ne doit être assorti d'aucune autre peine ou mesure que l'amende a été introduite en 1995, consacrant une jurisprudence constante de la Cour de cassation.

3°) Les délits prévus par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

La loi d'amnistie s'est enrichie de cette rubrique en 1981. Observons cependant qu'en 1995 (5° de l'article 2 de la loi du 3 août), le champ de l'amnistie se restreignait aux délits résultant de la loi de 1881 passibles de moins de dix ans d'emprisonnement.

La portée de cette rubrique est cependant restreinte par les 16° et 25° de l'article 13 qui excluent du bénéfice de l'amnistie d'une part, l'apologie et la négation des crimes contre l'humanité et la diffamation ou l'injure envers des personnes à raison de leur appartenance à une race ou à une religion, d'autre part la diffamation ou l'injure à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public.

4°) Cette rubrique vise une série d'infractions au code du service national et au code de justice militaire.

Les mêmes infractions figuraient dans le champ de l'amnistie en 1988 et 1995. Elles sont recensées dans les tableaux ci-après :

Infractions au code de justice militaire dont l'amnistie est prévue

Articles

Infraction

Peine maximale

d'emprisonnement

encourue

397

Insoumission

1 an
10 ans en temps de guerre

398 à 406

Désertion à l'intérieur et à l'étranger

3 ans, 5 ans ou 10 ans
selon les cas

414

Provocation à la désertion

3 ou 10 ans

415

Recel de déserteur

2 ans

418

Mutilation volontaire

5 ou 10 ans

429 alinéa 1 er

Destruction

3 ou 5 ans

438

Usurpation d'uniformes

et décorations

2 ans

441

Incitation aux actes contraires

au devoir ou à la discipline

2 ans

447

Refus d'obéissance

2 ou 5 ans

451

Voies de fait

3 ou 5 ans

453

Outrage à un supérieur

2 ou 5 ans

456 alinéa 3

Violences à sentinelle

3 ans

457

Insulte à sentinelle

6 mois

460

Violences sur un subordonné

5 ans

461

Outrage à subordonné

1 an

465

Infractions aux consignes

2 ou 5 ans

468 et 469
alinéa 1

Abandon de poste

6 mois,
1 an, 5 ans ou 10 ans

Infractions au code du service national dont l'amnistie est prévue

Articles

Infraction

Peine maximale

d'emprisonnement

encourue

L. 118

Fait pour un appelé de s'être rendu impropre au service

5 ou 10 ans

L. 124

Insoumission d'un appelé

1 ou 10 ans

L. 128

Recel d'un appelé recherché

3 ans

L. 129

Provocation à l'insoumission

5 ans

L. 131

Tentative de recel d'un appelé recherché ou

de provocation à l'insoumission

3 et 5 ans

L. 134

Incitation au renvoi ou à la destruction de pièces telles que la carte du service national

5 ans

L. 149-7

Désertion en cas de service accompli

dans la police nationale

3 ans, 5 ans ou 10 ans

L. 149-8

Abandon de poste d'un policier auxiliaire

6 mois ou 5 ans

L. 149-9

Refus d'obéir d'un policier auxiliaire

2 ans, 5 ans ou perpétuité

L. 156

Désertion des services de l'aide technique ou de la coopération

3 ou 10 ans

L. 159

Non exécution de mission

2 ou 5 ans

Comme dans les deux lois d'amnistie précédentes, le projet de loi précise que l'amnistie des délits de désertion (articles 398 à 406 du code de justice militaire) est subordonnée à ce que le point de départ de computation des délais prévus pour qualifier le fait de désertion soit antérieur à la date butoir du 17 mai 2002 et à la présentation volontaire du déserteur devant l'autorité militaire compétente avant le 31 décembre 2002.

Outre les infractions visées dans les deux tableaux qui précèdent, le 4° de l'article 2 se réfère également aux articles L. 146 à L. 149 du code du service national. Ces articles ont été abrogés postérieurement à la dernière loi d'amnistie par l'article 54 de la loi n° 59-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense. Il convient donc d'y faire référence pour couvrir les infractions commises avant 1999.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 2 sans modification .

Article 3
Amnistie de certains délits passibles
de moins de dix ans d'emprisonnement
en raison des circonstances de leur commission

Cet article énumère un certain nombre de catégories de délits compris dans le champ de l'amnistie dès lors que la peine maximale applicable est inférieure à dix ans d'emprisonnement. Notons que les cinq catégories visées figuraient déjà à l'article 2 de la loi d'amnistie du 3 août 1995. Il s'agit :

1°) des délits commis à l'occasion de conflits du travail , toujours amnistiés depuis 1959, et des délits commis à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés et d'agents publics , y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans des lieux publics, amnistiés depuis 1988. Est ajoutée par rapport aux lois précédentes la référence aux délits commis à l'occasion d'activités revendicatives par des membres de professions libérales ;

2°) des délits commis à l'occasion de conflits relatifs aux problèmes de l'enseignement , amnistiés depuis 1969, et des délits relatifs à la reproduction d'oeuvres ou à l'usage de logiciels à des fins pédagogiques et sans but lucratif comme en 1995 ;

3°) des délits en relation avec des conflits à caractère industriel, agricole, rural, artisanal ou commercial , y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans les lieux publics, selon une formule identique à celle figurant dans la loi de 1995, elle-même inspirée de la loi d'amnistie de 1988 ;

4°) des délits en relation avec des élections de toute nature , à l'exception de ceux en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis politiques, selon la formule consacrée en 1995. Les lois de 1981 et 1988 visaient déjà ces délits mais prévoyaient des exceptions différentes (délits concernant le vote par procuration et par correspondance notamment). La loi de 1988 prévoyait l'amnistie des délits en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis politiques ;

5°) des délits en relation avec la défense des droits et intérêts des Français rapatriés d'outre-mer , visés par chaque loi d'amnistie depuis 1981.

La liste des délits inclus dans le périmètre de l'amnistie reste donc tout à fait habituelle, les circonstances particulières de leur commission justifiant cette mesure d'apaisement afin de conforter la cohésion nationale.

Outre cette liste contribuant à la définition du champ de l'amnistie, l'article 3 du projet de loi est complété par deux alinéas pour préciser la procédure de constat de l'amnistie pour les condamnations prononcées de façon définitive et pour fixer le régime de l'amnistie en cas de condamnation relative à des infractions multiples.

Reprenant une disposition traditionnelle des lois d'amnistie, le présent projet de loi précise que le constat de l'amnistie incombe au ministère public près la juridiction ayant prononcé la condamnation, soit de sa propre initiative, soit sur requête du condamné ou de ses ayants-droit. Il s'agit de permettre le retrait effectif du casier judiciaire de la fiche relative à la condamnation.

Le dernier alinéa reproduit un dispositif également habituel dans les lois d'amnistie et qui figurait à l'article 19 de la loi de 1995 : en cas de condamnation pour infractions multiples, l'amnistie ne s'applique que si le délit amnistié comme se rattachant à l'une des catégories de délits visées par l'article 3 est puni d'une peine plus forte ou égale à celles dont sont passibles les autres infractions poursuivies. Toutefois, cette règle ne s'appliquera pas si l'une desdites infractions est exclue du bénéfice de l'amnistie : le condamné ne sera alors pas amnistié.

Cette disposition a été insérée dans l'article 3, mais peut également trouver à s'appliquer à l'article 2, qui prévoit l'amnistie d'infractions à raison de leur nature. Votre commission vous soumet, en conséquence, un amendement tendant à disjoindre du présent article son dernier alinéa pour en faire un article autonome.

Elle vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 3
Application à l'ensemble des infractions visées par la section 1
du régime applicable en matière d'infractions multiples

Votre commission vous propose d'insérer par un amendement dans un article autonome les dispositions du dernier alinéa de l'article 3, relatif aux cas de condamnations multiples, afin qu'elles s'appliquent à l'ensemble de la présente section et non seulement aux infractions mentionnées à l'article 3.

SECTION 2
Amnistie en raison du quantum
ou de la nature de la peine
Article 4
Amnistie des délits punis d'une peine d'amende

Cet article prévoit l'amnistie des délits qui ont été ou seront punis de peines d'amende ou de jour-amende.

Rappelons qu'aux termes de l'article 131-5 du code pénal, lorsqu'un délit est puni d'une peine d'emprisonnement, la juridiction peut prononcer une peine de jours-amende consistant pour le condamné à verser au Trésor une somme dont le montant global résulte de la fixation par le juge d'une contribution quotidienne pendant un certain nombre de jours.

En ce qui concerne les amendes, le présent article prévoit, comme les précédentes lois d'amnistie, que, si l'amende est supérieure à 750 €, l'amnistie ne sera acquise qu'après le paiement de cette amende ou après qu'a été subie l'incarcération prévue par l'article 131-25 du code pénal.

L'article 131-25 du code pénal dispose en effet que le défaut de paiement correspondant à une peine de jour-amende entraîne l'incarcération du condamné pour une durée qui correspond à la moitié du nombre de jours-amende impayés.

Enfin, le présent article prévoit que, pour les amendes d'un montant supérieur à 750  €, l'amnistie sera également acquise après exécution de la contrainte par corps, celle-ci ne faisant pas obstacle au recouvrement ultérieur de l'amende.

Dans un souci de clarté, votre commission vous propose par un amendement , de préciser que le présent article concerne les délits punis de peines d'amende ou de jour-amende, à l'exclusion de l'une des peines mentionnées à l'article 5.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 4 ainsi modifié .

Article 5
Amnistie des délits punis de certaines peines

Le présent article prévoit, comme le précédent, l'amnistie de délits en raison de la peine prononcée.

Il prévoit tout d'abord l'amnistie de délits qui ont été ou seront punis de peines d'emprisonnement . Une distinction, traditionnelle, est opérée entre, d'une part, les peines d'emprisonnement ferme ou accompagné d'un sursis avec mise à l'épreuve ou d'un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général et, d'autre part, les peines d'emprisonnement assorties du sursis simple.

Dans le premier cas, seront amnistiées les infractions punies de peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois au plus . Dans le second cas, l'amnistie s'appliquera aux infractions punies de peines d'emprisonnement inférieures ou égales à six mois au plus .

Ainsi, le présent projet de loi marque une nouvelle diminution des quanta retenus pour bénéficier d'une amnistie.

1959 à
1974

1981

1988

1995

Projet
de loi

Peines d'emprisonnement sans sursis ou accompagnées d'un sursis avec mise à l'épreuve ou d'un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général

3 mois

6 mois

4 mois

3 mois

3 mois

Peines d'emprisonnement avec application du sursis simple

12 mois

15 mois

12 mois

9 mois

6 mois

Le texte prévoit que les condamnations à une peine d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve supérieure à trois mois mais inférieure ou égale à six mois sont également amnistiées, à la condition que la condamnation ait été déclarée non avenue ou que le délai d'épreuve se soit achevé sans révocation .

En ce qui concerne les condamnations à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'effectuer un travail d'intérêt général, la loi d'amnistie de 1995 prévoyait une amnistie sans condition d'exécution pour les condamnations à une peine inférieure ou égale à trois mois d'emprisonnement. Elle prévoyait également l'amnistie des condamnations à des peines inférieures à neuf mois à la condition que le condamné ait exécuté le travail d'intérêt général sans avoir fait l'objet d'une décision ordonnant l'exécution de la peine ou la révocation du sursis.

Le présent article instaure un régime plus restrictif puisqu'il prévoit que les condamnations à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'effectuer un travail d'intérêt général sont amnistiées lorsque le travail a été effectué et que le sursis n'a pas été révoqué, si elles sont inférieures ou égales à six mois d'emprisonnement.

Les peines mixtes (emprisonnement en partie ferme et en partie assortie d'un sursis simple ou avec mise à l'épreuve) sont amnistiées lorsque le quantum de la partie ferme est inférieur ou égal à trois mois et que la totalité de la peine est inférieure ou égale à six mois, sous condition d'exécution de la période de mise à l'épreuve sans révocation.

Le présent article prévoit l'amnistie des peines de substitution à l'emprisonnement. Cela concerne :

- les peines de travail d'intérêt général , prononcées à l'encontre des majeurs (article 131-8 du code pénal) et des mineurs âgés de seize à dix-huit ans (article 20-5 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante). Comme en 1995, l'amnistie n'est acquise qu'après l'accomplissement par le condamné de l'intégralité du travail d'intérêt général ;

- les peines alternatives mentionnées aux 1° à 6° et 8° à 10° de l'article 131-6 du code pénal : il s'agit des peines de suspension du permis de conduire, d'interdiction de conduire certains véhicules, de l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant cinq ans au plus, de la confiscation d'un véhicule, de l'immobilisation d'un véhicule, de l'interdiction de port d'armes, du retrait du permis de chasser, de l'interdiction d'émettre des chèques et de la confiscation de la chose qui a servi à commettre l'infraction ou qui en est le produit.

Le projet de loi initial prévoyait également l'amnistie de la peine de confiscation d'une arme, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, M. Michel Hunault, a exclu cette peine de l'amnistie. Votre commission est favorable à cette modification. Par cohérence, elle vous propose, par un amendement , d'exclure du bénéfice de l'amnistie la peine d'interdiction de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation.

Il convient de noter que le présent projet de loi ne mentionne pas parmi les peines amnistiées la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale, qui figurait pourtant dans la précédente loi d'amnistie ;

- les peines complémentaires prononcées à titre de peines principales en application des dispositions de l'article 131-11 du code pénal. L'article 131-11 du code pénal prévoit que lorsqu'un délit est puni d'une ou de plusieurs peines complémentaires mentionnées à l'article 131-10, la juridiction peut ne prononcer que la peine complémentaire ou l'une ou plusieurs des peines complémentaires encourues à titre de peine principale.

Les peines complémentaires mentionnées à l'article 131-10 peuvent emporter interdiction, déchéance, incapacité ou retrait d'un droit, injonction de soins ou obligation de faire, immobilisation ou confiscation d'un objet, fermeture d'un établissement ou affichage de la décision prononcée ou diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle.

Toutefois, le projet de loi exclut de l'amnistie les peines mentionnées à l'article 15, à savoir la faillite personnelle, l'interdiction de territoire, l'interdiction de séjour, l'interdiction des droits civiques, civils et de famille, l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale, les mesures de démolition, la dissolution de la personne morale, l'exclusion des marchés publics ainsi que les mesures prévues par l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante 1 ( * ) .

Enfin, le présent article dispose que lorsque les peines mentionnées ont été prononcées en même temps qu'une peine d'amende ou de jour amende, l'amnistie n'est acquise qu'après le paiement de l'amende lorsque celle-ci est supérieure à 750 €.

Sur cet article, outre un amendement rédactionnel, votre commission des Lois vous soumet un amendement ayant pour objet de combler une lacune du dispositif en prévoyant que les peines fermes résultant de la révocation d'une peine avec sursis assortie d'un travail d'intérêt général ne sont pas amnistiées.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié .

Article 6
Amnistie des infractions
ayant donné lieu à une dispense de peine
et des mesures d'admonestation et de remise à parents
prononcées à l'encontre d'un mineur délinquant

Comme les précédentes lois d'amnistie, le présent article prévoit l'amnistie des infractions ayant donné lieu à une dispense de peine. L'article 132-58 du code pénal prévoit qu'en matière correctionnelle ou contraventionnelle, la juridiction peut, après avoir déclaré le prévenu coupable et statué, s'il y a lieu, sur la confiscation des objets dangereux ou nuisibles, dispenser le prévenu de toute autre peine.

La dispense de peine peut être accordée, conformément à l'article 132-59 du code pénal, lorsque le reclassement du coupable est acquis, que le dommage causé est réparé et que le trouble résultant de l'infraction a cessé.

Le présent article prévoit également l'amnistie de certaines mesures prononcées au titre de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante : les admonestations, les remises à parents, enfin la dispense de toute mesure.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 6 sans modification .

Article 7
Conditions du bénéfice de l'amnistie en raison
du quantum ou de la nature de la peine

Cet article précise les conditions dans lesquelles un condamné bénéficiera de l'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine.

En vertu du présent article, l'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine ne serait acquise qu'après condamnation devenue définitive. De fait, il est indispensable d'attendre que toutes les voies de recours aient été épuisées pour connaître la peine prononcée et savoir si celle-ci entre bien dans le champ d'application des articles 4 à 6 du projet de loi.

Une exception est toutefois prévue, comme pour les lois d'amnistie précédentes, pour les condamnations prononcées en l'absence du prévenu, c'est-à-dire lorsque la condamnation est prononcée par défaut, itératif défaut (absence du prévenu après opposition à un jugement par défaut) ou réputée rendue contradictoirement malgré l'absence du prévenu en application des articles 410 et 411 du code de procédure pénale. Dans ces hypothèses, l'amnistie est acquise dès le prononcé du jugement, si deux conditions sont remplies : l'absence de partie civile d'une part, le défaut d'appel ou de pourvoi en cassation d'autre part.

Les articles 498 et 499 du code de procédure pénale disposent que le délai d'appel en cas de jugement rendu en l'absence du prévenu ne court qu'à compter de la signification du jugement. En prévoyant que, dans ce cas, l'amnistie peut être acquise sans qu'il y ait lieu à signification, le projet de loi permet d'éviter l'accomplissement de cette formalité. Il permettra par ailleurs d'effacer du casier judiciaire les condamnations prononcées avant l'entrée en vigueur de la loi d'amnistie et non encore signifiées à cette date.

Par rapport aux précédentes lois d'amnistie, le présent projet introduit cependant une novation puisqu'il précise que l'amnistie n'est acquise dès la décision, en l'absence du condamné, que si elle n'est pas soumise à l'exécution de la peine. L'amnistie de certaines peines est en effet subordonnée à leur exécution.

Le présent article préserve les droits du condamné amnistié en précisant qu'il conserve la possibilité de former opposition, d'interjeter appel ou de se pourvoir en cassation s'il fait ultérieurement l'objet d'une assignation sur intérêts civils. Le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation sera alors calculé à compter du jour où le condamné a eu connaissance de cette assignation.

Enfin, le présent article précise que lorsqu'un prévenu a formé un appel, une opposition ou un pourvoi en cassation avant l'entrée en vigueur de la loi d'amnistie contre une condamnation amnistiée, il peut, par déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision ou de l'établissement pénitentiaire dans lequel il est détenu, se désister de la voie de recours exercée. Ce désistement rendrait caducs tous les recours incidents, sauf ceux de la partie civile et des autres prévenus, et rendrait définitive la condamnation sur l'action publique, ce qui permettrait l'application de l'amnistie.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 7 sans modification .

SECTION 3
Contestations relatives à l'amnistie
Article 8
Règles applicables aux contestations
de l'amnistie de droit

Dans des termes similaires aux deux précédentes lois d'amnistie, le présent article définit les règles applicables aux contestations de l'amnistie de droit ; il renvoie à cet égard aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 778 du code de procédure pénale qui fixe la procédure de rectification en cas de condamnation d'une personne sous une fausse identité. La demande devra ainsi être adressée au président du tribunal ou de la cour qui a rendu la décision ou encore, si la décision a été rendue par une cour d'assises, à la chambre de l'instruction.

Le principe étant posé, plusieurs situations particulières sont ensuite envisagées :

- lorsque la décision émane d'une juridiction militaire siégeant en France, la requête sera soumise à la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle est établi le siège de cette juridiction ;

- lorsque la décision a été rendue par un tribunal aux armées siégeant à l'étranger, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris est désignée pour recevoir la requête en contestation ;

- en matière de contravention de grande voirie, la juridiction compétente pour recevoir la requête est celle qui a prononcé la condamnation.

Enfin, l'article 8 précise qu'en l'absence de condamnation définitive, les contestations doivent être soumises à la juridiction compétente pour statuer sur la poursuite.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 8 sans modification .

* 1 L'article 6 du projet de loi prévoit cependant une exception à l'exclusion de l'amnistie des mesures prononcées en application de l'ordonnance de 1945.

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