LES MODIFICATIONS ADOPTÉES A L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Un
amendement présenté par M. Gilbert Gantier, rapporteur
spécial de la commission des finances pour l'équipement, le
transport et le logement, a été adopté en première
lecture à l'Assemblée nationale, visant à modifier la
répartition des crédits du budget annexe afin d'identifier
précisément les dépenses d'investissement pour la
sécurité.
Il s'agissait d'un
aménagement de l'imputation budgétaire de
10 millions d'euros en autorisations de programme et en crédits de
paiement
.
En seconde délibération, l'Assemblée nationale est
revenue sur son vote, à la demande du gouvernement.
L'exposé des motifs indique que le chapitre 82-01 (Etudes et
équipements) retrace uniquement les dépenses d'infrastructures
aéroportuaires, ainsi que les crédits de paiement relatifs aux
opérations de sûreté ouvertes antérieurement au 31
décembre 1999 sur le budget annexe de l'aviation civile et
nécessaires pour terminer lesdites opérations.
Compte tenu de la mise en place depuis la loi de finances pour 1999 d'un
support budgétaire distinct pour retracer les opérations
nouvelles de sûreté, le FIATA, le gouvernement considère
qu'il n'est ni nécessaire, ni opportun, de recréer sur le BAAC un
chapitre 82-03 doté en AP et en CP de 10 millions d'euros au titre
de la sûreté.
Les 10 millions d'euros ont donc été rétablis sur le
chapitre 82-01 (Etudes et équipements), conformément à ce
qui figurait dans le projet de loi de finances initiale.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une séance tenue dans l'après-midi sous la présidence de
M. Alain Lambert, président, la commission a procédé
à l'examen du rapport des crédits de l'équipement, des
transports et du logement : III.- Transports et sécurité
routière : . Aviation et aéronautique civiles, et du budget
annexe de l'aviation civile, sur le rapport de M. Yvon Collin, rapporteur
spécial.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a souligné qu'il devait se
livrer à un exercice un peu paradoxal en présentant les
crédits destinés aux transports aériens, compte tenu de la
situation complexe et incertaine de ce secteur, et du fait du changement
radical de l'environnement du projet de budget depuis les attentats du 11
septembre, le Gouvernement ayant annoncé, depuis cette date, que des
modifications substantielles seraient nécessaires.
Il a indiqué que, du point de vue des recettes, le projet était
caractérisé essentiellement par une stabilisation des taux de la
taxe de l'aviation civile et par la suppression de la subvention versée
par le budget général, l'aviation civile devenant ainsi le seul
moyen de transport financé exclusivement par ses usagers, et, plus
marginalement, par le contribuable local. Par ailleurs, il a noté que
l'endettement du budget annexe était stabilisé, les emprunts
nouveaux correspondant à peu près au remboursement des emprunts
passés.
Du côté des dépenses, il a souligné que les
dépenses de personnel augmentaient de 8,4 %, sous l'effet du protocole
d'accord de la direction générale de l'aviation civile
signé pour trois ans le 7 décembre 2000. Ce protocole
prévoit des mesures catégorielles de revalorisation des
rémunérations, fixe les modalités de mise en oeuvre des 35
heures, et prévoit surtout la création de 446 emplois nouveaux
par an pendant trois ans, dont 210 contrôleurs aériens, afin
d'absorber la croissance du trafic. Il a considéré que les
protocoles triennaux conduisaient à une croissance trop importante des
rémunérations des personnels, alors même que la
durée du temps de travail sera réduite, rappelant que cette
augmentation des coûts était à la charge des compagnies
aériennes.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a indiqué que l'augmentation
des ressources du budget annexe était complètement
absorbée par la croissance des charges de personnel, et que les
dépenses d'investissement diminuaient de près de 10 %,
après une baisse de 2,8 % en 2001.
Il a rappelé que les attentats du 11 septembre avaient des
conséquences négatives considérables pour le transport
aérien, dont certaines appelaient des mesures immédiates, comme
la mise en oeuvre du plan vigipirate renforcé dans les aéroports
ou la compensation des compagnies aériennes pour le préjudice
subi lors de la fermeture du ciel américain. Il a indiqué que ces
éléments, de même que la prise en charge des mesures de
sûreté mises en oeuvre par les compagnies aériennes
elles-mêmes, seraient exceptionnellement financées par l'Etat en
2002.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a souligné que le
renforcement des mesures de sûreté constituait une
nécessité pour l'avenir et que les dépenses
correspondantes devraient augmenter de manière importante au cours des
prochaines années, notamment en matière de personnel, afin
d'assurer le contrôle des passagers et des bagages en soute. Il a
indiqué que ces mesures seraient financées par les passagers, par
l'intermédiaire de la taxe d'aéroport, dont les plafonds seraient
relevés, et par le Fonds d'intervention pour les aéroports et le
transport aérien (FIATA), dont les ressources proviennent de la taxe
d'aviation civile.
S'agissant du budget annexe, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a
noté que ses recettes seraient moins importantes que prévues en
2002, dans l'hypothèse où le trafic ne progresserait que de 2,6
%, comme le prévoit l'agence européenne Eurocontrol. Il a
indiqué que la diminution de la croissance du trafic affecterait le
produit des redevances, mais surtout celui de la taxe d'aviation civile, qui
est assise sur le nombre de passagers et le volume de fret transportés.
Il a souligné que l'équilibre financier du budget annexe de
l'aviation civile serait vraisemblablement remis en cause si la crise du
transport aérien devait durer. Dans cette hypothèse, il a
estimé que des sources de financement nouvelles devraient être
trouvées, soit par un nouvel accroissement du taux de la taxe d'aviation
civile, qui devra cependant tenir compte de la situation concurrentielle des
compagnies aériennes françaises, soit par un accroissement des
emprunts, qui devra tenir compte du niveau d'endettement élevé du
budget annexe, soit par une subvention du budget général.
Le budget annexe serait en tout état de cause fragilisé, comme
les compagnies aériennes, qui constituent sa principale source de
financement. M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a
considéré qu'une réduction des coûts fixes serait
alors indispensable, pour le budget annexe comme pour les compagnies
aériennes. La question de la dénonciation du protocole d'accord
de la direction générale de l'aviation civile prévoyant la
création de 1.339 emplois sur trois ans, devrait alors être
posée. Celui-ci reposait en effet sur une hypothèse de croissance
du trafic aérien de près de 6 % par an.
Enfin, il a estimé que la question du réengagement financier et
opérationnel des pouvoirs publics dans le domaine du transport
aérien, notamment en matière de sûreté, était
plus que jamais posée. Il a remarqué que les Etats-Unis,
pionniers de la libéralisation du secteur, étaient intervenus
massivement en faveur de leurs compagnies aériennes, alors que les Etats
membres de l'Union européenne s'étaient montrés davantage
soucieux de prévenir les distorsions de concurrence et d'engager une
restructuration du secteur à l'échelle européenne.
Abordant les crédits du transport aérien, il a indiqué que
les crédits de recherche étaient en légère
diminution, tandis que les avances remboursables progressaient de
manière importante, afin de financer le développement de l'Airbus
A380. Il s'est félicité de la progression du montant de ces
avances, destinées à permettre le développement d'un
projet ambitieux. En revanche, il a regretté la réduction des
crédits de recherche, alors que les besoins de renforcement des
dispositifs de sécurité dans les appareils sont importants.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a rappelé que les
incertitudes pesant sur le transport aérien fragilisaient les
entreprises françaises de ce secteur d'activité. Il a craint que
des incertitudes ne persistent en matière de sûreté, en
dépit des mesures prises par de nombreux pays, considérant que
seule une coopération internationale renforcée et permettant de
contrôler le respect des normes par les différents Etats
permettrait de s'assurer d'un niveau minimal de sûreté.
Un large débat s'est alors ouvert.
M. Alain Lambert, président, a souhaité savoir si les aides
versées par les Etats-Unis aux compagnies aériennes
américaines ne risquaient pas de provoquer des distorsions de
concurrence vis-à-vis de leurs rivales, et s'est interrogé sur
les mesures prises afin de renforcer la prise en compte de l'environnement dans
le développement des infrastructures aéroportuaires.
M. Maurice Blin a souligné que les aides financières
versées aux compagnies américaines étaient beaucoup plus
importantes que celles décidées dans le cadre de l'Union
européenne. Il a noté qu'il en allait de même des aides aux
constructeurs. Il s'est inquiété de l'importance des
dépenses de fonctionnement au sein du budget de l'aviation civile,
compte tenu de la diminution du trafic attendu suite aux attentats du 11
septembre 2001. Enfin, il a souhaité obtenir des précisions sur
le coût du renforcement des mesures de sûreté
décidées par le Gouvernement.
M. Denis Badré a souhaité obtenir des précisions quant
à la coordination des investissements de contrôles aériens
au sein de l'Union européenne. Compte tenu des menaces actuelles, il
s'est interrogé sur l'opportunité de modifier sensiblement les
couloirs aériens et d'élargir l'interdiction de survol de Paris
à la « petite couronne ».
Il s'est également demandé si le projet de construction d'un
troisième aéroport dans la région parisienne
n'était pas remis en cause par les événements
récents.
M. Roland du Luart s'est inquiété du nombre de badges
d'accès aux zones réservées d'Aéroports de Paris en
circulation et a souhaité connaître les mesures prises afin de
maîtriser les risques liés à cette situation. Il a
également souhaité connaître le coût de la future
liaison routière entre Toulouse et Bordeaux, destinée à
transporter les éléments de fuselage de l'Airbus A380.
M. Jacques Oudin a souligné que la saturation de l'espace aérien
entraînait des retards de plus en plus importants. Il a
considéré que le développement des liaisons ferroviaires
à grande vitesse permettait de détourner une partie du trafic
aérien vers le rail, en souhaitant cependant que les connexions avec les
aéroports de province soient développées à l'avenir.
En réponse à M. Alain Lambert, président, M. Yvon Collin,
rapporteur spécial, a rappelé que les compagnies aériennes
américaines étaient globalement fragiles financièrement
avant les événements du 11 septembre, ce qui explique en partie
l'importance des aides consenties par le Gouvernement. Il a souligné que
l'Union européenne avait décidé de limiter
considérablement le montant des aides attribuées aux compagnies
aériennes, craignant une distorsion de concurrence sur le marché
européen, et estimant nécessaire d'engager une restructuration du
secteur des transports aériens en Europe. Il a indiqué que les
nuisances environnementales liées au développement des structures
aéroportuaires étaient mieux prises en compte que par le
passé, citant notamment l'existence de l'autorité de
contrôle des nuisances sonores aéroportuaires ainsi que la mise en
oeuvre de chartes environnementales par les gestionnaires d'aéroports.
En réponse à M. Maurice Blin, il a reconnu que les aides
versées par le gouvernement américain étaient beaucoup
plus élevées qu'en Europe, s'agissant des compagnies
aériennes, mais également des entreprises de construction
aéronautique. Il a rappelé que ces entreprises
bénéficiaient des financements accordés par les agences
gouvernementales américaines dans le cadre des programmes militaires,
tandis que la France, tenue par ses engagements internationaux, ne versait que
des avances remboursables.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a considéré que
l'importance des dépenses de fonctionnement risquait de mettre à
mal l'équilibre financier du budget annexe de l'aviation civile si la
reprise du trafic aérien attendue par le Gouvernement n'était pas
au rendez-vous.
Il a précisé que le renforcement des mesures de
sûreté représentait un coût d'environ 1,1 milliard de
francs à la charge des compagnies aériennes, l'État
prenant à sa charge les mesures exceptionnelles prises dans le cadre du
plan vigipirate renforcé.
En réponse à M. Denis Badré, il a indiqué que la
coordination des investissements en matière de contrôle
aérien au sein de l'Union européenne se développait
considérablement. S'agissant du survol des villes et de la proche
banlieue parisienne, il a rappelé que l'importance du trafic
aérien et l'existence de zones militaires limitaient les marges de
décision en la matière. Il a ajouté qu'il avait toujours
été opposé à la construction d'un troisième
aéroport en région parisienne, considérant qu'il
était préférable de développer le site de Roissy et
d'augmenter les capacités de trafic des principaux aéroports de
province.
En réponse à M. Roland du Luart, M. Yvon Collin, rapporteur
spécial, a rappelé que près de 40.000 badges
d'accès aux zones réservées d'Aéroports de Paris
étaient « dans la nature », en sus des 50.000 badges
appartenant aux personnels habilités à travailler dans ces zones.
Il a indiqué que des mesures immédiates avaient été
prises afin de mieux contrôler l'accès à ces zones, mais a
considéré qu'il serait indispensable, à l'avenir,
d'accroître la vigilance s'agissant des personnels travaillant dans les
aéroports.
Il a souligné que l'itinéraire de la route destinée
à transporter les éléments du futur Airbus A380 n'avait
toujours pas été décidé et qu'il n'était par
conséquent pas possible d'en connaître le coût.
En réponse à M. Jacques Oudin, il a observé que les
retards dans le transport aérien seraient susceptibles de
s'accroître à l'avenir, compte tenu du renforcement des mesures de
sûreté.
Il a estimé qu'il convenait de développer les connexions entre le
réseau ferroviaire et le réseau aérien, afin de favoriser
un développement équilibré des transports sur le
territoire.
M. Alain Lambert, président, a alors demandé à la
commission de se prononcer sur les crédits du ministère de
l'équipement, des transports et du logement.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial pour les services communs et le
logement, a souligné que le budget des services communs n'était
pas satisfaisant et que celui du logement était marqué par une
réduction regrettable des crédits pour dépenses
d'investissement. Enfin, il a considéré que le faible taux de
réponse à son questionnaire budgétaire était
inadmissible.
M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est exprimé en
faveur d'un rejet du projet de budget du ministère de
l'équipement, des transports et du logement. Il a
considéré que les dépenses d'investissement étaient
sacrifiées au profit des dépenses de fonctionnement et de
personnel, soulignant la diminution des subventions d'investissement pour
l'Agence nationale de l'amélioration de l'habitat, l'absence de
financement des investissements en matière de transport ferroviaire, les
retards pris dans l'exécution des contrats de plan Etat-régions
en matière de routes et l'insuffisance des moyens consacrés au
tourisme, secteur fortement touché par la conjoncture actuelle.
La commission a alors décidé de proposer au Sénat de
rejeter les crédits du ministère de l'équipement, des
transports et du logement.
M. Alain Lambert, président, a alors demandé à la
commission de se prononcer sur les crédits du budget annexe de
l'aviation civile.
M. Yvon Collin s'en est remis à la sagesse de la commission,
considérant que ce projet de budget avait été
préparé bien avant les attentats du 11 septembre et ne pouvait
pas prendre en compte les mesures annoncées par le Gouvernement depuis
cette date.
La commission a alors décidé de proposer au Sénat de
rejeter les crédits du budget annexe de l'aviation civile.