ARTICLE 41

Les délais de vote du projet de loi de finances de l'année et des projets de loi de finances rectificative

Commentaire : le présent article fixe les délais de vote des projets de loi de finances de l'année et rectificative.

L'article 47 de la Constitution, précisé par l'article 39 de l'ordonnance organique, prévoit des conditions très strictes pour l'examen des projets de loi de finances. Celles-ci se justifient par les difficultés rencontrées, sous les III e et IV e Républiques, pour voir adopter un budget avant le début de son exercice d'exécution. Ainsi l'Assemblée nationale dispose-t-elle depuis 1959 de 40 jours et le Sénat de 15 jours (20 jours si l'Assemblée a respecté son propre délai) pour l'examen de première lecture, et le Parlement dans son entier de 70 jours pour adopter le texte, faute de quoi les procédures de l'article 44 de l'actuelle ordonnance organique s'appliquent. Par ailleurs, la procédure d'urgence de l'article 45 de la Constitution s'applique de droit.

Ces conditions strictes ont été atténuées par le Conseil constitutionnel. Il a d'abord autorisé l'assouplissement des délais d'examen, portés de 15 à 20 jours en 1971, par le Sénat, en première lecture, en considérant que le délai de 15 jours s'entend seulement en cas d'absence de respect par l'Assemblée nationale des 40 jours qui lui sont impartis 102 ( * ) . Il a ensuite exclu les lois de règlement de l'application de ce dispositif, qu'il s'agisse des délais de vote en première lecture 103 ( * ) , ou de la procédure d'urgence 104 ( * ) . Enfin, il a estimé que le gouvernement pouvait accepter de laisser quelques jours supplémentaires à l'Assemblée nationale, du moment que ce délai supplémentaire n'ampute pas celui dont dispose le Sénat 105 ( * ) .

L'Assemblée nationale a repris le dispositif de l'article 39 de l'actuelle ordonnance organique en précisant, par l'insertion du présent article au chapitre premier du titre III relatif aux seuls projets de loi de finances de l'année et projets de loi de finances rectificatives, son application au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, c'est-à-dire en y soumettant la loi de finances de l'année et les lois de finances rectificatives, mais pas la loi de règlement.

Votre rapporteur comprend cette reproduction du texte de 1959, éclairé par la jurisprudence constitutionnelle. Il s'interroge cependant sur trois points.

Le premier porte sur la compatibilité entre la revalorisation forte de la loi de règlement prévue dans la présente proposition de loi organique et l'absence de délais pour son examen et son vote. Il ne lui semble donc pas opportun d'exclure la loi de règlement du champ d'application de l'article 47 de la Constitution et du présent article 41, et considère que la fixation de délais stricts incitera le Parlement à examiner et voter le projet de loi de règlement d'une année n-1 avant l'examen du projet de loi de finances de l'année n+1. Il vous proposera en conséquence de déplacer cet article dans le chapitre relatif aux dispositions communes pour le rendre applicable aussi aux lois de règlement. 106 ( * )

La seconde interrogation porte sur l'articulation entre les délais constitutionnels de l'article 47 et les prérogatives gouvernementales en matière de fixation de l'ordre du jour de l'article 48. Trop souvent en effet, le gouvernement a inscrit à l'ordre du jour, au milieu de la discussion du projet de loi de finances, des textes dont l'examen a conduit à restreindre les délais constitutionnels. C'est notamment le cas du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui vient chaque année prendre plusieurs jours sur l'examen du projet de loi de finances. Votre rapporteur considère que ces entraves mises par le gouvernement ne sont pas acceptables dans leur principe. Les délais de l'article 47 ne constituent en effet pas seulement une protection des prérogatives financières gouvernementales contre d'éventuelles discussions dilatoires de la part du Parlement. Ils doivent aussi se comprendre comme un délai plein et entier dont doit disposer le Parlement pour l'examen du projet de loi de finances de l'année. Votre rapporteur ne vous proposera cependant pas d'amender sur ce point la proposition de loi organique adoptée par l'Assemblée nationale. Il tient cependant à indiquer qu'il lui semblerait indispensable que le juge constitutionnel porte, à l'avenir et en cas d'entrave manifeste, un jugement sur les conditions dans lesquelles le Parlement aura pu, ou non, disposer des délais mis à sa disposition par l'article 47 de la Constitution.

Le troisième point sur lequel votre rapporteur souhaite se pencher porte sur la nature juridique de l'ordonnance prévue au dernier alinéa. Faute de précision contraire du texte constitutionnel sur ce point, il lui semble que la nature et le régime d'une telle ordonnance devraient s'assimiler à ceux des ordonnances de l'article 38 de la Constitution.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

* 102 Décision n° 71-43 DC du 17 juin 1971.

* 103 Décision n° 83-161 DC du 19 juillet 1983.

* 104 Décision n° 85-190 DC du 24 juillet 1985.

* 105 Décision n° 86-209 DC du 3 juillet 1986.

* 106 Voir le commentaire de l'article additionnel avant l'article 48.

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