Projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale, TOME VI - JUSTICE : Protection judiciaire de la jeunesse
GELARD (Patrice)
AVIS 94 - TOME VI (1999-2000) - commission des lois
Tableau comparatif au format Acrobat ( 84 Ko )Table des matières
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LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
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I. LES MOYENS DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
- A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS POUR 2000
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B. LA RÉPARTITION DES MESURES NOUVELLES
- 1. Le personnel : un effort de créations d'emplois sans précédent.
- 2. Les crédits de fonctionnement sont en forte progression
- 3. Les crédits de subventions (titre IV) : développer les activités pour les mineurs
- 4. Les crédits d'investissement (titre V) : création de nouveaux hébergements et rénovation des anciens.
- C. LE CONTRÔLE DE L'UTILISATION DES CRÉDITS
- II. LES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES DANS LA PRISE EN CHARGE DES JEUNES PAR LES SERVICES DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
-
III. LA DIFFICULTÉ D'APPORTER UNE RÉPONSE
JUDICIAIRE SYSTÉMATIQUE, RAPIDE ET EFFICACE AUX FAITS DE
DÉLINQUANCE
- A. LA DÉLINQUANCE JUVÉNILE AUGMENTE
- B. APPORTER UNE RÉPONSE SYSTÉMATIQUE AUX ACTES DE DÉLINQUANCE
- C. LE SUIVI DES MINEURS INCARCÉRÉS
-
IV. LES PRIORITÉS EN MATIÈRE DE PROTECTION
JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
-
A. LA PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE
JUVÉNILE
-
1. La contractualisation entre l'Etat et les
collectivités locales
- a) Les contrats locaux de sécurité (CLS)
- b) Les communes : les conseils communaux de prévention de la délinquance (CCPD) et politique de la ville
- c) Les conseils généraux : l'aide sociale à l'enfance et les conseils départementaux de prévention de la délinquance (CDPD)
- d) Les régions : la préparation des contrats de plan Etat-régions
- 2. Le partenariat avec l'Education nationale
- 3. Les maisons de justice et du droit
-
1. La contractualisation entre l'Etat et les
collectivités locales
- B. LE CONTRÔLE DU SECTEUR ASSOCIATIF HABILITÉ
- C. RENFORCER ET DIVERSIFIER LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS
- D. LA GÉOGRAPHIE PRIORITAIRE
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A. LA PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE
JUVÉNILE
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I. LES MOYENS DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
N° 94
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME VI
JUSTICE :
PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
Par M. Patrice GÉLARD,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour, vice-présidents ; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Simon Loueckhote, François Marc, Bernard Murat, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1805
,
1861
à
1866
et T.A.
370
.
Sénat
:
88
et
89
(annexe n°
33
)
(1999-2000).
Lois de finances.
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Après avoir entendu Mme Elisabeth Guigou, ministre de la
Justice, garde des Sceaux, la commission des Lois, réunie le
mardi 7 décembre 1999 sous la présidence de
M. Charles Jolibois, vice-président, a procédé, sur
le rapport pour avis de M. Patrice Gélard, à l'examen des
crédits relatifs à la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ)
inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000.
La commission a décidé de donner un
avis favorable
à l'adoption de ces crédits, en hausse de 14,7 % par rapport
à la loi de finances initiale pour 1999, sous réserve des
observations suivantes :
1. Les créations d'emplois, d'ampleur exceptionnelle, ne doivent pas
être réalisées au détriment de la
qualité
du recrutement et de la formation initiale
, les missions du secteur public
de la protection judiciaire de la jeunesse étant dirigées vers
des jeunes délinquants de plus en plus violents.
2. Votre commission des Lois déplore le
retard pris dans les
investissements
en matière d'hébergement collectif, le taux
de consommation des crédits d'équipement s'avérant
insuffisant pour respecter le programme d'équipement des services de la
protection judiciaire de la jeunesse.
3.
La sécurité physique et psychologique des jeunes
placés sous protection
judiciaire n'est pas satisfaisante
.
Or, ceux-ci ne pourront bénéficier d'une véritable
insertion tant qu'ils évolueront dans un contexte de
violence
quotidienne
.
4. La multiplication des mesures de réparation prononcées ne doit
pas faire illusion, dans la mesure où trop de
décisions de
justice
concernant les mineurs délinquants sont
en attente
d'exécution
ou ne sont pas appliquées.
5. L'accès des jeunes délinquants à l'assistance d'un
avocat
, en particulier d'un avocat spécialisé, doit
être facilité par l'instauration d'une juste
rémunération.
6. Votre commission des Lois s'inquiète de l'inefficacité du
dispositif de
prévention de la délinquance
juvénile
. Celui-ci pourrait reposer sur une meilleure implication de
l'
Éducation nationale
et sur la définition d'un
partenariat équilibré entre, d'une part, les
collectivités territoriales
dans le cadre de leurs
compétences, et d'autre part le service public de la justice, qui assure
une mission régalienne de l'État.
7. Le
contrôle
pédagogique, administratif et financier
du secteur associatif
habilité doit être renforcé,
au besoin au moyen d'une inspection générale de ce secteur.
8. Votre commission des Lois regrette que la mise en place de
l'accueil
d'urgence
s'effectue par transformation de structures existantes, au
détriment du bon fonctionnement des services et au risque de ne
constituer qu'un effet d'annonce.
9. Les efforts en direction des
départements prioritaires
doivent
être poursuivis, dans l'objectif d'un rattrapage à moyen terme.
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est comme chaque année appelé à examiner
les crédits des services de la protection judiciaire de la jeunesse,
qu'il avait adoptés à l'unanimité l'année
dernière.
Le projet de loi de finances pour 2000 fixe à 27,3 milliards de
francs le budget du ministère de la Justice, ce qui représente
une hausse de 3,9 % par rapport à la loi de finances initiale pour
1999, très supérieure à la hausse de 1,5 % des
budgets civils de l'Etat.
Le Gouvernement, lors de la réunion du conseil de sécurité
intérieure du 27 janvier 1999, a réaffirmé sa
volonté de faire de la protection judiciaire de la jeunesse une de ses
priorités.
Ainsi,
3,18 milliards de francs,
soit 11,7 % du budget de la
justice, seront consacrés à la protection judiciaire de la
jeunesse en 2000. Ces crédits sont en
hausse de 14,7 %
par
rapport à la loi de finances initiale pour 1999.
Il s'agit d'
un changement d'échelle
dans les moyens mis en oeuvre
pour répondre à la délinquance des mineurs.
Les
créations d'emplois sont exceptionnelles
au regard de l'effectif
global des services (380 emplois créés sur un total de 6400).
Le
plan gouvernemental de lutte contre la délinquance des mineurs
a été défini à la suite du rapport remis en
avril 1998 par les députés Christine Lazerges et Jean-Pierre
Balduyck, lors du Conseil de sécurité intérieure du
8 juin 1998, confirmé et renforcé par celui du
27 janvier 1999, complété par la circulaire d'orientation
relative à la protection judiciaire de la jeunesse en date du
24 février 1999.
Votre rapporteur exposera les crédits de la protection judiciaire de la
jeunesse, puis examinera la réponse judiciaire apportée à
la délinquance juvénile, enfin présentera les
priorités qui lui semblent devoir être retenues en 2000 en
matière de protection judiciaire de la jeunesse.
I. LES MOYENS DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS POUR 2000
Le
budget des services de la protection judiciaire de la jeunesse pour l'exercice
2000 s'élève à 3,18 milliards de francs, ce qui
représente 11,7 % des crédits de la Justice inscrits dans le
projet de loi de finances.
Votre commission des Lois se félicite de l'augmentation de
14,7 % des crédits destinés à la protection
judiciaire de la jeunesse, par rapport à 1999.
Cette progression est la plus importante enregistrée depuis de
nombreuses années, puisque le taux annuel d'augmentation des
crédits de la protection judiciaire de la jeunesse était de
6,4 % en 1999, 4,1 % en 1998, 1,5 % en 1997, 5,5 % en 1996,
5,0 % en 1995, 6,8 % en 1994, 7,7 % en 1992 et 10,7 % en
1991.
L'augmentation de 408 millions de francs (MF) des
crédits de la protection judiciaire de la jeunesse tient à la
progression des mesures acquises (+ 185 MF) et des mesures nouvelles
(+ 244 MF pour les titres III et IV).
Cependant, le titre V (équipements, investissements) est en diminution
de 20 MF en crédits de paiement par rapport à 1999. Le
Gouvernement fait savoir que cette situation ne devrait pas présenter
d'inconvénients pour la réalisation des programmes d'ouverture de
services ou pour la rénovation des équipements, en raison des
reports de crédits
de paiement qui pourraient être
réalisés en 2000.
Les crédits destinés à la rémunération des
prestations du secteur associatif habilité s'élèvent
à 1.468 MF, soit 46,2 % du budget de la protection judiciaire
de la jeunesse. Ces crédits sont en augmentation de 19 %.
Les crédits destinés au secteur public avec 1.712 MF, en
augmentation de 18,2 %, représentent 53,8 % du budget.
B. LA RÉPARTITION DES MESURES NOUVELLES
La progression totale en mesures nouvelles concernant le secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse est de 294 MF, répartis en 240 MF pour le titre III (moyens des services), 4 MF pour le titre IV (interventions publiques) et 50 MF pour le titre V (investissements).
1. Le personnel : un effort de créations d'emplois sans précédent.
Parmi
les mesures nouvelles concernant le secteur public, 109 MF seront
consacrés aux crédits de personnel : 68 MF financeront
la création de 380 emplois, annoncée lors du Conseil de
sécurité intérieure du 27 janvier 1999 ;
12 MF permettront la revalorisation du régime indemnitaire des
agents de la protection judiciaire de la jeunesse ; 3 MF en
crédits de vacation renforceront le suivi médico-psychologique
des jeunes. 14 MF sont destinés aux emplois jeunes.
Il s'agit d'une augmentation historique des moyens de la protection
judiciaire de la jeunesse, 380 emplois devant être créés en
2000, dont 258 emplois d'éducateurs.
Votre rapporteur se félicite de la
meilleure adéquation entre
les emplois budgétaires et les emplois réels
. Les
créations d'emplois budgétaires étaient de 60 en 1997, 100
en 1998, 150 en 1999. Ces créations devraient améliorer le taux
d'encadrement des jeunes suivis par la protection judiciaire de la jeunesse
(nombre de jeunes rapporté au nombre d'éducateurs).
Un
concours exceptionnel pour le recrutement de 200
éducateurs
1(
*
)
a été
lancé. La formation de ces éducateurs sera dérogatoire par
rapport au statut des éducateurs de la protection judiciaire de la
jeunesse. Les personnes recrutées devront justifier d'une
expérience professionnelle de trois ans dans le domaine social,
éducatif et sportif.
Par ailleurs,
600 emplois jeunes
seront recrutés dans les
services de la protection judiciaire de la jeunesse. Ils assureront des
activités d'animation culturelle, sportive, d'orientation ou
d'enseignement auprès des mineurs suivis par la protection judiciaire de
la jeunesse.
Le dispositif emplois jeunes du ministère de la Justice comporte deux
volets, l'un associatif, revu actuellement à la baisse
2(
*
)
, l'autre public
3(
*
)
,
avec le recrutement direct, sous contrats de droit public, par le
ministère de la Justice, des
agents de justice
.
Alors que la quasi totalité des crédits de fonctionnement sont
déconcentrés,
la déconcentration de la gestion du
personnel reste à effectuer
. Un groupe de travail a
été constitué à ce sujet et devra consulter les
organisations syndicales.
2. Les crédits de fonctionnement sont en forte progression
L'abondement des
crédits de fonctionnement
des
services augmente de
16 %
c'est-à-dire de 68 MF :
62 MF sont des crédits déconcentrés consacrés
aux établissements et services du secteur public de la protection
judiciaire de la jeunesse, 6 MF iront au Centre national de formation et
d'études de la protection judiciaire de la jeunesse. De plus, 34 MF
seront destinés à la formation des personnels.
Les crédits de fonctionnement permettront la poursuite de
l'
informatisation
des services de la protection judiciaire de la
jeunesse. Il s'agit, au niveau national, de l'extension dans les structures
d'accueil des jeunes du logiciel de régies d'avances (COBRA), et au
niveau déconcentré du passage à l'an 2000 des
logiciels de suivi de l'activité des structures d'accueil et de tableaux
de bord (logiciel GAME), ainsi que de l'informatique pédagogique.
Actuellement, le faible niveau des effectifs et le fort taux de sous-traitance
freinent la mise en place des nouvelles technologies.
3. Les crédits de subventions (titre IV) : développer les activités pour les mineurs
5 MF de moyens nouveaux seront consacrés au développement des activités pour les mineurs. La protection judiciaire de la jeunesse doit en effet préparer les jeunes à entrer dans les dispositifs de droit commun en proposant systématiquement des activités de jour dans le cadre de la prise en charge éducative.
4. Les crédits d'investissement (titre V) : création de nouveaux hébergements et rénovation des anciens.
Les crédits de paiement en investissement s'élèveront à 50 MF pour les mesures nouvelles. Le programme d'équipement 2000 de la protection judiciaire de la jeunesse prévoit la création de deux hébergements et de trois centres de placement immédiat ainsi que la poursuite de la rénovation et l'adaptation d'établissements anciens à Paris, dans les départements du Nord, Pas de Calais, Rhône, Bouches-du-Rhône.
C. LE CONTRÔLE DE L'UTILISATION DES CRÉDITS
L'année dernière, sur proposition de votre commission des Lois, le Sénat avait adopté à l'unanimité les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse, alors en augmentation de 6,42 %. L'autorisation parlementaire a donné lieu à une exécution budgétaire tout à fait satisfaisante en 1999.
1. La fin des gels de crédits
Dans le précédent avis budgétaire, votre rapporteur regrettait la persistance des mesures de régulation budgétaire pour l'exercice 1997, tout en soulignant le faible taux de modification en cours de gestion et l'augmentation du taux de consommation des crédits (compte tenu des gels et annulations de crédits et des reports de crédits à la gestion suivante).
2. L'exécution de la loi de programme pour la Justice
La loi
de programme n° 95-9 du 6 janvier 1995 relative
à la Justice est complètement exécutée en ce qui
concerne la création d'
emplois
de la protection judiciaire de la
jeunesse, celles-ci étant même supérieures aux engagements
de la loi de programme.
Cependant, le
taux de consommation des crédits
d'équipement
(dépenses en capital) était de 97 %
en autorisation de programme au 3 février 1999 et
54 %
seulement en crédits de paiement
4(
*
)
.
De janvier 1995 à juin 1999, en terme d'investissement,
243 places d'hébergement collectif ont été
programmées. Seules 115 ont été livrées au
30 juin 1999
5(
*
)
, soit un
taux
d'exécution de 47,3 % seulement
.
Considérant que
la moitié des crédits
d'équipement sont destinés à l'adaptation des structures
d'hébergement existantes
, à la mise en sécurité
ou à l'adaptation des locaux, l'effort budgétaire
réellement consacré aux créations nettes doit être
relativisé.
II. LES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES DANS LA PRISE EN CHARGE DES JEUNES PAR LES SERVICES DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
A. LES MODALITÉS DE PRISE EN CHARGE
1. Répartition entre les secteurs
Tous
secteurs confondus, plus de
140.000 jeunes
sont pris en charge en
permanence dans le cadre de la protection judiciaire de la jeunesse. En outre,
près de 80.000 jeunes ou familles sont l'objet d'une investigation
en vue d'une décision de justice. Compte tenu des entrées et
sorties intervenues en cours d'année,
près de 250.000 jeunes
ont été suivis au cours de l'année 1997
par ces
services.
Le secteur habilité assure près des trois quarts des prises en
charge et près de 95 % des mesures de placement. Il réalise
l'essentiel de son activité en assistance éducative.
Le secteur public est avant tout orienté vers le public
prioritaire : les mineurs délinquants
. Il prend en charge les
mesures en milieu ouvert au pénal
(contrôle judiciaire,
liberté surveillée, travaux d'intérêt
général, SME, réparation...), mesures qui relèvent
de sa compétence exclusive (hormis le cas de la réparation).
2. Les types de prise en charge
La
circulaire d'orientation relative à la protection judiciaire de la
jeunesse en date du 24 février 1999
a pour premier objectif de
renouveler les méthodes d'action éducative pour mettre en place
un encadrement soutenu auprès des mineurs.
L'hébergement
ou placement, collectif ou individualisé,
est mis en oeuvre sur mandat judiciaire, dans des foyers ou centres d'action
éducative.
Les
centres de jour
, propres au secteur public, reçoivent en
priorité les jeunes sous protection judiciaire ; ils visent
à apporter une formation ou un apprentissage élémentaire,
à la réintégration dans les dispositifs de droit commun ou
à la formation professionnelle.
Le suivi pénal en milieu ouvert
s'adresse en particulier aux
jeunes délinquants suivis au titre d'une mesure provisoire
(contrôle judiciaire, liberté surveillée
préjudicielle) ou définitive (sursis avec mise à
l'épreuve, travail d'intérêt général,
liberté surveillée...).
L'action éducative en milieu ouvert
(AEMO) s'adresse, quant
à elle, aux mineurs en danger. Elle accompagne obligatoirement un
placement familial confié au secteur habilité.
Le milieu ouvert représente près de 75 % des prises en
charge dans le secteur habilité et 88 % dans le secteur public.
B. LES MINEURS SUIVIS SONT DE PLUS EN PLUS JEUNES ET PRÉSENTENT DES HANDICAPS SOCIAUX IMPORTANTS
Une enquête conduite en 1998 auprès d'un
échantillon de près de 1.000
jeunes âgés de 14
à 18 ans
et pris en charge dans les centres de jour du secteur
public de la protection judiciaire de la jeunesse a montré qu'un jeune
sur deux de moins de 16 ans n'était plus scolarisé dans un
établissement de l'Education nationale, que les jeunes avaient un
niveau moyen proche du CM1, c'est-à-dire celui d'enfants de
8 ans, 30 % ne sachant ni lire, ni écrire, ni compter.
La répartition par tranche d'âge des jeunes pris en charge montre
le rajeunissement significatif de la population suivie
, en particulier
la très forte proportion des enfants de moins de 10 ans
6(
*
)
, qui représentent 40 % des jeunes pris en
charge par le secteur habilité contre 7 % dans le public, et sont
suivis à 95 % dans le cadre de l'assistance éducative.
Les
13-18 ans représentent 40 % du total des jeunes pris en charge et
se répartissent en quatre cinquièmes de mineurs en danger et un
cinquième de mineurs délinquants.
Les mineurs délinquants sont à 90 % de sexe masculin et
à 80 % âgés de plus de 16 ans. Le secteur
habilité ne prend en charge que 3,8 % des mineurs
délinquants.
Enfin,
une étude réalisée en 1998 par l'institut
national de la santé et de la recherche médicale
7(
*
)
(INSERM) met en évidence l'échec
scolaire et la mauvais état de santé caractérisant les
jeunes de l'échantillon, âgés de 14 à 21 ans et
suivis par le secteur public hors investigation.
Elle souligne que
la
violence fait partie de la vie quotidienne des
jeunes de la protection judiciaire de la jeunesse
, que ce soient les
conduites violentes (racket, vol, bagarres...), ou les violences subies,
physiques ou sexuelles.
La tentative de suicide concerne 12 % des garçons et 49 % des
filles
sous protection judiciaire, un garçon sur quatre et
une fille sur deux ayant récidivé
; 41 % des garçons
et 55 % des filles ont été victimes d'agressions physiques ;
la
fugue
constitue un comportement d'éviction pour un quart des
garçons et
deux cinquièmes des filles
.
Votre commission des Lois estime que la protection physique et psychologique
des mineurs placés sous protection judiciaire est un impératif,
en particulier dans le cas des mineurs retirés de leur milieu actuel en
raison des dangers encourus. Dès lors, les chiffres publiés dans
cette étude de l'INSERM lui paraissent inquiétants. A titre
d'exemple,
il ne paraît pas acceptable qu'un quart des garçons
et un sixième des filles aient eu au moins trois accidents dans
l'année écoulée
.
III. LA DIFFICULTÉ D'APPORTER UNE RÉPONSE JUDICIAIRE SYSTÉMATIQUE, RAPIDE ET EFFICACE AUX FAITS DE DÉLINQUANCE
A. LA DÉLINQUANCE JUVÉNILE AUGMENTE
En 1998,
le nombre des mineurs entre 13 et 18 ans impliqués dans des crimes
ou délits constatés par les services de police ou les
unités de gendarmerie s'est
accru de 11,2 %
par rapport
à 1997, pour atteindre 172.000.
La part des mineurs dans le total des personnes mises en cause
est
passée de 17,9 % en 1996 à
21,8 % en 1998
. Elle
varie fortement en fonction de la nature de l'infraction. A titre d'exemple,
les mineurs représentent 34 % des personnes mises en cause pour
faits de délinquance de voie publique (vol à main armée,
vol de voiture, cambriolage, vol avec violence, vol à la roulotte,
dégradation ou destruction de biens...).
L'amélioration du taux d'élucidation des actes de
délinquance de voie publique constitue l'une des priorités
annoncées lors des Conseils de sécurité intérieure
des 8 juin 1998 et 27 janvier 1999, ainsi que la création de brigades de
mineurs de la police et de brigades de gendarmerie de prévention de la
délinquance juvénile.
B. APPORTER UNE RÉPONSE SYSTÉMATIQUE AUX ACTES DE DÉLINQUANCE
L'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative
à l'enfance délinquante édicte un principe de
responsabilité pénale atténuée pour les mineurs,
graduée selon l'âge de l'auteur de l'infraction, la
priorité étant donnée à l'éducation des
mineurs et à la
recherche d'une dimension éducative dans toute
sanction.
L'activité des juridictions pour les mineurs en 1998 fait
apparaître que, sans tenir compte des alternatives aux poursuites,
l'institution judiciaire a augmenté sa capacité de
réponse de 10 % par rapport à 1997 et de 35 % par rapport
à 1995.
1. L'activité des parquets mineurs : le développement du traitement en temps réel et des alternatives aux poursuites
En
1997, 123.000 plaintes, procès-verbaux et dénonciations ont
été portés à la connaissance des parquets mineurs,
soit une augmentation de
33 % par rapport à 1995.
Près
de la moitié (59.300) ont été classés sans suite,
11.800 médiations et réparations ont été
engagées, 46.300 requêtes ont été
adressées aux juges des enfants et 5.400 jeunes ont
été mis en examen dans le cadre d'une information.
Le
traitement en temps réel des procédures
pénales
8(
*
)
revêt une importance
particulière à l'égard des mineurs : il apporte
rapidement des repères et des limites et favorise la mise en place
précoce d'une action éducative lorsque celle-ci s'avère
nécessaire. Alors que la convocation par officier de police judiciaire
aux fins de mise en examen ou aux fins de jugement est très largement
utilisée, il n'en va pas de même pour la procédure de
comparution à délai rapproché, dont les critères
d'application sont peu souvent remplis.
Entre la décision de ne pas poursuivre (" classement sans
suite ") et la poursuite pénale existe une place pour la
" troisième voie ", constituée des
"
alternatives aux poursuites
", introduites par la
loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant
l'efficacité de la procédure pénale.
La
circulaire de politique pénale
du 15 juillet 1998
indique les critères devant conduire le parquet à
privilégier les alternatives aux poursuites : le mineur est
primo-délinquant
, les faits sont qualifiables pénalement,
la participation du mineur est suffisamment établie, l'intervention d'un
service éducatif n'est pas nécessaire, les faits ne sont pas
d'une gravité caractérisée.
Les mesures suivantes peuvent être ordonnées :
- un simple
avertissement
délivré par un service de
police ou de gendarmerie et notifié au mineur ;
- un
rappel à la loi
effectué par le substitut
spécialement chargé des affaires de mineurs ou par le
délégué du procureur de la République
;
les délégués du procureur étaient au nombre de 293
au 1
er
juillet fin 1999, dont 91 spécialisés dans les
affaires de mineurs.
- un
classement sous condition
(appelé aussi sursis à
poursuite) subordonné au respect de certaines obligations ;
- une mesure de réparation. En 1998,
7.500 mesures de
réparation
ont été effectuées par les mineurs
délinquants, le seuil des 10.000 mesures devant être atteint en
1999. Le secteur associatif est habilité pour la mesure de
réparation depuis 1995.
Les parents sont systématiquement convoqués lors de ce type de
mesures.
2. L'activité des juges et tribunaux pour enfants est en forte augmentation
a) L'activité des juges d'instruction
En 1997, sur 4.200 dossiers transmis au juge ou au tribunal pour enfants, les juges d'instruction ont placé sous contrôle judiciaire 1.900 mineurs et placé en détention provisoire 1.300 mineurs. La durée moyenne de l'instruction est de 14 mois.
b) L'activité pénale des juges et tribunaux pour enfants
En 1997,
les décisions prononcées par les juges des enfants et les
tribunaux pour enfants se répartissent en 150.000 décisions
d'assistance éducative,
46.800 décisions pénales
(dont 25.600 jugements en chambre du conseil - audience au cabinet - et
21.200 jugements en audience de tribunal), 9.200 décisions de
protection judiciaire des jeunes majeurs et 27.200 tutelles aux prestations
sociales.
Votre rapporteur s'inquiète de l'importance des mesures en attente
d'exécution. A titre d'exemple,
en 1998, le nombre de mesures de
suivi en milieu ouvert en attente d'exécution
9(
*
)
était de 5.400
dont 48 % dans le secteur
public. La durée d'attente avant le début d'exécution des
mesures prononcées atteint trois à six mois pour un tiers d'entre
elles. En termes de proportion, dans le secteur public, 7,7 % des mesures de
suivi en milieu ouvert sont en attente d'exécution.
c) Activité civile des juges des enfants
En 1997,
35.200 mesures d'investigation ont été ordonnées,
72.000 ordonnances et jugements d'action éducative en milieu ouvert
ont concerné 122.000 jeunes et 77.800 ordonnances et jugements
de placement ont concerné 111.000 jeunes.
Les
investigations
confiées à la protection judiciaire de
la jeunesse sont au nombre de trois : les recueils de renseignements
socio-éducatifs (obligatoires avant l'incarcération d'un mineur),
les enquêtes sociales et les mesures d'investigation et d'orientation
éducative (IOE) réalisées au moins par un éducateur
et un psychologue. Elles sont réalisées notamment par les
services éducatifs auprès des tribunaux
(SEAT).
3. La défense des mineurs devant les juridictions
Les
crédits de l'
aide juridictionnelle
ont augmenté de 22 % de
1997 à 1998 pour le contentieux civil devant les tribunaux pour enfants
(assistance éducative) et de 14,7 % en matière pénale.
Votre rapporteur s'inquiète des conditions dans lesquelles les mineurs
ont accès à l'assistance d'un avocat, en particulier pour les
avocats spécialisés.
Les
difficultés d'indemnisation rencontrées par les
avocats
ne sont pas acceptables. Elles semblent liées au
développement des réponses judiciaires apportées par le
parquet sans intervention du juge et en l'absence de commission d'office de
l'avocat. Or, les avocats, qui consacrent autant de temps aux procédures
dites d'alternatives aux poursuites qu'aux procédures pénales
traditionnelles, méritent une juste indemnisation pour ce travail.
C. LE SUIVI DES MINEURS INCARCÉRÉS
Lorsqu'un mineur est écroué, les services de la
protection judiciaire de la jeunesse gardent une mission de suivi, en
particulier dans le cadre des
commissions de suivi d'incarcération
des mineurs
.
Après quelques années de stabilisation, le nombre de mineurs
incarcérés tend à augmenter depuis 1997. Au
1
er
janvier 1999, 714 mineurs étaient
détenus. Le nombre de mineurs en cours de détention
rapporté au nombre de mises à l'écrou (environ 4.000 par
an) fait apparaître un
très fort taux de rotation
, ce qui
signifie que la durée de la détention est courte : un peu
plus de deux mois en moyenne.
89% des détenus ont plus de 16 ans. 95,5 % des détenus
sont des garçons. La
proportion de détention provisoire,
77,5 % en 1999
, est sensiblement plus élevée que la
proportion observée pour l'ensemble de la population des détenus
(39 %). Cette différence s'explique par deux
phénomènes : d'une part, les mineurs condamnés
à une peine d'emprisonnement ferme et qui atteignent l'âge de la
majorité sortent des statistiques mineurs ; d'autre part,
s'agissant de mineurs, les alternatives à l'emprisonnement ferme sont
recherchées.
Le
travail d'intérêt général (TIG)
, introduit
par la loi du 10 juin 1983, peut constituer une alternative aux courtes peines
d'emprisonnement. En 1997, parmi les condamnations délictuelles, 12.500
peines alternatives de travail d'intérêt général ont
été prononcées, ainsi que
12.300 peines
d'emprisonnement avec sursis total assorties d'un TIG
.
Il existe actuellement
53 lieux d'incarcération pour mineurs
.
Votre commission des Lois estime important d'adapter les conditions
d'incarcération des mineurs et de développer des structures qui
leur soient réservées. Elle prend acte de l'engagement de la
Chancellerie de définir une méthodologie de prise en charge des
mineurs incarcérés, de réfléchir au régime
juridique d'incarcération des mineurs et de
revoir la carte
pénitentiaire des établissements habilités à
recevoir des mineurs
10(
*
)
.
IV. LES PRIORITÉS EN MATIÈRE DE PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
A. LA PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE JUVÉNILE
Votre
rapporteur s'inquiète de
l'inefficacité du dispositif de
prévention de la délinquance juvénile
, en termes
d'infractions constatées et davantage encore au regard du sentiment
d'insécurité éprouvé par nos concitoyens. La
multiplication des actions menées est impuissante à enrayer la
progression de la violence et sa banalisation.
Il semblerait que les actions de prévention ne rencontrent pas le public
qu'elles sont censées atteindre, à savoir les mineurs en
difficulté et les jeunes en voie de désocialisation.
La mise en place d'une véritable politique de prévention ne peut
reposer sur les seuls services de la protection judiciaire de la jeunesse, dont
ce n'est pas la mission première. La prévention doit produire ses
effets avant que la protection judiciaire de la jeunesse n'ait à
apporter une réponse judiciaire aux faits de délinquance. Le
Gouvernement entend donc davantage impliquer l'ensemble des acteurs et en
coordonner l'action.
1. La contractualisation entre l'Etat et les collectivités locales
Votre rapporteur regrette la tentation du Gouvernement de faire peser sur les collectivités locales la charge financière de la sécurité et de la justice de proximité, alors que la justice constitue une mission régalienne de l'Etat. Toutefois, les exécutifs locaux, confrontés à l'insécurité croissante, qui tentent d'apporter des solutions à l'échelon local, demandent, dans le respect de leurs compétences, la définition d'un partenariat équilibré avec le service public de la Justice.
a) Les contrats locaux de sécurité (CLS)
Les
contrats locaux de sécurité
, définis par la
circulaire interministérielle du 28 octobre 1997 et mis en
place par celle du 7 juin 1999, mobilisent tous les partenaires
publics et acteurs sociaux dans la mise en oeuvre au niveau local d'un
dispositif préventif et répressif de lutte contre
l'insécurité, comprenant un
diagnostic local de
sécurité
.
Pour l'autorité judiciaire, c'est le procureur de la République
qui est signataire du contrat. Les juges des enfants et les services de la
protection judiciaire de la jeunesse sont souvent associés à
l'élaboration des CLS.
b) Les communes : les conseils communaux de prévention de la délinquance (CCPD) et politique de la ville
La
circulaire du 15 juillet 1998 relative à la politique pénale
en matière de délinquance des mineurs rappelle aux juridictions
ainsi qu'aux services déconcentrés de la protection judiciaire de
la jeunesse l'intérêt d'associer les collectivités locales
à sa mise en oeuvre.
Les conseils communaux de prévention de la délinquance,
créés en 1983, pourraient être rebaptisés conseils
locaux de prévention et de sûreté, afin de tenir compte de
leur articulation avec les contrats locaux de sécurité.
c) Les conseils généraux : l'aide sociale à l'enfance et les conseils départementaux de prévention de la délinquance (CDPD)
Le
président du conseil général est chargé de
l'
aide sociale à l'enfance
(ASE) depuis les lois de
décentralisation. La protection administrative de l'enfance tend
à prévenir la maltraitance (enfants en danger) mais aussi la
délinquance, par exemple dans le cadre des observatoires de l'enfance et
de l'adolescence.
Une quinzaine de départements ont engagé depuis mars 1999 un
travail de
diagnostic et d'évaluation
en matière de
signalement des faits de délinquance et de coordination entre les
partenaires chargés de la protection de l'enfance.
d) Les régions : la préparation des contrats de plan Etat-régions
21 régions ont inscrit un " volet justice " dans leur projet de contrat. La protection judiciaire de la jeunesse est associée à la préparation des contrats de plan État régions à deux titres, le développement des structures d'accueil de jour des mineurs et l'amélioration de leur prise en charge par la formation et l'insertion professionnelle.
2. Le partenariat avec l'Education nationale
La rescolorisation des mineurs est une des priorités pour agir sur l'environnement des mineurs en danger et des mineurs délinquants. Le Gouvernement a prévu la création de 250 classes relais . 130 fonctionnaient au 30 juin 1999. Une programmation des lieux d'implantation a été engagée conjointement par la direction de l'enseignement scolaire et la direction de la protection judiciaire de la jeunesse en mai 1999.
3. Les maisons de justice et du droit
La loi n° 98-1168 du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits permet la création de maisons de justice et du droit, pour assurer une présence judiciaire de proximité , concourir à la prévention de la délinquance , aider les victimes et améliorer l'accès au droit. La participation de la protection judiciaire de la jeunesse dans toutes les maisons de justice et du droit doit être saluée.
B. LE CONTRÔLE DU SECTEUR ASSOCIATIF HABILITÉ
Les
établissements et services du secteur associatif doivent demander une
" habilitation justice ", délivrée par le préfet
à la suite de l'instruction menée par les directions
régionales de la protection judiciaire de la jeunesse, qui assurent
ensuite leur
contrôle pédagogique, administratif et
financier.
Or, les 1.084 établissements et services du secteur associatif
habilité, gérés par 430 associations,
présentent une extrême diversité. Si le travail remarquable
de ces associations " habilitées justice " doit être
salué, il n'en reste pas moins que certains partenaires du secteur
privé ont pu, par leur comportement inacceptable à l'égard
des mineurs dont ils avaient la responsabilité, porter préjudice
au crédit du secteur associatif.
Votre rapporteur insiste donc sur
l'importance d'un contrôle
renforcé du secteur habilité, si besoin au moyen d'une inspection
générale
des établissements gérés par le
secteur associatif. Il se félicite du renforcement des effectifs des
directions régionales de la protection judiciaire de la jeunesse dans
cet objectif et souligne que le retrait de " l'habilitation
justice " ne doit pas se limiter aux cas de maltraitance mais inclure
les associations dont le projet pédagogique est insuffisant.
C. RENFORCER ET DIVERSIFIER LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS
La
circulaire du 24 février 1999
définit de
nouvelles orientations pour la protection judiciaire de la jeunesse. Deux
objectifs sont prioritaires :
- un
accompagnement éducatif intensif
: la
présence des éducateurs auprès des jeunes sera
renforcée, ainsi que la socialisation, s'appuyant sur des actions de
scolarisation, sur la formation professionnelle ou l'organisation de
séjours de rupture ;
- la
continuité de l'action éducative
: il s'agit
d'éviter toute rupture dans la prise en charge du mineur.
1. L'accueil d'urgence est encore très insuffisant
En
juillet 1998, les services territoriaux de la protection judiciaire de la
jeunesse ont été chargés de mettre en place, dans les
départements prioritaires, une
cellule de coordination de l'accueil
d'urgence
associant juridictions, secteur public, secteur associatif
habilité et aide sociale à l'enfance. Une permanence d'accueil
serait ainsi assurée pour tous les mineurs déférés
au tribunal.
En juillet 1999,
seuls
neuf départements
disposaient d'une
cellule d'accueil d'urgence. Il ne paraît pas souhaitable qu'en l'absence
de structure d'accueil d'urgence, un mineur délinquant
appréhendé par les forces de l'ordre soit remis dans son milieu
actuel, au risque de générer un sentiment d'impunité.
2. Le placement des mineurs délinquants : centres de placement immédiat (CPI) et centres éducatifs renforcés (CER)
Le
Gouvernement a annoncé en janvier 1999 la création de
50 centres de placement immédiat
d'ici 2001 (soit une
capacité d'accueil total de 900 places), dont 15 d'ici
fin 1999
11(
*
)
, chargés d'assurer
l'accueil immédiat des mineurs, un bilan d'orientation et un encadrement
strict visant à prévenir les fugues. Les centres de placement
immédiat s'adressent aux mineurs délinquants pour lesquels un
éloignement immédiat de leur lieu de vie a été
décidé par le juge, pour une période brève, avec
une prise en charge éducative renforcée jour et nuit.
L'année dernière, votre rapporteur indiquait que la
création des " dispositifs éducatifs renforcés "
poursuivait l'expérience des " unités à encadrement
éducatif renforcé " (UEER) installées en 1996 et
mises en sommeil en septembre 1997.
En janvier 1999, le Gouvernement a décidé de
porter
à 100 le nombre de " centres éducatifs
renforcés "
créés au cours des deux prochaines
années. Les centres éducatifs renforcés visent à
accueillir les quelque 500 ou 600 jeunes multirécidivistes pour lesquels
un séjour de rupture de quelques mois est nécessaire. Le cahier
des charges établi prévoit une individualisation des prises en
charge, le nombre de mineurs accueillis s'élevant de cinq à huit,
pour une durée de trois à six mois. Le CER emploie
un
encadrant pour un jeune
.
Au 1
er
juillet 1999, 16 centres étaient en service et 6
ouvraient à l'automne 1999. Le coût annuel d'un centre
éducatif renforcé dans le secteur public s'élève
à 2,13 millions de francs.
D. LA GÉOGRAPHIE PRIORITAIRE
Le
Conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998 a
défini
26 départements prioritaires
dits
départements " très sensibles ".
12(
*
)
La Chancellerie développe un modèle
statistique permettant d'affecter les moyens aux localisations prioritaires.
Les
critères de répartition
des emplois nouveaux seront le
taux d'urbanisation, le pourcentage de mineurs, le taux d'accroissement de la
population, le taux de chômage, en particulier des jeunes de moins de 25
ans, le retard scolaire, le pourcentage de mineurs délinquants parmi les
mineurs, enfin l'activité judiciaire dans le département.
L'année dernière, votre rapporteur faisait savoir que 55 %
des moyens de fonctionnement étaient déjà affectés
aux 26 départements prioritaires, la proportion atteignant les deux
tiers pour les mesures nouvelles. Cependant, il ajoutait que la modestie
relative des moyens nouveaux (150 créations d'emplois en 1999 sur
un stock de 5.900 soit 2,5 %) ne permettait d'envisager un
rééquilibrage entre départements qu'à moyen terme.
Pour 2000, la protection judiciaire de la jeunesse réservera
75 % des moyens nouveaux aux départements prioritaires.
*
* *
Sous le bénéfice de l'ensemble des observations qu'elle a formulées, votre commission des Lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de la Justice consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse.
1
Décret n° 99-412 du 26 mai
1999
fixant des modalités exceptionnelles de recrutement d'éducateurs
de la protection judiciaire de la jeunesse.
2
Les accords cadre signés avec le secteur habilité il
y a deux ans devront être révisés à la baisse, ce
secteur ayant des difficultés pour financer les 20 % de la
rémunération des emplois jeunes restant à sa charge.
3
La loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant
l'efficacité de la procédure pénale permet l'emploi des
agents de justice, recrutés sur contrats de droit public. Ce dispositif
est détaillé dans le décret n° 99-916 du 27 octobre
1999.
4
Source : rapport sur l'exécution en 1998 de la loi de
programme n° 95-9 du 6 janvier 1995, présenté en application
de l'article 6 de cette loi, en avril 1999. Pour l'ensemble du
ministère, le taux de consommation des crédits
d'équipement s'établit à 65 % (rapport entre les
dépenses en capital et les crédits ouverts).
5
18 autres places devraient être installées d'ici la
fin 1999.
6
Le secteur habilité prend en charge 44.000 mineurs de moins
de dix ans, contre 2.600 dans le secteur public.
7
Comme votre rapporteur l'indiquait déjà
l'année dernière, " l'ampleur de la tâche fait que le
secteur public rencontre des difficultés à remplir sa fonction
d'hébergement, comme le souligne, concernant les aspects strictement
sanitaires, l'étude épidémiologique sur l'état de
santé des jeunes suivis par la protection judiciaire de la
jeunesse ".
8
Mis en place depuis 1990, il repose sur deux principes :
toute affaire élucidée doit faire l'objet d'un compte rendu
téléphonique au parquet de la part du service
enquêteur ; toute affaire dont il a été rendu compte
fait l'objet d'un traitement judiciaire immédiat.
9
Est considérée comme une mesure en attente
d'exécution toute mesure qui n'a pas reçu de début
d'application plus de deux semaines après la décision du juge.
10
M. Georges Othily, rapporteur pour avis des crédits de
l'administration pénitentiaire, au nom de votre commission des Lois, a
visité quatre établissements pénitentiaires au cours de
l'année écoulée. Il a constaté en particulier la
situation très préoccupante du centre de jeunes détenus de
Fleury Mérogis et souligné l'urgence de la rénovation des
établissements pénitentiaires.
11
Sur les quinze prévus, la plupart résultent de la
transformation de structures existantes,
seules trois sont des
créations nettes. Il semblerait qu'une certaine précipitation
soit à regretter dans la mise en place des centres de placement
immédiat, au détriment des foyers d'urgence existants.
12
Alpes Maritimes, Bouches du Rhône, Drôme, Eure et
Loir, Haute Garonne, Gironde, Hérault, Isère, Loire, Loire
Atlantique, Nord, Oise, Pas de Calais, Bas Rhin, Haut Rhin, Rhône, Seine
Maritime, Seine et Marne, Yvelines, Var, Vaucluse, Essonne, Hauts de Seine,
Seine Saint Denis, Val de Marne, Val d'Oise.