Projet de loi de finances pour 2000 - TOME II - INTÉRIEUR : POLICE ET SÉCURITÉ
COURTOIS (Jean-Patrick)
AVIS 94-TOME II (1999-2000) - commission des lois
Tableau comparatif au format Acrobat ( 134 Ko )Table des matières
- LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
-
INTRODUCTION
-
I. UNE CRIMINALITÉ EN HAUSSE
- A. UNE DÉTÉRIORATION DES STATISTIQUES DE LA CRIMINALITÉ
- B. UN FORT SENTIMENT D'INSÉCURITÉ DE NOS CONCITOYENS
- C. LA DÉLINQUANCE DES MINEURS CONTINUE DE S'ACCROÎTRE DE MANIÈRE PRÉOCCUPANTE
- D. LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE DÉTERMINÉE DE LUTTE CONTRE LE TRAFIC DE STUPÉFIANTS ET LA TOXICOMANIE
- E. UNE LUTTE CONTRE LE TERRORISME FOCALISÉE SUR LA CORSE
- F. UNE LUTTE PERTURBÉE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE.
- II. UNE PRIORITÉ DONNÉE A LA POLITIQUE DE PROXIMITÉ
- III. UN BUDGET QUI NE RÉPOND PAS AUX INQUIÉTUDES
- IV. L'ABANDON DES OBJECTIFS DE LA LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION
-
I. UNE CRIMINALITÉ EN HAUSSE
N° 94
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME II
INTÉRIEUR :
POLICE ET SÉCURITÉ
Par M. Jean-Patrick COURTOIS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour, vice-présidents ; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Simon Loueckhote, François Marc, Bernard Murat, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1805
,
1861
à
1866
et T.A.
370
.
Sénat
:
88
et
89
(annexe n°
30
)
(1999-2000).
Lois de finances.
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Réunie le 24 novembre 1999, sous la présidence de
M. Jacques Larché, président, la commission des lois a
procédé, sur le rapport de M. Jean-Patrick Courtois,
à l'examen pour avis des crédits de la police inscrits dans le
projet de loi de finances pour 2000, dont la commission des Finances est saisie
au fond.
La commission a constaté une détérioration des
statistiques globales de la criminalité en phase avec la persistance du
sentiment d'insécurité de nos concitoyens, alimenté par la
recrudescence de la violence urbaine de proximité et de la
délinquance des mineurs.
Elle a ensuite regretté que les objectifs de la loi d'orientation et de
programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995,
qui entrait en 1999 dans sa dernière application, soient loin
d'être atteints, tant concernant les personnels que les matériels.
Au plan budgétaire, elle a noté que l'accroissement de 3% des
crédits, certes nettement supérieur à celui de l'ensemble
du budget de l'Etat, porterait le budget de la police pour 2000 à
près de 30 milliards de francs sans permettre toutefois ni de
répondre aux importantes inquiétudes
générées par les départs à la retraite
massifs devant intervenir dans les prochaines années ni de
résorber l'important retard accumulé en matière
d'équipements.
Tout en souscrivant à l'objectif d'amélioration de la
sécurité de proximité poursuivi par le Gouvernement, la
commission s'est interrogée sur la validité d'une politique
reposant, pour l'essentiel, sur des emplois-jeunes, dont le recrutement semble
problématique et l'avenir incertain, ainsi que sur la
fidélisation de forces mobiles et de difficiles et timides
redéploiements territoriaux.
Ces observations ont conduit la commission des Lois à s'en remettre
à l'appréciation de sagesse déjà émise par
la commission des Finances pour la section police-sécurité du
projet de loi de finances pour 2000.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
La détérioration des statistiques de la criminalité en
1998 est en phase avec le sentiment d'insécurité de nos
concitoyens, alimenté par la recrudescence de la violence urbaine, du
trafic de drogue et de la délinquance des mineurs.
Les grandes orientations du Gouvernement en matière de politique de
sécurité sont désormais arrêtées par le
Conseil de sécurité intérieure créé le
18 novembre 1997. Ce conseil s'est réuni trois fois en 1998, les
27 avril, 8 juin et 22 octobre, et deux fois en 1999, les
27 janvier et 19 avril.
A ces occasions, le Gouvernement a réaffirmé, dans la
lignée des réflexions conduites au colloque de Villepinte, en
octobre 1997, sa volonté de mettre l'accent sur la politique de
proximité.
La police doit ainsi faire face à des défis multiples tant sur le
front de la délinquance de proximité que sur celui des trafics
internationaux qui exigent une coopération internationale active.
Depuis 1995, elle a connu une profonde réorganisation initiée par
la loi d'orientation et de programmation du 21 janvier 1995. Mais force est de
constater que les objectifs de cette loi, qui entrait en 1999 dans sa
dernière année d'application, sont très loin d'être
atteints aussi bien concernant les recrutements de personnels que les
crédits de fonctionnement et d'équipement dont a
bénéficié la police pendant cette période.
En 1998, la police a constaté, avec la gendarmerie nationale, plus de
3,5 millions d'infractions et procédé à 8 040
mesures de reconduite à la frontière.
Le budget de la police pour 1999 qui s'élève à 29,992
milliards de francs, soit 3% de plus que l'année
précédente, augmente nettement plus que l'ensemble du budget dont
la progression est limitée à 0,9%.
Malgré cela, ce budget ne suffit pas pour répondre aux grandes
inquiétudes générées par les départs
à la retraite massifs devant toucher près du quart des effectifs
dans les cinq prochaines années ni pour résorber le retard
accumulé en matière d'équipements.
Le ministère de l'intérieur devra ainsi faire face à un
considérable besoin de formation. Au 1
er
janvier 2000, plus
de 6 000 agents seront en formation en école, soit trois fois plus
qu'en 1995.
Si on ne peut que souscrire à la priorité donnée par le
Gouvernement à la politique de sécurité de
proximité, on peut s'interroger sur la validité de sa mise en
oeuvre reposant, pour l'essentiel, sur des emplois-jeunes dont le recrutement
semble problématique et l'avenir incertain et sur la
" fidélisation " de forces mobiles dont les modalités
semblent encore imprécises.
Les 20 000 adjoints des sécurité qui devraient être en
place à la fin de l'année 2000 représenteront plus du
cinquième des effectifs du corps de maîtrise et d'application.
D'un niveau d'études très inférieur à celui des
gardiens de la paix, il pourront, en application du décret du
19 octobre dernier, bénéficier néanmoins de 40% des
postes aux concours de recrutement de gardien de la paix.
Il faut espérer que les 300 contrats locaux de sécurité
signés, et les 400 sur le point de l'être, mobiliseront
efficacement au niveau local l'ensemble des intervenants publics et
privés en matière de prévention et de répression de
la délinquance.
On peut s'interroger également sur les perspectives de
redéploiements d'effectifs, après l'abandon, le 20 janvier
dernier, du programme très contesté de redéploiement
global des effectifs de police et de gendarmerie sur le territoire.
Mais avant d'aborder l'examen des crédits de la police pour 2000, votre
rapporteur tient, après avoir rappelé les conditions souvent
très périlleuses dans lesquelles les policiers se dévouent
au service de la sécurité de notre pays, ainsi que le
caractère psychologiquement de plus en plus éprouvant de
l'exercice de leur métier, à rendre hommage aux 7 policiers
tués et aux 3740 policiers blessés en mission de police au cours
de l'année 1998.
I. UNE CRIMINALITÉ EN HAUSSE
Inversant la tendance constatée les trois années
précédentes, l'année 1998 a enregistré une
détérioration des statistiques globales de la délinquance
et de la criminalité.
Cette évolution est en phase avec la perception par les Français
d'un fort sentiment d'insécurité alimenté par une
délinquance de proximité de plus en plus violente mettant en
cause un nombre croissant de mineurs.
Par ailleurs, les conditions d'une mobilisation efficace contre le trafic de
drogue, le terrorisme et l'immigration irrégulière n'ont pas
toujours été réunies.
A. UNE DÉTÉRIORATION DES STATISTIQUES DE LA CRIMINALITÉ
En 1998,
les services de police et de gendarmerie ont constaté
3.565.525
crimes ou délits
, soit environ 72 000 de plus que
l'année précédente.
La criminalité globale se caractérise donc par une
augmentation de 2,06 %
par rapport à l'année
précédente, la criminalité moyenne pour
1.000 habitants s'établissant à
60,7
contre 59,97 en
1997.
ÉVOLUTION DÉCENNALE DE LA CRIMINALITÉ EN FRANCE
Années |
Nombre d'infractions |
Evolution
|
Taux pour 1000 habitants |
1989 |
3.266.442 |
+ 4,27 |
58 |
1990 |
3.492.712 |
+ 6,93 |
62 |
1991 |
3.744.112 |
+ 7,20 |
66 |
1992 |
3.830.996 |
+ 2,32 |
67 |
1993 |
3.881.894 |
+ 1,33 |
67 |
1994 |
3.919.008 |
+ 0,96 |
67 |
1995 |
3.665.320 |
- 6,47 |
63 |
1996 |
3.559.617 |
- 2,88 |
61 |
1997 |
3.493.442 |
- 1,86 |
60 |
1998 |
3.565.525 |
+2,06% |
61 |
La
hausse de la criminalité reflète pour l'essentiel celle des
vols
qui représentent plus de 64% de l'ensemble et augmentent de
2,1%.
La délinquance dite de voie publique augmente de 1,3% et
représente plus de la moitié (54,9%) de la délinquance
enregistrée.
Les statistiques restent orientées à la hausse au
premier
semestre 1999,
avec
2%
d'augmentation globale au niveau national
et
3,9% à Paris.
Sur le
plan géographique
, quatre régions, Ile-de-France,
Provence-Alpes-Côte d'azur, Rhône-Alpes et Nord-Pas-de-Calais,
concentrent à elles seules plus de la moitié (55,11%) des crimes
et délits constatés en France métropolitaine.
Par ailleurs, la hausse globale de la criminalité observée en
1998 n'est pas uniforme sur l'ensemble du territoire.
Parmi les 22
régions
métropolitaines,
9 ont
enregistré une baisse
de la criminalité et 9 autres ont
enregistré une hausse supérieure à la moyenne.
Parmi les onze grandes circonscriptions de sécurité publique de
plus de 250 000 habitants quatre ont enregistré une baisse de leur
criminalité, à savoir, Bordeaux (-6,73%), Rouen (-3,95%) et, dans
une moindre mesure, Lyon et Grenoble.
On rappellera que, sur longue période, les chiffres de la
criminalité ont été
multipliés par plus de 6
depuis 1950
, la croissance ayant été constante depuis cette
date, à des rythmes plus ou moins élevés, avec
néanmoins un premier retournement de tendance de 1984 à 1988, et
un autre de moindre ampleur de 1994 à 1997.
Pendant cette période on a pu assister à une explosion de la
petite délinquance liée au développement de la
société de consommation et à une forte augmentation de la
criminalité en matière de stupéfiants.
L'augmentation des vols est particulièrement spectaculaire. On comptait
moins de 200 000 vols en 1950 pour plus de 2 millions en 1998. Les vols
d'automobile, très symptomatiques de notre époque, ont
été multipliés par plus de 100 passant de 2500 en 1950
à plus de 300 000 en 1998.
En matière de stupéfiants les faits constatés ont
été multipliés par mille en trente ans, passant d'une
centaine en 1968 à près de 100 000 en 1998, la progression
ayant dépassé les 80% dans les dix dernières
années.
B. UN FORT SENTIMENT D'INSÉCURITÉ DE NOS CONCITOYENS
La détérioration des statistiques de la criminalité en 1998 est en phase avec l'accroissement du sentiment d'insécurité de nos concitoyens. Mais en tout état de cause, comme votre commission l'a souligné les années précédentes, les statistiques officielles ne sont pas véritablement adaptées pour retracer l'insécurité réellement subie ou perçue par les citoyens dans leur vie quotidienne.
1. Le " chiffre noir " de la délinquance
Les
chiffres officiels résultent de la tenue par les services de police
judiciaire des états statistiques dits " états 4001 "
qui reflètent plus l'activité des services de police que la
délinquance réelle.
Ils ne recensent en effet que les
faits signalés par leurs
victimes
. Or, de nombreux facteurs, déjà relevés par
votre rapporteur les années précédentes dissuadent les
citoyens de porter plainte.
Il en est ainsi de la
faiblesse des taux d'élucidation
des
infractions de proximité. Alors que le taux d'élucidation des
homicides approche les 85%, et qu'il est en moyenne de 28,66% pour l'ensemble
des infractions (contre 30,20% en 1996 et 29,47% en 1997), il s'établit
à 13 % pour les vols et à moins de
10% (9,6%) pour l'ensemble
de la délinquance de voie publique
.
La faiblesse de la réponse pénale aggrave encore ce
phénomène puisque, en moyenne,
80 % des affaires
élucidées en ces matières sont classées sans
suite
par les parquets faute de moyens pour les traiter. Votre commission a
fréquemment déploré cette rupture de la chaîne
répressive estimant que le classement sans suite ne devait pas
être une solution pour pallier l'encombrement des tribunaux.
Par ailleurs, les statistiques ne recensent que les crimes et délits et
non les
contraventions
. Or, on observe, depuis plusieurs années,
l'apparition, à côté d'une réelle
délinquance, de comportements provocants, dits
"
incivilités
", qui sont durement ressentis par les
populations concernées. Il convient cependant de ne pas adhérer
à la tendance consistant à
cacher sous le terme
d'incivilités des comportements qui seraient tout à fait
susceptibles d'être réprimés pénalement, ne
serait-ce que par une simple contravention.
Même sans aboutir
à la " tolérance zéro ", de mise en
Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, il ne faut pas laisser croire que certains
agissements peuvent échapper à toute sanction.
Une
enquête de " victimation "
conduite par l'Institut
des hautes études de la sécurité intérieure
(IHESI), associé à l'INSEE, a révélé, au
mois d'octobre dernier, que les faits de délinquance commis en 1998
seraient
cinq fois supérieurs
à ceux des statistiques
officielles. La meilleure adéquation entre les faits commis et ceux
déclarés apparaît quand les victimes peuvent espérer
être dédommagées par les assurances à la suite du
préjudice subi, ce qui est le cas en matière de vol d'automobile,
par exemple. L'enquête met en lumière, au contraire, un nombre de
menaces ou chantages 66 fois plus important que celui déclaré, et
115 fois plus d'atteintes à la dignité des personnes.
Cette étude confirme que
les statistiques de la délinquance de
proximité sont certainement minimisées
et qu'il est
justifié d'évoquer le "
chiffre noir de la
criminalité
".
2. La forte croissance de la violence de proximité
La
violence affecte de plus en plus les Français dans leur vie quotidienne.
Depuis 1988, alors que les infractions dites de masse, qui sont les plus
courantes, ont augmenté de 20%, les
dégradations
et
les
coups et blessures volontaires
ont plus que doublé et les
vols
avec violence
ont augmenté de 75%. En 1998, ces infractions ont
continué à croître de 5 à 6%, soit très
nettement plus que moyenne, ainsi qu'il ressort du tableau ci-dessous.
ÉVOLUTION DÉCÉNNALE DES INFRACTIONS DE MASSE
Infractions |
1988 |
1992 |
1996 |
1997 |
1998 |
Evolution 1998/1997
|
Evolution 1998/1988
|
Coups et
blessures
|
42 512 |
55 613 |
75 425 |
81 910 |
86 796 |
5,97% |
104,17% |
Cambriolages |
375 851 |
462 497 |
436 414 |
407 385 |
409 212 |
0,45% |
8,88% |
Vols avec violence |
43 409 |
60 324 |
70 031 |
72 203 |
76 191 |
5,52% |
75,52% |
Vols à l'étalage |
63 355 |
70 856 |
59 627 |
57 055 |
60 395 |
5,85% |
-4,67% |
Vols à la tire |
99 305 |
102 990 |
80 984 |
79 747 |
93 081 |
16,72% |
-6,27% |
Vols de véhicules |
360 509 |
504 939 |
443 767 |
417 360 |
415 930 |
-0,34% |
15,37% |
Vols Roulotte |
675 032 |
886 011 |
704 955 |
672 101 |
687 362 |
2,27% |
1,83% |
Recels |
26 963 |
34 089 |
34 324 |
35 381 |
38 857 |
9,82% |
44,11% |
Falsifications |
173 891 |
180 721 |
163 698 |
154 675 |
149 929 |
-3,07% |
-13,78% |
Dégradations |
204 218 |
374 569 |
447 376 |
454 180 |
474 978 |
4,58% |
132,58% |
Total Infractions masse |
2 065 045 |
2 732 609 |
2 516 601 |
2 431 997 |
2 492 731 |
2,50% |
20,71% |
Criminalité |
3 132 694 |
3 830 996 |
3 559 617 |
3 493 442 |
3 565 525 |
2,06% |
13,82% |
Part de la criminalité |
65,92% |
71,33% |
70,70% |
69,62% |
69,91% |
|
|
En 1998,
le service des renseignements généraux a comptabilisé
26 000 faits de
violence urbaine,
soit 10 000 faits de
plus qu'en 1997. La moitié de ces faits étaient des incendies de
biens, 8 000 voitures ayant ainsi été incendiées. Le
ministre de l'intérieur a minimisé ces chiffres en faisant
ressortir qu'il n'y avait "
rien de commun entre un feu de poubelle et
un meurtre
". Il n'en demeure pas moins que l'incendie volontaire ne
peut être considéré comme une attitude sociale normale....
L'ensemble de ces phénomènes de délinquance urbaine se
concentre principalement dans les banlieues et les quartiers
défavorisés dont les habitants ont le sentiment d'être
à l'écart des services de l'Etat en devenant de fait des citoyens
de deuxième rang, condamnés à vivre dans des
zones de
non-droit
en contact quotidien avec la violence urbaine et la
multiplication des trafics.
Le service des renseignements généraux a déterminé
749 quartiers sensibles
en proie à la violence urbaine.
Parmi ceux-ci,
167
, sont régulièrement le siège de
violences anti-policières, y rendant extrêmement difficile
toute intervention
.
Ce phénomène, autrefois concentré dans les zones les plus
urbanisées, tend à se
diluer géographiquement
et
à toucher des quartiers de petites villes. Il tend de plus à
s'exporter à l'extérieur des quartiers, les fauteurs de trouble
tendant de plus en plus à sortir de leur cité et à se
rendre notamment dans les centres villes. C'est ainsi que Paris, longtemps
épargné, est de plus en plus fréquemment confronté
aux exactions de bandes venant de banlieue.
Vingt-six
départements ont été
déterminés comme
très sensibles
et
vingt et
un
comme
sensibles.
La recrudescence de la
violence dans les
transports en commun
est
particulièrement emblématique, affectant les usagers comme les
personnels. Ces derniers n'acceptent plus, à juste titre, d'être
quotidiennement mis en danger dans l'exercice de leurs fonctions. Il convient
à cet égard de saluer les dispositions de l'article 14 de la loi
n° 99-505 du 18 juin 1999
aggravant les peines encourues
par
les auteurs d'infractions commises à l'encontre des agents des
exploitants de réseau de transport public de voyageurs, mesures
préfigurées par la proposition de loi adoptée par le
Sénat en décembre 1998 à l'initiative, et sur le rapport,
de M. Christian Bonnet.
Au-delà d'une violence quotidienne, se sont produites de très
inquiétantes
explosions de violence urbaine
en 1998 et 1999.
Certains quartiers, notamment à Strasbourg, Toulouse, Givors ou Vauvert,
ont connu des situations proches de l'émeute. Par ailleurs, les actes de
violence et de déprédation perpétrés dans le cadre
de
rencontres sportives
, notamment lors du match de football entre
l'Olympique de Marseille et le Paris Saint Germain, le 4 mai dernier à
Paris, conduisent à souhaiter qu'une plus grande fermeté soit de
mise aux abords des stades.
C. LA DÉLINQUANCE DES MINEURS CONTINUE DE S'ACCROÎTRE DE MANIÈRE PRÉOCCUPANTE
En 1998,
le nombre de mineurs impliqués dans des crimes ou des délits
s'est
accru de 11,23 %,
atteignant 171 787.
Leur part dans le total des personnes mises en cause a continué de
progresser. Elle s'établit à
21,77%
contre 19,37% en 1997,
11,96% en 1988 et 10% en 1970.
Il faut noter que la
part des filles
continue à augmenter dans la
population des mineurs mis en cause (11,1 % en 1998 pour 10,47% en 1997 et
9,32% en 1996), mais qu'elle reste inférieure à celle des femmes
adultes dans le total des mis en cause majeurs (15,1%).
Le caractère de plus en plus
précoce
de la
délinquance devient un véritable sujet de préoccupation
pour les services de police qui sont souvent confrontés à des
enfants de moins de 13 ans, voire même, de moins de 10 ans.
La participation des mineurs est particulièrement importante en
matière de vols. Ils représentent ainsi 60% des mis en cause pour
des vols de deux roues à moteur et 34,11 % sur l'ensemble des vols.
Mais
l'augmentation des actes de violences impliquant des mineurs
se
poursuit également de manière particulièrement alarmante.
La part des mineurs s'élève à 14,6% en matière de
crimes et délits contre les personnes. Leur part en matière de
délinquance de voie publique (36%) est également en augmentation.
Cette situation reflète la
faillite des modes de régulation
habituels
, l'approche éducative classique n'ayant pas de prise sur
les jeunes délinquants et l'emprisonnement (possible à partir de
13 ans selon des règles spécifiques) ne conduisant qu'à
fabriquer des récidivistes en puissance.
Les conclusions du rapport de la mission interministérielle
confiée à nos collègues députés,
Mme Christine Lazerges et M. Jean-Pierre Balduyck, avaient
été examinées par le conseil de sécurité
intérieure du 8 juin 1998 qui avait arrêté les grandes
orientations
d'un plan gouvernemental de lutte contre la délinquance
des mineurs ne remettant pas en cause les principes de l'ordonnance de
1945.
Ce plan, s'inscrivant dans une logique de programmation sur la
période 1999-2001, a été précisé par la
circulaire du 6 novembre 1998 du Premier ministre et par la circulaire
interministérielle du même jour.
Le Conseil de sécurité intérieure du 27 janvier 1999 a
souhaité intensifier les actions décidées en 1998. Il a
ainsi décidé d'assurer "
l'immédiateté et
la continuité de la prise en charge des mineurs notamment des plus
difficiles d'entre eux, au besoin dans le cadre d'une rupture avec leur
environnement
". A notamment été décidée
la création d'ici 2001 de
50 centres de placement
immédiat
d'une capacité de 900 places devant permettre
l'éloignement des délinquants les plus difficiles et leur prise
en charge renforcée nuit et jour. A également été
prévue une accélération du programme de
développement des
centres éducatifs renforcés
afin
de disposer de 100 unités à la fin de l'année 2000
à l'intention de mineurs pour lesquels un séjour de rupture de
quelques mois apparaît nécessaire.
Les modalités de mise en oeuvre des principes de traitement de la
délinquance juvénile ont été
précisées par une circulaire du garde des Sceaux en date du 24
février 1999.
Votre commission rappelle que la lutte contre la délinquance des
mineurs doit être commencée à la base par un
véritable apprentissage de la citoyenneté. Il ne faut pas laisser
sans réponse les petites infractions au risque d'accréditer
l'idée que leurs auteurs ne sont pas soumis à la loi commune.
Elle approuve les orientations consistant à impliquer davantage les
parents et à éloigner les meneurs de leur milieu d'origine pour
tenter de soustraire leurs camarades à leur influence.
D. LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE DÉTERMINÉE DE LUTTE CONTRE LE TRAFIC DE STUPÉFIANTS ET LA TOXICOMANIE
Votre
commission a eu maintes fois l'occasion de rappeler l'importance qu'elle
attachait à la lutte contre le fléau que représente la
drogue.
En 1998, on constate une augmentation de 6% des infractions constatées
en matière de consommation ainsi qu'un accroissement des
quantités de produits stupéfiants saisies.
Infractions à la législation sur les
stupéfiants
Type d'infractions |
Année 1997 |
Année 1998 |
Variation 98/97 |
TOTAL |
89 285 |
91 048 |
+1,97% |
- dont trafic |
6 560 |
5 541 |
-15,53% |
- usage-revente |
12 281 |
10 874 |
-11,46% |
- consommation |
70 444 |
74 633 |
+5,95% |
Saisies de produits stupéfiants
Substances |
1997 |
1998 |
Evolution |
Cannabis
|
55,12 tonnes |
55,7 tonnes |
+ 1,05% |
Héroïne |
415 kg |
344 kg |
- 17,26 % |
Cocaïne |
0,8 tonnes |
1,05 tonnes |
+ 24,27 % |
LSD |
5 983 doses |
18 680 doses |
+ 212,22 % |
Crack |
16,2 kg |
25 kg |
+ 54,32 % |
Ecstasy |
198 941 doses |
1 142 226 doses |
+ 474,15 % |
L'augmentation des saisies de produits stupéfiants n'a
pas
concerné l'héroïne, ce qui confirmerait la
désaffection constatée pour l'usage de cette drogue. A
l'opposé, l'évolution des saisies de
drogues de
synthèse
révèle la part alarmante que prennent ces
drogues dans la consommation. Leur production est assurée à 80%
par les Pays-Bas mais aussi par de nombreux laboratoires clandestins
installés en Pologne, en Hongrie et en Russie.
Votre rapporteur tient à rappeler que la lutte contre la drogue passe,
tant en ce qui concerne l'action interne que la coopération
internationale, par une
mobilisation permanente de tous les moyens
. Ceci
implique l'efficacité de l'action préventive et répressive
des pouvoirs publics entreprise sous l'égide de la mission
interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT).
Mais ceci exige avant tout que la politique du Gouvernement en la
matière soit ferme et sans ambiguïté.
Sans remettre en
cause la nécessité de combattre les méfaits de
l'alcoolisme et du tabagisme, votre commission estime qu'il ne faut pas mettre
ces fléaux sur le même pied que la lutte contre la drogue qui
implique l'existence de trafics autrement plus dangereux.
E. UNE LUTTE CONTRE LE TERRORISME FOCALISÉE SUR LA CORSE
En 1998,
la lutte s'est poursuivie contre les mouvements terroristes d'origine
intérieure comme d'origine extérieure même
si la France
n'a subi aucun attentat d'origine extérieure
.
L'activité antiterroriste s'est principalement focalisée sur la
Corse après l'assassinat, le 6 février 1998, du
Préfet
de la
région corse
, M. Claude Erignac. Les
investigations de la brigade nationale anti-terroriste ont conduit à
l'interpellation de 430 personnes dont 55 ont été placées
sous mandat de dépôt. Les membres du commando ayant
assassiné le préfet ont pu être interpellés les 21
et 23 mai 1999, à l'exception de l'auteur présumé de
l'assassinat, Yvan Colonna, qui est en fuite. Le rapport de la commission
d'enquête sur la conduite de la politique de sécurité
menée par l'Etat en Corse détaille les multiples
dysfonctionnements révélés, au sein de la police, de la
gendarmerie et de la justice, à l'occasion de cette
enquête
1(
*
)
.
Le
terrorisme breton
s'est signalé par une dizaine d'attentats
depuis le début 1998, dont un à Belfort et un à
Cintegabelle.
La dernière action du
terrorisme basque
remonte au 5 août
1998, une trêve unilatérale illimitée ayant
été décrétée en septembre 1998. La lutte
contre l'organisation terroriste ETA dans le cadre d'une coopération
franco-espagnole renforcée a permis d'obtenir des résultats
significatifs. En 1998, 33 personnes liées à l'ETA ont
été interpellées et 6 écrouées. En 1999,
12 militants ont été arrêtés et 8
écroués et d'importantes caches d'armes ont été
découvertes au Pays Basque français.
La persistance de la menace d'une nouvelle vague d'attentats des
groupes
armés islamiques
(GIA) sur le territoire national à
l'approche de la coupe du monde de football a conduit les services
anti-terroristes à diligenter, en liaison avec d'autres pays
européens, une opération qui a abouti à la neutralisation
d'un réseau terroriste qui avait notamment projeté d'assassiner
le recteur de la grande mosquée de Paris. 140 personnes ont
été interpellées et 45 écrouées en 1998.
Le suivi de l'organisation du
parti des travailleurs du Kurdistan
(PKK)
a été intensifié du fait de l'errance puis de
l'arrestation par les services turcs du leader de l'organisation, Abdullah
Ocalan. Dans ce cadre, 74 personnes ont été
interpellées et 13 écrouées en 1998 et
23 personnes ont été interpellées et 15
écrouées en 1999.
F. UNE LUTTE PERTURBÉE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE.
L'année 1998 a été marquée par
trois
faits principaux en matière de contrôle de l'immigration : la
levée des contrôles fixes à la frontière italienne
le 1
er
avril 1998, la poursuite d'une forte pression migratoire
d'origine kurde et l'apparition d'un véritable exode lié à
la situation de guerre au Kosovo.
Globalement, en 1998, le nombre de mesures de non-admission aux
frontières s'est élevé à 40 608, en diminution
de 12% par rapport à 1997. Ces mesures ont concerné au premier
chef les Marocains et, lors de la coupe du monde de football, les Britanniques.
Le nombre des réadmissions a au contraire augmenté concernant
principalement les Yougoslaves du Kosovo et les Irakiens d'origine kurde.
La pression migratoire irrégulière la plus importante se situe
à la frontière franco-italienne.
Malgré un accroissement de la pression migratoire, et un nombre de
mesures d'éloignement (44 513) en augmentation, le nombre de
personnes effectivement éloignées du territoire ne s'est
élevé qu'à
8 040
contre
9 947 en
1997 et 12 571 en 1996.
Le taux d'exécution des mesures
d'éloignement est ainsi particulièrement bas,
s'établissant à 18 %.
La situation est similaire au
premier semestre 1999, au cours duquel ont été prononcées
19 810 mesures d'éloignement générant 3595
départs effectifs.
Cette faiblesse des éloignements exécutés peut s'expliquer
par l'expectative dans laquelle se sont trouvés les services pendant la
durée de
l'opération de régularisation
des
" sans papiers " initiée par la circulaire du 24 juin 1997,
prolongée par l'entrée en vigueur de
la loi du 11 mai 1998,
dite loi RESEDA,
qui a modifié une nouvelle fois les dispositions de
l'ordonnance de 1945 sur l'entrée et le séjour des
étrangers.
S'agissant du
bilan de l'opération de régularisation
, sur
143 939 demandes, 80 085 (55,6%) ont été
acceptées et 62 808 (43,6%) ont été rejetées,
1 046 étant encore en instance d'examen.
M. José Balarello, dans son rapport établi au nom de la
commission d'enquête du Sénat sur les régularisations,
présidée par M. Paul Masson, avait stigmatisé
l'institution par cette procédure de
" clandestins
officiels
", personnes en situation irrégulière,
désormais connues des services de police, mais ne pouvant faire, ne
serait ce que du fait de leur nombre trop élevé, l'objet d'une
reconduite effective à la frontière
2(
*
)
.
Les dispositifs
d'aide au retour dans le pays d'origine
n'ont pas
rencontré le succès escompté, 717 personnes seulement
ayant bénéficié des dispositions du décret de
janvier 1998. Par ailleurs un dispositif spécial a été mis
en place en septembre 1998 en collaboration avec la mission
interministérielle au co-développement. Il s'agit des contrats de
réinsertion dans le pays d'origine (CRPO) donnant le
bénéfice d'une formation professionnelle en France et dans le
pays d'origine aux ressortissants marocains, maliens et
sénégalais.
Par une circulaire du 11 octobre 1999, le ministre de l'intérieur a tenu
à appeler les préfets à une plus grande vigilance en
matière d'exécution des décisions d'éloignement et
a déploré que près de la moitié des
étrangers non-régularisés en 1997 et 1998 n'aient fait
l'objet d'aucun arrêté de reconduite à la frontière.
Votre commission ne peut qu'approuver cet appel à la fermeté
conduisant à éloigner effectivement les personnes n'ayant pas
droit au séjour dans notre pays
.
Le premier Conseil européen consacré aux affaires
intérieures et à la justice, dans le cadre du Traité
d'Amsterdam entré en vigueur le 1
er
mai 1999, s'est tenu
à Tampere le 15 octobre dernier. Ont été esquissés
à cette occasion les
contours d'une politique commune d'asile et
d'immigration
largement inspirée des conceptions françaises
refusant la fixation de quotas d'immigrants mais mettant l'accent sur la
nécessité d'une politique de co-développement avec les
pays d'origine et d'une maîtrise des flux migratoires associée
à un souci d'intégration des étrangers en situation
régulière.
II. UNE PRIORITÉ DONNÉE A LA POLITIQUE DE PROXIMITÉ
Pour
lutter contre l'insécurité au quotidien, le Gouvernement a
réaffirmé, notamment lors du dernier Conseil de
sécurité intérieure en date du 19 avril 1999, son
attachement au développement d'une politique de sécurité
de proximité dans la ligne des orientations définies au colloque
de Villepinte en octobre 1997.
Il s'agit de substituer à une police chargée principalement
d'assurer le maintien de l'ordre, une police ayant pour objectif premier
d'assurer la sécurité quotidienne des citoyens et de lutter
contre la délinquance de masse.
Cette politique repose sur la définition de territoires
géographiquement identifiés, la responsabilisation et la
polyvalence des fonctionnaires concernés et la mise en place d'un
accueil personnalisé du public ainsi que d'un partenariat actif avec
tous les acteurs des contrats locaux de sécurité.
Elle doit être mise en place progressivement sur trois ans, au vu des
résultats d'une expérimentation qui fera l'objet d'une
évaluation lors des assises nationales de la police de proximité,
en mars 2000.
L'expérimentation a débuté sur cinq circonscriptions de
sécurité publique (Beauvais, Châteauroux, Nîmes, Les
Ulis, et Garges-les-Gonesse). Elle a été étendue cet
été à une soixantaine de nouveaux sites, quartiers ou
communes, dans les départements les plus touchés par la
délinquance.
Mais une telle politique nécessite
des moyens importants en
personnels placés au contact des populations
. Or, si les effectifs
de policiers sont stables depuis 1995, ils sont à l'heure actuelle
lourdement grevés par les vacances de postes résultant du temps
de formation des agents appelés à remplacer les nombreux
personnels partant en retraite. En outre, de multiples policiers ne sont pas en
contact avec les populations du fait de l'accomplissement de tâches
purement administratives, de gardes statiques ou de tâches
" indues " ne relevant pas en principe des missions de la police.
M. Bauer avait affirmé dans une étude rendue publique au
début de l'année 1999 que, par le biais des
récupérations, des absences et des vacances de postes diverses,
il n'y aurait, sur un total de 20 000 agents affectés à la
sécurité publique, que 5 000 policiers présents sur
le terrain à un moment donné de la journée. Le ministre de
l'intérieur conteste fermement ces chiffres, ses services
comptabilisant, quant à eux, 14 000 fonctionnaires disponibles sur
la voie publique dans la journée et 6 000 la nuit. Cette
polémique a néanmoins eu l'intérêt de mettre
l'accent sur les difficultés rencontrées en la matière.
Alors qu'un partenariat des acteurs de la sécurité est
recherché à travers les contrats locaux de
sécurité, il semble en effet que la montée en puissance
des emplois de proximité s'accompagne de
difficultés
réelles pour mettre en place dans les zones sensibles les personnels
nécessaires à la réussite de cette politique
.
A. LES CONTRATS LOCAUX DE SÉCURITÉ
Mis en
place par la circulaire interministérielle du 28 octobre 1997, les
contrats locaux de sécurité ont pour objet de mobiliser tous les
partenaires publics et tous les acteurs sociaux dans la mise en oeuvre au
niveau local d'un véritable dispositif préventif et
répressif de lutte contre l'insécurité.
Leur mise en oeuvre a fait l'objet d'une nouvelle circulaire
interministérielle en date du 7 juin 1999.
Ces contrats déterminent les objectifs à atteindre et les actions
à engager sur la base d'un diagnostic local de sécurité.
Les emplois-jeunes de proximité sont affectés prioritairement
à la réalisation des objectifs fixés par ces contrats dans
les zones très sensibles.
Au 1
er
octobre 1999,
292 contrats avaient été
signés
dont seulement 89 dans un cadre intercommunal. Huit contrats
thématiques concernent les transports publics, notamment à Lille.
Etaient en cours d'élaboration à cette même date, 431
autres contrats, dont 85 intercommunaux et 5 spécifiques aux
transports publics.
Ces contrats sont cosignés par le préfet, le procureur de la
République et le ou les maires concernés et associent, outre les
services de l'Etat, des partenaires privés tels les bailleurs sociaux,
les sociétés de transports en commun, les organismes consulaires
ou des associations. Une dizaine de ces contrats ont été en outre
signés par le président d'un conseil régional, 38 par le
président d'un conseil général et 136 par le recteur ou
l'inspecteur d'académie. Quelques bailleurs sociaux,
sociétés de transports urbains ou organismes consulaires ont
été également signataires de contrats au lieu d'y
être simplement associés.
Les actions principales recensées concernent le développement de
l'îlotage, l'amélioration de l'accueil du public et l'assistance
aux victimes.
Le
contrat local de sécurité de Paris
a été
élaboré. Il comprend un contrat proprement dit et une
série d'annexes thématiques (toxicomanie, délinquance des
mineurs) ou territoriales (principalement par arrondissements) qui seront
négociées dans un second temps. Avant de le signer, le maire de
Paris souhaite néanmoins obtenir du ministre de l'intérieur un
engagement quant à l'évolution des effectifs permettant de
garantir sa bonne exécution. Un contrat local de sécurité
dans les transports est également en instance de signature.
Une mission interministérielle d'évaluation des contrats
3(
*
)
avait souligné, au mois d'octobre 1998, le
caractère souvent trop sommaire des diagnostics locaux de
sécurité, constatant que l'urgence de la signature du contrat
avait été parfois jugée plus importante que le diagnostic
et le contrat lui-même. Elle avait regretté par ailleurs la
réticence des maires à signer des contrats d'agglomération
ainsi qu'une insuffisante concertation entre les différents services de
l'Etat et avec les conseils généraux. Depuis, il semble que les
diagnostics locaux de sécurité se soient améliorés.
La circulaire du 7 juin 1999 a par ailleurs encouragé à
un élargissement du partenariat vers les conseils généraux
et régionaux, ainsi que vers l'ensemble des services de l'Etat et les
organismes à vocation sociale.
Il apparaît en outre que ces contrats locaux s'insèrent dans un
dispositif institutionnel trop complexe
. La circulaire du 7 juin 1999
essaie de clarifier le lien entre les contrats locaux de sécurité
et les conseils communaux et départementaux de prévention de la
délinquance. Elle préconise la création de tels conseils
là où ils n'existent pas pour assurer le suivi local des contrats
et prévoit d'en élargir la composition aux différents
partenaires concernés. Elle fixe de plus l'articulation des contrats
avec la politique de la ville, le contrat local de sécurité
devant constituer "
la convention thématique du contrat
consacré à la sécurité
" et devant se
substituer aux contrats d'action de prévention pour la
sécurité dans la ville (CAPS), quand ils existent....
Une cellule nationale d'animation et de suivi des contrats locaux de
sécurité a été mise en place au ministère de
l'intérieur au printemps 1999.
B. LES EMPLOIS DE PROXIMITÉ
Le Gouvernement prévoit que seront en place à la fin de l'année 2000 35.000 emplois de proximité sur le terrain dont 20.000 adjoints de sécurité et 15.000 agents locaux de médiation , recrutés dans le cadre des dispositions de la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes. Les conditions de mise en place de ces emplois suscitent de nombreuses inquiétudes.
1. Les adjoints de sécurité
Les
adjoints de sécurité sont des " emplois-jeunes " dont
le statut a été précisé par un décret du 30
octobre 1997. Agés de 18 à 25 ans, ils sont engagés pour
cinq ans
sur la base d'un
contrat de droit public
. Ils doivent
permettre de faire face à des besoins non satisfaits en matière
de prévention, d'assistance et de soutien, particulièrement dans
les quartiers les plus sensibles.
Leurs missions sont très variées mais ils ne peuvent pas
participer à des missions de police judiciaire ou de maintien de
l'ordre. Ils portent une
arme
quand leurs missions le justifient.
Les candidats sont recrutés dans le
cadre départemental
sur la base d'une sélection reposant sur des
tests psychologiques
et un entretien.
Aucun diplôme
n'est exigé.
Les adjoints bénéficient d'une
formation initiale d'une
durée de 10 semaines
, au lieu de 8 semaines initialement,
comprenant une partie théorique en école de huit semaines et un
stage de deux semaines dans un service. Un tuteur leur est affecté dans
des conditions précisées par la circulaire du 16 août
1999.
Ils sont rémunérés au
SMIC
sur la base de 169
heures de travail mensuelles.
Leur prise en charge financière est répartie entre le budget du
ministère de l'intérieur qui assure 20 % des
rémunérations, charges sociales comprises, et la totalité
des frais de fonctionnement, et celui du ministère de l'emploi qui
assure les 80 % restant des rémunérations.
Le budget de 1999 autorisait le recrutement de 15 850 adjoints de
sécurité. Au 1er septembre 1999, leur effectif s'élevait
à
12 118.
La loi de finances pour 2000 autorise le
recrutement de
4 150 adjoints supplémentaires
, et ouvre un
crédit de 393,23 millions de francs. L'objectif de 20 000
adjoints de sécurité serait ainsi atteint au cours de
l'année 2000.
Dans les faits, les adjoints de sécurité ont été
affectés majoritairement à des tâches d'îlotage et
d'accueil dans les commissariats et
sont le plus souvent dotés d'une
arme
.
Des
difficultés de recrutement
sont apparues. La
présentation des tests psychologiques s'est révélée
trop sélective pour les jeunes issus de quartiers sensibles ou de
communautés étrangères. Un
déficit de
candidatures a de plus été constaté en région
parisienne,
contrairement au reste de la France.
Le niveau d'études initial des adjoints de sécurité est
très inférieur à celui des gardiens de la paix, 40% ayant
un niveau égal ou inférieur au BEP-CAP. Le ministre de
l'intérieur a estimé devant la commission des Lois que les
adjoints de sécurité représentaient un important facteur
de rajeunissement et de diversification de la police et il a fait part de son
souhait de voir les adjoints de sécurité refléter la
population. A l'heure actuelle,
19% des adjoints de sécurité
sont originaires des quartiers sensibles
, sans toutefois que des quotas
aient été imposés.
Une mission d'inspection commune de l'inspection générale de
l'administration et de l'inspection générale de la police
nationale a relevé que les adjoints de sécurité ne
bénéficiaient pas toujours d'un
encadrement suffisant
, le
problème étant plus aigu en région Ile-de-France où
sont affectés beaucoup de gardiens de la paix stagiaires. La mission a
relevé que les tuteurs des adjoints ne recevaient pas toujours la
formation spécifique nécessaire et que la
formation
sur le
terrain des adjoints eux-mêmes avant leur entrée en fonctions
était souvent déficiente.
Compte tenu du grand nombre de départs à la retraite et des
recrutements attendus dans le corps de maîtrise et d'application dans les
années à venir (environ 25 000 en cinq ans), les jeunes
embauchés auront toute facilité pour passer les concours de
recrutement et être à terme intégrés dans la police.
Le décret n° 99-904 du 19 octobre 1999 leur réserve
ainsi
40% des postes ouverts aux concours
de recrutement de
gardiens de la paix.
Votre commission rappelle comme les années précédentes
que les adjoints de sécurité ne doivent pas être
considérés comme des supplétifs à moindre
coût de la police nationale.
Elle insiste pour qu'un soin particulier soit apporté à la
sélection des candidats
, d'autant plus qu'ils auront
vocation
à rentrer en nombre par concours spéciaux dans la police
. Or,
il semble que les recrutements massifs actuellement opérés soient
peu propices à assurer la qualité des personnels
concernés, principalement en région parisienne, du fait du
déficit de candidatures.
Votre commission estime indispensable que soit assurée la
qualité de la formation et de l'encadrement
de ces jeunes peu
expérimentés, à qui sont confiées des
missions
parfois dangereuses
et qui sont
le plus souvent dotés d'une
arme
. Or, cet encadrement est rendu problématique en raison du
manque d'effectifs dans le corps de maîtrise et d'application. Il n'est
pas rare de rencontrer sur le terrain des adjoints de sécurité
livrés à eux-mêmes ou simplement confiés à un
jeune stagiaire. Il ne faut pas oublier que les 20 000 adjoints de
sécurité représenteront plus du cinquième de
l'effectif total du corps de maîtrise et d'application. Plusieurs
personnes entendues par votre rapporteur lui ont fait part de leur crainte de
voir la police se transformer "
en garderie pour adjoints de
sécurité
".
2. Les agents locaux de médiation sociale
Les
agents locaux de médiation sociale sont recrutés dans le cadre de
l'article premier de la loi sur l'emploi des jeunes, pour 5 ans et sur la base
de contrats de droit privé, pour remplir des tâches de
prévention, périphériques de la sécurité
publique au sens strict.
Ils sont mis en place dans le cadre des contrats locaux de
sécurité. Le coût de leur rémunération est
supporté pour 20 % par l'employeur et 80 % par le
ministère de l'emploi.
Au cours du premier semestre 1999, 8 192 créations d'emplois
étaient prévues et
5 898 jeunes
avaient
été recrutés.
Ils sont principalement employés par des communes mais également
par d'autres personnes morales de droit public ou privé, telles des
sociétés de HLM ou des entreprises de transport public.
Les missions effectivement confiées aux agents de médiation sont
très variées : service de nuit dans les logements sociaux,
surveillance dans les transports en commun, aux abords des
établissements scolaires ou des espaces verts, aide aux jeunes en
difficulté, accueil des victimes, médiation sociale,
prévention de la toxicomanie, développement de solidarités
de voisinage, action d'intégration des publics les plus fragiles.
Une enquête effectuée sur 400 agents fait ressortir que la
moitié d'entre eux ont un niveau inférieur au CAP-BEP et que plus
d'un tiers seraient d'origine étrangère ou étrangers.
Des difficultés sont apparues en matière d'encadrement et de
formation de ces jeunes, les collectivités employeurs étant
souvent démunies de cadres pour assurer l'un et l'autre.
C. LES DIFFICILES REDÉPLOIEMENTS DE PERSONNELS VERS LES ZONES SENSIBLES
1. L'abandon du projet global de redéploiement territorial entre la police et la gendarmerie
A la
suite du rapport de nos collègues MM. Jean-Jacques Hyest et Roland
Carraz, le Gouvernement avait, lors du conseil de sécurité
intérieure du 27 avril 1998, retenu le principe d'un
redéploiement territorial des forces de police et de gendarmerie qui
aurait permis d'affecter un plus grand nombre de policiers et gendarmes dans
les zones sensibles. Ce plan aurait notamment conduit à la fermeture de
94 commissariats.
Devant les oppositions exprimées à ce projet, tant par les
élus concernés que par les personnels, le gouvernement avait,
dans un premier temps, chargé M. Guy Fougier de mener des
consultations complémentaires.
Le Premier ministre a en définitive annoncé, le 20 janvier 1999,
l'abandon du projet global de redéploiement, indiquant que
les
concertations seraient menées au cas par cas avec les élus
concernés
.
A l'heure actuelle reste seule envisagée la fermeture de six
commissariats, à savoir, Les Andelys (Eure), Aubusson (Creuse),
Vitry-le-François (Marne), Hirson (Aisne), Saint-Junien (Haute-Vienne),
Bagnière-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées).
2. La fidélisation des forces mobiles
Le
Conseil de sécurité intérieure du 19 avril 1999 a retenu
le principe d'une fidélisation dans les zones sensibles de forces de CRS
et de gendarmerie mobile à hauteur de 1500 CRS et 1500 gendarmes sur une
période de trois ans.
Le décret n° 99-936 du 10 novembre 1999 a modifié en
conséquence le décret du 19 septembre 1996 relatif à la
répartition des attributions et à l'organisation de la
coopération entre la police nationale et la gendarmerie nationale.
Concernant les CRS, il est prévu d'affecter, pendant six mois
consécutifs, cinq compagnies à résidence, par roulement de
compagnies implantées sur un même site. Les départements
concernés sont les Bouches du Rhône (CRS n° 53 à
55), la Haute Garonne (CRS n° 26 et 27), le Nord (CRS n° 11
et 12), le Rhône (CRS n° 45 et 46) et l'Essonne (CRS
n° 5 et 8).
Des détachements d'intervention à résidence de 60
fonctionnaires seront créés dans douze autres compagnies. Ils
seront également fidélisés pour six mois par roulement des
effectifs affectés dans les unités concernées.
Le dispositif a été mis en place au 1
er
octobre 1999
concernant les cinq compagnies sur sites et deux détachements à
résidence (CRS n°2 à Vaucresson et CRS n° 61
à Vélizy). Six autres détachements seront
créés en 2000 et les quatre derniers en 2001.
La fidélisation des forces mobiles s'accompagnera de la dissolution des
compagnies départementales d'intervention dont les effectifs pourront
être redistribués au bénéfice de la police de
proximité.
Il semble que cette opération ne rencontre pas l'adhésion des
personnels. Les pertes financières résultant de la non-perception
de l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT) ne
seraient qu'à moitié compensées par l'indemnité
représentative d'heures supplémentaires de 1 200 F
mensuels dont les personnels bénéficieront. De nombreux CRS
répugnent par ailleurs à rester six mois en place, estimant
qu'une période de quatre mois serait suffisante et permettrait de
modifier d'une année sur l'autre les périodes de
sédentarisation. Ces réticences semblent s'être
concrétisées par une curieuse recrudescence de congés de
maladie touchant les personnels concernés.
3. La difficile remise sur le terrain de policiers
Plusieurs voies sont en outre explorées pour remettre
sur le
terrain des policiers.
Le ministre de l'intérieur souhaite en premier lieu encourager
l'externalisation de certaines charges, concernant principalement la
maintenance informatique et les ateliers de réparation de
véhicules. La Cour des comptes a en effet évalué à
1 200 le nombre de fonctionnaires occupés à des tâches
d'entretien du parc automobile. Des consignes ont été
données par une circulaire du 3 juin 1999 pour encourager le recours au
secteur privé.
Il est également envisagé de limiter les gardes statiques de
bâtiments en ayant davantage recours aux systèmes de
vidéo-surveillance. Ces gardes ont en effet représenté 1,8
millions d'heures-fonctionnaire en 1998.
Quant aux recrutements de personnels administratifs devant permettre de
dégager les policiers, ils sont intervenus en nombre insuffisant par
rapport aux prévisions de la loi d'orientation du
21 janvier 1995. Par ailleurs, la réflexion qui s'était
engagée à l'occasion du vote de cette même loi concernant
la suppression de nombreuses " charges indues ", s'agissant notamment
des transferts de détenus, de la garde des détenus
hospitalisés ou de l'établissement des procurations de vote ne
semble pas devoir aboutir.
D. LES POLICES MUNICIPALES
Les polices municipales peuvent être un atout
important d'une politique de proximité en complément des forces
de police de l'Etat.
A l'issue d'un long processus et douze ans après la
présentation devant le Sénat d'un premier projet, la loi relative
aux polices municipales a enfin vu le jour cette année (loi
n° 99-291 du 15 avril 1999). Le Sénat a, sur le rapport de
M. Jean-Paul Delevoye au nom de la commission des Lois, souhaité
promouvoir la
complémentarité des polices municipales et de la
police nationale
dans un
cadre partenarial respectant l'autonomie des
communes
.
Lors de son audition par la commission, le ministre de l'intérieur a
indiqué que les décrets, qui avaient été
annoncés pour le mois de juillet 1999, allaient être
présentés prochainement devant le Conseil d'Etat.
E. LA RÉFORME DE LA PRÉFECTURE DE POLICE DE PARIS
La
réforme de la préfecture de police entrée en vigueur le
18 avril dernier tend à développer à Paris une
véritable police de proximité en introduisant deux innovations :
- Création au niveau de
chaque arrondissement
d'une
circonscription unique de police urbaine de proximité
regroupant,
sous l'autorité d'un commissaire central d'arrondissement, les moyens
des commissariats de sécurité publique et des commissariats de
quartiers chargés de la police judiciaire. Les arrondissements sont
eux-mêmes regroupés en secteurs. Ce regroupement a pour but de
donner plus de cohérence et d'efficacité à l'action de la
police et de simplifier les relations avec le public ;
- Création, au niveau de l'administration centrale,
de trois
directions
correspondant chacune à une filière distincte : la
filière de l'ordre public et de la circulation, la filière de la
police urbaine de proximité et la filière de la police
judiciaire. Cette distinction permettra de séparer clairement les moyens
consacrés d'une part aux missions d'ordre public et d'autre part
à la police de proximité.
La direction de la police urbaine de proximité compte
9 300 fonctionnaires actifs, auxquels s'ajoutent 700 adjoints de
sécurité et policiers auxiliaires et 1 800 agents de
surveillance de Paris.
La direction de l'ordre public et de la circulation compte 4 400
fonctionnaires actifs et 530 adjoints de sécurité ou policiers
auxiliaires.
La direction de la police judiciaire compte 2 200 fonctionnaires dont
1 900 actifs.
III. UN BUDGET QUI NE RÉPOND PAS AUX INQUIÉTUDES
Le
projet de budget de la police pour 1999 s'élève à
29,992 milliards de francs
, ce qui correspond à une
progression en francs courants de
3,02%
, nettement supérieure
à celle de l'ensemble du budget qui est limitée à 0,9%.
Sa part dans le budget de l'Etat
s'élève à
1,78%
et est comparable à celle des dernières
années. Sa part dans le Produit intérieur brut (0,32%) est en
diminution depuis 1996.
Mais le budget de la police n'est pas le seul concerné en matière
de sécurité. Certains, comme ceux de la justice ou de la ville,
plus orientés vers la prévention, sont en augmentation plus
importante (+10% pour la ville, + 4% pour la justice). Pour avoir une
vision de
l'effort consenti par la société
pour sa
sécurité
, il serait utile de pouvoir disposer d'un
état récapitulatif des crédits répartis dans les
différents ministères concernés, principalement ceux de
l'intérieur, de la défense, de la justice et de la ville.
Le budget de la police est
avant tout conditionné par les
dépenses de personnel
qui représentent
82,60% des
crédits
,
laissant peu de marge de manoeuvre
budgétaire.
La limitation de l'augmentation spontanée des
traitements permet cependant de dégager cette année une enveloppe
de mesures nouvelles un peu plus importante que les années
antérieures.
Les dépenses de personnel s'élèvent à
24,78 milliards de francs et sont en augmentation de 2,23%. Les
crédits de fonctionnement des services atteindront 4,064 milliard
de francs, soit une augmentation de 4%, alors que les dépenses en
capital s'élèveront à 1,161 milliards de francs en
autorisations de programme (-8%) et à 1,152 milliards en
crédits de paiement (+18,6%).
A. LES PERSONNELS
1. Les effectifs budgétaires
Les
effectifs budgétaires de la police s'élèveront en 2000
à
127 806 agents
, dont
113 052 personnels
actifs
. En incluant
2075 policiers auxiliaires
et
20 000 adjoints de sécurité
,
on
dénombrera
149 881
agents.
Depuis la loi d'orientation, les personnels actifs se répartissent en
trois corps :
- le corps de conception et de direction (commissaires de police) :
2 000 agents ;
- le corps de commandement et d'encadrement (officiers : lieutenants,
capitaines et commandants) : 16 000 agents ;
- le corps de maîtrise et d'application (gardiens et gradés :
gardiens, brigadiers et brigadiers-majors) : 95 000 agents.
La réforme des corps et des carrières, concrétisée
dans le règlement général d'emploi publié le 4
septembre 1996, s'accompagne d'une
modification de la répartition des
effectifs entre les trois corps
de manière à aboutir à
une augmentation du nombre des agents de maîtrise et d'application.
Ce changement de structure s'échelonne sur plusieurs années. En
2010, l'effectif des commissaires serait ainsi réduit à
1 600 et celui des officiers à 13 000 tandis que celui des
gardiens et gradés s'élèverait à 98 000.
Le budget pour 2000 prévoit ainsi la création, par transformation
de 10 emplois de commissaires et de 459 emplois d'officiers, de
469 emplois
dans le corps de maîtrise et d'application
.
Les principales autres variations d'effectifs concernent :
- la création de
4 150 emplois d'adjoints de
sécurité
qui s'ajouteront aux 15 850 autorisés
par le budget 1999 ;
- la suppression de
2 075 emplois de policiers auxiliaires
dans le cadre de la suppression du service national obligatoire ;
- la transformation de 35 emplois d'officiers en 36 emplois
d'attachés de police ;
- la création de
100 emplois de personnels techniques
(20 ingénieurs, 32 techniciens et 48 aides techniques de
laboratoires), permettant le renforcement de la police technique de
proximité et la mise en place du fichier automatisé des
empreintes génétiques (FAEG) ;
- la création de 4 emplois contractuels de médecins du RAID
gagée sur la suppression de 11 emplois administratifs.
2. Une évolution prévisionnelle inquiétante des effectifs
Du fait
de la pyramide des âges des corps actifs de policiers, de nombreux
départs à la retraite
doivent intervenir dans les
prochaines années dans les trois corps actifs de la police nationale,
touchant les policiers appartenant à la génération dite
" génération Marcellin ", recrutés en grand
nombre à la fin des années 60 et au début des
années 70.
Dans les cinq prochaines années sont ainsi attendus plus de 24 000
départs, soit par atteinte de la limite d'âge, soit par
départ anticipé. Seront concernés 480 commissaires,
4 300 officiers et 19 500 gradés et gardiens, soit
un
effectif représentant le quart du corps pour les commissaires et les
officiers et plus du cinquième pour les gardiens et gradés.
En application du paragraphe II de l'article 2 de la loi n° 57-444 du
8 avril 1957, les départs à la retraite
anticipée peuvent être sollicités cinq ans avant la limite
d'âge de leur grade par les agents ayant accompli 25 ans de service,
à savoir à partir de 50 ans pour les gardiens et
gradés.
Les demandes de
départ à la retraite anticipée
ont
été longtemps sous-évaluées. Or, en raison des
conditions de plus en plus difficiles de l'exercice de leurs fonctions, une
grande majorité de fonctionnaires a demandé à
bénéficier de cette disposition. Ainsi les départs
anticipés ont-ils concerné les années
précédentes plus de la moitié des commissaires et
officiers et
les deux tiers des
gardiens et gradés
.
La situation sera encore plus tendue pour les gardiens et gradés qui
doivent voir leurs effectifs augmenter du fait du repyramidage des corps
actifs. Compte tenu de la durée de formation, il existe un
décalage d'un an entre le recrutement d'un agent et sa prise de poste.
Pour éviter une désorganisation totale des services,
il est
impératif de prévoir des recrutements de personnels par
anticipation
, sous peine de manquer cruellement d'effectifs, ne serait-ce
que pour encadrer les adjoints de sécurité.
Une politique de proximité, exige en effet la présence d'un
maximum de personnels sur le terrain. Les
effectifs globaux de la police ont
stagné depuis 1995
.
On ne peut prendre le risque, du fait des
départs à la retraite, de faire reposer la sécurité
des Français sur des emplois-jeunes inexpérimentés, peu
formés et recrutés dans des conditions telles que la
qualité de leur action n'est pas assurée.
Le gouvernement a procédé à 492 recrutements
anticipés en 1998 et à 1664 en 1999. Pour l'année 2000, le
ministre de l'intérieur a annoncé à votre commission, lors
de son audition du 16 novembre, qu'il venait d'obtenir l'accord du Premier
ministre pour un nouveau recrutement en surnombre de 941 agents qu'il
espérait pouvoir recruter dans les premiers mois de
l'année 2000.
Le budget 2000 essaie par ailleurs, dans le cadre des mesures
catégorielles nouvelles, de limiter les départs à la
retraite anticipée en améliorant les fins de carrière des
agents.
3. Les mesures catégorielles
Le
budget prévoit des
mesures catégorielles
nouvelles, pour
un montant de
96,7 millions de francs
. Il convient de noter que cette
enveloppe est d'un montant supérieur à l'accroissement des
dépenses résultant de la mise en oeuvre de l'accord salarial de
février 1998 dont l'incidence se limite à 43,8 millions de
francs.
Plusieurs mesures
améliorent la fin de carrière
des agents
afin d'éviter qu'ils sollicitent un départ à la retraite
anticipée et de
diminuer ainsi le rythme des départs à
la retraite
:
- attribution à 600 fonctionnaires supplémentaires de
l'échelon exceptionnel de gardien de la paix (3,1 MF). Ces
échelons seront acquis automatiquement à 52 ans ;
- transformation de 300 emplois de gardiens de la paix en 150 emplois
de brigadiers et 150 emplois de brigadiers majors (15,8 MF) ;
- transformation de 40 emplois de commandants en emplois de
commandants fonctionnels (1,6 MF).
Par ailleurs une expérimentation va être conduite dans deux
arrondissements parisiens et deux départements pour
indemniser les
heures supplémentaires
des agents du corps de maîtrise et
d'application sur la base de 55 F l'heure plutôt que d'en
prévoir la récupération sous forme de repos compensateurs.
Cette forme de récupération grève en effet
considérablement la capacité opérationnelle sur le
terrain, les agents capitalisant les heures en fin de carrière,
bénéficiant ainsi d'une retraite avancée sans pouvoir
être remplacés.
Les principales autres mesures concernent :
- l'extension et la revalorisation de la
prime de
fidélisation
destinée aux gradés et gardiens
(45,4 MF). Cette prime sera versée aux personnels exerçant
en zone difficile à partir de la deuxième année
révolue de présence au lieu de la cinquième année
et son montant sera aligné sur celui de la prime versée aux
officiers (5 280 F par an) ;
- extension du versement de l'indemnité pour charges d'habitation
à l'ensemble des fonctionnaires du corps de maîtrise et
d'application affectés dans le secrétariat général
pour l'administration de la police (SGAP) de Paris (22,7 MF) ;
- extension en année pleine de la revalorisation de la
prime de
commandement
intervenue en 1999 (9 MF) et inscription d'une provision
de 14 millions de francs destinée au corps des officiers. A cet
égard, votre rapporteur tient à souligner le
malaise profond
qui semble actuellement régner dans le corps des officiers
. Ces
derniers sont appelés à exercer et exercent déjà
des responsabilités de plus en plus lourdes du fait du repyramidage des
corps. Plusieurs circonscriptions de sécurité publique ont ainsi
actuellement à leur tête un commandant. Ce corps, qui a du mal
à trouver sa place entre les commissaires et les gradés et
gardiens, estime avoir été lésé à plusieurs
titres à travers la réforme des corps et carrières,
notamment du fait de l'institution en février 1998 de la prime
unifiée de commandement. Ses représentants syndicaux souhaitent
que la dotation de 14 MF vienne entièrement abonder cette
prime ;
- extension de la
prime de qualification, dite " OPJ 16 "
à 1000 agents supplémentaires du corps de maîtrise
et d'application qui se verraient attribuer la qualification d'officier de
police judiciaire en application de la loi n° 98-1035 du
18 novembre 1998 (40 000 F uniquement car la mesure
n'interviendrait qu'à la fin de l'année 2000). On rappellera que
cette prime est d'un montant de 220 F mensuel, sachant cependant que le gain
réel n'est que de 80 F, les agents concernés perdant le
bénéfice de la prime d'agent de police judiciaire, dite
" APJ 20 ". A cet égard, votre rapporteur
considère qu'un montant
supplémentaire mensuel de 80 F de
prime présente
une incitation dérisoire
au regard
des importantes responsabilités découlant de l'attribution de la
qualification d'officier de police judiciaire
;
- revalorisation de l'allocation de la médaille d'honneur de la
police nationale (1,9 MF) ;
- revalorisation du régime indemnitaire des fonctionnaires
administratifs de catégorie C (4,4 MF).
B. LE FONCTIONNEMENT ET L'ÉQUIPEMENT
Un accent est nécessairement mis sur la formation. Les programmes informatiques et de transmission bénéficient de dotations qui permettent leur poursuite dans de bonnes conditions. En revanche, la situation des équipements, des services et des investissements immobiliers demeure très préoccupante.
1. Un accent mis nécessairement sur la formation
La
formation des personnels
est annoncée à juste titre comme
un objectif prioritaire. Une
direction de la formation
a
été créée par le décret n° 99-57
du 29 janvier 1999 au sein de la direction générale de la police
nationale. Des assises nationales de la formation se sont tenues à la
Villette et le Conseil national de la formation a approuvé, le 14 juin
1999, un schéma directeur de la formation pour les années
1999-2002.
Les priorités retenues sont l'adaptation à la police de
proximité ainsi que la formation aux technologies nouvelles, la
sensibilisation aux questions internationales et l'intégration de la
déontologie.
Les contraintes en matière de formation initiale, principalement dans le
corps de maîtrise et d'application, sont considérables, compte
tenu des recrutements massifs intervenant du fait des départs à
la retraite, du repyramidage des corps et des recrutements anticipés.
Près de 25 000 agents devront être formés dans les
cinq prochaines années.
Au 1
er
janvier 2000, seront intégrés dans les
écoles 6131 agents pour le seul corps de maîtrise et
d'application, soit un nombre
trois fois plus important qu'en 1995
.
La capacité des écoles a dû être augmentée.
L'école d'Oissel a été portée à 1150 places,
celle de Nîmes aura 483 places supplémentaires en 2000. Deux
écoles supplémentaires seront ouvertes en 1999, Aix-Les-Milles
(250 places) et Sainte-Foy-Lès-Lyon (100 places), et l'école de
Montbéliard (200 places) devrait être ouverte en 2000.
Il convient également de former les adjoints de sécurité
et leur tuteurs. La durée de formation des adjoints de
sécurité a été allongée de deux semaines.
Elle est maintenant fixée à dix semaines d'apprentissage
théorique complétées par deux semaines de stage.
La
formation continue
ne doit pas pour autant être
négligée si l'on veut permettre l'adaptation dans de bonnes
conditions des agents à la police de proximité.
Il convient en particulier d'assurer la formation des
agents du corps de
maîtrise et d'application
à la
fonction d'officier de
police judiciaire
en application de la loi du 18 novembre 1998. Un
arrêté du 11 juin 1999 a fixé les modalités de
l'examen technique d'aptitude. 8 000 fonctionnaires seraient
concernés à terme. Un premier cycle de formation avait
été organisé en 1998 à l'intention de 950
ex-enquêteurs ou gradés et gardiens titulaires d'un diplôme
d'étude universitaire générale. Le premier examen s'est
déroulé en juin 1999. Un nouveau cycle de formation a
été mis en place en septembre 1999, à l'intention de 1240
agents, consistant en une formation d'une soixantaine de jours sur un an,
assortie d'un contrôle continu donnant accès à l'examen.
Compte tenu des responsabilités importantes exercées par les
officiers de police judiciaire, votre commission attache une importance
particulière à la formation des personnels du corps de
maîtrise et d'application susceptibles de recevoir cette
qualification.
Considérant par ailleurs que
40% des places offertes aux concours de
gardiens de la paix seront réservées aux adjoints de
sécurité
en application d'un décret du 19 octobre
1999, alors que le niveau d'études des premiers est très
inférieur à celui des seconds (40% des adjoints de
sécurité ont un niveau inférieur ou égal au BEP-CAP
et 45% le niveau Bac alors que 80% des gardiens de la paix ont le niveau Bac),
votre commission souligne la nécessité de prévoir des
cycles de formation des adjoints de sécurité permettant d'assurer
la qualité de ce recrutement spécifique de gardien de la
paix
.
2. La poursuite des programmes d'informatique et de transmissions
a) Les programmes informatiques
Les
crédits de
fonctionnement informatique
s'élèvent
à 231,87 millions de francs. La baisse de 11% de ces crédits
ne devrait pas remettre en cause la poursuite des grands programmes
informatiques s'inscrivant dans le cadre du schéma directeur 1999-2003.
Trois grands projets sont actuellement en cours de développement.
•
Le système de traitement des infractions constatées
(STIC),
précédemment dénommé système de
traitement de l'information criminelle, est un chantier essentiel qui,
prévu dans la loi d'orientation de 1995,
n'a pourtant à
l'heure actuelle toujours pas d'existence réglementaire
. Il regroupe
l'intégralité des fichiers judiciaires de la police nationale. Il
est scindé en deux sous-systèmes : d'une part le logiciel de
rédaction de procédures (LRP) et, d'autre part, une base de
données nationale permettant la saisie et la recherche d'informations.
La base nationale reprend les signalements introduits dans le système
d'information Schengen ainsi que les images du système CANONGE.
Par une délibération en date du 24 novembre 1998, la Commission
nationale de l'informatique et des libertés a donné un avis
favorable au fichier sous réserve de certaines adaptations.
Elle a en premier lieu souhaité que la dénomination du
système soit modifiée. Mais elle a principalement
préconisé que soient fixées des durées de
conservation des données
nominatives enregistrées, variant
entre cinq et quarante ans en fonction de la nature de l'infraction et de
l'âge de son auteur. Elle a demandé que le fichier ne puisse pas
être consulté à des fins
d'enquêtes
administratives
sauf dans le cas où la sécurité des
personnes est en jeu et elle a préconisé qu'il soit gardé
trace des consultations effectuées de manière à ce que
puisse être effectué un contrôle a posteriori. Elle a
également souhaité que le fichier soit placé sous le
contrôle du procureur de la République et
mis à jour en
fonction des décisions de justice
intervenues. Elle a enfin voulu
que soit garanti, à l'issue d'une procédure judiciaire,
le
droit d'accès direct
des personnes inscrites dans le fichier.
Dans son avis rendu au mois de février 1999, le Conseil d'Etat a
souhaité que soient intégrées au fichier les
décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou
d'acquittement dont auraient bénéficié les personnes
inscrites dans le fichier. Il a par ailleurs demandé qu'il soit
imposé aux policiers de consulter le procureur de la République
avant tout usage administratif du fichier. Ces procédures apparaissent
assez lourdes à mettre en oeuvre, tant pour les policiers gestionnaires
ou utilisateurs du fichier que pour les autorités judiciaires.
Le ministre de l'intérieur s'est engagé à prendre en
compte les observations de la CNIL et du Conseil d'Etat, les adaptations
nécessaires étant en cours.
4,3 MF
seront consacrés à ce système en 2000, sur
un total de 88,4 MF depuis 1992.
•
Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED)
est un important outil d'identification des personnes mises en cause dans le
cadre des procédures judiciaires, commun à la police et à
la gendarmerie nationales. Fin juin 1999, la base centrale contenait plus d'un
million de références. Ce fichier a fait la preuve de son
utilité en permettant d'accroître notablement le nombre d'affaires
résolues, 3067 affaires ayant été élucidées
grâce à sa consultation en 1998. En l'an 2000 seront
équipés les trois derniers sites régionaux
d'identité judiciaire n'ayant pas encore accès au système
(Nancy, Clermont-Ferrand et les Antilles) et devrait débuter
l'équipement des services locaux de police technique.
20 MF
devraient être consacrés à ce programme en
2000, sur un total de 103,8 MF depuis 1996.
•
Le système d'information Schengen (SIS)
résulte
des accords de Schengen. Il vise à la mise en commun de données
policières relatives à des personnes recherchées et
à des véhicules ou objets (armes à feu, documents
d'identité, billets de banque). Il comporte un système central
situé à Strasbourg dont la France assure la gestion pour
l'ensemble de ses partenaires (C.SIS) et, dans chaque pays, une partie
nationale (N.SIS) assurant la consultation de la copie nationale du fichier
Schengen ainsi qu'une unité de support (SIRENE) répondant aux
besoins d'informations complémentaires pour mener une procédure.
Après un début difficile, la base, devenue opérationnelle
en 1995, est désormais alimentée par les dix pays participant
à l'accord et fonctionne de manière satisfaisante. Au 27 juillet
1999, elle comprenait plus de 9 millions de références, la
France, l'Allemagne et l'Italie en ayant chacune intégré plus de
2 millions. En 1998, la France a découvert sur son territoire
11 139 signalements intégrés au SIS par nos
partenaires, tandis que 3 074 signalements français
étaient découverts par eux.
A court terme, le SIS doit subir
d'importantes adaptations
pour assurer
le passage du système à l'an 2 000 et intégrer d'ici
la fin de l'année 2000 les cinq états nordiques. A l'heure
actuelle le système permettrait la connexion de 18 pays. A
l'échéance de 2005, est envisagé le passage à une
nouvelle génération
du système (SIS II).
Mais ces changements techniques sont appelés à se
développer dans des
structures juridiques en évolution
,
puisque depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, le
1
er
mai 1999, les acquis de Schengen ont été
intégrés dans l'Union européenne. Faute d'accord entre
tous les partenaires, la gestion du système SIS continue cependant de
relever du domaine intergouvernemental comme l'avait souhaité votre
commission dans sa résolution adoptée par le Sénat le 28
avril dernier. Les modalités de financement du SIS ou le rôle de
la France pourraient néanmoins être remis en question concernant
le système SIS II.
Pour 2000, le total de la dotation consacrée à ce programme
s'établirait à
18 MF
, ce montant résultant, pour la
part concernant le système central, d'une
quote-part
décidée au niveau européen s'élevant à
20,62 % en 1999
.
• L'année 2000 verra également la poursuite de la mise en
oeuvre du système DIALOG de gestion du personnel et de l'important
programme CHEOPS permettant la refonte des architectures informatiques
utilisées dans le domaine policier.
b) Le programme ACROPOL
Le
programme ACROPOL
, réseau de communications cryptées
numérique destiné à assurer à 100 % la
confidentialité des transmissions de la police, sera poursuivi à
un rythme permettant son achèvement pour l'essentiel en 2007 (une
hypothèse de développement plus rapide aurait permis
l'achèvement du réseau en 2004).
Le réseau couvre à l'heure actuelle huit départements,
à savoir, le Rhône, l'Isère, la Loire, l'Aisne, la Somme,
L'Oise, la Seine-Saint-Denis et les Hauts-de-Seine. Le réseau du
Val-de-Marne devrait être opérationnel à la fin de
l'année et celui de Paris et des deux départements corses, dans
le courant de l'année 2000.
Les prochains déploiements concernent, à partir de 2000, la
grande couronne parisienne, en 2001, la région Nord Pas-de-Calais, puis,
en 2002, la région Provence Alpes Côte d'Azur et le
complément de la région Rhône Alpes. En 2002 devrait ainsi
être équipé un territoire regroupant 80% de la
criminalité. Il apparaîtrait cependant que quatre
départements ne pourraient pas être équipés avant
2008.
La dotation correspondante s'élève en 2000 à
400 MF en
autorisations de programme
et
en crédits
de paiement.
Le ministère des finances s'est engagé à accorder
annuellement une enveloppe identique jusqu'en 2003.
L'interopérabilité du système ACROPOL et du
système de communication RUBIS
mis en place par la gendarmerie
nationale, principe auquel votre commission est très attachée,
devrait être totalement réalisée en 2002.
3. Des retards persistants dans l'équipement matériel et immobilier
La
situation du
parc automobile
léger
reste très
inquiétante. Sur 26 912 véhicules en service au début
de l'année 1999, 13% ont dépassé leur critère de
réforme. Les services évaluent à
266 millions de francs
les besoins théoriques résultant des retards accumulés ces
dernières années.
Les dotations consacrées au renouvellement du parc automobile sont en
effet
des variables d'ajustement
de crédits de fonctionnement
globalisés qui continuent à être fortement mis à
contribution, pour le fonctionnement du plan vigipirate par exemple.
Par ailleurs, L'Union des groupements d'achats publics (UGAP) a remis en cause
en 1998 les marchés de véhicules, ce qui a
généré des retards dans les renouvellements. A cet
égard, votre rapporteur a constaté que les voitures Ford Fiesta
sélectionnées ne permettaient pas en l'état d'installer
les terminaux de télétransmissions (TESA) de manière
satisfaisante pour la sécurité des passagers, ces terminaux
n'étant pas compatibles avec le maintien de l'airbag.
Les services évaluent à 110 MF le besoin annuel permettant
le renouvellement sur plusieurs années de
l'équipement des
services en véhicules lourds
et permettant de rattraper un
retard cumulé évalué à 206 millions de
francs en 1999. Or, les crédits inscrits au projet de loi de finances
pour 2000
ne s'élèvent qu'à 65 millions de
francs en crédits de paiement comme en autorisations de programme et ne
permettront donc pas de rattraper ce retard.
Le retard dans les
équipements immobiliers
est également
patent. Le parc immobilier affecté à la police nationale porte
sur une superficie hors oeuvre de plus de 3 millions de m². Les
services évaluent à 1,3 milliards de francs la dotation
annuelle minimale permettant de poursuivre les opérations
engagées, d'assurer la maintenance du parc existant et d'étudier
le lancement de nouveaux projets. Or, la loi de finances ne prévoit que
593 millions de francs d'autorisations de programme et 571 millions
de francs de crédits de paiement qui devraient être
consacrés à des aménagements rendus nécessaires par
la politique de police de proximité.
Le retard est tel que le Gouvernement en est conduit à souhaiter la
participation des collectivités locales pour l'aménagement des
locaux de police, ce à quoi certaines collectivités se sont
déclarées prêtes moyennant redevance.
Lors de son audition par la commission des Lois, le ministre de
l'intérieur a annoncé qu'une dotation de 500 millions de
francs en autorisations de programme et 250 millions de francs en
crédits de paiement serait ouverte au titre des grands hôtels de
police. Pourraient ainsi être financés en 2000 les travaux de
construction des nouveaux hôtels de police de Bordeaux et de Montpellier
et être lancée la procédure pour celui de Lille.
Concernant le
logement des policiers
, les dotations sont nettement en
baisse. Les crédits permettant la réservation de logements
sociaux sont divisés par deux (50 MF en autorisations de programme
et en crédits de paiement) et seul 1 million de francs est inscrit en
autorisations de programme pour l'acquisition de logements. La politique de
location de logements à taux préférentiel par des
bailleurs privés moyennant la garantie du ministère de
l'intérieur se poursuivra en région parisienne et sera
étendue à la région lyonnaise. Une prise de participation
dans une société d'HLM est intervenue par le biais de la
fondation Jean Moulin.
Votre commission constate donc encore une fois que l'effort en
matière de fonctionnement et d'équipement des services est
insuffisant pour permettre à la police d'accomplir normalement ses
missions.
IV. L'ABANDON DES OBJECTIFS DE LA LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION
La loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995 entrait en 1999 dans sa dernière année d'exécution. Force est de constater que la plupart de ses objectifs quantitatifs n'ont pas été remplis.
A. AU PLAN BUDGÉTAIRE
Sur le
plan des engagements financiers, on constate un
abandon total
des
objectifs fixés par la loi d'orientation et de programmation.
La loi d'orientation prévoyait de consacrer sur cinq ans 16 milliards de
francs pour
l'équipement de la police
, se répartissant
également entre l'équipement lourd et l'équipement
léger, ce qui aurait correspondu à 7 milliards de mesures
nouvelles sur cinq ans. Or, les dépenses de fonctionnement et
d'équipement léger ont enregistré un recul global pendant
que les dépenses en capital n'atteignaient pas la moitié des 8
milliards prévus.
Concernant les
investissements immobiliers
, il était prévu
de livrer ou de réhabiliter 608 000 mètres carrés de
surface de locaux de police. Moins de la moitié de l'objectif aura
été réalisé, même en tenant compte des
acquisitions réalisées auprès du ministère de la
défense.
Le nombre de
logements
prévus (4 000 en cinq ans) a
cependant pu être mis à la disposition des policiers, non pas
grâce à l'acquisition de logements, mais par le biais de
réservations de logements sociaux et de la conclusion de baux à
tarif préférentiel avec des propriétaires privés
moyennant la garantie de paiement du loyer.
La loi prévoyait le recrutement de 5 000
agents
administratifs
et techniques
qui permettraient aux policiers de se
concentrer sur les tâches de sécurité. Au total,
après des créations de postes les premières années,
n'ont été créés que
1003 emplois administratifs
et techniques, dont 424 postes proprement administratifs.
B. AU PLAN RÉGLEMENTAIRE
La plus
grande partie des mesures réglementaires concernant le statut des
personnels et l'organisation de la police sont intervenues et sont en cours
d'application.
Plus de 300 dispositions
ont été prises
à cet effet.
En revanche, certaines mesures relatives à "
la
prévention de l'insécurité
" ont tardé
à recevoir application, principalement pour des questions de financement.
Devrait pouvoir intervenir le décret prévu à l'article 11
sur les
études de sécurité préalables
à certains projets d'aménagement et équipements de
construction.
Ne sont toujours pas intervenus et ne semblent pas en voie de l'être :
- le décret prévu à l'article 12 concernant le
gardiennage des locaux d'habitation
;
- le décret prévu à l'article 14 relatif à
l'implantation sur le réseau routier et autoroutier de dispositifs
techniques
devant faciliter le contrôle du respect du code la route
;
- le décret prévu à l'article 15 sur le
marquage
électronique des véhicules
.
*
* *
Ces observations ont conduit la commission des Lois à s'en remettre à l'appréciation de sagesse déjà émise par la commission des finances pour la section police-sécurité du projet de loi de Finances pour 2000.
1
La sécurité en
Corse : un
devoir pour la République.- Rapport n° 69 (1999-2000)
2
De la non régularisation au non éloignement, un
risque majeur pour l'intégration et la cohésion sociale :
les " clandestins officiels ".- Rapport n° 470 (1997-1998).
3
Mission coordonnée par M. Jean-Claude Karsenty,
inspecteur général de l'administration, associant les
ministères de l'intérieur, de la défense, de la justice,
de l'éducation nationale et de la solidarité.