B. LES RISQUES ACCRUS DE PROLIFÉRATION NUCLÉAIRE ET BALISTIQUE
Le regain d'activité sur les programmes nucléaires constaté dans certains pays et la multiplication des expérimentations balistiques augmentent les facteurs de risque en Asie et au Moyen-Orient.
1. L'Asie, théâtre d'une nouvelle course aux armements ?
En
matière de prolifération nucléaire ou balistique, les
signes inquiétants provenant du continent asiatique se sont
multipliés au cours des derniers mois.
Après les essais nucléaires du mois de mai 1998, qui ont
confirmé ses capacités de production de matières
nucléaires et de réalisation d'armes et au cours desquels au
moins deux engins d'énergie significative ont été
testés, l'
Inde
semble déterminée à
développer un arsenal complet dont la finalité principale est la
dissuasion vis-à-vis de la Chine. Elle poursuit la réalisation
d'un ambitieux programme de mise au point de missiles balistiques avec le
Prithvi et surtout l'Agni, missile stratégique à propulsion
solide capable d'emporter une charge de l'ordre d'une tonne sur une distance de
2500 kilomètres. C'est la dernière version de ce missile, l'Agni
-2, qui a été testée en vol le 11 avril dernier.
Le
Pakistan
, qui a lui aussi fait la démonstration de sa
capacité nucléaire militaire en procédant en mai 1998
à des expérimentations souterraines, entreprend la
réalisation de têtes pour missiles et a testé au mois
d'avril, peu après le tir indien, un missile balistique Ghauri, mis au
point avec l'aide de la Corée du Nord, d'une portée
théorique de 1500 kilomètres pour une charge utile de 700 kg,
ainsi qu'un missile à carburant solide Shaheen, inspiré
semble-t-il d'une technologie chinoise, d'une portée théorique de
750 km pour une charge utile d'une tonne.
Le gel des activités nucléaires militaires nord-coréennes,
prévu par l'accord cadre signé avec les Etats-Unis en 1994
demeure toujours sujet à interrogations, l'Agence internationale de
l'énergie atomique n'étant pas en mesure de vérifier les
déclarations des autorités de Pyongyang et d'acccéder aux
combustibles stockés pour juger de l'état du programme
d'accès au plutonium. En revanche, la
Corée du Nord
est
incontestablement devenue en quelques années l'un des acteurs majeurs de
la prolifération balistique dans le monde, particulièrement en
direction du Moyen-Orient. La Corée du Nord développerait
actuellement deux types de missiles balistiques Taepo-Dong dont la
portée pourrait être respectivement de 2000 et 3500 km, un essai
ayant été effectué pendant l'été 1998. Il
faut par ailleurs rappeler que la Corée du Nord n'a pas
adhéré à la convention d'interdiction des armes chimiques
et dispose de sites de production d'agents chimiques et de munitions chimiques.
Ces évolutions se produisent en Asie alors que parallèlement,
la Chine constitue la seule puissance nucléaire reconnue à ne
pas réduire son arsenal nucléaire
mais au contraire à
le développer, quantitativement et surtout qualitativement. La Chine
détiendrait aujourd'hui environ 300 têtes stratégiques
auxquelles s'ajouteraient 150 têtes tactiques non
déployées, ces chiffres étant toutefois contestés
par certain experts qui évoquent des quantités beaucoup plus
importantes. Presque exclusivement basé au sol, cet arsenal repose
notamment sur des missiles stratégiques de type Dongfong d'une
portée de 10.000 km.
Ce contexte relance l'actualité des
système de défense
anti missiles de théâtre
(Theater missile defense - TMD)
que les Etats-Unis pourraient proposer de livrer au Japon ou à
Taïwan, le développement de tels systèmes pouvant
lui-même apparaître comme une incitation à améliorer
les capacités balistiques existantes et à encourager la course
aux armements.
2. La prolifération balistique au Moyen-Orient et autour du bassin méditerranéen
Alors
qu'une nouvelle crise s'est déclarée au sujet du contrôle
du désarmement irakien, les signes de prolifération balistique au
Moyen-Orient et autour du bassin méditerranéen demeurent
visibles. Les transferts de technologie touchant aux missiles balistiques et
aux armes de destruction massive en provenance de Corée du Nord ont
notamment bénéficié à l'Iran, à la Syrie et
à la Libye.
L'Iran a ainsi testé en juillet 1998 un missile Shahab- 3 fruit d'une
coopération avec Pyongyang.
Cette situation illustre l'insuffisance du régime actuel de
contrôle de la technologie des missiles, le code de bonne conduite ne
liant que 24 Etats.