N° 81
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996
Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME VII
TRAVAIL, EMPLOI ET FORMATION PROFESSIONNELLE
Par MM. Louis SOUVET et Jean MADELAIN.
Sénateurs.
(1) C ette commission est composée de MM. Jean-Pierre Fourcade, président ; Jacques Bimbenet, Claude Huriet, Charles Metzinger, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Michelle Demessine, M. Charles Descours. Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM Jacques Machet, secrétaires ; José Balarello, Henri Belcour, Jacques Bialski, Paul Blanc, Mme Annick Bocandé, MM. Eric Boyer, Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Georges Dessaigne, Mme Joëlle Dusseau, MM. Guy Fischer, Alfred Foy, Serge Franchis, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM. Alain Gournac, Roland Huguet, André Jourdain, Pierre Lagourgue, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain, Simon Loueckhote, Jean Madelain. Michel Manet, René Marques, Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Louis Philibert, André Pourny, Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, André Vézinhet, Jean-Pierre Vial.
Voir les numéros :
Assemblée nationale (10ème législ.) : 2222. 2270 à 2275 et TA 413 Sénat : 76 et 77 (annexe n°41) (1995-1996)
Lois de finances.
Cet avis est présenté par deux rapporteurs :
- M. Louis Souvet, pour l'emploi et les relations du travail ;
- M. Jean Madelain, pour la formation professionnelle.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Réunie le mercredi 29 novembre 1995, sous la présidence de M. Jacques Bimbenet, vice-président, la commission a d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Louis Souvet, rapporteur pour avis des crédits en faveur du travail et de l'emploi inscrits dans le projet de loi de finances pour 1996.
En préliminaire, Mme Marie-Madeleine Dieulangard a regretté le manque de disponibilité de M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, pour venir présenter son budget devant la commission des affaires sociales.
Après avoir souligné que le projet de budget consacré au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle s'inscrivait directement dans les priorités gouvernementales, M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, a présenté les crédits du ministère : 99,51 milliards, en augmentation de 5,7 % par rapport aux crédits ouverts en 1995. S'y ajoutent 38,8 milliards inscrits au budget des charges communes, en augmentation de 9,6 % par rapport à 1995 soit au total 138,2 milliards (+ 6,7 %).
Le rapporteur pour avis a ensuite souligné que l'augmentation substantielle des crédits correspondait essentiellement à la création du contrat initiative-emploi et à la montée en puissance du dispositif d'exonération des charges sociales sur les bas salaires, adopté au mois de juillet.
Il a précisé que le budget 1996 s'inscrivait dans une évolution du marché du travail plus favorable que l'année dernière, avec une diminution de 152.800 demandeurs d'emplois et un taux de chômage de 11,5 % en septembre. Cette amélioration correspond aux 240.000 créations d'emplois attendues en 1995. Le rapporteur pour avis a cependant tempéré son propos en rappelant que le chômage avait repris sa hausse en août et en septembre. Il a également précisé que le budget avait été bâti sur des prévisions de croissance du produit intérieur brut en 1996 de 2,8 %, devant permettre la création de 300.000 emplois.
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis , a ensuite détaillé les mesures bénéficiaires de l'effort budgétaire et visant à favoriser l'insertion dans le secteur marchand : le contrat initiative-emploi auquel 11,63 milliards sont consacrés et qui rencontre un indéniable succès avec plus de 130.000 contrats signés à ce jour et la ristourne dégressive sur les cotisations patronales sur les bas salaires pour laquelle 36,5 milliards sont inscrits au budget des charges communes. Il a, à cette occasion, présenté l'article 69 de la loi de finances, visant, à titre expérimental, à fusionner l'exonération des cotisations d'allocations familiales et la ristourne dégressive en une ristourne unique dégressive, applicable en-dessous du plafond de 1,34 SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance).
Il a précisé qu'il proposerait sur cet article un amendement tendant à simplifier le dispositif lorsqu'il concernerait les emplois à temps partiel.
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, a rappelé qu'au titre de l'allégement du coût de travail dans le secteur marchand avait également été institué un complément d'accès à l'emploi (CAE), s'ajoutant à l'aide au premier emploi des jeunes (APEJ). Il a constaté que ces dispositifs, auxquels d'ailleurs le Gouvernement ne consacrait pas de crédits supplémentaires par rapport à 1995, ne rencontraient pas le succès escompté en raison sans doute de la forte attractivité du contrat initiative-emploi. Il a conclu la présentation des priorités gouvernementales en soulignant que 53 milliards de francs étaient consacrés à l'allégement de charges sociales.
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, a ensuite exposé les actions auxquelles s'appliquait la rigueur caractérisant l'ensemble du budget ; trois raisons justifient, selon le Gouvernement, les baisses de crédits ou leur maintien au niveau actuel.
La première est que l'accent mis sur l'insertion dans le secteur marchand permet de réduire les dotations consacrées aux actions d'insertion dans les secteurs publics et non marchands. Cela concerne, notamment, les contrats emploi-solidarité, ramenés de 680.000 en 1995 à 500.000. A la diminution de leur nombre, s'ajoutent la réduction des taux de prise en charge et la suppression du fonds de compensation. En revanche, le nombre des emplois consolidés reste fixé à 20.000 ; 12 milliards sont consacrés à ces deux dispositifs. Des réductions du même ordre concernent des stages d'insertion et d'accès à l'entreprise (SIFE et SAE).
La reprise économique, qui conduit à une sous-utilisation des crédits, constitue la deuxième raison de leur réduction, par ajustement aux besoins constatés. Cela concerne notamment le chômage partiel, le temps réduit indemnisé de longue durée, la dotation de restructuration et les conventions de conversion. Les entrées en préretraite financées par les allocations spéciales du fonds national de l'emploi (ASFNE) diminuent également de 40.000 à 25.000 au profit des préretraites progressives qui augmentent de 23.000 à 28.000. Les actions expérimentales de réduction du temps de travail et le fonds partenarial sont également touchés par les restrictions budgétaires. Les crédits consacrés aux relations du travail stagnent ; mais on y constate des évolutions très contrastées : si les crédits consacrés à l'aide à la négociation et à la formation des conseillers prud'hommes augmentent, en revanche les crédits consacrés à l'hygiène et à la sécurité diminuent dans de très fortes proportions.
Enfin, la recherche d'une plus grande efficacité dans l'utilisation des crédits justifie leur baisse dans les domaines de la formation professionnelle et des aides à la création d'emplois, notamment l'aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprises (ACCRE), ou leur faible augmentation dans le cas du service public de l'emploi : cela concerne essentiellement l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA). Le réaménagement des modalités de versement de l'aide de l'État à l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC), dans le cadre d'un accord signé le 5 octobre dernier, participe de cette volonté de rigueur budgétaire.
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, a ensuite rappelé les grandes évolutions de la politique de l'emploi depuis quelques années, montrant dans quelles mesures les lois du 27 juillet et du 20 décembre 1993, prolongées par les lois du 4 août 1995 et par le présent projet de loi de budget, prenaient acte de ces évolutions.
L'État fait désormais porter ses efforts sur l'abaissement du coût du travail et délègue partiellement les autres instruments de la politique de l'emploi : aux régions, la formation, aux entreprises et aux partenaires sociaux, l'organisation d'une plus grande flexibilité du droit du travail. Cela se traduit par la multiplication d'accords novateurs concernant notamment l'utilisation des fonds de l'assurance chômage, l'aménagement du temps de travail, les conditions de négociation au sein de l'entreprise en cas d'absence de délégués syndicaux ou encore la signature de chartes pour le développement de l'emploi. Le législateur conserve un rôle d'impulsion, de contrôle et de sauvegarde de l'intérêt général.
Cette nouvelle orientation se traduit par une modification de la structure budgétaire, la plupart des grandes actions (formation professionnelle, travail-emploi, indemnisation du chômage et lutte contre l'exclusion) diminuant au profit de la seule insertion dans le secteur marchand.
Aux yeux du rapporteur pour avis, il y a là une évolution qui mérite d'être largement approuvée en ce qu'elle offre de nouvelles perspectives prometteuses à la politique de l'emploi.
Il a cependant assorti sa proposition d'avis favorable à l'adoption des crédits de quelques observations concernant les difficultés occasionnées aux établissements et aux associations employeurs de contrats emploi-solidarité (CES) par la réduction brutale de leur nombre, la baisse des aides aux conseils en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) et des petites et moyennes industries (PMI) ainsi que de l'ACCRE, et s'est inquiété des importantes réductions de crédits consacrés à la prévention des risques professionnels alors que l'on constate une reprise de la hausse des accidents du travail à partir du deuxième semestre 1994.
M. Jacques Machet s'est à son tour inquiété de la diminution des crédits consacrés aux contrats emploi-solidarité, considérant que le contrat initiative-emploi ne s'adressait pas totalement au même public.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard a indiqué ne pas déceler de modifications notables de la politique de l'emploi par rapport aux années précédentes. Elle a critiqué l'instauration d'allégements de charges sociales sans contrepartie et a regretté que l'effort consenti en faveur de ces allégements se fasse au détriment d'autres actions et notamment du versement de la subvention d'équilibre à l'UNEDIC ou de la dotation de l'ACCRE.
Elle s'est inquiétée de l'absence de mesures vraiment efficaces en faveur des jeunes, l'apprentissage ne pouvant s'adresser qu'à une partie d'entre eux ; elle a, en outre, craint l'émergence d'inégalités entre les régions en matière de formation des jeunes.
Elle a également souhaité savoir à combien s'élevaient les exonérations de charges non compensées par le budget de l'État, quel était le nombre de créations d'emploi induites par les allégements et quel serait le contenu des projets de loi sur le chèque emploi-service et sur le contrat d'initiative locale.
M. Jean Madelain, tout en admettant la nécessité de réduire le nombre de CES, s'est inquiété de la brutalité des restrictions, et a souhaité que des mesures de transition soient prévues.
M. Jean Chérioux s'est interrogé sur l'instauration de nouvelles aides au développement du temps partiel.
M. André Vézinhet, après avoir constaté que le projet de budget n'apportait pas de changements importants à la politique de l'emploi, a souhaité savoir ce que l'on entendait par dépenses « passives » d'indemnisation. Il a également rappelé la place importante tenue par les CES dans les établissements scolaires où ils occupent de véritables emplois.
M. Roland Huguet a indiqué que, dans le département du Pas-de-Calais, on ne décelait pas d'amélioration du marché du travail.
Il a reconnu que des limites devaient être posées au développement des CES mais qu'elles ne seraient pas faciles à faire admettre, d'autant que, pendant longtemps, les collectivités et les employeurs avaient été incités à en embaucher.
Il a également évoqué le projet intitulé « profession sport » qui permettrait dans son département de créer 50 emplois et a souhaité savoir si le ministère du travail pouvait lui apporter un appui.
En réponse, M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, a rappelé les raisons de la création, en 1989, des CES ; ceux-ci n'avaient pas pour vocation de pourvoir des emplois durables, mais constituaient un moyen de réinsérer les bénéficiaires dans la vie active. Lui-même avait, à Montbéliard, organisé un système de formation à leur intention. Il a également indiqué qu'à plusieurs reprises les CES avaient été dé contingentés sans que soit, sur le moment, prévu leur financement.
Il a précisé que l'allégement des charges non compensées s'élevait à 13,2 milliards de francs. A propos des créations d'emplois, incontestables depuis deux ans, il a reconnu que l'amélioration constatée sur un an n'était pas consolidée puisque le chômage avait repris sa hausse en août et septembre. La recherche de nouvelles voies pour la politique de l'emploi était donc toujours aussi nécessaire.
Il a indiqué que le projet de loi sur le chèque emploi-service serait examiné par la commission au mois de janvier et qu'on ne disposait pas d'informations précises sur le contrat d'insertion locale, dont l'initiative revenait au ministre délégué à la ville et à l'intégration.
A propos de l'ACCRE, le rapporteur pour avis a rappelé que la récente réforme avait pour but de lui conférer une plus grande efficacité. Les avis restent cependant partagés sur certaines de ses modalités et on ne peut exclure de nouvelles modifications.
A propos du temps partiel, qui bénéficie déjà d'avantages en matière de charges sociales, le rapporteur pour avis a précisé que les partenaires sociaux l'avaient inclus dans le programme de négociation sur l'aménagement du temps de travail.
Après un échange entre M. Jacques Machet, Mme Joëlle Dusseau et M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, à propos du respect par les entreprises de l'obligation d'emploi des handicapés, M. Pierre Lagourgue a souhaité connaître la date de parution du décret sur le dispositif emploi dans les départements d'outre-mer.
Puis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au travail et à l'emploi dans le projet de budget pour 1996. Elle a également adopté, après un débat au cours duquel sont intervenus MM. Jacques Bimbenet, président, Jean Madelain, Jean Chérioux et Mme Joëlle Dusseau, un amendement proposé par M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, à l'article 69 du projet de loi de finances tendant à modifier, pour le temps partiel, les modalités de calcul de la ristourne unique dégressive.
**La commission a ensuite entendu le rapport pour avis de M. Jean Madelain, sur les crédits de la formation professionnelle dans le projet de budget pour 1996.
M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que son appréciation de la politique menée en matière de formation professionnelle serait plus nuancée qu'en matière de politique de l'emploi, dans la mesure où la formation professionnelle se trouvait dans une phase transitoire. Plusieurs réformes ont, en effet, été engagées mais n'ont pas encore été conduites à leur terme, notamment parce qu'elles ne dépendent pas uniquement des pouvoirs publics et que des divergences de vue sont apparues entre les autres acteurs, essentiellement les acteurs privés.
Le rapporteur pour avis a rappelé que la formation professionnelle, depuis la loi quinquennale du 20 décembre 1993, s'inscrivait dans la logique de délégation déjà observée en matière d'emploi. C'est ainsi qu'il est davantage fait appel aux régions et aux entreprises pour la formation professionnelle des jeunes.
M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a ensuite détaillé les modalités de transfert aux régions des formations qualifiantes des jeunes et, dans un cadre conventionnel, des formations préqualifiantes. Il a indiqué que sept régions avaient déjà conclu une convention et que onze autres s'apprêtaient à le faire en 1996.
Il a alors dressé un rapide bilan du nouveau dispositif d'accueil et de formation des jeunes de 16 à 25 ans, placé sous la double responsabilité de l'État et des Régions.
Il a indiqué qu'en 1994, pour une dépense totale de 15,8 milliards de francs, 950.000 jeunes avaient fréquenté des structures d'accueil, d'information et d'orientation et 708.000 avaient bénéficié d'une formation.
Il a ensuite recensé les principales structures intervenant à l'échelon régional dans le domaine de la formation professionnelle et a formulé trois observations.
Il a tout d'abord regretté le peu de succès des mesures prises en faveur des jeunes, l'APEJ et le CAE victimes du contrat initiative-emploi (CIE), qui rend d'autant plus difficile leur insertion sur le marché du travail.
Il a ensuite dressé un bilan des contrats de formation en alternance, observant cependant que le succès du contrat d'apprentissage pouvait être lié, pour partie, au caractère plus attractif des incitations qui lui avaient été attachées ; cela l'a conduit à regretter l'absence d'un véritable débat sur l'opportunité de privilégier un type de contrat plutôt qu'un autre. En conséquence, il a souligné l'urgence de la réforme des formations en alternance, faute de quoi les problèmes continueraient à s'accumuler et ne permettraient pas aux jeunes, exclus encore en trop grand nombre du marché du travail, de profiter de la reprise de la croissance.
Sa troisième observation a concerné le financement de l'apprentissage dont les mécanismes aboutissent à réduire les ressources à proportion de l'augmentation du nombre de contrats. Là encore, il a souligné l'urgence d'une réforme de ses modes de financement, trop complexes et insuffisants, et s'est félicité de l'annonce de l'examen, dans les semaines qui viennent, du projet de loi sur l'apprentissage par le conseil des ministres.
Il a également rappelé la mission confiée au comité d'évaluation des politiques régionales d'apprentissage et de formation professionnelle initiale et continue qui devrait permettre de mieux connaître les conditions dans lesquelles s'effectue le transfert de compétences au profit des régions.
M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a ensuite exposé les conditions dans lesquelles avait été réalisée la remise en ordre du système de collecte des contributions des entreprises à la formation professionnelle. Selon lui, cette réforme, impulsée par la loi quinquennale du 23 décembre 1993, est d'autant plus nécessaire que l'on confie davantage de responsabilités en matière de formation aux partenaires sociaux et aux entreprises.
Il a ainsi indiqué que, de 255 organismes collecteurs, le système de collecte avait été ramené, après négociation des partenaires sociaux, à 96.
Par ailleurs, la loi du 4 août 1995 est venue régler la question des « collectes captives » afin de permettre aux organismes régionaux interprofessionnels de recevoir une partie des fonds collectés.
M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a également fait part d'une modification introduite par l'Assemblée nationale, créant un fonds mutualisé pour les excédents de trésorerie des organismes gérant le congé individuel de formation. Il s'est en outre félicité du renforcement des contrôles de l'État sur l'ensemble du système de la formation professionnelle.
Soulignant qu'au regard des réformes en cours, le budget de la formation professionnelle ne pouvait être qu'un budget d'attente sans orientations propres, M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, en a cité les principaux chiffres.
Avec 32 milliards, la part de la formation professionnelle dans l'ensemble des crédits dont dispose le ministère passe de 20 à 18 %, en raison des orientations générales retenues pour l'ensemble de la politique de l'emploi.
La progression la plus importante (27,6 %) concerne les crédits d'exonération de charges sociales en faveur de l'apprentissage.
Quelques autres actions progressent légèrement : la dotation de décentralisation et la dotation de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) ; toutes les autres diminuent : les crédits du fonds de la formation professionnelle et de la promotion sociale, ceux consacrés à la rémunération des stagiaires et les crédits d'exonération de charges sociales des contrats de qualification.
M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a également fait part de ses réserves concernant l'initiative prise par l'Assemblée nationale de réduire de 30 millions les crédits de l'AFPA, considérant que cet organisme, qui a signé un contrat de progrès en mars 1994, s'était engagé dans un processus de réforme qu'il convenait d'encourager. Il a aussi regretté que l'Assemblée nationale ait taxé les excédents de trésorerie des organismes paritaires agréés pour le congé individuel de formation (OPACIF) au moment même où l'État se désengageait totalement du financement du congé individuel de formation ; selon lui, il aurait été préférable de pousser ces organismes à mener une politique d'adaptation des salariés aux évolutions de leurs emplois.
En conclusion, tout en reconnaissant que les crédits consacrés à la formation professionnelle subissaient les effets de la rigueur budgétaire et de la nécessité de réduire les déficits publics, M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a souhaité que ce soit l'occasion de réfléchir sur les moyens de rationaliser les dispositifs, extrêmement complexes, afin qu'ils gagnent en productivité et en efficacité. Il a d'ailleurs rappelé que l'État n'était pas le seul à financer la formation professionnelle puisque, par exemple en 1993, 131 milliards y avaient été consacrés, dont 61,8 par l'État, 6,6 par les régions, 8,1 par l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC), 49,54 par les entreprises et 1,5 par les ménages.
En conséquence, il a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la formation professionnelle, assorti toutefois de quelques observations sur la nécessité de trouver des solutions au financement de l'apprentissage et de définir rapidement une politique claire de formation en alternance.
M. Jean Chérioux, après avoir souligné la complexité du système de formation professionnelle, a souhaité en connaître les coûts de fonctionnement. Il a également rappelé le rôle essentiel des branches professionnelles dans la définition de la politique de formation.
M. Bernard Seillier a jugé inopportun le prélèvement de 30 millions sur la dotation de l'AFPA et s'est demandé s'il ne convenait pas de le rétablir dans son intégralité.
M. Roland Huguet a regretté que la formation professionnelle subisse les effets de la rigueur et s'est interrogé sur l'opportunité d'organiser en un tout cohérent la formation initiale et la formation continue. Il a, en outre, constaté qu'une part des difficultés actuelles venaient du manque d'emplois réservés aux gens peu qualifiés.
Mme Joëlle Dusseau s'est inquiétée des modalités du transfert de la formation professionnelle qualifiante des jeunes aux régions, craignant que ce transfert de charges ne s'accompagne pas d'un transfert équivalent de ressources.
Elle s'est également demandé si la région était bien l'entité adéquate pour définir la politique de formation professionnelle et a manifesté une grande inquiétude à propos de l'absence de perspectives d'insertion pour les jeunes sans qualification.
Elle a aussi regretté la baisse des crédits concernant les contrats de qualification. Elle a déploré que l'apprentissage dans le cadre des formations supérieures soit utilisé comme un moyen d'engager des personnes qualifiées à un moindre coût.
Elle a enfin manifesté ses réserves sur l'initiative prise par l'Assemblée nationale de réduire la dotation de l'AFPA alors même que l'association s'était engagée dans un processus de réforme en application du contrat de progrès.
M. Jacques Machet a rappelé le rôle pionnier du secteur agricole en matière de formation en alternance.
MM. Roland Huguet et Jacques Bimbenet, président, sont également intervenus à propos du développement de l'apprentissage pour l'obtention de diplômes de niveaux élevés.
En réponse, M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a rappelé que le coût global de la formation professionnelle s'élevait en 1993 à 131 milliards, la décomposition de ces sommes, extrêmement complexe, pouvant être consultée dans le « jaune » formation professionnelle.
Il a reconnu que la branche professionnelle était essentielle dans la définition des qualifications, mais qu'il convenait de maintenir des formations polyvalentes indépendantes des branches.
Il a rappelé que le prélèvement de 30 millions sur les crédits de l'AFPA était à l'origine justifié par le mauvais fonctionnement de cet organisme, dénoncé par le Parlement depuis de nombreuses années. Néanmoins, à la suite de la signature du contrat de progrès, il était indéniable que l'association avait entrepris de se réformer. Le prélèvement de 30 millions pouvait être interprété comme un léger rappel à l'ordre. Il est évident qu'il gênera les responsables de la réforme sans toutefois remettre en cause cette dernière.
M. Bernard Seillier a souhaité que la commission manifeste, sans cependant déposer d'amendement, son regret de voir ainsi amputés les crédits de l'association.
M. Jean Madelain, rapporteur pour avis, a ensuite justifié la baisse des crédits consacrés aux contrats de qualification par le détournement de cette mesure de son objectif initial. Il a, en outre, reconnu que les incitations ne suffisaient pas à attirer les jeunes dans certaines professions, sans doute en raison du faible niveau de rémunération ou de la mauvaise image de la profession, et s'est déclaré favorable à la levée des frontières entre formation initiale et formation continue, ce qui aurait d'ailleurs l'avantage indirect de régler le problème des universités.
A propos du transfert des formations qualifiantes ou préqualifiantes aux régions, il a indiqué que les crédits étaient réévalués comme la dotation générale de décentralisation ou comme l'indiquait la convention signée avec l'État. Il a cependant admis que l'évolution des crédits ne suivrait pas une éventuelle augmentation des effectifs à former. Selon lui, il appartient à la région de choisir les actions qu'elle entend privilégier. Celle-ci constitue d'ailleurs un bon niveau de décision pour définir la politique de formation, car elle est plus proche des besoins que l'État et reste au contact des départements et des communes.
Enfin, il a déclaré partager les inquiétudes de plusieurs commissaires à propos de l'absence de dispositifs efficaces en faveur des jeunes sans qualification, à ceci près cependant que le dispositif d'accueil fonctionnait avec une certaine efficacité.
Puis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la formation professionnelle dans le projet de budget pour 1996.
Mesdames, Messieurs.
Parmi les trois objectifs retenus par le Gouvernement pour le projet de loi de finances 1996, réduire le déficit budgétaire par une remise en cause de la dépense publique, financer les priorités gouvernementales et amorcer la réforme des prélèvements obligatoires, deux concernent directement l'emploi. Cela se traduit, pour la seconde année consécutive, par une forte progression des crédits consacrés au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle qui passent de 129,9 milliards de francs en 1995 à 138,3 milliards en 1996 ; cela représente une augmentation de 21,16 % si l'on compare les seules lois de finances initiales, et de 6,48 % si l'on compare l'ensemble des crédits votés en 1995 (lois de finances initiale et rectificative) à ceux du projet de loi de finances pour 1996. Parallèlement, le budget global de l'État (dette, budgets civils et militaires) n'augmente que de 2,2 %.
Les crédits consacrés au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, représentent 8,9 % du budget total de l'État.
Le contraste entre l'évolution du budget général et des crédits consacrés à ce secteur illustre la priorité consacré à l'emploi, rendue d'autant plus nécessaire que la stabilisation de la croissance à 2,8 % en volume retenue à titre d'hypothèse ne favorisera pas les créations d'emplois spontanés. Seule une action volontariste -essentiellement les exonérations de charges sociales et le contrat initiative-emploi- permettra d'atteindre les 290.000 créations d'emplois dans le secteur marchand non agricole escomptés par le Gouvernement (contre 240.000 en 1995). La réduction des déficits publics, en favorisant la reprise des investissements, devrait également y contribuer.
Par ailleurs, le budget 1996 amorce un processus de réformes fiscales en matière de transmission d'entreprises et de prélèvements obligatoires dont l'objectif est aussi, indirectement, de favoriser l'emploi.
Les objectifs annoncés par le ministre du travail, du dialogue social et de la participation sont triples : obtenir une croissance plus riche en emploi, prévenir et lutter contre l'exclusion, enfin valoriser les ressources humaines. Cela se traduit par la concentration de l'effort budgétaire sur l'aide à l'insertion dans le secteur marchand et par le développement de l'apprentissage.
Corrélativement les autres actions se voient appliquer une rigueur accrue qui devrait les pousser à se réformer et à se rationaliser. En outre, l'amélioration de la conjoncture économique rend moins nécessaires certains dispositifs.
On notera, en effet, que ce budget s'inscrit dans une évolution du marché du travail plus favorable que l'année dernière : malgré les changements et les incertitudes liées à la nouvelle définition des catégories statistiques de demandeurs d'emploi et à la mise en place du nouveau document d'actualisation de la situation des demandeurs d'emploi et en dépit des mauvais chiffres d'août et de septembre, on constate une réduction sensible des demandeurs d'emploi (- 4,8 % sur un an). Depuis le début de l'année, le taux de chômage (BIT) a baissé de 0,5 point pour se situer à 11,5 % en septembre. Quant aux offres d'emploi enregistrées à l'ANPE, elles ont augmenté de 20,3 % en un an.
Les crédits consacrés au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle
Les crédits du ministère s'élèvent à 99.514,79 millions de francs contre 89.113,87 millions de francs en loi de finances initiale pour 1995, ce qui correspond à une augmentation de 11,7 %. Si l'on ajoute à la loi de finances initiale les crédits votés dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1995, au total 94.186,37 millions de francs, l'augmentation est de 5,7 %.
Les 99.514,79 millions de francs se répartissent ainsi :
. moyens des services (titre III) : 8.561,23 millions de francs, interventions publiques (titre IV) : 90.361,84 millions de francs, dépenses en capital (titre V et VI) : 591,72 millions de francs.
Aux crédits du ministère s'ajoutent les crédits inscrits au budget des charges communes. Cette localisation n'a pas de signification particulière ; on notera seulement que le budget des charges communes finance les actions les plus récentes de la politique de l'emploi, notamment les allégements de cotisations sociales et les aides à l'emploi des jeunes ; 38.808.47 millions de francs y sont inscrits contre 25.055 millions de francs en loi de finances initiale pour 1995, soit une augmentation de 54,9 %. Cependant, si l'on prend en compte la loi de finances rectificative de 1995, l'augmentation est de 9,6 %.
Au total, avec 138.323,26 millions de francs, les crédits consacrés au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle progressent de 21,2 % par rapport à la loi de finances initiale 1995, et de 6,5 % par rapport à l'ensemble des crédits votés pour cette politique en 1995.
Le tableau 1 retrace la répartition et l'évolution de ces crédits par grandes familles d'action.
Tableau 1
Crédits consacrés au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle (ministère et charges communes)
1996/1995
1 CES, ECIC handicapés insertion par l'économique
2 CIE, CRE, APEJ, CAF, CERMI exonérations de charges sociales
3. CA, CQ,, DGD, CIE, AFR, réseau d'accueil, formations préqualifiantes des jeunes
4 FNE PRP. ACCRE conventions de conversion relations du travail. DOM, fonds partenariat etc
Les augmentations ont essentiellement pour origine la création du contrat initiative-emploi (350.000 pour 11,6 milliards) et la montée en puissance du dispositif d'exonération de charges sociales (36,5 milliards contre 22,3 milliards en 1995) sur les bas salaires, mesures adoptées par le Parlement le 29 juillet dernier.
Par ailleurs, la comparaison de la structure des crédits 1995 avec celle du projet de budget 1996 (cf. graphiques 1 et 2) met en évidence l'infléchissement de la politique de l'emploi en faveur de l'abaissement à grande échelle du coût du travail, l'aide à l'insertion dans le secteur marchand passant de 27 à 38 %, alors que les principales autres actions diminuent : la formation professionnelle de 20 à 18 %, le travail-emploi de 17 à 15 %, l'indemnisation du chômage de 11 à 7 % et la lutte contre l'exclusion de 16 à 13 %. Il convient cependant de préciser que le contrat initiative-emploi, instrument essentiel de lutte contre l'exclusion des chômeurs de longue durée, figure au chapitre « aides à l'insertion » et non au chapitre « lutte contre l'exclusion ».
Graphiques 1 et 2
Ce choix, qui n'est pas sans risque puisqu'il pourrait hypothéquer l'avenir -notamment en matière de qualifications-, trouve cependant sa justification dans la nécessité de rationaliser et de réorganiser les structures et les dispositifs de la politique de l'emploi. Le rationnement des crédits aura le mérite d'y contraindre.
En conclusion, vos rapporteurs ne peuvent que constater que, comme les années précédentes, les comparaisons d'une année sur l'autre sont rendues difficiles par les réaménagements de la nomenclature budgétaire (adoptés cependant dans un but de simplification et de lisibilité), et les transferts de crédits vers d'autres départements ministériels.
Tableau 2
Évolution du budget TEFP depuis 1991 (hors BCC)
Crédits ouverts LFI + LFR + reports + fonds de concours et après transferts, répartitions et annulations.
1995 : fin septembre 1995
1996 : projet de loi de finances.
Mais surtout, l'expérience montre (cf. tableau 2 et graphique 3) que le budget voté, les crédits ouverts et les crédits consommés ne correspondent généralement pas. Plusieurs raisons l'expliquent ; on citera notamment le provisionnement de mesures étalées sur deux exercices, par exemple pour les contrats d'insertion, toujours sous la menace d'une annulation pour non-consommation, les réticences du Budget à honorer certains engagements de dépenses, les sous-évaluations ou les surévaluations de certaines dotations, le recours à des mesures temporaires reconduites la plupart du temps, mais ne figurant pas en loi de finances initiale, comme les aides forfaitaires pour les contrats d'apprentissage et de qualification qui n'apparaissent que dans les lois de finances rectificatives, ou encore le dé contingentement de certaines mesures en fonction de la courbe de l'emploi.
Se pose en outre, cette année, la question du financement du projet de loi en préparation sur l'exclusion, qui pourrait reprendre en les adaptant des dispositifs traditionnels de la politique de l'emploi, les contrats emploi-solidarité (CES) et les emplois consolidés (ECIC). Leur financement n'est, pour l'instant, pas prévu.
Vos rapporteurs notent cependant une tendance manifeste à la réduction de ces écarts dont ils ne peuvent que se féliciter.
Présentation chiffrée des grandes orientations du budget
• Un effort budgétaire très important
concentré sur une seule mesure : l'aide à l'insertion dans
le secteur marchand
L'augmentation conséquente des crédits consacrés au travail et à l'emploi concerne essentiellement l'allégement du coût du travail de certaines catégories de salariés à travers deux dispositifs :
. le contrat initiative-emploi (CIE) en faveur des chômeurs de longue durée auquel sont consacrés 11,63 milliards (par rapport aux contrats de retour à l'emploi (CRE) qu'ils remplacent -3,27 milliards en 1995-, le CIE nécessite 8,36 milliards de crédits supplémentaires). Plus de 100.000 CIE ont été signés à la mi-novembre, dont 70 % à durée indéterminée ; l'objectif de 350.000 CIE financés par la loi de finances peut donc, à ce rythme, être atteint. 1,2 milliard est prévu pour financer le reliquat de CRE.
Graphique 4
. la ristourne dégressive des cotisations sociales patronales sur les bas salaires : 36,5 milliards sont inscrits au budget des charges communes à ce titre. Afin de simplifier la procédure de calcul de l'allégement de charges sociales, l'exonération de cotisations d'allocations familiales et la ristourne dégressive sont fusionnées (art. 69 du projet de loi de finances).
Il est ainsi prévu la prorogation pendant six mois au niveau actuel des seuils d'exonération de cotisations familiales, puis au 1er juillet 1996 la fusion des deux dispositifs avec un seuil unique de 1,34 SMIC. Cette fusion devrait durer deux ans : elle correspond à un gel de l'exonération de cotisations d'allocations familiales. Le nouveau dispositif est expérimental et ne préjuge pas des décisions qui pourraient être prises quant au financement de la protection sociale.
Au titre de l'allégement du coût du travail, on citera encore l'aide au premier emploi des jeunes (APEJ) et le complément d'accès à l'emploi (CAE) dotés de 1,65 milliard, en progression seulement de 0,3 % par rapport à la loi de finances initiale 1995, ou les contrats d'apprentissage (200.000 au lieu de 160.000) qui bénéficieront de 3,73 milliards d'exonération de charges sociales, en augmentation de 27,6 %. En revanche, les autres contrats en alternance, hors CIE, voient leurs crédits d'exonération diminuer : par exemple, - 8 % pour le contrat de qualification (2,9 milliards) correspondant à 125.000 entrées au lieu de 140.000 en 1995.
Graphique 5
• La plupart des autres actions voient leurs
crédits diminuer Trois raisons justifient les diminutions de
crédits.
1. L'accent mis sur l'insertion dans le secteur marchand permet de réduire les dotations consacrées à des actions d'insertion dans les secteurs publics et non marchands, ou à des stages qui, malgré l'impulsion donnée par la loi quinquennale, restent des stages « parking ». C'est ainsi que :
• le nombre de contrats emploi-solidarité
financés passe de 650.000 en
1995 à 500.000. L'économie, pour les CES, est de 1 milliard (10,84 milliards en
1996 contre 11,82 en 1995). A la diminution de leur nombre s'ajoute la diminution des taux de prise en charge et la suppression du fonds de compensation. Les emplois consolidés à l'issue d'un CES restent à 20.000. Mais leur taux de prise en charge diminue. L'augmentation des crédits constatée qui passent de 650 millions de francs à 1.231 millions de francs résulte du gonflement du stock.
• les stages (SIFE et SAE
(
(
*
)2)
) financés en 1996
diminuent de 40.000(230.000 en 1996) ; la raison en est essentiellement
leur taux d'insertion très relatif : 30%.
2. La reprise économique conduit à une sous-utilisation des crédits affectés à certaines actions. Leur diminution en 1996 correspond donc à un ajustement aux besoins constatés en 1995. Cela concerne notamment :
ï le chômage partiel et le TRILD (- 52 % à 400 millions de francs) ;
ï la dotation de restructuration (- 16 % à 433 millions de francs) ;
ï les conventions de conversion (- 27 % à 887 millions de francs).
En ce qui concerne les ASFNE ( ( * )3) (préretraite à temps plein), malgré l'augmentation des crédits (+ 1,15 milliard) en raison du gonflement du stock, on constate une diminution des entrées financées qui passent de 40.000 à 25.000, au profit des préretraites progressives, moins coûteuses pour l'État et moins préjudiciables à la transmission des savoir-faire au sein des entreprises, qui augmentent de 23.000 à 28.000.
On notera par ailleurs l'accord des partenaires sociaux du 6 septembre, fortement encouragé par l'État, instituant un financement UNEDIC des allocations versées aux préretraités de 57 ans ayant cotisé 160 trimestres, en contrepartie d'embauches ; 100.000 embauches sont attendues pour un coût en 1996 de 4 milliards. Un projet de loi a été déposé pour autoriser l'utilisation des cotisations d'assurance chômage dans ce cadre et pour en fixer les modalités.
Plus généralement tous les chapitres hors préretraites diminuent, y compris ceux concernant les actions expérimentales de réduction de temps de travail (dont les crédits sont supprimés). Quant au fonds partenarial, il diminue de 13,3% (130 millions).
D'autres chapitres restent juste à niveau, tout en accusant de fortes différences selon les articles. C'est le cas des relations du travail qui stagnent (+ 0,9 %) et où l'on constate à côté d'augmentations conséquentes (aide à la négociation : + 100 % à 3 millions, formation des conseillers prud'hommes : + 10,9 % avec 37,5 millions) des baisses très importantes portant notamment sur la médecine du travail : - 19,8 %. la prévention des risques professionnels : - 13,8 % avec 5,5 millions, ou l'application de la directive européenne en matière de sécurité : - 20 % avec 6 millions.
3. De nombreuses actions de l'État nécessitent de gagner en efficacité : leurs crédits sont donc réduits ou n'augmentent que faiblement dans l'attente d'une réorganisation ou pour pousser à davantage de « productivité ». Cela concerne surtout la formation professionnelle, mais aussi le service public de l'emploi et l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise (ACCRE).
Les dépenses consacrées à la formation professionnelle progressent modérément (+ 2,6 %) mais avec des évolutions très contrastées entre les chapitres et à l'intérieur même des chapitres : ainsi le fonds de la formation professionnelle et de la promotion sociale (3,4 milliards) diminue de 5 %, mais dans ce chapitre le réseau d'accueil, la politique contractuelle ou les contrats de plan État-Région voient leurs crédits progresser respectivement de 2,9 %, 12,5 % et 3,3 %. En revanche, le programme national de formation professionnelle diminue de 18,3 %, les actions en faveur des jeunes restants à la charge de l'État de 12,9 %. les actions hors champ de la décentralisation de 42,6 % et les actions de rénovation de l'apprentissage de 53,7 %. Le chapitre formation et insertion professionnelle (10 milliards) diminue de 11 % presque toutes les actions étant touchées : ainsi, le financement du CIF ( ( * )4) est supprimé ; seule l'allocation de formation-reclassement (AFR) (3,68 milliards) voit ses crédits augmenter de 5,4%. La dotation de décentralisation (5,13 milliards) progresse de 4,6 %. ( ( * )5) Le chapitre consacré à la formation professionnelle des adultes (4,1 milliards) augmente de 2 %, mais essentiellement au profit de l'AFPA (+ 2,3 % avec 4,32 milliards), les autres actions diminuant toutes.
La recherche de gains de productivité et le souci de rationaliser expliquent la faible progression, 1,3 % à structure constante, des moyens des services et celle, 3,7 %, de l'ANPE, liée à l'État par un contrat de progrès qui semble donner des résultats satisfaisants (5,37 milliards en fonctionnement ( ( * )6) ).
Au titre de la recherche d'une plus grande efficacité, on citera également la réforme de l'ACCRE dont les crédits diminuent de 46,8 % avec 900 millions au lieu de 1,69 milliards.
Il convient de rapprocher de cette justification, le non-versement par l'État des 15 milliards dus à l'UNEDIC en vertu de l'accord du 13 octobre 1993. Le gouvernement considère en effet que l'excédent prévu de 26 milliards de l'UNEDIC ne justifie plus ce versement. Toutefois, pour tenir compte du fait que cet équilibre n'est pas seulement dû à la réduction du nombre des personnes indemnisées, mais également à une augmentation des cotisations et à une réduction des allocations, l'État, au terme d'un accord du 5 octobre, reprend à sa charge une partie de la dette de l'UNEDIC. Il se substituera à l'UNEDIC pour rembourser la première tranche de l'emprunt, soit 10 milliards en 1999, puis 5 milliards en 2002. Il disposera donc ainsi d'un moyen d'intervenir au cas où la situation de l'UNEDIC se dégraderait de nouveau, en anticipant le remboursement.
Le budget pour 1996 consacré au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle constitue, en raison de sa forte augmentation, une exception dans le cadre très restrictif de la loi de finances. Mais cette augmentation vise à privilégier un seul type d'action : l'insertion dans le secteur marchand par l'allégement du coût du travail. Ce choix a cependant pour contrepartie de réduire nombre de dotations finançant des actions susceptibles de préparer l'avenir, ce qui devrait pousser à leur évaluation et à leur éventuelle réforme. Cette perspective est l'occasion de s'interroger sur les conditions de l'emploi de demain : car il devient de plus en plus évident que la croissance ne permettra plus de retrouver les conditions de plein emploi d'hier. L'environnement technologique et économique, la conception de l'entreprise et la notion même de travail ont changé et continuent de changer d'année en année. Le commissariat au plan (« Le travail dans vingt ans », rapport de la commission présidée par Jean Boissonnat) s'y est attaché.
La politique de l'emploi devra donc sans doute recourir à d'autres voies. Ainsi au volet économique -rabaissement du coût du travail- faudra-t-il adjoindre un volet juridique -conventionnel et législatif- beaucoup plus novateur que les timides avancées actuelles. Mais cela suppose aussi une évolution sensible des mentalités et des modèles sociaux.
I. DÉMULTIPLIER LES EFFETS DE LA CROISSANCE SUR L'EMPLOI
Le budget du travail avait été bâti en 1995 sur des prévisions de croissance comprises entre 2,7 % et 3,1 %. Ces prévisions ont dû être légèrement révisées à la baisse dans un contexte de ralentissement mondial et d'élection. L'impact de cette moindre progression s'est surtout fait sentir sur les recettes fiscales, inférieures aux attentes. En revanche, elle n'a pas eu d'effet négatif sur l'emploi. Après la destruction de 525.000 emplois en trois ans, jusqu'à fin 1993, les créations d'emplois ont repris : 224.000 en 1994, 240.000 en 1995 et un objectif raisonnable, fondé sur une action volontariste renforcée, de 290.000 en 1996. Cette action renforcée repose sur l'allégement du coût du travail (exonération de charges sociales, CIE et aides diverses), mais aussi sur des dispositifs d'incitation à la reprise de l'activité tels que la nouvelle prime à la casse dans le secteur automobile ou le prêt à taux 0 pour l'achat d'un logement dans le secteur du bâtiment. L'objectif de réduction du déficit budgétaire, qui aura une incidence sur le niveau des taux d'intérêts et donc sur le niveau des investissements, renforce cette logique vertueuse.
Tableau 3
Prévisions de croissance (% du PIB en volume) et évolution de l'emploi
Le tableau 3 résume les prévisions de quelques unes des principales institutions françaises ou internationales de conjoncture ( ( * )7) . Toutes se rejoignent pour dessiner une tendance à l'amélioration de l'emploi, même si à l'évidence cette amélioration sera lente : d'après l'OFCE et le CEPII, en effet, le taux de chômage devrait continuer d'osciller autour de 12 % jusqu'en 2002 en raison de la mise en oeuvre d'une politique budgétaire restrictive destinée à satisfaire aux critères de 1'Union économique et monétaire ( ( * )8) . L'augmentation conjoncturelle récente des prélèvements obligatoires, sans doute suivie d'autres -remboursement de la dette sociale (RDS)-, avec ses effets sur le ralentissement de la consommation, illustre la difficulté de concilier les différents impératifs.
Encadré 1
Passage en nomenclature NAF pour les résultats de l'enquête trimestrielle ACEMO
Depuis février 1993, la nomenclature d'activités et de produits qui était en vigueur en France depuis 1973 (NAP 73) a été remplacée par la NAF (nomenclature d'activités française).
La NAF est une adaptation française de la NACE rev. 1 (nomenclature d'activités des Communautés européennes, 1ère révision), simplement obtenue par éclatement des rubriques européennes les plus fines.
Ce changement traduit la mise en place, au niveau communautaire, d'un langage statistique commun articulé autour de nomenclatures communes.
Pour la première fois, la statistique est collectée selon la même grille de classement au sein de la CEE. L'espace statistique européen est d'ailleurs élargi aux pays de l'AELE et à la plupart des pays d'Europe Centrale.
Les résultats de l'enquête trimestrielle ACEMO sont publiés dans la nomenclature NAF à partir des résultats de juillet 1995.
Parallèlement à ce changement de nomenclature, l'INSEE a souhaité modifier le champ des secteurs pris en compte afin de centrer ses études sur les plus réactifs à la conjoncture ; restrictif, le nouveau champ ne recouvre pas tout à fait les « secteurs marchands non agricoles » puisqu'il exclut l'agriculture, l'administration, l'éducation, la santé et l'action sociale.
A. L'AMÉLIORATION DE LA SITUATION DE L'EMPLOI N'EST PAS ENCORE CONSOLIDÉE
1. La poursuite des créations d'emplois...
Après qu'ont été perdus 236.000 emplois en 1992 et 231.000 en 1993, les chiffres se sont inversés en 1994 : 224.000 créations en glissement annuel. Le Gouvernement en attend 240.000 en 1995 et en prévoit 300.000 en 1996.
L'emploi a ainsi évolué dans les conditions retracées dans le tableau 4.
Tableau 4 - Évolution de la population active et de l'emploi
* SMNA : Secteurs marchands non agricoles (p) Provisoire
Au 30 juin 1995, l'emploi salarié dans les secteurs marchands non agricoles (en données CVS) était de 14.756.100. A la suite du changement de nomenclature en juillet 1995 (passage de Nap en Naf, voir encadré 1), l'emploi salarié est réévalué à la même date à 13.386.300, en hausse de 1,6 % sur un an.
Cependant, les résultats provisoires de l'enquête trimestrielle sur l'activité et les conditions d'emploi de la main-d'oeuvre (ACEMO) au 1er octobre 1995, publiés le 10 novembre par le ministère du travail, font apparaître que les effectifs salariés augmentent de + 0,2 % dans l'ensemble des secteurs non agricoles au cours du troisième trimestre 1995, soit un accroissement d'environ 30.000 emplois. Cela traduit un ralentissement de la hausse de l'emploi salarié qui avait augmenté de 0,4 % au 1er trimestre 1995 (+ 45.000) et au 2e trimestre 1995 (+ 47.000) selon les chiffres définitifs du ministère. Sur les douze derniers mois, les effectifs augmentent de + 1,4 % (+ 189.700 emplois), à un rythme inférieur aux hypothèses retenues pour l'élaboration du budget.
Tableau 5 - Évolution de l'emploi salarié au cours du troisième trimestre 1995
(1) Champ : ensemble des secteurs hors agriculture, administration, éducation, santé et action sociale. Ce champ couvre 13,4 millions de salariés sur un effectif salarié de 19,6 millions. Il ne correspond pas tout à fait à l'ancien champ des « secteurs marchands non agricoles » (14,7 millions de salariés) : en particulier, il ne comprend pas les salariés de la santé et de l'action sociale.
Source : Estimation réalisée par l'INSEE à partir des résultats de l'enquête ACEMO du ministère du travail. Cette estimation inclut les salariés des établissements de moins de 11 salariés.
On notera que de 1989 à 1994 la population active totale a augmenté de 620.000, soit, en moyenne, de 125.000 chaque année (+ 0,5 %). En revanche, la population active occupée (qui représente près de 90 % de la population active totale) s'est contractée.
La récente croissance de la population active occupée est essentiellement due au secteur marchand, et plus particulièrement au tertiaire marchand (+ 2,4 % sur un an), l'industrie (+ 0,3 %) et la construction (- 1,3 %) restant relativement stables. C'est dans ce même secteur tertiaire que les perspectives de développement de l'emploi sont les plus prometteuses.
Encadré 2
Un arrêt du 13 mai 1994 du Conseil d'État a confirmé, en application de l'article R. 311-3-3 du Code du travail, que les personnes qui, au moment de leur inscription à l'ANPE ou du renouvellement de leur demande d'emploi, exercent (ou ont exercé au cours du mois précédent) une activité occasionnelle ou réduite de plus de 78 heures dans le mois ne sont plus réputées immédiatement disponibles. Tirant la conséquence de cette décision du Conseil d'État, un arrêté publié au Journal Officiel du 7 mai 1995 modifie l'arrêté du 5 février 1992 définissant les catégories de demandeurs d'emploi.
Jusqu'à présent, les demandeurs d'emploi inscrits à l'ANPE étaient classés en cinq catégories :
ï Catégorie 1 : personnes sans emploi, immédiatement disponibles, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi, à la recherche d'un emploi à durée indéterminée à plein temps ;
ï Catégorie 2 : personnes sans emploi, immédiatement disponibles, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi, à la recherche d'un emploi à durée indéterminée à temps partiel ;
ï Catégorie 3 : personnes sans emploi, immédiatement disponibles, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi, à la recherche d'un emploi à durée déterminée temporaire ou saisonnier, y compris de très courte durée ;
ï Catégorie 4 : personnes sans emploi, non immédiatement disponibles, à la recherche d'un emploi ;
ï Catégorie 5 : personnes pourvues d'un emploi, à la recherche d'un autre emploi.
Désormais, et à compter du renouvellement de la demande d'emploi effectué au titre du mois de juin 1995, trois nouvelles catégories de demandeurs d'emploi inscrits à l'ANPE sont créées pour les personnes exerçant ou ayant exercé au cours du mois précédent une activité occasionnelle ou réduite de plus de 78 heures par mois :
ï Catégorie 6 : personnes non immédiatement disponibles à la recherche d'un autre emploi, à durée indéterminée à plein temps, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi ;
ï Catégorie 7 : personnes non immédiatement disponibles à la recherche d'un autre emploi à durée indéterminée à temps partiel, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi ;
ï Catégorie 8 : personnes non immédiatement disponibles à la recherche d'un autre emploi, à durée déterminée, temporaire ou saisonnier, y compris de très courte durée, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi.
2. ... n'a pas les effets escomptés sur le chômage
Sur un an, le nombre des demandeurs d'emploi en fin de mois de catégorie 1 (nouvelle définition, voir encadré 2) a baissé de 4,8 % passant en CVS de 3.131.900 à 2.979.100. ce qui représente 152.800 demandeurs d'emploi en moins (cf. graphique 6). Le taux de chômage au sens du BIT, en septembre, est de 11,5 %. ( 11,4 % en août) en baisse de 0,7 point par rapport à un an auparavant (12,2 %). Cette amélioration touche les moins de 25 ans et les 25 à 49 ans, hommes et femmes ; l'amélioration la plus importante concerne les demandeurs hommes de moins de 25 ans dont le nombre diminue de 11,3 % sur un an, et des femmes de même âge dont le nombre a baissé de 9,3 % (cf. tableau 6 et graphique 5 ci-dessus) ( ( * )9) .
Tableau 6
Demandes d'emploi par sexe et âge
Lignes 1 à 18 : Demandes d'emploi de catégorie 1 à 3 déposées a l'Agence Nationale Pour l'Emploi : à durée indéterminée à temps plein (catégorie 1), à durée indéterminée, à temps partiel (catégorie 2), à durée déterminée (catégorie 3)
Ligne 21 à 23 : cette série résulte de l'exploitation a posteriori du Fichier National des Allocataires de l'UNEDlC, qui fournit le nombre de personnes ayant perçu une aide au titre du dernier tour d'un mois donné. Les valeurs les plus récentes sont des estimations
Cette amélioration de la situation, sensible depuis 1994 (le retournement de tendance a eu lieu dès novembre 1993, cf. graphique 7), a subi un coût d'arrêt en août 1995, mois qui a vu le nombre des demandeurs d'emploi augmenter de 0,9 %. Si les chiffres d'août étaient présentés comme provisoires et devant être interprétés avec prudence ( ( * )10) , en raison du changement de définition des catégories et de la mise en place de la nouvelle déclaration de la situation des demandeurs d'emploi (voir encadré 3), en revanche ceux de septembre peuvent être comparés à ceux d'avant juin 1995.
Encadré 3
A la suite d'une expérimentation dans trois régions, les deux documents informant les ASSEDIC et l'Agence locale pour l'emploi de la situation du demandeur d'emploi ont été regroupés en un seul, la « déclaration simplifiée mensuelle (DMS) » à adresser directement au centre de traitement informatique inter-Assedic (GIA). Des retards et des erreurs dans la façon de remplir le document ont entraîné de nombreux rejets informatiques, conduisant à des radiations, puis à des réinscriptions. Des corrections ont dû être effectuées sur les chiffres du chômage, ce qui les a entachés d'incertitudes pendant trois mois.
Graphique 6
Graphique 7
Or, ils révèlent sans ambiguïté une augmentation de 28.200 en données CVS, soit + 1 % par rapport au mois d'août, avec 2.952.100 demandeurs d'emploi, niveau qui correspond à celui du mois de mai 1995. La hausse touche essentiellement les hommes (+ 1,7 %) et en particulier les hommes de moins de 25 ans (+ 5,1 %) consécutivement à leur inscription à la fin des vacances. Sur un an, la baisse est cependant de l'ordre de 30.000 (- 11,3 %).
Les jeunes restent les principales victimes des difficultés économiques. Selon une étude du Centre d'études et de recherches sur les qualifications (CEREQ) ( ( * )11) , en 1993, sur 100 jeunes sortis du système éducatif, 60 % étaient en activité au bout de neuf mois parmi lesquels 55 % avaient un emploi et 45 % étaient au chômage. En 1991, 30 % étaient au chômage. On constate donc une dégradation, le risque de chômage s'accroissant quel que soit le niveau de formation, même si l'accès à l'emploi reste plus facile au sortir de l'enseignement supérieur avec au moins un niveau Bac + 2 (cf. tableau 7).
Tableau 7
Sorties du système éducatif, activité et indicateur de chômage par niveau de formation
L indicateur de chômage donne le pourcentage de chômeurs parmi les jeunes en activité, neuf mois après la sortie du système éducatif. Niveau I-II : Bac + 3 et plus ; niveau III : Bac + 2 ; niveau IV : Bac ; niveau V : CAP-BEP ; niveau VI : sans qualification.
Graphique 8
* Allemagne de l'Ouest jusqu'en décembre 1994
Autre facteur d'inquiétude, la légère augmentation (CVS) des licenciements économiques avec 26.750 contre 24.275 en août. On notera par ailleurs les augmentations conséquentes des fins de contrats à durée déterminée (214.461 contre 127.135 en août) et des missions d'intérim (24.166 contre 18.910) qui indiquent que la reprise de l'emploi s'effectue pour partie dans un cadre précaire (cf. graphique
Graphique 9
Les offres d'emploi enregistrées à l'ANPE diminuent de 1,2 % sur un trimestre, mais augmentent de 20,3 % sur un an, signes de la vitalité nouvelle de l'ANPE dans le cadre de la mise en oeuvre du contrat de progrès comme de la reprise de l'emploi.
En outre, très certainement en raison du succès du contrat initiative-emploi, le nombre des chômeurs de longue durée inscrits depuis plus d'un an (35,7 % des demandeurs d'emploi) diminue de 8.300 (- 0,8 % sur un mois et -4,5 % sur un an) pour s'établir à 1.058.600. Cette amélioration se retrouve dans la réduction de l'ancienneté moyenne des demandes d'emploi qui passe à 391 jours contre 426 en juin (cf. graphiques 4 et 6 ci-dessus). Votre commission, ayant fortement souligné les risques d'exclusion de cette catégorie de personnes l'année dernière, ne peut que s'en féliciter. La prudence s'impose cependant dans l'appréciation de ces données, le graphique révélant une évolution « sinusoïdale » d'amplitude croissante.
On notera encore, comme signe de reprise, que le nombre de journées indemnisées au titre du chômage partiel, malgré une légère hausse en septembre (+ 6,3 %), diminue de 35,5 % en données brutes sur un an, et de 32,9 % en valeur CVS.
Il apparaît donc avec évidence, ainsi que vos rapporteurs le soulignaient déjà l'année dernière, que l'amélioration de l'emploi ne pourra être que lente et qu'elle supposera en conséquence longtemps le maintien d'une politique de l'emploi forte.
Le Gouvernement a choisi de privilégier l'allégement du coût du travail et la lutte contre l'exclusion. Cette politique, très récente, semble donner de bons résultats. Mais à l'évidence d'autres voies sont à explorer. La loi quinquennale en a tracées, reprises et élargies depuis. Encouragés et soutenus par les gouvernements successifs, les partenaires sociaux s'y sont engagés, signant des accords novateurs en matière d'activation des dépenses passives d'indemnisation du chômage et d'aménagement du temps de travail dans la perspective de sa réduction.
Il convient maintenant de dresser le bilan de cette politique de l'emploi et d'en présenter les perspectives pour 1996.
Tableau 8 : Principales actions de la politique de l'emploi
* (2) SIFE : stages d'insertion et de formation à l'emploi
* (3) SAE : stages d'accès à l'emploi. 2 ASFNE : allocations spéciales du fonds national de l'emploi
* (4) Le congé individuel de formation ne reçoit aucun crédit par mesure d'économie, la situation financière des organismes gestionnaires leur permettant de prendre le relais.
* (5) Plus que la norme d'indexation de la DGF (3,55 %), en raison du transfert de la dotation de rééquilibrage.
* (6) Le budget 1995 de l'ANPE a été amputé de 109,8 millions (annulation du 28.06.95).
* (7) Récemment des services de prévision, notamment dans le secteur bancaire, ont avancé des taux de croissance prévisionnels situés entre 2 et 2,2 %.
* (8) Colloque tenu au Sénat le 27 septembre 1995 sous l'égide de la Délégation pour la planification.
* (9) Les chiffres du marché viennent d'être publiés par le ministère du travail, alors que le présent rapport pour avis part pour l'imprimerie : ils révèlent une augmentation du nombre des demandeurs d'emploi de 9.700, soit une hausse de 0,3 % par rapport à septembre, ce qui porte leur nombre à 2.961.800 en données corrigées des variations saisonnières. Le taux de chômage (BIT) reste à 11,5 %. Sur un an, le nombre des demandeurs d'emploi a cependant diminué de 4,3 %. Cette hausse du chômage touche de nouveau les jeunes de moins de 25 ans, et notamment les hommes. Cela rend d'autant plus urgente la redéfinition d'une politique de l'emploi des jeunes réclamée par votre commission. Point positif : un nouveau recul du chômage de longue durée (- 1,2% soit 12.700).
* (10) Les mois de juin et juillet sont également à interpréter avec prudence.
* (11) CEREQ Bref, octobre 1995