B. LA HAUSSE DES DÉPENSES DE PERSONNEL ANNULE LES EFFORTS D'ÉCONOMIES DE FONCTIONNEMENT
En 2016, votre rapporteure avait salué la baisse inédite des dépenses de personnel (-0,3 %) tout en espérant que les efforts de maîtrise de la masse salariale (-300 ETP sur 3 ans) ne seraient pas neutralisés par l'octroi de nouvelles mesures catégorielles . Force est de constater que la hausse des dépenses dans le PLF 2017 est essentiellement due à une augmentation de 41 M€ de la masse salariale (+3,5 %) liée à la mise en oeuvre du dixième protocole social, tandis que la réduction des effectifs est interrompue . Elle masque une baisse importante des dépenses de fonctionnement, à hauteur de 15,7 M€ (-3,1 %). Le montant total de l' enveloppe des investissements reste quant à lui à un niveau élevé (250 M€ en AE et en CP) afin de poursuivre les efforts de modernisation.
Programme |
LFI 2016 |
PLF 2017 |
Évolution |
|||
(pro format) |
||||||
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
|
612 |
528 930 269 |
534 727 439 |
528 442 611 |
528 442 611 |
0% |
-1% |
613 |
1 537 046 987 |
1 536 626 130 |
1 563 493 964 |
1 563 493 964 |
2% |
2% |
614 |
44 403 769 |
44 048 662 |
43 425 740 |
43 425 740 |
-2% |
-1% |
TOTAL |
2 110 381 025 |
2 115 402 231 |
2 135 362 315 |
2 135 362 315 |
1% |
1% |
1. Le programme 612 « Navigation aérienne »
Ce programme regroupe les activités de la Direction des services de la navigation aérienne (DSNA) , service à compétence nationale chargé de fournir les services de circulation aérienne, de communication, de navigation et de surveillance ainsi que les services d'information aéronautique aux aéronefs évoluant dans l'espace aérien géré par la France.
Entre la LFI 2016 et le PLF 2017, il voit ses crédits stabilisés en autorisations d'engagement (AE) et diminuer de 1,2 % en crédits de paiement (CP) . En AE, la baisse des dépenses de fonctionnement (-6,5%) bénéficie aux dépenses d'investissement (+3,6%), tandis qu'en CP, la baisse des crédits est répartie de manière équilibrée entre dépenses de fonctionnement (-2,1%), organismes extérieurs (-0,9%) et dépenses d'investissement (-1%).
LFI 2016 |
PLF 2017 |
||||
AE |
CP |
AE |
CP |
||
Action 1 |
Soutien et prestations externes de la navigation aérienne |
250 725 326 |
250 725 326 |
246 374 841 |
246 464 841 |
Action 2 |
Exploitation et innovation de la navigation aérienne |
278 204 943 |
284 002 113 |
282 067 770 |
281 977 770 |
TOTAL |
528 930 269 |
534 727 439 |
528 442 611 |
528 442 611 |
Le maintien des crédits d'investissement à un niveau élevé (221,1 M€ en 2017) est nécessaire pour assurer la convergence technique aux standards européens requis pour le FABEC (bloc d'espace fonctionnel de navigation aérienne au centre de l'Europe) et son volet technologique SESAR ( Single European Sky ATM Research ), prévus par les règlements du « Ciel unique européen ».
LA MODERNISATION DES SYSTÈMES DE NAVIGATION AÉRIENNE L'investissement dans un nouveau système complet de gestion du trafic aérien constitue un impératif pour permettre à la France de faire face à la croissance du trafic d'ici 2020 et assurer la convergence technologique rendue nécessaire par la construction de l'Europe du contrôle aérien . Cette étape est d'autant plus cruciale que le maintien en condition opérationnelle des systèmes actuellement en service engendre des coûts non négligeables et augmente également les dépenses d'exploitation (environ 35 % du programme technique soit 90 M€ annuels). Quatre programmes majeurs impactent le budget d'investissement de la DGAC pour les années à venir : - « SESAR » (Single European Sky ATM Research) : ce programme lancé par la Commission Européenne et Eurocontrol, constitue le volet technologique du Ciel unique européen . Pour la première fois, il implique l'ensemble des acteurs du monde aéronautique. Ce programme a pour objectif de développer pour les trente prochaines années une nouvelle génération du système de gestion du trafic aérien européen sûre et performante, moins coûteuse et respectant les conditions d'un développement durable. Ce projet comprend trois phases : une phase de définition (2006-2008), une phase de développement (2008-2013), et une phase de déploiement (depuis 2014). La DSNA participe activement à ce programme qui constitue un enjeu majeur : il s'agit du cadre européen où seront développés et validés les futurs concepts opérationnels et techniques pour la navigation aérienne et qui permettra de synchroniser les mises en service opérationnelles de systèmes techniques ou de procédures ; - « 4FLIGHT » : il s'agit du renouvellement national du système informatique de gestion du trafic aérien des centres de contrôle en route et des deux grandes approches de la région parisienne. Le nouveau système complet de contrôle aérien développé en coopération avec Thalès sera déployé à Aix-en-Provence et Reims fin 2018, et à Paris en 2019-2020. Ce programme est la première étape de la mise en oeuvre par la France du programme européen SESAR (Phase SESAR IP1). Le programme 4FLIGHT prend en compte COFLIGHT, système pour le traitement des plans de vol, développé en coopération avec les prestataires de services de navigation aérienne italien (ENAV) et suisse (Skyguide). |
La DSNA prévoit de migrer vers un environnement de travail « tout électronique » pour les contrôleurs aériens à horizon 2019, intégrant les outils d'aide à la détection et à la résolution des conflits (fonctionnalités ERATO qui équipent les centres de Brest et de Bordeaux depuis 2016). Le projet 4FLIGHT représente à lui seul un budget total de 548 M€ d'investissements ; - « Communications sol-bord » (Data Link): le développement des liaisons de données opérationnelles sol-bord fiabilise et enrichit les communications pilote-contrôleur en complément des transmissions radio qui restent essentielles pour la sécurité. Le transfert de fréquences par Data-Link est désormais opérationnel dans la totalité de l'espace aérien français. Une conformité complète est exigée au plan européen pour 2018, incluant les échanges de « clairances de contrôle » ; - « Communications sol-sol sous IP » (CssIP) : le renouvellement des réseaux de communications sol-sol a été lancé en 2005 afin de préparer la migration des télécommunications sous Internet Protocol (IP). Il représente au total un budget de 82 M€ d'investissements . Ce projet qui devrait aboutir en 2018, a pris du retard car il a dû intégrer de nouvelles obligations réglementaires pour la sûreté informatique et la cyber-sécurité . En conséquence Orange s'est engagé à maintenir opérationnelles les liaisons spécialisées de télécommunications au-delà de l'échéance initiale ; - « Nouveaux systèmes spécifiques tours et approches » : le programme SYSAT a été créé pour définir et mettre en oeuvre une stratégie de modernisation des systèmes propres aux approches et tours de contrôle , en lien avec la stratégie nationale de réorganisation des espaces inférieurs, tout en pérennisant les systèmes actuels avant leur modernisation. Il permettra de moderniser les tours et les approches qui ne bénéficieront pas du système 4FLIGHT. Il représente un budget total de l'ordre de 90 M€ d'investissement et sa mise en oeuvre opérationnelle est prévue en 2019 et 2020 pour les tours et approches de la région parisienne et se poursuivra jusqu'en 2022 pour les autres tours et approches concernées de la métropole. |
2. Le programme 613 « Soutien aux prestations de l'aviation civile »
Ce programme est de loin le plus important du BACEA en termes de surface financière. Il prend notamment en charge les 11 000 emplois de la DGAC. Les crédits affectés à ce programme sont globalement en augmentation de 2 % par rapport à la LFI 2016.
En effet, les dépenses de personnel connaissent une hausse de 41 millions d'euros dans le PLF 2017 (+ 3,5 %) à schéma d'emplois constant , qui interrompt la baisse inédite observée en 2016. Les crédits de personnel hors pensions s'élèvent ainsi à 911,9 M€ en 2017 contre 879,7 M€ en 2016. Cette augmentation est la contrepartie des efforts de productivité demandés par la DGAC dans le cadre du dixième protocole social 2016-2019 .
LE DIXIÈME PROTOCOLE SOCIAL 2016-2019 Cet accord a été signé le 19 juillet 2016 entre, d'une part, la DGAC et le gouvernement, d'autre part, 4 des 5 syndicats représentatifs des personnels de la DGAC (représentant 72% du personnel et 80% des contrôleurs aériens). Seule l'USAC-CGT, premier syndicat tous personnels confondus, n'est pas signataire. Il est le premier protocole établi pour une durée de 4 ans (contre 3 ans par le passé), cette durée coïncidant désormais avec celle des engagements de la France au niveau européen en matière de performance et de sécurité de la navigation aérienne. Ce protocole définit des engagements de modernisation et de performance des services de la DGAC ainsi que de l'ENAC. Il comporte des mesures sociales pour l'ensemble des personnels mais subordonne une grande partie de ces mesures à une réorganisation du travail afin d'améliorer la productivité du service. Il transpose également les mesures prévues pour les trois fonctions publiques par le protocole « relatif à l'avenir de la fonction publique et à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations ». Contrairement aux précédents, le protocole 2016-2019 ne prévoit pas de réduction des effectifs : le schéma d'emploi est stable entre 2017 et 2019, et les recrutements compenseront donc exactement les départs en retraite. Le coût total de ce 10 ème protocole s'élève à 46 M€ , dont 15 M€ sont réservés aux expérimentations de nouvelles organisations du temps de travail des contrôleurs aériens . À titre d'exemple, le protocole prévoit une nouvelle prime de 500 euros par mois pour les contrôleurs choisissant un tour de service de 7 jours calendaires sur 12, et de 250 euros pour ceux qui choisissent un tour de service de 6,5 sur 12. Par rapport au cycle actuel de travail de 6 jours sur 12, cette modification des jours de récupération permet d' accroître le taux de présence pendant les périodes de pointes du trafic . En 2016, il est prévu une enveloppe de 2,4 M€ pour la mise en oeuvre : du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'État (RIFSEEP) pour les personnels administratifs ; des premières expérimentations en faveur d'une nouvelle organisation du travail du contrôle aérien ; des premières mesures au titre du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) pour les personnels de catégorie B . En 2017, il est prévu une enveloppe de 24,1 M€ pour les mesures dédiées : au développement des expérimentations précédentes ; aux mesures PPCR pour les corps de catégorie A et C et à la poursuite du processus pour la catégorie B ; aux premières mesures indemnitaires pour l'ensemble des corps hors administratifs . |
S'agissant des charges financières , elles continuent à diminuer grâce à la baisse des taux d'intérêt et à une restructuration de la dette qui permet de diminuer le remboursement d'emprunt. Ainsi, l'estimation du montant des intérêts d'emprunt pour le PLF 2017 s'élève à 19,7 M€, soit une baisse de 8,6 M€ par rapport à la LFI 2016 (-30,3 %).
La stabilisation des dépenses d'investissement est permise par la maturité des grands projets stratégiques de modernisation dans les domaines de la gestion financière et des ressources humaines.
Enfin, la dotation versée à l'École nationale d'aviation civile (ENAC) s'élève à 93 M€ en 2017 (-2 %). Le financement du personnel représente 80 % des dépenses et le nombre d'emplois reste stable à 812 ETP sous plafond. Des arbitrages ont été réalisés essentiellement sur la subvention d'investissement , en baisse de 45,8 % par rapport à 2016 : les deux grands projets largement engagés en 2016 (Volière drones et projet scientifique Achil), l'achèvement du bâtiment pédagogique Daurat à Toulouse, et la rénovation du centre de Muret seront financés en priorité .
LFI 2016 |
PLF 2017 |
||||
AE |
CP |
AE |
CP |
||
Action 1 |
Ressources humaines et management |
1 154 250 333 |
1 154 250 333 |
1 195 086 734 |
1 195 461 734 |
Action 2 |
Logistique |
41 879 866 |
41 459 009 |
40 433 765 |
40 058 765 |
Action 3 |
Affaires financières |
247 862 550 |
247 862 550 |
236 739 000 |
236 739 000 |
Action 4 |
Formation aéronautique |
93 054 238 |
93 054 238 |
91 234 465 |
91 234 465 |
TOTAL |
1 537 046 987 |
1 536 626 130 |
1 563 493 964 |
1 563 493 964 |
3. Le programme 614 « Transports aériens, surveillance et certification »
Ce programme rassemble trois actions disparates et connaît globalement une diminution de ses dépenses de fonctionnement (-2,5% en AE et -1,3 % en CP). Les dépenses d'investissement connaissent une érosion plus faible (-1 %) dans la mesure où elles contribuent surtout à la politique de sûreté.
Pour le volet « développement durable et régulation » , les crédits alloués aux dépenses de fonctionnement et d'intervention baissent de 2 % entre 2016 et 2015 . Les mesures d'économie portent sur les dépenses de fonctionnement courant mais aussi sur les subventions accordées aux fédérations aéronautiques. Les crédits d'investissement sont en revanche maintenus à leur niveau de 2016, s'agissant surtout de dépenses relatives à la sûreté.
LES GRANDS CHANTIERS DE LA DIRECTION DU TRANSPORT AÉRIEN (DTA) Plusieurs projets portés par la Direction du transport aérien (DTA) font l'objet d'un effort particulier d'investissement : - la construction d'un laboratoire de détection des explosifs à Biscarosse : il s'agit de doter la France d'un laboratoire de test et de certification des technologies et équipements destinés à détecter les explosifs artisanaux liquides ou solides. La phase d'études (2,3 M€) a été lancée en 2012 pour la partie « explosifs liquides » et la construction du laboratoire (2,7 M€), qui a débuté en 2014 devrait s'achever l'année prohaine. Les opérations liées à la phase « détection des explosifs solides » seront également mises en oeuvre en 2017 ; - le développement de la nouvelle application de gestion des habilitations et titres de circulation pour l'accès en zone réservée des aéroports (STITCH) : ce projet indispensable pour renforcer la sécurité des zones sensibles des aéroports a été initié en 2012. Les dépenses de l'année 2017 (1,3 M€ en AE et 0,9 M€ en CP) concerneront essentiellement le déploiement sur les sites pilotes, après une expérimentation fin 2016 à Toulouse. - le projet Passenger Name Record (PNR) 4 ( * ) vise à recueillir et traiter les données de réservation détenues par les compagnies aériennes, en vue de lutter contre le terrorisme. La DGAC participe aux côtés des ministères des Finances et des comptes publics, de l'Intérieur et de la Défense à sa mise en oeuvre, qui fait également l'objet d'un financement européen. La réalisation du projet s'étend sur quatre ans (2014-2017). La DGAC finance le projet à hauteur de 20,5 % et versera 3,7 M€ en 2017. |
En ce qui concerne les crédits relatifs à la surveillance et à la certification, ils diminuent de 2 % en AE et de 0,9 % en CP dans le PLF 2017, en dépit du fait que la DGAC souligne depuis plusieurs années que les crédits de fonctionnement atteignent un niveau plancher , au-delà duquel il devient nécessaire de diminuer le nombre de contrôles, ce qui n'est guère compatible avec l'objectif de sécurité.
Enfin, le budget (2,9 M€) du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) connaît lui aussi une légère baisse (-1,8 %). Il est principalement consacré à l'entretien des équipements de laboratoire, à la formation des enquêteurs dont le niveau de qualification doit rester élevé, à la sécurité des personnels ainsi qu'à la sécurité des systèmes d'échange de données.
LFI 2016 |
PLF 2017 |
||||
AE |
CP |
AE |
CP |
||
Action 1 |
Développement durable et régulation |
17 134 648 |
17 035 851 |
16 694 865 |
16 694 865 |
Action 2 |
Surveillance et certification |
24 364 003 |
24 107 693 |
23 879 450 |
23 879 450 |
Action 4 |
Enquêtes de sécurité aérienne |
2 905 118 |
2 905 118 |
2 851 425 |
2 851 425 |
TOTAL |
44 403 769 |
44 048 662 |
43 425 740 |
43 425 740 |
* 4 À noter, dans un contexte marqué par les attentats de janvier 2015 en France, un projet de directive PNR a été adopté par la commission du Parlement européen en charge des libertés civiles à l'été 2015. Ce texte vise à établir un fichier européen contenant les informations sur les passagers des vols extra-européens, comme l'agence de voyage ayant effectué la réservation, le moyen de paiement utilisé, le nombre de bagages. Un mécanisme de partage des données entre États membres est prévu dans le cadre d'Europol.