L'INSTITUT FRANÇAIS
II. L'INSTITUT FRANÇAIS : TOUJOURS EN QUÊTE DE LÉGITIMITÉ DANS LE PILOTAGE STRATÉGIQUE DU RÉSEAU CULTUREL LE PLUS VASTE DU MONDE
À périmètre constant 9 ( * ) , les crédits consacrés à l'action culturelle extérieure, hors titre 2, s'établissent, dans le projet de budget pour 2015, à 91,5 millions d'euros, soit une diminution de 1,6 % par rapport à leur niveau de 2014. Par ailleurs, les dépenses de personnel relevant de l'action culturelle extérieure inscrites sur le programme 185 et le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission « Aide publique au développement » demeurent globalement stables sur la période depuis 2009 (125 millions d'euros en 2015, contre 126 millions d'euros en 2014 et 130 millions d'euros en 2009).
Évolution à périmètre
constant des crédits culturels
(hors mesure de
périmètre)
(en millions d'euros)
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
Évolution 2015/2014 |
Évolution 2015/2009 |
|
Fonctionnement |
45 |
60 |
77 |
74 |
65 |
58 |
56,5 |
- 2,6 % |
+ 25,5 % |
Intervention |
90 |
65 |
43 |
40 |
38 |
35 |
35 |
0 % |
- 61,1 % |
Total |
135 |
125 |
120 |
114 |
104 |
93 |
91,5 |
- 1,6 % |
- 32,2 % |
Source : Ministère des affaires étrangères et du développement international
La baisse envisagée de ces moyens résulte de l'application aux opérateurs du programme 185 de la norme de réduction gouvernementale de 2 % inscrite dans le budget triennal pour la période 2013-2015, qui a principalement pour conséquence :
- la diminution , de l'ordre de 600 000 euros, de la subvention pour charges de service public versée à l'Institut français qui s'établirait à 30 millions d'euros, contre 30,57 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2014 ;
- la disparition progressive des crédits exceptionnels de restructuration du réseau culturel 10 ( * ) , dont le montant se limite à 400 000 euros dans le projet de loi de finances pour 2015 en raison de l'achèvement de la fusion entre les services de coopération et d'action culturelle (SCAC) des ambassades et des instituts et centres culturels à statut d'établissement à autonomie financière (EAF), ce qui représente une diminution d'un million d'euros.
Votre rapporteur pour avis entend alerter le Gouvernement sur la nécessité de modérer, dans le cadre du prochain budget triennal, les normes de réduction de la dépense applicables à notre diplomatie culturelle et d'influence : les opérateurs du programme 185 ont d'ores et déjà largement contribué aux efforts de redressement des comptes publics avec une diminution des crédits culturels hors titre 2 de plus de 32 % au cours de la période 2009-2015 . L'effondrement des crédits d'intervention culturels, de l'ordre de plus de 60 % sur la même période, nourrit le découragement de nos personnels culturels à l'étranger, qui n'ont plus les moyens de mettre en oeuvre des opérations culturelles ambitieuses et de soutenir la créativité des artistes français et étrangers dans le monde.
En revanche, les moyens consentis à notre réseau d'instituts culturels français à l'étranger , ayant le statut d'établissements à autonomie financière (EAF), sont globalement préservés des efforts de réduction des dépenses. Ainsi, les dotations de fonctionnement accordées aux EAF s'élèvent à 42,9 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2015, contre 40,8 millions d'euros en 2014, soit une augmentation supérieure à 5 % . Leurs dotations pour opérations devraient s'établir, en 2015, à 18,1 millions d'euros, contre 17,2 millions d'euros en 2014, soit également une progression de plus de 5 % .
A. L'INSTITUT FRANÇAIS : UN OPÉRATEUR QUI PEINE À EXERCER UNE TUTELLE STRATÉGIQUE SUR LE RÉSEAU CULTUREL
1. Des marges de manoeuvre insuffisantes qui relativisent les ambitions du prochain contrat d'objectifs et de moyens
Les montants prévisionnels des subventions accordées par l'État à l'Institut français dans le cadre de son contrat d'objectifs et de moyens (COM) couvrant la période 2011-2013 ont été revus à la baisse chaque année en raison des mesures d'économies liées au redressement des comptes publics. Le cadre budgétaire triennal qui sera défini pour la période 2015-2017, selon toute vraisemblance, devrait continuer d'imposer à la grande majorité des opérateurs de l'État des normes parfois douloureuses de réduction des dépenses d'intervention. Les priorités stratégiques et géographiques de l'Institut français sont donc appelées à être de nouveau resserrées dans le cadre du prochain COM. Les informations communiquées par le Gouvernement laissent entrevoir un ciblage de son intervention « auprès des jeunes publics et des nouvelles classes moyennes et supérieures ». À cet égard, l'institut entend cibler essentiellement : les étudiants, les jeunes professionnels, le public scolaire et les décideurs. Si l'intervention auprès de ces publics spécifiques peut s'avérer plus soutenable financièrement, votre rapporteur pour avis s'interroge néanmoins sur la compatibilité de ce resserrement stratégique avec la mission fondamentale incombant à l'institut d'animer un réseau culturel qui se veut avant tout universel.
Les priorités géographiques de l'Institut français pour 2015 s'articulent principalement autour de quatre catégories de pays :
- les pays prescripteurs : les grands pays européens (Allemagne, Espagne, Italie et Royaume-Uni), les pays prescripteurs nord-américains (Canada/Québec et États-Unis), les pays du Golfe (Émirats arabes unis) et les pays prescripteurs du Pacifique (Corée du Sud avec une saison culturelle et Japon) ;
- les pays de la rive Sud et Est de la Méditerranée : Algérie, Égypte, Liban, Maroc, Territoires palestiniens et Tunisie ;
- les pays émergents (Brésil, Chine et Inde, puis Afrique du Sud et Russie) et néo-émergents (Uruguay, Colombie, Indonésie, Mexique, Nigéria, Turquie et Vietnam) ;
- les pays en développement prioritaires : les pays sub-sahariens francophones (Bénin, Burkina Faso, Madagascar, Mali, République démocratique du Congo, Sénégal et Côte-d'Ivoire) et un pays de la Caraïbe (Haïti).
La subvention pour charges de service public consentie par l'État à l'Institut français, d'un montant de 31,3 millions d'euros en 2015, se voit appliquer la norme de réduction des dotations des opérateurs de l'État de 2 % et se décompose de la façon suivante :
- 30 millions d'euros inscrits sur le programme 185, contre 30,6 millions d'euros accordés en 2014 11 ( * ) ;
- 1,36 million d'euros inscrits sur le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » attribués par le ministère de la culture et de la communication, soit un montant stable par rapport à 2014.
Dans la lettre de mission interministérielle adressée en juin 2014 à son président pour l'année 2014, l'Institut français s'est vu charger de porter une ambition renouvelée sur la base de trois enjeux stratégiques :
- promouvoir une image innovante de la France en contribuant à une meilleure connaissance à l'international des créateurs français ;
- contribuer à la promotion de la langue, de la pensée et des savoirs français dans le monde ;
- participer à la stratégie d'influence de la France en attirant des talents et des projets innovants, en exportant ses produits culturels et son expertise, en assurant la présence française lors d'événements de renommée internationale.
Votre rapporteur pour avis partage le souci de confier à l'Institut français la mission hautement stratégique de coordonner les efforts en matière d'exportation de nos industries culturelles. À cet égard, il doit impérativement pouvoir s'appuyer sur une collaboration étroite avec les multiples organismes professionnels de promotion des industries culturelles françaises à l'étranger, gérés directement par les professionnels concernés et liés au ministère de la culture, tels que TV France International pour l'exportation de programmes télévisuels français, UniFrance Films pour la promotion des films français à l'étranger, le Bureau export de la musique, l'AFEX (« Architectes français à l'export ») dans le domaine de l'architecture et de l'urbanisme ou encore le Bureau international de l'édition française. L'Institut français doit également être en mesure de solliciter l'expérience et la notoriété des multiples établissements publics placés sous la tutelle du ministère de la culture, dont l'action internationale s'est considérablement développée, à l'image des musées du Louvre et du Quai Branly.
Votre rapporteur pour avis invite ainsi l'Institut français à oeuvrer à la constitution d'une « famille à l'export » des industries culturelles françaises qui permette de renforcer les synergies entre le réseau culturel et les organismes professionnels dédiés à l'exportation de produits et services culturels, en complémentarité avec les quatre grandes familles prioritaires à l'export (agroalimentaire, santé, communication et urbanisation) qui avaient été définies par l'ancienne ministre du commerce extérieur, Mme Nicole Bricq.
La situation budgétaire de l'institut semble stabilisée. L'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) est passé sous comptabilité publique au 1 er janvier 2012. Son budget initial pour 2014, qui ne prend plus en compte les ressources des douze postes expérimentateurs du rattachement, s'établit à 40 millions d'euros et affiche un résultat net provisoire à l'équilibre. Le budget rectificatif n° 1-2014 de l'opérateur, lui aussi à l'équilibre, est en hausse de plus de neuf millions d'euros par rapport au budget initial, principalement du fait des reprises de provisions et produits constatés d'avance en 2013 à mandater en 2014. En 2014, le nombre d'emplois affectés à l'opérateur s'élève à 142 emplois temps plein travaillé (ETP) sous plafond et deux ETP hors plafond.
Face à la réduction de sa subvention pour charges de service public conforme à la norme interministérielle de 2 %, l'Institut français a vocation à renforcer ses efforts en matière de diversification de ses ressources, en particulier en développant le mécénat et en se positionnant de façon de plus offensive sur le segment des financements européens, en s'appuyant sur l'expertise de son « Pôle Europe ». Toutefois, les financements européens ne peuvent raisonnablement compenser la baisse des moyens publics à disposition de l'institut et du réseau culturel, dans la mesure où l'Union européenne ne propose que du cofinancement, une partie du financement des projets demeurant à la charge de ses porteurs.
Votre rapporteur pour avis se réjouit du bilan particulièrement positif de l'action de l'Institut français, malgré le contexte budgétaire contraint qui a prévalu dès sa création. Il est parvenu à unifier le réseau public des instituts culturels dotés du statut d'EAF autour d'une marque prestigieuse « IF » (pour Institut français), complémentaire de celle de l'Alliance française. L'institut a également développé des partenariats et programmes culturels innovants dans des domaines aussi stratégiques que les médias, le numérique et la société civile, comme l'illustre le succès du programme SafirLab qui mobilise des jeunes de 20 à 30 ans issus des pays de la rive Sud de la Méditerranée et du Proche et Moyen-Orient autour de projets professionnels ou associatifs sur les questions de la citoyenneté, des médias et de la gouvernance locale.
Dans son rapport de 2013 sur le réseau culturel de la France à l'étranger, la Cour des comptes estimait que seulement 14 % du budget d'activités de l'Institut français en 2012 était consacré à des subventions directes au réseau des établissements culturels publics à autonomie financière, alors que l'objectif affiché était de 37,5 % 12 ( * ) . Toutefois, l'institut rappelle, pour sa part, que son apport au réseau ne se résume pas au versement d'une subvention directement aux EAF. Il souligne la nécessité de prendre en compte le conseil, l'expertise, les moyens matériels et les outils mis à la disposition des établissements pour leur permettre de conduire leur programmation dans les meilleures conditions. À ce titre, il appelle à tenir compte des crédits d'intervention qui sont versés aux partenaires extérieurs en coordination avec le réseau.
Crédits d'activités de l'Institut français en faveur du réseau culturel
(en euros)
Libellé |
Exécution
|
Exécution
|
Budget rectificatif n° 2 au 30/09/2014 |
Versement direct au réseau culturel IF+AF |
4 431 015 |
4 090 900 |
4 870 503 |
En % des charges d'activités |
19 % |
18 % |
15 % |
Total des crédits en faveur du réseau |
14 282 240 |
15 544 068 |
16 295 725 |
En % des charges d'activités |
61 % |
68 % |
50 % |
Source : Institut français
L'Institut français, dans ses relations avec le réseau culturel, entend passer d'une politique basée sur l'offre à une logique de réponse construite en concertation avec le réseau, afin de se mettre au service de ce dernier et de gagner pleinement sa confiance en tant qu'animateur de la politique culturelle extérieure.
Par ailleurs, l'institut dispose d'une enveloppe de 953 000 euros en 2014 afin d'assurer sa mission de formation des agents du réseau, 40 % de cette somme étant consacrés aux « Ateliers de l'Institut français ». 5 000 à 7 000 agents sont formés par l'institut. En revanche, aucun suivi de carrière des agents non rattachés à l'institut n'a été mis en place. Non seulement l'Institut français ne connaît pas le parcours de ces agents mais il ne dispose pas non plus de leur répartition par poste et par établissement. Il n'est pas en mesure de mettre en place une cartographie des métiers ni des compétences, alors qu'il s'agissait là d'un des principaux objectifs assignés à l'opérateur par le législateur lors de l'examen de la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État.
2. La fin de l'expérimentation du rattachement du réseau culturel à l'Institut français
L'article 11 de la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 prévoit l'expérimentation sur trois ans du rattachement du réseau de coopération et d'action culturelle du ministère des affaires étrangères à l'Institut français. Cette expérimentation a été conduite dans douze postes (Cambodge, Chili, Danemark, Émirats Arabes Unis, Géorgie, Ghana, Inde, Koweït, Royaume-Uni, Sénégal, Serbie, Singapour). Elle était encadrée par un cahier des charges établi en 2011 qui a veillé notamment au respect des principes de réversibilité et d'autorité des ambassadeurs.
L'expérimentation de rattachement s'est achevée le 31 décembre 2013 et le ministre des affaires étrangères a considéré que ses résultats n'étaient pas à la hauteur des effets escomptés. Ce bilan s'est appuyé sur le résultat des enquêtes réalisées tout au long de la période d'expérimentation et dont ont rendu compte trois rapports remis aux commissions parlementaires en mars 2011, mars 2013 et octobre 2013.
La démarche d'évaluation s'est nourrie d'échanges réguliers associant les postes concernés, et particulièrement les ambassadeurs et les conseillers de coopération et d'action culturelle « COCAC », qui disposent également de la « casquette » de directeurs des instituts culturels installés dans le poste, l'Institut français et le ministère. Les réunions de travail organisées à Paris avec les COCAC et les retours d'expérience ont été prolongés en 2013 par des enquêtes et échanges réguliers, confirmant à la fois les satisfecit formulés et les points de fragilité consignés dans les rapports de mars et octobre 2013.
Parmi les problèmes les plus significatifs, il a été relevé que le rattachement du réseau culturel à un EPIC impliquerait la transformation des services chargés de l'action culturelle à l'étranger conduisant, sur le plan juridique et diplomatique, à un éloignement du dispositif officiel de représentation de la France. Échaudé par l'expérience du rattachement des missions économiques des postes à l'EPIC Ubifrance, le ministère des affaires étrangères considère que le rattachement budgétaire à un opérateur central basé à Paris, et non pas au poste diplomatique, n'est pas conforme à l'esprit de notre diplomatie d'influence.
L'expérimentation a également conduit à confirmer les interrogations apparues sur la question du périmètre de rattachement. Il présente des contradictions avec le schéma institutionnel qui structure, au plan national, l'action de coopération et d'action culturelle, tant en ce qui concerne la spécialisation des opérateurs que l'organisation des postes à l'étranger. Les SCAC-EAF fusionnés disposent en effet d'un champ d'action plus large que celui confié à l'Institut français puisqu'il inclut le champ de l'attractivité, pour lequel un autre EPIC spécifique, Campus France, a été institué par la loi du 27 juillet 2010. Le principe de spécialité des opérateurs, qui s'appliquerait tout autant aux bureaux locaux qu'au siège parisien de l'EPIC, limiterait le champ d'activité des bureaux de l'Institut français à l'étranger à la seule action culturelle. Ces derniers ne pourraient donc pas conduire des opérations pour le compte des deux autres opérateurs créés par la loi précitée : Campus France dans le domaine de la coopération universitaire et l'Agence française d'expertise internationale (AFEI) 13 ( * ) pour l'expertise technique.
Le rattachement aurait également posé des problèmes d'articulation avec d'autres éléments importants du dispositif tels que la tutelle de l'AEFE, les relations avec les alliances françaises ou encore le suivi des instituts français de recherche à l'étranger (IFRE). Dans tous ces domaines, le rattachement à un bureau d'EPIC, qui implique la rupture du lien juridique entre les agents et le ministère des affaires étrangères, n'est en effet pas compatible avec la double compétence de COCAC et de directeur de bureau d'EPIC distinct de l'ambassade. Ces missions auraient dû être prises en charge par d'autres personnels au sein des ambassades, introduisant une rupture avec la cohérence que la fusion SCAC-EAF a souhaité renforcer, conduisant même à recréer des postes de COCAC distincts des directeurs de bureau d'EPIC. Des solutions provisoires ont pu être trouvées, pour la seule période de l'expérimentation, afin de permettre aux COCAC-directeurs de continuer d'exercer des fonctions régaliennes liées à leur statut de chef de service d'ambassade. Elles ne présentent toutefois pas un caractère pérenne et ne sauraient être appliquées en cas de rattachement de l'ensemble du réseau culturel à un EPIC. Le principe de spécialité des compétences et la spécificité des charges régaliennes liées au travail notamment de COCAC nous exposeraient donc à la nécessité de devoir recréer des postes pour la prise en charge des missions exclues du périmètre de l'Institut français.
Toutefois, l'Institut français rappelle que, sur le plan juridique et fiscal, le rattachement des postes n'a eu aucune incidence pendant la phase d'expérimentation, tout comme le retour à la situation initiale. Notamment en ce qui concerne l'évolution statutaire des agents des établissements rattachés, on peut relever que :
- pour les personnels expatriés, si l'objectif à terme était de les rattacher à l'institut dans le cadre d'un contrat de droit privé, une option transitoire avait été retenue pour des raisons de faisabilité juridique. Pendant la durée de l'expérimentation, ces agents ont continué à être liés contractuellement au ministère des affaires étrangères qui les mettait à disposition de l'Institut français ;
- pour les agents de recrutement local, ils ont été transférés à l'EPIC, et un avenant à leur contrat a été signé par l'ambassadeur et le directeur de l'institut local. Compte tenu du caractère réversible de l'expérimentation, une mention avait été faite de réintégrer l'agent à son EAF d'origine si le rattachement du réseau n'était pas généralisé.
L'hypothèse du rattachement présentait aussi un surcoût budgétaire estimé à 52 millions d'euros pour la période 2014-2016, en raison de la nécessité de recréer des postes actuellement assurés par des COCAC-directeurs, du transfert de 827 postes vers l'EPIC et de 85 postes administratifs présentant une charge supérieure en termes de masse salariale.
Dans ces conditions, le ministère a estimé que cette expérimentation ne revêtait pas un caractère concluant, ne présentant pas de gains d'efficience dans les postes expérimentateurs. Elle posait également, avec l'introduction d'une personnalité juridique distincte de l'ambassade, des problèmes de nature politique, juridique et financière. Le Gouvernement a donc annoncé sa décision de mettre un terme à cette expérimentation en octobre 2013, à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2014.
Votre rapporteur pour avis rappelle que la Cour des comptes, dans son rapport précité de septembre 2013 sur le réseau culturel de la France à l'étranger, soulignait que « la fin de l'expérimentation ne devrait pas conduire à un retour au statu quo ante mais permettre de relever plusieurs défis : l'exercice d'une tutelle stratégique sur le réseau, les modalités des prestations des opérateurs, le statut juridique du réseau et l'adaptation de la gestion des ressources humaines aux objectifs poursuivis » 14 ( * ) . En effet, le seul moyen pour l'Institut français d'imposer sa légitimité dans le pilotage stratégique du réseau culturel est de pouvoir s'appuyer sur un budget d'intervention conséquent lui permettant de peser sur l'organisation d'opérations d'envergure dans des zones d'influence prioritaires et d'emporter l'adhésion des agents du réseau en leur offrant des perspectives de carrière stimulantes.
Par ailleurs, votre rapporteur pour avis rappelle que l'incertitude demeure sur la possible remise en cause du statut d'autonomie financière sans personnalité juridique des EAF 15 ( * ) , qui leur permet de conserver les recettes issues de leurs activités, dénoncé par la Cour des comptes comme incompatible avec les principes d'unité et d'universalité budgétaires. Le fait est que le rattachement du réseau des instituts culturels ayant statut d'EAF à l'Institut français aurait permis de préserver les dérogations garantissant leur autonomie financière en devenant des bureaux à l'étranger d'un EPIC. L'idée de créer pour chaque EAF un fonds de concours a été écartée par le ministère des affaires étrangères, en raison de l'alourdissement de la charge de travail que cela représenterait pour ces établissements. Le ministère est déterminé à préserver l'autonomie financière de ces instituts indispensable à leur dynamisme d'un réseau culturel qui s'autofinance à hauteur de 70 %. Les services du ministère poursuivent donc une concertation interministérielle avec les directions générales des finances publiques et du budget dans l'objectif d'une normalisation juridique du statut des EAF.
* 9 C'est-à-dire hors transferts pour la fusion des services de coopération et d'action culturelle (SCAC) et des établissements culturels à autonomie financière (EAF) et pour l'expérimentation du rattachement du réseau culturel à l'Institut français, et hors mesure de périmètre entre les instruments à l'intérieur du programme 185.
* 10 Selon le projet annuel de performances de la mission « Action extérieure de l'État » annexé au projet de loi de finances pour 2015, ces crédits « contribuent à accompagner les postes dans les mesures d'adaptation du réseau, notamment l'aménagement des espaces suite aux décisions de déménagement, de regroupement, la restructuration des formats en ressources humaines, la modernisation et la rationalisation des moyens matériels. »
* 11 Des 40,85 millions d'euros de subventions accordées à l'institut en loi de finances initiale pour 2014 doivent être soustraits les crédits relatifs à l'expérimentation du rattachement d'une douzaine d'établissements culturels à l'institut, opération qui s'est achevée à la fin du mois d'octobre 2013 et ne sera pas reconduite.
* 12 Cour des comptes, Le réseau culturel de la France à l'étranger , communication au président de l'Assemblée nationale pour le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, septembre 2013.
* 13 Anciennement connue sous le nom de « France Expertise Internationale », le changement d'appellation étant intervenu par la loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.
* 14 Cour des comptes, Le réseau culturel de la France à l'étranger , communication au président de l'Assemblée nationale pour le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, septembre 2013.
* 15 Régi par les dispositions du décret n° 76-832 du 24 août 1976 relatif à l'organisation financière de certains établissements ou organismes de diffusion culturelle à l'étranger pris en application de l'article 66 de la loi de finances pour 1974.