B. LA MODIFICATION DE CERTAINES RÈGLES DE DROIT DES SOCIÉTÉS
La proposition comporte également une série de dispositions de nature défensive en matière d'offres publiques d'acquisition (OPA). Le texte modifie à cet effet le code monétaire et financier, le code de commerce ainsi que le code du travail, en vue de favoriser l'actionnariat de long terme dans les sociétés françaises. Votre commission a examiné les dispositions relevant du code de commerce, entrant dans son champ de compétence (articles 5, 7 et 8).
Supprimé par l'Assemblée nationale, l' article 4 de la proposition de loi modifiait le code monétaire et financier pour abaisser de 30 % à 25 % du capital ou des droits de vote le seuil de déclenchement obligatoire d'une offre publique d'acquisition, de façon à éviter les prises de contrôle dites rampantes, ce qui aurait constitué un grand bouleversement pour les sociétés cotées françaises.
L' article 4 bis de la proposition de loi vise à instituer, dans le code monétaire et financier, une règle de caducité pour les OPA qui ne permettent pas à leurs initiateurs d'atteindre un nombre d'actions représentant plus de la moitié du capital ou des droits de vote, de façon à inciter les initiateurs à offrir aux actionnaires un prix d'achat suffisamment attractif pour faire réussir l'offre et à empêcher des prises de contrôle partielles, tandis que l' article 4 ter modifie également le code monétaire et financier, en vue de restreindre la clause dite d'« excès de vitesse », selon laquelle le seuil de déclenchement obligatoire d'une OPA, fixé à plus de 30 % du capital ou des droits de vote détenus directement ou indirectement, ne s'applique pas lorsque la détention en capital ou en droits de vote augmente très modestement sur une période de douze mois, le taux de l'augmentation tolérée étant réduite de 2 % à 1 %, de façon là encore à éviter les prises de contrôle rampantes.
L' article 5 de la proposition de loi inverse la règle fixée par le code de commerce en matière de droit de vote double attaché aux actions détenues au nominatif depuis au moins deux ans, pour les seules sociétés cotées. En effet, alors que l'attribution du droit de vote double, qui déroge au principe d'égalité, résulte actuellement de la libre volonté des parties, qu'il s'agisse des associés dans les statuts ou des actionnaires en assemblée générale extraordinaire, le texte prévoit son application automatique à compter de deux ans de détention, sauf clause contraire des statuts ou décision contraire de l'assemblée générale. Le texte prévoit des dispositions transitoires pour ne pas remettre en cause la situation des sociétés qui, à ce jour, pratiquent déjà le droit de vote double.
L' article 6 de la proposition de loi modifie le code du travail en vue de renforcer le rôle du comité d'entreprise dans une société faisant l'objet d'une offre publique d'acquisition, s'agissant notamment de l'audition de l'auteur de l'offre par le comité, de l'assistance du comité par un expert-comptable afin de permettre au comité de mieux évaluer l'offre avant de formuler un avis et de la possibilité pour le comité de saisir le juge s'il s'estime insuffisamment informé sur l'offre.
L' article 7 de la proposition de loi complète le code de commerce pour porter à 30 % la part maximale du capital social d'une société susceptible d'être attribué à ses salariés sous forme d'actions gratuites, existantes ou à émettre, sur décision de l'assemblée générale extraordinaire et sur proposition du conseil d'administration ou du directoire, à la condition que tous les salariés de la société en soient bénéficiaires. En dehors de cette condition, c'est-à-dire en cas d'attribution d'actions gratuites à certaines catégories seulement du personnel, par exemple les cadres dirigeants, le plafond resterait fixé à 10 % du capital 5 ( * ) .
L' article 8 de la proposition de loi modifie le code de commerce en vue de rompre avec le principe de neutralité des mandataires sociaux de la société-cible en cas d'offre publique d'acquisition, en leur permettant expressément d'agir en vue de faire échouer l'offre. Actuellement, les mandataires sont tenus à un devoir de neutralité, afin de ne pas influencer le marché et la liberté des actionnaires sollicités par l'offre, sauf dans le cas où les mandataires de la société qui a formulé l'offre ne sont pas soumis à des règles équivalentes au principe de neutralité une fois l'offre lancée, c'est-à-dire que s'applique alors une clause de réciprocité qui apporte un tempérament au principe de neutralité.
* 5 Seuil porté à 15 % pour les petites et moyennes entreprises non cotées.