II. LA GESTION DES FONDS PRÉLEVÉS AU TITRE DE LA TAXE D'APPRENTISSAGE
1. Le système actuel
a) Le fonds national de modernisation et de développement de l'apprentissage
Créé par l'article 33 de la loi de cohésion sociale 4 ( * ) pour prendre la suite du fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage, le FNMDA s'est vu fixer comme objectif de favoriser « l'égal accès à l'apprentissage sur le territoire national » et de contribuer « au financement d'actions visant au développement quantitatif et qualitatif de l'apprentissage » .
A ce titre, il reçoit en recettes « la fraction du quota prévu au deuxième alinéa de l'article L. 6241-2 ainsi que les versements opérés au Trésor public prévus aux articles L. 6252-10 et L. 6252-12 et la contribution supplémentaire prévue à l'article 230 H du code général des impôts ».
Il perçoit donc une fraction de la taxe d'apprentissage, fixée aujourd'hui à 22 %, et provenant du « quota » servant au financement direct de l'apprentissage et des CFA. Il bénéficie également du montant des sanctions financières infligées aux organismes bénéficiaires des fonds de l'apprentissage ainsi que, depuis la loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie 5 ( * ) , de celui de la contribution supplémentaire à l'apprentissage (CSA).
Le FNDMA finance deux aspects de la politique publique de l'apprentissage.
Sa première section assure une péréquation entre les régions qui disposent de la compétence de droit commun en matière d'apprentissage (article L. 214-12 du code de l'éducation), afin de corriger les disparités qui peuvent exister entre les CFA en matière de perception de la taxe d'apprentissage.
Sa seconde section finance les interventions directes de l'Etat en faveur de l'apprentissage, notamment :
- ses engagements au titre des conventions d'objectifs et de moyens pour le développement de l'apprentissage (Com) conclues avec les régions et prévues à l'article L. 6211-3 du code du travail ;
- un concours financier aux CFA à recrutement national ;
- des actions nationales de communication et de développement de l'apprentissage.
Les ressources du fonds sont réparties entre ses deux sections par arrêté conjoint des ministres en charge du budget et en charge de la formation professionnelle. Depuis 2006, la part des ressources du FNDMA est fixée respectivement à 42 % et 58 %. A ce titre, il a engagé plus de 315 millions d'euros en 2009 6 ( * ) dans le cadre des Com, versés aux fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue.
Toutefois, sa nature actuelle le rend peu adapté au soutien d'une politique volontariste en faveur de l'apprentissage. Géré en compte de tiers par l'Etat, il ne dispose pas de la personnalité juridique . Son pilotage est mal assuré et peu transparent, le Parlement ne pouvant pas se prononcer directement sur l'utilisation faite de ses ressources et l'efficacité de son action. Par ailleurs, la mise en oeuvre progressive de la deuxième génération des Com pour la période 2011-2015, débutée par la signature, le 1 er juin 2011, de la première Com de ce type entre l'Etat et la région Languedoc-Roussillon, rend une réforme nécessaire. Enfin, l'idée du versement d'un « bonus » aux employeurs vertueux rend désormais obligatoire la modification du mode de gestion des fonds.
b) La contribution supplémentaire à l'apprentissage
L'article 16 de la loi pour l'égalité des chances 7 ( * ) avait instauré une majoration de la taxe d'apprentissage, portée de 0,5 % à 0,6 % de la masse salariale, pour les entreprises de deux cent cinquante salariés et plus employant un nombre de jeunes de moins de vingt-six ans en contrat de professionnalisation ou d'apprentissage inférieur à un seuil fixé à 1 % en 2006, 2 % en 2007 et 3 % les années suivantes, de l'effectif annuel moyen.
En 2009, la loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie 8 ( * ) , a transformé ce dispositif en créant la contribution supplémentaire à l'apprentissage, à l'article 230 H du code général des impôts. Cette taxe, désormais indépendante de la taxe d'apprentissage, a été affectée au FNDMA, avec le même taux, c'est-à-dire 0,1 % de la masse salariale, et le même champ d'application que le mécanisme dont elle prenait la suite. Toutefois, tous les salariés en contrat d'apprentissage ou de professionnalisation ainsi que les jeunes accomplissant un volontariat international en entreprise ou bénéficiant d'une convention industrielle de formation par la recherche sont, depuis la loi de finances pour 2008 9 ( * ) pour les uns et la loi de 2009 précitée pour les autres, pris en compte pour calculer le seuil de 3 % en dessous duquel une entreprise y est assujettie. Sous cette forme, la CSA a rapporté, selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi de finances rectificative, 67 millions d'euros par an, et 80 % des entreprises de deux cent cinquante salariés et plus l'acquittent.
2. Les propositions du Gouvernement
a) La création d'un compte d'affectation spéciale
Le Gouvernement souhaite modifier la gestion des fonds recouvrés et confiés au FNDMA. Pour cela, il lui substitue un compte d'affectation spéciale (CAS) intitulé « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » qui en reprend les attributions.
b) L'instauration d'un bonus-malus
Il propose également de modifier la CSA en y créant un bonus-malus, grâce à deux mesures complémentaires :
- une hausse du quota de salariés en alternance qu'une entreprise doit respecter pour ne pas être redevable de la CSA, qui passe de 3 % à 4 % de l'effectif annuel moyen ;
- une modulation de son barème en fonction de l'écart par rapport à ce niveau, rompant avec le taux uniforme qui existe jusqu'à présent.
Selon les évaluations fournies par le Gouvernement, la réforme du barème de la CSA et l'augmentation du quota d'apprentis devraient rapporter entre 5 et 10 millions d'euros supplémentaires par an à partir de 2012 ; 85 % des entreprises seraient alors assujetties à cette taxe contre 80 % aujourd'hui. Les recettes tirées de la CSA devraient, sous ce nouveau régime, être comprises entre 72 et 77 millions d'euros par an, sur lesquels 67 millions seraient consacrés aux Com, la différence étant destinée à financer le mécanisme de bonus versé aux entreprises qui dépasseront le seuil de 4 % d'alternants dans leur effectif.
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Le dispositif financier proposé ici contribue à une stratégie d'ensemble, qui mobilise tous les moyens de l'action publique, en concertation avec les partenaires sociaux, afin de confirmer le statut de l'alternance comme un mode de formation d'excellence, au plus près des attentes des acteurs économiques et des jeunes.
* 4 Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.
* 5 Loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009.
* 6 Jaune budgétaire 2011 « Formation professionnelle ».
* 7 Loi n° 2006-396 du 31 mars 2006.
* 8 Loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009.
* 9 Loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007.